C’est un monde désolé, où tout espoir a depuis longtemps disparu. L’épouvante et la terreur sont désormais les seuls compagnons. Ici, pas de lumière, juste du feu. Juste cette lueur orangée et vacillante émanant d’une vieille lampe à huile qui semble brûler depuis des temps immémoriaux et combat vainement l’épaisse obscurité triomphante. Bienvenue dans cette contrée où les inquisiteurs implorent une dernière fois un Dieu qui n’existe pas, alors que les hérétiques s’apprêtent à embraser le bûcher sur lequel ils sont solidement attachés, l’allumette à la main et le visage gagné par la folie.
Voilà à n’en pas douter le parfait théâtre de Witchsorrow, celui où la sorcellerie vainc toujours. Après deux sorties très remarquées chez Rise Above Records (du fameux Lee Dorrian), le groupe réitère cette année avec un troisième album chez Candlelight cette fois ci, label d’habitude plus orienté metal extrême. Changement d’écurie, changement musical ? Oui et non : notre trio anglais continue de donner dans le doom maléfique, bien qu’un peu vitaminé, il est vrai. Avec l’appui de Chris Fielding à la production, aussi connu pour tenir la basse dans le groupe au son le plus lourd du monde, j’ai nommé Conan, nous nous devions définitivement de revenir sur cette sortie de 2015 avant la fin d’année.
Le titre introductif, « There Is No Light, There Is Only Fire », nous fait d’entrée comprendre que Witchsorrow a glissé de la Juvamine dans son infusion à la verveine : on est plus proche de High On Fire que de Saint Vitus sur ce morceau secouant les morts. Même constat sur « To The Gallows », qui ne laisse pas beaucoup de place au silence en matraquant un riff au rythme des sabots de l’animal frappant la terre, se dépêchant d’amener l’accusé à la potence, gallows en anglais (oui, chacun son imaginaire). Les doomsters les plus pieux trouveront néanmoins leur bonheur sur des titres plus classiques et titrant au dessus des 10 minutes comme le veut la tradition, avec « Disaster Reality », « Negative Utopia » ou encore « De Mysteriis Doom Sabbathas », référence évidente au premier Mayhem (dont Witchsorrow a d’ailleurs enregistré une cover de Freezing Moon).
Mais les deux bijoux de cet album sont sans hésitation « Made Of The Void » et « The Martyr ». Riffs épiques, sonorités sinistres, chant clair un poil éraillé du frontman Necroskull se mariant parfaitement à l’ensemble, soli ultra efficaces et incisifs, puissance et tension croissantes… Bref, tout est réuni pour faire de ces deux morceaux des chefs-d’oeuvre du genre. On appréciera aussi la mélancolique interlude acoustique « Four Candles », on aurait même souhaité qu’elle dure plus d’une minute.
Witchsorrow nous livre ici leur meilleur album à ce jour, très complet et tapant dans plusieurs directions, pour notre plus grand plaisir. Un groupe en passe de devenir une référence et qui, comme la bonne bière, plus il vieillit, meilleur il est. À l’affiche du prochain Desert Fest londonien, on souhaite que le trio anglais profite de l’occasion pour définitivement gagner ses lettres de noblesse. Ce serait rendre à César ce qui appartient à César.
À déguster avec : des crêpes flambées (que tout ce feu serve à quelque chose)
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