Doucement, sans grands changements fondamentaux, Yob continue album après album d’explorer les tréfonds de la musique heavy. Le trio d’Eugene, Oregon est désormais une référence en matière de doom caverneux aux pourtours souvent lumineux dont il est très difficile de rendre compte avec de simples mots. Depuis The Elaboration of Carbon, chaque opus est une entité figée, rendant compte de la puissance émotionnelle que le doom peut charrier, blues d’apocalypse ayant reconnu en Mike Scheidt la voix de son maître. Catharsis, The Illusion Of Motion ou The Unreal Never Lived sont autant de bijoux inclassables ne ressemblant à nul autre, pas même à leur prédécesseur. Pourtant, malgré une discographie sans faille, la notoriété de Yob est restée plutôt confidentielle les premières années, amenant même Scheidt à prendre la décision de saborder son projet musical en 2006. Depuis sa sortie du coma trois ans plus tard, le trio bénéficie d’un regain de popularité notable et enchaîne les festivals et prestations dantesques au Roadburn, refuge évident des plus grands groupes de doom et affilié, où les natifs la bande à Mike Scheidt, désormais épaulé par Aaron Rieseberg et Travis Foster, sera toujours le bienvenu. Cela étant, le nouveau trio cherche toujours a graver sur disque une preuve sonore aussi à la qualité aussi évidente que ce que la première mouture du combo avait proposé. En effet, si The Great Cessation et Atma comportent quelques titres dont l’efficacité live n’est pas à discuter, l’épreuve du temps n’aura pas permis à ces deux disques de se hisser à la hauteur des standards de la première période. Sentant pourtant qu’il traverse une période créatrice prolifique, Mike Scheidt multiplie, à partir de 2012, les collaborations et side project, inscrivant son nom dans les livrets d’albums de Lumbar, Red Fang, VhöL ainsi que dans celui d’un hommage à Townes Van Zant, tout ça sans compter le temps que lui a pris le travail sur la réédition de Catharsis chez Profound Lore. C’est dans cette atmosphère riche qu’il s’attèle à la composition du septième album de Yob, à jamais le grand projet de sa vie.
Publié à l’orée de leur énorme tournée de 6 semaines en Europe, cet opus est en tout point magistral : composé de quatre titres dantesques à la palette émotionnelle variée, Clearing the Path To Ascend est enfin l’album de référence attendu depuis presque dix ans. Si « In Our Blood » qui commence le disque est un titre classique dans la droite lignée des habituels morceaux d’ouverture de Yob (« Aeons », « Ball Of Molten Lead », « Burning the Altar », « Quantum Mystic » etc.), lente descente dans les contrées doom magnifiée par la voix suraigüe de Mike Scheidt, « Nothing to Win », le titre suivant est de loin le plus violent de la discographie du combo. Ouvert par un riff rappelant Morbid Angel, il maintient tout du long une tension énorme, ne s’aérant que le temps d’un pré-refrain dantesque. La suite semble montrer la nouvelle voie que s’en va explorer Yob : « Unmask The Spectre » hypnotise par sa sensibilité toute en lourdeur, glissant quelques plans grunge dans cette perfection prog/doom, continuant à explorer un peu ce que The Illusion of Motion avait initié, prenant ce qu’il faut chez Neurosis et l’emportant plus loin sur le chemin du metal sombre. Mais la vraie réussite de cet opus le clôt : « Marrow » (moelle) n’est rien d’autre qu’une pièce de près de 20 minutes dont la perfection en matière de sensibilité et de puissance est saisissante. Très Neurosienne dans sa composition, elle transpire pourtant par tous les ports la spiritualité de Scheidt (ce dernier est très porté sur la culture bouddhiste et les arts méditatifs). L’ajout de quelques nappes d’orgue (jouées par Billy Barnett, technicien qui a enregistré les derniers opus du groupe) donne un relief mélancolique supplémentaire au spleen véhiculé par ce titre, clôturant l’un des albums de la décennie. Simplement.
Point Vinyle :
C’est à Relapse Records qu’il échoit de publier la version vinyle du disque. Le travail est remarquable, contenant des impressions métalliques dorées (les 3 lunes) sur la pochette, la tranche, et la back pochette, petite attention permettant d’apprécier à sa juste valeur le magnifique travail de design d’Orion Landau (l’un des boss de Relapse Records, ayant un nom à figurer dans Star Wars). Il s’agit d’un double LP, proposé en 5 pressages (regular black, regular black 180g, gold, grey and clear).
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