Azkena Rock Festival 2005, 2eme jour, 3 septembre 2005, Vitoria-Gasteiz, Espagne

Nous voici revenus en milieu d’après-midi pour une nouvelle journée de joyeusetés musicales. Le temps est toujours chaud et ensoleillé, et l’ambiance toujours bonne : vraiment, ce festival nous aura encore marqué par sa bonne tenue, son ambiance conviviale, jusque chez les spectateurs, loin de l’image de « viande saoule » que l’on retrouve trop souvent dans les festivals européens. Bref, la journée commence gentiment par un combo espagnol, Hash, qui comme son nom l’indique un peu, se positionne franchement sur le créneau hard rock psychédélique 70’s. Rien de flamboyant toutefois, c’est sympathique, mais ça casse pas 3 pattes à un canard. Surtout que Brant Bjork & the Bros se profile maintenant sur la grande scène. Le premier morceau est joué sans début ni fin, les musiciens réglant quelques problèmes techniques au cours d’une jam de plusieurs minutes. Tout ceci rentré dans l’ordre, Brant Bjork s’en excuse auprès du public et enchaîne sur plusieurs morceaux, issus de quasiment tous ses albums (il m’a même semblé reconnaître un peu de « Ché » avec des vocaux.). Et puis finalement, les morceaux défilent sans véritable début ni fin, comme des jams interminables. Pas ennuyeux, mais totalement déstructurés. On entend un riff ici, un bout de chanson d’Hendrix là, quelques paroles que l’on dirait improvisées encore là. Le tout compose un bon concert, finalement. Le quatuor joue bien, le batteur se la donne comme si sa vie en dépendait, un peu à l’exact opposé de ce bassiste ridicule qui ne nous aura montré que son dos de tout le concert, collé à 20 cm de son ampli basse. Sinon, je comprends désormais les critiques récurrentes sur la soi-disant apathie scénique du groupe : c’est vrai qu’hormis Bjork qui parfois se rapproche du micro pour adresser la parole au public, il ne se passe pas grand chose sur scène. Maintenant, bon, on n’attend pas forcément non plus une chorégraphie grand-guignolesque, mais c’est vrai, en terme de présence sur scène c’est un peu léger. Il n’empêche, musicalement, c’est très bon. Un concert un peu court et pas assez intime sans doute pour apprécier totalement la musique du combo.


Petite curiosité perso, je me dirige vers la seconde scène pour enfin voir ce que Electric Six a dans le ventre : des années que j’entends parler de ce groupe très underground, sans vraiment les écouter. Et bien je regrette d’avoir perdu tout ce temps ! L’air de rien, ce groupe peu connu du grand public a tout pour captiver une audience un peu réceptive (et ce fut mon cas) : une bonne humeur, un jeu efficace, un frontman attachant, et une chiée de compos bien ficelées ! Musicalement, c’est du rock électrique (?!?), un peu comme si les Hives abandonnaient leurs influences punkoïdes pour les troquer contre des nappes de synthés et loops sympathiques. En gros, ben c’est pas du stoner pour deux sous, c’est clair, mais c’est du vrai rock, joyeux, bien foutu, et entraînant. Un constat en guise de conclusion : ça donne envie d’acheter leurs albums !

Autre curiosité, sur la grande scène :Juliette & The Licks, c’est à dire 4 musiciens de rock et Juliette Lewis (oui l’actrice ! Celle de Kalifornia ou le remake de Les Nerfs à Vif !), vont tout faire pour convaincre un public de leur authenticité. Car oui, ce n’est pas facile d’abattre un cliché si profondément enfoui. Vous savez, ces actrices qui se mettent à la chanson « parce que finalement c’est leur vraie passion » (et accessoirement, la remarque qui suit est généralement « y’a que dans ce pays que ça choque tout le monde, aux USA tout le monde trouve ça normal ! », c’est ça ouais…), ça court les rues. Et bien là, on ressort bluffé. Bluffé parce qu’à défaut d’être révolutionnaires, Juliette & The Licks est un groupe authentique, et Juliette Lewis est une authentique rockeuse, au moins aussi dégénérée que les plus grandes performeuses du genre. C’est d’ailleurs elle qui attire tous les regards, elle assume d’ailleurs franchement son rôle de front(wo)man, et fait tout ce qu’il faut pour maintenir un niveau d’attention constant. Après, musicalement, on aime ou pas : c’est du gros rock indé bien barré, et c’est pas mal fait, les musiciens se la donnent, et Juliette est déchaînée. Bref, un sacré spectacle, et pas un mauvais souvenir musical… Pas mal du tout !

Encore une fois, en lisant la bio de Beasts Of Bourbon, on a un peu la bave aux lèvres : influences intéressantes, parcours discret mais exemplaire… Au bout de quelques morceaux on comprend que tout ceci n’est pas volé. Il y a d’ailleurs quelque chose de propre à tous les groupes de rock australiens, quelque chose d’un peu imperceptible, une sorte de négligence pas vraiment nonchalante, un dynamisme un peu naïf, un rock innocent et désintéressé, juste intuitif, en tout cas une authenticité qui fait plaisir à voir. Quelque chose que l’on retrouve chez leurs collègues de Rollerball par exemple. Les musiciens du groupe sont pourtant atypiques, avec 2 guitaristes qui ne paraissent pas être de la dernière fraîcheur notamment. Mais le chanteur, frontman hors pair, assure grave. Encore une fois avec une fraîche authenticité, le bonhomme se pointe avec un vieux tee-shirt trop usé et trop petit, et au gré des chansons, prend confiance, pour terminer en haranguant copieusement la foule (sans faire gaffe il crache même directement dans le public… quand on vous parle de naïveté !!!), se roulant par terre, jetant ses chaussures en l’air… Très rafraîchissant ! Et leur musique, un gros hard rock bien poisseux et heavy, est bien sympathique, ce qui ne gâche rien. Le groupe se fend par ailleurs d’une repris fidèle mais agréable du « Ride On » de leurs célèbres collègues australiens AC/DC. Très bon.


Les choses prennent un tour un peu plus anecdotique ensuite, avec Television, un groupe de pop-rock vieillissant sans grand intérêt. Bad Religion enchaîne et clôt la seconde scène pour la soirée, avec un set certes un peu rébarbatif (c’est quand même toujours du punk, même s’il est très mélodique), mais dynamique et finalement sympathique. The Pogues enfin propose pendant quasiment 2 heures des titres folk irlandais efficaces, et ça cartonne auprès d’un public décidément très ouvert musicalement. On notera parmi les musiciens un petit vieux guitariste (au bas mot une soixantaine de piges) qui virevolte autour de sa gratte comme un jeune fou ! A mourir de rire ! A noter aussi le pathétique Shane Mc Gowan, qui n’est plus que l’ombre de lui-même, alcoolique au milieu d’un groupe de vieux… Il est loin le groupe aux relents punk des années 80 ! On aura profité de ce long break (3 groupes un peu moins intéressants) pour aller se nourrir et taper la discute avec notre pote Miguel de Alone Records ! Ca y est, le moment des Queens est arrivé. C’est donc à QOTSA de monter sur scène, et dès que l’on voit les roadies monter les quelques instruments caractéristiques, du groupe, on est rassurés : avec l’annulation quelques jours plus tôt, on pouvait craindre de ne pas trouver le groupe à l’affiche du festival. On pousse un soupir de soulagement. Second soupir de soulagement au bout de trois minutes de concert : le déhanchement de Josh Homme nous rassure sur l’état de santé du bonhomme à la jambe blessée. Sorte d’Elvis du 3ème millénaire, Homme a un jeu de jambes tout à fait improbable mais viscéral, tout à fait communicatif en tout cas. Et le bonhomme est à la fête ce soir, l’humeur est au beau fixe ! Le concert commence par Feel Good Hit Of The Summer, et tout s’enchaîne très vite pour près de 2 heures. Désormais seul leader à bord du bateau depuis le départ de Nick, c’est un Josh débridé qui mène son groupe, et s’affirme comme vrai frontman décomplexé. Il plaisante, reste sur le devant de la scène tout le temps, faisant une confiance aveugle à son groupe. Et il a bien raison, car derrière, comme dirait un copain musicien, « ça tricote ». On ne parlera pas de Joey, qui l’air de rien s’affirme à chaque fois comme un batteur d’exception, remarquable de puissance et de feeling, un véritable métronome, ni de Troy, qui sans fioriture assure comme un chef à la gratte, la slide, la basse (oui, les musiciens échangent leurs instruments de temps en temps, l’air de rien, bluffant !). On retrouve en plus un faux inconnu en tant que bassiste, avec Alain Johannes (on va pas faire long sur les présentations, c’est le guitariste-bassiste qui officie sur la plupart des titres de « Lullabies », qui joue sur pas mal de Desert Sessions, etc…), et une claviériste de luxe avec son épouse Natasha Shneider (qui assure aussi quelques backing vocals bien sentis). Au niveau des titres, rien de révolutionnaire, si ce n’est un petit « You can’t quit me baby » que je n’avais pas entendu depuis longtemps, et joué « comme à la grande époque », à savoir dans une version à rallonge où cette poignée de musiciens se sont fait plaisir à enchaîner breaks, soli, impros, sur la même longueur d’onde. Génial. Pour le reste, les classiques sont passés en revue, et tous les albums sont abordés, ce qui est remarquable pour un groupe qui a suivi un si profond changement musical. Autre passage mémorable, même si prévisible : la montée sur scène de Chris Goss, pour interpréter une chanson écrite au sujet de « l’anus de Chris Goss » (humour toujours…), « Monsters in the parasol ». Bref, un concert parfait, pas le meilleur concert des Queens que j’aie vu, mais clairement dans le peloton de tête !


Harassés par cette journée, il ne reste plus que Monster Magnet pour nous tenir éveillés. En voyant les roadies monter les plateformes sur la scène, on sait à l’avance à quoi on aura affaire : des clichés rock’n’roll par poignées, des soli, des poses de rockers, des guitaristes avec le pied contre le retour. Bref, du grand spectacle totalement assumé, comme nous en a toujours offert la bande à Dave Wyndorf. Le père Wyndorf mène toujours son groupe à la baguette, et il occupe la scène avec aplomb, même si Jim Baglino ne rechigne pas à monter de temps en temps sur les plateformes lui aussi pour faire profiter le public de ses plans de basse (Ed Mundell est plus discret, mais assure dans son coin). Bref, Monster Magnet on aime, parce que musicalement ça tient la route (belle performance sur les titres issus du dernier album, qui ressortent très bien en live), et qu’en concert c’est forcément démesuré : chaque solo prend une dimension de fin du monde, et chaque mimique des musiciens transpire le RAWK. Jouissif, dans ce sens, et un excellent groupe de fin de festival !


On se retire donc sur la pointe des pieds (comme on est des malins, on part avant la fin de Monster Magnet pour ne pas quitter le site avec les quelques dizaines de milliers d’autres spectateurs !), le sourire aux lèvres, avec décidément l’impression d’avoir encore assisté à un festival super bien organisé, très sympathique, au public de bonne tenue et ouvert d’esprit musicalement (voir la variété de genres musicaux abordés !). Deux excellentes journées se terminent donc ainsi, des images plein les yeux et des décibels plein les oreilles !

Laurent

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