Très honnêtement l’affiche de ce jeudi avait de quoi ravir les amateurs de doom, de sludge et de Nicolas le Jardinier. Le Michelet qui entame sa dernière ligne droite avant de déposer les armes ne s’en laisse pas conter et avait organisé avec Black Flag Production une petite sauterie avec Atomic Trip et Bongzilla
Bien que la déception soit réelle de ne trouver aucun jeu de mot tripier dans le nom de Lyonnais d’Atomic Trip, l’envie est grande de se retrouver au cœur de leur usine à riffs. Dès l’entrée de la salle les tenants de billetterie insistent sur le besoin de porter des bouchons d’oreilles, “ça va jouer fort”. Le trio est posé devant un mur d’ampli qui confirme la promesse dès les premiers riffs. Dans cet assemblage comprenant deux gratteux et un batteur, c’est clairement ce dernier qui porte le groupe. Les variations qu’il impose, l’amplification de ses frappes ont un effet dévastateur. Chaque coup de pédale fait avancer la grosse caisse de dix centimètres, à tel point qu’entre chaque morceaux le batteur doit reculer sa machine à blasts.
Côté cordes, si l’ensemble est ravageur de puissance il ne manque pas de contrepoints tout en finesse et mélancolie. Leur son accordé six pied sous terre ne fait pas que vivre l’explosion de fin du monde promise, il donne à entrevoir ce qu’il reste après cette dernière, la désolation. Le public qui était déjà convaincu avant même de retrouver Atomic Trip est emporté par chacune des longues compositions du groupe qui test devant nous celles qui constitueront leur prochain album. Vivement que la bête soit sortie!
Nous sommes un jour après le 420 mais Bongzilla ne semble pas être du genre à faire cas des dates anniversaires, le trio s’installe et Mike “Muleboy”, qui tient la basse pour la formation après avoir été guitariste à ses débuts, partagent un pipeau à fumée avec Mike “Magma” le batteur. Attendez…mais ce n’est pas…un pipeau…que fait la police? Visiblement elle est restée loin et ce sera très bien ainsi pour que nous puissions profiter des trois américains qui œuvre au milieu d’une scène nue dans une atmosphère de squat en cours de déménagement.
Pour s’échauffer le groupe ouvre avec quelques riffs de blues tout en finesse, tout du moins jusqu’à ce que Mike prenne le micro et que les premiers accords destructeurs viennent accompagner sa voix sludge passée au papier de verre. La machine s’élance, progressivement elle vient examiner les rangs de l’assemblée massée dans cette petite salle qui affiche complet du haut de sa jauge à 140 personnes. Entre chaque titre qui puisent dans la discographie du monstre vert, les gars se font pasteurs et haranguent la foule pour réclamer ou promouvoir quelque mystérieuse médecine appelée tantôt weed, tantôt pot ou d’autres noms réservés aux initiés.
Passé cet habituel folklore, il faut saluer que le groupe soit venu comme le précédent avec son batteur qui joue d’astuces et de malice. Chacune des frappes de sa cymbale crash annonçant un nouveau tour plein de dextérité. Pendant ce temps, le bien nommé Jeff Spanky assène des fessées à base de six cordes suivant les préceptes sleepesques qui auront conduit nombre d’entre nous en ces lieux ce soir.
Pour résumer le moment, malgré un dernier album en dessous des attentes du public, Bongzilla arrive toujours à fracasser les crânes et à réduire les cervelles échauffées de son public en bouillie tout en jonglant habilement sur un savoir-faire étonnamment jazzy. Usant de ponts devenus viaducs, de variations habiles et de détachement, les Haschischins font briller leur musique d’une finesse que l’on pourrait rater si l’on n’y prêtait pas attention.
Cette soirée pouvait sonner comme une soirée d’adieu de plus au Michelet qui confirme qu’il aura été un des grands lieux de la musique DIY en sachant accueillir en son sein des formations talentueuses en particulier en ce qui concerne le stoner doom. Ouvrez les portes, laissez la fumée monter vers le ciel.