3ème et dernière journée toujours sous le soleil Berlinois le plus agréable… C’est le cœur lourd (et les corps lourds, on n’est plus très jeunes…) que nous regagnons pour la dernière fois cette année l’Arena et y retrouvons en ce début d’après-midi la même ambiance paisible, avec la cour extérieure baignée par le DJ set perpétuel et les premières odeurs des divers food trucks commencer à émerger… On salue les amis, on papote un peu, et très vite l’heure des premiers concerts arrive…
LIONIZE
Sans grande conviction, on s’apprête à voir avec Lionize, l’OVNI de la journée. On a tant dit sur ce groupe, éhontément “pistonné” par Clutch, qui n’aurait aucun intérêt musical… Vilénies que tout cela ! Tout en rutilance musicale, le furieux quartette va prendre la side stage pendant 30 minutes et profiter de la moindre seconde qui lui est donnée pour convaincre chaque personne dans le public de son talent ! Bon, la tâche est rendue moins ambitieuse qu’il n’y paraît au vu de la modeste assistance en ce début de journée semi-caniculaire… Mais la salle se garnit petit à petit à l’écoute des décibels stylés du combo U.S. déchaîné. Enfin, c’est surtout son frontman Nate Bergman qui est déchaîné, ne nous leurrons pas, il est la machine qui tire le groupe, même si derrière, on n’a pas affaire à des manchots. Mais côté prestance scénique, dynamisme, et talent, le gars se pose là. Niveau style, c’est bariolé, ça va taper dans les confins de rock, hard rock, funk, blues, soul même parfois, pour des titres punchy et entraînants, avec option groove en supplément siouplé. Un excellent moment et une bonne surprise coup-de-pied-aux-fesses. Quelle excellente entame !
FREEDOM HAWK
C’est dans une configuration à quatre que Freedom Hawk se radine sur scène à l’occasion de leur nouvelle tournée européenne. Le dernier passage sous nos latitudes de nos amis de la Côte-Est nous avait bien plu et il n’y avait aucune raison qu’il n’en soit pas ainsi avec celui-ci surtout après la sortie de « Beast Remains » cette année ; une plaque qui avait par ailleurs fait lever la cornette d’un membre de l’équipe présent. Nous fûmes ravis de voir ces lascars se produire sur la structure la plus vaste même si un placement plus tard dans la journée n’aurait été que le juste retour des choses pour les vétérans de Virginie. Les Étasuniens jouent presque dans le noir, desservsi par un jeu de lumières peu enthousiasmant, mais ils jouent foutrement bien et font remuer les nuques, ainsi que les culs, quand bien même le son n’a pas toujours été à la hauteur ; il a été variable durant ce set pour dire vrai, mais la grosse caisse était bien lourde comme il se doit ; que du bonheur ! Décidément très en forme, Freedom Hawk plaçait la barre bien haut, comme ces prédécesseurs du jour en habits de lumière, pour ce – déjà – dernier jour de la fête du riff. Nous ne bouderions pas notre plaisir de les voir à nouveau par ici surtout lorsque des brûlots comme « Land Of The Lost » sont envoyés avec une telle ferveur et ce n’est pas la nombreuse foule qui s’est pressée derrière les barrières qui nous contredira. Une belle prestation de plus à mettre à l’actif de ce groupe à la discographie malheureusement trop méconnue.
THE BLACK WIZARDS
Retour à la case scène sur le flanc pour écouter The Black Wizards, la formation portugaise qui va s’ensabler dans le désert berlinois. Comme le public a été très mal habitué durant les deux premiers jours : il râle alors que le groupe peaufine sa préparation et que l’heure est venue pour lui de déballer la marchandise sonore. Nous n’allons pas nous voiler la face longtemps : le double double mixte va rapidement envoyer sa sauce lusitanienne qui prendra bien auprès d’une frange du public, mais pas auprès de nos pommes ! Nous les quittons même quelques instants, le temps de voir les joyeux gagnants à la loterie du festoche qui se barrent sur l’eau à bords d’une embarcation improbable pour assister à une croisière musicale. Une fois nos mouchoirs bien agités sur le quai, nous les rangeons dans nos poches et assistons à la suite du set déployé par le quatuor du sud de l’Europe (qui tourne avec Maidavale et Jex Thoth par chez nous), mais nous peinons à adhérer à leurs rock vintage que nous avons l’impression d’avoir déjà vu mille fois même s’il est franchement bien interprété.
CHURCH OF THE COSMIC SKULL
Un OVNI s’est posé au Desertfest avec à l’intérieur sept Anglais vêtus de blanc. Church of the Cosmic Skull fait clairement bande à part avec son rock-psyché. Le leader, un gourou au chapeau, est accompagné au chant par deux nanas, (une blonde et une brune, il en faut pour tous les goûts) et après quelques morceaux, l’originalité laisse quand même place à l’ennui. Le son est parfois brouillon et surtout difficile à évaluer, surtout avec ces trois voix. N’exagérons rien, le groupe est loin d’être mauvais, il n’a juste pas vraiment sa place dans les allées du désert berlinois. Une partie du public reste tout de même jusqu’au bout, parce qu’ils sont fans pour certains, par respect pour les musiciens pour d’autres… en attendant la suite.
DOPELORD
Changement de scène pour Dopelord, on passe de la mainstage à la sidestage. Et changement d’ambiance surtout. Les Polonais nous concoctent un stoner/doom diablement efficace avec un son loin d’être dégueulasse. Bon, certes, le quatuor ne réinvente pas le genre et écluse toutes les bonnes recettes: riffs gras qui tournent en boucle, râles vocaux envoûtants du bassiste… le tout dans un épais nuage de fumée qui met tout le monde d’accord. Les fans d’Electric Wizard et de Black Sabbath étaient aux anges. Certains diront tout de même que la prestation était bonne mais sans plus, et qu’on peut rapidement s’emmerder durant le set. D’autres diront à l’inverse que la puissance du groupe est à souligner, notamment la performance du deuxième guitariste, tout en nuance. C’est assez rare dans ce genre de style pour le souligner. Dopelord quitte la scène sous l’ovation du public et c’est mérité.
PLANET OF ZEUS
Deuxième groupe grec à l’affiche du fest après Vonavibe, Planet of Zeus redore le blason hellénique avec brio. Le quatuor balance un stoner rock énervé où Babis Papanikolaou, chanteur au crâne luisant, alterne entre vocalises aussi puissantes que ses riffs, growl et passages plus calmes. Là-encore, l’originalité n’est pas de mise. Planet Of Zeus enchaîne les riffs assez bateaux mais ravageurs, c’est l’essentiel. L’interaction avec le public ajoute un certain charme à la prestation des Grecs qui terminent leur set aussi bien qu’ils l’ont commencé.
JEX THOTH
Après la baffe que nous venons de nous prendre sur la scène principale, nous retrouvons la petite scène qui sied si bien à certaines performances moins populaires. C’est Jex Thoth et ses mélopées emballées par du riff sombre qui nous y a donné rendez-vous et c’est tout comme d’hab ! Madame capte les yeux du public ainsi que les objectifs de la meute compacte de photographes (y compris les lourdingues qui n’ont rien trouvé de mieux que de conserver leurs gros sacs-à-dos avec eux…). Le côté théâtral de la prestation du groupe séduit et fait preuve d’un superbe rendu au niveau visuel comme à l’accoutumé (les flammes vives illuminant le visage de la maîtresse du sabbat ça la fait toujours bien) ! Les zicos derrière la frontwoman envoient avec précision les titres bien mous et doomisants de la formation pour le plus grand bonheur des groupies de l’assistance suspendus aux lèvres de la corneille du jour. De notre côté nous allons nous aérer et nous préparer psychologiquement à l’offensive du bayou qui va suivre ensuite !
EYEHATEGOD
EHG (comme on dit dans les milieux autorisés) avait particulièrement alimenté notre curiosité suite aux déconvenues que le groupe de NOLA endure depuis quelques temps. Les rares photos – croisées sur la toile – du père Williams nous avaient laissé à penser que son enveloppe corporelle seulement serait de la partie : dans le cul ! Il est en vie et foutrement vivant ! Un brin propret, le hurleur et sa joyeuse bande d’allumés déboulent sur scène devant leur étendard guerrier (sponsorisé par la NRA ?) et embrayent directement sur l’habituel concerto de riffs, de coups de grosses caisses ainsi que de vociférations puis c’est parti pour 50 minutes de folie furieuse à l’Arena de Berlin ! Servi par un son honorable – on s’en serait même branlé d’avoir une purée sonore vu le registre emprunté par la formation de Louisiane – Eyehategod enchaîne ses standards en prenant à peine le temps de reprendre son souffle (ou d’allumer sa clope sans être importuné par le service d’ordre qui chasse pourtant assidument les fumeurs à l’intérieur). Maîtrisant son art à merveille, les Ricains provoquent slams et pogos en enchantant le clan des bourrins dans la place. Jimmy Bower a mimé la prise du rail avec son look improbable (et habituel en fait) et ça a bastonné fermement tout du long avec une mention spéciale pour le cri venant de l’intérieur : « New Orleans Is The New Vietnam ». Que ces quidams soient remerciés pour les bûches offertes au public berlinois (ainsi qu’aux nombreux francophones présents qui nous laisseraient presque penser que nous nous trouvions en Francophonie).
RADIO MOSCOW
La fosse de la Sidestage est déjà bien remplie alors que Radio Moscow ne joue que dans une dizaine de minutes. Les fumeurs ont-ils une soudaine prise de conscience à cette heure avancée du dimanche ? Non, tout le monde attend de pied ferme Radio Moscow pour en prendre plein les oreilles. Et on va être servi. Parker Griggs et ses deux acolytes entrent en scène. Même pas le temps d’un “Salut ça va les gars ?” que le premier riff tourne déjà en boucle. Pour qui a déjà vu le groupe plusieurs fois, l’entame du set est énorme, avec le bien nommé “New Beginning” (de leur nouvel album “New Beginnings”) enchaîné au jouissif “Death of a Queen” où le soliste se fait plaisir. Puis petit à petit le set rentre dans un rythme plus habituel pour le groupe. On sent que le bassiste et le batteur ne sont là que pour accompagner le père Griggs qui tape des solos stoner-blues-psyché-rock toutes les vingt secondes sans sourciller. Et les deux loustics à ses côtés font ça à merveille. Le set peu sembler un peu banal mais le public prend sa dose de son pour un bon moment. Les mecs qui vont passer après Radio Moscow ont quand même intérêt à assurer… Comment ça Matt Pike vient d’arriver? On vous laisse et on file vers la MainStage, avec des solos épiques plein la tête.
HIGH ON FIRE
Troisième headliner du festival, High on Fire était très attendu en ce dimanche soir. D’autant plus compliqué à gérer pour Matt Pike et consorts que l’on s’est déjà pris quelques belles claques dans la journée, et en particulier la furie Eyehategod deux heures plus tôt sur la main stage. Nos fiers à bras prennent la scène dans un assaut de décibels et de power chords sur une base de batterie quasi martiale (“Sons of Thunder”) qui fait bien son effet, impeccable intro. Puis les titres s’enchaînent comme autant de déflagrations menées pied au plancher par un trio de musiciens tout simplement impeccables, tant dans l’exécution que dans la manière, assurant juste l’essentiel d’interaction avec le public depuis la scène. Pike en particulier, consacre à chaque coup de médiator sa guitare comme un instrument divin, capable – on ne peut que le constater – de déchaîner les flammes de l’enfer sur un public consentant. Mais les choses ne sont pas si impeccables sous tous les aspects : variable incertaine depuis 3 jours, le son s’avère simplement catastrophique sur le set du trio ricain. Dès que l’on recule de 10 à 15 mètres de la scène, la double grosse caisse de Des Kensel prend une dimension démesurée dans le mix, faisant vrombir l’ensemble de la salle, enrobée progressivement par des déluges de plus en plus informes de lignes de basse disparates… Une bouillie. Et dès lors que l’on prend encore un peu de recul, on assiste un peu pantois à un capharnaüm improbable dans lequel il nous faut à chaque fois bien 30 secondes au moins pour discerner les classiques “Carcosa”, “Fertile Green” et autres joyeusetés, à l’image de ce “Rumors of War” dévastateur qui n’émerge que par son jeu de batterie et sa rythmique si emblématiques. Les fans hardcore prennent leur pied dans le pit, pas de soucis, mais il y a fort à parier que ce soir High on Fire n’en aura pas conquis de nouveaux. Dommage, encore un concert qui aura pâti d’une mise en son inadaptée.
HAIK
Le tintamarre de la bande à Matt Pike passé, nous convergeons la mort dans l’âme vers la SideStage pour le dernier concert du dernier jour de festival, avec Haik. Même si nous commençons à sentir la fatigue, nous ne sentons aucunement la lassitude de la belle musique et assistons à une fin de journée telle que nous les connaissons lors de la déclinaison belge de l’événement : du pointu un peu hors-normes. L’ovni du jour est un ovni berlinois dont certains protagonistes sont connus des fins limiers que nous savons parfois être aussi puisque nous les avons déjà croisés au sein de Dÿse ou Rotor ! Ça envoie comme pédigrée, mais ça ne rassure pas vraiment en ce qui concerne le répertoire musical. C’est donc un joyeux merdier coloré de metal, de rock progressif, de jazz, d’un zeste de screamo et de bien d’autres styles encore que nous proposent les protagonistes de cette nouvelle aventure musicale haute en couleur (et au look particulièrement abouti : la casquette dorée du batteur placé à l’avant de la scène derrière un bouquet de fleurs résume bien la chose). La deuxième performance de ces artistes en tant que groupe est exécutée avec une précision chirurgicale (ce n’est pas des néophytes non plus !) et elle emballe les épicuriens amateurs de ce type de frasques musicales.
Voilà c’est fini pour 2018 et on se réjouit déjà du millésime prochain. Merci aux groupes qui nous ont enchanté, merci aux groupes, merci au public fantastique (tout comme à l’accoutumé en fait, la configuration nouvelle n’a en rien altéré l’esprit qui se dégage du Desertfest Berlin), merci aux potes rencontrés, aux confrères sympathiques et surtout big up au staff de l’organisation (vous vous reconnaîtrez !) qui ont assuré une fois de plus !
Chris, Laurent & TO)))M
(Photos : Laurent)
*************** NOTRE LIVE REPORT EN VIDEO DU JOUR 3 : ****************
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