Et de trois ! Troisième année sur le site du “Columbia” (Theater pour la scène secondaire, Hall pour la mainstage) pour le Desertfest de Berlin. Une édition 2025 qui s’appuie donc sur les acquis des précédentes avec en climax final, le dernier concert de la tournée des 10 ans de Lore, troisième album d’Elder (mais on y reviendra promis !). C’est cependant avec les mêmes préoccupations concernant les déplacements sur le site que nous arrivons sur place, et malheureusement pas de changement sur ce point. Il aura particulièrement été difficile de naviguer vers les douces mélopées psychées de la Columbia Theater. Ce bémol reste néanmoins contrasté par des zones de repos bien espacées sur le site et toutes accompagnées d’au moins un bar et d’un point nourriture. Navigation compliquée, mais sensation de ne pas être constamment les uns sur les autres, allez ça s’équilibre passons au coeur du sujet… les meilleurs döner du quartier… non, la musique !!
JOUR 1
Arrivé un peu tardivement pour se faufiler dans le Theater et profiter pleinement de la performance sonore de Bismut, c’est devant The Devil and the Almighty Blues que démarre réellement notre Déserfest. C’est un vrai plaisir de retrouver les norvégiens que l’on pensait disparus depuis leur très bon troisième album Tre. Difficile cependant de faire monter la température devant un Columbia Hall encore clairsemé et avec une panne générale de son dès le second morceau… Le groupe ne lâche rien et à force de volonté la foule se réveille enfin sur le banger ultime “The Ghost of Charlie Barracuda” !

The Devil and the Almighty Blues
On aimerait continuer de se chauffer avec Khan mais là aussi l’accès au Theater freine notre entrain et c’est bien dommage car ce trio vient d’Australie et est donc rare en nos contrées. Dommage aussi car leur musique est particulièrement cool, mélange de stoner heavy psych qui fait rappeler Mr Bison par endroit mais en plus dense. On finira le set depuis le bar juxtaposant la salle, légère compensation car le son y est plutôt bon.
Prenons ensuite un peu de hauteur pour Dozer sur le Hall ! Car oui la scène principale est constituée d’un balcon bien large permettant de profiter des concerts tout en étant assis ou de se caler sur les côtés juste au-dessus de la scène. Revenons à nos papas du stoner suédois qui font monter la température notamment grâce à l’énergie virale de Tommi Holappa. Musicalement au poil, on reste juste un poil perplexe devant le chant souvent trop présent. Rare critique du son de la salle que l’on retrouvera sur plusieurs groupes durant le week-end mais surtout dommageable avec Dozer lorsque Fredrik Nordin part dans ses notes aériennes. Un repos s’impose après ces premiers concerts, et c’est l’occasion de découvrir un peu plus les lieux et plus précisément le Nerdistan, petite salle juxtaposée au balcon du Columbia Hall. Un nom de salle fort malin qui propose canapés moelleux, comics/BD(en allemand) et bornes d’arcades… Au programme Street Fighter, Mortal Kombat mais aussi Duck Hunt … toujours étonnants ces allemands !
Apprenant nos erreurs du Columbia Theater, c’est avec une certaine avance que l’on se positionne au premier rang pour Belzebong. Bien nous en a pris car la salle est bondée lorsque les polonais entament la masse sonore qu’est “Bong Thrower”. Le set est musclé, on sent une urgence voire une certaine violence dans le jeu de scène. Pourtant le temps semble ralentir, sous l’emprise des riffs poisseux et de cette batterie qui cogne fort ! Une performance toute en puissance donc, mais la proximité avec le groupe montre aussi toute la technicité du duo guitare/basse, ce qui contraste avec l’a priori simpliste de leur musique.

Belzebong
On a du mal à se remettre de ce coup de massue que déjà s’approche le concert de Slomosa sous la Columbia Hall. Quasiment tête d’affiche de la journée, c’est en patron que débarque la bande à Benjamin Berdoue et Marie Moe, avec en première surprise un guitariste supplémentaire qui n’est autre que leur producteur. On se fait littéralement rouler dessus par Slomosa qui impose un set plus direct et puissant que ce que nous avions pu voir au dernier Westill. Les passages mélodiques sont moins mis en avant, alors que les riffs déjà accrocheurs sur album viennent ici s’imprimer sur nos tympans à grand coup de marteaux. Ressenti encore plus présent sur “Battling Guns”, qui vient suivre un discours rageur de Benjamin sur l’état actuel du monde, plus précisément à Gaza, dont la mélodie principale explose comme un tir de sulfateuse. Sans surprise, les norvégiens soulèvent la fosse et déclenchent les premiers (et rares) slams et pogos. Le concert se termine sur un gros “Horses” avec en seconde surprise Arvid le chanteur de Greenleaf qui vient lâcher ses meilleurs mouvements de breakdancer (grosses techniques du robot !).
Complètement rassasié, c’est posé au balcon (puis au Nerdistan, il parait que les canapés sont moelleux et qu’on entend quand même les concerts) que l’on profite du set de The Hellacopters. Groupe assez inattendu car plutôt du côté hard rock de la force mais qui se montre diablement efficace et dont l’énergie finit par convaincre le Columbia Hall.
Une première journée vraiment agréable qui donne le ton pour la suite des évènements ! Avec malheureusement comme menace de bien jongler entre les horaires pour ne pas être bloqué sur la scène secondaire.
JOUR 2
Nous voilà partis pour une seconde journée qui s’annonce – enfin ça dépend des goûts – comme la plus dense du week-end. Motivés par la promesse de lourdeur, c’est devant Turbo Moses, et dans un Theater pas encore bondé, que la journée commence. Promesse tenue, l’épaisseur sludge des allemands est bien là, mais le quintette est malin car l’étiquette sludge cache en fait un savant mélange entre la corrosivité d’un Demonic Death Judge, notamment dans le chant, et le groove redneck d’un Down. Mélange rudement efficace, et parfois complété par une atmosphère plus stoner notamment sur le titre d’ouverture “The Serpent”, qui fait tomber les premières nuques au sol. Certaines références semblent encore immatures dans les compositions mais l’énergie et la maîtrise du groupe sur scène nous fait rapidement oublier qu’ils n’ont qu’un EP à leur actif. A surveiller de près !
Toujours sur la scène secondaire, Kant prend la relève mais peine à nous emballer… malheureusement pour eux la bûche Turbo Moses est encore ardente et le passage à quelque chose de plus doux, bien que heavy sur le papier, est un peu précipité. Dommage car leur musique est loin d’être désagréable et est emmenée par un chant vraiment prenant.
On file donc vers l’ouverture du Columbia Hall pour un show tout aussi perturbant que prenant. Si on se concentre uniquement sur la musique, Castle Rat développe un doom sabbathien terriblement efficace où chaque riff, chaque mélodie devient entêtant tandis que les lignes de chant de la Rat Queen vient égarer notre esprit dans un univers de fantasy qui pourrait ressembler à celui de Conan le Barbare ou Metal Hurlant. Si musicalement le job est impeccable, il faut aussi louer la mise en scène qui bien que racoleuse dans l’idée est assumée à fond par le groupe. Rite d’initiation du guitariste, ambiance de médiévale tordue où la peste et les rats sont rois (enfin reine !) et combat épique entre la chanteuse et une performeuse peu vêtue, voilà dans quelle aventure vous vous embarquez en allant voir Castle Rat. A vous de vous faire une idée objective du délire mais force est de constater que cela fonctionne et accentue la puissance musicale du groupe
Après ce trip nous filons à l’extérieur – car oui, nous avions oublié de le préciser, il y a aussi une troisième scène proposant majoritairement des DJ set, mais aussi quelques concerts dont les vibes space stoner de Skyjogger, qui colle parfaitement au soleil éclatant de cette fin d’après midi. On se laisse rapidement emporter par les jams du trio qui serait comme un vaisseau spatial propulsé à toute vitesse dans un champ d’astéroïde composé de stoner, rock 90’s, rock psychédélique et d’éléments plus métal. Petit bonus pour le somptueux son de basse qui vient bourdonner dans nos oreilles.
Là aussi, difficile après un moment aussi lumineux de replonger dans l’obscurité et la mélancolie d’un Pallbearer, c’est donc vers le Columbia Theater que nous allons pour nous placer en vue de Temple Fang. S’il existait une échelle du rock psyché allant de 1 à 10, on serait facile à 12 ou 13 sur ce concert ! Porté par leur excellent dernier album Lifted From the Wind, le quatuor nous emmène loin, très loin dans leur univers éthéré. Le groupe confirme ici toutes les bonnes choses qu’on avait pensé d’eux en 2022 dans ce même Deserfest et nous offre un des meilleurs moments de ce week-end. Merci messieurs !

Temple Fang
Pas le temps de souffler sur ce samedi, nous courons ensuite sous le Hall pour voir Lowrider réciter son stoner par cœur. Même souci de présence du chant qu’à Dozer la veille, venant altérer le plaisir de certains titres mais difficile de râler tant le groupe maîtrise son sujet, entre ses anciens morceaux à la bonne odeur de sable chaud et les pépites de Refractions.

Lowrider
La foule devient masse à l’approche de My Sleeping Karma mais au courage nous allons quand même voir The Mystery Lights dans le Theater pour un set plein de fuzz, de rock à l’esprit punk et portée par un chanteur sur ressort qui ne cesse d’haranguer la foule et de disperser sa bonne humeur aux quatre coins de la salle !
Et nous y voilà, My Sleeping Karma ! Difficile de décrire l’émotion qui nous traverse à l’arrivée du groupe. Nous ne pensions plus jamais les croiser sur scène suite au décès de leur batteur emblématique, Steffen Weigand… et pourtant les voilà ! Et Steffen aussi en quelque sorte avec cette bougie posée en hommage près de la batterie. Cet hommage passé, le groupe déploie un magnifique concert, se baladant d’album en album avec grâce. Impossible de ne pas les aimer d’amour tant ils dégagent une humanité et une fraternité à toute épreuve ! Là aussi le temps semble s’allonger, se distordre et il faudra plusieurs minutes pour réaliser que le concert s’est terminé. My Sleeping Karma c’est de la belle musique, il n’y a rien à ajouter <3
Complètement cuit par ce marathon et ce dernier sublime concert, il est trop dur de se mouvoir vers la décharge de décibel promise par Daufødt. Les jambes n’auraient pas tenu mais les quelques vidéos sorties du concert confirment que la promesse a été tenue, avec une chanteuse finissant dans la fosse pour se joindre aux danseurs fous de la fosse. Trop dur ensuite d’enchaîner avec Dinosaur Jr, d’autant plus que le Columbia Hall est plein à craquer même sur le balcon. Comme un rituel, c’est depuis le Nerdistan que nous finissons cette journée les jambes en coton mais le cœur plein de bonheur.
JOUR 3
Comme dit le dicton, “Dimanche, c’est Elder”… euh non… enfin oui complètement, mais il y a de belles choses à voir avant ce final en apothéose !
Et notamment Elephant Tree qui ouvre le bal sur la Columbia Hall. Cela dit, quelle idée farfelue de faire jouer les anglais à 15h45 dans une salle loin d’être pleine et encore en gueule de bois de la veille. Même eux en rigolent jaune… Vraiment dommage car, pour ceux qui ne les connaîtrait pas encore, Elephant Tree est passé maître dans l’art de la bûche délicate et nous envoie ici encore une belle flambée principalement composée de leur dernier (vrai) album Habits et agrémenté de “Long Forever” et des missiles “Surma” et “Apothic Blues” de leur album éponyme. Un set qui aurait mis le feu au festival en soirée mais passons, et espérons les revoir prochainement dans de plus belles conditions !
Les jambes sont encore lourdes, et le temps bien moins ensoleillé que la veille, nous restons donc sous le Hall pour découvrir Green Milk From The Planet Orange…et on a bien fait ! En parfait OVNI du week-end, ce trio japonais vient éclater nos petits cerveaux fatigués avec rock progressif, avec par endroit cette urgence punk et surtout cette atmosphère acidulée qui donne une vraie poésie à l’ensemble du set. Posé sur des chaises comme des étudiants en musique timides, Green Milk From The Planet Orange dégage paradoxalement une vraie force…
Ils nous donnent suffisamment d’énergie pour combattre la pluie et filer vers Hippie Death Cult pour un show un poil perturbant musicalement… nos esprits avaient en effet un souvenir allant certes régulièrement vers des horizons plus sombres mais à la composante principale plus stoner. Imaginez alors notre surprise, et notre plaisir de tomber dans un piège heavy doom à la basse massive au possible et au chant féminin d’une puissance féroce ! On retrouve la patte plus stoner du groupe sur quelques morceaux mais la lourdeur heavy doom l’emporte et nous embarque dans un trip des plus jouissifs !

Hippie Death Cult
Passé ce moment de fureur, qu’est-ce qui serait mieux que du saxophone et de la trompette ? Pas mal de choses à priori, et pourtant nous enchaînons avec Coogans Bluff et son mini orchestre de cuivre … Et là aussi on a bien fait ! Coogans Bluff vient nous enchanter avec son mélange de blues, psyché, funk … bref un véritable caméléon musical sublimé tantôt par des nappes de claviers tantôt par un super duo saxo/trombone, le tout avec une bonne humeur qui envahit la salle. Coup de cœur particulier pour ce morceau qu’est “Beefheart” et qui résume plutôt bien les aspirations du groupe !
Retour ensuite sur la scène principale où Wine Lips diffuse les bonnes ondes du rock psychédélique à une foule beaucoup, beaucoup plus dense qu’à notre départ. Un concert plutôt plaisant mais où il nous manque quelque chose pour vraiment rentrer dedans et partir surfer sur les nuages…
Il n’est cependant plus question de bouger du Columbia Hall car voilà Elder qui monte sur scène pour préparer le dernier concert de la tournée des 10 ans de Lore, troisième album du groupe. On repassera sur la qualité de cet album (le rédacteur étant complètement subjectif), mais l’idée de le voir être joué en intégralité à de quoi faire rêver, notamment certains titres quasiment jamais joués habituellement. Bon eh bien si vous vous attendiez à lire que le concert était génial, vous ne serez pas déçu ! Ce concert était génial !! Quel plaisir d’enfin entendre “Deadweight” ou “Legend” en live, d’avoir de nouveau le titre “Lore” en entier avec sa seconde partie qui aura envoyé toute la salle dans l’espace, et de remarquer que le groupe profite pour arranger certaines parties pour y insérer des couleurs plus récentes (notamment les solos de guitares ajoutés sur “Compendium” et “Legend”). Les fans assidus sont aux anges, mais les autres spectateurs aussi au vu du nombre de têtes qui se secouent sur cet immense et implacable mur sonore qu’est “Lore”! Et puis, l’album passé, la bande à Nick nous offre en cadeau son magnifique “Dead Roots Stirring” pour clore en beauté cette soirée ! Rien à redire, Elder nous aura encore ébloui de leur talent.

Elder
Voilà encore une magnifique édition du Deserfest Berlin qui se termine ! Bien que par moments difficile de voir les groupes sur la Columbia Theater, il faut bien avouer que ce site, utilisé depuis trois ans, est d’une grande qualité. Son parfait, une grande salle vraiment agréable notamment avec son balcon, espaces extérieurs des festivaliers… et le Nerdistan, tout est là pour passer un super moment et profiter à fond de chaque show ! On repart le cœur serré, avec comme promesse de revenir l’an prochain pour de nouvelles découvertes et de nouveaux concerts exceptionnels !
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