Il y a 25 ans, Down débarquait sur la scène musicale et sortait son premier album, toujours référentiel aujourd’hui, NOLA. Un super-groupe complètement initié par Phil Anselmo, première illustration significative de la gloutonnerie musicale du frontman de Pantera (pour rappel, Pantera à l’époque était au sommet de sa carrière). Anselmo y rassemble quelques potes dont il présume que leur amour partagé pour Trouble et Saint Vitus, mêlé à leur background musical et un fort enracinement louisianais, rendront ce projet spécial. Et il le fut, amenant le sludge à un niveau de reconnaissance que l’on connaît aujourd’hui, et tirant dans son aspiration bon nombre de formations louisianaises qui n’auraient sans ça probablement jamais rencontré le succès.
Il apparaissait donc logique, en 2020, de fêter comme il se doit les 25 ans de ce premier disque. Down avait donc prévu d’arpenter le vieux continent (et d’autres), pour célébrer cet anniversaire en interprétant l’intégralité de l’album sur diverses scènes et festival (rappelez-vous, on devait les retrouver à l’affiche du Hellfest en juin). Et pour l’occasion, c’est le line-up originel qui a été mobilisé, alors que ces dernières années ont vu la formation live du groupe fluctuer, du fait notamment des engagements respectifs des musiciens avec leurs autres groupes. Petit écart de principe, c’est le bassiste actuel du groupe, le nonchalant mais solide Pat Bruders, qui tient l’instrument à la place du pourtant espéré Todd Strange.
La démarche était séduisante et on s’en pourléchait les babines à l’avance… mais le COVID-19 est passé par là, tuant cette initiative dans l’œuf. Symboliquement, ne rien faire en 2020 semblait inenvisageable, et c’est en version “dématérialisée” que la solution sera trouvée. Le groupe reprend donc son cycle de répétitions, met en place les conditions de “streaming” optimales, et donne rendez-vous aux fans le 29 août, à minuit pour les français, en échange d’une petite contribution de moins de 8 eur (dont 10% sont reversés à un fond de soutien à la nation unie Houna, une tribu indienne ancestrale implantée dans près de la Nouvelle Orléans).
Il est aussi stérile que vain de parlementer sur l’intérêt d’un concert derrière un écran plutôt que devant une scène. Le fait est que le second choix est impossible, et qu’on oublie un peu vite qu’on a tous passé des heures carrées derrières nos écrans de PC, DVD ou même cassettes VHS pour les plus anciens, à regarder des concerts ! C’est donc une forme un peu hybride qui nous est proposée ici, et au diable les plus bégueules et autres pisse-froid – on ne crachera pas dans la soupe.
A l’heure dite, c’est finalement une succession de reportages courts, interviews et petits sketches qui nous accueille et non pas le concert, qui commencera trois quarts d’heure plus tard. Enfin, donc la scène apparaît sur l’écran, sombre mais vaste, avec deux grands écrans latéraux (largement sous-exploités durant le set), baignée par un light show pro (aux tons très jaunes / rouge). Les musiciens sont tous là, menés par un Phil Anselmo bien crampé en front de scène, bien au milieu, sur son pied de micro.
Ça démarre de manière assez décousue sur la montée en régime de “Eyes of the South”, autour de quelques impros de Keenan, et très vite les planètes s’alignent pour une intro massue et rassurante. Assez rapidement, la mise en son efficace nous rassure, on va pouvoir monter le volume des haut parleurs… Les speechs d’Anselmo entre les morceaux sont trop bas, mais on n’est pas là pour ça, donc pas très grave. Les musiciens sont en forme et efficaces, ça joue bien et fort. Les gars sont aussi concentrés sur leur prestation que contents d’être ensemble, c’est évident.
Et l’interprétation en bénéficie largement, avec des titres qui, même s’ils gardent leur forme initiale, font l’objet de quelques adaptations maîtrisées. On lèvera les sourcils d’étonnement à l’écoute de quelques harmonies guitare un peu dissonantes entre Keenan et Windstein, mais au final, l’ensemble est très solide et tient furieusement la route. Même Anselmo, dont le niveau de forme ces dernières années n’a pas toujours été un long fleuve tranquille, s’avère appliqué et plutôt en voix – en tout cas rarement pris en défaut.
Les morceaux de l’album sont interprétés dans le désordre, et le groupe inclut même trois titres du second album, pour enrichir un peu le set (dont “Lysergik Funeral Procession”, interrompu sur son intro, mais relancé par Anselmo comme si de rien n’était). A noter que le groupe jouera aussi le très planant “Jail”, en mode assis au calme… Un morceau enregistré séparément, avant le concert, dont la transition fut un peu dégradée par un problème technique. Cette parenthèse leur permettra de se ragaillardir et de revenir pour un final au taquet. A son habitude, Down termine sur “Bury Me in Smoke”, où à la fin les guitares sont passées à quelques potes (dont Katie la femme d’Anselmo) pour finir de labourer le dernier riff ad lib dans le bordel le plus absolu.
Bref, on aura passé un très bon moment devant ce set, qui nous aura proposé une petite bouffée d’air frais dans un milieu musical pour le moins sclérosé. Il y avait des pains, des clins d’œil, des private jokes entre musiciens… Comme sur scène ! Exactement ce dont on avait besoin.
Un régal de te lire ! J’ai eu la chance de voir le combo d’origine avec Rex en 2009, au bikini à Toulouse.
J’ai finis le cou brisé … Un live énorme, un de mes plus grand souvenir Live à ce jour .