Invité au Roadburn, le désormais quatuor de Philadelphie aurait eu tort de ne pas en profiter pour se fendre d’une petite virée (de 24 dates) en Europe. Une tournée un peu décousue, donc fatigante mais ô combien prometteuse. Merci bonsoir les a donc attrapés en route et concocté un plateau en conséquence.
Un des trucs sympas sur Lyon, c’est le nombre d’endroits où il est possible de se produire. Entre les bars, les péniches, les salles, les MJC, les stades ou les squats, on peut assister à dix concerts dans autant de lieux différents. Ainsi Le Croiseur, plus habitué au théâtre qu’à ce genre de soirée distordue était à ce jour inconnu de la plupart des spectateurs du soir. Un lieu plutôt agréable, un peu roots mais cosy avec sa petite scène drapée d’un rideau rouge et son accueil convivial.
Il fait un temps agréable alors on profite, un peu trop largement, de la terrasse, ce qui entraînera un léger retard du début des réjouissances.
TORGNOLE
Tout jeune groupe par l’âge de ses membres et son existence de quelques répétitions seulement, Torgnole s’installe et entame gentiment son set. Évidemment on se demande bien se qui va pouvoir se cacher derrière ce sobriquet. Il va s’agir d’une petite demi-heure d’un set mené sans pause et de façon plutôt singulière. Faiblement sonorisé, le groupe va en effet interpréter ce qu’on pourrait appeler une symphonie drone, avec plusieurs mouvements et variations d’intensités. La base rythmique basse/batterie est secondée d’une cornemuse et d’une vielle à roue, instrument étrange qui se prête bien au style tournoyant. Le temps de laisser cette ambiance particulière se mettre en place et on se laisse happer par ces sonorités différentes et déroutantes. Mieux vaut ne pas s’absenter ou se détourner le moindre instant sous peine de risquer de décrocher, la chose étant présentée et exécutée comme un ensemble indivisible. Alors évidemment il y a quelques petites approximations dans les enchaînements, on assiste vraiment à la genèse d’un projet annexe pour un bassiste habituellement batteur et un batteur habituellement guitariste, qui mène la danse d’une façon très orchestrale. Le final monte doucement dans la plus grande tradition classique et les applaudissements ponctuent longuement une prestation sympathiquement atypique.
SUNDER
De retour du Desertfest londonien, Sunder continue son ascension de la planète stoner, ou tout du moins du continent. Bon, je suis dans l’obligation d’employer la première personne du singulier et d’admettre que j’ai un souci avec le combo pariso-lyonnais. Malgré leurs qualités individuelles en tant que musiciens et une interprétation au diapason, difficile de trouver quelque chose d’original dans leur musique, mis à part l’apport de ces claviers dépressifs. Impossible de leur trouver quelque chose de personnel quand je les écoute et ne pas penser à un énième ersatz de ce qui peut constituer actuellement le haut du panier en termes de stoner rock… Tant pis pour moi.
D’autant que le rendu en façade montre les limites de la sono, un peu limite pour mettre en valeur le matos onéreux installé sur les planches.
Le quatuor va interpréter honnêtement une bonne partie de son album éponyme, porté par un batteur loin d’être avare en dépense d’énergie, ces gars sont indéniablement proches du professionnalisme. On peut ainsi espérer une marge de progression dans les mois à venir, moyennant une digestion de leurs influences qui pourrait s’avérer intéressante d’ici quelques temps. A suivre avec attention…
ECSTATIC VISION
Fraîchement débarqué et remarqué par Relapse, le groupe de Pennsylvanie est assurément promis à un meilleur avenir de ce côté-ci de l’Atlantique. Son premier album Sonic Praise sorti l’an dernier est un mélange rafraîchissant de stoner et de krautrock, qui ne semble pas être le style d’infusion au pays de l’oncle Sam. Nul n’est prophète en son pays paraît-il…
A une semaine de la fin d’une tournée éreintante car zigzagante, Ecstatic Vision en a encore sous la pédale de fuzz. L’ex trio a désormais un saxophoniste/flûtiste dans ses rangs et est déjà parti pour composer un second opus qui s’annonce tellurique.
Doug, tête pensante à l’origine du groupe, a trouvé le line-up idéal tant tout le monde se fait visiblement plaisir sur scène. Le set sera malheureusement trop court (à peine plus de trois quarts d’heure) mais va embarquer l’assistance à coups de rythmes endiablés, frénétiques et répétitifs – même si la sono semble décidément peu habituée à cracher de la sorte. Doug, le guitariste chanteur, fera immanquablement penser vocalement aux jeunes années de Lemmy, Matt Pike ou encore Dave Wyndorf, tandis qu’il dispensera riffs endiablés ou soli aériens et balancera quelques sons de l’espace à l’aide d’un clavier.
Très dommageable, il faudra une panne de courant sur la scène pour qu’on puisse entendre Kevin qui n’hésitera pas à se lancer dans une impro de grande classe au sax’ le temps de régler le problème. Compliqué pour se faire du coup une idée sur l’ensemble du groupe. On se délecte néanmoins d’une assise rythmique possédée, hypnotique ou furibonde, les vibrations renvoyées des planches se font difficilement résistibles. Les ricains sont rentrés à la maison et vont s’atteler à un second opus qui promet un retour par chez nous dans de meilleures conditions sonores, on vous attend d’oreilles fermes les gars !
Photos : c’est devenu plus qu’une habitude, merci à Miss Sandie/Noodle, toujours dans les parages quand il y a de bons groupes à photographier !