Ce dimanche 27 septembre, il valait mieux avoir posé son lundi au boulot si l’on souhaitait assister à cette 8ième édition du Glad Stone Fest en association avec les Stoned Gatherings. Il était en effet compliqué de sortir indemne de ce déferlement sonore organisé pour les 5 ans d’existence du fest. Avec 6 groupes à l’affiche dont aucun n’a le tricot de dentelle pour passion, le déluge de saindoux était à prévoir. C’est donc avec un grand plaisir que l’on s’est rendu à ce séduisant rendez vous, sans parapluie ni K-Way, afin de profiter pleinement de toutes ces grasses effluves.
C’est Decasia qui a l’honneur d’ouvrir à 18h. Ce trio nantais installé à Paris depuis peu entame son set et l’on comprend rapidement que cette soirée va faire vibrer nos organes et la surface de notre bière tiède. Le son est en effet gigantesque, avec une basse très prédominante pour le plus grand bonheur de nos cœurs de doomsters, pour reprendre l’expression de Julien Clerc. Pourtant, la musique du groupe n’est pas brutale. Les passages de riffs heavy sont souvent atténués par d’autres chantés sur une guitare claire et dénuée de tout effet superflu, se rapprochant d’un rock plus traditionnel. Ajoutez à tout cela une teinte de psychédélisme et une bonne dose d’énergie, coupable d’une corde de guitare cassée en fin de concert, et vous aurez une petite idée de la chapelle dans laquelle officie Decasia. Bonne entrée en matière pour le reste des événements.
Le trio parisien Red Sun Atacama prend le relais et débute sur un morceau élevé en bpm rappelant un “Green Machine”. La basse est encore une fois mise à l’honneur et on se délecte du jeu très groovy du bassiste chanteur, dont on peine malheureusement à entendre la voix. La guitare vient quant à elle poser de nombreuses envolées réverbérées, manquant parfois un peu d’altitude et d’inspiration. Un mélange assez efficace pour voir naître les premières agitations au sein du public.
Il est 19h30 et c’est au tour de Miava de continuer le viril concours de celui qui aura la plus grosse fuzz. Les quatre belges nous livrent des compos post metal et purement instrumental avec une certaine maîtrise. Malgré quelques fulgurances reluquant vers Tool, la musique du groupe souffre tout de même d’une certaine linéarité et demeure assez prévisible. Heureusement, le son toujours aussi lourd que l’enclume du forgeron d’Excalibur nous permet de digérer ces quelques points faibles et de passer un bon moment.
C’est les oreilles déjà bien rassasiées qu’on entame cette deuxième partie de soirée et qu’arrive Enos. Face à un bassiste encapuchonné et aux premières notes plus basses que terre qui résonnent lentement dans la salle, on jurerait être devant un groupe de doom. Que nenni. Nos anglais évoluent dans un registre space rock/stoner psychédélique, un croisement entre Hawkwind pour le trip spatial et Orange Goblin pour la science stonerienne du riff. Le guitariste – un poil trop bas – nous balance des riffs bluesy pour les envoyer rendre visite aux étoiles, dans un espace à l’écho hypnotique. Une belle leçon de musique.
Si jusqu’ici le son était assez lourd pour faire trembler les murs, Sunnata vient placer la barre encore au dessus et menace le Glazart de s’effondrer. Entraperçu aux derniers Doomed Gatherings, les polonais avaient fait assez sensation pour être de nouveau invités ce soir. Pour situer la noirceur de la musique du groupe, pensez à une nuit d’hiver au nord de la Finlande. En sous-sol. Dans une cave. Au milieu de cris et de larsens, la puissance phénoménale du doom/sludge de Sunnata ravage tout sur son passage, avec toujours un sens de la mélodie indiscutable.
La gueule bien amochée par tant de violence sonore, on s’apprête à recevoir le coup final de la main de Glowsun. Le Glad Stone Fest qui se charge habituellement de réunir des groupes peu connus du grand public a enfreint la règle pour ses 5 ans : le groupe français de stoner/psychédélique fait clairement figure de tête d’affiche ce soir. Après un album fraîchement sorti et très bien accueilli et un passage par le Hellfest, Glowsun a pris du galon et ça se voit. Le groupe entame son hypnotique « Death’s Face » autour de volutes d’encens tout juste allumé et posé au devant de la scène. Il faut voir Glowsun en live pour se rendre compte à quel point leur son est massif. Il y a une réelle puissance, difficile à cerner au travers d’une simple écoute de leurs albums, et qui devient pourtant évidente en live. La subtilité des compositions laisse la place à une force brute et primitive, dont votre nuque se souviendra dans les jours à venir. Parce que Glowsun fait preuve d’un groove incroyable. Le groupe contraste aussi avec les précédents par un professionnalisme et une aisance incomparables. Les morceaux s’enchaînent impeccablement et tout est très carré. Le guitariste jongle avec une facilité déconcertante entre ses différentes pédales d’effet, toutes très présentes dans la musique du groupe. Après un rappel unanime, le groupe s’apprête à entamer une nouvelle chanson alors qu’il se fait interrompre discrètement sur le côté de la scène : il est déjà 23h30, le temps qui leur était imparti est écoulé. Dommage, on serait tous bien restés plus longtemps.
De manière encore plus poussée que les Stoned Gatherings, qui associent des groupes moins connus à d’autres à la notoriété déjà bien installée, le Glad Stone Fest a toujours essentiellement eu à cœur de dénicher des formations intéressantes, moins exposées médiatiquement. Si la démarche est légèrement différente, le Glad Stone Fest n’en est pas moins un rendez vous incontournable pour tout fan du genre. Avec une programmation d’un très bon niveau général et un tarif plus que dérisoire, même Lidl en période de solde aurait du mal à concurrencer un tel rapport qualité/prix. Bref, on s’étonne que l’événement ne joue pas à guichet fermé à chaque fois. Allez, pour la prochaine édition, plus d’excuse.