HELLFEST 2025 – Jour 2 Valley (Hermano, Pentagram, Dopethrone, …) – 20/06/2025 – Clisson

Le soleil tape déjà fort à 10h du matin sur le site et la journée de concerts, bien plus longue que celle d’hier, va s’annoncer difficile pour les vieux corps déjà fatigués de vos serviteurs, encore étourdis de la veille. Pourtant la qualité de l’affiche de ce vendredi n’annonce pas de temps de repos, comptons sur l’excitation pour nous maintenir vifs et alertes jusqu’au soir…

Notre vidéo de la journée :

 


Wormsand

On a beaucoup vu Wormsand sur les planches ces derniers mois, soutenir son formidable dernier album, You, The King, avec toujours la même impression d’une énergie jamais prise en défaut, et d’une maîtrise scénique toujours impeccable, permettant de transcender ses compos. L’enjeu d’aujourd’hui sera de valider l’homothétique transition de ce jeune trio, de scènes plus modestes vers la gigantesque Valley. Comme à leur habitude, la formation sudiste attaque bille en tête, et choisit le heavy et complexe “Digging Deep” pour capter l’attention de l’auditoire du jour. La bonne réputation scénique du groupe s’est bien répandue apparemment, si l’on en juge par la taille très respectable du public devant la scène – à cette heure et par cette chaleur c’est une belle performance. Le concert se déroule sans jamais que les musiciens ne s’apaisent, virevoltant, chantant ou criant, sautant, transpirant, frappant sur les futs comme une mule… Le set évolue avec des compos progressivement plus lourdes et moins “nerveuses” (“Drown”, “To Die Alone”), ce qui est plutôt malin, une fois le public “ferré”. Les puristes regretteront l’absence de titres plus anciens, mais c’est un peu vite oublier la qualité de cet enchaînement, qui tire bien profit de ce court créneau horaire, parfaitement géré.


Castle Rat

Bientôt midi, le soleil tape fort sur la tête, et même si la Valley ne fait pas salle comble, le public s’est déplacé en nombre très raisonnable pour assister au set de la nouvelle petite sensation doom rock américaine. On comprend assez vite que le groupe n’est pas venu pour enfiler des perles, résolu à mettre les petits plats dans les grands. Musicalement, la set list se concentre sur ses morceaux les plus efficaces, essentiellement issus de sa récente production Into the Realm. C’est maîtrisé, varié, et on n’a pas le temps de s’ennuyer. Côté decorum, les musiciens sont tous déguisés et maquillés (mention spéciale au guitariste vampire et au bassiste qui a joué avec un masque intégral sous un soleil à 35° pendant 45 minutes), sans parler évidemment de Riley Pinkerton. La frontwoman, énergique et charismatique, légèrement vêtue de son haut en côtés de maille, anime avec fougue et conviction le spectacle épico-comico-fantasy, avec juste la bonne dose de cheesy pour ne jamais s’éloigner de l’aspect fun. Au final, un très bon set, qui n’a jamais basculé dans le ridicule et aura largement contenté les amateurs de musique heavy doom old school… et de spectacle !

 


Dirty Sound Magnet

Premier constat : cette chaleur rend toute chose difficile, en particulier le fait de se tenir face à la Valley avec le soleil qui cogne sans zone d’ombre nulle part. Bravo au groupe dans ce contexte, en milieu de journée, au pic du soleil, d’avoir déplacé un public loin d’être ridicule… Il faut dire que leur style musical et leur enthousiasme sont probablement la recette parfaite à cette heure de la journée. Le trio helvète a établi une set list intelligente, piochant du côté le plus énergique de sa discographie, pour proposer une collection de petites pépites stoner psych au groove décadent. Tandis que la paire rythmique de la formation Marco Mottolini /Maxime Cosandey tisse une trame rythmico-mélodique irrésistible, le fantasque guitariste/chanteur Stavros, outillé d’un énorme pedal board, empile les soli et leads flamboyants pour élever un peu plus chaque titre. Il serait plus que temps de voir ce groupe atteindre le niveau de notoriété qu’il mérite.

 


Sandrider

Si l’on devait identifier la petite friandise du jour, Sandrider pourrait clairement postuler. Le trio américain ne bénéficie pas d’une notoriété à la hauteur de son talent dans nos contrées, et la prestation du jour vient le confirmer avec éloquence. N’ayant pas hérité du créneau le plus facile (on vous a déjà parlé de la chaleur écrasante qui terrasse le public de la Valley aujourd’hui ?…), la formation de Seattle se jette dans son set avec énergie et envie. Leur style musical est difficile à faire rentrer dans une case ; on pense à un grunge fuzzé à haute énergie, où se mêlent influences sludgy, prog… Une sorte de Mastodon grunge ? Toujours est-il que derrière cette maladroite et trompeuse labellisation, le set affiche une belle cohérence. Jon Weisnewski, souriant frontman de la formation, empile les riffs colossaux les uns sur les autres, tout en proposant des lignes de chant mi-gueulard / mi-chant clair (enfin « clair », faut le dire vite…), souvent sur la brèche. Derrière lui ça ne chôme pas, avec une section rythmique qui ne peine pas à structurer certaines compos généralement moins basiques qu’il n’y paraît. Il est aussi là, le talent du groupe : interpréter en mode « bas du front » des morceaux souvent plutôt audacieux. Le public, s’il n’est pas d’une densité incroyable (aucun groupe ne peut se targuer d’avoir fait le plein cet après-midi), apprécie, headbanguant à l’occasion ou tendant moults points rageurs au gré des nombreux breaks heavy. Un set enthousiasmant et solide qui, s’il ne trouvera peut-être pas sa place dans les top du Hellfest 2025, aura montré le potentiel live du groupe, qui devrait, dans de meilleures conditions, s’avérer d’une belle efficacité.

 

 

 

Du côté de la Purple House…

Knuckle Head

Si la police cherche un four c’est à la Purple House que ça se passe. Knuckle Head thermostat 11 deale son groove et fait suer à grosses gouttes un public en transe. Étonnant qu’on ne dénombre aucun malaise sous la tente avec la chaleur que dégage le rock crunchy du duo, en particulier avec son finish sur une reprise de “Personal Jesus” de Depeche Mode.

 

 


Årabrot

L’assistance s’est encore un peu amoindrie en face de la vaste scène. Il faut dire que l’on est probablement en ce cœur de l’après-midi au pire de la vague caniculaire : le public présent n’est pas simplement curieux ou amateur du groupe, il est avant tout courageux, tout simplement. Ce set de la formation norvégienne s’annonçait pour le moins excitant, proposant d’interpréter son nouvel album Rite of Dionysus… qui ne sortira que dans quelques mois ! On aborde donc le concert les oreilles grandes ouvertes, curieux et disponible à toute surprise… de la part d’un groupe qui n’en a jamais manqué dans sa carrière. On ne pourra donc pas citer les chansons jouées, mais on peut assurément dire que le groupe revient avec un ensemble de compos costaudes et mélodiques – en tout cas dans leur forme live. Le set s’avère assez enthousiasmant à suivre, emmené par le désormais assumé duo composé du fondateur Kjetil à la guitare et au chant, et de madame à la ville, Karin Park, uniquement accompagnés d’un batteur. La densité musicale est pourtant bien au rendez-vous, renflouée au besoin par les diverses nappes et plans de synthé amenés par Park (il faut la voir, se tenant droite et défiant le public, une main sur chaque clavier à sa gauche et à sa droite !). Les deux se partagent l’animation scénique, avec une certaine austérité pour monsieur, et une réelle fougue pour madame. Si jamais l’on s’ennuyait, le groupe a mandaté une trouve de danseuses de blanc vêtues pour animer plusieurs titres, et elles reviendront à la fin pour le (prévisible, au vu du titre du disque) banquet final, avec une tablée rapidement mise en place, décorée de quelques victuailles ! Un vrai bon set, mélant humblement spectacle et musique, de la part d’un groupe dont on s’était progressivement un peu détaché, probablement à tort.

 

 

Du côté de la Purple House…

Witchorious

Quand la paire des cordistes monte sur scène, rien d’autre n’existe. L’énergie passe de l’ intérieur du groupe au public. Il ne faut que peu de temps à ce dernier pour scander le nom du trio. Plus choc qu’aérien ce set vient compléter à merveille le ressenti de l’album et confirmer que le boulot abattu par le groupe  cette dernière année paie ! Good Job !

 

 

Du côté de la Purple House…

Witchfinder

L’affluence est au rendez-vous dans la chaude Purple House, signe que le groupe est attendu. Et il ne déçoit pas un auditoire amateur de gros riffs lents et de saturation. Le quatuor, depuis sa petite scène-cage,  s’emploie à délivrer un doom tellurique avec énergie. Les gouttes de transpiration perlent, que ce soit des mains de Stan à la guitare ou des fronts d’un public qui headbangue de bon cœur. Une prestation réussie, dans des conditions de chaleur ayant poussé les corps à leurs limites.

 

 


Dopethrone

Le set des Montréalais prend une dimension particulière tandis que l’après-midi touche à sa fin et qu’il prend place face à un public qui vient de se taper plusieurs heures sous un soleil de plomb ! Pour notre part, nous attendons avec intérêt cette prestation, qui fait écho à leur dernière venue au Hellfest en 2018, un concert que tout le monde considère unanimement comme raté. Depuis, le groupe a tourné de manière sporadique, évitant quasi-systématiquement le territoire francophone… Pour beaucoup dans le public, donc, il s’agit d’un retour aux affaires pour le trio canadien. « Trio », car le groupe est revenu à sa formule basique, avec une formation recentrée autour de Vince, désormais seul membre fondateur à bord après le départ il y a quelques années du bassiste Vyk. Ce dernier a été remplacé par Mike, tandis que Shawn à la batterie est déjà présent depuis quelques années au sein du groupe. Point de surprise au rendez-vous : Vincent mène la barque Dopethrone en tant que frontman, il gesticule (un peu), grimace (beaucoup), éructe ses vocaux, et gratte des accords et riffs bordéliques. Le chaos ambiant qui émane généralement des sets de Dopethrone est un peu atténué aujourd’hui par un son (de guitare en particulier) presque « trop » bon, propre, et manquant de cet aspect approximatif et glaireux endémique au combo (on s’était habitué à ce que chaque compo ne soit identifiable que quelques secondes après son démarrage, quand elle s’extirpe un peu de ce mix brouillon…). Au-delà de quelques menus tracas (peau de batterie cassée par ce bourrin de Shawn, qui l’offrira au public à la fin), le set se déroule sans aléa, autour d’une sélection de titres couvrant toute leur carrière (seul le très bon « Life Kills You » représente leur dernière galette Broke Sabbath), offerts à un public satisfait, qui headbangue de bon cœur dans les premiers rangs. Un bon set, sans relief, mais efficace.

 

 


Crippled Black Phoenix

“Sorry about Masters of Reality, that would have been fucking awesome”… C’est par ces mots que Justin Greaves rappellera le contexte de la présence de son groupe sur scène ce soir, qui remplace finalement la formation culte de Chris Goss, qui s’est fait porter pâle. Le combo britannique de post-rock a ses détracteurs, mais il a aussi ses fans qui sont comprimés contre les crash alors que le septuor se pointe sur La Valley, transformée en propagatrice d’idéologies politiques : les amplis sont ornés de symboles ou messages (drapeau palestinien, support aux saboteurs de la chasse…), les t-shirts affirmés (libération animale) et le keffieh porté sur le visage. Le ton est donné et la formation anglaise à géométrie variable affirme ses engagements, ses convictions, depuis ses débuts. Le set du jour démarre de manière très aérienne et la torpeur ambiante n’est pas propice à déchaîner le pit de la Valley. A mi-set, le groupe envoie son titre palyndrome « 444 » qui agite les aficionados et il faudra attendre le tube certifié « Rise Up And Fight » pour secouer un peu le public qui sera généreux en applaudissements au terme du concert, tandis que le leader criera « Fuck Fascism » au terme de « We Forgotten Who We Are ».

 


Pentagram

Le Pentagram nouvelle version a désormais quasiment un an d’existence, avec plusieurs dates live dans les pattes désormais, et un nouvel album studio (Lightning in a Bottle, certes moyen) révélé au public il y a quelques mois. La dernière fois que nous les avions vu, le backing band choisi par Liebling était efficace (on parle de 2/3 de Mos Generator, un groupe pour le moins compétent) mais peu rodé dans l’exercice Pentagram. Très vite ce soir l’on s’aperçoit que la situation est toute autre : l’aisance scénique de la troupe est décuplée, à l’image de Scooter à la basse qui… bouge et regarde ailleurs que ses pieds ! Concernant Bobby, il est toujours le même boute-en-train (ce qui est quand même un constat auquel on ne devrait pas s’habituer, le poids des ans tarde à se faire sentir…), avec ses blagues douteuses (parfois sous la ceinture) et ses mimiques et regards torves… Ces derniers nous font nous interroger : quelle est la part du public (qui remplit fort bien la fosse) qui vient par admiration ou respect pour ce groupe culte, et quelle part vient pour voir le « phénomène » chanteur aux yeux globuleux qui a fait le bonheur des réseaux sociaux il y a quelques semaines, via de nombreux memes autour d’un trend incongru ? Ne boudons pas notre plaisir, la prestation de ce soir est de haut vol, Bobby est en voix, et les musiciens sont rodés et à l’aise. En outre, les quelques mois en commun ont suffi à une complète appropriation des titres,  aboutissant pour certains à des arrangements particuliers, et surtout des réaménagements pour introduire ou développer tel ou tel solo de Tony Reed souvent (sur les nouveaux titres en particulier, étant plus facile de remodeler ses propres compos, les plus anciennes étant quelque peu sacralisées – voir en particulier sur « Dull Pain », « Walk the Sociopath »…). Une prise de liberté la plupart du temps réussie, participant là aussi à montrer la bonne incorporation et appropriation de ce nouveau line up sur « l’entité Pentagram », qui de fait se façonne peu à peu en fonction de leur identité. Si quasiment la moitié du set repose sur ces compos récentes, la plupart des classiques sont quand même présents (et « 20 Buck Spin » joué en entier). Point de surprise majeure, ni de facteur exceptionnel, mais une prestation plus qu’honnête, qui fait honneur au groupe.

 


Hermano

La nuit est bien installée, et la chaleur bel et bien disparue quand vient l’heure de début du set du groupe culte américain. Est-ce la raison qui explique l’affluence inédite du public qui se masse devant la scène ? Ou bien est-ce cette sorte de tension que l’on sent grésiller dans l’atmosphère avant la montée sur les planches du sieur Garcia ? Quelques éléments de contexte pour mettre en perspective ce concert de Hermano : tous ses musiciens vivent désormais à plusieurs centaines voire milliers de kilomètres les uns des autres, l’entité n’a pas enregistré de véritable album depuis 18 ans, et n’a joué qu’un seul concert en 17 ans… au Hellfest, en 2016 ! Vous le sentez monter, le facteur événementiel ? S’il y a un concert à ne pas rater sur ces quatre jours, c’est celui-ci. Même si chaque musicien reste (plus ou moins) actif au sein d‘autres formations, le groupe a mis à profit les quelques jours précédents pour une sorte de résidence (dans les locaux de la prod du Hellfest), afin de finir de mettre en place ce set, et retrouver les bonnes interactions entre copains/musiciens. Le résultat ne tarde pas à se faire sentir : dès le nerveux « Cowboys Suck » délivré en intro, le groupe apparaît solide et parfaitement en place… et ce constat ne sera finalement jamais questionné sur tout le concert.

Même si tous les yeux sont (anormalement) rivés sur Garcia, tous les musiciens de la formation apportent une contribution dantesque à l’exercice, à commencer par cette section rythmique redoutable, avec un Chris Leathers sans faille derrière les futs, segondé par Dandy Brown, discret leader du groupe, distillant des trames mélodiques au groove implacable à la basse. Par-dessus, Mike Callahan débite des riffs énormes, associé à Dave Angstrom et ses leads impeccables, atypiques, imprévisibles parfois, en prolongation directe de sa personnalité. L’alchimie naît là, à travers ces quatre musiciens avec lesquels John Garcia délivre ce soir une prestation plus que solide (soyons honnête, on l’a déjà vu moins impliqué et/ou moins efficace dans d’autres contextes parfois). La set list n’apporte pas grande surprise, reposant sur les principaux hits du quintette, agrémentés de « Love » (déjà jouée en 2016, inédite à l’époque) et « Breathe » (proposée dans le mini album « fourre-tout » sorti par le groupe il y a quelques mois). Les mid tempo charpentés sont alternés avec les titres plus nerveux (les premiers pogos dans le pit interviennent au milieu du set sur le rageur « Angry American »), pour le plus grand ravissement d’un public qui n’en perd pas une miette, ondulant et headbanguant à l’unisson, en symbiose avec le groupe. L’attente fut tellement longue que l’on râle un peu de voir le groupe ne pas tirer profit de la moindre seconde du créneau qui lui est alloué (ils finissent 5 minutes plus tôt, ce qui aurait permis d’interpréter un titre supplémentaire). Mais ce constat se volatilise bien vite en regard de l’expérience globale, de ce moment quasi-magique qui vient de se dérouler sous nos yeux.

 


 

Complètement vidés d’énergie, courbaturés et délivrant à tous vents des odeurs de transpiration très discutables, vos serviteurs font la route du retour avec des étoiles dans les yeux et les oreilles qui sifflent. Rarement journée au Hellfest fut aussi éprouvante et satisfaisante à la fois… et celle du lendemain se profile avec un gabarit, sur le papier, tout aussi impressionnant ! Mais demain est un autre jour…

 

[A SUIVRE…]

 

Textes & Photos : Chris, Laurent, Sidney Résurrection

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