HELLFEST 2015 – Jour 1 (Mastodon, High On Fire, Orchid, Truckfighters, etc…) – 19 juin 2015 (Clisson)

C’est carrément au nombre de trois que nous nous sommes pointés à Clisson pour le grand raout de l’enfer qui trouble chaque année la paisible existence des culs-bénits de Loire-Atlantique et des environs. Pour son dixième anniversaire, le festival avait fait très fort question logistique et aménagements afin de proposer à ses festivaliers hauts en couleur une expérience encore plus intense (le festoche serait-il en passe de réaliser le doublé des awards européens ?).

En ce qui concerne la fameuse tente The Valley où la majorité des actes stoner se déroulent, point de grande évolution lorsque nous la comparons aux scènes voisines The Altar et The Temple qui ont gagné en volume (mais putain ces scènes super larges ça fait vraiment bizarre). Par contre, The Valley a régulièrement flirté avec sa capacité maximale durant ces trois jours idylliques que vous découvrirez, si vous n’y étiez pas (et ça c’est pas drôle), dans les lignes ci-dessous :

GLOWSUN

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Le premier concert des trois jours du Hellfest est toujours l’objet d’une foule d’incertitudes : va-t-on pouvoir accéder au site et passer la sécurité assez tôt pour les voir ? Le groupe porte la responsabilité de donner le ton du week-end : sera-t-il à la hauteur ? Le son et la technique seront-ils au rendez-vous dès le premier groupe ? Pour la première fois depuis plusieurs années, on peut répondre positivement à toutes ces questions. En effet, le public massé sous la Valley avant même les premières notes du trio nordiste, et les échos captés ici ou là après le concert, nous laissent penser que pour une fois l’accès au site du Hellfest permettait à tout un chacun (qui s’y prenait raisonnablement tôt) d’assister aux premiers concerts. L’opportunité pour Glowsun de disposer d’une tente presque pleine, d’un public intéressé. La bande son du classique « Death’s Face » retentit pile à l’heure pour donner le départ d’une (trop) petite demi-heure de set, et d’un week-end exaltant sous la Valley ! Grosse pression donc, mais gérée de main de maître par les robustes lillois, désormais musiciens aguerris, qui maîtrisent leur prestation : aucun faux-pas instrumental, on sent Johan et ses collègues se donner sans réserve. Trente minutes, c’est peu pour découvrir l’univers musical complexe du groupe, et le choix d’une set list efficace n’est pas évident : quatre titres seulement seront donc proposés, deux anciens (des classiques, issus de Eternal Season) et deux nouveaux, « Behind The Moon » le premier « single » extrait de l’album, et le véloce « Arrow Of Time » pour conclure de fort belle manière un set sans temps mort. Le public ondule sur les séquences les plus atmosphériques et headbangue sur les passages les plus féroces, même s’il n’est pas aussi déjanté qu’on aurait pu l’imaginer (premier concert de trente minutes à 10h du mat, il ne faut pas rêver non plus !). Impeccable de bout en bout, le challenge est relevé.

THE MIDNIGHT GHOST TRAIN

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L’effet buzz tourne à plein régime apparemment : voir The Midnight Ghost Train, tornade dévastatrice bien (re)connue de centaines de concerts en club, accéder à un public de plusieurs milliers de personnes, qui ont pour la plupart uniquement entendu parler de ses prestations hautes en couleur, ça fait chaud au cœur. Trente minutes pour conquérir ce public de curieux représente un challenge que nos trois furieux rednecks se sentent prêts à affronter – et il ne leur faut pas plus de trente secondes pour nous en convaincre, dès l’intro « Along The Chasm » où le furieux binôme de cordistes se déchaîne et propose déjà la première d’une longue série de leur traditionnelle routine de cette sorte de headbanging en quinconce face à face qui leur est bien propre. Les gouttes de sueur commencent à perler en masse tandis qu’ils enchaînent le dévastateur trio qui introduit aussi leur dernier album. Associé à « No. 227 », cette séquence vise à casser les tibias d’un public qui n’en demandait pas tant, et y parvient pour l’essentiel. Démonstration étant faite, « Straight To The North » permet de montrer la face plus groovy du trio. Au final le groupe n’aura joué que des titres de son dernier album, un choix fort judicieux finalement, avec le pied sur l’accélérateur (chaque titre paraît joué avec plus de pêche encore que sur l’album !). Sur scène, le groupe donne ses tripes exactement comme on l’attendait. Dans le public, ça fonctionne aussi, mais encore une fois, l’inertie des grosses foules, le phénomène « matinée », et un son de gratte en façade franchement famélique (donnez-moi plus de gras, diantre !) ne permettent pas de déguster le set comme on aurait pu l’espérer. Il n’empêche que le groupe a ravi plusieurs milliers de personnes, comme le mentionne Steve Moss sur la fin du set : « If you’ve never seen us before, now you know what the fuckin’ deal is ». L’essentiel est fait.

SAMSARA BLUES EXPERIMENT

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Après le rock barbecue des ricains, le running order nous conviait à un plat plus digeste et aéré en provenance d’Allemagne. Samsara Blues Experiment investissait la scène, cheveux soyeux et moustache fluette, à grande dose de delay et de longues plages psychédéliques. Il nous tardait de tester la formule trio dispensée depuis 1 ou 2 ans tout de même afin d’en goûter la force ou d’en déceler les faiblesses. Pas de surprise, la recette est depuis longtemps éprouvée et efficace. De Causa Sui à Colour Haze en passant par certaines galettes de Acid Mother Temple, les passages saturés puisant leur force dans les longues expérimentations claires et groovisantes restent le fruit de Samsara. Le set tournera un peu en rond cependant sur ces plages d’impro, la voix aurait mérité un peu plus de puissance aux entournures et l’on n’aurait pas craché sur un peu plus de communication entre le groupe et l’auditoire acquis à sa cause. Reste un set frais et cohérent qui aura eu le mérite de rafraîchir les esprits et les corps en cette journée grasse de programmation. Une pointe d’amertume cependant tant ce Blues Experiment pourrait aller plus loin mais en quarante minutes on ne va pas leur demander l’absolu.

TRUCKFIGHTERS

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Les trois suédois connaissent déjà la Valley pour y avoir joué il y a deux ans, en ouverture de journée. Logiquement, ils gagnent trois petites places dans l’ordre d’apparition du jour et viennent donc dans l’objectif de fuzzer quelques culs à l’heure de la digestion. Bon présage, « Desert Cruiser » est à nouveau utilisé en intro, avec son riff qui fait mouche à chaque fois. Dotés d’une grosse paire de cojones, ils enquillent directement vers le roboratif « Mastodont », dont la bonne douzaine de minutes propose quelques moments de grâce, mais aussi des plages plus atmosphériques qui coupent un peu la dynamique du set. Il en va de même sur « The Chairman » (même cause). Heureusement la sauce reprend lorsque le groupe choisit « Mind Control » pour la suite, un des titres les plus directs du dernier album (notons que deux tiers de la set list est composée de titres issus de leur dernière galette, Universe). Côté public, comme dans la vraie vie, il y a deux profils : ceux qui s’éclatent, dégustent le fuzz jusqu’à la dernière goutte, slamment et headbanguent sans réserve. Et les plus dubitatifs, qui ont beau reconnaître la qualité d’une bonne part du catalogue du combo, se lasse de voir son pois sauteur mexicain (A.K.A. Dango, le guitariste) faire des sauts de cabri à la moindre occasion, de manière irrationnelle, et ce quelle que soit la dynamique ou le rythme de la chanson jouée. Ce comportement scénique « extrême » étonne et détonnera toujours un peu, il est vrai. Il n’empêche que l’on ne pourra jamais reprocher au groupe de se la jouer facile et de se regarder le bout des chaussures pendant trois quart d’heures (suivez mon regard un cran plus haut sur l’affiche). Et puis en terminant par le vieux méconnu « Gweedo-Weedo », le combo scandinave est assez courageux pour ajouter une surprise et une vraie prise de risque dans une set list de quarante minutes comprenant seulement cinq chansons. Cojones, on vous dit !

ORCHID

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Après le groupe dans le trend du moment, nous retrouvons une valeur sûre de la scène hard rock seventies dans le sillage du Black Sabbath originel. Nous les avions déjà admiré au Freak Valley et nous attendons donc à un set de qualité équivalente, même si les Californiens ne headlinent pas sur ce coup là. Pensez donc, il est à peine l’heure officielle du thé lorsque le quatuor envoie son premier titre à nouveau issu du EP Sign Of The Witch, qui commence sérieusement à se faire attendre. Tout comme deux semaines auparavant, Orchid aligne plusieurs titres de cette pièce à venir (et tout pareillement qu’à cette occasion, le chanteur potasse son énorme recueil de paroles entre les titres afin de ne pas se gourer). Le concert est court : moins de trois quart d’heure et il n’est pas question ici de badiner. La formation enchaîne donc les morceaux sans interagir plus que nécessaire avec le public ; ça tombe bien, ce n’est pas vraiment leur point fort. La Valley remue timidement sa nuque alors que quelques pièces notoires du répertoire des Ricains sont alignées en cette fin d’après-midi. Naturellement, les nostalgiques des années septante sont aux anges lorsque « The Mouths Of Madness » ou « Eyes Behind The Wall » sont jouées. Le t-shirt Nazareth (il faut oser nous vous l’accordons), le gilet à franges (il faut là aussi être carrément cascadeur) ainsi que le tambourin (nous notons encore l’audace de certains) agité durant certains soli apportent un rendu vintage à ce show bref et très efficace balancé devant un backdrop sobre frappé des armoiries de ces gars. Une nouvelle réussite à mettre à l’actif d’une formation inspirée par un style d’un autre temps qui poursuit efficacement son malhomme de chemin sans coller aux tendances de la mode, mais en devenant – au fil du temps – une référence d’un genre déserté par ses vieilles gloires. Vivement la prochaine occasion qui nous sera donnée de voir Orchid si possible en salle ou alors plus haut sur l’affiche afin de se taper un peu plus de leurs fabuleux titres. On remballe fissa sur la scène afin de se préparer à un ouragan de riffs.

HIGH ON FIRE

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Avec un temps de jeu raisonnable (presque une heure) et un créneau horaire sympa (fin d’aprem, avant l’apéro, en gros !), le trio de bourrins U.S. High On Fire a toutes les cartouches en poche pour bien démonter une Valley qui n’attend que ça, le sourire aux lèvres. La démonstration tourne vite au carnage d’ailleurs, tandis que le set commence par le gros « The Black Plot », qui introduit le nouvel album du groupe, le tout chaud Luminiferous (à sortir quelques jours après cette prestation, mais qu’une part du public connaît apparemment déjà). Double crosse-caisse, grosse basse nerveuse, riffs de guitare bien gras occasionnellement remplacés par une poignée de soli impeccables, le tout enjolivé (!!) de la plus belle voix goudronneuse de monsieur Piquet : l’équation est pourtant simple (et HOF n’a jamais prétendu à une originalité débordante) mais l’efficacité de la machine qui laboure les boîtes crâniennes de la Valley sous nos yeux est redoutable. Le public ne s’y trompe pas, jamais aujourd’hui le pit n’a été aussi chaud et les slammeurs aussi nombreux. La programmation sur ce créneau précis aura quand même un peu desservi le trio nord-californien, en faisant jouer en même temps d’autres gros bourrins (Sodom et Dying Fetus), mais la Valley est plutôt bien remplie, et les présents se satisfont d’une set-list se rapprochant assez d’un best-of. On y retrouvera des titres de toute la discographie du groupe (allez, pour les puristes, on précisera que « Surrounded By Thieves a été mis de côté), que du bon : « Cometh Down Hessian », « Rumors of War », « Fertile Green », ou encore le terrible « Slave The Hive » que l’on connaît depuis quelques mois en exclu issu du premier album. Bon, après la première demi-douzaine de barres à mines dans la nuque, on aimerait quand même entendre un peu de variété (le lourdinque « 10,000 years » apparaît presque délicat dans ce contexte…). Mais on n’a finalement pas le temps de se lasser et on prend notre claque comme tout le monde. Papa Pike a la pêche, même si le gars est bouffi de partout (on ne parle pas que de son spectaculaire beer belly…) : ça n’a jamais été une bête de scène, mais le bonhomme n’est pas non plus apathique, et délivre ses offrandes sans déplaisir, apparemment. Avec une mise en son d’excellente facture, il aurait été difficile de faire plus dévastateur. Contrat rempli.

ENVY

Alors, certes, nous sommes chez desert-rock, mais on va quand même écrire quelques phrases sur Envy. Parce que les japonais étaient déjà venus pour le Furyfest et qu’ils ont, une fois de plus, envoyé leur gros post-rock/screamo nippon dans les esgourdes du public. Et même si la formation dépareillait dans la prog, force est de constater qu’ils ont fait le taf et de fort belle manière.

MASTODON

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Après avoir foulé les grosses structures du Hellfest, Mastodon revient dans un cadre nettement plus adapté à son art (et c’est tant mieux pour nos gueules), en tant que headliner de la Valley. Ceci à l’occasion d’une tournée européenne très axée gros festivals, mais qui les vit aussi s’agiter sur des scènes à taille nettement plus humaines. Un de nos rédacteurs aura eu la chance de les voir à deux reprises durant cette semaine puisque la tournée s’est arrêtée un soir à l’Usine de Genève pour un concert au setlist très proche dans une salle ayant une capacité inférieure à mille spectateurs. Bref, l’orga propose une grosse pointure rompue à toutes les configurations scéniques envisageables qui va nous gaver de son style véloce et hyper technique. Bien qu’assez éloigné du stoner pur beurre, Mastodon a commis jadis quelques pièces fort prisées par la communauté. Nous nous permettons donc de nous arrêter quelques instants sur ce show qui débuta de manière pas étonnante sur « Tread Lightly» qui fait office d’ouverture sur ce tour. Comme quelques jours auparavant, on est frappé par la clarté du mix ; ces types-là ont de la bouteille et ça s’entend. On remarque aussi qu’un membre du crew passe le concert à réaccorder les instruments sans interruption puisque les grattes changent à chaque morceau côté jardin (et moins fréquemment côté cour). Proposant un énorme bordel (très) organisé qui voit les protagonistes s’échanger régulièrement le lead et déverser chacun un nombre de notes à la minute impressionnant, ce n’était pas gagné d’avance d’avoir un rendu permettant de discerner les différentes interventions sous une tente à l’occasion d’un festoche dont ils ne squattaient pas l’une des principales scènes. Toujours aussi classe en ce qui concerne l’entretien capillaire et le style vestimentaire, le quatuor a envoyé la sauce de manière fort qualitative durant l’heure qui leur était allouée ; c’est peu ! Ca a permis de se cogner une grosse part de Once More ’Round the Sun, agrémenté d’un soupçon de titres plus anciens, mais malheureusement – et c’est ainsi depuis quelques années déjà – beaucoup trop peu d’extraits tirés des trois premiers chefs-d’œuvre qu’ils ont sortis en début de carrière. Nous n’allons pas bouder notre plaisir : « The Motherload » avec ses différents vocalistes a été un très bon moment quand-même. « Black Tongue» de The Hunter a poutré en diable et on s’est un peu rabiboché avec le groupe en entendant « Megalodon » survivant d’une autre époque. C’était très bien, mais beaucoup trop court à notre sens. La structure se vide sitôt la fin du set afin que les quidams rejoignent d’autres scènes à la programmation alléchante (et peu stoner), le dernier acte de la journée (peu stoner) se déroulant plus d’une heure après.

WOVENHEAD

Retour dans la Valley (lalilala…) pour la formation étasunienne qui était la dernière à s’y produire en cette première journée. Actifs dans un registre très éloigné de celui que nous chérissons dans ces pages, nous n’allons point nous étaler sur la performance suivant la grosse baffe envoyée par leurs compatriotes précédents. C’est dans une Valley (de la mort) que quelques bipèdes ont tangué une heure durant au son (clair) de leur rock underground apaisé empreint de sonorités country (tout un programme que nous laissons à d’autres).

Le temps d’aller considérer aussi la programmation proposée en d’autres lieux (le temps n’est pas resté sans effet sur Judas Priest…), de se retrouver au milieu de la foule (qui nous emporte) et de taper la causette avec deux/trois quidams connus de nos services, le temps est venu de reprendre la route afin d’aller monter le résumé visuel du premier jour (cf. ci-dessous), de faire charger les batteries des appareils et des types qui se sont levés à l’aube (aussi un peu car nous ne sommes plus tout jeunes et qu’il nous faudra des forces pour affronter la suite de cette aventure pleine de promesses ).

[A SUIVRE…]

 

Chris, Flaux, Laurent

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