Si jamais vous vous imaginez un petit fest amateur en club devant quelques dizaines de pelés, votre arrivée au Westill sera un peu un choc, d’autant plus avec les nouveaux aménagements de cette année. Après des années à se chercher, le Westill poursuit les ajustements propres à ce genre d’événements : Cashless rechargeable depuis le téléphone, zone merchandising dédiée sous un barnum hors de la salle (plein d’exposants : disquaires, posters, tee-shirts, tatoueurs, CBD, etc…), accessibilité aux PMR accrue… Le complexe de Champilambard est à ce titre une excellente localisation de l’événement, avec notamment une grande zone extérieure (on n’ira pas jusqu’à dire qu’il est agréable d’y évoluer – la météo bretonne, bla bla bla…), et évidemment la salle de concert, très grande (au pifomètre une belle capacité de 1500 à 2000 personnes) et une superbe scène. Le tout est agrémenté de décors sympas, entre autres attriobuts généralement dévolus aux fest “pro”…
APHASIS
Autre aménagement très significatif introduit par le Westill cette année, probablement le plus important finalement : une nette progression de la qualité du son, qui heurte l’habitude dès les premières notes d’Aphasis. C’est à ce jeune groupe local (nantais) que revient l’honneur d’ouvrir les hostilités, ce qu’ils font fort bien, devant une assistance déjà bien fournie. Le quintet devenu quatuor (nos vœux de bon rétablissement à son chanteur Greg) propose donc par obligation une sorte de gros stoner metal forcément instrumental. Même si le spectre Karma To Burn n’est jamais loin dès lors qu’il s’agit de gros riffs qui tabassent en instrumental, Aphasis se distingue par une lourdeur accrue et des pincées de post métal pour renforcer ses poutres. Le format instrumental ne les handicape pas trop. Un bon moment.
QILIN
Il semble que pas mal de monde dans les premiers rangs connaisse personnellement des membres du groupe, ce qui aide pas mal à donner une tonalité très positive à l’accueil fait à Qilin. Le quatuor parisien n’avait pourtant pas besoin d’un coup de pouce car il semble que l’assistance, déjà drue en ces premières heures de festival, apprécie. Il faut dire que le groupe a quelques atouts dans sa manche, même si son activité scénique est un peu timorée. Le rock instrumental de Qilin ratisse large, on peut penser à Yawing Man autant qu’à une sorte de Elder sous tranxene parfois. On passe souvent de plages très aériennes et plutôt calmes, à des morceaux franchement plus lourds avec de très bons riffs (c’est quand même sur ces séquences que le public frissonne). Une large palette qui mériterait peut d’être un peu plus concentrée. Mais ce ne sont que des détails, car en l’état le set de Qilin était solide et a bien fonctionné auprès du public.
CHILD
Voyage express dans les déserts d’Australie avec le très chaud blues rock de Child ! Avec un son incroyable de clarté (comme pour la plupart des groupes), les sudistes nous régalent de leur musique, qui est un alliage savant entre Brant Bjork, Kadavar et Hendrix, et nous balladent entre morceaux au groove suintant et riffs pesant. Le tout est survolé par un chant aussi puissant qu’envoutant de la part de l’impressionnant Mathias Northway : derrière ses atours de messie chamanique, son feeling à la guitare est au moins aussi impressionnant que son chant. Les premiers rangs se feront clairement ensevelir par les lents riffs de “Blue Overtone Storm” ! Une énigme persiste cela dit… pourquoi ce groupe n’est pas plus connu ?!
GREENLEAF
Dès les premiers pas de Arvid, arpentant la scène de long en large comme un fauve furieux en cage et haranguant le public à la moindre occasion, on sent que l’énergie ne fera pas défaut aux suédois ce soir. C’est confirmé immédiatement par la fougue de Hans à la basse, qui headbangue furieusement avec le sourire qu’on lui connaît, jusqu’aux oreilles. Et que dire de Tommi : le guitariste ne tient pas en place, faisant les cent pas entre le bord de scène et ses amplis en fond, le tout évidemment en assurant à lui seul l’intégrité du colossal édifice guitaristique. De bonne humeur ce soir, Arvid communique et blague pas mal avec le public – rigolo quand il mentionne la propension de groupes scandinaves à faire des chansons sur les chevaux et, tandis qu’il annonce “Different Horses”, Tommi lance justement le riff du “Horses” de leurs potes de Slomosa… La set list ce soir laisse peu de place au hasard, avec peu de changement globalement sur cette tournée, alignant des titres super efficaces de leur discographie (grosse rasade issue de leur premier album avec Arvid, Trails & Passes, très représenté avec pas moins de 4 titres) mêlés à pas mal de jolies cartouches de leur dernier album (trois nouveaux titres dont l’efficacité live n’est plus à confirmer – mention spéciale à “Breathe Breathe Out” et son groove énorme, avec un gros travail de Hans à la basse) et même un passage aux archives pour y dégainer le vieux “Stray Bullit Woman”. Un concert sans faute.
NIGHTSTALKER
S’appuyant sur leur habitude le groupe entre en scène puis Argy vient prendre la place centrale pour marquer le début des hostilités de ses gestes de vieux marionnettiste. Une set list de choix va allumer un excès de vie dans la fosse avec un tournant dans la soirée qui se produit sur “Forever Stone”. Il faut dire que les premiers rangs ont vu les fidèles du groupe jouer des coudes pour se placer au mieux. C’est à cette frange conquise du public que s’adresse le groupe ce soir et les erreurs sur “Sweet Knife” ne diminuent en rien le plaisir des festivaliers qui petit à petit font bouger le pit d’une agitation qui ira grandissante. Les gars assurent un mix entre vieux titres sans prise de risque (“Zombie Hour”, “Dead Rock Commando)” et le plus récent “Great Hallucination” où l’on subira parfois l’excès d’enthousiasme de la basse d’Andreas, ce dernier assurant comme à son habitude une prestation sans faille mais armé d’un son un poil trop puissant. De son coté Tolis manie sa gratte avec justesse et des quelques accords d’intro de “Children of The Sun” il offre ce qui sera pour les fans le moment de communion tant attendu qui pourra clôturer leur concert et inscrire sur le visage de Dinos le plus large des sourires, ce dernier distribuant tous ses jeux baguettes une fois la dernière note jouée, comme remerciement à ce public qui aura su les accueillir.
DOZER
Deux heures après Greenleaf, c’est Dozer qui rentre en scène – c’est une bonne idée côté logistique, étant donné que les groupes partagent le même batteur et le même guitariste ! Et pas de signe de fatigue chez les deux forçats, ni chez leurs deux collègues plus frais évidemment : tout le monde à le sourire et le gardera tout le long du set ! On est presque même sur un excès de bonne humeur (!) chez Fredrik, qui passe presque plus de temps à faire des mimiques et à échanger avec le public qu’à jouer ! Apparemment il n’y avait pas que de la Cristalline backstage… Pour autant le frontman tient bien sa boutique, en particulier pour compléter le mur de grattes co-construit avec Tommi Holappa. Côté chant, c’est parfois plus compliqué, le fantasque frontman prenant quelques libertés ce soir, et certaines notes étant un peu plus difficiles à atteindre que d’autres… Or la qualité du son de la salle, une nouvelle fois impeccable, ne pardonne pas, et tout s’entend. Les interactions entre musiciens sont aussi plus rares (en partie liée au groupe lui-même – ce n’est pas Greenleaf ! – et probablement au fait que les autres musiciens sont dans un mood un peu différent…).
La set list de ce soir est solide, se concentrant sur trois albums majeurs qui trustent quasiment tous les morceaux : le dernier album bien sûr, avec trois extraits (dont le décidément convaincant “Mutation / Transformation”), mais aussi Call it Conspiracy (avec évidemment “Rising”, mais pas que…) et surtout le colossal Through the Eyes of Heathens avec rien moins que quatre extraits. Vraiment pas de mauvais choix, mais certains qui ont pu être moins percutants ce soir (notamment en lien avec le facteur évoqué plus haut…). Conséquemment, le concert a globalement un peu manqué de consistance et de tension, là où la force de Dozer tient justement dans cette alternance de puissance et de groove. Mais peut-être attendions nous trop, de la part d’une des dernières légendes en activité de la scène stoner européenne… Toujours est-il que les premiers rangs pogottaient cordialement, et que les stage divers (dont Fredrik himself) et les slammers se sont donnés le relais durant tout le concert. Le public, globalement, a pris son pied – en atteste l’ovation finale qui vient saluer le départ du quatuor.
Même si elle est moins copieuse que celle prévue le lendemain, l’affiche du jour a tenu ses promesses, largement, et c’est repus de décibels que nous regagnons nos pénates pour préparer les corps à la grosse journée de samedi.
[A SUIVRE]
par Laurent, Kara et Sidney
(photos Laurent)
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