ZOE – octobre 2006

Alors là les enfants ! Nous ne sommes pas peu fiers de vous présenter cette interview d’un groupe francophone. Et quel groupe : Zoe, c’est le nom du groupe qui m’a mis sur le cul en ce milieu d’année ! Originaire de la fameuse Côte d’Opale, le quatuor nous en dit un peu place par l’intermédiaire de son chanteur et guitariste Fred. Actif dans un registre assez proche d’Hermano, de Dozer ou de Sparzanza pour le rendu final, le combo fait dans le bref et percutant, mais évite soigneusement les redondances sur son dernier effort “Make It Burning” qui m’a franchement mis une grosse baffe. Ces lascars nous prouvent qu’il faudra aussi compter sur eux et que le stoner n’est pas une spécialité scandinave. Rock’n’roll !

 

Pourrais-tu brièvement nous présenter Zoe ?

Zoe est né en 1997. Nous sommes tous originaires de Calais, ville portuaire du nord de la France. Aldo est moi sommes les deux membres d’origine, Eric nous a rejoint en 2003 et Vince en février 2006, juste avant la sortie de “Make It Burning”.

Tous les musiciens de Zoe proviennent d’horizons musicaux assez différents de ce que vous pratiquez aujourd’hui. Qu’est-ce qui vous a poussé à vous lancer dans ce rock’n’roll furieux quelque part entre le punk’n’roll et le stoner ?

C’est une évolution qui s’est faite progressivement, au fil des changements de line up, et il y en a eu pas mal… Au départ notre musique était résolument seventies. Fuzz, wha wha, Fender Rhodes, venaient agrémenter des compos entre MC5 et les Stooges avec des textes en français. Aldo, bien que guitariste, était le chanteur et moi le guitariste. Puis nous avons interverti les rôles, je suis passé au chant (en anglais) tout en gardant la guitare et Aldo a repris la guitare. Cependant, avec le temps nous nous éloignions de nos influences rock’n roll et nous sommes passés par des périodes plus ou moins psychédéliques. En 2003, avec l’arrivée d’Eric nous avons décidé de revenir aux sources avec comme mot d’ordre l’énergie, on avait envie de voir les gens headbanger à nos concerts. Vince, qui est plus influencé metal hardcore, est venu ajouter sa pierre à l’édifice.

Vous revendiquez tous des influences différentes puisque ça va de Noir Désir à Motörhead en passant par Tool. Qu’est-ce qui fait l’unité au sein de la formation ?

C’est vrai qu’on a des influences sensiblement différentes mais c’est justement cela qui fait l’unité du groupe, personne n’est confiné dans un style musical précis, et même si chacun a ses petites préférences, on aime tous le rock n roll ! Bien que dans Zoe la moyenne d’âge soit comprise entre 25 et 42 ans, on est autant influencé par la musique des seventies que celle des nineties.

Et quelles sont celles qui influencent votre style actuel ?

Je dirais globalement le courant stoner avec Kyuss, Fu Manchu, la vague rock’n roll scandinave avec Gluecifer, The Hellacopters, le power rock de Monster Magnet et bien sûr Motörhead, AC/DC, …

 

Vous avez ouvert ou partagé la scène avec beaucoup de combos punk ou métal. Etait-ce pour toucher un nouveau public ou était-ce motivé par le peu de groupes stoner voire rock’n’roll qu’on croise en France ?

Disons que dans le nord de la France la tendance est effectivement plutôt metal et on n’a pas encore eu énormément l’occasion de jouer en dehors de la région. Donc quand on nous propose de jouer avec tel ou tel groupe si les conditions sont acceptables, on y va. Cela nous a d’ailleurs permis de constater qu’on passait finalement assez bien partout.

D’ailleurs puisque nous en sommes à parler de styles musicaux. Comment définissez-vous le vôtre ?

On nous classe dans la catégorie stoner. Mais je pense qu’on est tout simplement un groupe de Rock’n’roll !

Et puisque nous parlons de la France , quel regard portez-vous sur la scène stoner francophone actuelle et quels sont vos rapports avec ses différents acteurs ?

Au risque de te décevoir, à part Glowsun, je ne connais pas beaucoup de groupe stoner francophone. Ah si ! Il a aussi Blackstone dont le dernier album est également distribué par Brennus, il me semble. J’ai lu à leur sujet dans la presse “premier groupe de stoner en France”. Est-ce vraiment du stoner ? J’ai l’impression que cet estampillage est devenu un peu “fourre-tout” et que l’appellation est galvaudée. On dit qu’on fait du stoner pour ne pas dire que l’on fait du hard rock. Pour moi, ce qu’on pourrait appeler stoner c’est Kyuss, Fu Manchu. Zoe du stoner ?… Ce qui est certain c’est qu’il y a un regain d’intérêt pour le rock dans la francophonie et c’est le principal. Un groupe dont on se sent proche dans la démarche : Houston Swing Engine. Je suis certain que ces mecs ont digéré plein d’influences, ça se ressent dans leur musique.

Vous avez passé un deal avec Brennus pour album “Make It Burning” n’était-ce pas un danger de se retrouver sur un label estampillé métal ?

Lorsque nous avions enregistré notre première demo avec Eric en 2003s, nous l’avions envoyé en masse aux labels. Nous avions reçu beaucoup d’encouragements, mais personne n’était réellement intéressé pour nous signer. Sauf un, Alain Ricard de Brennus. Il nous avait répondu que dès que nous aurions enregistré un album, nous pourrions éventuellement travailler ensemble bien que nous ne soyons pas tout à fait dans le créneau des groupes dont il assure la distribution. Nous l’avons donc contacté à la fin de l’enregistrement de “Make It Burning” et il a accepté. Il est d’ailleurs lui-même assez étonné puisque nous faisons partie des meilleures ventes d’album par correspondance sur le site de Brennus.

 

Vous avez co-produit ce disque avec Laurent Prevost de MDB Concept Studio dans le 59. Comment s’est déroulée la collaboration avec un étranger à vos compos ?

Laurent est le batteur du combo hardcore lillois No Flag. Donc pas tout à fait dans notre style. Cependant dès le départ, il s’est investi à 200%. Il a très vite compris ce qu’on voulait et ce qu’on aimait. Juste avant la sortie de l’album, notre batteur Jean-Luc, avec qui Aldo et moi jouions depuis plus de 15 ans, a quitté l’aventure. Cela a été un coup dur alors que l’album était prêt à sortir. Avant de trouver son remplaçant, Laurent nous a dépanné et il l’a remplacé sur une date. Tout ça pour dire qu’il a vraiment participé activement à l’élaboration de l’album et à sa sortie.

La scène rock de votre région semble être très ouverte vu que les groupes collaborent quand bien même ils pratiquent des styles fort différents. Cette unité n’est-elle qu’une impression ou un fait avéré ?

Non c’est un fait, il y a en général une bonne entente voire une entraide entre des groupes qui pratiquent des styles différents, une forme de respect, je pense, pour le travail bien fait. Par exemple, il y a Dee n Dee, groupe de metal indus de Calais avec qui on forme une vraie famille. On partage tout, ou presque… L’association LX qui organise des concerts sur Calais et s’occupe de chercher des dates pour Dee n Dee et ZOE nous a donné un sacré coup de main pour le financement de l’enregistrement de l’album, l’association Relief qui est pourtant tendance electro nous a aidé également. Et puis la MPT de Calais où nous avons récemment fait une résidence, la ville de Calais aussi qui nous a “prêté” le théâtre municipal où s’est déroulé l’enregistrement du clip “Think Today”, et j’en oublie sûrement… Je pense qu’il y a dans notre région une réelle envie d’aider les groupes sérieux et motivés, que ce soit au niveau des groupes entre eux ou des institutions qui ont en charge la promotion et le développement des musiques actuelles. C’est une chance !

Vous avez engagé des moyens dans la réalisation d’un excellent clip “Think Today” qui se trouve sur votre dernière production, des passages télé ont-ils déjà été dealé ?

C’est Benoit Hénon, un ami qui fait partie du collectif lillois Digital Vandal, qui a réalisé le clip. Pour ce qui est de sa diffusion, c’est en cours. Malheureusement, il n’y a que très peu de chaînes qui diffusent des clips et les réponses sont rares. Cependant, le clip sera diffusé prochainement sur oc-tv.net, une télévision sur Internet.

Pensez-vous que le statut d’intermittent du spectacle qui existe – encore – en France soit un frein à une certaine créativité avec son quota minimum de shows par année ?

Je ne pense pas que ça soit un frein à la créativité puisqu’il y a de plus en plus de groupes. Par contre, il est certain qu’il faut vraiment tourner un maximum pour obtenir ce statut, qui est en plus très précaire. Beaucoup de musiciens qui ont le statut d’intermittent du spectacle sont d’ailleurs bien souvent obligés de faire de la technique pour joindre les deux bouts.

 

Comme vous vous produisez régulièrement avec des formations politiquement engagées, comment jugez-vous la scène stoner qui est très apolitique ?

Chacun son truc, tout dépend du contexte. Il y a peut-être aussi une part d’implicite. Je ne sais pas si la scène stoner est à proprement dite apolitique, ce qui est sûr c’est qu’il y a plusieurs manières de faire passer un message. En ce qui nous concerne, on ne peut pas dire qu’on soit un groupe engagé politiquement bien qu’il nous arrive parfois de revendiquer des idées. C’est le cas de titres comme “Make It Burning” ou “Strike It On” qui dénoncent – sans rentrer dans les détails – les méfaits de notre société de consommation et l’endormissement général qu’elle induit. Cependant, pour nous la musique passe avant tout et les textes plutôt sont secondaires, ou à la limite c’est plus le sens général, l’ambiance qu’ils peuvent dégager, qui nous intéressent et ils ne sont pas à prendre au sens littéral. Pour cela il y a des groupes comme Lofofora, Trust, Parabellum, Sick Of It All, Ministry,… qui le font très bien.

Quels sont vos prochains projets ?

Tout d’abord on commence à composer avec Vince qui a un jeu de batterie beaucoup plus fluide que celui de Jean-Luc notre ancien batteur et cela semble très prometteur. Les premiers concerts avec lui nous ont boosté, il apporte un sacré regain d’énergie. Nous aimerions pouvoir retourner en studio d’ici l’été deux-mille-sept, mais pour l’instant nous nous focalisons sur la tournée, nous avons pas mal de dates dans notre région, mais nous aimerions nous exporter un peu plus. Nous avons quelques contacts dans l’est de la France et il est probable que nous allions jouer là-bas d’ici peu. Une tournée de quelques jours en Allemagne est envisagée pour fin octobre, et nous aimerions aussi bien sûre venir jouer en Suisse.

As-tu quelque chose à ajouter ?

Nous sommes avant tout un groupe de scène, donc si nous passons près de chez vous et que vous voulez une bonne tranche de rock’n roll bien grasse, venez nous voir ! Je pense que vous ne serez pas déçu. J’aimerais également ajouter que si nous sommes quatre sur scène, sur la route nous sommes une super équipe de potes (techniciens son, lumière, roadies, merchandising, …). C’est comme une famille : Ils passent leur temps à se défoncer pour que tout aille bien et ils croient en nous. C’est pour leur rendre la pareille à notre manière que l’on interprète parfois sur scène “We Are The Road Crew” de Motörhead. Et enfin, longue vie à Desert Rock !!!

octobre 2006 par Chris.

 

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