Milking the Stars, la ré-interprétation du très bon Last Patrol, avait laissé tout le monde un peu circonspect… pour plusieurs raisons : d’abord, le principe même de proposer, quelques mois après sa sortie, une nouvelle version d’un album qui recueillait pourtant tous les suffrages publics et critiques, paraissait une démarche sinon suicidaire, tout du moins saugrenue. Ensuite, le monde s’est divisé en deux catégories : ceux qui ont trouvé l’exercice un peu trop barré, exercice de style un peu stérile et inconsistant (votre serviteur), et ceux qui ont adoré, voire même préféré cette version à l’original. Il n’empêche que la démarche avait déstabilisé. Et du coup, plutôt que de repartir en studio proposer un fillot à l’excellent Last Patrol, que nous propose Monster Magnet aujourd’hui ? Encore un remake, celui de Mastermind cette fois ! Nos ricains ont de la suite dans les idées ! Enfin, papa Wyndorf surtout, le véritable artisan derrière l’objet, bien aidé dans son entreprise de reconstruction par tonton Caivano, son bras droit.
L’album de base, Mastermind, donc, est un bon album du groupe, tout en étant probablement l’un de ceux qui réservent le moins « d’aspérités » : album de retour en forme à l’époque, mais pas album de prise de risque. En tant que tel, un bon matériau de base, potentiellement. On clique donc sur « play » (modernité, l’an 2000, technologie, âge digital, toussa toussa… les temps changent), prêts à entendre toutes les expérimentations possibles et imaginables (et, avouons-le, préparés mentalement à voir quelques excellents titres ruinés par les lubies d’un Dave Wyndorf parfois, reconnaissons-le, un peu nombrilo-centré). Et puis les titres défilent… sans difficultés ! Traduction : sans nappes de Bontempi ridicules (bon OK, « Watch me Fade » est limite), sans fulgurances vocales exagérées, bref, rien qui détonne… Agréable surprise, qui se confirme après de nombreuses écoutes : contrairement à Milking The Stars, Cobras and Fire est homogène, fluide et consistant. Si l’on devait le résumer, on pourrait penser à une réinterprétation un peu plus planante de Mastermind : on limite un peu les montées en pression, on apaise un peu les riffs, on « désature » un peu les grattes, on atténue un peu l’importance des soli, on blinde l’ensemble de nappes de claviers solides (et néanmoins très présentes, reconnaissons-le) et on gorge le tout du space-rock dont Monster Magnet s’est fait la spécialité. Le fan un peu puriste versera forcément sa petite larmichette en déplorant le manque de fuzz et de saturation (il y en a quand même, rassurez-vous, ainsi que des soli).
On peut même dire que certains titres, sans être meilleurs, se retrouvent ragaillardis ou révélés par l’opération : l’orientalisation de « Mastermind » est un parti-pris réussi ; « Hallucination bomb », complètement aseptisé et nettoyé, n’est plus le titre de remplissage qu’était la version originale ; « Gods and Punks », plus ramassé et apaisé, gagne en densité même si sa progression dynamique y perd un peu… On a même droit à une reprise d’un titre des Temptations (« Ball Of Confusion ») qui nous donnera l’occasion de découvrir une part plus obscure (à plusieurs titres) du répertoire de ces grands soulmen (!!).
On pourrait s’engager dans un track-by-track un peu stérile, mais le point n’est pas là. On n’est pas dans un objectif d’amélioration des morceaux, mais bien une nouvelle vision qui, cette fois-ci, apparaît plus cohérente, plus réfléchie aussi. Un vrai album ? Peut-être bien que oui… Les grincheux relèveront évidemment qu’il s’agit plus d’une « Wyndorfisation » plutôt que d’une vraie nouvelle vision proposée par le groupe (le bonhomme croone toujours aussi allègrement dès que l’occasion lui en est donnée…), mais l’adjonction de nouvelles pistes de grattes, pas forcément aussi chétives qu’on l’aurait pensée, rendra l’ingestion de ce Cobras and Fire bien plus confortable pour tout amateur du groupe de space rockers du New Jersey. Une agréable surprise.
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