Dozer entretient une certaine rareté dans le paysage depuis une bonne grosse quinzaine d’années en se produisant à petite dose. Tel n’était pas le cas à ses débuts lorsque le quatuor était omniprésent sur nos scènes. C’était aussi l’époque à laquelle nous avons eu l’idée de lancer ce site avec trois mecs que je n’avais jamais rencontré que par clavier interposé…c’était différent, Dozer jouait et sortait des petites merveilles à tirages plus ou moins confidentiel sur des structures appartenant désormais au mythe de la scène comme Man’s Ruin ou Meteorcity (les anciens vont verser une larme). En ces temps anciens, le stoner et ses déclinaisons n’avaient pas voix au chapitre sur le devant de la scène et c’est très naturellement que ce sont sur des circuits parallèles que sont sorties une palanquée de production de la bande de Borlänge empruntant les codes du monde qui était le sien alors : l’underground !
De cette période souterraine, il demeure un paquet de pépites n’ayant pas fait l’objet d’un tirage conséquent voire même d’une mise à disposition du grand nombre car Dozer est populaire désormais et bénéficie d’un intérêt certain. La chose est aujourd’hui partiellement réparée. Réparée comment ? Le groupe – soit des gens de goût – a sélectionné selon son bon vouloir des titres issus des sorties disséminées aux quatre vents alors que le stoner européen n’en était qu’à ses premiers balbutiements. Réparé aussi parce qu’ils ont transmis leur sélection à Karl Daniel Lidén – un type au goût aussi certain que Dozer dont il a été le batteur, il l’a aussi été pour Demon Cleaner – on y reviendra – et Greenleaf avant de devenir producteur – afin qu’il remasterise la chose dans les règles de l’art. Pas réparé parce que l’exercice de style, à savoir de confier à des auteurs-compositeurs-interprètes le libre arbitre sur une sélection de leurs titres contraint justement le choix et quand il y a choix il y a des titres qui restent en rade…il demeurera donc une quantité non-négligeable de compositions gravées dans le sillon ou sur des bandes magnétiques qui n’ont pas passé le round des sélections et ne figurent donc pas sur ce double grand format. C’est un peu frustrant certes, mais cela laisse aussi la porte ouverte à une éventuelle deuxième couche (c’est quand vous voulez les gars !).
De retour au business, les Suédois vont se tirer en tournée américaine avant de revenir pour quelques dates européennes au sud ou au nord, mais pas au milieu, et c’est avec ce nouvel album composé de vieilleries qu’il se baladera. Ce nouvel album est une occasion de se pencher sur un groupe emblématique de la scène stoner du vieux continent, sur sa galaxie dont le propagateur principal par ici était son label Molten Universe ainsi que sur une belle brochette de groupes sur lesquels il est toujours bon de se repencher voire de se pencher tout court si on n’a pas connu le Nokia 3310 à sa sortie. Parmi les titres, plusieurs extraits on été tirés des 3 split commis avec Demon Cleaner (les albums sont naturellement chroniqués dans nos colonnes), un groupe incroyable des la scène de la fin des nineties et du début du millénaire. Zéro trace de celui commis avec Los Natas, qui est aussi un groupe incroyable originaire d’Argentine voire de celui perpétré avec Brain Police, incroyable formation islandaise (les deux orchestres font aussi l’objet de quelques mots commis par nous-mêmes jadis ici même). Aucun extrait du split avec Unida est présent certainement parce que la chose s’est déjà bien répandue et aura su trouver son public sans l’appui d’une réédition. A titre très perso et juste pour ramener ma grande gueule de mauvaise foi, je suis un peu partagé sur la présence de « Vinegar Fly » déjà présent sur « Vultures » qui était déjà une compilation de choses inédites mise en valeur par les mêmes protagonistes, mais qui ne couvrait que des prises captées entre 2004 et 2005 (vous devriez aussi trouver sur ce site une chronique de la chose).
Alors quoi ? Alors bien sûr on achète la chose. Bien sûr qu’il ne s’agit pas d’une oeuvre cohérente vu que l’arbitraire règne sur une sélection de titres, mais quels titres ! C’est Dozer ! C’est Dozer moins le quart avant Jesus Crie ! C’est Dozer dans sa toute grande forme : du heavy rock fuzzé remarquablement composé, interprété et arrangé. Ca bat n’importe quelle sortie de l’année sans forcer sur le moteur. C’est magique de bout en bout, du début à la fin. Zéro remplissage des premières notes du premier split avec leurs acolytes de Demon Cleaner soit« Tanglefoot » qui est un bijou de lenteur très heavy avec ce timbre de voix à reconnaissable d’entre tous puis ça embraye avec le deuxième extrait « Hail The Dude » qui pose clairement le cadre de ce que sera la trademark Dozer.
On s’enfile ensuite une kyrielle de hit intergalactiques genre « Southern Star » qui est proche des ogives « Rising » ou « Supersoul » et qui entraîne du mouvement de nuque avec le pied qui bat la mesure. On s’arrête aussi sur l’incroyable chef-d’oeuvre ressuscité « Star By Star » issu du split avec Giants Of Science qui est l’astre de cette (re-) sortie et qui fait clairement partie des meilleures ogives balancées depuis la Suède. On se termine sur une pièce plus anecdotique plus qu’issue de la demo « Universe 75 » (aussi présente à l’appel) : « 2 Ton Butterfly » qui retient sa violence avec la basse en première ligne devant un riff qui tourne et des lignes vocales balancées en ligne arrière avant de se terminer de manière chaotique. On parcours non seulement la période la plus prolifique des Scandinaves, mais aussi celle qui à mon sens est clairement la meilleure en termes de productions hautement qualitatives.
Bref : qu’on se tape une séance de rattrapage, un bain de jouvence pour se rappeler le bon vieux temps (ah ouais c’était mieux avant ?), une découverte d’un pilier du genre ou simplement une immersion de soixante minutes dans l’univers Dozer propice à l’onanisme, cette production rejoint le rayon des indispensables dans la discothèque de chaque mélomane qui se respecte un tant soit peu. De plus est, si nous devons encore attendre 15 piges entre « Drifting In The Endless Void » et son successeur, soit la période qui le sépare de son prédécesseur « Beyond Colossal », cette production devrait être poncée à la sortie de la prochaine livraison (sauf si le reste du catalogue subit le même sort et on croise un peu les orteils).
Point Vinyle :
La question de savoir s’il faut se procurer cette chose est vite réglée : c’est tout bonnement indispensable et il y aura un contrôle de la police du desert-rock ! Il reste donc la question de l’écrin à régler car se contenter de la déclinaison numérique d’un pareil trésor ne devrait être à l’ordre du jour d’aucun de nos lecteurs qui sont des gens de goût et qui se respectent. Il y a donc un cd limité disponible des deux côtés de l’Atlantique (comme tout le reste), une édition limitée à 400 pièces du double LP en noir et rouge, une édition extrêmement limitée (je n’invente rien) en vinyle noir affectionné par les audiophiles vu sa qualité supérieure (un peu comme l’absinthe du purgatoire), laquelle bénéficie d’un déclinaison noire et blanche de la pochette ainsi qu’un tirage en vinyle rouge transparent qui sierra à merveille avec l’artwork de base. Fais ton choix camarade !
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