Janvier 2015, découverte d’un album qui sortira le mois suivant. Cinq titres, quatre déjà enregistrés en 2013, parus en 2014. Avec donc un cinquième en addition pour doper la re-sortie d’un EP déjà plébiscité à l’époque et qui touche maintenant au grand, au très grand. Trois mois que j’écoute en boucle l’œuvre d’un trio New-Yorkais, que je la déguste et savoure à chaque instant telle une madeleine de Proust que je me complais à retrouver. Un album de chevet, un classique de 2015 dont les fondements remontent à plusieurs années et qui dans plusieurs encore sera toujours indémodable.
Dans un club miteux au fin fond d’une galaxie lointaine en plein XXVème siècle, un groupe reprendra ces titres suintant le blues et suffisamment aériens pour traverser les âges. Dès les premières notes de « Ancient Song », le ton est donné. Une guitare planante entonne un phrasé bien léché, voguant sur les nuages cotonneux d’une section rythmique carrée et justement ronde. Quelques notes aussi volubiles que volatiles, exprimant la liberté d’Icare au plus proche des cieux et toute sa solitude d’en tomber seul. Les contretemps se font plus heavy et alors que s’étire le jam, survient ce gimmick. CE gimmick, celui qui vous fait basculer à jamais dans les méandres de cette incarnation parfaite d’un heavy-blues maîtrisé, inspiré et inspirant.
« Thorny » met de côté les phasers et autres flangers qui servaient alors de duvets aux 6-cordes ailées, au profit d’un bottleneck chevauchant le midwest au dos de Pégase. Mais le cheval-ailé est au pas, il slide durant 4 minutes d’un blues intemporel. La saturation reprend ses droits sur « Ghost Rider Solar Plexus » qui est d’ors et déjà le hit de 2015 ! Les chevaux sont lâchés, débridés et groovant sur les collines d’un riff à raser de près les Tres Hombres de 1973. Composé par une gratte ? Pas certain quand on entend sa parfaite appropriation par la basse sur la deuxième moitié du morceau qui laisse la place à un jam fumant, la gomme des sabots collant au bitume brulant.
Un jam de heavy blues aérien qui groove, cet album est déjà au firmament qu’il entame sa pièce maitresse de près de 15 minutes. Le fameux petit nouveau, qui apparaît désormais sur la réédition signée chez Ripple Music. « Tales of Murder and Unkindness », réunit tous les ingrédients précédemment cités, les délaye, les passe au chinois, les explose, les enlumine et les compose en une lecture en trois actes. Le charme psychédélique, qui se dégage des premiers mouvements, se dissipe lors d’une dernière scène désenchantée, soutenue par la métronomique batterie qui ne joue que de toms et de clics faisant fi de toutes cymbales. Le groupe démontre ici toutes ses velléités et capacités à sortir du cadre, à renouveler son propre format, à se définir lui-même, cet album n’étant que son deuxième effort à proprement parlé.
Puis « Dude It’s Molecular » clôt les bacchanales. L’orgiaque blueserie à laquelle nous participons prend fin en 4 minutes d’un instrumental dépouillé de tout artifice. Comme une fin en live sans cette rocailleuse voix qui nous a conté tant de déboires précédemment, sans effet pour propulser les mélodies. Reste trois instrumentistes à leur état le plus brut pour émettre les dernières résonnances de 38 minutes vouées à finir dans le top 5 de l’année.
Ces hommes, c’est Geezer qui a sorti en février Gage, un immanquable.
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