Boom, l’album surprise du mois nous est venu de Denver, Colorado, morne patrie dont le sludge ou le doom ne font pas forcément partie du patrimoine culturel le plus traditionnel. Tant et si bien qu’on était passé à côté de ce duo-devenu-trio, qui a pourtant déjà sorti une petite poignée de disques, et dont le cheval de bataille semble être l’autoproduction à tout prix (avec en contrepartie une faible visibilité, dommage). Le groupe, plus ou moins actif depuis neuf ans, propose une musique à la base sludge-doom assez évidente, mais à la personnalité bien trempée, le tout étant assorti d’une vraie prise de risque, sur chacun des titres.
Une écoute rapide des titres qui composent la rondelle devrait vous faire rapidement toucher du doigt la teneur de leur production, à commencer par “The Fool’s Journey”, dont le riff brise-nuques du refrain, plombant à souhait, est aussi… sans paroles ! Quand on a un riff aussi fat on ne le dégrade pas avec des vocaux inutiles… Le titre de 10 minutes prend même plus tard un virage lugubre aux confins du funeral doom sur sa seconde moitié, lente, lourde et poisseuse, avant de clôturer par une cavalcade thrash pur jus, option riff-mâchoire-serrée. Pffiou… Pour bien remettre l’église au milieu du village, “Scales of Maat” déroule son riff au groove pachydermique, puis après une série de breaks venus de nulle part, se vautre dans un sludge doom bien gras, dont le chant guttural doublé file la chair de poule. Vous avez dit classique ? Ravalez vos viles pensées : “The Chasm at the Mouth of the All”, après un court instru acoustique guitare/violon (!), se lance sur une intro sautillante en son clair et chant crooner (!!), pour mieux balancer sur son refrain un pur high-kick de stoner doom nerveux, avant de revenir en mode cowboy… Retour au classique avec “Archonic Manipulations” et son imparable riff heavy incisif en double guitare, avant de revenir à un ovni en clôture : après un autre titre de transition instrumental à la guitare acoustique hispanisante, l’intro de “Prima Materia”, dans la même tonalité, déroule ses couplets mélodiques en électro-acoustiques sur quasiment 5 minutes avant de lâcher quelques refrain stoner pur jus, avec toujours le chant nerveux et graveleux à souhait de Grant Netzorg. Tout s’enchaîne ainsi dans un tourbillon de styles musicaux qui s’entremêlent dans un déluge ininterrompu de goudron dans ses formes les plus variées, allant taper un peu partout où ça fait mal, entre doom et sludge, allant même picorer en terres post-metal (“Lightchild”) et autres joyeusetés ténébreuses, selon l’effet souhaité.
Pour autant, In the Company of Serpents ne tombe jamais dans le piège de l’exploration WTF un peu stérile : au bout de quelques écoutes à peine, ses incursions dans des sentiers musicaux en mode “hors pistes” s’avèrent parfaitement intégrées, pertinentes, et servent bien les compos. Un constat loin d’être évident en première approche ! Encore une fois, donner sa chance au produit et persévérer fut payant. Bien servis par une production soignée et efficace, sans chichis, les gars proposent finalement une demi-douzaine de vraies compos efficaces, nerveuses et originales. Un album bien foutu, qui défriche et renouvelle le(s) genre(s) de fort belle manière, avec talent et audace.
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