Desert-Rock a profité de la venue de John Garcia And The Band Of Gold au Trabendo à Paris pour rencontrer le chanteur américain. Motivé et regonflé à bloc, l’ex-Kyuss nous parle de son nouveau groupe, de ses envies, de sa famille et de ses futurs projets, qu’ils soient musicaux ou non. Malgré ses lunettes noires, John Garcia est bien loin de certains clichés qui collent à la peau des rockeurs et on s’est retrouvé face à un mec sympa, attentionné et avec les pieds sur terres.
John, tu es à Paris pour commencer une tournée européenne avec 25 dates. Comment te sens-tu ?
C’est génial ! Je ne suis pas souvent sur la route, et revenir à Paris pour cette première date représente beaucoup de choses pour moi. On a 25 dates en trente jours et j’étais vraiment impatient de commencer, tout comme le groupe. Avec le Band Of Gold, je suis entouré de très bons musiciens, très professionnels, et notre seule motivation est d’être sur scène pendant 90 minutes et de donner le maximum à chaque concert. On est donc très excités.
Tu as décidé de donner un nom à ton groupe, mais considères-tu toujours cela comme un projet solo ?
Oui, c’est mon projet solo, indubitablement, c’est ce que j’ai toujours voulu faire. Mais cette fois je ne voulais pas que seul mon nom apparaisse. Ces musiciens sont tellement doués, ils ont beaucoup participé au projet, ils ont proposé beaucoup de choses, et beaucoup apporté au disque. Ils méritaient un nom, en quelque sorte… On se mettait souvent autour d’une table pour discuter de la direction que nous souhaitions prendre, et on était toujours d’accord. Il m’est donc assez vite apparu normal et logique d’avoir un nom de groupe, et pas seulement mon nom.
Concernant ce nom, il vient de la chanson “Band of Gold”, un morceau superbe interprété par Freda Payne, une chanteuse R&B des 70’s… Je me suis juste dit que c’était un nom vraiment cool pour mon groupe. En tout cas, donner un nom au groupe est un changement significatif, c’est vrai, ça donne l’impression de “nous” plutôt que “moi”, ce qui correspond bien à notre situation : nous sommes très proches, même si nous avons chacun nos autres métiers, nos propres familles…
Justement, rappelle-nous ta rencontre avec ces trois musiciens.
Un jour j’ai été rendre visite à un copain musicien qui répétait avec son groupe dans un local. J’ai réalisé que mon groupe à moi était constitué de gars dans le Kentucky, la Georgie, la Belgique, la Caroline du Nord, etc… Du coup il m’était impossible de faire de simples répétitions… Donc quand j’ai recherché de nouveaux musiciens, il y a environ cinq ans maintenant, je voulais à tout prix des mecs du coin. Le désert est petit, tous les musiciens se connaissent et tout le monde connait les musiciens qui gravitent autour de ce lieu. Le groupe est constitué de Ehren Groban, Mike Pygmie et Greg Saenz. On s’est retrouvé tous ensemble pendant l’été et tout s’est fait naturellement. Ce sont vraiment de bons gars et maintenant on est devenus comme une petite famille, on fait des barbecue, on passe du temps ensemble…
Ce nouvel album a pris un peu plus de temps à enregistrer que prévu… pour quelle raison ?
Oui on a perdu beaucoup de temps… Je me suis lancé dans un projet qui n’a pas abouti : pour être plus libre d’enregistrer dans ma région, j’ai envisagé de monter un studio avec plusieurs personnes, et d’y produire mon album. Mais progressivement il est apparu que les gars avec qui j’avais lancé ce projet ne partageaient pas la même vision que moi, je ne pouvais pas continuer ainsi, nous ne regardions pas dans la même direction. Je n’aimais pas le chemin qu’ils voulaient prendre, j’ai donc décidé d’arrêter avec eux. On a repris contact avec un vieil ami, Chris Goss, pour prendre la suite… Alors certes, ça a généré du retard, mais ce genre de choses arrive, ce n’est pas dramatique.
Les premières critiques de John Garcia And The Band Of Gold sont très positives. Ça te rassure pour la tournée et la suite de ta carrière ?
Bien sûr, ça me rend forcement heureux. Cet album n’est pas pour tout le monde : tu l’aimes ou tu ne l’aimes pas. C’était aussi le cas avec mon album précédent, acoustique. Je sais qu’il y a beaucoup de critiques, je connais cette industrie depuis un moment déjà. Certains aiment, d’autres non, il faut s’y habituer. Il faut apprendre à se détacher émotionnellement de certaines critiques. Si tu dis que cet album est de la merde, OK, je peux comprendre, chacun a son opinion, mais je n’y attache plus beaucoup d’importance. Ça ne fait aucune différence pour moi. Il faut savoir se détacher de ça… L’essentiel est que ça reste toujours un plaisir pour moi de me produire sur scène, de créer des chansons et de sortir des albums… D’une certaine manière c’est ce qui me permet de recharger mes “batteries d’émotion”. C’est ma drogue et c’est ce qui me rend heureux. Lorsque j’écoute mon fils chanter (il a 9 ans, il adore la musique, il écoute Panic! At the Disco, Marshmallow Wednesday, il aime l’EDM…), ça me transporte littéralement – j’ai la chair de poule rien que d’en parler – et c’est l’effet que me fait la musique… Désolé j’ai fait un peu long haha !
C’est étonnant de t’entendre dire cela, sachant qu’il y a quelques mois, tu as confié dans une interview que tu pensais que cet album serait ton dernier… Qu’en est-il aujourd’hui ?
J’ai dit ça à un moment où ma foi pour la musique a été ébranlée, et avant qu’elle ne soit ravivée par Chris Goss [ndlr : producteur de l’album] et par mon groupe… Dans l’industrie de la musique, il y a beaucoup de connards et de trous du cul… des personnes qui sont là pour elles-mêmes, qui passent leur temps à prouver qu’ils sont cools mais qui ne font rien d’autres. Je ne suis pas cool, et je ne veux pas être cool, je suis un père de famille et un mari avant tout. Quand j’ai dit que c’était mon dernier album, j’étais malade et fatigué, j’en avais marre de ne voir autour de moi que des gens qui essayaient de me tendre des pièges. Désormais, quand je vois un problème arriver en face de moi, je tourne la tête, et je regarde dans l’autre direction où tout est plus joyeux. Je détourne mon regard et je vois ma fille de 16 ans écouter Post Malone [ndlr : un rappeur], ça me fait marrer, c’est une toute autre sorte de “problème” – dans le sens où j’aurais préféré qu’elle écoute AC/DC ou un truc comme ça – mais c’est un problème joyeux, tu comprends ?… Ou quand je dois aider mon fils à construire une église en modèle réduit alors que j’ai des trucs super urgents à faire… Ce sont des exemples de “bons” problèmes, que je suis content de rencontrer… Ce que je dis n’a probablement aucun sens, haha ! Donc pour revenir à ta question, disons qu’aujourd’hui, si je devais évaluer les chances que John Garcia And The Band Of Gold soit mon dernier album, je dirais qu’elles sont presque nulles…
Quand on écoute ton album, on a l’impression qu’il a été réalisé pour être joué en live…
C’est une très, très bonne remarque. En 2014, mon précédent producteur voulait systématiquement ralentir toutes les chansons, j’ai appliqué ses conseils et je n’ai pas aimé ça. Alors cette fois quand nous avons commencé à enregistrer, j’ai dit “je veux les jouer comme je les jouerais sur scène, je vais les jouer au tempo le plus approprié, je ne veux pas tout ralentir”. Même si parfois le tempo fluctue sur une chanson, je m’en moque, c’est quasiment des erreurs volontaires, parfois ça monte, parfois ça descend, on ne cherche pas des rythmiques identiques au métronome… On veut que ça soit comme ça, que ça bouge, que ça soit vivant, comme en concert. On a voulu créer une émotion avant tout… Quand j’écoute une chanson, je veux être transporté ailleurs et avoir cette émotion… Quand j’écoute “Jim’s Whiskers”, par exemple, je veux être transporté quelque part, je veux me retrouver devant son appartement, là où il est mort… Cette chanson [ndlr : qui parle de Jim Morrison, le chanteur des Doors] réveille de mauvais souvenirs personnellement, car on est en ce moment-même dans la ville où il est décédé – et il est mort trop tôt – or même si cela m’attriste, j’aime l’endroit où ça me transporte. Ça me transporte à Paris, assis en face de ce petit bar, à côté de son appartement où ils l’on trouvé mort… C’est très émotionnel, j’y ai été avec ma femme, ça m’a donné la chair de poule, j’aime tellement ce groupe… Voilà, j’aime là où ça me transporte, j’aime là où “Kentucky II” me transporte, j’aime où “Space Vato” me transporte, même si c’est un instrumental ! Ça m’extrait du moment présent et m’emmène ailleurs… à Paris… Et regarde où je me trouve maintenant : à Paris ! haha.
Quels sont tes plans après cette tournée européenne ? D’autres projets musicaux ?
Oui, j’ai envie de retourner en Australie au mois d’octobre, on a quelques concerts prévus ici ou là… Mais pour l’essentiel je vais continuer ma carrière, retourner à Palm Springs, à l’hôpital vétérinaire [ndlr : John Garcia y travaille avec sa femme]. J’aimerais aussi avoir un peu plus de temps libre pour me reposer car j’ai beaucoup travaillé à l’hôpital ; c’est très fatigant. On a vraiment beaucoup de travail là-bas, beaucoup de pression. C’est un petit hôpital mais on a beaucoup d’urgences à gérer. Quand je suis en tournée, ma femme gère tout elle-même. Je veux aussi passer du temps à devenir le meilleur père et le meilleur mari possible. Je ne le suis pas, j’essaye de l’être. C’est un travail de tous les jours, il faut y consacrer du temps… On y revient, ce sont encore de bons problèmes (sourire).
Je veux aussi continuer avec le groupe, faire des barbecues, boire des bières fraîches et m’amuser. Juste profiter de la vie.