Blue Heron – Ephemeral


Le Nouveau Mexique n’a jamais vraiment été (re)connu comme une plateforme du stoner rock américain, loin s’en faut. On pourra néanmoins se rappeler qu’un ambitieux jeune groupe, Spiritu, avait sorti autour du changement de millénaire un excellent disque  (hey, devinez quoi : on était déjà là et on vous en parlait) qui en appelait d’autres, mais a fini par disparaître discrètement par la petite porte. Son chanteur Jadd Shickler n’est toutefois pas resté inactif tout ce temps, œuvrant en coulisses pour d’innombrables groupes du genre, à travers labels et boîtes de promotion notamment. Vingt ans plus tard environ, ils décident, avec Mike Chavez, le guitariste de Spiritu, de monter un nouveau groupe sur les cendres bien refroidies de leur ancien combo. Leur récent EP nous avait titillé, et on ne s’est donc pas fait prier pour se plonger dans leur premier LP.

Blue Heron (le Héron Bleu, étrange sobriquet convenons-en) propose probablement un extrait de ce qui peut être fait de mieux dans un genre très balisé : celui du stoner « à l’américaine », un stoner rock moderne, heavy, structuré, qui ne se perd pas en jams sans fin ou tergiversations de toute autre nature. Un style où le songwriting est primordial, et très fortement « riff-dépendant », trahissant une approche de la musique heavy bien charpentée, respectueuse de quelques basiques. Une sorte d’hybridation entre les groupes de pur desert rock (Slo Burn et compagnie) et les combos plus « carrés » du Nord-Est des USA (Lo-Pan, Gozu, etc…). Par ailleurs, toujours dans cette veine musicale, une importance significative est apportée au chant, placé bien en avant, avec un vrai chanteur (si si) au style varié, à la voix puissante et accrocheuse. L’effet est toutefois un peu à double tranchant ici : Shickler est présent sur tous les plans, du chant clair limite suave (« Push the Sky », « Salvage ») aux passages puissants et énervés (« Salvage » encore, « Black Blood of the Earth »), en occupant tout le spectre stylistique intermédiaire (« Futurola », etc…). « Double tranchant » car tout en servant habilement chaque compo par un réel effort d’adaptation, cette diversité n’aide pas à mettre en lumière la ligne directrice musicale du groupe.

Côté songwriting, le « jeune » groupe est au rendez-vous de ses ambitions, usant adroitement qui de riffs punchy, qui de leads percutantes et travaillées, qui de mélodies accrocheuses. Le tout est (bien) servi (évidemment) par une bonne prod bien costaude – « à l’américaine », quoi, où rien n’est laissé au hasard. Le mid-tempo énervé est à la fête, bien servi par un son de guitare gras et puissant, adroitement fuzzé, à l’image de « Futurola » ou « Push the Sky ». Le groupe explore aussi des voies moins balisées, avec des morceaux plus complexes, comme « Black Blood of the Earth » (début bourrin avec chant guttural caverneux et blast beat, ouvrant sur la deuxième moitié du titre des plages aériennes de plus pur stoner désertique) ou ce « Sayonara » à l’ambition un peu démesurée (13 minutes, c’est trop, même si la séquence mélodique est porteuse et pas mal pilotée sur la longueur). Au final, 6 chansons (8 avec les deux courts instrus, pas inintéressants pour autant) ça reste quand même peu pour se faire un avis définitif, même si le groupe a le bon goût de ne jamais se répéter entre chaque titre.

Ce premier véritable album de Blue Heron s’avère donc séduisant et prometteur. Il a les (petits défauts) de sa jeunesse : il montre beaucoup de choses, et il est donc un peu ardu d’en faire émerger une identité claire. Mais il y a de l’envie et du (bon) travail, et ce disque devrait contenter les amateurs de desert rock old school et de gros stoner US nerveux.

Note de Desert-Rock
   (7.5/10)

Note des visiteurs
   (9/10 - 2 votes)

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