MARS RED SKY (Nov. 2019)

Après une année bien chargée avec un nouvel album et une grande tournée, nous avons posé quelques questions à Mars Red Sky… Nous devions rencontrer Jimmy, Julien et Mathieu lors de leur escapade parisienne à l’Alhambra en novembre dernier mais leur emploi du temps était trop chargé. C’est donc par Skype que s’est réalisée cette interview…

Vous avez choisi d’enregistrer The task eternal sur vos terres girondines, tout comme le précédent opus Apex III. Pourquoi ?

Jimmy: Mars Red Sky est un groupe qui tourne beaucoup et on a créé ce groupe pour voyager (un peu trop même ces derniers temps !) mais au bout d’un moment, pour pouvoir concilier vie de famille et vie professionnelle, il apparaissait plus pertinent d’enregistrer ce nouvel album près de chez nous, tout simplement.

 

Et pourquoi vous avec choisi plus particulièrement de bosser dans un château médiéval ?

Mathieu: il faut savoir qu’on n’a pas réellement enregistré dans le château mais tout le processus d’écriture et de composition s’est effectivement passé là-bas. Pourquoi avoir choisi ce lieu ? Tout simplement parce qu’on rêvait depuis des années de faire un album de black metal et c’était l’occasion de rester fidèle aux traditions ! (rires) Plus sérieusement, on a eu cette opportunité et on voulait un lieu qui sorte de l’ordinaire, un endroit qui ne soit pas situé en plein centre-ville de Bordeaux mais sans pour autant se retrouver perdu au fin fond des montagnes… On a donc choisi ce château situé non loin de Marmande où l’on pouvait s’isoler tout en restant pas très loin de la maison. C’est par un ami de Jimmy qu’on a eu ce contact et c’est un château qui a été acheté et restauré par deux couples dans les années 70 et ils ont l’habitude d’accueillir des résidences, des stages de jazz, des séminaires de yoga et de méditation, ce genre de choses… On s’est retrouvés là-bas pendant plusieurs jours pour écrire et composer l’album.

Julien: On a surtout utilisé ce lieu pour tester les premières démos, trouver les structures principales des morceaux… On avait pensé un moment enregistrer toutes les parties de batterie de Mathieu là-bas car l’acoustique de la salle s’y prêtait plutôt bien mais la logistique était trop compliquée. Du coup, on s’est rabattu sur le studio Cryogène à Bordeaux dans lequel on avait enregistré l’album précédent.

 

Vous avez choisi de travailler à nouveau avec le producteur Gabriel Zander, qui avait déjà produit l’album Apex III...

Jimmy: Alors je t’arrête tout de suite car c’est faux ! C’est une mauvaise interprétation de la bio qu’on a mis en ligne et qui a été modifiée depuis… En fait, Gabriel a enregistré notre deuxième album, Stranded In Arcadia, au Brésil (suite au fameux incident avec les douanes) et il est venu au studio Cryogène pour Apex III mais pour The Task Eternal, nous n’avons pas travaillé avec lui…

 

 

The Task Eternal sonne parfois de façon très cinématographique, un peu comme la bande originale d’un film de la Hammer ou d’une série B de science-fiction des années 50. Le cinéma a-t-il une influence sur votre musique ?

Jimmy: Non, c’est nous qui avons une influence sur le cinéma ! (rires) Notre cinéma est nourri de notre musique et de nos visuels donc non, le cinéma n’a pas d’influence sur nous mais nous avons une influence sur NOTRE cinéma ! Pour développer un peu plus ma réponse, on a souvent ce genre de question, sans doute à cause de nos visuels assez développés (ce qui est un peu mon domaine de prédilection) mais je dois reconnaître que je n’ai pas une culture cinématographique hyper développée… Simplement, le cinéma d’anticipation nous botte tous les trois et on connaît les grands classiques du genre. Mais pour revenir à notre musique, elle est principalement progressive et assez psyché et donc, par déduction, assez cinématique dans son approche.

Julien: Je ne suis pas non plus un expert en cinéma de science-fiction mais je suis sensible à la musique qu’on peut mettre sur des images…

 

The Task Eternal est salué par la critique depuis sa sortie. Vous lisez toujours ce qui se dit sur vous, que ce soit les médias ou sur les réseaux sociaux ?

Mathieu: Personnellement, j’aime bien acheter les magazines de temps en temps, ça me fait plaisir d’aller au kiosque et découvrir une chronique qui parle de nous ! Mais les réseaux sociaux je suis moins fan car c’est un peu trop fourni pour moi, je préfère un bon vieux magazine, à l’ancienne ! (Jimmy et Julien éclatent de rire de leur côté…). Plus sérieusement, je dis souvent que les critiques ne m’atteignent pas mais quand je vois une critique positive sur l’album ou des commentaires de gens qui nous disent qu’ils nous aiment encore après quatre albums, ça fait forcément plaisir !

Jimmy : Pour cet album, on a eu un bon accueil des médias mais surtout du public. On sent qu’il s’est passé un truc par rapport aux 2 albums précédents. Il faut dire qu’on a commencé avec un premier album très identitaire qui a fédéré et catalysé un truc très fort avec le public et c’est difficile de continuer à plaire mais on s’est rendu compte en tournée que le public nous parlait de cet album, venait vers nous pour nous donner leur avis et ça c’est assez nouveau. Et “Hollow King” et “Crazy Hearth” sont les 2 morceaux qui reviennent le plus souvent dans les conversations.

Mathieu : Il faut dire qu’on joue beaucoup de nouveaux morceaux sur scène, plus que pour n’importe quel autre album à sa sortie…

 

J’ai toujours trouvé que vos chansons prenaient toute leur dimension en live. Quand vous composez, vous avez déjà en tête l’adaptation des chansons en live ?

Mathieu : A titre personnel, pour cet album, j’ai fait particulièrement attention à mes parties de batterie pour qu’elles soient « simples » à jouer en live, c’est-à-dire qu’elles ne soient pas trop exigeantes et qu’il soit possible de se libérer et d’être « au-dessus » de ce qu’on joue. Dans le château, je me disais « allez, tu cales bien ton truc, reste simple, comme ça tu ne le regretteras pas sur scène et tu seras bien content de regarder les copains qui, eux, mettent des notes partout » ! (rires)

Jimmy : C’est pas vrai, je ne mets pas des notes partout, je n’en mets qu’une et c’est toujours la même en plus ! (rires) De mon côté, j’ai surtout pensé à Mat car il galère, il est arrivé tard dans la batterie et son niveau est assez faible donc j’ai surtout pensé à ne pas l’envahir avec des trucs trop complexes pour lui parce qu’après, il a du mal à suivre et il perd ses marques et sa confiance ! Le niveau d’un groupe se mesure à celui de son batteur, ne l’oublions pas ! (rires)

 

 

Vous avez tourné avec des dizaines de groupes. Vous venez récemment de partager la scène avec Kadavar. Ça vous apporte quoi de jouer aux côtés d’autres groupes ?

Jimmy : Du public ! Question suivante ! (rires)

 

Mais non ! Même sans Kadavar, le public serait venu !

Mathieu : Peut-être, mais moins !

 

Le public aurait peut-être été différent aussi…

Jimmy : Pas forcément… Les gens sont venus nous voir car nous étions en deuxième position sur l’affiche et ceux qui nous aiment vraiment paient 5 euros de plus que d’habitude mais ils s’en foutent car maintenant, nos concerts coûtent 15 ou 18 euros à nous aussi ! Non, le plus, c’est qu’on a eu le public de Kadavar ! Par exemple, à Nantes, au lieu de jouer devant 250 personnes, on a joué devant 800 personnes ! Ça fait une grosse différence ! A Bordeaux, dans notre ville, au lieu de jouer devant 150 personnes, ils étaient 450 !

 

Chez Mars Red Sky, le visuel a une importance capitale et vos pochettes sont toutes des œuvres d’art qui vous identifient immédiatement. C’est important pour vous de sortir des albums sous de belles pochettes, comme au bon vieux temps ?

Julien : Absolument, et j’ajouterai qu’on est ravi de notre collaboration avec Carlos Olmo qui a réalisé toutes nos pochettes et qui travaille en étroite collaboration avec Jimmy. Jimmy lui donne les idées directrices et Carlos les met en forme et depuis le premier album, il a développé un truc qu’il essaie de faire évoluer au fil des pochettes qui est assez hallucinant, je trouve…

Jimmy : A la base, on lui avait demandé de s’inspirer de l’infographie des vieilles encyclopédies « Tout l’univers » des années 60. On collabore aussi avec plusieurs autres graphistes pour nos flyers et, de temps en temps, on fait appel à Carlos pour ces flyers aussi et tout récemment, on va bosser ensemble pour une éventuelle future tournée aux États-Unis. J’ai appelé Carlos pour lui dire : « tiens, j’imagine un drive-in avec des guitares à la place des voitures » et lui m’a répondu : « on pourrait tenter un truc post-apocalyptique » et on échange nos idées comme ça… Par exemple, pour la pochette de The Task Eternal, on n’arrivait pas à finaliser la pochette et on y a réfléchi tous les 4 avec Carlos jusqu’à ce qu’on se mette d’accord tous ensemble. On est en parfaite symbiose avec lui.

 

Vous avez énormément tourné en Europe, vous êtes même allé jusqu’aux Etats-Unis et en Amérique du sud. Vous avez des projets à court et moyen terme pour faire évoluer le groupe ?

Jimmy : Faire un peu moins de dates mais essayer de faire plus de festivals et des plateaux comme avec Kadavar et Hällas. En gros, faire moins de dates mais de meilleures dates et continuer à faire des projets spéciaux… On ne révèlera rien pour l’instant mais je pense qu’on refera un EP dans la continuité de Myramid. Ne pas rester dans le cercle « album/tournée/album/tournée » en fait…

Julien : Ça fait plusieurs années qu’on imagine un ciné-concert mais c’est assez difficile à organiser et pour trouver un diffuseur… Mais on ne désespère pas de pouvoir le faire un jour !

 

Vous êtes étiqueté groupe stoner mais cette étiquette est maintenant tellement vaste et comporte tellement de sous-genres qu’on finit par ne plus s’y retrouver ! Mais c’est quoi pur vous, un groupe stoner ?

Jimmy : On va laisser répondre Mathieu, il a une excellente théorie sur le sujet ! (rires)

Mathieu : Pour moi, le stoner, c’est un peu comme du rock seventies auquel on aurait enlevé le côté virtuose, c’est-à-dire qu’il ne reste que les riffs… En fait, c’est un terme assez réducteur et heureusement, il existe des centaines de groupes qui ne se content pas de balancer des riffs et c’est ce que Mars Red Sky essaie de faire : ne pas se cantonner à un genre (même si on a des influences clairement seventies) et essayer de pousser les choses un peu plus loin avec le chant de Julien qui vient contrebalancer le côté lourd de la musique. Et puis on rencontre plein de potes, on a l’impression d’appartenir à une niche, on s’y sent bien et ça permet également aux gens de nous identifier plus facilement…

Julien : Moi l’élément qui me plaît là-dedans c’est le son très marécageux des guitares mais pour moi, la base du stoner c’est Electric Wizard, Sleep, Acid King, Nebula… Des groupes avec un son de guitare très seventies, lancinant et répétitif…

Jimmy : … et surtout contemplatif, un terme qui nous correspond bien je trouve, aussi bien pour Mars Red Sky que pour les projets solos de Julien.

 

 

La musique électro française, à l’image de Daft Punk ou Justice, s’exporte parfaitement à l’international. Alors j’ai une question : est-ce que, comme le disait si bien John Lennon, «le rock français, c’est comme le vin anglais, ça n’existe pas ?» ou alors c’est plus un souci de manque de talents ou de reconnaissance par chez nous?

Mathieu : Je vais te dire une chose : en tournée, une fois par jour, on écoute Daft Punk ! C’est comme ça, c’est une obligation ! Alors au début, je t’avouerai que ça fait un peu mal mais en fait, à la fin, ça fait du bien ! On appelle ça un petit plaisir coupable… Parce que notre ingénieur du son, qu’on appelle « dieu », quand il arrive dans les salles (même dans les salles « à l’ancienne » comme on peut trouver en Allemagne), il vire tout le monde, il s’installe et il balance Daft Punk à fond dans la sono. C’est comme ça qu’il équilibre son installation et nous pendant ce temps-là, on installe le merch et du coup, on danse, on est contents et moi, j’aime bien Daft Punk, voilà ! Pour en revenir à la théorie de Lennon, j’ai longtemps été d’accord avec ça mais de nos jours, il y a quand même des groupes français qui s’exportent plutôt bien et qui n’ont rien à envier aux anglo-saxons…

 

Ils s’exportent mais ils ne marchent pas forcément en France…

Mathieu : C’est pas bien grave, tu sais… Je prends comme exemple Gojira qui est devenu une tête d’affiche internationale mais il y a plein de groupes français qui ont du talent, qui savent se prendre en main et qui font une jolie carrière. Donc je ne crois plus à cette vision qui est une vision du passé !

 

J’ai lu que vous étiez énormément influencés par la musique des années 60, Beatles, Jimi Hendrix, le rock psychédélique, le blues, Led Zeppelin… Qu’est-ce qui vous fait vibrer dans cette période ? Et peut-on espérer un jour un album 100% blues ou un album de reprises d’Hendrix ?

Mathieu : Alors je pense que pour l’album de reprises d’Hendrix, il faudra repasser ! Pour l’album 100% blues, le blues ce n’est pas quelque chose de figé et j’estime que d’une certaine manière, on fait du blues mais d’une façon très contemporaine.

Julien : Tous ces artistes font partie des influences qu’on aime, c’est certain. Il y a sans doute en ce moment une certaine nostalgie d’une époque et des productions de cette époque. Il n’y a qu’à voir le nombre de groupes actuels qui s’en inspirent, qui reprennent ces manières d’enregistrer et de produire leurs disques avec du matériel analogique par exemple. Et quand on regarde ce qui est sorti à l’époque, que ce soit les Beatles ou d’autres choses plus confidentielles, c’est génial de savoir que des spécialistes des sixties arrivent encore à découvrir des disques dont personne n’avait entendu parler, des petites perles, des groupes qui n’ont parfois sorti qu’un seul album qui est un chef-d’œuvre absolu comme Odeyssey And Oracle des Zombies par exemple… Tiens, d’ailleurs, j’ai écouté récemment le groupe Rush pour la première fois et c’est vraiment pas mal ! On sent bien que c’est une des principales influences de Tool…

 

Vous allez bientôt fêter vos 10 ans de carrière. Quand vous avez sorti votre premier opus en 2011, vous pensiez en être là où vous êtes aujourd’hui ? Et vous préparez quelque chose pour fêter ça ?

Jimmy : Cà fait effectivement dix ans qu’on est sur la route et on imagine pour septembre 2020 sortir une édition spéciale du premier album mais rien n’est encore certain. On y réfléchit parce qu’on a aussi pas mal de vidéos et de photos qui pourraient prendre place dans une édition collector, le tout mêlé à du matériel plus récent. On a aussi d’autres projets dans nos cartons comme un songbook mais il faut qu’on finalise tout ça.

 

Quels sont les albums qui vous ont marqué récemment en tant qu’auditeur?

Mathieu : Le dernier Alcest, Spiritual Instinct, est vraiment très bon. Le dernier Brad Mehldau, Finding Gabriel, reste l’un des meilleurs disques de l’année pour moi. J’ai bien aimé également le dernier Skeletonwitch, Devouring Radiant Light, groupe de punk-rock à tendance black. Le dernier Lysistrata est vraiment bon également, ils viennent juste de sortir leur deuxième album.

Jimmy : Moi j’ai découvert le dernier Amon Tobin récemment, il est mortel ! Je l’ai écouté en boucle ces derniers temps et c’est assez surprenant, j’avais lâché la musique électro il y a longtemps mais cet album est extrêmement organique et finalement très psyché. Et j’ajouterai le dernier album de The Great Old Ones, Cosmicism, qui est extra également, un peu dans la veine de Gojira, qui peut être fédérateur dans un style « de niche ». On vient d’ailleurs d’organiser leur concert la semaine dernière et c’était génial. Sans oublier Hällas, qui était avec nous sur le plateau aux côtés de Kadavar.

 

Dernière question: Henri Salvador a dit un jour que « la musique, c’est aussi grand que l’univers, il suffit juste d’oser ». Vous en pensez quoi?

Jimmy : On est d’accord, mais ça ne vaut quand même pas une bonne soirée entre copains en regardant La Soupe Aux Choux ! (rires) Et puis tu peux aussi oser à la Jean-Louis Costes et ça donne tout de suite autre chose !

Julien : On nous a parfois demandé si on pensait engager un autre guitariste mais je pense qu’on n’a pas encore fini d’explorer toutes les possibilités d’un trio. Mais je reconnais que la formule est jolie…

MARS RED SKY (février 2016)

Apex III – Praise For The Burning Soul, le troisième album des français de Mars Red Sky, chroniqué ici même, sort ces jours-ci. Entre tournée européenne et outre-Atlantique, l’année 2016 est une année bien chargée pour le groupe dont on attendait impatiemment le retour depuis le très remarqué « Stranded In Arcadia » sorti en 2014. Grâce à nos talents d’astronome, nous avons réussi à intercepter la météorite en plein vol, et nous en avons profité pour s’entretenir avec son chanteur et guitariste, Julien Pras.

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Stranded In Arcadia a été très bien accueilli par la critique. Cela a t il eu un impact sur l’écriture d’Apex III ?

Julien : Inconsciemment peut être, mais on n’y a pas trop réfléchi. On a surtout voulu trouver le temps de se retrouver tous les trois pour développer les idées accumulées au cours des derniers mois. Il y avait des idées germées en tournée, un riff qui sortait par ci par là, des bouts de morceaux composés à la maison que j’amenais aux autres… Je pense que dans le processus de composition, on sentait lorsque l’on avait quelque chose qui sentait la redite, nous ne voulions pas nous répéter et nous voulions avoir la satisfaction d’explorer d’autres territoires, d’aller plus loin dans certaines directions, de s’élargir..

 

L’intervention de Gabriel Zander sur Stranded in Arcadia était le fruit d’un heureux concours de circonstances. Cette fois, il est à la baguette sur l’ensemble du nouvel opus. Pourquoi ce choix ?

D’abord parce que ça s’était super bien passé avec lui, même si notre collaboration n’avait pas du tout été planifiée. On avait eu la chance de se trouver à un moment où nous étions bloqués sur Rio : nous avions un studio booké aux Etats Unis où nous n’avons pas pu aller à cause de problème d’immigration, on a été refoulés… Il nous avait finalement sauvé la mise et cela a également été une superbe rencontre humaine. Pour ce nouvel album, on a donc décidé de le faire plus posément à la maison, et on lui a donc proposé de venir chez nous, à Bordeaux.

 

A la manière de Radiohead avec Nigel Godrich, avez vous trouvé un producteur indispensable à la musique du groupe, une sorte de quatrième membre ?

Pas loin… Quelque part, en la personne de Pierre Fillon, qui est notre ingé son et avec qui on perfectionne chacun de nos lives, on a déjà notre quatrième membre… Mais c’est vrai qu’avec Gabriel on a peut être aussi développé ça. Tous les trois (les membres du groupe), on a vraiment une compréhension assez intuitive les uns des autres, et c’est un peu la même chose avec Gabriel. Il capte très bien ce que l’on veut faire, il est à l’écoute et amène des idées sans jamais être hyper-arrêté. Donc oui, il a vraiment un rôle de producteur, en plus du fait d’être aussi un très bon musicien. On verra dans le futur si il reste dans le groupe, en tout cas il y a des chances (rires).

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Sur Apex III, ta voix est particulièrement bien produite et éclaire le son du groupe d’un jour nouveau. Avez vous conscience de quitter le cadre dans lequel vous avez commencé ?

Clairement oui. C’est lié à ce que l’on disait avant : cette fois ci, on a pris plus de temps. On l’a fait à Bordeaux sur 15 jours et on a vraiment eu le temps de poser toutes les instrumentations. Toutes les voix lead ont été faites cette fois ci au studio avec Gabriel et Denis Jacob, un américain qui travaille avec Gabriel. Quand le moment est venu d’enregistrer les voix, ça tenait vraiment à cœur à Gabriel d’aller au fond des choses et d’enregistrer toutes les leads ensemble. On a vraiment posé des bases solides de chant. Sur certaines parties, il m’aiguillait en me disant : «  là ca serait bien que tu changes un peu cette partie », je lui proposais une autre mélodie, etc… Dès que j’avais un doute sur la prononciation d’un mot, il y avait aussi Denis pour me conseiller. Les leads sont vraiment solides alors que sur Stranded In Arcadia, les chants avaient tous été enregistrés à la maison. Par contre, concernant tous les arrangements, les chœurs, quelques parties chant de Jimmy, ça je les ai faits dans mon petit home studio à la maison.

 

Vos artworks sont toujours très travaillés et vos concerts utilisent souvent la vidéo, MRS semble accorder autant d’importance à l’image qu’au son. L’écoute d’Apex III est d’ailleurs très cinématographique, et évocatrice d’images. Le cinéma a t il une influence sur MRS ?

Le cinéma comme tout un tas d’autres choses en fait. Ce que tu viens de dire fait écho notamment à des livres que j’ai pu lire dont un qui a accompagné tout l’enregistrement et auquel on fait un clin d’oeil dans le titre « Praise For The Burning Soul », « The Burning Soul » étant un livre de John Connolly. Quand je lisais ce bouquin, ça résonnait avec la musique que nous étions en train d’enregistrer, comme si nous étions en train de faire la bande-son du livre. Sans pouvoir te citer un réalisateur en particulier, c’est toute une somme de films ou d’esthétiques auxquel nous sommes très sensibles. Je suis hyper sensible à la musique et à l’image, je trouve que la musique prend une ampleur grâce à un film, et vice versa. Jimmy a commencé à monter des vidéos à base de vieilles images d’archives pour un concert en particulier, et nous avons finalement continué à développer cette idée, pour faire vivre encore plus les morceaux. Notre ami Geoffrey Tores commence d’ailleurs a concevoir des vidéos propres à chaque morceau, d’ici la tournée en mars.

 

Vous comptez donc garder ce principe de concert alliant la vidéo…

Oui exactement !

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Pour revenir sur vos artworks, ils semblent être l’oeuvre d’une même personne depuis vos débuts, puisqu’on y retrouve le même « coup de pinceau » (motif flamme). Qui se cache derrière ces œuvres ?

Il s’appelle Carlos Pop. À la base, il avait fait l’intérieur de la première édition de notre premier album, avec cette comète utilisant une technique entre le collage et la peinture. C’est une technique qu’il n’a utilisé que pour nous et qu’il a réutilisé par la suite. La pochette du EP qui a suivi montre une comète s’écrasant sur une planète, et symbolise le départ de Benoit et l’arrivé de Mat [ndlr : Benoit est le premier batteur de MRS, Mat le nouveau]. Sur Stranded In Arcadia, on voit ensuite les pas sur la planète sur laquelle s’est échouée la comète et le vaisseau qui décolle. L’artwork d’Apex III représente l’intérieur d’un cockpit, avec trois sièges, mais il y avait un côté un peu trop SF, trop comics, qui dénotait avec le reste.. Du coup, Carlos a donc suggéré de voiler cela pour l’instant avec un carton emballant le disque, et à ceux qui auront le disque d’ouvrir les rideaux, de voir l’intérieur et de se retrouver dans le cockpit. Il y a donc tout un délire autour du voyage, avec cette vue sur l’espace, the light beyond

 

Vous prévoyez plusieurs dates aux USA cette année. Comment appréhendez-vous vos prestations outre atlantique ?

On est déjà surpris de voir qu’il y a une certaine attente, à un niveau tout relatif. On a déjà joué là bas en 2012 au South by Southwest, avec ensuite une petite tournée sur la côte ouest avec un groupe de Seattle, les Ancient Warlocks. Ca c’était très bien passé, et de fil en aiguille il y a eu d’autres occasions qui se sont présentées mais jamais concrétisées. Il y a eu aussi cette tournée avortée, bloqués au Brésil à cause d’un douanier faisant un peu de zèle et qui ne voulait pas croire que l’on avait participé au SXSW sans être payé, alors que c’était complètement le cas ! Tout avait été financé par la ville d’Angers, ce qui nous avait permis de faire 6 concerts là bas pendant la semaine… Cette fois ci, avec nos contrats de travail, il n’y aura pas de problème ! En tout cas, on est évidemment impatients de voir l’accueil qui nous sera réservé. Mais visiblement on est assez soutenus là bas, notamment par The Obelisk, qui est très emballé par ce que l’on fait. On a eu aussi pas mal de commandes de disques pour là bas, de bons retours sur facebook… Il y a moyen de faire de belles rencontres et de bonnes dates !

 

Vous serez notamment à l’affiche du Psycho Las Vegas. Comment avez vous trouvé ce plan ?

Pour moi, c’est encore presque irréel parce que ça s’est confirmé il y a très peu de temps. Pour l’instant, comme on est très focalisés sur la tournée européenne, je vois ça comme un truc presque optionnel alors que c’est pourtant confirmé donc il va falloir s’y faire (rires). Quelque part c’est presque flippant d’aller jouer à Las Vegas, dans le bon sens. Mais Austin s’étant très bien passé, il n’y a pas de raison que ca n’aille pas.

 

On vous retrouve aussi sur le Up In Smoke 7 auprès de Stoned Jesus et Belzebong. Y’a t il une appréhension particulière à partager une tournée en compagnie de groupes musicalement très éloignés du vôtre ?

Ah oui tu trouves ? Je trouve qu’on des affinités avec ces deux groupes, qu’on a eu l’occasion de croiser à plusieurs reprises et que l’on aime beaucoup. Ils sont tous les deux sur Sound Of Liberation, notre tourneur. Je pense que ça va être très enrichissant de tourner avec eux et de partager avec eux notre quotidien. Mais c’est vrai que musicalement on a peut être plus de similarités avec Stoned Jesus car ils ont un coté plus mélodique avec du chant.

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Jimmy est tourneur en dehors de ses activités avec le groupe. Pourquoi faire alors appel à Sound Of Liberation pour MRS ?

Tout simplement pour soulager la masse de travail. Et c’est aussi une super opportunité de travailler avec eux car ils travaillent avec des territoires avec lesquels ils sont en contact, alors que Jimmy se concentre sur la France. Cela nous offre ainsi plus de chances de jouer à l’étranger. Le management du groupe lui demande aussi pas mal de temps, ce serait vraiment trop de travail pour lui.

 

Peut on espérer voir naître d’autres side projects comme celui très réussi avec Year of no light ?

Éventuellement, nous avions pensé à faire quelque chose avec Glowsun. Sinon, Mat et moi sommes déjà pas mal occupés avec d’autres projets à côté. Me concernant, j’ai un projet solo orienté… folk, psyché, baroque… je ne sais pas comment dire (rires). Là je suis en train d’enregistrer un troisième album. Mat, lui, vient d’enregistrer un album avec James Leg, un musicien américain blues garage super bon. Il joue aussi dans les groupes Daria et Epiq, un trio metal africain.
Donc avec tout ça, on est déjà bien occupé ! J’ai aussi un projet folk avec ma copine…
En tout cas, une nouvelle collaboration n’est pas exclue car celle avec Year Of No Light était une super expérience. Ce sont aussi des copains de longues dates, j’étais à l’école avec Jérôme, le guitariste, c’est un très bon pote à moi.. C’était vraiment chouette de se retrouver dans un local de repet’, ca faisait super longtemps que je n’avais pas joué avec lui, on jouait ensemble au collège et là on s’était retrouvés dans ce contexte. Il avait amené un bout de riff, j’avais amené un bout de riff, on avait mélangé tout ça… Il y a tellement de groupes avec lesquels ce serait chouette de faire ça, je pense notamment à Yeti Lane avec qui nous allons jouer le 4 avril…

 

Belzebong ?

(rires) Pourquoi pas ! S’ils ont besoin d’un chanteur un jour, je ferais bien quelques lead vocal sur un morceau. S’ils demandent, je serais présent !

 

 

MARS RED SKY (Octobre 2014)

C’est lors du Up in Smoke, que Mars Red Sky a bien voulu répondre à nos menues questions. Après avoir aidé les lascars avec leur merch, taillé le bout de gras avec le chanteur sur ses albums solo, j’ai la chance d’avoir, attablés autour de moi Julien, Jimmy et Matgaz pour ce qui va s’avérer être une heure de discussion passionnante sur le groupe, son dernier album, sa vision de la musique, le tout au son du live de Lonely Kamel (dont le set se déroule sur la scène à côté) qui viendra ajouter un peu de suspens à l’interview, les chameaux ne lésinant pas sur les décibels.

Quelques heures plus tard, Mars Red Sky allait mettre le Up In Smoke à genoux avec un show maîtrisé, un son aux petits oignons mixé par Dieu, leur ingé-son, et une interprétation surpiquée velours 4 étoiles de leur dernier album. On ne le répétera jamais assez, Mars Red Sky est un grand groupe. Merci Messieurs.

 

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Parlons un peu de « Stranded in Arcadia » voulez-vous ? On peut revenir sur sa « naissance » brésilienne ?

Jimmy – On devait enchaîner quatre dates brésiliennes en septembre 2013 avec une date argentine puis partir sur la côte ouest américaine pour enregistrer l’album. On s’est retrouvés finalement coincés au Brésil pour des histoires de papiers…

Matgaz – Oui, avec le choix de rester une semaine à se dorer la pilule sous le soleil sud-américain ou bien mettre ce temps à profit.

Jimmy – Du coup, notre ami Felipe (qui a monté la tournée brésilienne) nous a hébergé et nous a mis en contact avec Gabriel Zander qui possède le studio d’enregistrement Superfuzz sur Rio. La belle rencontre est là. En quatre jours nous avons mis en boite la quasi-totalité des titres, exceptés pour les voix.

 

Gabriel Zander donc…

Julien – Il a tout de suite compris notre univers. Il était venu nous voir jouer quelques jours auparavant et a su capter le feeling que l’on voulait. Son mix de « Hovering Satellites » nous a convaincu. C’est un morceau important, qui devait représenter Stranded.

Matgaz – Il est musicien aussi avec une réelle écoute. Il a su nous orienter et accompagner les idées avec intelligence.

 

J’imagine que la collaboration ne fait que commencer ?

Julien – C’est sûr qu’on a très envie de retravailler avec lui.

 

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Revenons sur l’album. Avez-vous déjà joué « Stranded in Arcadia » dans sa totalité ? En écoutant l’album dans la voiture en venant, on constatait l’étonnante cohérence de la tracklist et de son évolution.

Jimmy – On ne l’a pas encore joué comme ça. On commence souvent nos set par le dernier morceau, « Beyond the light » mais ça pourrait être intéressant de le proposer tel qu’il a été pensé.

C’est cool de le percevoir de cette manière. De manière générale, on travaille toujours la cohérence de l’édifice, de son ensemble, afin de proposer une vision globale de notre musique. De la vidéo au sonnous faisons vraiment attention [ndlr : ce qui transpire vraiment en live, le groupe proposant une immersion totale] . Un peu a l’image du « Into the Mars Red Sound » [ndlr : soirée spéciale pour la sortie de leur album qui se déroulait sur plusieurs strates artistiques, expositions, création sonore et concert bien sûr, ndlr].

 

J’écoute vraiment cet album avec l’idée de boucles et de points de ruptures, avec cet « Arcadia » et sa double pédale…

Matgaz – Y en a pas…

 

C’est porc !

Matgaz – Merci ! (rire)

 

D’ailleurs, quand est-venue cette idée du chant frêle et délicat avec cette base musicale très sourde, heavy, grave ?

Julien – Elle est là depuis le début de Mard Red Sky quand avec l’ancien batteur, Benoit Busser, nous avons créé le groupe. Je voulais dès le départ cette association avec un son de gratte fuzzé, joué à la Big Muff, ça a donné « Strong Reflection ».

 

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Ouvrons un peu le chapitre « on the road ». Comment vous êtes-vous retrouvés à ouvrir pour Détroit (le nouveau groupe de Bertrand Cantat) ?

Matgaz – C’est eux qui nous ont demandé. Ils avaient l’habitude d’emmener des groupes qu’ils aimaient faire leur première partie lors de Noir Désir déjà. Pour ce nouveau projet et cette tournée, c’est tombé sur nous.

 

Comment a réagi le public de Détroit à l’univers de Mars Red Sky du coup ?

Jimmy – Bien. Très bien même. Les gens venaient nous voir à la fin pour nous dire qu’ils avaient apprécié et que c’était une très bonne découverte pour eux. On ne regrette pas du tout d’avoir dit oui et d’avoir pu toucher un public différent de celui que l’on côtoie habituellement.

 

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En parlant d’ouverture, comment vous êtes vous retrouvés à signer chez Listenable Record, un label plutôt métal ?

Jimmy – Une fois de plus, c’est eux qui sont venus nous voir. Alors, certes, c’est un label typé métal mais quand on voit le travail de développement qu’ils ont fait, notamment pour Gojira, on y a vu une belle opportunité pour nous.

Matgaz – C’est aussi le fait de pouvoir toucher un public plus « métal » que le nôtre, d’ouvrir le champ des possibles.

Julien – Oui, et évidemment, les mecs de Listenable sont avant tout des gens adorables, ce qui ne gâche rien.

 

Pourquoi sont-ils venus vous voir, vous, à votre avis ?

Jimmy – Peut-être l’intérêt d’avoir un groupe un peu différent dans leur catalogue, pouvoir proposer une touche visuelle, psyché à leur public.

Matgaz – Oui, et espérons que ça soit aussi parce qu’ils aiment notre zic ! (rire)

 

Quelques mois après, contents du choix d’avoir intégré le label ?

Jimmy – Oui. Toujours très content.

 

mrs-tour

 

Comment expliquez-vous le fait de tourner plus à l’étranger qu’en France ?

Jimmy – Très simplement. C’est que les lieux, les offres et opportunités y étaient les plus nombreuses. Mais le phénomène tend à diminuer. Les initiatives sont plus nombreuses maintenant en France, l’essor du mouvement « stoner » prenant plus d’ampleur. On le voit avec les Stoned Gathering à Paris…

 

Ou les « Make it Sabbathy » sur Bordeaux…

Jimmy – tout à fait. On va faire notre 11ème plateau bientôt avec toujours un bon retour du public sur les concerts et la programmation. [ndlr : maintenant 12ème ou 13ème édition avec par exemple Kadavar dernièrement]

 

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