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En ces temps faméliques pour tous gourmands de la chose live, la résistance s’organise sur le net, les groupes proposant de plus en plus de concerts en live via des plateformes de streaming. Le procédé fait débat et divise les fans. « Pourquoi payer pour une vidéo » se disent ceux qui ont le Youtube facile, « rien ne vaut l’incomparable sensation d’un vrai concert » argue le sensé. Oui. Oui mais cela fait désormais 8 mois que les salles se sont tues, et le spectacle vivant avec elles. Foutu virus. Alors lorsque Paradise Lost a annoncé proposer un Stream exclusif « At The Mill », un night club de Bradford, via la plateforme digitale Stageit, il nous a semblé important d’en être, pour voir un peu quelles sensations cela procure, de faire un concert sur son canapé.
21h, le casque sur les oreilles, le jogging Black Sabbath sous le plaid, une bière à la main et les copains sur Messenger, le concert peut démarrer.

Tout de noir vêtu, le visage fermé (les membres de Paradise Lost ne sont pas sur scène les plus joviaux mais pour le coup le stress est palpable), Nick Holmes et ses comparses ouvrent avec « Widow », premier extrait d’Icon. Le son est excellent, la résolution vidéo aussi (il est possible de la baisser pour s’adapter à votre débit). Le chat de la plateforme déborde de messages, l’opération semble être un succès. Seul Waltteri Väyrynen (ci désigné « le batteur », hors de question de réécrire une seconde fois son nom) voit son poste de travail adapté, puisqu’il joue derrière un plexiglass. Le son énorme, ample du groupe fait la part belle à la basse de Steve Edmondson, qui emplit l’espace sonore d’un son rond, un poil fuzzé. Le groupe propose ce soir 3 extraits d’Obsidian, joués lives pour la première fois (« Fall From Grace », « Ghosts » et « Darker Thoughs », les trois pépites de l’album) au milieu de titres plus attendus. C’est d’ailleurs là un peu le reproche à faire à ce concert : la set list est très classique, et courte, 50 minutes pour un ticket classique (10 dollars) et 1h20 pour le ticket VIP (15 dollars, suivi d’une session interview certes intéressante mais que l’on aurait aisément remplacée par « Hallowed Land » et « The Longest Winter »). L’absence de communication entre les morceaux aussi est dommageable (“mais pour parler à qui ?” me diriez vous, lorsque l’on ne peut avoir aucun retours du public ?), rendant ce concert certes excellent dans sa réalisation mais un peu sans âme, l’ajout de bandes enregistrées allant aussi un peu dans ce sens. Mais quels morceaux cependant ! « Faith Divides Us », « As I Die » et même le très dansant « So Much is Lost » issu de Host font à coup sûr chanter dans de nombreux salons d’à travers le monde.
Au final un excellent moment, sensation amplifié par l’effet de manque, malgré une ambiance un peu étrange et une set list convenue. De quoi se laisser tenter pour un autre Stream, en attendant que la vie, la vraie puisse un jour reprendre.
SET LIST
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- Widow
- Fall From Grace
- Blood And Chaos
- Faith Divides Us
- Gothic
- Shadowkings
- One Second
- Ghost
- The Enemy
- As I Die
- Requiem
- No Hope In Sight
- Embers Fire
- Beneath Broken Earth
- So Much is Lost
- Darker Throughts

Ce soir la France a peur! Alors que le président de la république doit annoncer la fin du monde de la culture, une petite ville résiste encore et toujours à l’envahisseur. Une fois de plus l’association Erato est en lutte pour proposer dans l’écrin de La scène Michelet une soirée pleine de gras acoustique et de subtilités ensablées. C’est Grandma’s Ashes qui ouvrira la soirée comme à l’accoutumée désormais, en deux sets successifs devant 45 personnes assises chacun. Puis ce sera au tour de Red Sun Atacama de se prêter à l’exercice.
 Grandma’s Ashes
Il est 20h10 et Chloé chanteuse de Djiin et organisatrice vient gueuler en terrasse l’ouverture de la salle. Chacun monte alors prendre place sur chaise et c’est un acte toujours déstabilisant de se dire que l’on va assister à un concert pimenté le cul posé. Les trois musiciennes de Grandma’s Ashes montent sur scène, prennent leurs marques et rapidement enchaînent les riffs de leur musique qu’elles définissent comme un mélange de punk et Stoner notamment.
Il faut rapidement retirer les bouchons d’oreille car aux premiers rangs la saturation est intenable. Une fois le conduit auditif libéré on peut se rassurer, la balance est tout à fait correcte. Le trio de Parisiennes délivre une musique où sonnent quelques accents grunges. Il y a du Muse là-dedans aussi et si le groupe ne joue pas les copy cat c’est un constat au travers duquel on ne saurait passer. La musique de Grandma’s Ashes transpire et goute l’acidité, en cela on ressent une volonté punk d’en découdre et le jeu sait se faire violent à bon escient. Dans leur phrasé néanmoins on a parfois du mal à suivre la logique qui les anime, l’asymétrie des morceaux étant souvent perturbante. Lorsque le chant trouve les rails et que le chœur entamé tend à un moment de plaisir intense, souvent la gratte cherche à s’exprimer plus avant et prends des risques puis la rythmique prend un virage à 180° et la batterie rattrapée par la basse fait voler en éclat les morceaux.
Grandma’s Ashes se complait dans une sorte d’expérimentation sonore qui désarçonne l’auditeur. Autant dire qu’il n’y a pas chez elles de consensus et la volonté des gonzesses n’est pas de sombrer dans le conformisme. Quitte à livrer un patchwork musical où le public aurait été moins désarçonné grâce à quelques transitions. Qu’importe le plaisir est intact lorsque l’on garde à l’esprit les accès de rage et les quelques tours de passepasse du côté des cordes qui n’étaient pas piqués des vers.
Le temps d’une causerie autour d’une bière bien méritée et d’une perception assez partagée du set que l’on vient de vivre et c’est à nouveau l’heure de venir se caler devant la scène. Red Sun Atacama a déjà investi les planches et les brûlent de leur impatience de se lancer dans le set. Voilà plus d’un an que le groupe n’a pas jeté sa hargne à la face du public.
 Red Sun Atacama
A peine la salle remplie, déjà Clém le bassiste demande si le temps imparti permet de se lancer dans une jam session. On sent bien que les gars ont besoin de se défouler avant d’attaquer les choses sérieuses. Le trio n’attend pas, il démonte la salle à coup de riffs et on se demande comment le public accepte la frustration de rester assis. On se demande aussi comment le premier rang évite la baguette qui glisse de la main du batteur à la fin du premier échange. Le plaisir est communicatif et le titre “Gold” ajoute de la pression sous le couvercle de la salle. Red Sun Atacama offre un investissement total dans le show. Jamais poseurs les gratteux se mettent en avant juste ce qu’il faut pour enivrer le public et valoriser leur musique.
Ce soir le trio vient proposer ses nouveaux titres, on ne s’arrête pas de vivre parce qu’on a pas repris la scène depuis longtemps et c’est après une intro à l’orientation très blues que les gonzes font voler en éclat ce qui aurait pu rester de calme dans chaque auditeur présent et faisant ainsi naître des sourires que l’on imagine plein de dents derrière les masques.
Red Sun Atacama a pleinement profité de l’acoustique de la salle et fini de me convaincre, si c’était encore nécessaire, qu’il s’agit d’un groupe de scène, un groupe vivant à la musique lumineuse. Plus au point que la dernière fois où j’avais pu profiter de leur set en première partie de Black Rainbows, à présent ils jouent l’absolu collectif dans une sorte de triptyque où le plat passe de la batterie à la basse puis à la guitare. Cette fois-ci Red Sun Atacama profite jusqu’à la dernière seconde, les parisiens se ravissent de leurs dernières 7 minutes quitte à accélérer le tempo. Plus d’un ce soir sortira de la salle avec une seule hâte, celle d’être au prochain album l’an prochain, rendez-vous est pris.
On descend les oreille bourdonnantes, ravis d’avoir encore pu participer à une soirée vivante et musicale grâce à deux groupes de qualité et l’opiniâtreté de lieux et d’orgas qui luttent dans une période critique. Au moment de se dire au revoir on apprend les annonces de la soirée. Une chape de plomb est tombée sur une bonne parties grands villes de France et le couvre-feu décrété annonce des jours encore bien sombres pour pas mal d’acteurs de la culture. Comme à Nantes quelques-uns passent pour cette fois au travers des gouttes, espérons que cela durera, en attendant ce n’est pas ça qui viendra gâcher le plaisir pris ce soir ni l’envie de remettre ça le plus tôt possible.


Ce vendredi soir je fête deux anniversaires en un. La première date n’est pas des moindres puisqu’il s’agit du 13e anniversaire de la scène Michelet, bastion metal et grand pourfendeur de la cause du rock sablonneux. Le lieu a organisé pour l’occasion un cycle des plus sérieux avec une série de dates aux styles variés. La deuxième date est plus anodine, il s’agit de mon sixième mois sans concert et autant vous dire que ça n’a pas été simple et de fait je traine mes guêtres ce soir d’une façon un peu particulière pour retrouver le lieu du crime. Car oui, en effet, mon dernier concert avait été notamment celui de Wormsand, groupe qui ouvre de nouveau ce soir ! Je clos donc la faille spatiotemporelle et me lance dans cette soirée à l’organisation toute Covidienne où les groupes auront le devoir de satisfaire deux salves d’auditeurs. Deux sets d’affilé pour chacun afin de permettre d’organiser des concerts à jauge réduite,le public en roulement, masqué et assis au sol dans le respect le plus strict des normes sanitaires.

D’office Wormsand balance des riffs d’une lourdeur saisissante, le power trio est à l’évidence plus au point que lors de son dernier passage. Le groupe de Menton distille de la première a la dernière composition une atmosphère à la fois lourde et éthérée. Assénant les parpaings les gars jouent sans retenue séduisant les têtes qui dodelines ou donnent de la nuque pour suivre la variété de rythmes. Au chant on assiste à une alternance entre le cri déchiré de Julien le guitariste et la clarté de celui de Clément à la basse. Un grand écart qui semble-t-il donne plus de gage du côté du bassiste. Pourtant il faut admettre que le tout accompagné d’accords et arpèges dérangeants laisse souvent un arrière-goût de malsain, de poisseux qui produit un effet de fascination dans la fosse. Il s’agit d’un fragile déséquilibre où la batterie joue sur le contretemps et quand elle assène les bûches est accompagnée de violentes gesticulations scéniques de part et d’autres. La démonstration de puissance de Wormsand aura étiré les meilleures phrases de leurs compositions connues et permis la présentation de petites dernières. Le public sort convaincu et les tapis chauffés pour accueillir la première vague d’auditeurs pour le groupe suivant.
L’entrée en matière de The Necromancers est laborieuse, il faut que l’ingé son s’y reprenne à trois fois pour lancer la musique du thème d’introduction. Finalement c’est parti, juste à temps car les vannes commencent à fuser dans la salle.

Dès les premières notes de “Secular Lord” c’est une putain de vague démoniaque qui emporte les spéctateurs., la puissance des phrases est sans appel alors que déboulent les titres les plus ravageurs du groupe, monte l’envie d’aller au contact. Oui c’est bel et bien frustrant que de devoir suivre un tel set assis sans pouvoir profiter de l’énergie collective qui se dégage d’une fosse qui chahute. Espérons qu’ils reviennent ces concerts moites de corps en transe, un morceau comme “Lucifer’s Kin” n’aurait mérité que cela pour accompagner son introduction nantie d’une basse pachydermique et les lames de fond des grattes où l’on se fait gifler en prime par la grande maîtrise vocale de Tom qui passe avec aisance de la rocaille au plus suave des chant.
Comme pour tous les sets des Pictaviens il est impossible de ne pas fixer le visage possédé de Benjamin derrière ses fûts. En particulier lorsqu’il attaque “Black Marble House” en roulant des yeux déments. Le quartet entonne ses thèmes et lorsque ces derniers sont répétés à en être usés jusqu’à la corde comme présentement, le public en redemande encore, prêt à tout sacrifice sur l’autel de la grosse caisse et du riff poutracier

Relisant son album Servants ofThe Salem Girl , The Necromancers invoque les pouvoir ancestraux de la sorcière et offre au sabbat convoqué ce soir “Salem Girls Part II” puis “Part I”. Finissant par envouter la totalité de l’auditoire et démontrant qu’ils ont signé un pacte avec Lucifer au nom de la qualité.
Au moment de sortir, le corps transporté par la joie d’être revenu dans l’arène, au détour d’une conversation on découvre les set lists et s’aperçoit que les deux sets de The Necromancers n’étaient pas les mêmes…quel dommage de n’avoir pas pu en profiter, certes, mais quel bonheur que d’avoir pu remettre les pieds devant une scène grâce à l’association résidente de la salle, Erato qui aura eu le courage de passer la tempête sanitaire et la force de nous rassasier les esgourdes, longue vie à elle et ses congénères.

Il y a 25 ans, Down débarquait sur la scène musicale et sortait son premier album, toujours référentiel aujourd’hui, NOLA. Un super-groupe complètement initié par Phil Anselmo, première illustration significative de la gloutonnerie musicale du frontman de Pantera (pour rappel, Pantera à l’époque était au sommet de sa carrière). Anselmo y rassemble quelques potes dont il présume que leur amour partagé pour Trouble et Saint Vitus, mêlé à leur background musical et un fort enracinement louisianais, rendront ce projet spécial. Et il le fut, amenant le sludge à un niveau de reconnaissance que l’on connaît aujourd’hui, et tirant dans son aspiration bon nombre de formations louisianaises qui n’auraient sans ça probablement jamais rencontré le succès.
Il apparaissait donc logique, en 2020, de fêter comme il se doit les 25 ans de ce premier disque. Down avait donc prévu d’arpenter le vieux continent (et d’autres), pour célébrer cet anniversaire en interprétant l’intégralité de l’album sur diverses scènes et festival (rappelez-vous, on devait les retrouver à l’affiche du Hellfest en juin). Et pour l’occasion, c’est le line-up originel qui a été mobilisé, alors que ces dernières années ont vu la formation live du groupe fluctuer, du fait notamment des engagements respectifs des musiciens avec leurs autres groupes. Petit écart de principe, c’est le bassiste actuel du groupe, le nonchalant mais solide Pat Bruders, qui tient l’instrument à la place du pourtant espéré Todd Strange.
La démarche était séduisante et on s’en pourléchait les babines à l’avance… mais le COVID-19 est passé par là, tuant cette initiative dans l’œuf. Symboliquement, ne rien faire en 2020 semblait inenvisageable, et c’est en version “dématérialisée” que la solution sera trouvée. Le groupe reprend donc son cycle de répétitions, met en place les conditions de “streaming” optimales, et donne rendez-vous aux fans le 29 août, à minuit pour les français, en échange d’une petite contribution de moins de 8 eur (dont 10% sont reversés à un fond de soutien à la nation unie Houna, une tribu indienne ancestrale implantée dans près de la Nouvelle Orléans).
Il est aussi stérile que vain de parlementer sur l’intérêt d’un concert derrière un écran plutôt que devant une scène. Le fait est que le second choix est impossible, et qu’on oublie un peu vite qu’on a tous passé des heures carrées derrières nos écrans de PC, DVD ou même cassettes VHS pour les plus anciens, à regarder des concerts ! C’est donc une forme un peu hybride qui nous est proposée ici, et au diable les plus bégueules et autres pisse-froid – on ne crachera pas dans la soupe.
A l’heure dite, c’est finalement une succession de reportages courts, interviews et petits sketches qui nous accueille et non pas le concert, qui commencera trois quarts d’heure plus tard. Enfin, donc la scène apparaît sur l’écran, sombre mais vaste, avec deux grands écrans latéraux (largement sous-exploités durant le set), baignée par un light show pro (aux tons très jaunes / rouge). Les musiciens sont tous là, menés par un Phil Anselmo bien crampé en front de scène, bien au milieu, sur son pied de micro.

Ça démarre de manière assez décousue sur la montée en régime de “Eyes of the South”, autour de quelques impros de Keenan, et très vite les planètes s’alignent pour une intro massue et rassurante. Assez rapidement, la mise en son efficace nous rassure, on va pouvoir monter le volume des haut parleurs… Les speechs d’Anselmo entre les morceaux sont trop bas, mais on n’est pas là pour ça, donc pas très grave. Les musiciens sont en forme et efficaces, ça joue bien et fort. Les gars sont aussi concentrés sur leur prestation que contents d’être ensemble, c’est évident.

Et l’interprétation en bénéficie largement, avec des titres qui, même s’ils gardent leur forme initiale, font l’objet de quelques adaptations maîtrisées. On lèvera les sourcils d’étonnement à l’écoute de quelques harmonies guitare un peu dissonantes entre Keenan et Windstein, mais au final, l’ensemble est très solide et tient furieusement la route. Même Anselmo, dont le niveau de forme ces dernières années n’a pas toujours été un long fleuve tranquille, s’avère appliqué et plutôt en voix – en tout cas rarement pris en défaut.

Les morceaux de l’album sont interprétés dans le désordre, et le groupe inclut même trois titres du second album, pour enrichir un peu le set (dont “Lysergik Funeral Procession”, interrompu sur son intro, mais relancé par Anselmo comme si de rien n’était). A noter que le groupe jouera aussi le très planant “Jail”, en mode assis au calme… Un morceau enregistré séparément, avant le concert, dont la transition fut un peu dégradée par un problème technique. Cette parenthèse leur permettra de se ragaillardir et de revenir pour un final au taquet. A son habitude, Down termine sur “Bury Me in Smoke”, où à la fin les guitares sont passées à quelques potes (dont Katie la femme d’Anselmo) pour finir de labourer le dernier riff ad lib dans le bordel le plus absolu.

Bref, on aura passé un très bon moment devant ce set, qui nous aura proposé une petite bouffée d’air frais dans un milieu musical pour le moins sclérosé. Il y avait des pains, des clins d’œil, des private jokes entre musiciens… Comme sur scène ! Exactement ce dont on avait besoin.



EyeHateGod, dernier concert avant la fin du monde, uchroni-que de concert.
Mercredi 03 mars 2021. 353 jours de confinements. Bientôt une année cloitré à la maison. Dehors le ciel est gris et les rues désertes. La végétation a, par de nombreux endroits, repris ses droits sur le béton. Je suis sorti ce matin troquer mes deux derniers vinyles de Motörhead contre un rouleau de PQ. Sur le gros millier de disques de ma collection, il ne m’en reste qu’une petite dizaine. Les 6 premiers de Black Sabbath, avec lesquels je souhaite être enterré, un Sleep, un Kyuss, un Blues Pills que personne n’a voulu reprendre. Et Take As Needed For Pain d’Eyehategod dont la pochette, dérangeante au possible, semble aujourd’hui me dévisager.
Cela fait un an jour pour jour que j’ai assisté à mon dernier concert, dix jours à peine avant que le président de la république annonce les premières mesures de confinement. Lorsque je ferme les yeux je repense au show clinique de Misery Index, à la rage de quinquas de Napalm Death. Qu’est ce qu’on avait guinché avec les copains à la Machine du Moulin Rouge ce soir là. Mais mon grand souvenir de cette dernière nuit d’insouciance reste le show d’EyeHateGod. C’est que les quatre New Orléanais avaient cassé la baraque.

Dès l’entrée de Jimmy Bower, en Crocs et jogging informe, avec ses yeux dans le vague et ses tics de drogués, on a compris que l’on allait vivre un moment unique. Le genre de concerts où personne ne dictera le tempo. Mike Williams lui, tee-shirt Motörhead sous veste kaki, se présente au public en se mouchant sur les premiers rangs. Une salve de doigts d’honneur plus tard, le concert peut commencer. Et quel concert. Tout est sur le fil, agressif, sans compromission. Une déclaration de guerre à ceux qui ne sont pas là pour les écouter. « Lack Of Almost Everything », le premier titre joué prend un sens spécial dans ce contexte. On voit bien le téléphone dans la poche informe de Bower, on voit l’écran s’allumer à travers le tissu lorsqu’il reçoit une notification. Et le moins que l’on puisse dire c’est qu’il s’en fout. Il balance riff sur riff, semble parfois être sur une autre planète que ses collègues. Son accordage est co(s)mique. « Parish Motel Sickness » : la fosse fond un boulon. Il pleut des coudes, même les plus braves mordent le plancher. Certains s’envolent et ne retombent jamais. « Sisterfucker », les deux parties. Les doigts se lèvent, encore. On s’invective, on célèbre le sale. Riffs, riffs, riffs, riffs. On voit bien qu’une partie du public, reculé, inquiet, ne comprend rien à notre catharsis. Certains rient dans le coin. Lorsque finissent les dernières notes de « New Orleans Is The New Vietnam » ils n’ont plus de dents et leurs sourires ont fait place à des trous béants déformés par la douleur. Nous sommes exsangues mais pétris de bonheur. Les gorges hurlent, les poings acclament, donnent du respect.
Le concert s’est ouvert sur un long larsen et s’est refermé de la même façon. Nous étanchons notre sueur et notre plaisir d’une pinte sans goût. Au merch une femme, qui a longtemps été un homme, nous énonce, hilare, toutes les insanités qu’elle connaît dans toutes les langues des pays qu’elle a traversés. « Runka Min Kuk ! » ah oui je la connais aussi celle là.
Un tee shirt sous le bras je rejoins le métro. Les gens sont pâles, mon voisin de siège tousse. Il semble fiévreux. Je quitte la rame station Porte de Versailles pour récupérer ma voiture, sans remarquer que le fiévreux tombe de son siège. Quel concert, quel chaos, quel bonheur.
Une pensée bien sûr pour les organisateurs de concerts, les techniciens du spectacle, les groupes et tous ceux impactés de près ou de loin par cette situation. Espérons tous en rire dans quelques semaines, une bière à la main tandis qu’un groupe s’échinera à nous luxer la nuque sur une quelconque scène à Paris ou ailleurs.

Voilà quelques temps que je m’étais promis de profiter du prochain passage à Nantes des Manceaux de Stone From The Sky pour aller découvrir ce que donne leur prestation live. Donc, voyant se dérouler l’affiche de leur mini tournée de ce début d’année et leur passage à Nantes, j’en ai profité pour aller jeter une oreille sur ces gaillards ainsi que sur Wormsand dont on m’avait dit le plus grand bien. Pourquoi se priver d’une soirée sous les auspices de l’association Erato qui se décarcasse si bien pour faire émerger les talents parfois confidentiels de notre scène ou trop souvent les mastodontes règnent sans partage?
 Black Horns
Nous voici donc encore une fois à la scène Michelet et ce soir c’est Black Horns qui a pour tâche d’ouvrir le bal. Cet étonnant duo Rennais a déjà à son actif un EP et un LP et les deux bonshommes ne sont pas venus faire autre chose que jouer. Ils associent l’art minimaliste du duo à un je-m’en-foutisme salutaire. Les gars produisent un son qui appartient à beaucoup d’autres groupes sans pour autant en être la copie conforme.
Black Horns tire une originalité délicieuse de la base du genre. La gratte exhale une haleine pas nette où suinte un fond d’ordure. Mais derrière la crasse faussement étalée il y a une réelle maîtrise. Le public ne s’y trompe pas et tends la joue pour se faire tarter comme dans un concours de baffe du fin fond de la Sibérie. C’est sludgy, muddy et alcoolisé comme il faut. La nonchalance d’Adri à la gratte est porteuse. Sa voix du fond du bayou ajoutée au swing de Tom derrière ses fûts offrent une palette de jeu virant du blues au doom en passant par le sludge. Carton plein pour Black Horn qui conquiert la salle et fini le préchauffage de la machine avec une efficacité remarquable.
Wormsand étant de Menton, ville à la réputation gériatrique, on aurait pu croire que le temps ne nous était pas compté et pourtant, à peine le temps de s’offrir quelques mondanités houblonnées et le trio vient se cramer la plante des pieds sur les planches encore chaudes du précédent set.
 Wormsand
Une énergie juvénile déborde de ces gars un brin poseurs mais séduisants de fougue. Wormsand met quelques minutes à convaincre son auditoire mais pour des raisons techniques où le guitariste frôle la colère. Heureusement le public est bienveillant et les gesticulations énergiques ainsi que les idées prometteuses de la musique ont tôt fait d’enthousiasmer la salle. Les efforts musicaux naviguent dans une nappe continue d’un même gruau quasi doom l’ensemble est pesant à souhait. Emerge de la masse le chant qui touche plus au cri rauque qu’à l’angélus. Ce doom sombre ou pointe (poutre?) parfois la lumière fait bien son office ce soir même si une respiration de temps en temps n’aurait pas nuit il est indéniable que les accords qui séduisent l’oreille feront de Wormsand un groupe à suivre toujours plus attentivement et à revoir sur les planches avec (encore) quelques bornes de plus au compteur pour savourer pleinement leur musique et y trouver les tanins propres aux vieux routards sludge qu’ils promettent de devenir.
Voici venu enfin la prestation qui m’a décidé à venir ce soir. Stone From The Sky avait récolté quelques lauriers l’an passé au sein de notre rédaction et sur ce sujet mon insistance sur la qualité du groupe a dû déplacer hors du cadre le concept d’objectivité. Pour autant le trio va immédiatement démontrer la qualité de ses compositions en ouvrant avec “Inside the Dalek” et poursuivant avec “Vena Cava”.
 Stone From The Sky
Du côté de de la basse et de la guitare les mecs assurent le show, rien de trop excessif, juste la démonstration de la volonté d’exister sur scène. Le public entre dans la transe et le set défile à une vitesse folle. L’atmosphère dégagée par le trio vaut bien celle de ces albums et on sent que le set s’est bien rodé au cours de ces derniers mois. Impeccable SFTS assomme toute la salle avec sont titre “Animal” flirtant entre post et psych. Les montées pleines de puissance et de beauté du morceau sont une preuve de plus du talent d’écriture de ce groupe.
“Welcome To Trentor” et sa mise en scène musicale parfaite va clôturer la soirée, les accents orientalisants balayent ce qui aurait pu rester d’objection. La batterie va crescendo et l’envie de plus monte à chaque instant. Les cordes se déchainent et font souffler la tempête dans la petite salle où le plancher toujours prompt à vibrer semble se soulever en vagues. Stone From The Sky joue le passage de balle d’un instrumentiste à l’autre et finit le set dans la frustration la plus totale car le temps manque pour un rappel.
C’est un peu déçu de n’avoir pas pu en prendre plus plein les oreilles que le public quitte la salle. Frustration sans trop de gravité pourtant, le sentiment d’avoir passé un excellent moment domine. Chacun trace donc sa route pour se rendre soit au bar, soit sauter sur l’occasion pour acquérir la réédition par More Fuzz Records de Fuck The Sun de Stone From The Sky et compenser le rappel manquant.
Monster Magnet avait raté le coche des 20 ans de Powertrip en 2018, trop occupés qu’ils étaient à défendre Mindfucker, qui venait d’être publié. Car c’est une grande différence entre Monster Magnet et la plupart des autres groupes se prêtant aux tournées anniversaires : Magnet continue de sortir de très bon albums. Mais Powertrip a une place particulière dans la discographie du groupe. Album pivot (celui de la fin du stoner pur pour aller vers le hard rock racé), il est le point culminant commercial et artistique (dans l’idée de synthèse artistique, car en valeur pure il y a débat) de la formation du New Jersey. Rien de plus évident donc que de voir Windorf et ses camarades prendre la route, des deux côtés de l’atlantique pour passer « des soirées sur le thème de Powertrip » (s’évitant ainsi le « joué en intégralité » qui est rarement réalisé). Le rapport entre Magnet et la France continue par contre à être contrarié. Après leur passage l’année dernière à Magny le Hongre, pas de date en hexagone cette fois ci, pas au Hellfest, pas même à Paris qui continue d’être l’un des endroits où le groupe ne fait pas recette. Qu’à cela ne tienne, une fois n’est pas coutume c’est chez nos voisins belges que nous ferons le déplacement, profitant pour le même tarif de bonnes bières et d’un public plus agréable que dans notre (trop) chère capitale.
L’ouverture de soirée revient à un jeune groupe local qui investit la jolie salle du Trix. Jeune oui, local aussi, mais pas inconnu pour autant car si le nom de RRRags ne parlera qu’à ceux qui ont écouté leur premier album, sorti en 2018, le CV des musiciens qui composent le groupe est plutôt étoffé. Au menu Ron Van Herpen (The Devil’s Blood, Astrosoniq), Rob Zim (Lords Of Altamont) et Rob Martin (Biksem) et leur son très 70’s, convoquant autant les Stooges qu’Hawkwind. Sur scène le rendu sonne plus stoner, la faute à la fuzz et la demi heure de set passe avec plaisir (il me semble avoir saisi une reprise de Grand Funk au moment d’aller remplir ma bière au bar). A suivre de près donc.
Comme lors du concert à Magny Le Hongre, c’est au son de Black Sabbath que les roadies peaufinent les réglages et à 21h pile Dave Wyndorf et son orchestre entrent en scène, sur les accords d’« Atomic Clock ». A peine le temps de constater l’absence de Chris Kosnik à la basse, que le riff implacable de « Tractor » nous retourne comme une vulgaire jachère. Quel plaisir d’entendre ces morceaux si rares en concert au milieu des hits habituels : « Temple Of Your Dreams » est ouvert par un lubrique « Shake Your Moneymaker » d’un Wyndorf visiblement émoustillé par une très belle femme au premier rang, tandis que le génial « See You In Hell » (et son irrésistible riff de basse) sera propice à un peu de théâtralité dans ce show bien huilé. 10 des 13 titres de l’album seront joués et le pit, constitué en majorité de quinquagénaires, donnera tout ce qu’il a sur deux ou trois chansons (oui à 50 ans on a plus le même cardio) en fin de set (quel joyeux bordel sur « Powertrip »).
De notre côté nous nous concentrons sur le jeu toujours impeccable de la paire Caivano/Sweeny, la classe du premier s’accordant à merveille avec la bonne humeur communicative du second, et profiterons des rappels pour faire le plein de bonheur. Avant l’attendu « Negasonic Teenage Warhead », c’est toujours un bonheur d’entendre la reprise de « The Right Stuff » de Robert Calvert et, surprise, de se prendre en pleine poire « Look To Your Orb For The Warning » tiré de Dopes To Infinity et qui a connu son succès en 1999 grâce à la B.O. de Matrix.

Comme d’habitude avec Monster Magnet, le contrat est plus que rempli et il ne nous reste plus qu’à compter les jours nous séparant du retour du groupe en Europe. Perso j’en reprendrais bien tous les deux mois sans soucis. Et la région parisienne ne manque pas de salle difficile d’accès où je me ferais un plaisir de me trainer pour faire de chacun des concerts de Magnet une aventure.
Set List :
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- Atomic Clock
- Tractor
- Crop Circle
- Temple Of Your Dreams
- Third Eye Landslide
- See In You In Hell
- Baby Götterdämerung
- Bummer
- Powertrip
- Spacelord
Rappels :
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- Twin Earth
- The Right Stuff
- Look To Your Orb For The Warning
- Negasonic Teenage Warhead
Retour aux affaires pour les Make It sabbathy sur Bordeaux, avec le lancement sérieux de l’activité pour 2020 à l’occasion de la venue des texans The Well. L’occasion aussi pour votre serviteur de découvrir La Voûte, petite salle qui trouve sa place dans l’offre de lieux de concerts en centre ville de Bordeaux. Comme son nom le laisse penser, il s’agit d’un local en sous-sol d’une petite brasserie, et hormis les lumières (apparemment ils ont embauché le même ingénieur lumières que le Void voisin : 1 spot rouge fixe de chaque côté de la scène et basta ! Désolé pour la qualité des photos, du coup…), les conditions d’accueil des groupes sont plutôt sympa, avec notamment une mise en son très correcte pour une salle de cette configuration.
Mais place aux (presque) locaux de l’étape d’ouvrir les hostilités : les limougeots de Mama’s Gun prennent la scène et leurs premiers accords voient la migration du bar attenant vers la zone de concert s’opérer comme par magie. Le trio marque ses premiers points via une mise en place solide : leur signature chez le qualitatif label Klonosphere n’est pas due au hasard. Atypisme réjouissant, le chanteur du groupe est aussi leur batteur, ses deux compères l’épaulant occasionnellement aux chœurs. Le public rentre bien dans leurs compos riches et variées. Même si l’on est encore un peu loin des contrées sablonneuses et fuzzées du stoner comme on l’entend traditionnellement, le heavy blues (occasionnellement saturé) du groupe capte l’intérêt de l’auditoire. Certaines compos apparaissent un peu contrastées voire alambiquées, et quelques arrangements live peut-être perfectibles (quelques leads de guitare au son vraiment maigrelet par exemple), mais la marge de progrès est modeste et le groupe propose une prestation de bon niveau.

Les texans de The Well proposent sur leur généreuse tournée européenne plusieurs arrêts en francophonie, et la perspective de revoir ce groupe – habitué aux divers festivals de la scène musicale qui nous intéresse en Europe – en configuration club nous enchante, et le public aussi apparemment, qui remplit bien la petite salle, malgré la popularité relative du groupe (espérons que ce type de tournée participe à changer la donne). Le début du set est foncièrement low profile : premiers titres plutôt mid-tempo, l’ambiance s’installe plutôt tranquillement. Les repères sont vite trouvés, et en particulier le binôme Lisa / Ian – ce dernier assurant un rôle de frontman « relatif » (chant et guitare) sans jamais faire ombrage à sa partenaire bassiste, qui accompagne une large part des vocaux de groupe pour ce chant « doublé » qui participe à la marque sonore du trio. La bonne ambiance sur scène est au rendez-vous, les sourires bien installés sur les visages des musiciens, et finalement aussi dans le public, qui headbangue et ondule avec entrain.
Petit à petit le set s’installe et la qualité de la musique du combo devient une évidence : sorte de mix de doom old school chargé de rasades de boogie rock texan et de leads fuzzées, leurs riffs plombés et leurs rythmiques implacables font vite la preuve de leur efficacité. Venus défendre leur dernier excellent LP, Death and Consolation, le groupe n’oublie pas son parcours et tape copieusement dans son répertoire le plus ancien, pour le plus grand plaisir des aficionados. Ainsi, des pépites récentes (un super groovy “Raven” par exemple) alternent avec quelques titres issus des deux premiers albums, pour culminer avec un très nerveux “Black Eyed Gods”, en mode accéléré par rapport à la version vinylique. Interprétés un ton plus bas que sur album, certains vieux titres gagnent en épaisseur et en efficacité, à l’image de “Mortal Bones” et son riff mastoc. Le concert se termine sur le ténébreux, heavy et tortueux “Act II” (avec son intro samplée), mais les hurlements du public au sortir de scène auront raison en quelques secondes seulement des texans qui ne rechignent pas à revenir sur scène pour engager un dernier rutilant “I Bring the Light”…
Une fort bonne soirée, avec un groupe qui gagne vraiment à être vu sur des sets plus longs que les sets de 30-40 minutes en festoches que l’on était habitués à voir (et apprécier !).

Le parking du Rocher de Palmer en cet agréable dimanche soir est bien rempli et l’on peut observer un certain « exotisme » dans les plaques d’immatriculation : beaucoup sont venus de loin pour assister à ce plateau de toute beauté, et la date, sise dans la plus grande salle du complexe du Rocher de Palmer, sur les hauteurs de Bordeaux, affiche complet depuis longtemps.
L’excitation est à son comble quand, quelques instants après l’ouverture des portes, Kamchatka monte sur les planches, devant une assistance déjà plutôt bien garnie. Le trio suédois entame bille en tête par le punchy “Blues Science Pt2” avec Per Wiberg au chant (on sait le multi-instrumentiste très doué derrière un clavier ou une basse, on oublie souvent qu’il sait aussi chanter). Pour la plupart c’est surtout Thomas Andersson qui prend le micro, le frontman étant doté d’une voix chaude et puissante. Mais c’est surtout avec son jeu de guitare qu’il met tout le monde d’accord, à la fois inspiré et enflammé, emmenant le blues sur des terrains plus rock (“TV Blues”, “Sing Along Song”), enrobé d’un groove insolent dressé par une section rythmique au diapason de ses impros et solos (superbe “Son of the Sea”). Avant de finir le set, Tobias Strandvik cède son kit aux baguettes expertes de Jean-Paul Gaster, pour que se retrouve constituée sous nos yeux la formation de base de King Hobo (le projet parallèle du trio) qui interprètent le ronflant “Hobo Ride”, l’un des meilleurs titres de leur dernier album, au shuffle particulièrement emballant – on croise toujours les doigts pour que le groupe trouve enfin la possibilité de monter quelques dates ensemble… Un peu moins de trois quarts d’heure auront permis à Kamchatka de se faire connaître auprès d’un large public : une aubaine, certes, mais qui n’est que justice au regard de la qualité discographique du groupe et de son talent, confirmé aujourd’hui encore en live.

L’organisation impeccable de la soirée continue, avec une courte pause avant le tour de Graveyard. On peut se demander avec le recul si la notoriété du groupe ne lui aurait pas permis d’assurer une tournée de taille presque aussi significative en tête d’affiche… ça n’ajoute que plus de poids à ce plateau décidément impressionnant ! En tous les cas, le set du jour n’est pas un concert au rabais, loin s’en faut, même si on aurait aimé qu’il fut plus long. Pour autant, Graveyard a le temps de dérouler une set list plus qu’honorable, où les brulots de blues rock les plus enflammés alternaient avec les mid-tempo fiévreux (“Hard Times Lovin'”…). La voix de Nillson, mise en défaut sur quelques dates de la tournée (suite à maladie), est ce soir impeccable, redoutable de puissance et de chaleur (voir son interprétation fiévreuse de “Uncomfortably Numb”), accompagnant parfaitement ses leads inspirés, comme sur un très bon “The Siren” (les deux premières parties de la soirée avaient décidément pour point commun un frontman aussi doué en chant qu’en lead guitar). Mais Nillson, incontournable frontman, n’est pas entouré de bras cassés, se reposant sur le très doué Jonathan Ramm à la six-cordes pour des soli impeccables, et sur Truls Mörck pour assurer, en sus de lignes de basse solides, des parties de chant efficaces (voir le nerveux “Walk On” en intro), qui ajoutent un peu de variété à un set qui n’en a même pas besoin. Le tableau ne serait pas terminé sans ce “Hisingen Blues” éruptif, toujours de fort belle tenue. Une leçon de maestria et de classe.

Quand Clutch monte sur scène, traditionnellement tandis que la sono balance leur reprise du « Money » de Chuck Brown, la salle est pleine à craquer. On parle de la grande salle du Rocher, une jauge à 1200 personnes, blindée jusque dans les escaliers du fond, d’un public qui n’attend qu’eux, la bave aux lèvres. Sacré contraste quand on repense à leur dernière date en terres girondines, il y a 6 ans, dans une salle qui n’affichait pas complet (sans que le remplissage soit ridicule non plus), dans une ambiance bien plus coincée… L’heure et demie qui s’ensuivra nous permettra de mesurer l’ampleur du gap franchi par le groupe depuis.
A force de les voir se produire en festivals, avec des sets un peu formatés, où l’efficacité doit primer, sur des créneaux assez courts, on avait un peu oublié quel excitant groupe de scène peut être Clutch, en mode complètement libéré – ils nous l’ont rappelé il y a quelques jours en faisant remarquer qu’après les 4 premiers concerts de cette tournée ils avaient déjà joué rien moins que 62 chansons différentes, ce qui en disait long sur la volatilité de la set list… Ils mettront ce principe en application toute la soirée, pour notre plus grand plaisir, à commencer par le vieux mais pas daté “Pure Rock Fury”, ressorti des placards depuis quelques semaines, pour une intro bien punchy à la soirée, confirmée par une sélection de quelques titres plutôt nerveux issus des deux derniers albums. On refait ensuite un petit flashback sur le lancinant “Profits of Doom” et le groovy “Cypress Grove”. Agréable surprise, on retrouve ensuite un bon vieux “Spacegrass”, porté par l’entêtante ligne de basse de Dan Maines, toujours discret en fond de scène mais redoutablement efficace, et évidemment le chant si emblématique de Fallon, qui trouve sur ce titre très “ouvert” toute sa place. Après une poignée de titres récents, on retrouve avec plaisir l’efficace “Regulator”, suivi de leur ré-interprétation du “Evil (is going on)” de Howlin’ Wolf, blues rock fiévreux qui permet à Tim Sult de se lancer dans quelques soli en totale maîtrise.

Un peu plus loin, surprise, Clutch invite sur scène deux potes pour un superbe “Brazenhead” : Per Wiberg pour quelques nappes de claviers bien groovy, et Laurent (A.K.A. Malcom) de The Inspector Cluzo, groupe voisin (le duo est landais) très pote avec Clutch, qui les a emmenés en tournée à plusieurs reprises en Europe et aux USA. Ce dernier balance quelques leaks de guitare bien funky sur ce morceau interprété du coup à trois guitares, et sur la fin duquel s’enchaînent quelques plans jams vraiment sympas. Le concert reprend son cours naturel, quand vient l’heure d’un rappel court mais vigoureux, avec, évidemment, l’incontournable “Electric Worry”, articulé ce soir avec une bien sympa reprise du standard “Fortunate Son” de Creedence (encore une reprise enregistrée récemment par le groupe pour son “The Weathermaker Vault Series”).
Que dire au final après ce set ? On a beau avoir vu le groupe de très nombreuses fois en une vingtaine d’années, être même un peu blasé parfois, sur disque ou sur scène… ce soir ils ont balayé toutes les réserves que l’on pourrait avoir. Le quatuor est musicalement au top, les musiciens sont solides, le choix des titres est à la fois efficace et aventureux, la place laissée aux impros est réjouissante… Une superbe soirée, un trio de groupes remarquable, et une leçon donnée par Clutch.

Paris- 18/11/2019 (L’Alhambra) par Alex.

C’est avec une saveur particulière que nous nous dirigeons vers l’Alhambra ce soir ; de l’excitation bien sûr, mais aussi un peu de tristesse. La tournée Sound of Libération Sonic Ride, annoncée depuis longtemps, souffre de l’abandon de My Sleeping Karma. Après avoir déjà annulé plusieurs festivals cet été, le groupe se voit également dans l’obligation de renoncer à sa pérégrination d’automne pour raison médicale. Un coup dur pour eux comme pour les fans qui, espérons-le, continueront à montrer leur soutien. Côté hexagone, il revient à Glowsun de remplacer MSK pour les trois dates prévues. Flanqués des trios d’Ukrainiens Somali Yacht Club et Stoned Jesus, les français comptent bien se montrer à la hauteur de nos attentes.
 Somali Yacht Club
Devant un contingent plus qu’épars en ce début de soirée, Somali Yacht Club grimpe sur scène. Et premier constat, cette dernière se révèle sacrément large, tout comme le reste de la pièce, d’ailleurs. À tel point qu’elle fait apparaître les Ukrainiens comme trois musiciens solitaires, chacun isolé dans son coin. On se rappelle alors que l’Alhambra est un théâtre avec de quoi accueillir quelque 600 spectateurs, une mezzanine, et que son acoustique ne va pas desservir la cause. Le trio ouvre donc sur « Up in the Sky » pour un petit set de quatre titres.
 Somali Yacht Club
Mélange entre calme et bonne humeur, ils déroulent sobrement un rock psyché à tendance shoegazing qui rameute peu à peu les foules à l’intérieur. Une fois cette audience attentive, Mez introduit la fameuse « Sightwaster » en précisant ‘Do not do drugs, but if you have some, do it now’, histoire de mettre tout le monde à l’aise. Ce morceau aux multiples visages commence à remuer les corps et d’une manière générale, en dépit d’une basse un poil trop forte au début, le set s’avère très correct. On enchaîne ensuite sur l’album The Sea avec d’abord « 84 Days », pleine de profondeur, puis la superbe « Vero », qui avec ses quasi douze minutes de balade détient (presque) de quoi rassasier une foule en demande croissante.
 Glowsun
Si la première partie de soirée rimait avec introspection et sobriété, la suite que propose Glowsun arbore une facette nettement plus énergique. Très peu de chant ici, mais ce n’est apparemment pas nécessaire. Le propos est inscrit dans la puissance du riff, les idées portées par le galop de la basse, les arguments martelés sur les fûts et criés par les cymbales. La rythmique est incisive et ce sont littéralement des mandales auditives qui sont distribuées par les mecs de Lille. Johan ne reste pas en place plus de temps que le requièrent ses interventions sur pédalier, et il n’est pas rare de le voir poser les deux pieds dessus. Ronan de son côté écarte tant les jambes qu’on croyait qu’il franchit une barre de limbo invisible. Quant à Fabrice, dont le choix du T-shirt Powder For Pigeons mérite d’être salué, il grimace sous la transe dont il fait l’objet. Ce savant cocktail nous hypnotise, à l’image de cette perche micro qui, ayant basculé pour se coincer sur un projecteur en rotation, se retrouve à lentement osciller, prisonnière d’un mouvement dont seul le groupe détient le contrôle. Le set défile trop vite et c’est déjà le temps de la dernière. « Arrow of time » arrive comme notre ultime chance de profiter de l’énergie de Glowsun avant que la magie se dissipe. Une chance qu’aucun des zouaves présents dans la salle n’osera laisser passer.
 Stoned Jesus
Pour le final de ce lundi, nous accueillons sur scène Stoned Jesus. Un trio qui, comme toujours, est très bien reçu par le public parisien. À son habitude, le frontman Igor Sidorenko chauffe la salle, balance des petites blagues à droite à gauche, nous parle de sa guitare. Pendant ce temps-là, son bassiste peut tenter de régler ses problèmes d’ampli ou de pédalier qui lui valent de crachoter par intermittence dans le caisson ou de ne carrément rien sortir du tout. Malgré ce léger tracas, les badauds ne perdent rien de leur enthousiasme. Et lorsque les premières notes d’« Electric Mistress » retentissent, le pit jusque là très pondéré explose comme un baril de poudre. Avec « Indian », même tarif, le premier rang se retrouve pris en étaux entre la scène et la bande de dégénérés qui s’animent derrière. Ça se jette de partout. Chaque titre, qu’il provienne d’un vieil album ou bien du récent Pilgrims, reçoit un accueil chaleureux. Pas de doute, on a affaire à un public d’initiés, n’en déplaise aux détracteurs du trio. « Black Woods » déchaîne à son tour les passions, puis un « Bright like the Morning » rendant hommage à My Sleepong Karma vient un peu calmer le jeu. Tendance que vient sans surprise inverser l’incontournable « I’m the Mountain » pour le final. Morceau dont la moitié des lyrics raisonnent dans toutes les bouches de l’Alhambra. Question interaction avec le public, on ne peut nier que Stoned Jesus sait faire le taf. Entre les interventions du frontman, son jeu et ses regards échangés sur « Apathy », les slams à répétition du bassiste durant ce rappel, et le fait qu’Igor me pique ma casquette pour la porter sur l’un de ses solos, on en a pour notre argent. La foule s’avère tellement conquise qu’elle en redemande. Bien que l’on connaisse l’astuce désormais, on est content d’assister à un second rappel. Surtout avec la dévastatrice « Here comes the robot » qui achève pour de bon le set avec, comme de rigueur, Igor et Victor slamant sur les premiers rangs.
 Stoned Jesus
On le sait, il ne doit pas exister d’exercice plus difficile pour les organisateurs de tournée que celui de remplacer un groupe phare au dernier moment. Et pourtant, si l’on observe un instant les radieux sourires du public sortant de l’Alhambra, on se dit que SOL a tiré le bon numéro.
Rennes – 19/11/2019 (Antipodes MJC) par Sidney.
Même avec une affiche dégradée par la perte des admirables My Sleeping Karma, je reste motivé pour me rendre à Rennes et voir sur scène Somali Yacht Club et Stoned Jesus. Les premiers parce qu’ils me semblent mériter à plus d’un titre le coup d’oreille et d’œil, quant aux seconds parce que je n’ai jamais eu l’occasion de les voir sur scène (aussi bizarre cela puisse-t-il paraître j’ai toujours réussi à être indisponible lorsqu’ils passaient à portée de moi.). Autant vous dire que lorsque Garmonbozia et SOL ont fait savoir que le plateau serait complété par Glowsun, j’en était tout à ma joie. Donc un coup de boogie van plus loin, nous voilà entrant dans l’Antipode MJC une salle de concert respectable du haut de ses 450 places et de sa configuration sans fantaisie architecturale.
 Somali Yacht Club
C’est un grand moment de sobriété auquel il nous est donné d’assister alors que Somali Yacht Club monte sur les planches. Le trio se pose plein de concentration et sans effet de emmanchait sonner les premières notes de son set. Impossible dès lors de passer à côté de la console à gauche de la scène et celle au fond de la salle, côté matériel, ça devrait envoyer et la sentence tombe très vite, les jeux de lumières dans les halos de fumées jettent leur jus. Une belle mise en scène qui vient combler le manque d’excentricité du groupe. Coté balance c’est un pur régal, situé devant la scène ou à l’arrière de la salle le public peut jouir d’un travail de haute volée, rien ne semble corrompu, il est même possible de retirer par instant ses bouchons d’oreille sans souffrir (Restons prudent tout de même sur ce point, la limite haute ce soir flirte avec les 102 décibels réglementaires plus d’une fois et il faut pour les petites natures comme moi remettre rapidement ses protection)
C’est donc nanti de l’arme redoutable qu’est l’ingé son du lieu que Somali Yacht Club déverse ses boucles aguicheuses avant de s’orienter sur l’ envoutant “Sightwaster” où le Dub s’invite dans le monde du Stoner. Le public peut s’envoler happé par les halos de lumières aux milieux de volutes de fumée, porté par les sonorités organiques du trio. On retiendra surtout la subtilité de la basse qui arrive à se faire tenue, fondue dans une nappe de chorus, un batteur assuré qui sort du temps et y revient sans aucun effort et un chant qui aura su être aussi mélodieux qu’hurlé quand il le faut.
Le Set passe malheureusement à la vitesse de l’éclair et c’est déjà l’heure de quitter la scène pour les Ukrainiens. Le public aura eu le temps cependant de venir se masser dans la salle, fort à parier qu’il ne sont pas nombreux ceux qui ont demandé le remboursement suite à l’annulation de My Sleeping Karma.
A peine le temps d’une bière et de débriefer sur le premier set qui semble avoir convaincu tout le monde que c’est l’heure de retourner s’accrocher à la scène de l’Antipode MJC.
 Glowsun
Si les apparitions de Glowsun sont moins rares que leurs sorties d’albums (Le dernier remonte à 2015) il faut admettre qu’il ne s’agit pas du groupe qui sillonne l’Hexagone tous les quatre matins. C’est donc un réel plaisir que de venir de nouveau prendre les bonnes vibrations que procurent leur musique.
Les Lillois sont accueillis par quelques cris qui laissent supposer que des supporters de choc se trouvent dans la salle. On aura donc pu dès le début du set fonder un bel espoir sur l’énergie qui se dégage de la fosse.
Le trio livre ce qu’il fait de mieux et les riffs de “Arrow of Time” ou de “Behind the Moon” ont de quoi porter l’assistance. Tantôt oriental, tantôt tribal, Glowsun fait péter les riffs les plus métal et les plus efficaces alors que Johan bouge comme possédé. Le public entre pour une part en transe. Sous les coups de boutoir de Fabrice derrière ses fûts. On assiste ce soir à un set rodé où les mélodies font 80% du show, les 20% restants étant sans doute grandement à chercher du côté de la console une fois de plus dont le travail remarquable permet de maintenir la qualité du set précédent
Une fois de plus Glowsun remporte une victoire et convainc par son professionnalisme autant que par son talent. Et même s’il est évident que la salle aurait pu se montrer plus vivace, le trio va laisser derrière lui une bien belle impression.
Alors que débute le dernier set, avec une tête d’affiche d’opportunité j’admets ne pas être dans un état d’esprit des plus ouverts. En effet, je l’ai dit, j’attends depuis assez longtemps de pouvoir me faire un avis sur Stoned Jesus en concert.
 Stoned Jesus
Autant vous dire que tout à très vite dégénéré. L’excellence de la balance du début de soirée a été mise à mort et c’est un son terne par rapport à ses prédécesseurs que livre le trio qui attaque son set. Les compositions me semblent fades aprés ce que j’ai pu ressentir avec les deux groupes précédents et alors que doucement je décroche, je me demande s’il est bien légitime que Stoned Jesus ait eu la vedette même accidentellement. L’humour potache qui entrecoupe les morceaux ne parvient pas non plus à me rendre à la fête ni à me faire plus patient.
Je me tourne donc vers le public et je concède que je dois me tromper quelque part, en effet, les spectateurs amassés ce soir sont galvanisés par le show et on sent bien que les 10 ans d’existence de Stoned Jesus les ont bien servis. Ils ont su s’approprier une fan base conséquente et motivée. Alors je me dis que je suis sans doute un peu dur, que les pastilles bluesy que j’arrive à capter de-ci de-là adjointes à une culture pop presque assumée font que non, Stoned Jesus ne fait pas les choses sans habileté mais je trouve dommage qu’un titre du concert serve à revenir sur les démos des débuts, je n’ai réussi qu’a capter la brutalité de la chose et non la beauté brute de l’acte sans doute. Pour autant les gars connaissent le jeu et vont clôturer la fête avec “I’m The Mountain” et “Here Come The Robots” les titres les plus attendus et qui vont encore faire monter d’un cran la température de la salle. Allez, je suis bon prince, je me désincarne pour que vous sachiez ce qu’il en était vraiment et je vais vous traduire ce que j’ai pu entendre au sortir de la salle: “C’était un super concert, une énergie incroyable et un groupe communiant avec son public, un pur régal.”
Pour ma part, je pense partir en retraite dans un grotte et réfléchir à mon manque de gout évident.
Paris – 14/11/2019 (L’Alhambra)
4 ans presque jour pour jour après ce funeste 13 novembre 2015, c’est à quelques centaines de mètres du Bataclan qu’ont lieu les festivités du soir. Direction l’Alhambra, non loin de la place de la République, pour se délecter d’une affiche qui, sur le papier, a tout pour plaire : Kadavar est en représentation en France (et pour plusieurs dates) et a apporté dans son tour-bus Mars Red Sky et Hällas.
L’Alhambra est un théâtre de 700 places assises environ sauf que, bien évidemment, la fosse est debout ce soir. Dès l’entrée, vous avez le choix : soit vous pouvez rester debout à batailler pour bien vous placer au rez-de-chaussée ou vous pouvez monter à l’étage pour poser votre séant, peinard sur de confortables sièges rouge sang. Mon dos m’ayant honteusement lâché quelques jours plus tôt me supplie de le reposer et c’est donc depuis le balcon que je vivrais cette soirée (vous verrez quand vous aurez mon âge, bande de millenials !). La fosse se remplit doucement, la bière coule à flots, les premiers vinyles apparaissent dans les bras et la fumée qui recouvre la fosse se dissipe peu à peu. Des écrans de part et d’autre de la scène déroulent les concerts à venir… Oh putain ! Y a Chimène Badi le lendemain ! On a eu chaud !!!
19h45 : pile à l’heure prévue, Hällas débarque dans la pénombre sans bruit et sans faire réagir le public qui ne les accueille même pas avec un petit applaudissement. Pas grave, les suédois en ont vu d’autres et ils ont une arme irrésistible pour s’attirer l’attention : un truc qui s’appelle « The Astral Seer »… Sauf que l’ingé-son doit être aux toilettes car on a l’impression que le groupe est en acoustique tellement le son est faiblard ! Heureusement, cela va s’améliorer au fil des 5 titres qui composeront leur set. Premier choc pour le néophyte d’Hällas que je suis : la voix, fulgurante et tétanisante, de Tommy Alexandersson. Pour le coup, il a réussi à me foutre les poils… Par contre, je peux aisément comprendre que ce genre d’organe puisse déranger et en rebuter certains mais pour ma part, j’adore ! 3 titres de l’album Excerpts From a Future Past, paru en 2017, seront de la partie ce soir (« The Astral Seer », « The Golden City Of Semyra » et le superbe « Star Rider » qui secouera l’assistance) ainsi que « Tear Of a Traitor », extrait de leur nouvel album à paraître fin janvier. Une belle découverte, saluée comme il se doit par un public qui a apprécié la prestation.

Depuis la sortie de The Task Eternal, les avis sont partagés sur le dernier opus de Mars Red Sky… Il est donc grand temps de découvrir si ces nouveaux morceaux passent l’épreuve du live. Lumière tamisée, écran en fond de scène, nos trois amis girondins s’installent et balancent en guise d’amuse-bouche « The Light Beyond ». Premier constat : le son est juste fantastique, réglé aux petits oignons et la basse de Jimmy fait vibrer les coursives du balcon. La mise en scène moins sombre que celle d’Hällas permet de profiter du spectacle comme il se doit. Et après avoir entendu les nouveaux morceaux en condition réelle (dont « Collector », « The Proving Grounds » et un fabuleux « Crazy Hearth » magnifié par la voix de Julien), il est évident que The Task Eternal est un album qui se vit plus qu’il ne s’écoute. Comme à son habitude, Jimmy n’est pas avare en remerciements ni en petites blagues bien senties (que serait Mars Red Sky sans les intermèdes de Jimmy !), Julien est en grande forme et c’est peu dire que Matt a lui aussi une sacrée patate vu la façon dont il va maltraiter sa batterie ! « Hovering Satellites » (tiré de Stranded In Arcadia) et « Marble Sky » (extrait du premier opus) sont eux-aussi de la partie. Évidemment, c’est sur un « Strong Reflection » à la sensualité bestiale qui concluera un set parfait à tous points de vue : un son énorme, un public en osmose et de nouvelles compositions taillées pour la scène. Bravo les gars !

Quand le barnum Kadavar se déplace, autant vous dire qu’il ne reste que poussière et gravats derrière lui. Kadavar, c’est une force de la nature qui donne l’impression de ne jamais forcer… Et ceux qui les ont déjà vus sur scène vous le diront : les patrons, ce sont eux ! Dès l’installation du groupe, on n’est pas dépaysés : Christoph « Lupus » Lindemann, sa barbe et sa guitare à gauche, Simon « Dragon » Bouteloup, son chapeau et sa basse à droite et au milieu, Christoph « Tiger » Bartelt, sa nouvelle superbe moustache (bye bye la barbe ZZTopienne) et sa batterie bien au centre, presque collée au nez du premier rang.
Une toile tendue représentant la tronche d’un diable prêt à vous bouffer est disposée derrière le trio, les lumières se tamisent et nos 3 allemands foulent la scène de l’Alhambra. Il est alors 21h45 et les premiers accords de « The End » arrivent à nos oreilles. Puis « The Devil’s Master » est balancé sans sommation. Le son est dantesque, les lumières crachent dans tous les sens et l’auditoire balance ses attributs capillaires en cadence. Le côté cinématographique du nouvel album, For The Dead Travel Fast (un album qui divise également), prend ici tout son sens : les musiciens sont magnifiés comme jamais grâce à l’ingé-son et au responsable lumières. « Evil Forces » suit dans la même veine (avec un Lupus qui monte haut dans les tours…), avant un « Into The Wormhole », tiré du controversé Rough Times paru en 2017. Tiger se démène comme un beau diable sur ses fûts et gratifie le public des mimiques et grimaces habituelles. Lupus est comme toujours concentré sur ses riffs et Dragon, fier comme un paon, harangue la foule avec toute la classe qui le caractérise.

Arrive la bonne surprise : « Living In Your Head » suivi du superbe « Black Sun », 2 titres tirés du premier album qui date de 2012. Retour en 2019 avec « Demons In My Mind » avant un passage par Berlin avec « The Old Man ». C’est alors que déboule « Into The Night » qui va avoir un effet dévastateur sur le public : celui-ci se déchaîne alors et toute la fosse est prise d’une envie soudaine de balancer son voisin ! Un spectateur finira même sur la scène (les bras en croix, tenant un vinyle dans chaque main) avant de se laisser tomber dans la foule qui le portera pendant plusieurs minutes. Et ce n’est rien à côté de la version cataclysmique de « Die Baby Die » qui mettra le public en transe. « Long Forgotten Song », qui conclut le dernier opus, met également un terme à la « première partie » du concert avant un long moment à attendre le rappel (plus de 10 minutes quand même !) composé de « Children Of The Night », « All Our Thoughts » et l’incontournable « Come Back Life » qui voit le public ovationner les teutons comme ils le méritent.
Grand, grand moment que cette soirée du 14 novembre 2019 à l’Alhambra qui restera dans les mémoires de ceux qui ont eu la chance d’y participer. Sono, light show, public réceptif, tout était au top. Hällas laisse augurer du meilleur, Mars Red Sky a confirmé (s’il en était encore besoin) qu’ils sont au top du genre dans l’hexagone et Kadavar, qui n’a plus rien à confirmer, s’est montré en patron. Revenez quand vous voulez !

Bordeaux / Bègles – 15/11/2019 (BT59)
Le lendemain, ce plateau de luxe vient envahir les terres girondines, dans une salle un peu oubliée du public rock bordelais : le BT59, qui s’était focalisé sur les musique électroniques et dansantes depuis plusieurs années avant de fermer, a ré-ouvert ses portes il y a quelques semaines avec des ambitions plus diversifiées.
On y entre malheureusement un peu en retard tandis que Hällas a déjà lancé les hostilités. Première excellente surprise : le public est déjà là, en masse, quelques centaines de rockers souriants garnissant bien le vaste cube. On n’attendait pas d’être conquis par Hällas : on savait que les gars allaient encore nous régaler, ce qu’ils font avec la manière. Dans une ambiance scénique plutôt sombre (contrastant avec les light shows suivants), le flamboyant quintette suédois déroule une set list jouissive, dont les super catchy “The Astral Seer” et surtout le suranné mais délicieux “Star Rider” se taillent la part du lion. La flamboyance 70’s du combo convainc le public, qui pour une large part découvre ce soir les cinq scandinaves (n’est-ce pas là le principal intérêt des premières parties, finalement ?).

Ambiance toute particulière puisque Mars Red Sky est ici chez lui en région bordelaise. Mais ce n’est pas pour autant qu’ils vont se la jouer relax, bien au contraire : le trio entame son set avant l’heure prévue (ça lui permet de caser un titre supplémentaire, beaucoup de groupes devraient s’inspirer de cette heureuse stratégie), sobrement, par un ronflant “The Light Beyond”. Sur plus de 45 minutes de concert, le groupe à la discographie bien garnie doit être sélectif, laissant de côté, évidemment, des titres qu’on aimerait aussi entendre, mais se concentrant sur un set de “basiques”, leur panoplie de titres clés, à l’efficacité garantie sur facture… dont quelques nouveaux morceaux ! La set list est similaire à celle de la veille, et les points forts se trouvent aux mêmes endroits. On notera en particulier l’efficacité des pourtant très jeunes extraits du dernier album, et en particulier le superbe enchaînement “The Proving Grounds” / “Crazy Hearth”, qui ont déjà gagné leurs galons dans la set list de référence du groupe, avec en particulier des lignes vocales remarquables et entêtantes. Le set se finit par un large segment “old school” pour bien équilibrer un concert qui aura ravi un public de connaisseurs.

Le plateau a beau être de qualité, la plus large part du public est venue pour Kadavar. Il faut dire que depuis plusieurs années, le trio berlinois (et un peu français) n’a pas ménagé ses efforts pour arpenter tous les bouts de scène disponibles en Europe et ailleurs, lui permettant de gagner en maîtrise scénique tout en se constituant une solide fan base. La réputation de machine de guerre live précède donc le groupe, et le public (désormais condensé sur le devant de scène) accueille nos champions avec énergie – une énergie qui trouve son pendant sur scène, où nos trois lascars sont chacun au taquet. C’est même le cas de Lupus, généralement plutôt isolé sur scène, qui est ce soir en grande forme, généreux dans ses soli, impeccable dans ses vocaux, et haranguant copieusement un public qui le lui rend bien. De leur côté, Tiger est moins extraverti qu’à l’habitude mais reste une figure clé du groupe, attirant les regards par son jeu très visuel, tandis que Dragon évolue sur son tronçon de scène comme un animal en cage, la mâchoire serrée, proposant des lignes de basse toujours plus structurantes dans la musique du groupe.
La set list est identique à la veille, naviguant aléatoirement dans une désormais copieuse discographie, mais avec toujours ce soucis d’efficacité qui est désormais la marque de fabrique des (franco-)allemands. On ne détaillera pas les points forts (pleins) / points faibles (pas vraiment) du set tant le bilan global du concert est excellent. On peut aimer ou pas Kadavar, on peut exprimer des réserves sur l’un ou l’autre de ses albums, mais il est difficile de les critiquer sur leurs prestations live.

Le bilan de la soirée relève donc du sans-faute : le plateau était alléchant sur le papier, et dans les faits, comme porté par une saine émulation entre ces trois grands groupes européens, il a répondu à toutes nos attentes.
Letthereberock51 (Paris) / Laurent (Bordeaux)
Quoi de mieux à faire en ce 12 novembre, lendemain d’armistice, que de braver le froid pour aller en découdre outre-Quiévrain, à Bruges qui plus est, ville ayant joué un rôle important durant la première guerre mondiale, avec Gozu. 45 minutes de conduite et un passage de frontière plus loin, nous arrivons donc à la MJC de Bruges et sommes accueillis par le Gaff himself tandis que Grotto entame son set.
Le trio instrumental belge, qui porte le même nom que le bassiste de Gozu, va délivrer une performance d’une quarantaine de minutes axée sur des titres très longs. Déjà repéré pour sa prestation au récent DesertFest d’Anvers, Grotto aligne ici les épiques « The 12th Vigil » et « Lantern Of Gius », ce dernier sonnant comme du Rotor sous acide. C’est solide, c’est carré. Bref, nos trois lascars ont fait le job devant un parterre malheureusement encore clairsemé.
Viennent ensuite les Fire Down Below, eux aussi repérés lors de la dernière édition belge du DesertFest. Autre groupe, autre ambiance : exit l’instrumental psych-(é)-pique et bonjour le stoner-fuzzy-rock ‘in your face’. Là aussi c’est carré, c’est solide et ça donne envie d’opiner du chef, notamment sur le fameux « Through Dust and Smoke ». Malheureusement, l’affluence n’est toujours pas énorme à la fin du set du quatuor.
Seule l’arrivée de 3 autocars remplis de furieux stoners doit permettre à la température de monter dans la Venise du nord. Ils n’arriveront jamais… et Gozu monte donc sur scène devant une petite quarantaine de personnes à tout casser (groupes de première partie, personnels du bar et crew members compris !). Triste constat qui n’empêchera pas le groupe d’assurer comme des pros et de balancer la sauce pendant une heure.

Piochant dans les quatre galettes du gang de Boston, la setlist (construite par Joe Grotto durant le set de Fire Down Below) va permettre à Gozu de montrer l’étendue de son immense talent. Après un démarrage avec les lourds et groovys « Big Casino » et « The People vs. Mr. T », les bostoniens embrayent et appuient sur le champignon en délivrant une version survitaminée de « Meth Cowboy ».
Aidé par un Mark Gaffney particulièrement en voix (qui réussira d’ailleurs à nous filer la chair de poule sur le final a cappella de « By Mennen »), Gozu alterne entre rythmique de plomb et riffs assassins, en maîtrisant son sujet de bout en bout.

La soirée s’achèvera de la plus belle des manières avec « Bald Bull », seul titre de The Fury Of a Patient Man, mais laissera malgré tout un goût amer : il est dommage que, malgré les quelques 220 personnes intéressées par l’événement selon Facebook, nous ne soyons qu’une poignée présents dans la salle à être témoin de tant de classe.
Monté en mode complètement DIY, un petit festoche prometteur se tient sur le dernier week-end de ce surchargé mois d’octobre, proposant à la fois une fenêtre “découverte” et une contre-offre par rapport à tous ces festivals et tournées proposant des groupes étrangers. L’objectif du What’s in the Woods festival est de proposer sur 2 jours une poignée de groupes français, dans toutes les variantes du stoner, une vitrine privilégiée sur l’offre musicale hexagonale…
JOUR 1 :
On rejoint donc avec plaisir la salle choisie pour accueillir ces deux jours de festivités, à Bègles, petite ville qui jouxte Bordeaux… Première illustration d’un choix structurant fort intéressant : la liste des groupes sur les 2 jours est connue, mais l’ordre de passage de chaque groupe est une surprise : ceci permet non seulement de mettre tous les groupes à égalité, mais aussi de s’assurer que les petits malins ne feront pas de calculs stupides pour n’assister qu’à l’un ou l’autre des concerts ! Chaque groupe bénéficie donc de la même visibilité (ce qui se confirmera sur le week-end, l’affluence étant similaire sur chaque concert).
STRONGER THAN ARNOLD
La météo très clémente en ce début de soirée incite quelques dizaines de spectateurs à traînasser sur la très agréable terrasse, où le cuistot s’affaire en plein air, et où les bières (locales et peu chères) coulent à flot… Il faut quelques minutes à l’assemblée pour se rassembler dans la salle, à l’appel des premiers gros accords de Stronger Than Arnold. Les quatre limougeauds ont beau traîner leurs guêtres depuis quelques années, leur existence était passée jusqu’ici sous nos radars. Évoluant dans une sorte de gros stoner assez varié (on ne louera jamais assez ces grosses embardées nerveuses efficaces), avec peu de vocaux et un bon travail de complémentarité sur les guitares, le set se passe sans jamais que le spectateur ne s’ennuie, au contraire. Souffrant de quelques problèmes techniques (avec les retours en particuliers), le quatuor prend sur lui et semble apprécier d’être là.

OROTORO
On enchaîne sur un gros morceau : le trio d’Orotoro a beau être un local de l’étape, il a usé pas mal de scènes ces derniers mois, à Bordeaux et ailleurs, et ses derniers sillons vinyliques nous ont plusieurs fois titillé. Et effectivement, il ne faut pas longtemps pour jauger le niveau des trois gaillards : sur scène, c’est du très-très solide. Il faut un peu de temps au set pour se mettre en place, avec des premiers titres mettant notamment en avant la diversité stylistique du groupe, qui emprunte même par moments des sentiers progs bien maîtrisés. Mais très vite, la puissance du combo prend le dessus et, occasionnellement, on est même soufflé par certains plans particulièrement bien vus. Les musiciens disposent d’un bagage technique robuste qui leur permet de toujours être en contrôle de morceaux audacieux, alliant subtilité, déséquilibres et puissance. Belle bête…

WIZARD MUST DIE
L’un des groupes les plus attendus de la journée prend la suite sur la grande scène mise à disposition des groupes. Il va falloir assurer ! On n’est pas trop inquiets : l’album de Wizard Must Die nous a enthousiasmés il y a quelques mois, et les lointains échos de leurs prestations live qui nous sont parvenus étaient plutôt enthousiastes. Les opportunités de les extraire de leurs terres lyonnaises étant manifestement rares, on félicite le festival pour cette excellente initiative. Les gones s’engagent dans l’interprétation des titres de leur album, avec conviction et talent : la variété stylistique de ce dernier est parfaitement exploitée pour rythmer le concert, jamais monotone, tandis que les plans les plus puissants bénéficient du jeu massif des trois musiciens qui ne manquent pas d’énergie dans leur interprétation. “From their Blood”, “Umibe no Kafuka” ou encore “Empty Shell” passent l’épreuve du live à la perfection. L’ambiance est bonne, Flo ne manque pas une occasion de déconner avec le public (tournant en dérision un cassage de corde de sa gratte – que sa technique guitaristique remarquable rendra imperceptible pour la suite du set…). Pour finir d’ambiancer la salle, le groupe propose une dernière saillie avec le nerveux “Logical Math Carnage” sous les applaudissements nourris. Superbe set.

ETHILI
Dernier concert de la soirée, les locaux d’Ethili prennent les planches devant un public qui leur semble acquis d’avance : il faut dire que les bordelais jouent assez régulièrement sur les scènes girondines, et quelques potes sont aussi là pour les supporter. Ayant changé de bassiste il y a quelques mois, le trio est quand même resté dans le même trip / concept : développant une sorte de mythologie décalée, les musiciens se présentent en kilt et en armures constituées de canettes et étiquettes de bières (on les avait même connus avec des casques, ils ont un peu réduit la voilure). Musicalement, Ethili propose un stoner foisonnant, dynamique, difficile à cerner, mais toujours enthousiaste et jamais prise de tête ou trop sérieux. Le public s’amuse tout autant que les musiciens sur scène, qui tiennent bien la baraque. La communication est plutôt cool, les échanges avec la fosse se font conviviaux, et les riffs sont échangés autour de quelques soli bien sentis et pas trop démonstratifs. Une fin de soirée des plus cools, confirmant un bilan complètement positif pour cette première journée du festival.

JOUR 2 :
SPELL SHELTER
Même lieu, même heure, mêmes conditions et même principe : on repart pour la suite (et fin) de ce What’s in the Woods fest en découvrant l’ordre de passage du jour. C’est donc les Spell Shelter qui ouvrent les hostilités aujourd’hui. Le jeune quatuor bordelais, par ailleurs important activiste dans la mise en place du festival, affiche une franche bonne humeur. Pour un groupe aussi récent, la musique de Spell Shelter est solide et sa mise en place live est franchement pas mal. Quelques compos sont un peu en deça (moins efficaces) et le style du groupe se cherche un peu (un registre très vaste, avec sur certains titres un effet un peu “fourre-tout”) mais le concert est franchement cool et satisfait un public que l’on constate déjà plus nombreux que la veille (samedi vs. vendredi), et qui kiffe bien. Les musiciens sont bons voire excellents, et se font plaisir, à l’image de ce dernier titre, saillie quasi-punkoïde lâchée comme un baroud d’honneur.

DJIIN
Durant la courte pause, la salle bruisse de propos élogieux sur Djiin, groupe rennais qui n’avait pas atteint les sélectives esgourdes de votre serviteur. Alors quand le groupe monte sur scène, l’attention (!) est à son comble. Et il ne faut pas longtemps pour que le constat ne s’impose : Djiin, c’est du solide ! Côté mise en place, on est dans la cour des grands : les musiciens sont impeccables, solides, et le set se déroule dans une grande maîtrise. Mais le fond de jeu est pas mal non plus : musicalement Djiin va construire son stoner en tapant dans des registres variés, blues, soul, jazz… Chloe, frontwoman impeccable, à l’aise dans son rôle, illustre en particulier pas mal de ces variations, par ses lignes vocales puissantes et subtiles d’une part (même si jamais dans la démonstration stérile), piochant des les styles sus-cités, mais aussi par l’usage occasionnel d’une harpe, en son naturel ou distordu, selon l’ambiance du titre ! Subtilement encapsulées dans les chansons, ces séquences ne sont jamais artificiellement mises en avant (on n’est pas sur du gimmick foireux). Les autres zicos ne sont pas moins bons, loin s’en faut. Le tout se déroule avec sérieux mais aussi décontraction et un vrai sens de l’animation scénique : Chloé descend dans le public chanter un titre, Tom pose sa gratte pour aller accompagner Allan à la batterie un peu plus tard, etc… Un vrai bon moment live, par un groupe dont il est probable que l’on entende parler à l’avenir s’ils continuent sur leur lancée.

WORMSAND
On part de l’autre côté de l’hexagone avec les mentonnais de Wormsand, trio “faussement récent” puisque émanant des cendres encore chaudes des excellents Clystone. Dès leur montée sur scène, changement de ton radical. Visuel d’abord : le groupe fera baigner son set dans une ambiance verdâtre particulière tout du long (notons pour l’occasion que hormis sur ce set un peu atypique, le light show de tout le fest a été remarquable – malgré un deuxième jour plus “sombre”). Mais la vraie rupture se situe au niveau musical et énergique : en quelques secondes, le groupe se détache de ses “gentils” prédécesseurs par une véritable furie scénique (Clément renversera même son pied de micro en faisant virevolter sa basse dans les premières minutes). Wormsand évolue dans un genre musical assez audacieux, qu’il est difficile de cataloguer (cette preuve d’originalité en soi le distingue d’une large part de groupes), une sorte de sludge sur-vitaminé, avec un son d’une profondeur abyssale, quasi-doom (on pensera même à Bongripper parfois pour ce son de basse qui fait vrombir les tympans pendant le soundcheck). Clément et Julien se partagent le chant de manière très complémentaire (chacun dans son registre) et les voir défendre leur musique sur les planches concourt à faire passer ce set bien trop rapidement. Un très bon moment, qui aura décoiffé un peu les festivaliers, l’affiche du jour proposant des groupes aux genres largement plus “polissés”… Ça fait du bien par où ça passe !

LITTLE JIMI
Tête d’affiche logique du festival au vu de la notoriété (relative qui leur est acquise, Little Jimi monte sur scène en dernier, devant un public constant par son affluence (pas “d’effet tête d’affiche”, ce qui correspond bien à ce que souhaitait l’orga). Les bordelais, qui ont eu l’opportunité de pas mal jouer ces derniers mois, affichent très vite leur maîtrise musicale et instrumentale. Little Jimi, c’est en premier lieu un trio avec deux guitares (pas de basse… même si on détectera des sonorités pas si éloignées sortir occasionnellement de la 6-cordes de Benjamin) qui évoluent dans un rock très teinté 70s, un peu psyché, un peu blues, parfois hard rock… On les a vus il y a quelques mois déchaînés mettre le feu dans un club, on s’imaginait donc une véritable furie, avec dans leurs bagages désormais une expérience scénique autrement plus significative… Mais sur scène, aujourd’hui, c’est plutôt calme. Chacun fait sa part du taf sérieusement (c’est carré de chez carré, tout roule), mais l’ensemble est plutôt austère. Le contraste avec Wormsand est brutal… Benjamin s’adresse au public pour la première fois sur la fin du set, puis annonce leur dernier titre, le très bon “Goodbye Katus”, propice à quelques soli dont le duo a le secret. Du haut niveau musical, mais pas leur date la plus marquante scéniquement…

Il est temps de dire au revoir aux copains, de repasser par les divers stands qui agrémentent le fest (merch, producteurs d’alcool, artistes, disquaire, etc…) pour des dernières emplettes, et de regagner nos pénates avec le ressenti que cette édition du What’s In the Woods ne devrait pas être la dernière : avec beaucoup d’envie, et une série de concepts audacieux mais porteurs, l’orga a positionné ce petit festoche sur la carte des événements hexagonaux avec une vraie audace et une certaine valeur ajoutée bien distinctive. Rien qu’à ce titre, les voir continuer sur cette lancée serait une bonne chose.

Voilà deux ans que Nightstalker n’avait pas foulé le sol de France et il faut croire que la masse des dates dans l’hexagone n’aura laissé qu’une seule chance au groupe pour se produire là. Heureux hasard pour moi, c’est l’asso West Stoner Session qui a saisi l’occasion au vol ajoutant au plateau Hangman’s Blood et Oaks Crown à Nantes. Retour donc pour la seconde fois de la semaine à la Scène Michelet.
 Hangman’s Blood
Les gars de Hangman’s Blood sont venus en charentaise, ils sont Nantais, pas la peine d’enfiler autre chose qu’un slip quand on est voisin. Hangman’s Blood (un mélange de Rhum, Gin, Brandy, Porter) aurait pu s’appeler Swamp Water (Rhum, Orange, Curaçao, Lime) tant leur amour du bayou est invasif. Dès les premières mesures, l’influence de Mudweiser et de la NOLA flotte dans l’air et ce n’est pas un hasard, cela colle pile à l’univers des gars. Et s’il n’y a pas encore grand monde pour en recevoir l’odeur de vase, deux morceaux plus tard la salle est quasi pleine de spectateurs venus pour la tête d’affiche mais aussi de copains de Hangman’s Blood.
Le gratteux accroché à sa Dean From Hell (Guitare inspirée de celle de Dimebag Darell) livre des bûches de 40. Le son est trapu et efficace et plus le set avance plus le premier rang joue l’interaction avec des vannes auxquelles Hangman’s Blood prend un malin plaisir à rétorquer. Ce n’est pas qu’à cause de l’orientation des spots en direction du public que la salle s’échauffe, la tessiture de voix qui agit dans les basses vient s’érailler lorsqu’il s’agit de mettre la gomme et le public s’y complait. Le groupe semble inépuisable, il ne perd rien de son énergie et je serais curieux de les voir sur un long format pour savoir si celle-ci reste entière
Finalement à bout de soli farceurs comme une pastille mentholée pour marin et surtout à court de temps, les gars de Hangman’s Blood finissent leur set, le bassiste se prenant à rêver qu’il est la réincarnation de Lemmy et arrose le public avec la tête de son instrument comme s’il tenait une sulfateuse.
 Oaks Crown
Les gars de Vannes (et pas de la Vanne hein!) Oaks Crown sont suffisamment bretons pour avoir eu le droit de jouer au Motocultor. Fort de cette programmation ils ont entamé une mini tournée de cinq dates qui les a amenés jusqu’à nous ce soir. Ils viennent offrir leur musique à l’esprit post métal avec des bouts de pleins de trucs dedans. Si l’attitude scénique semble un peu poseuse cela ne fait qu’enrichir le show et accordons ceci à Oaks Crown, ils semblent unis et cohérents dans la façon dont ils se présentent à nous. Nombre de mélodies sont bien trouvées et laissent rêveur. La basse écrase l’assemblée derrière un équipement qui semble minimaliste et le public en redemande, cédant très vite à l’envoûtement.
La musique évolue tout au long du set, elle vient aux limites du screamo notamment grâce au chant du côté du gratteux rappelant celui de Aaron Turner d’Isis. Le bassiste quand il prend le micro vient compléter la puissance du guitariste chanteur. Le trio possède une force faite d’attraction et submerge le public dans une première partie de set, tout du moins. Une césure se produit à mi set, le batteur swing et entraîne avec lui le bassiste ainsi que le public, la migration s’opère vers un style plus Doom sans qu’on sache trop pourquoi et le chemin va se poursuivre à la lisière de terres Sludges. La musique de Oaks Crown est terriblement efficace, les corps dans la salle se cassent en deux et marquent le rythme d’avant en arrière entraînés par la lourdeur des notes. La musique dense et pas toujours digeste pour tout le monde fait perdre une partie du public au groupe mais le plus grand nombre reste accroché au set. Qui tire vers sa fin pour libérer la place à la tête d’affiche tant attendue ce soir.
Il est temps de vous décrire la configuration des lieux pour ceux qui ne connaissent pas la Scène Michelet. L’endroit est un bar. Un rez-de-chaussée avec une cour intérieure où boire son godet et un espace pour le merch en intérieur. Passons la porte pour entrer, face à vous le zinc, a votre droite un escalier. C’est par là que l’on accède au cœur de l’endroit, la salle de concert. L’heure approche, Nighstalker ne devrait plus tarder à finir ses balances et déjà une file se forme devant l’escalier. Bigre! il semblerait que l’on soit venu de loin et que l’envie d’en prendre plein les cages à miel soit vive!

Les quatre comparses de Nightstalker font leur entrée par un escalier derrière la scène, la salle murmure et se met en branle accueillant comme il se doit les patrons de la soirée qui entament un lancinant “Go Get Some”. Alors que Argy en père noël squelettique vient prendre son tour de chant ça commence à remuer dans les rangs. Impossible de ne pas remarquer que le quidam tel un vieux diesel met toujours un peu de temps à démarrer son chant et à en livrer toute la force.
Mais le show se déroule, implacable avec “Baby God Is Dead” qui résonnera jusqu’à l’église Saint Felix toute proche, puis “Zombie Hour” où le chanteur tel un marionnettiste habité par on ne sait quel génie fait de ses mains des gestes envoûtants. La part belle n’est pas nécessairement laissée au dernier album, les gars piochent allègrement dans leur discographie aussi loin que possible avec entre autre un “Trigger Happy” de l’époque Use; très efficace! Indiscutablement, la machine est lancée et c’est une salle en transe qui se soulève sous les coups de boutoir de la batterie qui ce soir prend une importance évidente.
L’humilité des grecs est prenante, ils remercient le public entre chaque morceau, toujours aussi reconnaissants après toutes ces années que le public vienne les voir et se renouvelle. La fin du set est sublime avec un démoniaque “Dead Rock Commandos” qui entraîne les corps et ne les laisse reposer qu’entre les bras d’un “Children of The Sun” et un rappel sur “Great Hallucinations”. Le show se termine sans que le temps n’ait défilé dans les esprits. Je quitte la salle un rien amer de n’avoir pas entendu jouer “For Ever Stone”, tant pis, il faudra que ces Messieurs reviennent pour nous jouer ça et on espère cette fois avant deux ans.
Fin de la visite, on descend l’escalier, on tourne à droite pour faire emplette au merch et remercier les artistes présents ce soir d’avoir fait un job à la hauteur de l’envie du public. Demi-tour, arrêt au bar, le temps de quelques papotages et d’appréciation du concert et il est l’heure de rentrer. Un peu à reculons, admettons-le.

C’est que pour un peu on n’arrêterait pas de courir en ce mois d’octobre. Up In Smoke, Desertfest Belgium, Keep It Low, Monolord, Low Pan, Sleep, Truckfighters, Sunnata, Bongripper. Comme vous le savez, la rédaction n’a pas chômé et était de toutes les parties fines ce mois-ci (Et il n’est pas fini!). Alors quand les Stoned Orgies ont annoncé un plateau 100% Heavy Psych Sounds avec Crypt Trip, High Reeper et Ecstatic Vision on aurait pu faire la fine bouche, mais c’était sans compter la passion, le sens du devoir et la soif insatiable de lourdeurs sonores qui nous anime! sur ce, direction l’incontournable Scène Michelet !
 Crypt Trip
Si j’en crois la chronique de mon confrère Laurent, le groupe qui va se produire, Crypt Trip, est de bonne facture, c’est ce que nous allons voir car prennent d’assaut les planches trois texans sur vitaminés. Ils offrent pour chauffer la salle un heavy bien de chez eux. Un de ces son ou se mêlent le rock et l’âme country de l’oncle Sam. La salle déjà pleine de moitié montre qu’il faut compter sur ces gars-là qui déversent sans relâche leur southern rock 70’s. Le paquet est envoyé comme il faut dans la fosse et donne à entendre des compos des albums Rootstock et Haze County. Indéniablement la qualité d’écriture est bien là toujours vivante en live et sans effet de manche. Avec ça, la voie de Ryan Lee est envoûtante même si écrasée par une trop forte dose de basse qui elle, emporte le public. Ce dernier monte en pression et finit par déverser sa joie comme lors de la rupture d’une digue. Le batteur vole au-dessus de son art yeux fermés avalé par l’énorme kit de batterie ivoire et ne quitte sa transe que pour prendre le micro.
J’avoue sans peine que je n’aime pas la musique country ni ce qui s’en approche de trop, ici Crypt Trip a le mérite d’en extraire le côté sympa et entraînant et je ne peut m’empêcher de penser aux frères Duke en version texane. (D’ici à ce que je tombe sur Général Lee en sortant…) “Natural Child”, le titre le plus pesant est paradoxalement celui qui porte le plus le public avec sa ligne de basse minimaliste en boucle qui noie la gratte. Au final les morceaux qui m’auront le plus marqué sont ceux de Rootstock, ceux qui vénèrent la trinité Deep Purple Black Sabbath et Led Zepplin. Les Texans finissent en laminant la salle avec le solo de batterie de “Gotta Get Away” qui mettra tout le monde d’accord, Crypt Trip est bel et bien un groupe taillé pour la scène.
Le temps passe vite et alors que High Reeper attaque son set, c’est la course au premier rang (Oui la salle est petite, donc rang au singulier.). Je regrette immédiatement la position de Shane Trimble le bassiste qui se fait tout petit dans un coin entre le batteur et le guitariste.
 High Reeper
Leur doom old school fait penser aux Black Sab bien entendu mais aussi à Pentagram, on joue sur du classique, le doom le vrai! celui qui swing au ralenti et sait pousser l’excitation à son comble lorsqu’il accélère . Le son rond et enveloppant n’altère pas l’agressivité des riffs de High Reepers. Force est de reconnaître qu’on a là un bel exemple de maitrise du classique. La salle qui avait déjà bien monté la jauge vers la fin du set précédent est à présent quasi comble, les Stoned Orgies ont de la bouteille et savent recevoir, cela se sait!
Alors que la chaleur monte, le chant scandé comme sur Obsidian Peaks et que les riffs coups de poing déchirent le velours doom des premier morceaux High Reeper libère toute son agressivité et se montre plus bestial lorsque les titres s’enchaînent. Zach Thomas, le chanteur fait le show, prends les sub d’assaut et domine son public poings en avant pour le galvaniser. Le jeu tabasse dur Bring The Dead, Soul Taker ou encore Barbarian soulèvent le parquet et donc ceux qui s’y trouvent. Ça sent le cuit le suif la transpiration et la bière, ça sent le live et la bonne musique, voilà une fête qui restera en bonne place dans les souvenirs de l’année!
Ecstatic Vision fini à peine ses balances que la salle se remplit de nouveaux, For The Masses qu’ils disaient! L’affluence a encore augmenté. Si on trouve encore de la place cette fois on ne peut plus être totalement libre au dernier rang et grand mal me prend de céder la place que j’occupais au pied de la scène pour prendre du recul.
 Ecstatic Vision
Cette petite peine de me retrouver relégué au fond est effacée par la joie de vivre indéniable du chanteur Doug Sabolick tout sourire alors que Kevin Nickles derrière son saxo et sa gratte est hilare . La Basse hypnotique et batterie concentrée jouent la carte de l’expérimentation tout comme lors de l’utilisation du mégaphone pour chanter ou jouer de l’harmonica. Les riffs de sax ne font qu’ajouter à la communion scénique.
Il faut dire que le groupe sait organiser une sauterie, il a apporté ses propres spots et aveugle les premiers rangs d’effets stroboscopiques colorés . Ça sent l’herbe et le décollage en trombe. “Booster mis à feu mon commandant!”. C’est parti pour l’hyperespace et bordel le voyage est dingue épileptique et sans relâche. Les balances assurent la jonction avec une qualité plus que notable. Le set à la pulsation du groupe de Scat Cat des Aristochats les acides compris.
Les rythmes tribaux de “Sage Wisdom” assurent la montée de trip ultime et provoquent des gestes de transe chez certains spectateurs. Même si la radicalité de la prise de parti sonore fait décrocher une (maigre) partie du public l’autre partie ne sortirait pas même pour aller pisser. Alors que tout le monde pense que la clôture en jam session sonne la fin de la soirée avec son déferlement de forces telluriques, la lumière se rallume avant de s’éteindre de nouveau pour un vrai rappel. Les sons extraterrestres de Ecstatic Vision satellisent la salle désagrégée pour moitié juste avant cet ultime morceau inespéré. Généreux et immersif le quartet fait valoir sa qualité festive et rend à la nuit un public heureux.
Les derniers drilles finissent leurs bières au bar, le merch écoule gentiment son stock. Le bonheur est assez palpable en cette fin de soirée. Le constat est sans appel, un concert réussi sous l’égide d’une orga qui encore une fois aura su animer les nuits nantaise en taillant un plateau à la mesure de sa réputation. Merci les Stoned Orgie ce fut bien bon!
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