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De retour au Trix d’Anvers pour le troisième et dernier jour de cette sixième édition du Desertfest version belge. La mainstage nous promet des merveilles et les autres scènes du tout bon aussi, la journée s’annonce donc au moins aussi heavy que la veille, c’est tout ce qu’on demande!
LUCY IN BLUE
Lucy in Blue a l’honneur et la difficile mission d’entamer ce dernier jour sur la Vulture Stage. Autant Bismut la veille nous avait mis les pieds dans le plat directement, autant les islandais nous ont tranquillement permis de finir notre digestion sans trop nous énerver. Vue la liste des groupes prévus aujourd’hui, Lucy in Blue fait un peu bande à part avec son rock psyché/progressif un tantinet trop propre. C’est agréable à écouter, le groupe a un bon feeling mais voilà, on ne va pas dire que nous avons fait là une découverte inoubliable.

SÂVER
Avec Sâver sur la Canyon Stage, on reste dans le nord avec la Norvège mais on change radicalement de style et c’est peu de le dire. Le trio est ici en plein dans sa toute première vraie tournée européenne et pas difficile de se dire qu’ils ont réussi à intéresser le public avec leur doom post metal – je ne sais même pas comment qualifier ça – de haut vol. Bref, si vos potes ont l’habitude de qualifier votre musique favorite de bruit lourd à la limite de l’écoutable, alors allez tout de suite les découvrir ! Heavy as fuck comme disent certains, le groupe a défendu avec brio son excellent premier album, sans aucune concession.

WOLVENNEST
Décidément les trois premiers groupes de l’après midi n’ont rien à voir les uns avec les autres puisque nous voilà en face des belges de Wolvennest et son décorum un peu kitch à mon gout. J’ai du mal à m’y mettre. Je sors de Sâver qui m’a mis une claque sans le moindre artifice sur scène et un éclairage au strict minimum et j’arrive sur la mainstage avec un hôtel de cérémonie en plein milieu de la scène et pas moins de trois guitaristes. Bref, ça ne prend pas avec moi, je n’accroche pas. Mais en toute objectivité, le groupe donne un set bien pro et rodé. Le public semble y trouver son compte. Ajoutons qu’il y a trois ans le groupe faisait la Canyon Stage (la moyenne), aujourd’hui ils ouvrent sur la Desert Stage (la grande). Il y a donc un nombre d’adeptes grandissant pour voir Shazzula et ses compagnons. Un concert qui a ravi les fans j’en suis certain.

THE PROGERIANS
Allez, direction la Canyon pour rester avec des belges particulièrement bien représentés durant ce DesertFest. The Progerians pour qui ne connait pas, c’est un mélange de pas mal d’influences. Si vous avez envie d’y voir du punk, vous en trouverez, vous voulez du sludge, la petite touche est là aussi, une pincée de rock, de doom etc… bref, encore des inclassables. Un mélange qui d’ailleurs prend très bien et un groupe qui maitrise son sujet. La chose très intéressante dans ce groupe, y compris dans sa prestation, c’est que c’est lourd, parfois très lourd mais toujours accessible. On n’a jamais l’impression d’être devant un groupe qui veut construire un mur du son infranchissable pour les oreilles non exercées. Le genre à plaire aux puristes tout en tentant les newbies. Bref, The Progerians a largement de quoi nous satisfaire et c’est largement ce qu’ils font en occupant le moindre espace sonore disponible pour le remplir avec un son puissant mais pas agressif. De la belle œuvre.

VONNIS
Dans une Vulture qui se remplit peu à peu, les Belges de Vonnis proposent un set dans la plus pure tradition crust/blackened/Sludge (si tant est qu’une telle ode à la crasse puisse avoir une quelconque tradition). La formation de Gand est dans son plus simple appareil (guitare/basse/batterie) pour accompagner un chanteur torse nu, recouvert de tatouages qui passera les 45 minutes de leur set à livrer bataille, sur scène comme dans le pit, haranguant provocant, allant chercher centimètre après centimètre, l’estime d’un public qui ne s’attendait peut-être pas à une telle agression si tôt dans la journée. Résultat c’est le guitariste du groupe qui en fait les frais et qui finit le set sur le dos de ce zébulon maléfique. Une prestation aussi solide que chaotique.
LORD DYING
Dans la famille doom/sludge heavy américaine, après Papa Mastodon, maman Baroness et de nombreux enfants plus ou moins viables, je demande le petit dernier, qui fait la joie de Relapse Records avec des albums aussi mélodiques qu’heavy : Lord Dying. Le quatuor (aujourd’hui deux membres permanents et des portes flingues) a vu sa côte grimper comme le mercure un jour de canicule depuis la publication de Mysterium Tremendum en début d’année. C’est donc avec joie et logique que l’on retrouve les imposants américains (surtout Eric Olson qui est tout aussi américain mais encore plus imposant que ses comparses) sur la mainstage pour un set… XXL forcement. Ils sont accompagnés du batteur de Behold The Monolith (que nous vous recommandons chaudement) et d’Alyssa Mocere, désormais Madame Pike au civil (et à la basse donc pour Lord Dying). Leur set impressionne une salle plutôt bien remplie et « Envy The End », le single de leur dernier album en date fait mouche, malgré des passages complexes (et un petit recours à une bande enregistrée, si si on vous a vu). Un très bon moment.

MONKEY3
C’est peu dire que les Suisses étaient attendus. Dans une mainstage absolument blindée, les plus floydiens (du Pink Floyd sera joué lors des balances) des musiciens de la scène européenne dévoilent une ambiance impressionnante, faites de lumières profondes et de deux points luminescents, reprenant le logo de Sphere, leur dernier album en date, publié en avril dernier. Ils en tireront la plupart des morceaux de leur set, emportant l’ensemble de la salle dans un trip cosmique, dont le point d’orgue sera « Prism » à l’incroyable crescendo. L’un des concerts du fest.

EYEHATEGOD
Pères incontestés du sludge, véritables caïds du metal, EyeHateGod est monté sur scène avec la dérision et le je m’enfoutisme qu’on leur connaît, d’autant plus après avoir été échaudé par quelques « where is Jimmy Bower ? » émanant de la fosse. Le Bower en question s’étant fait lourder après un fâcheux incident à l’aéroport Charles De Gaulle en septembre (incident impliquant la sécurité de l’avion devant amener le groupe à Tel-Aviv), c’est Brian Patton, leur ancien second gratteux, en bon soldat, qui est revenu tenir la 6 cordes dans le gang. Visiblement ravi d’être de retour, il fait preuve d’une vraie complicité avec Mike Williams et lorsque ce dernier demande avec malice quel groupe joue après eux, Patton se fait un plaisir de troller l’assistance en balançant le riff de « Dragonaut ». Le chanteur, en grande forme et en voix, se moque, charrie, provoque (lançant « Sisterfucker part 1 » par un « vous semblez tous avoir baisé votre sœur » ou annonçant 3 chansons d’affilées comme étant les dernières du set) et obtient l’adhésion de la moitié des spectateurs tout en provoquant le départ de l’autre moitié. Côté musique leur son est monstrueux, aussi massif que nécessaire et le concert, dans cette ambiance délétère juste ce qu’il faut, est un moment absolument truculent. EyeHateGod toujours délivre, comme on dit aux states.

SLEEP
Sleep est de toute évidence la plus grosse attente du festival et nous sommes quelques parisiens à attendre avec impatience ce grand rendez-vous, convaincus que la mainstage du Trix et le son qu’elle développe siérait bien plus à la performance du trio que le Bataclan deux semaines auparavant. Et nous ne fûmes en aucun cas déçus. Dès la (longue) intro, reprenant la retranscription radio des premiers pas de l’homme sur la lune, terminée, Matt Pike (que l’on a vu trainer au bord de la mainstage toute la journée), Al Cisneros et Jason Roeder investissent les lieux et balancent « Marijuanaut’s Theme » en pâture à une fosse déjà enfumée. Le son est puissant, implique l’estomac à l’évènement et l’expérience est déjà, en quelques riffs, plus concluante que le concert à Paris. Plus de la moitié du set est alloué au dernier (et parfait) album du groupe, The Sciences et l’on peut regretter que sur la tournée « Dopesmoker » n’a jamais été joué (même pas un riff, un petit quelque chose). Mais les moments forts sont légion, et c’est avec un plaisir total que les spectateurs accueillent les jams de « The Botanist » et bien sur l’énorme « Dragonaut » en fin de set. Un concert dantesque.

BLACK PYRAMID
Drôle d’affaires que celles de Black Pyramid qui se présente en tournée avec un line up dont il ne subsiste plus personne du line up précédent et des derniers albums. C’est un groupe tout neuf (quoi que fait de revenants) qui se présente sur la Canyon, histoire de clore le festival. Bien sûr de nombreux spectateurs ont déjà quitté les lieux mais la salle est tout de même correctement remplie et le groupe déroule son heavy/doom écrasant, foisonnant de riffs, présentant (il me semble) deux nouveaux morceaux et emportant tous les suffrages avec le classique et imparable « Visions of Gehenna ». Un concert très solide avant de baisser le rideau d’une édition qui aura présenté tout de même un certain nombre de groupes de grande qualité.
Et voilà, toutes les bons choses ont une fin comme le dit l’adage. Ce Desertfest 2019 nous a donné beaucoup de bons concerts et quelques bonnes découvertes, exactement ce que l’on demande d’un festival. Il ne reste plus qu’à attendre quelques mois avant de retrouver la franchise Desertfest à Londres, Berlin et bien sur Anvers. La machine est désormais bien rodée et c’est devenu au fil des éditions un incontournable, et c’est largement mérité.
Iro22, Shinkibo
(Photos : Shinkibo)
En 2019, les festivals stoner et affiliés sont légion en Europe, et, si rien ne semble poindre en France, les Desertfest, Red Smoke, Stone From The Underground et autres Up In Smoke continuent à exercer sur nous autres fans du genre une attraction presque cosmique, comme autant de satellites fuzzés en orbite autour d’un hexagone prêt à lâcher ses hordes de français aux portes des salles annonçant du « lent, lourd et psychédélique ». Desert-Rock s’évertue, comme toujours, à vous faire vivre un maximum de ses sensations embuées par le truchement de live report. Voici donc deux des trois jours du Desertfest Anvers.
Impossible pour les deux amateurs de sons gras envoyés sur place de se libérer pour le vendredi et c’est la mort dans l’âme qu’on loupe en particulier l’enchainement Truckfighters/Nebula. Ces derniers ayant, d’après les échos qui nous sont arrivés, clairement sorti leur épingle du jeu.
Comme depuis la première édition, c’est le Trix d’Anvers (Antwerp pour les locaux) qui accueille les festivités. Un lieu qui regroupe deux salles (420 et 1 110 de capacités annoncées) et le bar dans lequel est bricolé une troisième scène (Vulture Stage, 180 de capacité bien serrés…) pour accueillir les plus petits groupes.
Passer d’une scène à l’autre vous prendra deux minutes, c’est vraiment un des points forts du lieu. L’inconvénient c’est une capacité forcément limitée et donc un sold-out toujours assez rapide des tickets, en particulier les pass 3 jours. Toujours sur les lieux, un espace vert à l’extérieur, très convivial, regroupe différentes caravanes proposant de quoi se nourrir et s’hydrater. On ajoute un espace merchandising à l’intérieur du bâtiment et on a la configuration parfaite pour un festival à taille humaine loin des grosses machines de l’été.
BISMUT
Samedi, 15h précise, les hollandais de Bismut entament donc cette deuxième journée et c’est déjà la première bonne grosse claque. Trio instrumental des plus classiques où une section basse/batterie à toute épreuve accompagne un guitariste qui attire les regards. Sauf que ce groupe a un petit truc en plus. Prolongement naturel de ses mains, la guitare du frontman vous sort des sons divins et les compositions sont riches et variées. Pas plus de quelques secondes pour se dire qu’on est en face d’un groupe qui, s’il continue comme cela, ne fera plus l’ouverture du samedi sur la petite scène mais aura une bonne place sur une des deux autres scènes. Le ton est donné, Bismut emballe la foule des curieux venus au plus tôt, ce qui s’avère être une très bonne idée.

ADMIRAL SIR CLOUDESLEY SHOVELL
Les hostilités sont lancées sur la Canyon Stage par l’un des groupes au nom le plus galère à prononcer encore en activité, Admiral Sir Cloudesley Shovell, trio anglais plutôt habitué des lieux puisqu’ils étaient tout simplement déjà présents à l’affiche l’année passée. Il y a deux façons de juger leur musique : soit vous êtes amateurs de musiciens carrés et pro, qui font leur travail avec dévotion et respect, vous passerez alors un moment plus que moyen ; soit vous aimez l’ambiance chaotique, le son brouillon mais le rock’n’roll toutes brides lâchées et alors la bande de trois pocherons vous feront passer un joli après-midi. Nous sommes de la trempe des seconds et nous nous régalons des tubes enfilés comme des nouilles sur un collier de fête des mères (« Do It Now » « Hairy Brain part 2 ») et sautillons joyeusement avec le public (à part ceux qui ont fui, naturellement). Toi qui aimes les musiques qui déclenchent des bastons, sache qu’il est bien possible que le riff de « Robot Colossus » t’habite pendant longtemps (pardon pour cela).

FIREBALL MINISTRY
On enchaine avec le premier groupe foulant la scène principale, la Desert Stage. Piochant majoritairement dans l’album The Second Great Awakening, les américains de Fireball Ministry nous délivrent une solide prestation, très énergique. Sourires sur les visages durant tout le set, les quatre membres sont visiblement bien contents d’être là et même s’ils font l’ouverture de la grande scène, ils ne s’économisent pas et enchainent les titres pour le plus grand bonheur du public. On sent bien qu’une bonne partie est venue pour voir le mythe qu’est Scott Reeder et son côté de la scène regroupe une foule plus dense (et des smartphones sortis plus nombreux). Mais c’est bien le groupe au complet qui mérite les applaudissements nourris qui ponctuent chacun de leurs titres. Une prestation très convaincante pour une de leurs rares dates européennes à se mettre sous la dent.

CHURCH OF MISERY
On reste sur la Mainstage pour l’une des grosses attentes de la journée, les japonais de Church Of Misery qui, à défaut d’avoir un nouvel album à présenter, se font un plaisir d’enchainer les pépites de leur déjà généreuse discographie. En ouvrant leur set par « El Padrino », le groupe déclare la guerre à la fosse et passera 50 minutes à nous assener des banderilles doom aux relents 70’s, avec renfort de thérémine et riffs aussi velus que la sangle de Tatsu Mikami est basse (qu’est-ce Tatsu les genoux ? Ta basse. Ne me remerciez pas). Notons que le chanteur actuel du groupe – Hiroyuki Tagano – a un petit quelque chose d’un Robert Lowe nippon, avec ses yeux révulsés et sa présence un poil chamanique (la police, woup woup). Garanties sur fractures, « Born To Raise Hell », « Brother Bishop », et toutes les joyeusetés attendues sont au rendez et si la set list apparaît finalement sans surprise, elle est idéale en configuration festival (ce qu’on leur pardonnera donc sans sushi).

ELEPHANT TREE
Un rapide tour dans les hauteurs de la Canyon nous permettra de constater que 1/ monter des escaliers c’est chiant et que 2/ Elephant Tree fait un carton devant un public massif et émerveillé, appréciant l’humour anglais des musiciens autant que leur musique, ayant beaucoup de Kyuss en elle mais aussi pas mal de Pink Floyd. Nous dirons pudiquement ici que de tous les copycats stoner des rois du desert nous avons ici affaire à l’un des plus talentueux faussaires de sa génération pour ne pas froisser les amateurs du groupe tout en justifiant que nous ayons décanillé après à peine deux morceaux, l’ennui plein les yeux et les oreilles, pour se placer en première ligne pour la venue d’un groupe original et rare, dont le concert est à venir sur la mainstage.

BONGRIPPER
(Don’t Fear The) Bongripper était l’une des principales raisons de notre venue, la tournée européenne du groupe évitant soigneusement la France cet automne (« Hellfest en juin ? » étant souvent la question qui survient dans ce genre de cas) et il va sans dire que chaque venue de Bongripper doit être célébrée comme l’évènement qu’elle est. C’est que le quatuor de Chicago est un modèle de micro entreprise à succès : un personnel fidèle, un produit maitrisé de la conception à la vente et une qualité renouvelée à chaque nouvelle fournée ; prenez ça les grosses entreprises du doom 40 ! En trois titres, du hit de Terminal « Slow » jusqu’au cultissime « Endless » en passant par l’irrésistible « Satan », Bongripper aura mis la salle à genoux, le public en transe et livré une prestation aussi heavy que la plus heavy de tes copines. Des patrons, tout simplement.
STEAK
Les anglais de Steak ont parcouru bien du chemin depuis leurs débuts et ont le droit maintenant à la Canyon Stage sur un créneau de début de soirée assez porteur. Les curieux d’il y a quelques années sont en partie remplacés par des fans attendant impatiemment leur groupe favori. Le groupe est hyper efficace en live balançant des titres pêchus issus de leur discographie complète. Le public est très réactif et tout le monde s’entend sur l’objectif commun, prendre du plaisir. Impossible malheureusement de rester jusqu’au bout car Pelican s’annonce sur la grande scène et vu la densité de la foule pour Bongripper, mieux vaut prendre un peu d’avance.

PELICAN
Qui ne connait pas Pelican et les découvre lors de ce concert se prend une claque monumentale. Qui connait Pelican et y va en connaissance de cause se prend une claque monumentale. Tout est dit. Pelican s’est carré, c’est pro, c’est impeccablement joué. Puissance et maîtrise, deux qualificatifs indissociables de ce quatuor. Les américains piochent dans leurs deux derniers albums, privilégiant le dernier, et enchainent les titres tous plus puissant les uns que les autres. Quelques mots d’introduction et de remerciements mais pas plus, on n’est pas là pour causer, on est là pour vous en donner plein les oreilles et c’est très exactement ce que fait le groupe. Certains qui ne voulaient pas louper Lo-Pan font la concession de rester jusqu’au bout. On maudira ce chevauchement mais tant pis, Pelican met le feu sur la Desert Stage, ça se savoure jusqu’au bout !

LO-PAN
Vite vite vers la Vulture Stage pour profiter au maximum de Lo-Pan. Voilà ce qui semble être la seule bizarrerie de programmation de ce festival. Lo-Pan, si rare en Europe (2019 fait exception), sur la plus petite scène chevauchant Pelican et Dopelord. La foule est bien présente, ça déborde même sur le côté bar et derrière les portes. Faut dire que le groupe envoie sévère et la machine à riffs régale le public. Les quatre sont tellement dans leur truc qu’au moment de s’arrêter, l’un des gars sur le côté leurs dit « il vous reste dix minutes ». Parfait, « vous en voulez une autre ? » et le public de crier que bien sûr, se prendre une dose de son bien gras, bien rock, ils sont là pour ça ! Lo-Pan aurait peut-être bien mérité une scène plus grande mais d’un autre côté, on ne voudrait pas être à la place des organisateurs et du casse-tête que représente les choix de programmation. Lo-Pan a fait un paquet d’heureux avec un set énergique et authentique. De bon gros rock comme on l’aime.

TY SEGALL AND THE FREEDOM BAND
Ty Segall est donc la tête d’affiche de ce samedi. Un choix qui peut surprendre mais la Desert Stage est copieusement remplie pour accueillir The Freedom Band et son leader. Le groupe n’y va pas par quatre chemins et balance un set énergique dès les premières notes. C’est fort, peut-être trop, et ça cherche à en mettre plein les oreilles. Un peu de mal à accrocher mais le public semble y trouver son compte. Le choix s’avère donc payant pour clôturer cette deuxième journée.

Laissons nos oreilles se reposer quelques heures avant de remettre ça pour un dimanche qui, sur le papier, nous annonce du bon, du très bon, du mythique. Les quelques heures de repos bien méritées pour tout le monde ne seront pas de trop. Cette journée du samedi sous le soleil du désert anversois était au top. Lieu, organisation, public et bien sur les groupes : le big 4 d’un festival réussi.
[A SUIVRE…]
Iro22, Shinkibo
(Photos : Shinkibo)

Non content de nous avoir régalé la semaine précédente dans l’antre du Gibus, Below The Sun remet le couvert ce jeudi 17 octobre avec une programmation pas piquet des hannetons. En premier lieu les Portugais de Vircator armés de leurs space rock psyché, puis de la grosse doomerie avec les Ricains Yatra et les superbes Sunnata venus de Pologne. Tout ce petit monde réuni dans le sous-sol intime de l’International pour quelques heures de balade auditive.
 Vircator
Le quatuor portugais Vircator se présente devant un parterre de convives pas beaucoup plus nombreux qu’eux. Mais confiant de la suite des événements, il débute avec « Yarrow » ; titre issu du dernier album Arcano sur lequel se centre le choix du set pour la soirée. Ici, les micros ne servent qu’à l’interaction avec le public, car aucun chant ne perturbe les obscures ambiances lancinantes dans lesquelles nous plonge le groupe. Les quatre gaillards officient avec assurance, envoyant tantôt les gros riffs de « Burdock », tantôt les phrasés éthérés de la céleste « Mandrake », le tout porté par une batterie robuste qui maintient toute la structure du bazar d’une poigne de fer. Attirés par cette sirène ténébreuse, les badauds rappliquent de l’étage pour s’enfoncer dans la caverne. Ainsi, ils sont de plus en plus nombreux à hocher la tête devant les humbles et non moins sympathiques Portugais qui les gratifient en retour de quelques timides sourires. A la fin de leur prestation, le sous-sol s’avère plein.
 Yatra
Petit interlude pour profiter de l’happy hour puis on y retourne. Premier constat tandis que les balances de Yatra sont ajustées, le batteur Sean Lafferty n’est pas là pour enfiler des perles. Et tandis qu’il martyrise ses fûts avec des roulements aussi techniques que puissants, je me dis que ça augure de bonnes perspectives. De son côté, avec sa stature de géant et ses tatouages faisant office de T-shirt, monsieur Helmuth en impose tout autant. Quant à la Maria Geisbert dissimulée derrière ses mèches de cheveux, elle n’est discrète que sans sa basse. Devant une foule au rendez-vous et énergisée, le trio from Maryland balance la purée. Une essence heavy métal et doom qui oblige Sean à régulièrement changer de baguette et à replacer sa grosse caisse tant celle-ci tente de s’échapper sous le traitement qu’elle subit. Côté chant, la tessiture d’Helmuth évoque un train en plein freinage sur des rails endommagés ; une patte graveleuse et braillarde qui rappelle sans mal Dopethrone et son aspect démoniaque. Les paroles sont plus parlées que chantées, un peu à la Sleep, là où les riffs évoquent davantage du Electric Wizzard. Un mélange qui ne manque guère de satisfaire un public en demande. Les Américains enchaînent les titres presque sans pause et terminent leur show en sueur par une accolade fraternelle éclaboussée de bière.
 Sunnata
Ils se font attendre les patrons de la soirée. Alors qu’un parterre impatient de stonehead trépigne, les quatre Polonais installent encore leur attirail. Et quel attirail pour Sunnata… Rien moins que lumières, fumigènes, ventilateurs, et trois pédaliers n’ayant rien à envier à un transformateur EDF. Ça se baisse, ça branche, ça débranche et enfin ça teste. Puis, surviennent les inévitables soucis techniques : « on ne m’entend pas ! », « j’ai pas de retour », « cette pédale ne donne rien », etc. (bon, je ne touche pas une bille en Polonais, mais j’imagine qu’on navigue dans ces eaux-là). L’attente se prolonge, et même lorsque tout semble au poil, il faut encore patienter que le groupe reviennent en tenue de scène. Toutefois, en dépit des délais, l’humeur se maintient, chacun des zouaves concentré sur la gifle auditive qu’il s’apprête à prendre. Un coup d’envoi qui frappe avec « Lucid dream », morceau d’ouverture du génial album de 2018 intitulé Outland, et dont la majorité des pistes sont piochées ce soir. Maintenant vêtus de leurs robes noires de cérémonie, les quatre officiants nous baignent dans leur doom tribal à l’empreinte caractéristique ; un flot de delay et de reverb aux accents mystiques d’un autre temps qu’il nous ait donné de contempler l’espace d’un instant au travers de mélodies ciselées et d’arrangements judicieux : « Long gone ». Là-dessus se posent les chants monolithiques des deux frontman, mélodieux, aériens et d’une redoutable puissance. « Outland » et « Ascender » se succèdent et on constate que Sunnata c’est avant tout une machine impeccable, un engin bien huilé où le travail du son se révèle le fer de lance des ouvriers en charge de son fonctionnement. On ne peut hélas en apprécier toute la beauté dans une si modeste salle, mais on en appréhende quand même la dimension.
C’est le doublé gagnant pour Below The Sun qui, peu importe les salles, grandes ou petites, assoit encore un peu plus son emprise sur la programmation parisienne dans le style stoner doom, tout en sachant conserver une grande diversité dans ses choix de groupe. Une initiative qui, une fois revenu dans le monde réel, la fraîcheur de l’automne se substituant à l’étuve du sous-sol, mérite d’être saluée.

C’est au tour de Garmonbozia de frapper en ce mois d’octobre. Un coup fort en la personne des illustres Truckfighters accompagnés pour cette tournée survoltée de Swan Valley Heights. Une nouvelle occasion de secouer le Petit Bain qui affiche complet ce mercredi soir aux allures de weekend anticipé. Dès 19 h, le merch est littéralement dévalisé alors que les t-shirts à l’effigie du groupe sont déjà légion parmi les spectateurs. Y’a pas de doute, ce soir ça va envoyer.
 Swan Valley Heights
On commence pourtant en douceur avec Swan Valley Heights, le trio originaire de Munich et Berlin qui vient défendre son dernier album signé chez Fuzzorama Record (comme par hasard). Une pièce que nous avons eu plaisir à écouter il y a un mois de cela et qui brille tout autant sur scène. En dépit d’un pédalier de guitare qui refuse d’obtempérer dès le premier morceau, forçant la basse et la batterie à meubler au mieux en attendant, le stoner psyché aux ascendances fuzzées et space rock prends sans difficulté. On se sent de suite baigné dans cet univers sophistiqué mais vaste, sans oppression, libre de hocher la tête en appréciant tant les riffs puissants, la voix claire et spectrale, que les phrasés délicats et mystérieux qui les précédent. Sur « Heavy Seed », le quatrième et dernier morceau du set, les toms sont même frappés avec paumes de mains et non baguettes. Un morceau qui par son écriture et sa longueur évoque assez facilement Colour Haze ou Mother Engine, tout comme « Teeth & Waves ». Pour leur tout premier concert en France, les Allemands reçoivent un accueil chaleureux de la part du Petit Bain. Succès rendu également possible par l’ambiance émanant de la scène ; une brume éthérée qui baigne les musiciens de mystère, puis des jeux de lumière qui, grâce à leur teinte spatiale et leurs mouvements délicats, apportent un vrai plus à la proposition de Swan Valley Heights.
 Truckfighters
Nous ne quitterons pas le devant de la scène trop longtemps, sous risque de voir un spot prisé disparaître sous les hordes qui s’amassent pour accueillir Truckfighters. Inutile de répéter à quel point le trio est attendu en cette soirée. Tandis qu’ « Altered State » attise cette convoitise, invitant les plus impatients à scander des appels, c’est le rouge qui occupe la scène. Puis enfin, l’équipe débarque. Dango n’a pas lâché un riff qu’il jette déjà son T-shirt dans la foule. Ensuite, avec un « A. Zapruder » dévastateur, ils font exploser le pit comme une caisse de nitroglycérine. Pour cette tournée axée sur le génialissime Gravity X, les Suédois ont choisi d’en jouer les pistes dans le sens opposé à celui de l’album. Histoire de finir par vous-savez-laquelle. Mais au regard de l’humeur des zouaves dans la salle, ça pourrait tout aussi bien être autre chose. Chaque intro reçoit un accueil où l’excitation la dispute à la joie d’en entendre les premiers accords. Les têtes se secouent sans discontinuité, les pogos animent le centre d’une fosse qui grimpe en température. Toutefois, cette énergie ne semble en rien rivaliser avec celle qui jaillit de sous les projecteurs. Si Ozo maintient son poste devant le micro, envoyant lignes de basse et de chant aussi impeccables les unes que les autres, l’énergumène à sa droite ne tient pas en place. Quand il ne saute pas en l’air, ne s’agite pas devant son ampli ou ne joue pas sa guitare derrière la tête, il vient arroser de sa sueur déperlante les assoiffés du premier rang, ou fait carrément le tour de la salle, ses doigts toujours à décrocher gros riffs fuzzés et soli frénétiques. Le tout provoque une marée d’émoi dont les tremblements qui en résultent nous rappellent qu’on se tient tous dans un bateau, et qu’il a de la chance d’être bien amarré. Avec un brin de naïveté, on pourrait s’imaginer un répit avec « Subfloor » et « Superfunk ». Hélas, même si c’était vrai, les « The Deal » et « Freewhelin’ » qui suivent ramènent tout le monde à l’ordre du jour. Dans cette tornade explosive, on décèle quelques petites erreurs, notamment dans les finish des morceaux qui frôlent par moment l’impro. À un autre niveau, il faut aussi reculer pour entendre décemment la voix ; malédiction qui ne cesse de sévir dans les salles parisiennes. Bémol que Truckfighters contourne en laissant son public chanter à sa place. Lorsque la fameuse « Desert Cruiser » est introduite, c’est tout le Petit Bain qui crie. Et contrairement à ce qu’ils nous hurlent dans les oreilles, on constate que s’il existe bien une équipe qui ne semble jamais à court d’essence, c’est bien le trio suédois.
 Truckfighters
À bien des égards, il paraît difficile de quitter le bateau sans sentir son cœur rempli d’allégresse. Le merch ressemble à une Fnac en fin de Black friday, la fosse est moite de bière et de sueur, le bar encore blindé, et tout semble constituer une norme louée proche de la félicité. La tournée de Truckfighters bat son plein, et accompagnés de Swan Valley Heights, ils promettent de faire encore beaucoup d’heureux.
Bongripper est rare sur scène en Europe – et commencer un article par un bon gros euphémisme ne fait jamais de mal, dit-on… 1 date en 2018 (en Finlande), 4 en 2017, 6 en 2016, 1 en 2015… On continue ? Du coup, les voir en live réclame des efforts, notamment celui de traverser quelques frontières pour aller observer la bête dans son véritable biotope : la scène…
Journal de bord “Bongripper on tour” – Jour 1 :
Milan (Slaughter Club, Italie) – 11/10/2019 (avec Satori Junk + Burning Gloom)
On rejoint le Slaughter Club en milieu de soirée, dans un quartier industriel pas vraiment aussi glamour qu’on aurait pu l’espérer (la salle est en fait à quelques kilomètres du centre de Milan). Mais peu nous chaut, on est là pour la musique. Satori Junk entame les hostilités, dans une ambiance plutôt calme… La salle, de belle capacité, est à peine un quart remplie d’un public discret. Le quatuor milanais a pour but de chauffer le public, et ne manque pas d’énergie déployée dans ce but, mais musicalement, c’est difficile : les musiciens sont carrés, ça joue bien, mais le paysage musical est un peu barré. Se revendiquant de l’acid horror doom (!) le combo local propose une musique bariolée, très portée par son clavier, qui se lance parfois dans des plans complètement saugrenus (des passages jazzy smooth limite piano bar), et quelques instants plus tard ils lâchent une embardée de gros stoner doom qui remet le groupe dans les clous… Étonnant à défaut d’emballant.

Vient le tour de Burning Gloom, un nouveau groupe… quoi que ! En fait, il s’agit de la nouvelle incarnation de My Home On Trees, groupe que l’on avait déjà vu en live et entendu sur album ! Même pas de changement amer de musicien ou de deal foireux avec un label, tous les zicos sont toujours là et le groupe est en forme ! Ce qui a changé ? L’intro sur le très Kyussien “Nightmares” (écoutez cette ligne de guitare…) est trompeuse : le stoner classique a cédé la place à un propos plus rude et plus metal, clairement plus sombre. Laura, la chanteuse, représente toujours l’un des atouts qui démarque le groupe, avec des lignes vocales profondes et variées, plus hargneuses désormais. Notons qu’elle sera accompagnée de Celestial Ivy, une chanteuse invitée sur le titre “Modern Prometheus”, sur lequel les deux vocalistes se renvoient les lignes de chant, un passage sympa… parmi d’autres ! Car le set, durant lequel ils jouent 90% du nouvel album, tient bien la route et nous rapproche (un peu) des maîtres de la soirée…

Ils sont là, les maestro du doom, Bongripper… et malheureusement, la salle n’est pas remplie ! Il faut dire que la capacité du complexe est un peu trop grande, signe soit que Milan manque de salles, soit que l’organisateur espérait que cette première date italienne dans la carrière du groupe rameuterait les troupes (dans un pays où le remplissage des salles de concert est aussi problématique qu’en France, par exemple…). Quoi qu’il en soit, les quatre américains montent dans une nappe de fumée, discrets, et lancent le traditionnel feedback introductif de leurs sets… Au bout de quelques minutes de concentration forcée, la montée en régime de “Hail” est engagée, et les premiers riffs nous écrasent littéralement : s’ils le jouent en entier (spoiler : c’est ce qu’ils feront) on va avoir du mal à s’en sortir indemnes. Le son est colossal au 1er rang (les amplis en pleine face) et le mix est perfectible dans la salle (le son de batterie est trop poussé). Mais on chipote : tout le monde prend aussi cher. Ce concert a beau être le premier de cette série d’une dizaine de dates, les gars sont rodés, et la machine de destruction tourne à la perfection : chacun connaît son rôle, les interactions sont toutes précisément établies, les regards sont partagés, mais aucun mot n’est JAMAIS prononcé. Le titre d’intro du nouvel album, “Slow” (bon, OK, la moitié du nouvel album) est alors engagée sur la base d’une boucle sonore lancée ad lib par Nick et avec un plan de batterie de Daniel O’Connor ralenti (un comble), laborieux et malsain. La petite demi-heure du morceau passe, avec ses coups de boutoir alternant avec ses transitions superbes, ses riffs massue et ses plans quasi atmosphériques… Étouffant.
Puis “Endless”, désormais incontournable de leurs set lists, vient prendre le relais pour encore presque 20 minutes de déluge sonore organisé. Clairement moins déboussolés que leur public, victime consentante, les gars concluent le set sur le final cacophonique du titre, synchronisant leurs feedback respectifs pour un arrêt net, dernier acte de brutalité d’un set qui n’en manquait pas. On est soufflés, on repart hébétés et heureux… et on en demande encore !

Journal de bord “Bongripper on tour” – Jour 2 :
12/10/2019 au Keep it Low festival (Munich, Allemagne)
Voir chronique ici.
Journal de bord “Bongripper on tour” – Jour 3 :
13/10/2019 (avec Telepathy) à Leipzig (UT Connewitz, Allemagne)
Après une fin de journée quasi-estivale à Leipzig, on rejoint le quartier très sympa et animé de Connewitz, où se trouve la salle. En rentrant, on est soufflés : le lieu propose des volumes énormes, et une scène impressionnante, avec colonnes et portique emblématiques d’un bâtiment de la Rome antique, carrément ! Le lieu, insoupçonnable de l’extérieur (on y rentre par une vulgaire porte d’immeuble) est en fait un théâtre de plus d’un siècle, l’un des plus anciens de la ville.
La “théâtralité” du lieu est tangible dès les premières notes de Telepathy : le quatuor anglais (et polonais), qui partage quatre dates de cette tournée de Bongripper, évolue dans une ambiance vaguement ténébreuse, dans une atmosphère très fumeuse (on verra assez rarement le pauvre Richard Powley, perdu dans la brume sur son côté droit de la scène), avec un éclairage dramatique très bien étudié pour mettre en valeur le lieu. Musicalement, le groupe complète plutôt bien une affiche bicéphale avec les maîtres du doom : Telepathy propose un post-metal très lourd et nerveux, porté par des plages ambiantes pesantes et des assauts guitaristiques puissants. Complètement instrumental (le groupe n’utilisera son micro que pour balancer deux ou trois phrases à l’attention du public…) le groupe fait montre d’une grosse assurance scénique et d’une set list riche en titres bien plombés. L’énergie déployée finit d’emporter le pompon, et on se dit qu’on devra garder un œil sur ce combo atypique mais qui en a sous la pédale…

Quand arrive Bongripper, la salle est blindée : on peut y circuler, mais il y a du monde partout (ah, le public allemand laisse songeur…). Après trois dates, on n’a plus de surprise sur le comportement scénique du quatuor, même si justement, par nature, on est à l’opposé de toute scénographie : conceptuellement, Bongripper dédie tous ses efforts au son, la présence scénique n’est vraiment pas dans ses priorités, malgré encore une fois une salle qui se prête à un superbe spectacle. Du coup, chaque seconde du set vient remplir le spectre sonore, soit par des délires bruitistes plus ou moins structurés, soit en jouant sur les potards de leurs amplis ou leurs pédales d’effets (pédales qu’ils manipulent parfois comme des instruments à part entière).

Aujourd’hui c’est le heavy (oui, désolé) “Worship” qui introduit les hostilités du jour pour un petit quart d’heure de riffs assénés en pleine face à la vitesse d’un pachyderme apathique. Comme toujours, Dennis à gauche, tourné vers ses collègues, est le moins dynamique, concentré sur son manche et son son (et la puissance de ce qui sort de ce discret guitariste est au delà de l’imaginable). Nick et Ron sont plus énergiques, et leur jeu hypnotise. Il faut voir en particulier Ron faire claquer les cordes clairement sous-accordées de sa basse pour chaque coup de médiator… Quant à Daniel derrière son kit, discret, il emmène ses potes dans des compos complexes, riches et élaborées, sans jamais se perdre en route (le piège est grand d’accélérer le propos, voire l’inverse). Bref, la prestation physique “a minima” cache en réalité une maîtrise musicale et instrumentale de tous les instants. Côté set list, s’ensuivent les dévastateurs “Slow” et “Endless” évidemment, pour finir de constituer plus d’une heure d’un set éprouvant, étouffant, mais libérateur…

On interrompt sur cette date notre petite tournée Bongripper avec le sourire jusqu’aux oreilles, le cou douloureux, et une petite boule au ventre en se demandant quand le groupe reviendra sur nos terres…
Difficile de rater le Keep It Low cette année au vu de l’affiche de haute volée… Malheureusement, impossible d’assister au 1er jour du festival munichois pour des raisons de… priorité. Décidément, après avoir raté le 1er jour du Up in Smoke, on apparaît coutumier du fait… Mais trêve de pleurnicheries, concentrons-nous sur cette seconde journée et sa liste de groupes incroyable. On gagne le complexe Feierwerk de Munich sous un soleil radieux, le temps de se poser un peu dans le beergarten et papoter avec les copains, en contemplant la perspective de la première bière…
DESERT STORM
Mais le devoir nous appelle, sous la forme du set de Desert Storm qui lance les hostilités du jour dans la salle Kranhalle, la seconde en terme de capacité dans ce complexe de trois salles, mais pas beaucoup plus petite que la salle principale. Quoi qu’il en soit le quatuor rentre dans le vif du sujet et s’engage das un set de gros stoner / metal bien nerveux. Plutôt une bonne idée au final que ce choix musical dans la prog du jour : il fallait bien ça pour nous extirper de l’accueillante torpeur quasi-estivale qui baignait le beergarten pour s’engouffrer dans cette salle obscure… Niveau scénique on retrouve le Desert Storm que l’on connaissait sur les planches, avec un peu plus de maturité (ce dont il ne manquait pourtant pas) : l’interprétation est solide, l’énergie est là, les musiciens sont bien dedans et vendent bien leurs morceaux. On n’est pas en face du groupe le plus original du genre ni de la journée, mais on a une entame de qualité.

INSTRUMENT
On retraverse le Beergarten (décidément un point central de la journée au coeur du complexe) pour rejoindre la petite salle Orange, un peu isolée, mais plutôt bien foutue. On y retrouve le trio Instrument, inconnus de votre serviteur jusque là. Bon, on ne va pas vous mentir : on n’est pas restés longtemps. Le psyche-rock (pop ?) du groupe est gentillet et pas désagréable, et devient même plutôt intéressant quand les gars s’emballent un peu. Mais les vocaux trop doux et les rythmiques très soft ont du mal à nous tenir jusqu’à la fin. Notons que la salle est plutôt pas mal remplie en revanche ! On est passés à côté…

STEAK
Les anglais de Steak enchaînent, dans la salle moyenne encore. Même réflexion que le week-end précédent au Up in Smoke : on imaginait les retrouver plus tard sur l’affiche. En effet, sur scène, c’est du solide : section rythmique solide, interprétation au cordeau… Les anglais gratifient même le public d’un titre inédit, un mid-tempo plutôt accrocheur. Après, ça reste Steak, ça ne révolutionne pas le genre, les compos ne sont pas les plus transcendantes… Mais c’est du bon niveau, et il va falloir maintenant qu’ils trouvent les clés pour franchir ce plafond de verre (ça peut passer par plus de présence live). A noter que le groupe commence 5 min plus tard et termine 5 min plus tôt : sur un créneau aussi court, c’est potentiellement une ou deux chansons de plus…

BLACK PYRAMID
Première incursion du jour dans la Hansa39, la plus grande salle du complexe, pour aller voir Black Pyramid. Une expérience un peu irréelle dans l’absolu : les dernières fois que l’on a vu le trio américain, le line-up était différent… COMPLETEMENT différent ! Aucun musicien de l’incarnation précédente ne figure dans la formation actuelle, plus proche du line-up originel (modulo le batteur). Musicalement, Black Pyramid a toujours été un groupe intéressant, toujours passé à côté de son potentiel, largement à cause de ses problèmes de “personnel”. La prestation live est impeccable, les gars sont acérés et les riffs tombent comme des coups de hache par le furieux Beresky, bien en appui sur une rythmique en béton armé. Disposant d’un nombre conséquent de compos de haute volée, que les premiers rangs connaissent par cœur, les 50 minutes de set défilent finalement bien vites. Très bon set !

SWAN VALLEY HEIGHTS
Avec un certain enthousiasme on rejoint la petite salle Orange pour aller retrouver les partenaires de tournée et de label de Truckfighters. Le trio, souriant et dynamique, s’engage dans un début de set cool, mêlant plans psyche, kraut, et stoner plus traditionnel : sur quelques mesures, on passe de passages jazzy ou prog à du psyche rentre-dedans bien charpenté. Des breaks, des structures biscornues, des rythmes variés… Est-ce le contraste avec le set costaud et direct de Black Pyramid juste avant, ou l’appel d’une bière fraîche au soleil ? Toujours est-il que le groupe a du mal à capter sur la longueur l’attention d’une large part du public. Pourtant ils ne déméritent pas : l’interprétation est impeccable et inspirée, les titres sont sympa et variés… mais parfois ça passe pas. C’était un de ces jours.

ELEPHANT TREE
Le quatuor anglais prend place sur la scène de la Kranhalle, dans un salle fort bien remplie. Vus une semaine plus tôt, on n’est pas surpris du spectacle : musiciens talentueux, à l’aise, souriants, compos variées et toujours aussi excitantes, tous les ingrédients sont réunis pour passer un bon moment, et c’est exactement ce qui se passe. Ça commence par “Dawn”, qui propose une bonne part des éléments caractéristiques du combo : soli incisifs ou aériens, nappes de claviers bien senties, basse groovy et ronflante,… Ne manquant jamais une occasion de blaguer ou communiquer avec le public, Peter envoie un bonjour à leurs partenaires de tournée, Lo-Pan et Steak (“good drinkers” apparemment, ce qui semble un bon critère d’affinité…). Le set déroule avec aisance sur scène, et le facteur plaisir dans le public est au top. Un grand groupe de scène décidément.

NEBULA
Le facteur surprise en a pris un coup : on a vu la semaine dernière Nebula au Up in Smoke et on a pu jauger le niveau du groupe, en excellente forme. Confirmation cet après-midi sur la “main stage” du Feierwerk, sans Tom Davies à la basse encore une fois, pour rappel absent sur toute la tournée car retenu à Los Angeles (remplacé par le technicien guitare du groupe). Ce dernier fait parfaitement le job et semble même plutôt à l’aise, et aguerri au jeu de scène. Mais ne nous leurrons pas, c’est Eddie Glass qui mène la barque, et attire tous les regards. Et il a une recette magique pour l’aider, avec une set list impeccable, qui commence par le stellaire classique “To the Center” enchaîné au nerveux “Do it Now”, qui donnent le ton. Plus encore que la semaine dernière, le trio va faire briller sa rutilante discographie, quitte à mettre de côté les meilleurs titres de son récent dernier album (quelques extraits néanmoins) : un gros “Fall of Icarus”, les fiévreux “Aphrodite” et “Freedom”, un punchy “Giant”… le vertige ! Eddie est au taquet, impeccable au chant et, bien sûr, en lead, interagissant avec le public en face et… sur le côté ! Et oui, la scène du Hansa39 a ça de spéciale qu’elle est ouverte sur son côté droit, laissant un pan du public profiter du profil des musiciens ! Le groupe se laisse lui-même emballer dans ce set débridé, déborde de 10 minutes bien tassées, et est prêt à se lancer dans un nouveau titre, quand ils s’aperçoivent qu’ils ont peut-être un peu trop tiré sur la corde… On en aurait bien repris une heure ou deux de plus nous !

RUFF MAJIK
Difficile après ce set un peu fou de rejoindre la plus confidentielle salle Orange pour aller y voir les sud-africains de Ruff Majik. Logiquement rares sur scène, le trio traîne une solide réputation live, et l’on comprend vite pourquoi. Sans artifice (détail anecdotique rigolo : alors que côté effets de guitare les pédaliers de tous les groupes du jour ressemblent à des tableaux de bord d’avions de lignes, celui de Johni Holliday est juste un boîtier avec un bouton type “on/off” au bout d’un fil…), mais droit à l’essentiel, le groupe s’embarque dans un set énergique de psyche assez nerveux. Musicalement, ça virevolte entre des rythmiques plutôt rapides et des tempi plus moyens, le tout étant largement baigné par une rythmique très efficace, et en particulier un groove de basse impeccable. Holliday, en frontman aguerri, assume ses leads au même titre que ses vocaux, sans faillir – même si sa voix un peu stridente peut user un peu sur le long terme. Quoi qu’il en soit, difficile de monopoliser l’attention d’une part du public avec encore des étoiles de Nebula dans les yeux, et d’autre part en attente de Lo-Pan, raison pour laquelle Ruff Majik ne remplit pas la petite salle, même si leur set bien sympa capte un public d’amateurs avertis.

LO-PAN
Troisième fois que l’on voit Lo-Pan sur cette tournée, autant dire qu’on n’est pas trop inquiet, on sait qu’on va prendre notre pied. On ne va pas en faire des tonnes, ce set reprenait peu ou prou les mêmes caractéristiques que les précédents : un groupe qui prend la scène le couteau entre les dents, une rythmique redoutable, un guitariste d’une efficacité désarmante, et un chanteur au feeling incroyable qui fait de Lo-Pan un groupe “différent”. Une part du public semble découvrir les américains, qui viennent finir de remplir une Kranhalle bien remplie ! Bref, le set est encore une fois impeccable d’efficacité et les américains cartonnent, si bien que tout le monde est un peu déçus quand on les voit quitter la scène un peu plus tôt que l’horaire prévu. On aurait pas craché sur un titre de plus…

TRUCKFIGHTERS
Truckfighters est décidément un groupe qui ne rend personne indifférent : ils prêtent le flanc depuis plusieurs années à tout un pan du public stoner qui en disent pis que pendre (en dépit de toute rationalité parfois : Dango saute trop sur scène ? Leur musique est pauvre ? Ils ont trop de succès ?…), tout en voyant les rangs de leurs fans grossir de plus en plus et leur statut monter en fonction. Par ailleurs, cette tournée les voit remettre le couvert en mode « reformation » suite à un split de plusieurs mois, dont on n’était pas sûr qu’ils ressortiraient. On gagne donc la scène principale en se demandant à quelle sauce on va être mangé. Devant le public un grand rideau imprimé dissimule la scène, rideau qui tombe à la seconde du premier riff (10 min en retard sur l’horaire quand même) pour découvrir une paire de musiciens baignant dans une subtile fumée (dissimulant complètement le batteur) et un ensemble de spots puissants posés au sol, générant des flash en mode stroboscopique, le tout apportant une vraie intensité visuelle à la scénographie. Nos deux musiciens sont comme toujours bien excités (et oui, Dango saute dans tous les sens, désolé), mais surtout… le public est en feu ! Chauffé à blanc, la fosse est blindée et surexcitée ! Bien attisée par Dango qui va les haranguer à l’envie, le pit réagit au quart de tour, pogos, headbang, etc… Et donc, voilà, le constat se dessine très vite : Truckfighters peut faire l’objet de moults critiques, mais ce qu’ils ont provoqué aujourd’hui, personne n’a été capable de le faire à moitié, c’est aussi honorable qu’inattaquable. Généreux, solides, honnêtes, professionnels, leur posture désarme le moindre contre-argumentaire. Côté set list, votre serviteur n’aura pas pu assister à tout le concert (Ecstatic Vision oblige) pour le valider, mais le groupe semble s’employer à jouer la totalité de Gravity-X, son classique. A noter qu’il semble que leur ancien batteur (l’un de leurs anciens batteurs pour être correct) Poncho soit en charge des futs, le même Poncho qui les avait quitté pour aller garnir les effectifs de Blues Pills (et donc au chômage technique). Bref, un set qui aura laissé des traces, sans discussion possible.

ECSTATIC VISION
Alors que la foule est massée devant la grande scène en train de se faire baffer par Truckfighters, et qu’une autre part se prépare à encaisser le set de Bongripper, Ecstatic Vision se prépare à faire le meilleur usage de ce créneau horaire « sandwich » un peu ingrat, en particulier sur la petite et isolée scène Orange. Un public d’aficionados se prépare néanmoins à les accueillir dignement, et c’est – encore une fois – avec un professionnalisme, un sérieux et une efficacité bluffantes que le quatuor prend tout le monde par surprise. « Hello, we’re Ecstatic Vision from Philly. Do you like smooth jazz ? » lance Doug en laissant Kevin proposer quelques notes de saxo, hilare. Mais c’est sur du classique Ecstatic Vision qu’ils lancent les hostilités, sous la forme d’un déluge de groove lancinant et dynamique, une base de riffs répété à l’envie pendant presque dix minutes en mode kraut-rock boogie, emballant le public en moins de 10 secondes dans une frénésie irrésistible, sous des salves ininterrompues de stroboscopes entre hystérie et hypnotisme. Les gars passent du sax à la guitare, de la guitare au chant (avec ou sans mégaphone), rajoutent de l’harmonica, des effets… Mais le tout se fond dans une sorte de gigue groovy psychédélique enivrante et joviale. Impossible de discuter set list, les concerts se chevauchant, il était impossible d’assister à l’entièreté du concert, mais autant vous dire que ce fut un crève-cœur que de quitter la salle en milieu de set… Mais quel groupe de scène !

BONGRIPPER
Autant le dire tout de suite, Bongripper fait un peu tâche sur cette affiche qui fait la part belle au psyche/stoner de toutes engeances. Mais cet audacieux choix de programmation s’avère payant à plus d’un titre. D’abord, parce que ça attire du monde : la salle est blindée et se masse 10 minutes avant devant la scène de la Kranhalle. Ensuite, stylistiquement, Bongripper, c’est à la fois la contre-programmation (à cheval avec Colour Haze – qui commence un peu plus tard – c’est un peu la Belle et la Bête du stoner, Dr. Jekyll & Mister Hyde…) et à la fois un gros pavé dans la mare, pour apporter un peu de poil et de gras à cette affiche un peu trop glabre. Dans tous les cas tu gagnes… et nous en premier ! Le quatuor étasunien prend les planches sans artifice, comme d’hab. Sur une base de feedback qui végète quelques minutes tout seul dans son coin, les gars se lancent dans le riff de “Worship” pour la première série de headbangs – première d’une série annonciatrice de pas mal de rendez-vous chez le chiropracteur. Ron toujours au centre vit son truc à fond et fait vrombir sa basse en faisant claquer des cordes si lâches qu’on dirait des fils élastiques. Dennis, la force tranquille, est toujours concentré dans son coin tandis que Nick enchaîne headbangs et leads dévastatrices. Chacun fait sa part du job pour rendre hommage aux compos épiques et massives ; ils évoluent tous de manière complémentaire, et se retrouvent en harmonie à chaque fois qu’un riff de 38 tonnes pointe le bout du nez, pour mieux asséner le coup fatal à vos cervicales. Le son des instruments, bien aidé de cette véritable science du pedalboard, est juste hallucinant de lourdeur, chaque coup de grosse caisse semble accompagné d’un déluge de bitume. S’ensuivent rien moins que “Slow”, la première moitié du dernier album, jouée en entier, et le prophétique autant qu’ironique (au vu du contexte) “Endless” avant de terminer le set dans le même feedback qu’il a commencé. 3 titres, pour plus d’une heure de messe doom, le compte est là. Plus qu’une démonstration, plus qu’une claque, Bongripper a trépané le Keep it Low, et personne n’en ressort tout à fait comme il est venu…

COLOUR HAZE
Du coup, ne nous voilons pas la face, il est assez difficile de traverser le complexe et de rejoindre le set plutôt bon enfant et relax de Colour Haze. Pourtant, la bande à Stefan est redoutablement en place, et accueillante. Désormais en format quatuor de manière stable (avec l’apport de Jan Faszbender en membre à part entière du groupe aux claviers) le groupe joue ce soir dans son statut bien particulier au Keep it Low, quelque part entre groupe invité et hôte ! En effet ils jouent tous les ans sur les mêmes planches, devant “leur” public, étant donné qu’ils sont munichois eux-mêmes… La salle est un peu moins remplie que pour Truckfighters (Bongripper oblige / fin de soirée oblige/ appel du Beergarten oblige…) mais bien tassée néanmoins, d’un public jovial et qui déguste chaque solo de Stefan Koglek, le guitariste aux pieds nus. Niveau jeu de scène, difficile de faire plus rigide et statique, mais ce n’est pas une critique : l’intérêt du groupe est à trouver ailleurs, dans un autre niveau de perception, dans ce stoner très infusé et fuzzé, emballant, rythmé, propice aux jams sous maîtrise d’œuvre guitaristique, servi par un quatuor de musiciens surdoués mais jamais démonstratifs… Clairement, ce sont les champions du genre, le mètre-étalon de la performance jam, le porte étendard du fuzz psyche… La prestation est planifiée pour durer 2h… mais on sait le groupe coutumier des sets sans fin, et on se dit que cet horaire de fin risque d’être emplafonné, or nos petits corps fourbus et notre pauvre cortex cérébral en pièces suite au set de Bongripper ont bien besoin de repos…

On s’éclipse donc du Feierwerk dans la nuit, dans une température presque estivale, et on regagne nos pénates des étoiles plein les yeux… Cette affiche incroyable s’est enchaînée tout l’après-midi sans nous laisser respirer, mais on aura pu goûter à tout… et on en aurait même repris un peu parfois ! Maudits overlaps… On a apprécié ce festival à l’ambiance très sympa, entre amical et familial, où tout le monde se croise et se retrouve, fatalement, dans ce super agréable Beergarten. Quand en plus l’affiche est de ce niveau, on peut être sûr que l’on y reviendra…
Deux facteurs nous mettent en joie en arrivant au Z7 cet après-midi : 1/ la météo est plus favorable qu’hier (où un crachin occasionnel était parfois un peu ennuyeux) et 2/ sur le papier, le programme du jour s’annonce énorme. C’est donc avec un enthousiasme certain (et une certaine envie) qu’on aborde cette troisième et dernière journée…
LORD KESSELI & THE DRUMS
Ce groupe au sobriquet pour le moins énigmatique prend la scène en début d’après-midi, tandis que les festivaliers, usés par deux grosses journées dans les jambes, se réunissent petit à petit, qui avec un café, qui avec une première bière en mode “réveil”, le tout baignant dans une atmosphère d’encens, qui brûle depuis un bon moment avant le set. L’ambiance est d’autant plus étrange que la musique développée par le duo (oui, le patronyme n’était pas trompeur) est pour le moins atypique : une base très électro, des nappes et des beats lancés par le batteur, le visage caché derrière son rideau de dreadlocks… Dominik Kesseli, le Lord du titre, se présente en costume quasi-cérémonial, maquillé et accessoirisé, et déroule ses titres au jeu de guitare minimaliste, avec occasionnellement quelques fulgurances saturées plutôt rares. On aura du mal à s’emballer franchement pour cette prestation, mais on retiendra une introduction soft plutôt bienvenue avant la montée en tension.

STEAK
Une montée en tension qui se dessine très vite sur la main stage, avec les anglais de Steak. Armés d’un super light show et d’un son impeccable, les quatre musiciens font très vite la démonstration de leur efficacité et de leur solidité : chacun connaît bien son rôle et fait le job, la section rythmique est impeccable, Reece mène les débats côté guitaristique (riffs et leads), et Kippa, frontman tout en humilité, finit de dessiner le caractère sonore de l’ensemble. Un ensemble qui reste bien ancré dans un stoner assez traditionnel, de bonne facture, dont finalement assez peu de représentants sont actifs sur la scène musicale aujourd’hui. Le groupe nos gratifie assez tôt dans le set de son classique “Liquid Gold” et de quelques autres compos efficaces. Bref, un très bon concert, qui nous interroge sur la place du groupe dans la journée, finalement assez tôt… Ça laisse augurer de beaux morceaux pour les concerts suivants !

LO-PAN
Puisqu’on parle de beaux morceaux, et sans jeu de mot foireux, les gaillards de Lo-Pan montent sur la side stage… Mâchoires serrées, mise en place immédiate, les ricains ne sont pas venus là pour louvoyer. Ça commence par le super-catchy groove de basse de “Sage”, et ça ne s’arrête plus pendant trois quarts d’heure. Ce ne sera d’ailleurs pas le seul extrait du dernier album du groupe, dans lequel ils piocheront l’essentiel du set du jour – pas de motif de plainte à l’horizon, il est excellent (et il rend bien en live). Les fans les plus anciens regretteront néanmoins que la pourtant qualitative discographie du groupe ne soit pas mieux représentée… Mais abandonnons immédiatement toute perspective de déception, Lo-Pan sur scène c’est une machine à l’efficacité remarquable : un bassiste solide et nerveux, un batteur hargneux et puissant, un guitariste taciturne mais redoutable, et bien sûr l’imposant Jeff Martin, vocaliste au registre atypique, aussi mélodique que puissant. On était habitués à le retrouver plus discret, parfois en fond de scène sur tout le concert, on le retrouve aujourd’hui aux côtés de ses collègues, assuré, à l’aise dans la communication avec le public et dans son rôle désormais assumé de frontman. Du coup le kif est total, et le concert se termine trop tôt à notre goût, on en aurait bien repris un peu…

ELEPHANT TREE
Elephant Tree sur la mainstage c’est une des garanties sans risque de l’affiche du jour. Raison pour laquelle le public est présent en masse pour accueillir les anglais, qui, à leur habitude, montent sur scène avec le sourire, ça fait toujours plaisir. Les gars semblent heureux d’être là, ça se voit, et ce sera le cas pendant les 45 minutes qui viennent. Ils blaguent avec le public, embarquent leurs nombreux potes en coulisses dans leur délire (les gars de Steak montent tous sur scène à un moment pour leur apporter des shots à chacun, Igor de Stoned Jesus vient chanter sur le dernier titre…). Et musicalement, car l’essentiel est bien là, c’est évidemment redoutable d’efficacité, l’exécution est parfaite et ça part dans tous les sens : rythmiques groovy, riffs nerveux, mid-tempo ou rapides, plans heavy… Elephant Tree marie subtilité et lourdeur, comme sur cette excellente version de “Surma”, qui finit de ravir un public en joie. Il nous tarde d’entendre le nouvel album, désormais imminent…

24/7 DIVA HEAVEN
On était plutôt dubitatifs initialement de constater la présence d’un groupe de punk rock aussi haut sur une affiche d’un festival qui fait la part belle au stoner rock et ses multiples déviances. Directe émanation du mouvement Riot grrrl, le trio berlinois déboule sur la side stage à l’heure de l’apéro, bien décidées à en découdre. Et finalement, la pilule passe étrangement bien. Nous ne revendiquerons aucune expertise sur le genre musical pratiqué que nous nous abstiendrons donc de commenter, mais l’énergie déployée semble contenter le public (même si en toute logique la fosse n’est pas la plus tassée du week end) et, plus que tout, offre une parenthèse et un peu d’air frais à cette affiche dense en grosses formations stoner.

NEBULA
…et s’il fallait un énième groupe aujourd’hui pour appuyer ce postulat, Nebula débarque sur scène, tout auréolé de son statut de pionnier du genre musical qui nous intéresse. Après une parenthèse de plusieurs années qui ressemblait fort à un split, Eddie Glass et Tom Davies étaient revenus motivés et en grande forme montrer que Nebula avait encore des choses à dire et de sérieux arguments à défendre. Le premier constat à l’arrivée sur scène du trio c’est : “Mais où est Tom Davies ?”. En effet, un grand bassiste à la longue tignasse brune frisée occupe le côté gauche de la scène en lieu et place de l’emblématique musicien à l’éternelle Gibson Firebird. Point de malaise a priori, ni de signe avant-coureur de retour des mauvais travers de Nebula : simplement, le bassiste est bloqué à Los Angeles pour des besoins administratifs (pas ce que vous croyez…), et Ranch, leur technicien guitare, le remplace sur cette tournée. On se dit alors que le concert risque d’être un peu boiteux, sans l’un de ses piliers, mais maître Glass – ayant par ailleurs retrouvé ses oripeaux traditionnels et ses cheveux bruns – est bien déterminé à nous rassurer. Et il s’y emploie avec fougue et un argument inattaquable : une set list en béton armé, s’appuyant sur une discographie pour le moins solide ! D’ailleurs, même si le frontman balance quelques bons titres du dernier album Holy Shit, il va taper bien loin dans ses vieilles compos pour dégainer des petites perles, à commencer par son intro sur le classique spacy/heavy “To the Center”, mais aussi des titres comme le terrible “Giant”, “Freedom” ou encore l’agressif “Fall of Icarus”. Quel pied ! Glass virevolte, écrase sa wah wah, parle au public… Bref, il est en forme, et Nebula se repositionne comme sérieux challenger aux meilleurs groupes du genre… en activité ! Superbe surprise.

GREENLEAF
Dire que l’on n’a pas vu Greenleaf sur scène depuis longtemps serait mentir. Il serait aussi abusif de dire qu’on ne sait pas à quoi s’attendre : à coup sûr, les suédois (et un peu allemand pour leur bassiste Hans) vont débouler sur scène comme des furies, Tommi va faire voler sa casquette au premier de ses furieux headbang, Arvid va arpenter la scène de long en large avec sa démarche bien particulière et haranguer le public à foison, le groupe jouera une majorité de chansons de ses derniers albums, etc… La recette est connue… mais elle marche à chaque fois ! Et aujourd’hui ne fera pas exception, le public massé devant la side stage a la banane et est ravi, il faut dire qu’il en a pour son argent. Les hits sont là, et l’énergie est aussi au rendez-vous. Petit couac au démarrage néanmoins, avec Hans qui casse sa corde de basse : le contexte est immédiatement mis à profit par Arvid qui s’engage dans un a capella blues-soul en interaction avec le public pour passer le temps. Parfaitement adapté, bien vu, particulièrement dans la continuité enchaîné avec le très soul “Sweet is the Sound”. Pour le reste, la set list tape uniquement dans les trois derniers disques, encore une fois sans aucune surprise, mais propose ce qui est désormais du 100% tube de haute efficacité. Tout le monde était content, et on n’en attendait pas moins.

CHURCH OF MISERY
Un peu plus rares sur les planches (même si finalement assez actifs depuis leur dernier album) les japonais de Church of Misery se retrouvent bombardés bien haut sur l’affiche du jour, ce qui n’est pas pour nous déplaire. De même, le line up nous revient identique aux dernières (remarquables) interventions du quatuor, ce qui est plutôt une perspective sympa lors de l’arrivée sur les planches du groupe (Mikami étant susceptible de changer son line-up assez radicalement quand bon lui chante). On a très vite la confirmation de la bonne tenue du set en prenant un “El Padrino” en pleine poire dès l’entame de match. Enchaîné à “I, Motherfucker” puis “Brother Bishop”, une autre information se dessine : ce soir, c’est un best-of que nous sert le groupe, rarement enclin malheureusement, il est vrai, à aller chercher quelques vieilles pépites oubliées au fond de sa foisonnante et excitante discographie. Autre constante avec le groupe : ils terminent leur set 5 minutes plus tôt que prévu, gâchant donc le potentiel de nous lâcher un toujours bienvenu “Murderfreak Blues”, “Badlands” ou autre joyeuseté… Mais on va pas bouder notre plaisir, comme à son habitude le groupe est en grande forme, avec toujours Mikami (la basse sous les genoux et en pattes d’eph’) qui vient au contact du 1er rang assez souvent et un vocaliste/frontman que l’on a connu plus excité, mais qui fait largement sa part du boulot – en particulier en usant plus souvent de son thérémine, notamment sur le final de “Killfornia” en clôture de set. Bref, du bon, du très bon même, et encore un concert de très haut vol dans cette journée qui finit par être étourdissante.

LOWRIDER
Ah, là, voilà un groupe pour lequel on ne pourra pas avancer qu’il est très présent sur les routes : Lowrider, hormis un break discographique qui se compte en décennies (ce qui va beaucoup changer dans les prochains mois….), n’est pas vraiment suractif sur scène depuis sa “réactivation” il y a quelques années. Chacune de ses prestations est donc un événement en soi… il ne faut pas nous pousser beaucoup pour nous retrouver au premier rang (où on est fort serré, on n’est pas les seuls à se languir des suédois semble-t-il). Le quartette engage les hostilités sur une série de classiques, “Caravan” et “Dust Settlin'”, on est en terrain connu, mais ô combien attendu… Puis rapidement, le concert bifurque, mais pas dans le mauvais sens du terme : Lowrider a désormais un paquet de nouveaux titres dans sa besace, posés sur bandes d’enregistrement, et est bien décidé à les partager (ou les tester ?). Du coup, ils les mélangent aux anciens titres, l’opportunité donc d’entendre des titres qui seront dans leur mini-album “Postwax” à venir ans quelques semaines et… d’autres ! On vous en dit pas plus. Quoi qu’il en soit, on a droit à ré-entendre “Into The Wild” (déja joué il y a 2 ans sur la même scène – cadeau : https://youtu.be/zREKvi_4Rcg) et une poignée d’autres (qu’il est difficile d’évaluer en première écoute, soyons honnête, en tout cas ça semble solide mais perfectible en live – on garde en mémoire une intro un peu bancale…), alternés avec quelques vieilles cartouches (“Convoy” bien sûr, “Lameneshma” chanté par Ola, mais aussi des titres plus rares comme “Ol’ Mule Pepe”). Le tout défile du coup bien trop vite… mais pas que pour nous, étant donné que le groupe vient bouffer son créneau horaire en dépassant d’une généreuse dizaine de minutes ! Régisseur magnanime, fin de fest en prévision, public en joie… Ça ne dérange personne ! Trop-plein de générosité : à un moment, ça déborde…

STONED JESUS
On va commencer en mode graveleux : pour être headliner d’une affiche de ce niveau, il faut en avoir une sacrée paire, reconnaissons-le. Sans pression apparente, Igor et ses deux compères montent sur la main stage sans effet de manche et lancent direct le vieux “Red Wine” qui donne le départ à ce qui ressemble fort à une set-list “assurance tous risques” avec tous les plus grands classiques du groupe, et seulement 2 ou 3 du dernier album… Mais n’est-ce pas justement ce que l’on attend d’un headliner, ou bien ce qu’un headliner “doit” proposer à un public forcément plus large que le sien pour lui présenter toutes les facettes du groupe ? Peut-être, toujours est-il que l’on n’a pas vraiment de surprise. Sur scène, après quelques minutes pour se chauffer, on retrouve le trio que l’on connaît, à l’aise sur les planches et avec leurs instruments, avec Igor toujours solide, à la manœuvre, et Serhiy à la basse (désormais dreadlocké) loin de se laisser effacer, dans son style bien particulier, rarement pratiqué dans ce genre musical. Ça joue bien, les titres défilent et, à 15 minutes de la fin, surprise !, l’intro nonchalante du boursoufflé, roboratif et rebattu “I’m the Mountain” (qui, à la grande surprise de votre serviteur, continue de contenter les foules…). Il faut bien en passer par là… et c’est donc après ce titre fleuve que le groupe salue le public et quitte la scène. Comme Lowrider, et sans impact vu qu’ils sont le dernier groupe à jouer, ils remontent sur scène après avoir dépassé leur horaire pour un (toujours pas très original mais efficace) “Here Come the Robots”, vivifiante outro à un set qui ne se sera exposé à aucune critique : solide, sérieux, pro.

Soyons lucides : autant la veille fut la journée des découvertes, des révélations et des bonnes surprises, autant aujourd’hui fut la journée des valeurs sûres, et le constat factuel est que ce qui s’annonçait comme une journée énorme sur le papier a tenu qualitativement toutes ses promesses. Il a manqué le petit grain de folie qui aurait pu faire bifurquer l’un ou l’autre de ces sets, mais chaque groupe fut présent au rendez-vous, voire au delà des attentes dans certains cas. Et quand une scène musicale dispose d’autant de richesses et de potentiel scénique, et qu’ils trouvent des orgas aussi compétentes pour les rassembler dans des conditions aussi sympas, on peut se dire qu’on risque de revenir à Bâle (et ailleurs) encore plusieurs années sans risque de s’y ennuyer !
Oui vous lisez bien, le titre de cette chronique dit “Jour 2″… “Mais il est passé où, le jour 1 ??” vous demandez-vous, légitimement (et probablement au bord de la panique)… Pour des basses questions logistiques, votre serviteur ne put rallier la belle région bâloise pour le 1er jour du festival cette année, première fois où l’organisation a choisi de passer le format de deux jours traditionnellement à trois jours ! Pas un drame : on pourra assister à deux pleines journées de festival quand même… et quelles journées, vous allez voir !
E-L-R
On regagne donc le Z7 alors que le complexe se remplit déjà. Les copains nous racontent les concerts de la veille (aucune prestation décevante apparemment, y’avait du haut niveau…) et la journée commence avec E-L-R sur la scène latérale. Une scène latérale désormais partie intégrante du dispositif, d’une très grosse capacité (quasiment autant que la scène principale intérieure), à l’extérieur mais protégée par un barnum géant, et à la sonorisation impeccable. Les trois membres du groupe qui prennent la scène dans un décor un peu floral vont vite nous en apporter la confirmation. Les deux musiciens qui empoignent leurs instruments sur le devant de la scène se dotent d’une mine taciturne qui fait probablement partie du “package” musical pratiqué, le trio déroulant une sorte de doom metal atmosphérique se frottant au dark/post metal par moments. Le tout n’est pas sans intérêt, et peut rappeler par moments des groupes comme Subrosa (R.I.P.), la part pseudo-symphonique en moins (même si E-L-R recourt à quelques bandes et samples pour apporter un peu plus de densité que celle produite par leurs seuls instruments). Le chant est rare et l’atmosphère lourde prime, à l’image de l’attitude scénique des protagonistes, sans un sourire et quasiment sans une parole à destination de leur public. Ils quittent la scène là aussi sans l’ombre d’une quelconque célébration (un sourire, un “coucou”, un salut de la main, un cœur avec les doigts… rien !) au bout de quarante minutes qui auront finalement pas mal convaincu un public qui a fait une belle découverte.

NO MUTE
On avait déjà vu No Mute dans ce même festival en 2014, on les retrouve un peu comme on les avait laissés, avec néanmoins un second album sous le bras. Est-ce que ça justifie une place sur la main stage ? Comme on le verra au fil du week-end, il n’y a pas vraiment de “hiérarchie” entre les deux scènes, la scène latérale ayant une contenance presque équivalente… Toujours est-il que les suisses, que l’on voit peu tourner (ou faire quoi que ce soit d’ailleurs) se démènent avec leur heavy rock énervé, devant un public assez épars, et plus poli qu’excité pour tout dire. Mais sur scène ça joue avec sérieux et énergie, le chanteur crie beaucoup, le guitariste est enragé… Ils ne ménagent pas leur peine, et c’est tout à leur honneur, mais ça ne suffit pas à faire entrer ce concert dans la postérité.

HATHORS
Dans la série des groupes suisses “on est un peu obligé, on est en Suisse quand même”, voici maintenant Hathors. Le trio de Winterthur laissera une impression modérée sur le public encore un peu vasouillard. Leur heavy rock vaguement indé / grunge trouve difficilement sa place sur cette affiche, et même si leur énergie et leurs gros riffs font le job, associés à une interprétation solide, on ne tient pas encore le concert du jour…

THE GREAT MACHINE
Vous avez dit “concert du jour” ? Là on tient peut-être un bon challenger. On avait vu le trio israélien mettre le feu sur le toit du bateau du Desertfest Berlin, on s’attendait donc à prendre une claque. Ce ne fut donc pas une surprise : claque il y eut ! Les bonhommes déboulent sur scène remontés à bloc : perpétuellement en mouvements, les gars sont taillés pour la scène. Leur jeu n’en pâtit jamais, ça joue et ça joue bien (on a rarement droit à pareil jeu de basse dans les groupes stoner). les gars montent sur les retours, les amplis (spéciale dédicace à Aviran qui saute depuis le dessus de sa tête d’ampli… et se casse la gueule ! Mais finit de jouer…). Leur stoner énervé fait penser à l’enfant étrange de Kyuss et System of a Down, ce qui ne les empêche pas de développer des ambiances plus psyche par moment… Comme on n’en avait pas eu assez de leurs frasques, les gars décident de délocaliser leurs instruments dans la fosse (avec un mini kit de batterie ouais!) et vont jouer le dernier titre dans le public, avec Aviran qui se fait porter sur la grosse caisse, slamme, etc… Un gros, très gros moment de ce festival.

SAMAVAYO
Pas de surprise à l’horizon cette fois : on sait déjà en regagnant la seconde scène que Samavayo est un groupe discret mais solide. Confirmation au bout de quelques instants, tandis que le frontman, Behrang, fait montre de son talent et de la classe de son jeu. Les compos, nerveuses, dépotent (même si les mid-tempo sont aussi au rendez-vous), issus d’une disco plus dense qu’on ne le penserait. Stoner, heavy, prog, le tout se mélange sans jamais se perdre en route. Sur scène, c’est du velours : ça joue carré, c’est pro, rien à redire. Seul facteur relou : les gars communiquent beaucoup avec le public… en allemand ! Les nombreux spectateurs italiens, francophones, anglophones… apprécient ! Évidemment ils finissent par leur incontournable hit “Rollin'”, avec un segment dédié pour faire participer et chanter le public. Impeccable !

THE DEVIL AND THE ALMIGHTY BLUES
Encore une fois, pas de surprise prévue : on sait qu’on va se faire plaisir. Sur la main stage, avec des lights soignés, un son énorme, le heavy blues suave des norvégiens tape dans le mille. S’appuyant sur des assauts de guitare de toute beauté, Arnt Andersen hypnotise un public prêt à lui manger dans la main. Loin de l’attitude de frontman, le chanteur (en toge…) recule en fond de scène dès que ses lignes de chant sont terminées, pour mieux mettre en avant ses collègues. Des collègues guitaristes en particulier dont le jeu classieux rappelle les plans les plus chaleureux de Graveyard par exemple. “Root to Root” et “Salt the Earth” remportent tous les suffrages, mais c’est ce vibrant “The Ghosts of Charlie Barracuda” à la fin qui fout la chair de poule, introduit par un Andersen qui gueule le refrain en intro sans micro à destination du public… Pfiou… Superbe.

THE MACHINE
Toujours un plaisir de retrouver le trop rare trio hollandais, qui investit humblement la side stage et se lance dans un set costaud et maîtrisé. Calme et puissance. La structure power trio donne dans ce genre musical une assise parfaitement indiquée, permettant en particulier de mettre en exergue le talent de David Eering, dans les vocaux mais surtout dans son jeu de guitare, pêchu dans les riffs et incisif dans les soli ! Car derrière ça bastonne, le son de basse est énorme et la caisse claire de Davy Boogaard est redoutable. On a d’ailleurs l’opportunité de toucher du doigt cette bonne dynamique rythmique tandis que Eering doit régler un problème technique pendant quelques minutes et que le duo déroule un groove impeccable sur toute la durée. Les bonhommes terminent par “Faceshift”, le morceau titre de leur très bon dernier album sorti l’an dernier, en apothéose avec un final de plusieurs minutes en forme de déluge de soli fuzzé et de wah-wah a gogo. Orgiaque ! Encore une belle démonstration.

MANTAR
Décidément, le line-up de cette seconde journée de festival flaire bon la valeur sûre, le groupe qu’on prend toujours le même plaisir à revoir live, en sachant à l’avance qu’on va se faire bouffer cru. C’est le cas de Mantar, on sait qu’on va prendre une tarte, mais on accourt dans les premiers rangs à chaque fois. Et on peut le dire désormais, la machine est bien huilée, un peu plus à chaque fois. Les claques s’enchaînent, “Cross the Cross”, “Spit”, “Into the Golden Abyss”, etc, etc… Rien à dire. On trouvera peut-être Hanno moins loquace et interactif avec le public qu’on n’avait pu le voir au Hellfest cette année par exemple, mais on est tatillon… L’essentiel est là, à savoir une série d’assauts sans fioritures, des riffs les uns par dessus les autres… Hanno écrase son pédalier 150 fois pendant le set tandis que Erinc, en forme, explose ses futs pendant une heure, une créneau généreux pour que le duo s’exprime. Un duo qui devient trio pendant quelques instants d’ailleurs, quand Hanno invite un pote vocaliste beugler avec lui ! Une affaire qui roule.

DOPELORD
Un long trajet et quelques aléas ont créé quelques sueurs froides en coulisse quant à la présence de Dopelord sur les planches… Deux pauvres minutes après l’heure prévue, les quatre barbus polonais sont prêts à lâcher les chevaux. Et au final, personne ne se serait aperçu de rien si Piotr Zin (immédiatement disqualifié pour un pantalon à rayures violet aux limites de l’acceptable) n’arrêtait pas de s’excuser durant tout le concert ! (devant un public qui ne comprend pas trop, le set ayant commencé quasiment à l’heure) Mais très vite le non-événement est oublié et les heavy-doomeux lancent leur set sur un bon rythme, et en particulier dès le très apprécié classique “Addicted to Black Magick”, véritable carton qui met le public dans d’excellentes conditions. Pour le reste, leur musique flaire bon le vieux Sabbath Noir dès qu’ils accélèrent un peu le rythme (le tee shirt “Sabbath Worship” de Zin n’est pas là pour rien) avant de se pencher sur des plans doom plus classiques ici ou là. Le tout est apprécié comme il se doit et le public headbangue en rythme. Les problèmes techniques de Paweł Mioduchowski sur la fin (pas de son) ne viendront pas empiéter la bonne humeur du public, qui a bien kiffé… et nous aussi !

AMENRA
Incontestés headliner de la soirée, Amenra monte sur scène dans la pénombre. Van Eeckhout est le seul musicien actif en début, dos au public (on est habitués) à genoux, un spot sur lui, à taper avec une baguette sur un instrument métallique, en rythme, pour constituer l’intro bien connue de “Boden”. Le titre prend son envol, et le light show du concert se dessine, à travers la projection sur l’entièreté du backdrop, light show qui la plupart du temps constitue l’unique apport de lumière sur la scène (complété parfois par quelques stroboscopes ou spots blancs qui développent l’ambiance hypnotique voulue par le quintette)… Van Eeckhout attire les regards malgré, on le répète, son habitude de jouer dos au public – une habitude qu’il mettra à mal plusieurs fois en venant gueuler sur les premiers rangs ! Pour le reste, on appréciera la set list qui pioche dans la majorité des albums du groupe, mais la journée fut lourde et exigeante, et votre serviteur manquera la fin de ce set, en outre de la part d’un groupe qui sort un peu de nos références musicales…

Sur la papier, cette journée était solide de bout en bout, et à ce titre, elle a répondu aux attentes, voire même les a dépassées à travers quelques groupes “surprise”, mais aussi des groupes attendus qui ont su se transcender sur scène. Cette journée fut bien meilleure qu’on n’aurait pu le penser initialement, et quand on jette un œil au line-up du lendemain, on se dit qu’on a intérêt de prendre des forces, car il y a du lourd…
[A SUIVRE…]
J’ai senti le besoin d’ajouter une longue introduction à ce qu’est pour moi un concert de Sleep. Il est bien évident que la plupart des lecteurs n’en ont pas grand-chose à faire donc soyez sympa, pour aller directement dans le dur, sautez le premier paragraphe !
Un concert de Sleep n’est pas un concert classique. Jamais. Déjà parce que l’immense majorité des fans de Sleep le sont devenus lors d’une longue période d’inactivité du groupe, plus précisément après un split qui paraissait définitif. Toute la décennie 2000, celle des tergiversations autour de la commercialisation de Jerusalem/Dopesmoker, était une décennie durant laquelle Sleep live n’était pas une option. Juste un rêve enfumé. High On Fire et OM, le feu et l’eau, ça oui. Mais pas Sleep. Jusqu’à Mai 2009. L’ATP annonce alors deux lives de Sleep et soudain l’espoir nait. Quelques concerts épars, quelques invitations prestigieuses permettent de voir Sleep live dans des lieux importants. Pour moi, comme pour beaucoup de Français, le coup d’envoi à lieu à la Vilette Sonique, Grande Halle, avec les Melvins. Un concert dingue, s’ouvrant et se fermant avec « Dopesmoker », avec 4 titres emblématiques (et un long moment d’hommage à Iommi) au milieu. Définitif. Le genre de concert où l’on souhaite presque égoïstement la dissolution du groupe par la suite, afin de pouvoir dire, des décennies après « il y en a eu peu, j’y étais et c’était parfait ». Mais la musique live c’est le partage et il en faut pour tout le monde. Ce qui était rare l’est de moins en moins et Sleep joue au Roadburn (2012 / un concert beaucoup trop fort, avec plus d’amplis que jamais et une grande émotion), au Hellfest (2013 : un grand live) et dans de nombreux autres endroits notables. Et puis, sans rien dire, le groupe publie un nouvel album. Un grand, un gigantesque album (The Sciences), puis un live (At Third Man Records, 4 vinyles, pressés immédiatement après le live, une grande, grande pièce de collection à la qualité sonore inestimable) et Sleep de jouer un peu partout. De partir en tournée. Les voilà qui remplissent le Trabendo l’année passée, pour un concert finalement un poil poussif, combinant les désavantages de la fraicheur (premier concert de la tournée) et de la fatigue (Pike revenait d’une longue tournée avec High On Fire), drôle de mélange. Mais Sleep, insatiable continue sa (re)conquête de l’espace, sa carrière sans faute, passant juste du statut de légende à celui de groupe légendaire. Sans perdre en prestige, ce statut ramène juste le trio dans une réalité physique dans laquelle nous ne l’avions jamais vu évoluer, nous autre qui ne pouvions, début 2000 que les imaginer flottant dans un infini cosmos.
Ce n’est jamais neutre en émotion que l’amateur de musiques lourdes se rend au Bataclan. Devant le 50 boulevard Voltaire on croise ce que Paris compte de préoccupés de la fuzz et de yuppies habitués de la salle et rompus par le côté happening des choses.
Nous étions quelques centaines curieux d’entendre Pharaoh Overlord, qui affiche déjà pas loin de 20 ans d’expérimentations sonores, les ayant emmené aux confins du psychédélisme à fuzz (2001/2005) à autre chose de plus électronique ces dernières années. Un rapide coup d’oreille à leur discographie permet d’imaginer qu’en ouvrant pour Sleep le 08 mai 2012 à Helsinki, le duo finlandais (trio à l’époque) jouait une tout autre mixture que ce soir. Car Pharaoh Overlord en 2019 est plus proche de Perturbator que de Grails (avec qui ils ont partagé un split en 2012) désormais. Et ces mots n’ont pas vocation à faire office de compliment pour quiconque a repéré mes obsessions musicales. Reste que le public semble enchanté, que les morceaux sont efficaces et que tout le monde prend du bon temps, sauf votre vieux con de chroniqueur, qui ne goute que très peu au nombre invraisemblable de bandes enregistrées (jusqu’à des lignes de chant !!), à la grosse caisse électronique et à l’aspect dansant de la chose, moi qui était venu entendre « Mangrove » et qui me retrouve devant un clone de Steve Jobs et son compère imitant un gorille tandis que joue derrière une bande électro.

Bref je suis ronchon mais cela ne dure que très peu de temps puisque bien vite résonne la transcription radio des premiers pas de Neil Armstrong et Buzz Aldrin sur la lune, annonciatrice de l’entrée des cosmonautes du riff sur scène. La salle est plutôt bien garnie (même si les balcons sont fermés et les cotés très praticables) lorsque Pike, Cisneros et Roeder lancent « Marijuanaut’s Theme ». Et à ce moment, un constat, rejoignant mon introduction, est à faire : dois-je juger la prestation de Sleep à l’aune de c’est qu’est un concert, ou à l’aune de ce qu’est un concert de Sleep ?

Car bien sûr les morceaux sont incroyables, bien sûr l’aspect monolithique de la chose est saisissant, mais le son est trop faible (trop normal quoi) et le tempo trop rapide (trop normal quoi). Cisneros se permet de dire bonjour et merci (normal quoi) et cet aspect bon enfant et normatif incite le public à danser, voire par deux fois à monter sur scène (hérésie, absurdité que Pike règlera d’un coup d’œil insistant aux Roadies qui vireront les deux malotrues poliment mais prestement) là où l’habitué de Sleep attendait un décollage (de tympans et dans l’espace). Le concert était prenant, « Sonic Titan », toujours anthologique, fera bouger les nuques avec une frénésie rampante, et que dire des longues jams, éthérés, spaciales, Floydiennes, incorporées au milieu de « Leagues Beneath » et « The Botanist ». Des moments sublimes. « Giza Butler » sera, il ne pouvait en être autrement, un chouette moment de basse, avant de nous rouler dessus avec autorité et bien sûr le final « Dragonaut » sera propice à ce que le son soit enfin un poil écrasant et que la fosse puisse rendre l’influ en énergie brute. Mais Sleep a été et doit être plus que ça. Sleep ne sied pas à une tournée, ne sied pas à une salle, à des normes (sonores ou d’us et coutume de concert), Sleep ne sied pas à une foule cosmopolite, pensant avoir affaire à un concert comme un autre, un live de Sleep devrait toujours être un évènement, quelque chose sur la brèche, perdant en maitrise ce qu’il gagne en puissance. Et ce ne fût pas le cas ce soir. Ce fut un grand concert avec applaudissements, jets de médiators et set list à photographier, ce fut un live avec un son règlementé à 105db, comme la loi l’exige (et des pointes à 128 ça reste Sleep), avec un public s’autorisant à passer la barrière symbolique de la scène, les anneaux de Saturne, avec des invectives vocales (on a craint le « à poil » à plusieurs instants), avec des bonnets Sleep vert à 20 euros et des selfies dans la fosse.
Seul les ingénieurs de la NASA auront la compétence pour définir si cette ambivalence dans le ressenti du chroniqueur vient du fait que Sleep n’est pas un groupe comme les autres ou si votre dévoué est devenu un sacré vieux con.
Tentative de réponse au Desert Fest Anvers dans quelques jours…


Ah, le mois d’octobre ! Ses innombrables tournées, ses festivals tous les weekends, ses semaines constellées de dates toutes plus appétissantes les unes que les autres. C’est un véritable pain béni pour les amateurs du genre. Le sésame du jour nous emmène au Gibus de Paris. Un événement à l’estampille Below The Sun qui propose un trio prometteur : d’un côté les deux groupes britanniques Elephant Tree et Steak, coutumier des scènes parisiennes, de l’autre les Américains de Lo-Pan qui inaugurent ici leur premier show dans la capitale.
 Elephant Tree
À son habitude, Elephant Tree monte sur scène de bonne humeur et bien déterminé à la partager. Armés d’un doom puissant et de ses deux voix si complémentaires, les Londoniens déchaînent leurs envoûtants murs de sons. Le parterre de convives demeure un tantinet épars en ce début de soirée, laissant encore ces quelques mètres carrés de no man’s land entre la scène et le public. Un timide espace qui disparaitra à l’orée de « Dawn », « Wither » et d’un couple de nouveaux titres dont « Wasted ». Enfin, plus si nouveau que ça si l’on considère l’avoir déjà entendu à l’occasion de leur précédente tournée, il y a exactement un an de cela. Tout comme ce charmant John Slattery, accompagnant désormais le trio au synthé, à la guitare et prêtant même parfois sa voix. Il est ce coup-ci officiellement introduit par ses comparses, qui en profitent pour le taquiner sur ses origines irlandaises lorsqu’il admet ne pas raffoler du whisky offert par le serveur du Gibus. Au-delà des sourires échangés et vannes qui mettent tout le monde à l’aise, l’équipe de Sam et Jack ne plaisante plus quand elle prend les instruments. Le flot des riffs lourdement groovy et des mélodies hypnotiques font s’agiter les têtes et transportent l’audience dans un monde à part ; sur « Apothic Blues » on s’approche presque d’un hymne rituel sur son final désormais caractéristique. Le tout offrant une prestation de sept morceaux qui ne soulèveront qu’une seule interrogation : à quand ce nouvel album que l’on nous promet depuis si longtemps ?
 Steak
Le temps d’un Picon et d’un tour sur le merch, Steak s’installe déjà. Plus réservés que leurs prédécesseurs, il ne faut surtout pas commettre l’erreur de les sous-estimer. Grosse batterie, riffs avec la dose de fuzz qui bouscule, voix musclée, le tout donnant naissance à un desert-rock stellaire plein d’une redoutable énergie. Mais au cas où on voudrait à l’inverse les prendre trop au sérieux, n’oublions pas que leur setlist reste écrite sur des assiettes en carton décorées d’une jolie collection de zobs. N’oublions pas non plus l’absence de quatrième corde sur la basse de Cam qui n’apprécie de toute évidence guère s’encombrer du superflu. Le sort voudra d’ailleurs que sa pédale d’effet s’arrête de fonctionner après le premier morceau et le forcera à se brancher directement à l’ampli. En dépit d’une foule qui mériterait d’afficher un peu plus de mobilité, les têtes s’agitent et les bras se lèvent. Notamment en face de titres dévastateurs comme « Living Like A Rat » ou « Coke Dick ».
 Lo-Pan
Pour le clou du spectacle, c’est au tour de l’équipe des crânes rasés en provenance de Colombus Ohio de prendre empire sur scène. Et le projet n’est ni plus ni moins que de présenter leur dernière production en date ; le fameux Subtle façonné chez Aqualamb Record. Ça commence par le groovy « Sage », puis les fondamentaux s’enchaînent : « Old News », « Savage Heart », « A thousand Miles » ou encore la sulfureuse « Ascension Day ». Pourtant, pour leur premier concert à Paris, c’est une audience timide qui les accueille. De par un manque d’agitation, l’absence de pogos dans des moments où les Parisiens ont l’habitude de se jeter les uns sur les autres, mais aussi de par la porosité croissante de la fosse. D’un rapide coup d’œil, on constate qu’il s’y trouve moins de monde que pour les deux groupes précédents. C’est fort dommage, car les absents n’auront jamais eu si tort que ce soir. La performance scénique de Lo-Pan met à l’honneur la qualité de composition du studio. Leur heavy rock burné à souhait nous régale. La basse ronronnante d’un Skot Thompson en semi-grand écart, les yeux exorbités, les Paiste de Bartz au supplice sous le tabassage de rigueur qu’elles subissent, les riffs acérés de Chris qui, rappelons-le, sort tout juste de l’hôpital avec un bandage au pouce. Sans oublier le chant de Jeff Martin qui donne son empreinte au groupe. Précis, mesuré et, disons-le, excellent. Attention toutefois à ne pas rester trop près de la scène sous peine de manquer du volume nécessaire pour l’apprécier. En plus d’être balaise sous les projecteurs, les gars de Lo-Pan affichent des sourires et partagent leur reconnaissance de pouvoir jouer ici, le tout teinté d’une certaine humilité somme toute assez touchante. Le set s’achève presque trop tôt (22h30), avec ce désir coutumier de vouloir toujours un dernier morceau de plus. La marque d’un show de qualité.
 Lo-Pan
Le visage de nouveau au frais à l’extérieur du Gibus, on se dit qu’on a quand même de la chance. La saison des tournées bat son plein, et comme à chaque fois, les copains de Below The Sun savent nous dégoter les combos aux petits oignons qui transforment un vendredi soir classique en une sacrée expérience musicale.

Ce soir, c’est soirée métal à la Cartonnerie, la seule « vraie » salle de concert de la belle endormie, la cité des sacres, Reims (une grande salle évènementielle de plus de 8000 places est actuellement en construction à quelques centaines de mètres de là, ouverture prévue dans 2 ans si tout va bien). Quelques bars musicaux (comme le Dropkick bar, le Floyd ou l’Appart’ café) proposent souvent des concerts de notre genre de prédilection (Mars red sky est notamment passé fin mars et Valley of the sun déboule ce dimanche) mais rien de bien folichon à se mettre sous la dent. Bref, les habitués de la Cartonnerie ont donc été étonnés de voir la tournée de Monolord passer dans la Marne, plus habituée aux Flâneries musicales (du classique!) ou un festival de Jazz (soupir…). Pourtant, seulement une petite centaine de personnes ont daigné faire le déplacement, dommage car le concert de ce soir méritait une plus grande audience, l’album « No Comfort » recevant d’excellentes critiques depuis sa sortie et mon petit doigt me dit qu’il sera en bonne position dans les classements de fin d’année des meilleurs albums de 2019. Après tout, les absents ont toujours tort, tant pis pour eux, cela ne nous empêchera pas de passer une bonne soirée !
La Cartonnerie possède 2 salles de concert : la plus grande, au deuxième étage, peut accueillir pas loin de 1000 personnes mais ce soir, ce sera dans la plus petite salle située au premier étage que les festivités vont se dérouler. Canapés aux coussins rouge vif taillés dans des cuves en zinc, assises design taillées dans la ferraille, bar attenant à la salle, ambiance intimiste aux lumières tamisées… un régal ! Et en plus, le son est réglé aux petits oignons… Bon allez, c’est pas le tout mais on est là pour prendre une cargaison de bûches dans la tronche, voici un trio de chevelus qui s’avance…
Firebreather
Forts de leur excellent album « Under a Blood Moon » paru quelques jours plus tôt, les suédois de Firebreather investissent la scène et invitent immédiatement les timides barbus éparpillés aux quatre coins de la salle à se rapprocher de la scène, ce qu’ils font avec gourmandise dès les premières mesures de « Closed Gate », première mandale qui met tout le monde d’accord : Firebreather ne fera aucun compromis ce soir et va envoyer du lourd, du très lourd ! « Our Souls They Burn » continue sur la lancée avec un son à déniaiser une nonne… Matthias Nööjd hurle comme un damné dans son pauvre micro qui n’en demandait pas tant et la salle succombe et se laisse aller à un festival de headbanging rythmé par les coups de boutoir du batteur Frederik Käll, en très grande forme. « Dancing Flames », le titre d’ouverture de « Under a Blood Moon », est envoyé à nos visages avec toute la délicatesse que le genre réclame, c’est-à-dire sans aucune clémence pour nos pauvres esgourdes mais putain, quelle énergie ! « The Siren », quatrième et dernier extrait de cet album (qui, décidément, mérite qu’on s’y intéresse…), finira d’achever les derniers courageux qui feront une véritable ovation au trio, ravi d’un tel accueil.




Monolord
Une heure avant leur concert, j’ai pu rencontrer Esben, Mika et Thomas pendant une vingtaine de minutes (une interview que vous pourrez lire ici dans quelques jours, d’ailleurs…) et j’ai trouvé les gars un peu fatigués. Forcément, je me suis dit bêtement que cela allait se ressentir sur scène… Monumentale erreur ! Dès les premières secondes de « Where Death Meets The Sea » (tiré de l’album « Rust »), l’auditoire est mis au parfum : la distribution de bûches aura bien lieu, pour le plus grand plaisir de tous (après tout, c’est pour çà qu’on est venus, non?). La lumière minimale et la sublime toile tendue sont un bonheur pour les yeux (un peu moins pour les photos…). « Lord Of Suffering » enchaîne sans temps mort et l’instrumental « Audhumbla » (extrait du premier opus « Empress Rising ») est balancé avec une puissance de dingue avant que l’orgue funéraire de « Rust » ne fasse faire hurler le public qui va littéralement se déchaîner (on notera quelques cervicales en miette et plusieurs kilos de cheveux tombés au sol).
Euh, au fait les gars, vous n’avez pas un nouvel album qui vient de sortir ? Vous comptez jouer quelques titres de « No Comfort », quand même ? Le riff pachydermique de « The Bastard’s Son » résonne alors et nous rassure immédiatement. Bonne nouvelle : les nouvelles bombes de Monolord réussissent parfaitement le test du live. Le sublime « Larvae » suivra, ainsi que « The Last Leaf » (quelle claque celui-ci en live ! Quel son ! Quelle puissance dans la gratte de Thomas ! Quelle… ok, vous avez compris…) qui conclue la soirée en beauté. Hein, quoi, vous dites ? Il ne manque pas quelque chose ? Une babiole du nom de « Empress Rising » ? Evidemment, c’est sur un « Empress Rising » de furieux (pléonasme) qui voit Monolord achever la foule (Thomas en descendra même au milieu de la fosse pour un final dantesque) qui en aurait bien repris une louche que s’achève ce concert d’exception. Placé au premier rang avec mon pote et nos enfants respectifs (eh oui, il faut bien les éduquer dès le plus jeune âge !), ma fille de 10 ans et le fils de mon pote se verront remettre un médiator de Thomas et une baguette d’Esben (baguette qui a bien souffert, croyez-moi!) sous les bravos du public qui apprécie le geste (et qui va nous jalouser jusqu’à la sortie!).





Venus rencontrer le public après le concert, les musiciens des 2 groupes saluent tout le monde, discutent avec le sourire, signent les vinyles fraichement acquis au merch (ils se sont d’ailleurs fait dévaliser…), tapent dans les mains des enfants en nous disant à quel point c’est génial de voir des gosses au premier rang d’un concert comme celui-ci… Bref, un pur bonheur de pouvoir assister (et faire assister à nos enfants) à un concert comme celui-ci ! Merci à Firebreather, merci à Monolord (pour leur accueil chaleureux pendant l’interview et pour leur prestation) et merci également à la Cartonnerie d’avoir osé les programmer car le public rémois est réputé difficile et froid mais ce soir, tout le monde à fait mentir les vieilles réputations tenaces…
Une semaine à peine avant la sortie du très attendu “The Task Eternal”, leur nouvel album, Mars Red Sky a invité une poignée de potes pour fêter ça, et proposer quelques titres en exclu.
L’ambiance est cool, la chaleur de la journée se prolonge dans la cour de Rock & Chanson, la dynamique asso qui gère cette petite salle dans l’agglo bordelaise. Le bar fait le plein, la plupart des gens se connaissent et déconnent, on retrouve un petit stand de merch improvisé… Le houblon coule et les sourires sont au rendez-vous. L’heure du concert arrivant, la salle se remplit tranquillement, avant que le trio des régionaux de l’étape monte sur la petite scène. L’Antirouille est la salle parfaite pour cette petite sauterie : de petite capacité, elle offre pourtant des conditions scéniques impeccables (son, lights, projections…) à un petit public de happy few.

Histoire de donner le ton, le trio lâche tout de suite une paire de nouveaux titres, le très catchy “Reacts” et le heavy “Collector”, que tout le monde connaît bien maintenant puisque déjà dévoilé depuis juin dernier. Les gars sont concentrés, mais ça paye : l’interprétation est impeccable, un sans-fautes. Et quand bien même, eut-ce été le cas, Jimmy nous rappelle avec le sourire “on vous a tous invités pour que vous n’attendiez pas de retour sur investissement, donc on a le droit de faire des pains”… Ils se détendent d’ailleurs assez vite et chaque lancement de nouvelle chanson est propice à une petite blague où une série de remerciements chaleureux et autres clins d’œil entre potes…
S’ensuit un petit passage autour de l’album “Apex III”, mais pour mieux revenir au nouveau disque avec encore une salve d’inédits. Ne boudons pas notre plaisir, nous sommes aussi là pour ça ! Et là encore, on est assez bluffés, pour deux principales raisons. La première est que les morceaux passent super bien en live, très proches des versions album, et même parfois déjà adaptés au live (oui, l’album tourne sur nos platines depuis quelques semaines, veinards que l’on est, donc on peut comparer). L’autre, c’est que ces nouveaux titres passent parfaitement bien et s’intègrent à la perfection aux plus anciens – pour tout dire, à la fin de chaque nouveau morceau on se dit qu’on tient un titre qu’on pourra retrouver longtemps et souvent sur les set lists de référence du groupe. Il y a à chaque fois ce côté entêtant et efficace devenu la compétence clé du combo girondin. Même le complexe “Hollow King”, quasi prog parfois, avec ses rythmiques barrées et son final aérien et apocalyptique (!), passe l’épreuve. Ce morceau éprouve d’ailleurs nos trois gaillards, pas mécontents de souffler un peu à l’issue de cette série en revenant en terrain connu, à savoir le classique “The Light Beyond” (qui se termine avec la reprise de la conclusion de “Apex III”, avec la ligne de chant poignante de Julien Pras… frissons garantis).

Un Julien Pras en tout point parfait ce soir, très en voix notamment (ses lignes de chant sont toujours justes, atteignant des notes improbables avec une apparente facilité) et toujours efficace sur ses parties de guitare, manipulant ses pédales d’effet comme un virtuose. Ses compères ne sont en outre pas en retrait, assurant la colossale rythmique et la base mélodique, éléments ô combien emblématiques du son du groupe. Rien de mieux pour illustrer cette parfaite alchimie qu’un titre instrumental, et ils nos dégotent à cet effet le lancinant “Arcadia”, un titre rarement joué live, sur lequel ils semblent bien prendre leur pied. Enfin, rien de très déstabilisant pour la conclusion du set, avec “Marble Sky” et “Strong Reflection”, très attendus.
Les musiciens posent leurs instruments avec le sourire et se joignent à nouveau au public pour aller profiter de la fin de soirée dans la salle et dans la cour, relax. On vient l’air de rien de se taper un set de 1h30 sans s’ennuyer une seule seconde (à force de les voir en festival ou en première partie, on avait oublié ce que ça faisait un vrai set de Mars Red Sky, sur la longueur !). Confiants dans la qualité et le potentiel live des nouveaux titres (ils ont quand même joué 6 des 8 titres de leur nouveau disque ce soir !), on est pour le moins enthousiastes à la perspective de les retrouver sur scène dans les prochains mois. Il nous tarde déjà !
Merci Mars Red Sky pour l’invitation, on a passé une somptueuse soirée…


Si vous étiez sur Paris hier soir, vous aviez le choix: aller voir PSG – Real Madrid au Parc des Princes pour la modique somme de 3 SMIC ou alors vous pouviez vous rendre au Supersonic, à quelques encablures de la place de la Bastille, pour assister à 3 concerts totalement gratuits! Le Supersonic est une petite salle qui peut contenir environ 200 personnes (voire un peu plus si on tasse bien) avec 2 bars, un au rez-de-chaussée et un autre à l’étage, accessible par 2 escaliers en métal de chaque côté de la salle. L’ambiance façon loft industriel est exceptionnelle: des poutres en métal, des inscriptions phosphorescentes au bar, un balcon qui surplombe la scène et une scène visible depuis l’extérieur grâce à une immense baie vitrée qui permet aux retardataires et aux recalés du soir de profiter malgré tout de l’image.
Qilin
C’est aux régionaux de l’étape que revient le plaisir d’ouvrir la soirée. Les parisiens connaissent à peu près la moitié des personnes présentes et l’autre moitié va instantanément devenir pote avec eux tant leur stoner instrumental est addictif. D’entrée, on est surpris de les voir évoluer en trio, le guitariste Frédéric manquant à l’appel (il sera excusé par ses camarades). Dès les premières mesures, on découvre un son rugueux et puissant et la paire Cold Pine Highway – Labyrinth, qui ouvre dans cet ordre leur EP paru en 2017, retourne une salle déjà largement acquise à sa cause. Sun strokes the wall continue de faire chavirer l’assistance et leur set se conclue par Lucid dreams et Head of Medusa, non sans avoir chaleureusement remercié le public et l’orga. Vivement l’album promis dans quelques mois par les gars!
Dirty raven
Après Qilin, voici venir les rémois de Dirty raven. Eux aussi sont en préparation d’un premier album et ils ont fait spécialement le déplacement depuis la ville des sacres pour l’occasion. U.F.O. se charge d’installer l’ambiance. Hypocrisy, tiré de Rust for blue, leur dernier EP en date, confirme ce qu’on pouvait penser dès les premières notes: les corbacs sont en forme et le public, réceptif, leur fait bien comprendre en headbangant en cadence. Desert of champagne accélère le rythme, tout comme le rugueux Hell on heels qui voit Bernard et sa guitare composer avec quelques problèmes de son. L’énergie déployée par le groupe fait passer la pilule et le public peut se délecter de Rockabilly girl et d’Open your doors et son riff pachydermique. Leur set se termine par un Brainwashing qui finit de convaincre les spectateurs: malgré ces regrettables problèmes de sono, les corbeaux ont assuré et le public les applaudira chaleureusement. Contrat amplement rempli.
Valley of the sun
Il est plus de 22h30 quand s’approche le groupe star de la soirée: les américains de Valley of the sun. Il n’y a plus un centimètre carré de libre devant la scène (ni dans la salle d’ailleurs), le public est agglutiné comme des sardines en boîte (il est quasiment impossible de se déplacer ni d’emprunter les escaliers) et les quelques malheureux qui attendent dehors n’auront que leurs yeux pour pleurer car ils vont rater un set dantesque lancé par un Old gods aux petits oignons. La troupe de Ryan Ferrier est en grande forme et Hearts aflame (tiré de The saying of the seers) va faire dévisser plus d’une cervicale. Le son est terrible (dans le bon sens du terme) et on sent bien que Valley of the sun maitrise son sujet. A l’américaine, quoi! All we are voit le public dévaster le pit et les premiers rangs souffrent pour repousser les attaques continues (certains se risqueront même au slam, assez dangereux vu le peu de hauteur sous plafond). Means the same ne va pas calmer les ardeurs d’une salle chauffée à blanc et la foule se balance d’avant en arrière comme un seul homme. Ceux qui sont au pied de la scène manquent de se la manger, Ryan Ferrier a failli se retrouver avec son micro planté dans l’oeil et la bagarre fait rage pour tenir debout. Vision impressionnante que cette fosse qui se lâche complètement dans ce espace plus qu’exigu. Le très attendu (enfin, surtout par votre serviteur…) Centaur rodeo, extrait de la galette Electric talons of the thunderhawk, ne calmera pas les ardeurs d’une assistance totalement en transe (un slammeur finira même balancé sur scène, un autre escaladera le balcon…) et tout le monde est happé par Valley of the sun. Mais la fin approche, Into the abyss et Riding the dunes finissent d’achever les plus courageux avant que les américains ne gratifient le public d’un titre supplémentaire en rappel. Les applaudissements sont nourris, les musiciens tapent dans les mains et saluent chaque personne qui vient leur dire tout le bien qu’ils pensent d’eux et les vinyles d’Old gods s’arrachent comme des petits pains. Et la foule quitte la salle, hagarde et vidée par ce qu’elle vient de vivre, une expérience à nulle autre pareille: celle d’un groupe qui aime la musique, qui aime le rock, qui aime partager sa passion et, surtout, qui la vit à fond. Merci encore, messieurs…
Voilà, il est temps pour chacun de regagner son foyer, de retourner à sa vie et de dire un grand merci à Below the sun pour ce genre de soirée qui nous fait aimer la musique live, qui nous fait sortir de notre torpeur quotidienne et qui nous fait vivre des moments de grâce et de bonheur. A la prochaine!

(Attention la phrase qui suit est la plus longue jamais écrite par l’auteur, ce dernier n’ayant pas les qualités littéraires suffisantes pour l’aérer avec une ponctuation adéquate. Merci de prendre un peu d’élan avant de la lire).
De retour de vacances, beaux frais et halés pour certains, encore gris du labeur estival pour d’autre, parfois de retour de quelques festivals (OM en Suisse au Palp festival, tout juste revenus du Metal Mean ou du Motocultor) pour les plus chanceux, la faune parisienne (et un peu plus), s’est donnée rendez-vous pour la plus boueuse des dates de l’année, le plateau sludge XXL qui sillonne l’Europe : EyeHateGod et Dopethrone, de nouveaux réunis à Paris un an après avoir livré une guérilla urbaine légendaire rue Jean Pierre Timbaud. (C’est bon respirez, allez y). Mais c’est tout d’abord à Putrefaction of Rotting Corpes (dit P.O.R.C. pour d’évidentes raisons charcutières) d’ouvrir les hostilités. Et « hostile » n’est pas un vain maux : P.O.R.C. se présente tee shirt de Canibal Corpse saillant sur fond d’extrait de Snatch (si si la recette porcine pour se débarrasser de quasiment un corps humain entier, sauf les dents, inoubliable) et délivre un grind/death putride, lourdingue, sludgy qui frappe sourdement et lacère les vicaires. Le public présent est en plein trip(es) et applaudît chaleureusement l’opération. Bravo.

Dopethrone vient ensuite et l’on sent immédiatement que Vincent Houde, guitariste et vocaliste du groupe n’est pas dans son assiette (de poutine, Canada oblige). Pâle comme tout, ce dernier n’a pourtant rien perdu de son plaisir à attaquer ses cordes de guitares et le sludge du groupe roule sur les crânes dans la fosse. Il est heureusement soutenu dans sa tâche de brailleur par l’impressionnante Julie, désormais intégrée au groupe, dont le visage entièrement tatoué a de quoi sidérer le chaland. Cette dernière s’époumone et happe l’assistance, vocifère ses souffrances tandis que le groupe la supporte à grand coup de boue. Le public, hétéroclite (une belle proportion de femmes, des gens de tous les genres, de toutes les couleurs, un golgoth et même un fauteuil roulant pour organiser le pogo) a du répondant et le concert revêt de jolis pourtours de folie furieuses sur « Scum Fuck Blues », l’hymne du groupe, chanté à trois voix avec l’apport de Sam Kun, chanteur de Welcome X (et mon pote aussi hein, et mon pote il crie plutôt bien dans le micro quand on lui en met un sous le nez). Le public semble comblé même si les habitués du groupe savent que les canadiens sont capables de faire bien plus anarchique lorsque le groupe est en pleine possession de ses moyens.

EyeHateGod prend la suite à 22h passée et n’est pas venu pour faire de quartiers. Le groupe reprend possession d’une salle, Glazart, qu’ils avaient atomisé en 2015 lors d’un concert épique, joué tard (car arrivé tard sur les lieux) dans une ambiance plus punk que jamais. Passé à une seule guitare depuis le départ l’an passé de Brian Patton, le gang sait qu’il peut se reposer sur Jimmy Bower (amaigri, en belle forme, s’étant peint avec malice des croix inversés au stylo sur les joues) et le set du groupe sera heavy comme jamais. Hardcore même. En 2015 le groupe avait livré une prestation pleine de hargne et de violence, sur le fil du rasoir, en 2018 le set dans la rue pour la défaite de la musique était l’expression musicale du chaos et il était impossible que le concert de ce soir ait la même portée extra musicale. EyeHateGod a donc opté pour un groove du bayou et une maitrise de tous les instants. Que ce soit lors des imparables moments de gloire que sont « New Orleans In The New Vietnam » ou « Sister Fucker » (introduit par Mike Williams de la meilleure des façons : « This is a song about fucking his sister »), ou le nouveau titre dévoilé lors du set, les morceaux du quatuor font mouche et le public devient complètement dingue à mesure que les riffs s’enchainent.

Une fois le set terminé, chacun récupère ses affaires (« quelqu’un aurait vu mon portefeuille ? », lance un jeune homme avec son tee shirt Napalm Death, « quelqu’un aurait vu mes dents ? », surenchérit un mec hilare) et boit une dernière bière, se remémorant les venues du groupe dans la capitale sans jamais avoir le souvenir d’avoir été déçu. La marque des grands.
Encore une tournée “discrète” de la part du passionnant quartette de Caroline du Nord, qui aligne une dizaine de dates un peu chaotiques, à l’arrache, avec une promo a minima. Et au milieu de cette tournée, une date pour le moins surprenante : un pub à Hossegor, une ville plus connue comme spot de surfers que comme ville à l’activité live significative… On ne pouvait décemment pas rater ça.
C’est donc après une légitime après-midi à la plage que l’on se pointe sur place dans une sorte de zone commerciale sur le haut de la ville, dans les pins, cernés par les magasins d’usines de toutes les marques de surfwear imaginables… Au milieu, L’Ile du Malt, un pub / bar à bières déjà bien blindé en fin d’après-midi, alors que trône à côté de sa terrasse cet énigmatique petit barnum (estampillé aux couleurs d’une marque de surf bien connue…).
La soirée commence avec les punk rockers locaux des Dead Krazukies. Le combo, qui ne manque ni de bonne humeur ni d’énergie, aligne ses compos pendant un peu moins d’une heure devant un public qui compte une bonne part de leurs potes ! Le son, crachant d’une paire de petits haut-parleurs et des amplis en façade, est étonnamment bon vu le contexte : les groupes jouent quand même en plein air, sur l’équivalent d’un petit parking ! Le punk rock mélodique du groupe d’Hossegor, bien emmené par une frontwoman très à l’aise (un peu en difficulté néanmoins sur la fin – la faute aux fêtes de Bayonne la semaine précédente semble-t-il…) fait bien le job de chauffer le public, et même si ce n’est pas notre genre musical de prédilection, on passe un bon moment.
 The Dead Krazukies
La nuit se couche et les musiciens d’ASG se sont affairés à mettre en place leur équipement (eux-mêmes hein, on est pas bégueule chez ASG) avant de lâcher, direct – à froid – les premiers accords de “Mourning of the Earth” (un extrait d’un split avec Black Tusk), pêchu à souhait. Le groupe est très, très bien en place, comme on les a toujours connus : Andy Ellis est à fond sur sa basse, Jonah Citty est concentré sur ses lead, Scott Key martyrise ses futs sans répit… Une belle machine en œuvre sous nos yeux. Quant à Jason Shi, comme d’hab, le frêle frontman mène la barque avec énergie, efficacité et talent : son chant est impeccable, ses plans de guitare saignants et implacables… Tout est là, et avec cette touche de sympathie en plus qui finit de convaincre un public qui, bière à la main, n’en peut plus de sourire et de headbanguer. Un public un peu atypique d’ailleurs, composé d’une poignée de fans du groupe, d’une part de rockers ou de metalleux avertis, et d’une grosse rasade de surfers et de curieux ! Mais ça fonctionne !
La set list est efficace, intègre et respectueuse : à peine deux extraits du dernier album, le reste étant constitué d’extraits de Blood Drive et surtout du vieux mais sublime Win Us Over (pas moins de cinq extraits !). C’est d’ailleurs avec “Right Death Before”, enchaîné avec “Avalanche” et “Blood Drive” (quel triplé de haut vol), que le concert prend un réel virage et décolle : là, tout le monde est à fond dedans, et le public mange dans la main des américains. A partir de là, c’est cartouche sur cartouche, et tout est dans la cible : “Gallop Song”, le reposant “Day’s Work”, puis une furieuse version de “Dream Song”, qui voit les premiers rangs commencer à se frotter les uns sur les autres et entamer un mosh un peu boiteux qui ne s’interrompra plus.
Une dernière série de titres viendra finir de mettre le feu, avec un “Horse Whipper” rajouté un peu à l’arrache (était-ce prévu ? On s’en fout…) pour finir de botter les derniers culs et filer les derniers sourires.
Bon esprit, communication, headbanging, bonnes bières, ambiance amicale et familiale, super météo estivale, décibels, saturation, fuzz… On a passé une sacrément bonne soirée. Et on a eu la confirmation, encore et encore, qu’ASG est un groupe d’exception, de grand talent, qui mérite depuis longtemps un succès qui lui fait toujours défaut. Il serait temps que ça change…

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