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À l’instar de The Awesome Machine, il est très difficile de cataloguer Spoiler. Les Hollandais proposent une sorte de gros hard rock très heavy que l’on pourrait rapprocher de, ben personne ! Parce que même s’ils n’ont rien inventé (loin de là), leur propension à piocher des influences un peu partout et à les recracher d’un coup sur vinyl force l’admiration. Les relents 70’s sont bien présents (notamment au niveau du chant – tantôt chaleureux, tantôt hurlé -, des chœurs, …), mais à aucun moment la musique du groupe ne paraît datée, belle performance. Au contraire, on se laisse vraiment emporter par ces envolées de grattes (‘Mud’N’Glitter’, ‘Wear Me Out’), ces riffs plombés (toutes les chansons !!), ces parties de lead aériennes (‘Million’) et ces breaks heavy (‘Jack’). Au rayon anecdote, notons aussi la reprise du ‘Electrifying’ de Grease sauce metal, un nectar ! Bon, inutile de tergiverser, c’est un très bon album, une excellente surprise : après deux ou trois écoutes, vous accrocherez forcément. C’est si rare un bon album finalement. Ne ratez pas celui-ci !
La rumeur sourde de la popularité grandissante de Last Barons commençait à se faire entendre fortement à nos oreilles ces derniers mois. Pour autant, ce groupe assez discret donne l’impression de tracer sa route sans faire de vague dans la « scène rock » française. Sentiment confirmé après écoute de ce disque : Last Barons n’est pas un groupe comme les autres.
Affichant des affinités assumées avec le stoner, les influences du groupe vont chercher bien plus loin, composant un patchwork musical diversifié, et en tout cas sans équivalence dans la scène rock française. La première surprise vient des vocaux de Julien, dont le timbre ne fait pas que rappeler Layne Staley (Alice In Chains), parfois même de manière très présente (l’intro de « Guru’s rules »). Perturbant. Les échos de Scott Weiland ne sont pas non plus absents, sur les passages les plus « crooner ». L’autre surprise que l’on n’attendait pas c’est la subtilité de la prod : tout est propre, classieux, y’a pas grand-chose qui dépasse. Un son de gratte léché, une « mise en musique » globalement très travaillée. Les influs stoner sont bien là, mais plutôt à rattacher du côté QOTSA période post-Rated-R, avec des relents « robot-rock » évidents par moments. De manière assez surprenante, la bio du groupe est plutôt clairvoyante (croyez-moi, on en voit généralement des vertes et des pas mûres sur les bios des groupes), affichant aussi des influences du côté Faith No More, qui sont effectivement très claires ici sur des titres comme « Ethanol Blues » et ses subtils claviers très « Bottum-esques » ou encore ses passages jazzy typiques du groupe de San Francisco.
La maturité des compos est vraiment bluffante, tant les titres sont élaborés et audacieux : cet aspect désarçonnera probablement les amateurs de titres directs, de riffs tranchants et d’albums « coups de poing » homogènes et droits à l’essentiel. « L’éparpillement » musical du groupe apporte en revanche une richesse inédite pour ce type de groupes, portée par une production que l’on prend rarement à défaut. Au final, cet album est à recommander à ceux qui savent écouter plusieurs fois un disque pour en apprécier la richesse, tandis que ceux qui préfèrent les albums plus directs et tranchés pourront être refroidis par les premières écoutes.
En toute confidentialité, et par de sordides réseaux à peine visibles sur la toile, est apparue il y a quelques semaines cette somptueuse double-galette (100% cautionnée par le groupe rassurez-vous – contrairement à cette hideuse compilation sans âme sortie il y a quelques mois). Génèse : avec la reformation du groupe il y a quelques mois à peine, un appétit remarquable de “toujours plus” les a incités à non seulement engager une tournée mondiale (qui a ravi ces dernières semaines nos oreilles fébriles), mais aussi à préparer l’enregistrement d’un nouvel album… et à sortir ces vieilles bandes live qui traînaient dans un coin ! Qui s’en plaindrait ?…
Je vais m’abstenir d’en faire 3 tonnes sur quels titres déchirent plus que les autres. Ou plutôt si, tiens, ça peut être marrant. Ca commence donc par le célèbre riff ultra-catchy de “20”, enchaîné au super-heavy “38”. L’intro aérienne, limite psychédélique, de “31” désarçonne un peu dans un contexte live mais amène à une conclusion bien plus heavy et étonnamment bien charpentée. “30” est le titre suivant, probablement l’un des plus efficaces en live de leur répertoire. Quelques titres “dans la trentaine” tout aussi excellents défilent, pour culminer à “39” et son riff saccadé comme un cheval au galop. Après “8”, c’est “35” qui déboule : intro vicieuse et montée en puissance pour réduire le public en charpie dès le premier riff. “32” prend la suite avant que le set ne se cloture sur l’orgasmique “28”. Bref, que des titres issus de leur deux dernières galettes.
Fini la grille de loto, l’essentiel est que ce concert de 2001 est servi par un son qui, s’il n’est pas honteusement sur-produit, est tout à fait correct. On appréciera par ailleurs dans ce set bien tassé (11 titres, pas de temps mort) un groupe qui assure au moins aussi bien en live que sur album. Il est commun chez les groupes 100% instrumentaux d’assister à des impros et soli a gogo, à chaque coin de refrain, particulièrement en live. A l’opposé, K2B distille ses titres ciselés à la note près, taillés pour être efficace avant tout, et accorde une place limitée aux “écarts de conduite”. Leur crédibilité en tant que “vrai groupe” (et non pas uniquement “groupe instrumental”) passe aussi par là : la reconnaissance qu’une chanson, si elle est structurée à la perfection, n’est pas moins bonne sans ligne vocale. A ce titre, ce live est une vibrante illustration de ce constat.
A noter que pour ne pas “voler” les acheteurs de ce superbe témoignage live, le groupe y ajoute un disque “best of” reprenant pas moins de 16 chansons issues de leurs deux derniers albums. Idéal pour ceux qui n’ont pas encore les 3 albums du groupe : ce mini-best of aura tôt fait de les convaincre.
Rawk’n’roll !!! Houla que cela fait du bien d’entendre des disques de cet acabit. Pas de fuzz. Même pas de disto. Mais un son sec et crade délivré par des amplis poussés dans leurs retranchements. On est bien loin de Kyuss et c’est tant mieux. Du sax, de l’orgue, du piano, de l’harmonica. On vogue tout d’abord dans les eaux saumâtres des Stooges et des New Christs. Voire, dans une certaine mesure, dans la fange psychédélique d’On Trial. Cheveux longs et haute énergie. Mais la référence la plus marquée de ces suédois constitue probablement les Stones. Ce qui leur confère un air souverain. Un air qui les autorise à nous toiser comme s’ils étaient un alliage de Mick Jagger et d’Iggy Pop. Rhythm’n rock à fond. Punk’n blues à bloc. Sûr qu’ils le font bien ces gaillards. On peut s’incliner.
Après deux albums “presque normaux” (des instrumentaux qui déboitent autant, c’est tout sauf “normal”), les suisses de Monkey 3 choisissent, probablement pour détendre l’atmosphère, de nous offrir un mini album (presque 40 minutes tout de même) de reprises. Ce qui peut se révéler un peu convenu est en réalité un exercice compliqué pour un “jeune groupe”… et la démarche se révèle d’autant plus dangereuse pour un groupe 100% instrumental !
L’album déboîte fort dès le 1er titre, une reprise du groupe Archive, dotée d’un rythme martial, porté par la frappe de mule métronomique de Walter. Les claviers de dB ajoutent une teinture électro-rock plutôt couillue qui fonctionne bien (on pense même parfois à Waltari). Le quatuor tombe dès le deuxième titre l’un de ses plus gros atouts, avec “Watchin’ you” (Kiss), proposant un featuring du grand John Garcia. Le plus surprenant est que l’on s’attendait à quelques vocaux et un refrain répétitif tourné en boucle, or le brillant vocaliste occupe bien ici le poste de chanteur “à temps plein” : couplet, refrains, etc… Chapeau ! La prestation est bonne, et le titre, du metal basique, tourne bien. Le “One of these days” de Pink Floyd qui prend la suite, porté par une rythmique classieuse, voit les nappes de synthé se frotter aux leads de Boris, pour un résultat épique et concis. Moins original est le choix du “Kashmir” de Led Zeppelin ensuite, sur lequel le groupe envoie au carton l’autre chanteur invité sur l’album, Tony Jelencovich (chanteur de Transport League). On ne se frotte pas impunément au grand dirigeable, et même si la reprise tient fort bien la route, le groupe ne parvient pas à la transporter sur une dimension très différente. Mais ne gâchons pas notre plaisir, ça le fait bien quand même. Pour finir le trip “oldies but goodies”, c’est le “Burn” de Deep Purple qui est complètement machouillé et digéré par le quatuor, pour finir transformé, ralenti, alourdi aussi (dans le bon sens du terme), et dans tous les cas, bien réussi !
Pour finir, la reprise de Ennio Morricone figurant sur leur seconde galette, “Once upon a time in the west”, est proposée en version live. La capture est correcte (une prise de son perfectible quand même – les vibrations des peaux de batterie pas terribles pendant l’intro…) mais le morceau fonctionne bien et a déja fait ses preuves sous cette forme.
Ce mini album bien rempli est une bonne surprise de la part des jeunes suisses. Ils auraient pu se vautrer lamentablement, mais leur choix de morceaux est audacieux (ils n’hésitent pas à se frotter aux plus grands groupes et aux plus grands titres), et leur talent, que l’on savait déjà remarquable, emporte la partie. Un très bon disque.
Quelle écoute étrange que celle de l’album du Bakerton Group… Pour lever immédiatement tout mystère, The Bakerton group, c’est Clutch sans Neil : tous les zicos de Clutch réunis, sans vocaux (ni la guitare additionnelle qu’ajoute Neil Fallon parfois). Et on va pas vous la faire : ça sonne comme Clutch… sans Neil ! Hum…
Ca veut dire quoi concrètement ? En gros, ça groove par chaque centimètre de corde de basse, ça swingue au moindre coup de symbale, et sur ce festival jouissif de musique se greffent les torrides accords de clavier de Mick Shaver (quel excellent élément que cette recrue au sein de Clutch !), et les brillants lead de guitare de Tim Sult. J’appelle ça un orgasme auditif.
En gros, la différence entre TBG et Clutch, c’est sans doute une touche de folie ici ou là (la variété entre les titres est moins importante ici), et une légère dose de rock en moins. TBG fait du rock quand même, mais leur rock partouze avec du blues (of course) mais aussi du jazz, tout en se frottant à quelques passages preque progressifs (un peu normal, pour maintenir l’attention sur un morceau sans vocaux, il faut quelques structures bien alambiquées). Mais bon, ne vous leurrez pas : ça ressemble quand même bougrement à Clutch, et vous reconnaîtrez même quelques riffs qui ont été repris sur les derniers albums du combo !
Si vous aimez le stoner bien gras qui tâche, et rien que ça, allez voir ailleurs, ce disque n’est pas pour vous. En revanche, si vous aimez explorer les strates “alternatives” du genre, épater vos potes en leur montrant que ces mecs-là font partie de Clutch, participer à construire des passerelles avec le jazz ou le blues, épater quelques musiciens, et globalement vous en foutre plein les oreilles de GROOOOOVE, alors jetez-vous sur cet album modeste mais superbe.

En voilà une drôle de façon de célébrer la fin de Kyuss : sortir un split CD avec le nouveau groupe de son guitariste.
On commence avec Kyuss, qui, en guise de cadeau d’adieu, fait preuve d’une certaine générosité en proposant 3 titres dont la durée totale frôle les 19 minutes. Tout commence avec une reprise des pionniers Black Sabbath : ‘Into The Void’. Rallongé de 2 minutes, ce titre sorti 26 ans auparavant (sur l’album Master Of Reality) semble avoir été écrit par et pour Kyuss. Tous les ingrédients ayant fait la notoriété du groupe y sont présents. Ça suinte le groove et le désert. Même constat à l’écoute du fabuleux ‘Fatso Forgotso’, qui, a lui seul, est certainement plus riche musicalement que nombre d’albums qui sortent actuellement (non, non, je ne citerais pas de nom). Aussi, quand s’achève le rageur ‘Fatso Forgotso phase II’, on ne peut s’empêcher de se demander « Pourquoi ».
Passons maintenant à Queens Of The Stone Age, le bébé de Josh Homme. Au côté plus groovy de Kyuss, Queens Of The Stone Age préfère un rock plus direct et un peu plus conventionnel. C’est ‘If Only Everything’ qui ouvre le bal et qui montre d’emblée que Queens Of The Stone Age a un bel avenir devant lui et que Josh Homme possède un joli brin de voix. Plus accessible que Kyuss, et porté par le talent de compositeur de son leader, QOTSA fait encore mouche avec ‘Born To Hula’ (sur lequel chante également un certain John Garcia). C’est un Josh libéré que l’on découvre sur ce morceau, libéré de l’étiquette « Stoner » qui collait à la peau de son ancien groupe, un Josh pouvant enfin jouer à sa guise la musique qui lui fait vraiment plaisir.
Au final, ce split CD est donc une vraie réussite qui mérite de figurer dans toute bonne CDthèque qui se respecte.
Daredevil records met enfin les petits plats dans les grands : après 2 sorties vinyliques un peu confidentielles de ses compils “Burn The Street”, ils sautent le pas et offrent un support CD au volume 3 de leur série. Une sorte de début, donc, et un excellent début, jugez plutôt…
L’entâme ne peut être meilleure avec un excellent extrait du dernier Disengage, puis un autre d’Hermano, et enfin un de Milligram. Rien d’inédit, mais le ton est donné ! Que du gros calibre !
Sparzanza prend le témoin avec un inédit bien sympa issu des sessions du dernier LP du groupe. Sunride, qui déboule ensuite avec un bon extrait de “Through the red”, maintient la tension, avant un titre inédit de Chum : belle surprise que de les retrouver ici ! J’avais pris une grosse claque en 1996 avec leur album “Dead to the world”, résolument metal (avec vagues relents neo-metal étonnamment “tolérables” !), et je croyais à leur split depuis, c’est donc avec joie que je les retrouve avec un titre tout à fait dans la veine des meilleures productions “heavy stoner” made in Scandinavie… J’attends la suite !
Le sans-faute continue avec un différent mix de “Bring out the dead” de The Awesome Machine (pas vraiment un inédit, mais un super morceau !).
Du stoner pur jus ensuite avec un inédit de Devillac, rien de foncièrement original, mais un titre bien enthousiasmant qui donne vraiment envie d’en entendre plus de ce groupe (faut que je me penche sur leur cas). Même chose pour Magnified Eye qui eux aussi proposent un inédit appétissant.
Petit passage par une valeur sûre avec un extrait du dernier Nebula (pas vraiment de prise de risque, mais toujours plaisant !) suivie de Great Day For Up, un groupe sympathique qui ne m’avait pas emballé sur album, et là encore je leur reprocherai un manque d’originalité et de “relief”.
Les “locaux de l’étape” Duster 69 (ils sont sur le label Daredevil records qui produit la compilation) enchaînent de fort belle manière (la seule manière qu’ils connaissent !), en explosant la porte d’entrée, saccageant le salon, vômissant sur la table, violant votre copine, et repartant en faisant vrombir la Mustang dans la rue… Excellent.
Dozer continue, un peu plus subtil mais aussi efficace finalement, avec un extrait de leur dernière excellente rondelle.
Même commentaire que pour Great Day For Up appliqué à Sergej The Freak : bien fait, sympathique, mais ça casse pas 5 pattes à un gnou…J’avais entendu des extraits de The Chuck Norris Experiment, et ce titre issu de leur dernier skeud, sympathique chanson sautillante, saccadée et heavy, me conforte dans l’idée que ce groupe doit déchirer en concert (et qu’il faut que je fasse l’acquisition de leur dernier album !).
Rien de très original à signaler du coté de Sissies, groupe allemand sympathique en apparence, mais qui ne joue pas dans la même cour que leurs collègues sur cette compil… Même chose pour Mount Caravan : dans le paysage actuel du stoner, où peu de groupes parviennent à se distinguer de la “masse” de groupes underground, ils vont avoir du mal à se faire un nom… Laissons-les progresser un peu !Hell N’Diesel est plus prometteur, un riff catchy et un vocaliste chaleureux, l’ensemble fait mouche, et l’enchaînement avec Spoiler paraît remarquablement adapté tant les groupes sont proches, en genre mais aussi en qualité ! Bien joué !
Sub Second Rocket propose un genre un peu éloigné du stoner que l’on aime, mais on peut néanmoins reconnaître un certain talent de composition, avec un morceau bien agréable, ma foi.
Astroqueen ferme le bal de fort belle manière avec un inédit bien dans la veine de leur dernier skeud, très bon.
Au final, une compilation vraiment sympa, qui mélange des titres plus ou moins connus, avec non seulement une vraie volonté de proposer des inédits mais surtout d’en donner pour son argent à l’acheteur (21 chansons quand même !). On en ressort avec le sentiment d’une compil agréable à écouter (oscillant entre terrain “balisé” – groupes connus – et prises de risques – groupes plus “modestes”), homogène en terme de genre abordé (et de qualité, finalement !), et qui donne envie de découvrir certains groupes fort prometteurs !
‘Mud ‘N’ Glitter’ en 2001 nous avait fait découvrir ce groupe hollandais prometteur, et les voir en concert (en première partie de Hermano) nous avait fait comprendre que ce n’était pas des rigolos ! Ils reviennent avec une douzaine de chansons, le couteau entre les dents et prêts à foutre le feu ! Les riffs sont acérés et les rythmiques assurent méchamment, le groove est présent sur chaque titre, et surtout, les compos sont originales et pêchues ! Si bien qu’on se retrouve dès les premières écoutes à headbanger et chanter à pleins poumons en cœur avec les refrains accrocheurs de ‘The devil’s ride’, ‘Dirty black shades’, ‘King Sonic’. Ils s’essayent même avec brio à des morceaux plus lents (‘Drivin’ Till sunrise’ ou le très beau ‘Respect’) sans ennuyer l’auditeur une seule seconde. Le groupe garde donc son évidente originalité, et y rajoute une production encore meilleure, qui transforme ce nouvel opus en une jouissive surprise en ce morne début d’année ! Rock ‘n’ roll !

Pas la moindre ambiguïté. Le nom du groupe, le titre de l’album et son layout renseignent immédiatement sur sa nature. Avant même que le disque n’arrive dans le lecteur, la sentence « slow shalt be the whole of the law » vous est martelée une dernière fois. Pas de tromperie sur la marchandise. Souffrance. Dépression. Lenteur. Le triptyque maudit prend vos oreilles d’assaut. Le son est énorme. Oppressant. Cet orchestre norvégien nous livre un doom d’autant plus funeste et terrifiant qu’il est fort habilement croisé avec un black metal dégénéré. Abreuvé d’obscurantisme médiéval, TFO met en scène des titres très longs qu’il entrecoupe d’intermèdes glaçants. Alternance de gémissements et de pleurs féminins. Moines psychopathes que l’on imagine volontiers difformes proférant d’incompréhensibles incantations démoniaques. Coups de fouets. Ambiance sépulcrale. Le Triomphe de la Mort. Imaginez une synthèse entre un Winter encore plus ralenti qu’à l’accoutumée et un black old school type Abruptum ou Grey. Totalement barré. Dévastateur. Grégoire IX aurait apprécié. Avec ce disque les hérétiques auraient abjuré sans même qu’on les soumette à la torture. Pas de doutes, notre époque à la musique qu’elle mérite.

Voici encore un disque surprenant qui surprendra ceux qui voudront bien se laisser surprendre. Et oui, ce second album de l’Orquesta Del Desierto est définitivement très éloigné de conventions du genre stoner rock auquel on serait tenté de l’associer trop rapidement. En effet, ce projet regroupe Mario Lalli de Fatson Jetson, vieil habitué des Desert Sessions, Dandy Brown, producteur de Hermano et l’immense Pete Stahl, chanteur de Wool ainsi que du mémorable et regretté Goatsnake. Par ailleurs, ce disque a été enregistré au Rancho de la Luna, studio mythique du sud californien. Et pourtant, on n’y retrouvera pas le moindre heavy riff de la mort. Rien de tout cela ! Par contre, on pourra s’y délecter d’un blues-folk-latino gorgé de percussions et de trompettes mariachi. Du soleil donc ! Et de la bonne humeur ! Il est très plaisant de se laisser porter par les ambiances chatoyantes de cet orchestre si singulier qui donne envie 1/ de siroter du bon rhum, 2/ de porter un chapeau de paille, 3/ de faire la sieste dans un hamac. « Dos » est incontestablement un disque destiné à décontracter le gland ou la vulve. Il reste à vérifier s’il est en mesure de favoriser la rencontre de ces organes. Disco erotico !
Un nouvel album de Five Horse Johnson est un petit délice rare, de ces petits bonheurs qui vous égayent une journée par ailleurs banale, une bonne nouvelle, une parenthèse de plaisir immédiat et égoïste. Enfourner un Five Horse Johnson, c’est la garantie de retrouver nos briscards là où on les avait laissés, fidèles au poste ; un vieux pote toujours aussi drôle et cool que la dernière fois qu’on l’a vu.
FHJ ne détonne pas forcément dans l’écurie (étonnamment irréprochable) de Small Stone records : ils partagent avec leurs partenaires de labels une identité bien spéciale, une touche qui leur est propre. L’originalité de ses groupes devient de plus en plus la seule marque de fabrique de Small Stone. Ca, et la qualité de la musique qu’ils produisent, une autre constante.
Car la qualité est encore au rendez-vous : toujours dans son southern-heavy-blues-boogie-rock, FHJ enquille les pépites et procure un plaisir d’écoute trop rare de nos jours pour ne pas le signaler. Les exemples ne manquent pas, et l’on ne s’ennuie jamais au gré des chansons. “Ten-Cent Dynamite” est d’un blues grassouillet, traditionnel dans sa conception, sautillant dans sa rythmique, mais pêchu dans son refrain. “Feed that train” et son boogie de batterie frénétique, sur lequel l’harmonica répond au chant d’Oblander en une répartie sans fin, ferait sautiller un cul de jatte. Et que dire de “I can’t shake it” et son riff bluesy-boogiesque, qui fait ironiquement mentir son titre ? Quant à “Drag you there”, c’est tout simplement la plus impressionnante incursion de FHJ en territoire 100% blues, et c’est une réussite.
On retrouve (comme sur la dernière tournée) l’impeccable Jean-Paul Gaster de Clutch derrière les fûts, et l’on est particulièrement surpris par la sobriété, l’humilité admirable de son jeu, tout en mesure pour supporter la musique totalement non-démonstrative de FHJ. La gratte de Coffin et la voix rocailleuse, houblonneuse d’Oblander font le reste du boulot.
Bref, on va pas en faire des tonnes, ce disque partage avec “The last men on Earth” la prestigieuse première marche du podium des meilleurs albums de FHJ.Si j’étais en train de lire cette chronique, il ne m’en faudrait pas plus pour courir sur internet acheter ce skeud magique. Après, c’est vous qui voyez.
Lorsque j’ai découvert Phased sur scène un peu par hasard il y a quelques mois, ce groupe avait déjà une longue histoire derrière lui. Le genre d’histoire compliquée émaillée de changements de nom et de personnel, de nouvelles directions musicales, de tournées annulées et de sorties confidentielles sous différents formats (dont un 7′ injouable car bombé à la laque et à la peinture orange ! Je me demande s’ils en ont vendu beaucoup). De la formation originelle, seul subsiste aujourd’hui Chris Sigdell (chant et guitare), d’origine suédoise mais établit en Suisse depuis longtemps, désormais épaulé par un batteur finlandais et un bassiste suisse.
Ce mélange de nationalités trouve sur Medications un écho particulier dans le mariage d’influences très diverses qui composent le style de Phased et qu’ils définissent comme étant du Psychedelic Deathrock, ce que d’autres considèrent comme la rencontre entre Hawkwind et Black Sabbath, soit du Space Rock bien plombé matiné de punk attitude auquel la production de V.O. Pulver (Gurd) ajoute un petit cachet métal dans la façon de traiter les guitares. Les vocaux martelés avec une rigidité toute germanique (impression renforcée par la façon qu’a parfois Chris de rouler les r, malgré ses origines) ne font rien pour atténuer l’aspect sévère et sombre d’un album qui traite essentiellement des effets néfastes de substances altérant la perception, même si on suspecte les membres du groupe de maîtriser l’art du second degré avec subtilité. Phased ne propose rien de fondamentalement novateur et revendique les mêmes influences que la majorité des groupes stoner, parmi lesquels on peine néanmoins à leurs trouver une comparaison pertinente. En cause, une façon unique d’imbriquer les différents éléments constituant leur son qui interdit de les affilier à une catégorie précise.
L’album s’ouvre sur Worship the Sun, un titre très lourd au ton résolument doom qui faisait défaut sur l’opus précédent, Music for Gentlemen, avant de bifurquer vers des compos aux tempos plus soutenus tel Back in Time ou Reminder, un morceau au riff ultra-basique et à l’urgence toute rock’n’roll qui flirte même avec le punk. De temps à autre un break salvateur vient aérer le propos, comme c’est le cas sur Sausage Tricks où la basse se fait soudain groovy pour amener le morceau vers une conclusion toute en douceur, ou au contraire l’alourdit sur Frozen Buds avant que les guitares frénétiques ne reprennent leurs droits. En s’appuyant sur des riffs simples et une rythmique très carrée, Phased nous offre dix titres directs et variés, sans fioritures et bourrés d’influences parfaitement digérées à consommer directement. Et çà fait un bien fou de pas trop se prendre la tête de temps à autre.

Voici un album qui a bien failli ne jamais voir le jour. Resté plus d’un an sur les étagères de ces cons de Columbia qui ne souhaitaient plus sortir cet album, les mecs de SLEEP ont été réduits au silence et à la mort en tant que groupe, avant de trouver un deal avec la maison Rise Above. On sait le retentissement qu’a eu leur précédent album Sleep’s Holy Mountain « Earache, CD, 1992 » sur des générations d’individus fans des early 70’s. Il leur a tout simplement permis de se décomplexer par rapport à un genre musical, revendiquant ouvertement la paternité de BLACK SABBATH et consorts à une époque ou indus/metal/fusion régnaient en maître dans le monde de l’underground. Et d’ouvrir la porte à tous les groupes qui sont chroniqués dans ces colonnes, que l’on regroupe, par facilité sémantique, sous le vocable de stoner rock. L’impact de Jerusalem, en tant qu’œuvre posthume est un pied de nez magistral à toute l’industrie du disque en même temps qu’un bouleversement total des modes de pensée et des pratiques. Car il s’agit d’une œuvre que l’on pourrait résumer par l’expression : « ceux qui l’ont fait ! » Comment en effet ne pas considérer comme tel un disque de 52 minutes et 08 secondes comprenant un seul morceau décomposé en cinq mouvements (une symphonie ?)? Tous ceux qui comme Brotherfab sont avides de riffs monolithiques ont toujours rêvé d’un riff répété à l’infini. A l’image des surfers qui courent après l’été sans fin (endless summer), à la recherche de la vague perpétuelle en parcourant le monde et ses plages, les fans de stoner rock parcourent les disques qui pourront leur offrir LE riff qui tourne, qui tourne et qui tourne encore. Celui-là même qui leur procurera le plus longtemps possible ce mouvement de balancier des corps si caractéristique du public des vrais concerts de stoner rock. Celui-là même qui les conduira à une sorte d’extase hypnotique dans leur salon. C’est donc ce qu’ont réalisé Chris Hakius, Matt Pike et Al Cisneros. Un monument. Un thème (et quel thème) et un ensemble de variations sur ce même thème. De quoi se pâmer. Ces mecs forcent le respect par leur attitude jusqu’au-boutiste. Ils sont au 90’s ce que les BLACK SABBATH étaient aux 70’s. Totalement indispensables. Eternels.
Le New Hampshire est un petit état des USA. Si petit qu’on en vient à se demander s’il n’y règne pas une consanguinité malsaine, conforté dans cette idée à l’écoute de cet ep d’un groupe parmi les plus rednecks qu’ai jamais offert le stoner rock.
La beauffitude a toujours été une facette prisée par les groupes américains qui jouent du rock n roll burné. Mais de là à la pousser à un tel paroxysme !
Ces mecs sont des paysans, ils ont la quarantaine, mais ils ne sont en rien assagis, ce serait plutôt le contraire. Chaque album est de pire en pire dans l’excès. Instruments sous accordés au-delà du possible (et du raisonnable), volume sonore monolithique et abusif, riffs basiques répétés ad nauseam, et par-dessus, une grosse voix de grizzli (le chanteur pourrait d’ailleurs se faire confondre avec un, s’il n’avait pas son bandana à la Mike Muir et ses lunettes de soleil vissés en permanence sur son crâne) vient presque ‘parler’ pour les accompagner.
Cet ep résume parfaitement leur identité très raffinée et, comme si cela ne suffisait pas, ils permettent de réenregistrer un de leur tube en allemand, langue délicate s’il en est, pour enfoncer le clou.
Bourrin et beauf, magique quoi !
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