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DESERTFEST Berlin – Jour 1 (Spirit Caravan, Sixty Watt Shaman, ASG,…), 24 avril 2014, Allemagne

On avait pris un pied assez incroyable l’an dernier lors de ces trois jours de rêve à Berlin : musique sensationnelle (des révélations, des valeurs sûres…), super ambiance dans le public,  lieu atypique et convivial… Bref, dès les premières annonces de cette édition 2014, on n’a pas hésité longtemps avant de commander nos billets d’avion pour la capitale germanique, qui devient de fait la capitale mondiale du stoner pendant trois jours.

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En arrivant sur les lieux du crime, avant même d’encaisser le moindre décibel, la simple vue du ciel nous donne la patate : un soleil radieux, propice à siroter des bières peinard au Beergarten avec les potes entre chaque concert, en se baladant dans le market à hippies ou en discutant avec les musiciens ou artistes, qui se mixent au public pendant tout le week end avec un naturel et une humilité qui font plaisir à voir… Toutes les conditions d’une nouvelle édition d’exception sont réunies !

 

COJONES

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Contrairement à ce que son patronyme peut laisser croire, Cojones est un quatuor croate et non pas hispanique… mais qui paraît doté de sérieuses paires de “cojones” quand même ! Bien conscients de la responsabilité qui repose sur leurs frêles épaules (en gros : en l’introduisant, donner le ton de cette nouvelle édition) les zagrébois entament un peu fébrilement leur set, et l’excitation atteint vite son point culminant… quand Bojan pète sa corde de guitare dès le premier titre ! Les deux ou trois titres suivants seront joués sans guitare pour le frontman du combo, sans que nous sachions clairement si c’était prévu ou pas (on sait que le groupe évolue sur certains titres alternativement avec une ou deux guitares). Se concentrant sur ses vocaux, il fait montre d’un coffre intéressant et d’une belle puissance, faisant même, au détour de certains refrains pêchus, penser à un certain Dave Wyndorf. Quoi qu’il en soit, c’est aussi à ce moment que le groupe semble se débrider, et son set gagner en dynamisme. Le gros rock des jeunes stonerheads est bien exécuté, les titres sont balancés avec une belle assurance, et le public, déjà nombreux devant la petite scène Foyer, headbangue avec satisfaction devant ce stoner bien carré, teinté de soupçons psyche subtils mais bienvenus pour aérer le tout. Une excellente introduction !

 

ANCIIENTS

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Pour cette première journée du festival, le programme étant plus light que pour les jours suivants, il appartenait à la deuxième formation de la journée d’inaugurer la Main Stage du Desertfest. Les jours suivants, les premières formations se succéderont sur la Foyer Stage dans une configuration underground qui sied plutôt pas mal à certaines “dérives” du style vénéré durant ces trois jours de folie. Mais ne nous égarons pas et revenons à nos moutons de Vancouver : un quatuor classique et pileux qui envoie un son énorme lorgnant méchamment vers le metal pur sucre ! En fait, les tournées avec Sepultura, Death DTA et Lamb Of God ont certainement aussi influencé le son des Canadiens en plus de leur prestance scénique (laquelle s’approche sensiblement de celle de Valient Thorr) : headbanging et pieds sur les retours sont de la partie tout au long de ce set qui aurait gagné en intensité s’il avait eu lieu dans le bouillonnant Foyer. Délivrant les pépites de leur seul long format “Heart Of Oak” sorti l’an passé : “Raise The Sun”, “Giants” et “Overthrone” ainsi que “Built To Die” extrait du single “Shakebeard”, les viieux ont foutu un gros boulet bien pugnace à cette première journée en déversant de manière brute leur gros son. La subtilité présente sur leurs albums restant en retrait pour un set très carré, placé et rondement mené sous le signe de la puissance. C’était bien foutu en live et c’est plutôt pas mal sur disque. C’est surtout ce qu’on aurait bien aimé comme style sur les derniers Mastodon tant Anciients reprend les choses là où les nouvelles stars des charts les ont laissées après leurs premiers efforts.

 

THE MIDNIGHT GHOST TRAIN

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Une petite clope pour l’un, un changement d’objectif pour l’autre, et direction la petite scène pour se régaler du show de Steve, Brandon et Mike que nous attendions avec impatience tant leur prestation au dernier Up In Smoke nous avait littéralement scotchés ! Nous avions déjà échangé dans la journée avec le trio jetlagué qui foulait ce jour-là le Vieux Continent pour une tournée de six semaines, et les gars étaient positifs à bloc à l’idée de mettre le feu à Berlin dans la soirée : nous ne serons pas déçus ! Les deux imposants manipulateurs de manche ont donné le La en battant le plancher du Foyer dès les premiers accords d’une prestation au poil, durant laquelle ils ont balancé du nouveau son et, croyez-nous les enfants, ça vaut son pesant de schnitzel berlinois ! Grosses grattes saturées, rythmiques pachydermiques et la voix de bluesman éraillée au Jack Daniel’s de Steve ont à nouveau fait mouche dans nos cages à miel ! On en a eu pour notre fric et nous pouvions nous coucher tranquilles : cette soirée était déjà une réussite à l’issue de ce show dévastateur au cour duquel le trio du Kansas ne s’est une fois de plus pas ménagé. Si la musique de The Midnight Ghost Train semble fomentée pour la scène, nos potes assurent aussi bien le spectacle en se trémoussant, en effectuant des mimiques incroyables et en interagissant verbalement avec les spectateurs – heureux – tout au long de ce show dont le seul bémol sera sa longueur, tant nous aimerions encore passer du temps en compagnie de cette formation taillée pour le live et définitivement hyper rock’n’roll !

 

SIENA ROOT

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Après cette sérieuse déculottée prise devant la scène Foyer, le changement d’ambiance proposé par le set de Siena Root est bienvenu. Les suédois (encore un nom de groupe fait pour nous faire perdre nos repères géographiques…) entament leur set par leur dernier single, “Conveniently Blind”, un titre plutôt percutant, et attendent leur second titre, “Waiting for the Sun”, pour mettre en avant leur son bien spécifique, un mix de rock psyche old school planant, baigné parfois de nappes bluesy ou orientales. Visuellement, le groupe s’est d’ailleurs un peu pris les pieds dans une faille spatio-temporelle : bassiste vêtu d’une sorte de toge rituelle du plus bel effet, chanteur aux pattes d’eph’ et pilosité faciale tendance “Jésus est parmi nous”, un organiste à la coupe au carré somptueuse et au ravissant petit gilet sans manche en cuir… Chez les scandinaves, on est dedans à fond, et pas uniquement pour l’esthétique : sur scène ça joue, et ça joue même plutôt bien, on se croirait vraiment devant un jam band directement débarqué des 60’s. Et petit à petit, l’alchimie opère : l’ambiance se fait béate, la musique ensorcelante, une sorte de trip champis… sans champis ! Exactement la musique qu’il fallait à ce moment de la soirée (chapeau bas aux programmateurs, choix audacieux mais finalement bien vu !). L’apothéose sera atteinte avec un “Rasayana” d’une petite dizaine de minutes, propice aux jams les plus aériens. Un bon trip ! De quoi en tout cas nous refaire une petite santé avant le tir de barrage qui nous attend à quelques dizaines de mètres dans dix minutes…

 

SIXTY WATT SHAMAN

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Après le trip babacool venu du nord de l’Europe, le moment est venu de repasser le rideau séparant les deux espaces dévolus au son du festival et voilà le moment de se taper un des groupes que nous attendions le plus. La formation pionnière de Baltimore avait disparu de nos écrans radar depuis belle lurette. Pourtant ces lascars n’avaient jamais réellement mis un terme à leur aventure musicale commune. Ils ont d’ailleurs aligné pas mal de projets depuis leur dernière trace vinylique, “Reason To Live” sortie en 2002 (ah ouais ça ne date pas d’hier…). Ayant par ailleurs partagé pas mal – que ce soit en tournée ou sur disque – avec d’autres grosses pointures du festival (Clutch et Spirit Caravan par exemple) nous n’étions pas les seuls à nous taper un bain de jouvence et à espérer un truc de fou. Soyons clair : la surprise collaborative ne vint jamais (nous venons donc de tuer le suspense pour la lecture de la review du jour trois). Néanmoins, la prestation du quatuor nous ravira tant ces types avaient jadis composés des classiques du genre et tant ils nous ont transmis de leur énergie positive tout au long d’un set mené tambour battant sur la scène du Foyer qui, bien que de taille concise, fit superbement marcher l’interaction du groupe avec son public. “Cactus” – tiré de leur premier effort – ouvrit les feux et ce fut une déferlante du meilleur de Sixty Watt Shaman qui s’abattit sur nous durant le temps alloué au groupe jusqu’au final “Red Colony” (tirée de “Seed Of Decades”). Le duo initial composé de Daniel Soren et de Jim Forrester fonctionne à la perfection sur scène avec les deux nouvelles recrues que sont Chuck Dukehart (à la batterie, qui est aussi actif dans un groupe fort intéressant répondant au nom de Foghound que nous vous recommandons particulièrement) et Todd Ingram (de King Giant, remplaçant le guitariste original Joe Selby avec brio). Malgré des dégaines plus proches de celles qu’on rencontre en se défoulant dans les moshpits hardcore, ces types sont restés fidèles à leur style originel et des perles assez planantes comme “Poor Robert Henry” invitent toujours le spectateur à laisser onduler son corps de manière lascive même s’il n’a pas fait cinquante-deux arrêts au bar depuis son arrivée sur les lieux du festoche (ou fumé de l’herbe qui fait rire). C’est gonflé à bloc que ces Etasuniens sont de retour aux affaires et nous devrions avoir de leurs nouvelles très rapidement vue la dynamique avec laquelle ils abordent ce retour sur les devants de la scène stoner ! Notre attente a été plus que comblée avec ce concert qui restera comme l’un des meilleurs de cette édition. Le fait qu’il ait été donné par des mecs on ne peut plus sympathiques et ouverts – en parfaite osmose avec leurs fans – n’a été que bonus !

 

SLEEPY SUN

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A peine remis, il est temps de ramper jusqu’à la main stage pour se refaire un peu une santé. Sleepy Sun, à cet instant précis, apparaît comme le groupe idéal pour cela. Le quintette californien propose un stoner psychédélique efficace, dont le vaporeux mais efficace “Marina” en intro montre une bonne image. La rupture stylistique est un peu violente toutefois : difficile de rentrer dans le trip après avoir encaissé en pleine face toutes les cartouches de Sixty Watt Shaman une par une pendant presque une heure. Mais Sleepy Sun est rodé à tous les contextes scéniques, et leur expérience l’emporte : malgré un public un peu apathique au début, les bonhommes ne se démontent pas et enquillent leur setlist sans se laisser perturber, habitués à rallier à leur cause musicale à chaque fois un public qui finit conquis. Même si les tempi ne s’emballent jamais de trop, le groupe sait varier les plaisirs, et enchaîne des titres immersifs, planants et ondulatoires, souvent chargés en efficaces salves guitaristiques, à l’image de ce “New Age” en conclusion, long titre propice à un festin de soli du meilleur effet. Cette dose homéopathique de cinquante minutes est bien adaptée dans ce contexte de festival, où les scandinaves se retrouvent en alternance avec la scène Foyer où jouent aujourd’hui des groupes foncièrement plus pêchus. On peut toutefois imaginer que Sleepy Sun gagne à être vu en tête d’affiche, sur un set complet, pour bien “rentrer dedans”. C’était en tout cas un bon avant-goût aujourd’hui.

 

ASG

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Poursuivons dans cette alternance entre psyche et gros rock qui tâche (une alternance qui a été le point fort de ce milieu de soirée) avec le set d’ASG. Il faut dire que les américains sont très attendus : leur dernier album a fait à peu près l’unanimité depuis un an, et leur expérience scénique est reconnue et bien documentée. Sur le papier, ce concert s’annonce donc un peu comme une garantie sans risque, et quand les américains montent sur la petite scène du Foyer (bien trop petite pour eux, honnêtement, ils auraient botté encore plus de culs sur la Main Stage), on a tout l’air d’être partis pour un set bien carré. Jason Shi, leur incontestable leader, apparaît un peu frêle derrière son micro au premier abord, mais sa maîtrise impeccable et ses vocaux bien particuliers font mouche. Le set d’ASG met évidemment en avant leur dernier effort studio, “Blood Drive”, avec notamment en extrait le sur-heavy binôme composé du morceau éponyme et de “Day’s Work”. C’est du lourd, et le public acquiesce avec le front et la nuque. Le quatuor ne se prive pas pour autant de quelques incursions dans son précédent excellent opus “Win Us Over”, avec par exemple le percutant “Low End Insight” ou “Right Death Before”, un titre à la fois puissant et aérien, qui fait onduler le public comme un seul homme. Tout du long, une impression de robustesse se dégage de ce set, avec une setlist impeccable d’efficacité. Pour autant, la bonne humeur de Shi et la communication avec le public empêchent cet excellent concert de devenir une sorte de machinerie un peu aseptisée, et le groupe ne donne jamais l’impression d’avoir enclenché le pilote automatique. ASG est clairement un groupe d’une efficacité redoutable, à voir sur scène, et ce set ne fait que le confirmer.

 

SPIRIT CARAVAN

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Spirit Caravan a toujours été un groupe un peu spécial dans nos petits cœurs de stoner-heads mélancoliques et émotifs… C’est un peu le groupe “rebond” ayant permis au cultissime Wino de s’engager dans un nouveau projet après l’arrêt de The Obsessed, et ce fut le début ensuite d’une longue série de projets et featurings du maître qui ont fait et continuent de faire notre bonheur depuis des années. Le trio (qui voit le vénal Gary Isom remplacé derrière les fûts par le copain Henry Vasquez, qui joue avec Weinrich dans St Vitus) débarque donc sur la Main Stage en terrain presque conquis, tête d’affiche incontestée de cette première journée. Avec seulement deux véritables albums, on pouvait craindre un set un peu court, avec un groupe qui se regarde le nombril. Et ben on a tout le contraire, avec un groupe bien dedans (ces dates américaines qui sont suivi la récente reformation du groupe lui ont manifestement été bénéfiques), qui construit son set en tapant dans tous les tiroirs, pour remplir plus que copieusement un set d’une heure quinze roboratif et jouissif : ses deux albums bien sûr (et surtout “Jug Fulla Sun” en l’occurrence) mais aussi ses EP, ses singles, des titres inédits parus sur leur compil, des reprises… Ils s’autorisent même quelques solos… Faut dire que les zicos se défendent : Vasquez a un jeu ample derrière ses fûts, généreux et robuste, qui laisse à penser qu’il s’est complètement approprié le répertoire du groupe. Dave Sherman, plus statique, assure ses lignes de basse “lead” de manière remarquable : avec un son sursaturé (une approche instrumentale similaire au jeu de Lemmy dans MOTÖRHEAD, en gros, dans un genre différent), le spectre musical est clairement plutôt dans le complément à la gratte que dans la base rythmique lourde, bien calée au fond des amplis. Quant au père Wino, même s’il pue le charisme à cent mètres à la ronde (et ce malgré un superbe petit gilet sans manches en peau retournée et franges, porté sur un torse nu plus vraiment tout jeune ; une tenue du plus bel effet vraiment…), il ne se met jamais en avant, bien au contraire, restant simplement au service de chaque titre. Une posture qu’il a finalement toujours adoptée dans ses groupes et projets. Il laisse occasionnellement le micro à Sherman (qui soit manque un peu de coffre, soit souffre d’un micro un peu à la ramasse dans le mix…) et la plupart du temps reste dans son coin à enquiller les leads féroces, les riffs lancinants ou les soli chaleureux. On se permettra de voir émerger de la set list par ailleurs impeccable des titres comme les catchy “Healing Tongue” ou “Retroman” (après une intro basse sympa), et un petit plaisir en final avec le “Ice Monkey” de ST VITUS. Un concert de haute volée, généreux, bien au niveau de nos (grandes) espérances vis-à-vis de ce groupe culte.

 

PET THE PREACHER

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Après s’être cogné le trio de légende sur la scène la plus importante de cette manifestation, il était – déjà – venu le moment de rejoindre le Foyer pour le dernier acte d’une journée à la hauteur de ses promesses qui était déjà une réussite avec les formations s’étant succédées sur scène et un public en parfaite osmose avec les groupes et les lieux. Les Danois de Pet The Preacher seraient donc les derniers pour cette journée (en fait on était déjà le lendemain) pour une prestation un peu particulière. Le trio a eu la drôle d’idée de vernir son nouvel album en festival : une belle manière pour clore cette première journée du Desertfest édition 2014. Nous nous radinons donc dans l’antre plutôt dédiée aux formations bourrines pour faire connaissance avec le successeur de “The Banjo” et découvrons les mecs de Copenhague grimés au charbon ; ce seront les seuls à déployer ce genre d’artifices sur ce festival si l’on excepte les tenues de scène extravagantes de Siena Root et un masque chouette le vendredi soir. Les trois petits ramoneurs des Misérables ont donc pris la scène devant un public clairsemé – hé ouais m’sieurs dames, on explosait carrément les une plombe du mat quand la release party de “The Cave & The Sunlight” (sorti chez Napalm si jamais) débutait. Ce set consacré à la plaque fêtée ce vendredi-là demeura sous le signe de l’innovation : ces lascars ont enchaîné les nouvelles compositions de belle manière. Les amateurs de performances inédites se sont frottés les pognes, par contre les quidams restés tardivement debout pour se taper des classiques du combo de stoner traditionnel resteront sur leur faim. Tant pis pour eux ! Une mention spécial à “Remains”, une pépite issue de “The Cave & The Sunlight”, qui fut une réussite sur scène autant qu’elle l’est sur la plaque.

Une fois la Flying V débranchée, c’est les jambes bien lourdes que nous avons traversé une énième fois de la journée le Beergarten et jeté un dernier coup d’œil aux stands de merch, pour enfin rejoindre nos pénates afin d’être un minimum requinqué pour un peu de tourisme au petit matin et un retour quelques heures plus tard à l’Astra pour continuer à se faire plaisir.

 

(A SUIVRE…)

Chris & Laurent

Doomed Gatherings, Hull, Inter Arma, Elder, Windhand, 18 avril 2014, Glazart, Paris, France

Dans la grande famille du stoner, je demande l’oncle Stoned Gatherings ! Les Stoned Gatherings c’est un  peu notre super tonton à nous ! Celui qui nous permet de voir des groupes que l’on n’aurait jamais espéré croiser sur le sol français. Celui qui nous pousse à découvrir des groupes dont on n’avait jamais entendu parler. Celui qui s’investit à fond pour que l’on puisse toutes et tous, ces petits neveux et nièces, en profiter de manière régulière et abordable. En un mot comme en cent les Stoned Gatherings font vivre la famille et ce soir au menu : du doom. Première soirée des « Doomed Gatherings » qui prirent place en ce week-end pascal de 2014 au Glazart.
Intitulée « Doom Heaviness », l’affiche s’annonce prometteuse (comme toujours quand tonton est à la barre) avec quatre groupes au compteur tous réunis pour une date unique en France. Ca fait plaisir. C’est devant un bon burger que déjà quelques bruits courts que nos invités du soir sont arrivés avec quelque peu de retard. Ce qui explique le délai d’ouverture des portes et de début des concerts. Rien qui n’empêchera finalement le bon déroulement de la soirée.
Hull ouvre les festivités. Hull c’est quatre gaillards tout droit venus de Brooklyn et qui ne font pas dans la dentelle. Le terme « doom heaviness » leurs colle à ravir. Ça envoie effectivement du lourd, son massif, riffs tout aussi costauds et chant guttural pour la plus grande partie. Pour la plus grande partie parce que le chant se partage chez Hull et si deux des comparses sont franchement dans l’écorché, le troisième larron est plus clair. Autant sur album le chant peut faire ressortir des harmonies vocales, en live ça dépote avant tout. Musicalement les chansons sont riches, les passages doom groovy font parfois place à du sludge pure crasse qui peut nous dégueuler un riff plus métal pour dégraisser l’ensemble. C’est du post-sluge-doom-core en quelques sortes. Comme l’hydre à plusieurs têtes, Hull nous écrase vite fait, bien fait. Une bonne découverte en pré-écoute d’avant concert, le live ne leurs a pas rendu justice sur la subtilité dont ils peuvent savoir faire preuve sur album. Ils ont misé sur l’efficace et le rentre dedans, c’est gagné.
Inter Arma prend le relai. A voir l’acharnement du batteur à bien faire consumer son encens, une certaine atmosphère semble vouloir être installée. Verdict : ça sentait bon l’encens mais musicalement ce n’est pas ma tasse de thé. Inter Arma c’est un chanteur possédé, ou en tout cas qui fait comme si, deux guitares, une basse et un batteur possédé aussi mais dans le sens qui ne laisse pas une minute de répit à ses fûts. Le ptit gars ne chôme pas et sort vraiment du lot. Pour le reste en live ça sonne comme du black à petits relents de doom. Autant sur album les passages black sont contrebalancés par des passages plus atmosphériques, avec un chant moins présent pour justement laisser planer, là en live c’était concrètement très (trop) orienté là-dessus pour me chatoyer. Voix hurlé, simili-blast etc. certainement que 30 minutes ne permettent pas à ces messieurs de développer toute leur richesse progressive, dommage.
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Enfin Elder entre scène. Le groupe que tout le monde adore et attend mais qui ne passe que trop trop rarement par chez nous. Merci tonton ! Les premières notes résonnent et la foule est conquise. Ca groove entre le batteur et le bassiste. Belle assise rythmique pour laisser la guitare aller et venir entre riffs pachydermiques et envolés solitaires. Les trois de Boston ont la banane. De toutes évidences ravis d’être là, ils vont nous dérouler leur setlist psychédélistonedoomique à faire headbanguer les morts. Le chant n’est pas la force du trio, on le sait, en live ça s’entend mais on n’est pas venu pour ça non plus. On est dans la frange mélodique de la soirée. Ça paraît bien léger après les deux précédents combos mais c’est tellement efficace. Le son fait honneur à toute la richesse des riffs et des solos ainsi qu’aux lignes de basses voyageuses. Tout paraît fluide entre eux. La complexité des morceaux à tiroirs, dont ils connaissent le secret, coule de source. Passage « dans ta face », solo psyché, pose le groove, envoie la sauce, passe la troisième, freine, mets nous un petit coup de mélodie. Etc. etc. Bref tout le monde jubile. Ca passe bien trop vite. Le temps semblait s’être suspendu et en même temps filer vitesse grand V. Des shows comme ça pourrait durer plus longtemps qu’on ne serait toujours pas rassasier de cette lourde classe qu’est la leur.
Après cette démonstration signée Elder, Windhand vient clore une soirée déjà bien riche. En provenance de Richmond, Virginie, le quintet mené par la voix de Dorthia Cottrell est un peu la sensation doom du moment. Seul groupe du soir à jouer du doom « classique » comme les maîtres du genre l’ont précédemment défini, Windhand se démarque par ce chant habité, presque lointain. En live l’impression reste identique. Le risque à personnifier ce genre de voix est de démystifier l’ensemble, mais la discrétion derrière le micro est de mise. Un petit merci à l’occasion, un petit headbanging au ralenti et souvent dos au public, Dorthia nous fait nous tourner vers ses collègues de lourdeur. L’innocence du chant est complètement débauchée par la roublardise dont fait preuve la musique. Les riffs sont bons, l’ensemble est carré et bien rôdé pour laisser la magie opérer. Ce n’est pas l’originalité des arrangements ni des mélodies qu’il faut venir chercher, mais l’essence même de cette musique qui nous est chère. Riffs et solos classes par leurs apparentes simplicités, section rythmique présente, son saturé et crade comme il se doit pour nous envoûter. Et envoutée l’audience l’est. De la première à la dernière note, la barque descend paisiblement le court du Styx et nous sourions tous béat des jolies enluminures qui décorent notre moyen de locomotion. Frustration encore de voir le set se finir si vite malgré une chanson en rappel, Windhand met les pieds dans la cour des grands en toute simplicité.
Quatre groupes qui s’enchaînent à cette vitesse c’est limite trop. Moins de groupe pour plus de temps de jeu aurait peut être permis à tout le monde d’offrir tout ce qu’il a à donner. On chipote Tonton. On revient quand tu veux, on te fait confiance.

Ain’t One

STONE RISING FESTIVAL, 2ème édition, 18 et 19 Avril 2014, Clacson, Oullins, France

Réussir la deuxième édition d’un festival participe du même challenge que de réussir son second album. Quand on a envoyé la sauce sur son premier essai, il faut confirmer, ne pas décevoir, justifier les attentes et espoirs placés en vous. Bref, serrer les miches, être sincère dans la démarche et honnête avec ses envies. Ne faisons pas durer le suspens plus longtemps, l’essai est transformé haut la main. Il est même satellisé, artistiquement et techniquement.
C’est donc le vendredi 18 avril 2014 que je retrouve avec plaisir la salle du Clacson à Oullins, cet antre du rock et de la sueur, où Kadavar et Mars Red Sky m’avaient explosé les entrailles l’année dernière. Et le moins que l’on puisse dire c’est que le festival démarre fort. Là où un an auparavant j’étais dubitatif sur certaines premières parties, je dois admettre que cette année les groupes chargés d’ouvrir les hostilités ont foutrement rempli leur rôle. Déboule donc Dätcha Mandala, des bordelais bourrés d’influences 70s, explosifs, à l’aise techniquement, se fendant d’une reprise du Sabbath Black, histoire de planter le décor du week-end et se permettant quelques fulgurances grasses de stoner massif. Mis à part le bandana et quelques attitudes un peu surjouées, ils méritent qu’on les suive sérieusement. Bière, clope, abdos (non, j’déconne), changement de plateau. The Squared Circle prennent ensuite possession de la scène pour un set éthéré et hypnotique. Les compos du groupe portent en elles le germe mélodique de Joy Division, elles s’étirent en nappes de synthés et guitares incisives portées par les vidéo psychées qui défilent en arrière-plan. J’aurai aimé cependant que les morceaux durent plus longtemps, que le groupe prenne encore plus le temps de développer son univers. Planant. Clope, bière, cardio-training (oui oui c’est la running-joke de ce report). Domadora pose ensuite ses petits petons sur le plateau du festival. Précédé d’une coquette réputation live et porté par son album Tibetan Monk, le trio va mettre la première grosse baffe du week-end. 45min de heavy-jam massif et jouissif. Le guitariste, aux faux-airs détachés de Woody Harrelson, nous emmène aux confins du solo, essayant de faire plier la section rythmique en s’éloignant du canevas des morceaux. Las, le batteur et le bassiste envoient du lourd, c’est un outil de précision dans le corps d’un éléphant, et soutiennent les délires de leur six-cordiste. Natural Born Killers. On vient d’assister à trois quart d’heures intenses de jam et de progressions orgasmiques. Messieurs merci. Mais il fait soif, mon cours d’aérobic va commencer et nous devons laisser DeWolff se préparer. DeWolff, le trio made in Hollande (le pays bien sûr) remplace Blues Pills qui a dû annuler sa tournée pour raison de santé. Encore un coup de maître de l’organisation car ces trois jeunes loups ont livré un show puissant et électrique à souhait. Le début du set me laisse perplexe pourtant. La zic, deep purplienne, déboîte, le trio est en place, carré, impressionnant techniquement mais quelque peu figé, peut-être fatigué du voyage. Erreur cher moi-même ! Car lorsque retentit « Don’t you go up the sky » le public se met à pogoter méchamment entraîné par le riff dévastateur du morceau, et le groupe de suivre l’énergie de la salle. Car le pogo est tel le feu ; sans oxygène pas de brasier. Ce soir-là n’étant pas sold-out, la place fut suffisante pour décupler le furieux mouvement du jeune en joie, l’explosion fut immense. Et emporta le groupe avec lui pour le reste du set. S’en suivit un live magistral et enlevé de la batterie nerveuse à l’orgue Hammond. Le claviériste, fils de John Lord, frère de barbe de Kadavar, finit de m’achever sur un morceau incestueux entre les Doors et le Take Five de Brubeck. Gros live, grosse prestation, quelle bande de bataves ! Je pense qu’ils ont pris un énorme pied, et que cette date surprise les a convaincus de revenir dans notre contrée. C’est le souffle court que je sors du Clacson pour boire ma dernière clope et fumer mon dernier verre de la soirée. A demain Stone Rising Festival !
srf2014
Samedi 19 avril 2014, 17h30. Je suis arrivé plus tôt pour interviewer The Socks. J’en profite aussi pour faire le tour des stands de merchandising (c’est comme les soldes, faut toujours repérer le vinyle qui va vous mouler le boule comme il se doit), tailler le bout de gras avec Jo Riou, un graphiste rocailleux qui expose ses merveilleuses illustrations le temps du festival, zieuter le stand de Sentenza, un fabriquant de pédales d’effet. Déjà 19h30 et un running-order serré, Horta prend place. Belle surprise, les morceaux du quartet se construisent patiemment, méthodiquement. J’ai l’impression de voir un gratte-ciel se construire devant moi, émergeant sous les notes empruntées à Pink Floyd et plus proche de nous, sous le sens artistique de RIEN, les grenoblois. Et tendre vers RIEN, c’est déjà beaucoup. Une demi-heure et puis s’en va, place maintenant aux cinq moustachus, barbus, poilus de Brutus, place à la sueur et la bière, à un show garage et sexy malgré un son de grosse caisse dégueulasse qui déroutera un peu mon sens rythmique. Mais peu importe, le gobelet du chanteur (sosie de Philippe Katerine) nous toise et le groupe nous balance ses petites bombes, Personal Riot et Big Fat Boogie, dans la face. Ça commence à dodeliner sérieusement de la tête et olfactivement, on sent bien que ce soir est sold-out. Y a plus d’aisselles qu’hier, c’est certain. Comme sur album, Brutus est meilleur quand il ralentit le tempo, la voix prenant tout son sens. Et à mon grand regret, ils ne joueront pas Reflections. Ce set mérite tout de même que j’achète un Lp histoire de participer à la tournée, les bougres ayant perdu une bonne partie de leur matos dans un incendie, deux semaines avant de partir. L’ambiance est toujours au beau fixe grâce à l’organisation aux petits oignons, au public merveilleux et une temporalité maîtrisée. Aussitôt dit, aussitôt prêt, les ténébreux Aqua Nebula Oscillator acidifient l’ambiance. La musique du combo à géométrie variable est un buvard de LSD sexué, malsain et désirable. Quand il reste dans les structures, la profondeur des mélodies fait corps avec la gravité de la voix, mais je décroche quand le groupe part en jam psyché. Je suis peut-être un peu affamé et conventionnel mais quand surgit une paire de bongos dans le mix, je décide qu’il est grand temps de croquer dans un de ces sandwichs qui me draguent depuis une heure. Et bien m’en fut pris car des forces j’allais en avoir besoin pour supporter la déflagration qu’allaient être les concerts de The Socks et Radio Moscow. La belle histoire de The Socks, sa signature chez Small Stone, son album incroyable, ses instruments vintage, ses cheveux soyeux, la fiancée lyonnaise prend place sur scène, le public prêt à l’étreindre sans réserve. La salle est bondée, la tension palpable, la magie noire du rock dans les starting blocks. Some Kind Of Sorcery. Le concert est monstrueux, les harmonies vocales en place dès le premier morceau nous uppercutent les esgourdes, les riffs enflamment la façade. Oui, The Socks envoie un heavy rock 70s efficace, il a tout bien appris de ses aînés, mais le son, la puissance, l’originalité de ses compositions en font un groupe bien dans son époque, les guitares sont énormes (quand elles ne disparaissent pas d’un coup, la faute à une tranche de console capricieuse j’imagine) et la voix à vous fendre une petite culotte en deux. La section rythmique explose littéralement sous Holy Sons et son incroyable frappe de caisse claire. Autant vous dire que ça pogote, que ça slame, que ça lève le poing à tire-larigot dans la fosse. C’était la première date de la tournée pour The Socks, ce fut monstrueux. Allez, on va se prendre un LP et une petite pinte pour fêter ça ! J’épanche ma soif, j’éberlue mes yeux devant le bleu merveilleux de la Socks galette, puis je repars dans la salle. Je me fraye un chemin sur le côté jardin de la scène et je tends l’autre joue pour en prendre une bonne grosse de la part de Radio Moscow. Parce que oui, la fin du festival est dantesque. La radio de l’est n’usurpe pas son succès. Le trio est énorme et nous balance un blues-rock puissant et aérien, tranchant et suintant le groove. Parker Griggs est un maître de cérémonie démoniaque protégé par Hendrix, John Mayall, par Jeff Beck, par tous ces putains de génies de la guitare. Tous ses solos sont inspirés, techniques et profondément soul, encadrés et cajolés par une section basse-batterie ronflante, précise. J’ai encore la chair de poule en repensant à ces montées et descentes de manche tout en souplesse, quand on y réfléchit c’est une musique hyper phallique. Mais point de branlette dans ce show, que de l’utile, de l’efficace, du direct qui te prend aux tripes. Une fois de plus les oiseaux ont la gueule d’un public qui slame, il ne vole pas bien haut mais sa joie d’être là est contagieuse et il hurle à chaque fin de morceaux. Mon ptit pref, 250 miles, sera joué, j’ai le sourire aux lèvres et le sang au tympan.
Voilà, le Stone Rising Festival 2014, 2ème édition est terminé. Stoned Box association a une nouvelle fois fait des merveilles. Programmation, organisation, accueil, bien servis dans cet écrin rock qu’est le Clacson. On ne peut qu’espérer une troisième édition avec encore plus de groupes merveilleux, d’artistes talentueux et chevelus, de guet-à-pintes et autres réjouissances gustatives, de gentil public éclectique et de riffs en pagaille. Merci et bravo à tous.
Flaux

Uncle Acid and the Deadbeats, Black Moth, 8 avril 2014, La Maroquinerie, Paris, France

Il n’y a pas si longtemps le mardi c’était permis (je vous parle d’un temps que les moins de 25 ans ne peuvent connaitre) et en ce mardi 8 avril permission était donnée d’aller s’euphoriser en compagnie d’Uncle Acid and the Deadbeats. Le crime s’est produit à la Maroquinerie, munis de guitares, basse, batterie et Black Moth comme témoin.
Black Moth nous vient tout droit de Leeds, Royaume Uni, et propose un stoner/doom de facture classique et efficace. Le riff est épais, une belle basse ronde, ça tabasse bien derrière les futs. On sent que les Anglais sont rôdés et nous proposent un set efficace autour de leur « originalité » à eux en la personne de Harriet Bevan au chant. Harriet est une maitresse de cérémonie tout en simplicité, petits échanges sympas avec le public, voix claire et posée. Rien de si original en fait. A chaque début de chanson on se surprend à taper du pied, à hocher la tête, l’énergie du groupe est communicative et puis ça déroule sans se démarquer. Malgré quelques petits soucis techniques avec la deuxième guitare, qui offre un moment de solitude pour les autres membres du groupe et un certain énervement pour le guitariste concerné, les morceaux s’enchainent. Forcément avec un début de set à 19h30 pétantes et en 30 minutes toute l’audience du soir ne pouvait être présente pour le groupe. La salle commence à bien se remplir et est réceptive au dynamisme du quintette.
Une bonne première partie qui chauffe l’atmosphère sans la faire bouillir.
Petit détour par la case hydratation du corps due à une température ambiante qui commence à monter devant l’autel dédiés au rock obscur de tonton acid et ses bons à rien. Le planning horaire affiché saute alors aux yeux, le concert ne durera que 1h10 ! Encore une de ses soirées expédiées au lance pierre. La pression est donc sur les frêles épaules du headliner d’assurer en peu de temps. Pour les avoir vu l’année dernière au cours d’un festival majeur dans l’ouest français, je garde un souvenir d’un set pro et efficace, sans esbroufes. Qu’en est-il un an après ?
Le groupe entre en scène sur une musique non identifiée et déjà Uncle Acid a.k.a K.R Starrs a.k.a le leader du quartet prononce plus de mots que l’année dernière en saluant la Maroquinerie maintenant bien remplie. Il faut dire que le groupe en fin de tournée a étendu son aura suite aux premières parties de la tournée de Black Sabbath. C’est avec « Mt. Abraxas » premier titre du dernier né que le show se lance. Le cachet 60’s du son n’a pas sa place ce soir, priorité est donnée à l’impact live. K.R Starrs assène autant de coup au sol qu’il attaque lourdement sa 6 cordes. Le chant arrive, les harmonies avec le second guitariste sont en place. Tellement en place que ça en devient bluffant. En un morceau on comprend que ce line up constant depuis un an n’a pas chômé. Le groupe est allé à bonne école avec les pionniers du genre, ça a joué, ça a tourné, ça c’est trouvé. Belle énergie déployée en un titre qui s’enchaine sur « Mind Crawler » et l’audience est déjà euphorique. Deuxième utilisation de ce terme parce que le buzz qu’a créé le groupe en si peu d’années se situe bien là. Souvenez-vous de ce sourire niais et béat que vous avez eu la première fois que vous avez entendu leurs albums. Et bien ce sourire est de retour. En live Uncle Acid et sa bande ont sur-vitaminé les tempos, ont gonflé le son et ont peaufiné l’impact du chant. Et aujourd’hui ça ne se la joue pas rétro, c’est bien vivant et énergique que le quartet balance les riffs, matraque la batterie et se laisse enrober par la basse.
Troisième morceau de la soirée tout droit sorti de leur premier introuvable album, annoncé par tonton lui-même, Crystal Spiders déboule. Les stéroïdes font toujours leurs effets. On sent le groupe content d’être là mais on n’est pas là pour s’épandre non plus. Un petit remerciement entre chaque morceau, on annonce le titre du suivant et pam dans votre tronche. La folie gagne la fosse à l’intro de I’ll cut you down. Ca pogote, ça slame, qui aurait cru qu’en live ce groupe délivrerait autant de puissance, du heavy doom ! La setlist est variée, faisant honneur à tous leurs albums. On passe des ténèbres à la lumière, du lourd au plus léger, des sombres mélodies aux riffs entraînants, à chaque enchainement. Le groupe est au cordeau. La batterie imprime une cadence élevée à chaque titre, les guitares s’en donnent à cœur joie avec des solos plus débridés. La basse bien présente dans le son n’est pas en reste et donne toute l’épaisseur nécessaire à cette grande messe. On aurait eu tendance à oublier que ces quatre là savent jouer. On sent l’influence des groupes des années 60/70 qui maitrisent leurs instruments autant que l’art subtil de la compo qui te rentre dans le crane. Belle entente entre les deux guitares qui se cherchent et se répondent durant tout le show. Mention spéciale au chant, tout en harmonie à deux ou trois voix. Les Beach Boys du doom m’sieurs dames. Sans hésitation, sans accroche, cette particularité a de la classe en live. Il s’émane de ce groupe, et surtout de son mind-controller, un certain charisme qui envoute en live. Si Mister Starrs mène la barque, ses acolytes se font plaisir aussi et ne servent pas de faire valoir : quelques cris de ci de là et une présence scénique légitime. Un deuxième extrait du Vol.1 est joué. Notre oncle Kevin s’en joue de nous en demandant qui a cet album : en réponse aux quelques mains levées, un « fucking liars » bien senti.
Déjà l’heure du rappel. Le groupe sent l’audience conquise et 13 Candles est dédié à ce public qui depuis le début soutien et fait que ce groupe est là aujourd’hui bien présent au devant de la scène. 1h10 pile ! C’est frustrant. On en aurait bien repris quelques dizaines de minutes supplémentaires. Le groupe n’a pas perdu son temps. Soirée simple, efficace et trop courte.

Setlist :
Mt. Abraxas
Mind Crawler
Crystal Spiders
I’ll cut you Down
Death’s Door
Poison Apple
Valey of the Dolls
Over and Over Again
Vampire Circus
——————
13 Candles
Whitered Hand of Evil
Desert Ceremony

Grand Magus, Audrey Horne, Zodiac, The Vintage Caravan, 18 mars 2014, Divan du Monde, Paris, France

Décidément le Divan du Monde est un endroit où il fait bon vivre. La raison de notre venue à tous en ce dix-huitième jour du troisième mois de l’année deux mille quatorze se nomme Rockrevelation ! Tournée qui rassemble The Vintage Caravan, Zodiac, Audrey Horne et Grand Magus… Oui là comme ça sur le papier on se demande ce qui lie tous ce petit monde… et à l’écoute aussi.
Le problème de compatibilité entre ces mini-festivals et l’impératif de finir les concerts tôt entraîne à commencer à 18h pétantes les hostilités et malheureusement pour moi à 18h30 pile The Vintage Caravan était en train de remballer leur matos… Dommage, mon écoute pré-concert m’avait donné un très bon sentiment sur ce jeune groupe islandais. L’ambiance de la salle semble excellente, j’en conclue donc qu’en live ils ont assuré également. Je me consolerai avec leur clip haut en couleur « Expand your Mind ». Un groupe à suivre très certainement.
Zodiac s’installe tranquillement, fait ses balances et là on se dit que ça va être bon, très bon. Rien que pendant les balances le groupe se lance dans une petite impro et on sent déjà le feeling qui passe entre les quatre allemands. Ils n’ont fait que régler leur son et on en demande déjà plus. Le groupe entame enfin son set et nous voilà parti pour 40 minutes de bonheur. Petite intro lancée par la guitare rythmique de Stephan Gall, qui permet à tout le monde de le rejoindre sur scène les uns après les autres et « A Bit of Devil » déboule. Excellent son, belle dynamique entre les instruments et Nick Van Delft se met à chanter. Monsieur, voilà un bien bel organe que le vôtre. Belle voix claire, profonde et chaude, un petit côté rocailleux quand il « s’énerve » un peu. Voilà un chanteur qui sonne en live comme sur album. On sent le groupe content d’être de la fête, échange de sourires, communication avec le public et hop voilà « Free » sorti de leur dernier album en date. La magie opère toujours et quand on demande à une audience déjà envoutée si elle aime ZZ Top, on ne peut qu’emporter l’adhésion générale. « Blue Jean Blues » reprise des texans nous emmène donc au fin fond d’un bar miteux où toute la tristesse du jour suinte du comptoir imbibé de whisky. Le plus lumineux « Moonshine » prend la suite et on nous annonce déjà le dernier morceau. Mais comme pour nous rassurer Nick nous informe que « Coming Home » aura le droit à son jam. Set sans faute jusqu’à présent, la section rythmique formée par Ruben Claro et Janosh Rathmer ayant fait son boulot de fort belle manière, les solos étant bien sentis, on se dit qu’un petit jam ne nous fera pas de mal dans ces conditions. Intro du morceau, Nick fait de la slide guitar avec sa bouteille de bière (quand on vous parle de musicien de grande classe) et arrive la cerise sur le gâteau. La basse prend le lead, lance son motif, tout le monde suit sans broncher et s’éclate. La claque. Voilà comment on met tout le monde d’accord. Zodiac est bon, Zodiac a du feeling, Zodiac sait jouer, Zodiac assure en live, Zodiac plays « that blues rock thing » selon leurs propres termes.
On en oublie presque qu’on a raté un groupe après cela et Audrey Horne entre en scène. Les norvégiens font du heavy classic rock, comme il est dit. Ca joue bien, le public en grande majorité s’est déplacé pour ces messieurs et ils leur rendent bien. Ca chante en cœur, des inédits sont joués, les guitares sont fièrement brandies pendant chaque morceau, des coups de pied lancés à chaque intro, un petit tour dans la fosse et voilà. Pas forcément ma came, donc pendant une heure les morceaux s’enchainent et pour le coup je n’aurai pas de révélation sur ce groupe.
Le public reste nombreux pour l’arrivée de Grand Magus. Dès leurs apparitions pour les balances, les cris fusent, le groupe y est réceptif. S’annonce une belle entente entre les suédois et l’audience se soir. Que penser de Grand Magus aujourd’hui ? Ancien fer de lance d’un blues-hard 70’s-doom, les voilà catalogués en heavy metal. Le tempo a peut être été accéléré, le chant va peut être plus souvent flirter avec les hautes sphères, les solos sont peut être plus typés « metal » qu’avant mais il reste un sens de la mélodie, du feeling et du groove qui n’a jamais quitté le groupe depuis le premier album. Et ce soir plus que jamais le groupe va nous en faire la démonstration. Pour les deux du fond qui n’auraient pas suivi, depuis deux ans maintenant, se tient aux côtés de JB et Fox derrière les fûts ni plus ni moins que Ludwig Witt. Pour ceux encore plus au fond encore, Ludwig Witt c’est l’assurance que le groove reste présent, c’est le haut du panier des batteurs sauce Bonham, c’est Spiritual Beggars, The Quill, Firebird et plus si affinités.
Intro traditionnel/viking et « I, The Jury » attaque les cervicales. Le groupe est effectivement en forme, JB est très en voix et première démonstration est faite qu’avec le sieur Witt aux baguettes même les morceaux les plus heavy gagnent en chaleur. En fait le trio a perdu en froideur (si l’on peut dire) que ce soit au niveau du son tout comme au niveau de l’ambiance et de la communication avec le public. JB commente chaque morceau, chauffe la salle et les pépites des quatre derniers albums s’enchaînent. Déjà cinq morceaux et on a le droit à un solo de batterie. JB le souligne bien : des batteurs comme ça on n’en trouve plus beaucoup. JB s’essaye au français, nous parle de son attachement à l’école (dixit le « fuck school »). Le drakkar compresseur poursuit son chemin, le groupe est aux anges, on sent une vraie cohésion dans le trio et ce soir, le public est le quatrième membre. Vient l’heure du rappel, exceptionnellement pour la France une chanson bonus sera jouée par rapport à la setlist prévue. « Hammer of The North » vient ensuite clore la soirée avec ses chœurs puissants venant de la salle. Le groupe en est bluffé, les chœurs n’en finissent pas, le concert est fini qu’ils retentissent encore. C’est encore touché par ce public dédié que les suédois quittent la scène mais JB revient vite nous remercier une ultime fois. La voix était au top, les solos débordaient de feeling, la basse tenait la baraque et dégoulinait de gras, la batterie emballait le tout : 1h10 d’un concert première classe avec pour seul bémol un oubli total des trois premiers opus. Promis ils reviennent avant la fin de l’année, on espère parce que le power trio n’a jamais aussi bien sonné. Quelle que soit la classification musicale ça fait chaud aux cages à miel.
Setlist :
I, The Jury
Sword of the Ocean
On Hooves of Gold
Ravens Guide our Way
Like the Oar Strikes the Water
Drum Solo
Steel vs Steel
Valhalla Rising
Iron Will
Rappel :
Triumph & Power
The Shadow Knows (bonus français)
Hammer of the North
Ain´t-One

Truckfighters, White Miles, Valley of the Sun, 28 février 2014, Divan du Monde, Paris, France

28 février… Deux longs mois d’attente avant le premier concert d’une année 2014 qui s’annonce déjà riche en bons évènements. Il faut dire que ces dernières années le public français (et parisien principalement) a été gâté. Les groupes trouvant enfin leur public grâce aux efforts combinés des nombreux acteurs adeptes de musique de qualité. Et comment mieux lancer la saison qu’avec une affiche aussi alléchante dans une salle de qualité.
L’endroit : Le Divan du Monde, ancien théâtre du XIXème rénové récemment. Une bonne atmosphère se dégage de ce lieu, combiné à la qualité du son et une scène surélevée pour que tous vos sens se délectent.
L’affiche: Valley of the Sun, White Miles et Truckfighters.
Arrivé en avance il paraît raisonnable de faire le plein de bonnes énergies avant d’attaquer la soirée, le bar/brasserie du coin de la rue me fait de l’œil et pas qu’à moi apparemment vu que les stars du jour s’y installent également quelques instants plus tard pour un apéro d’avant concert. Note pour plus tard, penser à revenir dans ce bar, de toute évidence de bonnes rencontres à y faire.
Vient l’heure de rentrer dans la salle qui est déjà bien remplie, avec un petit tour par le stand merch de rigueur. Le stand merch est un bon reflet de la soirée : de qualité. Du choix pour les trois groupes, des produits « originaux », pour moi un vrai signe que le but de cette tournée pour nos amis suédois n’est plus juste de se faire connaître et de séduire. Aujourd’hui les Truckfighters ont marqué l’essai mais ils leur restent encore à le transformer, écrire pour la postérité leur nom dans le marbre.
Valley of the Sun entre en scène et c’est parti pour 30 minutes de stoner classique soit, mais d’excellente facture. Première signature sur le label Fuzzorama (de nos chers suédois) et on comprend pourquoi. Basse groovy à souhait, riff affutés, rythmes effrénés, voix juste avec ce qu’il faut de grain, pour un cocktail d’efficacité signé Cincinnati Ohio (comme nous le précise le groupe). On sent le groupe content d’être là, sourire aux lèvres, bonne communication, actifs sur scène et ils emportent avec eux l’unanimité du public. Le batteur donne tout ce qu’il a et bien plus encore, pensez à Dave Grohl survitaminé. Le résultat est simple : 3 titres = 2 baguettes de cassées. Heureusement pour les trois titres suivants il arrêtera là sa participation à la déforestation. En six morceaux VOTS (pour les intimes) tapent dans leurs différents albums (c’est toujours eux qui nous le précisent) et nous montrent et démontrent qu’ils sont définitivement un groupe à suivre. Il y a suffisamment d’efficacité et de variété dans ce qu’ils proposent pour nous donner envie de mieux les connaître.
Rapide changement de matériel et voilà les White Miles qui attaquent. Le groupe autrichien qui s’annonce comme originaire de Madagascar (première private joke de la soirée) nous propose un stoner/blues épuré à sa substantifique moelle : Guitare/voix + batterie. Pour faire dans l’analogie de base les White Miles sont les White Stripes du stoner sauf que cette fois madame gère la guitare et le chant et monsieur la batterie. Maintenant je ne crois pas qu’ils soient frère et sœur pour ceux que ça intéresse. Au fil des huit titres que vont nous offrir le groupe, les riffs sont bons, la batterie à bloc (je crois que ça doit être de rigueur pour cette tournée), le chant prenant. Le groupe échange beaucoup avec le public (seconde private joke avec quelqu’un dans la fosse) mais aussi avec la personne qui gère le merch (troisième private joke). On sent que la bonne humeur et le bon esprit règnent au sein de cette tournée. Maintenant les WM offrent un bon set mais qui pour ma part (et à vu de nez pour une partie de l’audience aussi) fait un peu retomber le soufflé.
Nouvelle intervention des roadies et des membres des groupes et résonne enfin dans la salle “Altered State” en guise d’intro/ mise en ambiance. Troisième fois que je m’apprête à voir Truckfighters en live. Après une prestation bonne mais un peu décevante pour ma part au Stoned Gatherings et un set rouleau compresseur au Hellfest, je suis plus que ravi de les voir en tête d’affiche dans de bonnes conditions pour juger le « meilleur groupe du monde » dixit JH.
C’est donc sur la douce mélancolie d’”Altered State” que Dango monte sur scène bientôt rejoint par Ozo et… mais c’est pas Poncho ! C’est quoi son petit nom déjà à ce batteur ? Désolé là je sèche et pour finir avec les analogies, Truckfighters sont les Spinal Tap du stoner définitivement.
Quoi qu’il en soit Dango nous balance l’intro de leur nouvelle offrande en date, “Mind Control” et c’est parti pour 1h30 de fuzz à gogo. Fidèle à leur image du fuzz il y en a, beaucoup ça c’est bien mais un peu trop compressé sur la gratte ce qui rend certains passages mélodiques trop étouffés.
Ce sont ces passages qui font la richesse du groupe et il est dommage que le son live ne leurs rendent pas justice. Ce sera le seul bémol de la soirée parce que sinon ça déboite.
“Atomic” pointe le bout de son nez ensuite et ne semble pas vouloir s’arrêter, signe que le groupe est là pour profiter avec nous du moment et pas juste en mode « pas le temps, on enchaine ».
“Universe” est sorti, il faut le défendre ! Ozo demande à la foule s’il doit commencer à jouer et une fois validation eue, il nous lance un petit “Get Lifted”.
Déjà deux morceaux du nouvel album et le verdict est simple : ça passe trèèès bien l’épreuve du live. Dango se risque à des reprises en cœur sur la chanson mais on peine à l’entendre. En même temps je ne vois pas comment il pourrait avoir assez de souffle pour chanter vu la débauche d’énergie dont il fait preuve tout le long d’un show. Parce que oui le gaillard en 1h30 ne s’arrête jamais, un accord = saut, et entre chaque bon : sautillement permanent. Il se donne physiquement à chaque concert et c’est communicatif ! C’est bien, rien qu’en le regardant j’ai fait mon sport pour l’année.
Ozo lui est très en voix. Quelques petites faiblesses par endroit mais je ne l’avais jamais entendu si juste et il n’est pas fainéant en terme d’investissement physique non plus donc je suis d’autant plus agréablement surpris. Le groupe visite l’ensemble de ces albums en jouant les « classiques », “Last Curfew” avec une intro jazzy étirée, “Manhattan Project”, “Traffic”.
Troisième échantillon du dernier né : “The Chairman”. Cette chanson démontre une fois de plus que le groupe compose de manière subtile sur album mais qu’une fois en live ça prend une autre ampleur. Un vrai coup de cœur pour ce morceau.
“Monte Gargano” déboule, le groupe fait une fois de plus durer le plaisir à la fin du morceau et Ozo n’y résiste pas et plonge dans la foule. L’interaction est totale avec le public. A partir de là les stage divings vont pleuvoir et quiconque monte sur scène est le bienvenu, le groupe jouant avec eux avant le fatidique saut ! “In search of (the)” achève l’audience avant un mini break. En guise de rappel quatrième représentant de Universe, “Prophet” qui lui aussi trouve sa place en live.
Ozo consulte ensuite le public conquis pour choisir l’ultime morceau de la soirée. Les demandes hurlées sont nombreuses et variées mais c’est “Desert Cruiser” qui l’emporte. Le public chante sur tous les refrains, le groupe se donne à fond, le bassiste finit une nouvelle fois dans la fosse.
Fin du show, c’est passé vite, trop vite. Démonstration est faite que Truckfighters assure plus que jamais en live et que si on leur laisse le temps il vous offre un vrai show original et bien pensé. C’est quand le prochain ?

Setlist :
Altered State
Mind Control
Atomic
Get Lifted
Last Curfew
Manhattan Project
Traffic
The Chairman
Monte Gargano
In Search Of (The)
Prophet
Desert Cruiser
Ain´t-One

UP IN SMOKE 2013 – Pentagram, Colour Haze, My Sleeping Karma, Truckfighters…, 5 octobre 2013, Z7, Bâle, Suisse

Nos amis de Sound Of Liberation, à qui l’on doit aussi le formidable Desertfest de Berlin, avaient déjà monté quatre tournées sous le label “Up In Smoke” depuis 2011. C’est ainsi que des formations telles que Monkey3, Glowsun, Colour Haze, The Atomic Bitchwax, My Sleeping Karma et une poignée d’autres ont déjà sillonné l’Europe sous la bannière de ce festival itinérant. La nouvelle formule sédentaire propose quinze formations du meilleur tonneau qui se sont succédées sur deux scènes : une petite et une grande (qui l’eût cru ?) dans la salle bâloise, de l’heure du repas jusqu’à très tard dans la nuit…
Le choix de l’épicentre pharmaceutique et chimique suisse était judicieux pour voir converger des Suisses (ben tiens !), des Allemands et des Français dans cette cité à cheval sur les trois pays. C’est donc au chant du coq que vos deux envoyés spéciaux se sont tirés de leurs pénates respectives pour se chopper à l’aéroport de Bâle-Mulhouse où le représentant du Sud-Ouest se rendait en avion (on n’est pas bien payé par Desert-Rock, mais on rigole bien, ça compense) afin d’y être recueilli par le petit Suisse.
La salle est dans sa configuration habituelle, avec une partie des groupes sur la grande scène statique du club et une petite scène au niveau du public organisée sur le côté gauche du hangar. L’avantage d’une telle disposition est qu’à part pour fumer, bouffer ou s’aérer un peu les neurones (car il nous en reste un peu…), on peut assister à tous les concerts en n’ayant qu’à se tourner (c’est un peu comme à Roland Garros, mais en version plus rock’n’roll). Les petits futés que vous êtes auront noté au passage que si les concerts ne se chevauchent pas, c’est grâce à une organisation bien huilée qui envoie pile à l’heure tous les sets.

Nos horaires respectifs ne nous ayant pas permis d’être sur place à midi à l’ouverture des portes, nous n’avons pas pu assister au set de Marant (c’est pas drôle !) et de Joules. C’est donc avec SHEVER que nous avons commencé ce Up In Smoke dans la lourdeur de leur doom aux tempi fort ralentis. Expérience commune aux shows de doom : ça envoie du gras, ça réveille, ça fait bouger la nuque et déconcerte un peu le public, encore congru à cette heure de la journée, venu soit pour des groupes de stoner, soit pour Pentagram (les quidams avec leurs vestes à patch) soit – et ils étaient nombreux – pour la nouvelle coqueluche des newbies du stoner : Truckfighters ! La formation helvétique à majorité féminine nous assène donc ses rythmiques pachydermiques accompagnées de vociférations féminines hallucinées durant presque une demi-heure soit le temps qui leur était alloué pour séduire le public à l’heure du dessert. Les inconditionnels du groupe qui a déjà sorti quatre productions dans le circuit underground ont goûté aux interactions verbales de la frontwoman qui a échangé dans le dialecte local avec eux.

CAROUSEL

Sitôt les dernières salves lancées depuis la Main Stage, c’est CAROUSEL qui a envoyé un rock nettement moins bourrin sur la Small Stage. La formation américaine se distingue dans un tout autre registre que leurs prédécesseurs. Empreint de sonorités seventies, leur hard rock lorgnant vers le psychédélisme est fort appréciable en live. C’est la plupart des brûlots de “Jeweler’s Daughter” qui ont été balancés par le groupe qui avait sorti pour l’occasion ses grattes d’un autre temps. Enfin, d’un autre temps pour le quidam moyen, mais certainement pas pour ces types qui semblent avoir le compteur bloqué sur le début des années quatre-vingt lorsque les soli agrémentaient tous les titres fomentés par des chevelus. Ca groove incroyablement bien même si la voix aiguë et nasillarde de l’imposant chanteur à chemise de bûcheron dépareille avec sa stature. Croyez-nous les enfants, quand l’Explorer croise le fer avec la SG sur leurs riffs bien foutus, on comprend pourquoi Tee Pee a sorti la plaque de cette bande de chevelus au potentiel impressionnant.

BRIGHT CURSE

Nous quittons la scène raz du sol pour assister à la prestation d’un second groupe non autochtone : c’est au trio de BRIGHT CURSE que revient l’honneur d’ouvrir les hostilités internationales sur la main stage de ce Up In Smoke. Le groupe pour partie français, établi en Angleterre, nous avait fait kiffer avec leur premier jet et nous attendions avec impatience de voir ces garçons dans le brouillard en live maintenant qu’ils se sont confrontés plusieurs fois à cette exercice (ce qui n’était pas le cas lorsqu’ils ouvrirent pour Naam à Genève au printemps dernier). Le moins que l’on puisse dire c’est que le côté plutôt aérien et psychédélique de leur son prend une énorme paire de couilles sur scène où ils envoient des versions nettement plus lourdes de leurs compositions. La setlist est calée sur le premier album, chose qui n’est pas très étonnante pour un groupe n’ayant qu’une production à son actif, mais l’efficacité scénique du trio le distance de la division amateur même s’ils avouèrent en fin de set n’avoir jamais joué devant un public si nombreux : continuez comme ça les gars et ça devrait se reproduire assez vite ! Très à l’aise sur cette grande scène malgré des lights vissées quasi uniquement sur le frontman de la formation (Romain), Bright Curse a assuré un show impeccable et nous devrions entendre parler de ces types très rapidement vu le stoner de qualité qu’ils fomentent.

GRAND LOOM

Et hop, quart de tour sur la gauche pour ne pas rater les allemands de GRANDLOOM qui finissent de préparer la petite scène à leur assaut. Le trio, visiblement ravi d’être là (ça tombe bien, nous aussi !), engage les premiers accords de son stoner instrumental teinté de bon vieux heavy rock 70’s et de quelques passages subtilement planants. Ils ont la pêche, et manifestement ont décidé de se donner à fond sur les trente minutes qui leur sont allouées. La formule musicale standard de tout trio instrumental est exigeante en soi : elle n’autorise ni l’approximation ni l’incompétence. Grandloom ne se heurte jamais à aucun de ces écueils. Le groupe en fait la démonstration dès “Orbit Wobbler” en intro, un titre épique et groovy d’une dizaine de minutes, qui permet à Thomas de déverser quelques seaux de fuzz devant un public ravi, tandis que Hans, qui gardera le sourire aux lèvres pendant toute la durée du set, se défonce pour former une ligne de basse consistante, ronde et punchy à la fois. Lui et le nouveau batteur du groupe, Tim, constituent une base rythmique impeccable. Au milieu d’un set peu copieux (trois ou quatre longs titres rempliront vite ce petit créneau) le trio dégainera aussi le punchy “Woodbridge” (toujours issus de son premier – et seul véritable – album), un titre efficace, même si donnant une impression un peu déstructurée en live (des breaks en veux-tu en voilà). Un groupe intéressant, et en tout cas un vrai bon groupe de scène, qu’il est probablement intéressant de voir sur un set plus long, où il a le temps de dresser des ambiances plus “profondes”…

 

STEAK

Pas le temps de se poser, on court vite vers la main stage pour ne pas rater une minute des très hype STEAK (bon, on va pas vous la faire, on a au passage un peu abusé des dix minutes de pause entre les groupes pour faire quelques passages au bar…). Quoi qu’il en soit, on est bel et bien au premier rang lorsque le quatuor londonien pose les premiers accords de “Black Milk” et de son riff bien crade et lancinant, qui fait se rapprocher le public. On évalue très vite les forces en présence : un chanteur charismatique (qui même si sa technique vocale n’est pas irréprochable, compense par un coffre et une puissance impeccablement appropriés), un guitariste un peu poseur (mais qui le vaut bien) et une base rythmique moins démonstrative mais fichtrement bien en place. Du coup, ben on a tout ce qu’il faut, là sous nos yeux, et on apprécie. Les riffs de Reece sont tour à tour vicieux et chargés de fuzz, ou plus planants, accolés à un bassiste bien dans son trip. Même si les britons évoluent globalement dans un cadre musical plus propice aux mid-tempi, la charge en règle que représentent les riffs de morceaux comme “Whiskey Mule” ou “Liquid Gold” génère une énergie phénoménale, et assez contagieuse. On aurait néanmoins apprécié que la machine s’emballe un peu : sur la demi-heure de set qui lui était réservée, on aurait pu glisser quelques passages un peu plus “nerveux” peut-être pour se démarquer un peu, et remuer un peu un public qui a déjà enquillé quelques concerts bien sympas à cette heure. Pas la révélation attendue, mais un groupe qui assure, à voir assurément sur un set plus long.

 

THE MIDNIGHT GHOST TRAIN

Petite séance d’aération des poumons et retour dans le chaudron bâlois, qui commence à être furieusement bien rempli et voit donc des sourires illuminer le minois des organisateurs (c’était pas gagné d’avance), pour se diriger vers la petite scène où le trio étasunien MIDNIGHT GHOST TRAIN s’apprête à foutre un boulet énorme ! C’est clairement la révélation du festival qui s’apprête à envoyer du rock bien gras à l’image de ses membres qui sont un peu l’antithèse physique de Kadavar. Passées ces considérations visuelles, nous sommes aspirés vers la scène où le groupe déploie une énergie incroyable pour nous faire vibrer, nous secouer la nuque et taper du pied voire plus si affinité. C’est un set digne de celui gravé dans le sillon lors du dernier Roadburn (le “Live At Roadburn 2013” en fait) dont le groupe nous gratifie et à voir les bananes fleurir sur les bobines du public présent, nous ne sommes pas les seuls à être conquis par ce trio de hard rock bien seventies qui sait être tantôt subtil tantôt superbement grailleux. Mention spéciale à son leader charismatique Steve Moss dont la voix éraillée a fait mouche dans nos cages à miel surtout sur des brûlots tels que “Woman Of Hate” qui suinte par tous les pores le rock de dégénéré aux relents blues. Vivement la prochaine !

 

MONKEY 3

On se dégourdit les jambes quelques mètres en se frayant un passage au milieu des fumeurs et des amateurs de junk food puis retour à la case Grande Scène pour une ultime formation helvétique ; pas n’importe laquelle puisque c’est au tour de MONKEY 3 d’envoyer du son dans le Z7. “The 5th Sun” n’est pas encore dans les bacs, mais les aficionados ont déjà parcouru le web et écouté le split pour se faire une idée de l’orientation musicale qu’a pris le quatuor instrumental : ils n’ont pas été déçus car la formation lausannoise persiste dans son style tout en montant en puissance albums après albums ! Boris, Walter, Picasso et son chapeau ainsi que dB nous proposent un set à quelques encablures de ses précédentes prestations en s’éloignant des setlists auxquelles nous sommes habitués, ce qui est assez cohérent vue la sortie de leur nouvelle plaque. Ces lascars attaquent bille en tête avec un nouveau titre fleuve : “Icarus” qui désoriente un tantinet les quidams venus pour les standards de nos chouchous, mais quel énorme panard nous avons pris avec ce titre énorme dans tous les sens du terme qui nous a carrément transcendé d’entrée de jeu. Le reste du show fût du même tonneau et ce n’est pas demain la veille que nous allons nous lasser de cette formation incroyable, même si Boris a abandonné son légendaire marcel ! Du tout grand art au programme et notre forte incitation à aller découvrir la dernière galette en date pour ceux qui ne l’auraient pas encore fait (nous avons les noms !).

 

GLOWSUN

Certes, on ne dénombre dans la journée qu’un seul et unique groupe français, mais quand la machine GLOWSUN se met discrètement en place sur la petite scène et commence à faire pleurer les riffs de “Death’s Face”, on comprend que niveau qualité, on est dans le haut du panier. L’intro et ses ambiances éthérées (quelques passages de wah-wah bien sympas) laisse sa place à une montée en tension fiévreuse sur la fin du titre, qui donne le ton des trois petits quarts d’heures qui constitueront l’un des points d’orgue de cette journée (qui décidément méritait bien le déplacement !). Tandis que Ronan et Fab sont concentrés sur les fondations rythmiques de cet édifice colossal, Johan est à fond dedans. Quand on connaît le personnage en dehors de la scène, posé et discret, le voir aussi furieux et expressif derrière sa gratte est une surprise en soi. Après un groovy et percutant “Virus” parfaitement exécuté (seul extrait de leur première production), le trio enquille les perles issues de son classique second LP. Les soli sont envoyés sans interruption, enchaînés à l’avalanche de riffs de ce set, au son énôôôôrme. En fait, il faut vraiment voir Glowsun sur scène pour comprendre la puissance du choc : quand on est habitués à leurs albums finement ciselés et efficacement mis en son, entendre les mêmes titres avec toute la puissance du groupe et un son dix fois plus gras est une nouvelle surprise. La setlist fait la part belle à “Eternal Season” (dont le design orne deux beaux socles lumineux verticaux sur la scène, une excellente initiative pour sortir un peu du lot !), et joue un titre encore inconnu (sur le prochain album ?) comme un cadeau donné aux fans, et notamment les nouveaux fans gagnés aujourd’hui, en nombre. Ce soir Glowsun n’a pas simplement convaincu, ils ont mis la barre du stoner hexagonal très très haut, et après ça, les successeurs restant à passer sur l’affiche de ce bien nommé Up In Smoke vont devoir s’accrocher. Carton.

 

TRUCKFIGHTERS

Un autre trio, suédois cette fois, prend la suite sur l’affiche : les très attendus TRUCKFIGHTERS, auréolés d’une série de tournées dans le monde entier, de quelques apparitions remarquées en festival (le Hellfest cet été, une belle claque), viennent presque en terrain conquis, bien préparés à botter quelques culs. Ca commence très bien et très fort avec (surprise…) “Desert Cruiser”, toujours lui. Mais avouons que son riff simplissime remarquable, déluge de fuzz blindé d’une basse ronflante, est une introduction dont il est difficile de se passer de la part des trois suédois. Un peu après rugissent les premiers accords de “Monte Gargano”, un titre assez exceptionnel et très sous-estimé lui aussi, dont a minima le refrain à contretemps et son riff plus élaboré sont des petits trésors d’inventivité et d’efficacité. Mais les choses se gâtent un peu lorsque le groupe se lance dans le morceau titre de son dernier E.P., “The chairman”, un titre alambiqué, plein de breaks, au tempo un peu “bâtard” (ni rapide ni lourd), sans riff remarquable, des soli peu impressionnants… et ce sur plus de huit minutes ! Le titre désarçonne un peu un public qui vient de s’enquiller un paquet de super concerts jusqu’ici, et attend un set percutant et efficace. Clairement pas la pièce maîtresse à dégainer en milieu de set, encore moins enchaînée au pourtant très bon “Last Curfew”, trop subtil à ce moment stratégique de la setlist. Et de fait, la fin du concert sera un peu lourdingue, et les sauts de cabri désormais légendaires de Dango (qui feront grincer quelques dents dans le public – sans doute des gens qui ne comprennent pas que le stoner n’est pas forcément introspectif et nombriliste…) n’y feront rien. Un peu moins d’une heure dont on ne retiendra en terme d’efficacité pure que le premier tiers du concert. Notons néanmoins que la majorité du public aura passé le concert entier à fond dans le set, et en ressortira objectivement pleinement satisfait.

 

MY SLEEPING KARMA

Comme c’était déjà le cas il y a quelques mois au dernier Desertfest de Berlin, MY SLEEPING KARMA se retrouve sur la plus petite des scènes et comme c’était déjà le cas il y a quelques mois, Matte, Seppi, Steffi et Norman ont foutu un énorme boulet à la salle qui les accueillait ce soir-là ! L’intensité scénique que délivre ce quatuor instrumental nous transcende carrément à chacune de ses apparitions et nous ne nous sommes pas fait prier pour friser l’orgasme durant le concert des Allemands ! Seppi, impérial, accompagné de son acolyte Matte font rapidement disparaître l’absence de chanteur dans le groupe en occupant physiquement bien la scène et captivant aisément tout le public qui se retrouve très rapidement comme envoûté par les mélodies aériennes et hypnotiques délivrées par le quatuor. Des nappes synthétique bien présentes, des riffs psychédéliques, une rythmique bien calée, un public qui prend un énorme plaisir, des influences bouddhistes et un groupe qui prend son pied sur scène : c’est les ingrédients qui ont une nouvelle fois transformé un show de rock de My Sleeping Karma en un pur moment de bonheur terrestre ! Le groupe nous a gratifié de titres extraordinaires dont seuls ils ont le secret, à l’image de”Tamas”, “Pachyclada”, “Psylocybe” et bien sûr l’énormissime “Glow 11” qui doit être un des morceaux les plus géniaux jamais composés !

 

COLOUR HAZE

Alors que Matte salue le public, les mecs de COLOUR HAZEattendent patiemment sur scène, les musiciens prêts, les réglages faits et l’attitude aussi expressive que celle qu’ils auront durant tout leur set. Il est à noter que le format festival a contraint les Allemands à adapter une setlist restreinte, rentrant dans la durée qui leur était allouée. Beaucoup plus percutant quand il s’agit de se laisser à aller à jammer sans limite, Colour Haze a néanmoins balancé un set de belle facture qui n’a toutefois pas conquis la totalité du public. Il faut dire que si le groupe compte une grosse poignée d’adeptes par delà la planète stoner, il n’est pas composé des personnalités les plus extraverties qu’il soit. En fait c’est un peu comme si des profs de musique faisaient étalage de leurs prouesses techniques et ça, ça passe assez mal après le délire qu’a été le show de leurs compatriotes de My Sleeping Karma. Ces virtuoses que nous adorons sur disque ont peiné à nous convaincre ce soir-là à Bâle. Peut-être avions nous placé la barre trop haut ou vu trop de bonnes formations se succéder sur scène car c’est pas que nous ne soyons pas réceptif à l’art de ce tiercé de grosses pointures du stoner, mais jamais durant ce concert nous nous sommes sentis transportés par la musique de ce groupe. Dommage parce que sur le papier c’est un des groupes qui nous a fait bouger et ce n’est pas demain la veille que nous allons cesser de les écouter. Il est fort à craindre que ce manque d’osmose avec les vétérans de Munich est aussi à créditer sur le syndrome exprimé ci-après. Comme ce n’était pas notre première confrontation avec ces superstars du stoner européen, il y a fort à parier que dans une configuration moins rigide, nous allons prendre un énorme panard lorsque nous recroiserons la route de Colour Haze.

 

RADIO MOSCOW

Cher lecteur, le moment est venu de te narrer les aléas existentiels liés à la triste condition du chroniqueur, des aléas dont certains groupes sont souvent, injustement, la victime. Debout depuis dix-sept heures de temps, deux avions (pour l’un, ou quelques centaines de kilomètres pour l’autre), treize concerts jusqu’ici, quelques bières, quelques boissons énergisantes pour tenir le coup (pros jusqu’au bout !), ledit chroniqueur (qui n’est qu’humain, rappelons-le) voit son métabolisme de guerrier fléchir pendant une petite heure autour de minuit… et ce jour-là, c’est malheureusement les très attendus RADIO MOSCOW qui en font les frais. Les américains (comme leur patronyme ne le laisse pas présumer) ne déméritent pourtant pas : tandis que le bassiste et le batteur sont plutôt du style introvertis, tous les regards se focalisent vers l’unique leader du groupe, Parker Griggs, excellent guitariste et vocaliste de son état. Le trio joue bien, son stoner rock assez classique présentant néanmoins des atours assez variés (blues, psyché, heavy, doom “light” même…). Seulement, malheureusement, le groupe dans ces conditions ne présente pas d’élément marquant qui parvienne à faire émerger cette prestation du maelstrom que constitue déjà ce Up In Smoke : light show atone, jeu scénique basique, musique qui ne se démarque pas radicalement de ses prédécesseurs (ce qui ne diminue ni la qualité des compos ni le talent des instrumentistes)… Aveu d’échec, cher lecteur, on n’a pas été à la hauteur de ce groupe, que l’on meurt d’envie de revoir dans de bonnes conditions. On est passés à côté.

 

PENTAGRAM
Un mal pour un bien, au final, car ce petit passage à vide nous aura bien requinqué pour l’indiscutable tête d’affiche de cette journée, PENTAGRAM, et quand Bobby Liebling et son regard de vieux vicelard tordu monte sur scène sur le riff sur-heavy de “Treat me right”, les sourires sont omniprésents dans le Z7. Le vocaliste, dont l’énergie semble intacte malgré le poids des années, attire légitimement tous les regards : ses poses étranges, ses regards incroyablement glauques, ses gesticulations (entre la danse lugubre et la pantomime naïve) font le bonheur d’un public d’afficionados qui n’en demande pas tant. Sa voix n’est plus celle de ses vingt ans (bon sang, le bonhomme un peu cinglé qui s’agite devant nous va quand même terminer sa sixième décennie !), mais il assure quand même bien le niveau attendu (rappelons quand même que le point fort de Pentagram n’a jamais été le coffre de son vocaliste plutôt que sa personnalité et sa tessiture vocale, subtilement nasillarde). Illustration est faite sur le bien glauque “Forever My Queen” ou un peu plus tard encore le classique incontournable “Sign of the Wolf” très appréciés par un public au taquet ! Les musiciens qui accompagnent papy Bobby ne déméritent pas, signe si besoin était de confirmer le talent du vieux roublard pour s’entourer de zicos impeccables : sa plus récente recrue, le taciturne Matt Goldsborough à la gratte, débite les riffs impeccables du combo comme si de rien n’était, et son toucher fait mouche sur les innombrables soli que devant lesquels Bobby se prosterne sans arrêt (témoin ce superbe “Dying World”). Le duo basse-batterie ne démérite pas, jouant par ailleurs d’une complicité apparente qui fait plaisir à voir. Le quatuor, pro jusqu’au bout des ongles, déroule donc son set constitué essentiellement de classiques ; efficacité garantie. On aura tôt fait de regretter peut-être un léger manque de prise de risque dans le choix des titres joués ce soir, mais au final, le set tourne super bien, et après quinze concerts aujourd’hui, l’on peut aussi présumer qu’on n’aurait peut-être pas forcément apprécié un titre obscur et peu connu, issu de la disco fournie du groupe. On ne boude donc pas notre plaisir de terminer notre soirée avec un Pentagram en bonne forme.
Voilà qui clôt de fort belle manière un festival très réussi sous cette forme ! Réjouissez-vous bande de petits veinards, la formule ayant été fort concluante, vous pouvez déjà noter au marker rouge la date du samedi 4 octobre 2014 car une deuxième édition de ce festival aura lieu au même endroit. On ne change pas une équipe qui gagne ! Rendez-vous l’an prochain !

Chris & Laurent

Colour Haze, My Sleeping Karma, 1er octobre 2013, La Dynamo, Toulouse, France

L’honneur est sauf quand l’on rentre dans la Dynamo, cette sympathique salle toulousaine de capacité honorable… car le remplissage en début de soirée est loin d’être ridicule ! Même si les préventes n’étaient pas au niveau attendu, les toulousains ont su répondre présent et faire de cette soirée une étape réussie supplémentaire de cette mini-tournée prestigieuse sur le papier, mais audacieuse néanmoins : My Sleeping Karma et Colour Haze sont portés depuis plusieurs années par une réputation inattaquable… plutôt dans la partie Centrale du continent ! Leur venue en ces contrées plus occidentales (Ouest, Sud-Ouest de la France, Espagne…) est complètement inédite, et leur fanbase est à construire. Au vu du succès de cette tournée, gageons que l’objectif est bien parti pour être atteint et que le reste du continent est prêt à succomber…
On commence la soirée avec Aerisian, un trio que l’on présume local, qui n’apporte pas grand-chose à la soirée si ce n’est lancer l’activité du bar. Les trois gaillards, assis sur des tabourets, enquillent des compos à trois guitares sèches. Pas inintéressant en soi (y compris un dernier titre presque épique dans sa structure et son interprétation) mais pas non plus une entrée en matière appropriée à l’ambiance développée par nos têtes d’affiche.


Ce n’est que lorsque MY SLEEPING KARMA monte sur scène que les affaires démarrent donc vraiment. La montée se fait très progressivement avec le désormais habituel “Pachyclada”, un titre lent, inspiré et juste catchy comme il faut. Il n’a pas suffit de plus pour emporter le public, et le sentiment est partagé, puisque dès lors les sourires s’imposent sur les visages des musiciens. La scène est de petite taille (et le kit de Steffen est posé devant celui de Manfred, le cogneur de Colour Haze, ce qui restreint encore un peu la surface) mais le groupe s’en accomode, et les musiciens évoluent dessus sans obstacle : ils vivent étroitement leur musique, comme une sorte d’osmose entre eux trois – clairement les échanges scéniques se font uniquement dans le cadre du trio guitare-basse-batterie, le claviériste (aussi essentielles que soient ses nappes sonores dans la musique du groupe) faisant son truc de son côté. Il suffit d’un clin d’œil, d’un sourire, d’un hochement de tête pour qu’ils se plongent dans un break ou ne se rattrapent au branche après un petit passage modestement jammé. C’est beau à voir ! La set list verra défiler sur l’heure de set les meilleurs titres de toutes leurs productions (puisqu’ils remontent jusqu’à leur première sortie, notamment avec le désormais classique “Glow 11” et ses violentes montées en puissance). Les sourires sincèrement reconnaissants vis-à-vis d’un public de connaisseur sont omniprésents, et Matte n’hésitera pas à s’adresser autant que possible aux spectateurs dans leur langue d’origine, un effort louable ! Une belle claque en tout cas, pas la première avec le groupe.


Quand COLOUR HAZE prend place sur scène (après un court intermède), l’ambiance reste la même dans le public, en moins “animée” peut-être, la musique du second groupe allemand ce soir étant un peu plus introspective dans son approche, plus largement planante, même si les passages plus incisifs et rythmés ne manquent pas. Il faut dire aussi que l’attitude scénique de nos trois lascars laisse un peu pantois quand on les voit pour la première fois. Par politesse, on passera sous silence la posture de Philipp à la basse, faisant passer les concerts de Brant Bjork & the Bros pour un concert de Dillinger Escape Plan… Le gars ne bronche pas, planté immobile sur ses deux pieds. Au final, on aura néanmoins du mal à valoriser son collègue cordiste Steffan, qui n’est pas beaucoup plus animé derrière sa guitare : pieds nus derrière son rack de pédales d’effets, le bonhomme au visage largement dissimulé par sa chevelure “Tahiti Bob” ne lève que rarement la tête pour s’enquérir du ressenti du public. Mais au final, on aurait du mal à le critiquer pour sa posture : d’une part, il assure des lignes de gratte absolument remarquables : rythmiques, soli, breaks maîtrisés, impros impeccables… il abat à lui seul une quantité de boulot remarquable. Et par ailleurs, le bonhomme est complètement immergé dans l’ambiance musicale qu’il tisse avec ses potes. Avec un design visuel scénique inexistant (quasiment pas de light show, rien de décoré), pas plus de dix mots adressés au public dans toute la soirée, tout est clairement orienté sur la musique, et rien ne s’en dévie, jamais. Et du coup, portés par une qualité de riffs et de compos effectivement inattaquable, l’adhésion se fait assez vite. Les gars ne sortent jamais de leur trip, et enquillent les titres sans effort. On notera un all-star man de l’ombre, avec un batteur impeccable, qui alterne sans efforts des styles de frappe tantôt jazzy, tantôt bluesy, tantôt heavy… Je préfère ne pas m’engager sur la set list pratiquée, ayant été contraint pour motifs personnels de quitter la salle aux alentours de minuit, après déjà plus d’une heure d’un set qui ne semblait pas près de s’achever, devant un public ravi, qui n’en demandait pas tant, et qui aura passé une fichtrement bonne soirée.

Laurent

Colour Haze, My Sleeping Karma, 29 septembre 2013, Divan du Monde, Paris, France

J’aime la façon dont le stoner (au sens large) évolue dans notre pays. Bien sur j’aimerais que tout soit plus rapide mais tout vient à point à qui sait attendre et nous pouvons finalement être heureux de la tournure des choses.
Il y a dix ans, si on m’avait dit que deux groupes allemands, l’un 100% instrumental, l’autre en grande partie, rempliraient une salle comme le Divan du Monde pour donner deux superbes concerts devant une public conquis d’avance et très enthousiaste, je n’aurais pas misé un euro la dessus, surtout à plus de 25 € la place.
Sauf que voilà, cela fait des années que des gens y croient, cela fait des années que certains s’investissent corps et âmes pour que ce genre de soirée puisse avoir lieu et c’est avec une satisfaction vraiment sincère que je me rends à Paris pour cette affiche magnifique, Colour Haze précédé de My Sleeping Karmapour la première des quatre dates en France, oui vous avez bien lu, quatre dates en France.

Le quatuor de My Sleeping Karma vient nous offrir ce qu’ils font de meilleurs pour ouvrir la soirée. Et quand je dis ce qu’ils ont de meilleurs, je pourrais même dire de la meilleure des façons possibles. Avec de splendides interprétations de certains de leurs excellents morceaux, Seppi et ses acolytes nous ont offert cinquante minutes de pur bonheur. Energique et planant, totalement maitrisé, le concert, de la première à la dernière seconde, vous transporte ailleurs, vous file des frissons et vous mets le sourire aux lèvres instantanément. En plus de cela vous ajoutez un excellent son qui permet d’apprécier pleinement la performance du groupe, tant dans l’équilibre que dans la puissance.
Le groupe alterne les passages planants, aux rythmes répétitifs pour d’un coup vous plonger dans un break psyché ou une envolé heavy de toute beauté.
Une excellente prestation, les applaudissements me font dire que je ne suis pas le seul à avoir apprécié le show.

Place au trio de Colour Haze pour un peu moins de deux heures d’un show là aussi réellement intéressant et particulièrement maîtrisé. Colour Haze, c’est le genre de groupe qui peut commencer son concert avec un She Said de plus de vingt minutes… C’est bluffant, c’est magnifique, c’est jouissif. Le groupe maîtrise ses compos de façon impressionnante. L’entente entre les trois membres est une évidence. De nombreux coups d’œil entre eux, une complicité, une alchimie parfaite qui rejaillit sur leur musique, qui montre et traduit cette cohérence de façon tellement plaisante pour un public qui ne s’y trompe pas et applaudit là aussi généreusement.
Le groupe enchaîne ensuite avec Moon et à titre personnel, voilà, je suis aux anges. Un titre que j’affectionne particulièrement et qui est magnifiquement interprété… C’est du tout bon, c’est duColour Haze des grands jours.
La setlist est exclusivement consacrée aux quatre derniers albums du groupe à l’exception d’un nouveau titre qui, sur les impressions que peuvent laisser une découverte en concert semble encore présager du meilleur avec un rythme légèrement oriental en intro.
Le groupe nous laisse comme il nous a accueillis avec un Peace, Brothers & Sisters! de plus de vingt minutes. Le public est pleinement satisfait, le groupe est chaleureusement remercié par des applaudissements nourris.

Une excellente soirée donc, comme on en rêvait il y a plus de dix ans et qui est maintenant une réalité. Un grand merci à ceux qui ont cru qu’un jour ce genre de concert aurait sa place dans la capitale. Ils ont eu raison d’y croire et les voilà récompensés par un public pleinement satisfait.

Setlists:

My Sleeping Karma
Pachyclada
23 Enigma
Ephedra
Glow 11
Ahimsa
Tamas
Psylocybe

Colour Haze
She Said
Moon
Lights
Aquamaria
Nouveau titre.
Transformation
Slowdown
Love
Tempel
———-
Peace, Brothers & Sisters!

Shinkibo

Toner Low, Revok, Throw Me In The Crater, 11 septembre 2013, Stoned Gatherings, Glazart, Paris, France

Le Glazart n’affiche pas complet en cet agréable début de soirée parisienne. Le grand public aura manifestement craint de déflorer ses conduits auditifs, tant il apparaît évident à la lecture de l’affiche de ce soir que ces derniers seront fortement sollicités…

Première illustration avec les hollandais de Throw Me In The Crater qui montent sur les planches pile à l’heure devant les premières dizaines de rockers déjà arrivés. Mon Dieu que c’est sale ! Le groupe débite ses riffs lents et crades larvés des beuglements déchirants de son grand (par la taille au moins) vocaliste. Le jeu de scène est minimaliste, les zicos étant concentrés sur leur taf, et le chanteur headbanguant penaudement dans son coin lorsqu’il ne part pas dans des vomissages de tripes les yeux fermés. Ces dernières années, le sludge est devenu un genre largement pratiqué / usé / abusé par tous types de groupes, mélangé à différents types de sons… Ca aboutit à des trucs-bidules-core sludgy selon les groupes. Malheureusement, difficile dans ce maelstrom de groupes et de sous-genres de tirer son épingle du jeu, car faire original devient difficile. Throw Me In The Crater se heurte un peu à cet écueil, qu’il tente néanmoins de contourner par l’efficacité de ses riffs qui parviennent à faire hocher pas mal de têtes dans un public intéressé mais pas complètement conquis. Bonne démonstration néanmoins.

Les parisiens de Revok prennent la suite sur la scène encore chaude, et finalement la transition se fait sans peine : même si la veine musicale est plus rock, le groupe s’adresse à un public pas si éloigné que ses prédécesseurs ce soir. Le combo évolue dans un genre plus connoté hardcore avec influences Neurosis et Dillinger Escape Plan, avec des riffs cinglants ponctués de breaks acérés et de plages sonores aériennes. Une musique encore une fois pas révolutionnaire, mais bien exécutée, et dont l’efficacité n’est plus à prouver. On se laisse pas mal emporter par les passages atmosphériques lancinants, pour mieux se faire faucher en plein air par les hurlements du chanteur, frontman incontesté d’un quintette par ailleurs un peu statique.

Enfin, Toner Low installe tranquillement son matos, cale sa lampe à lave sur la grosse caisse de Jack, et entame son set dans un ronflement de basse, alors qu’on le croyait encore en plein soundcheck. Les lumières se tamisent (beaucoup !) pour laisser place à un spot verdâtre fixe, et le vidéo projecteur commence à diffuser pendant plus d’une heure de set des feuilles de cannabis en mouvement perpétuel. L’ambiance est dressée et le ton est donné : la soirée sera psyché ou ne sera pas. Le premier riff émerge rapidement du maelstrom sonore et débloque les premières nuques dans le public, qui ne s’arrêteront plus jusqu’à la fin du set. Le doom psyche des hollandais s’installe alors très vite auprès d’un public particulièrement réceptif. Faut dire que Toner Low a roulé sa bosse et son expérience scénique fait son effet : le groupe installe d’abord visuellement une atmosphère propice à la concentration et “l’évasion” du public, grâce à un light show statique et hypnotique, un jeu de scène tout en neutralité (l’introspection est de rigueur) et débite les riffs lancinants non stop pendant une grosse heure. La musique du groupe ne rentre néanmoins pas dans le carcan de la monotonie, et n’a pas la lenteur comme unique registre. Les envolées sont donc nombreuses, les montées en tension régulières et les rythmiques enlevées ne manquent pas. Le public ne s’y trompe d’ailleurs pas, porté par les salves rythmiques et happé par les lignes de basse ronflantes de la belle Miranda et ses immenses dreadlocks ondulant au rythme des basses fréquences… Daan mène le débat à coups de médiators, s’approchant occasionnellement du pied de micro pour émettre quelques râles lointains noyés d’effets, et secoué ponctuellement de spasmes et autres fulgurances guitaristiques, maintenant sous tension un public ravi d’être ainsi immergé dans cette expérience commune. Au bout d’une heure et quelques, le set touche à sa fin (cinq ou six titres ont été joués à ce stade, de mémoire), et le groupe, un peu maladroitement, ne sait pas trop s’il doit quitter la scène ou pas pour un rappel finalement un peu téléphoné mais néanmoins attendu et apprécié. Mieux, passé ce titre, alors que les membres du groupe plient les gaules, Daan, appréciatif des sincères signes de reconnaissance du public, décide de proposer un “vrai” rappel, complètement imprévu (prenant par surprise Miranda, qui, elle, avait déjà quitté la scène). Un geste généreux, apprécié du public, connaisseur.

Une fort bonne soirée, dont on regrettera seulement qu’elle ne fut pas partagée par un public plus nombreux.

Laurent

Mondo Generator, Valient Thorr, Steak, 8 août 2013, Underworld, Londres, UK

Petit voyage à Londres pour les vacances et en tête cette envie d’y faire au moins un concert. J’arrive le 8 et il y a justement le soir même une affiche très intéressante à l’Underworld. Jugez plutôt, Valient Thorr et Mondo Generator, le tout précédé par Steak. 
C’est donc après quelques heures de trajet, la visite complète du British Museum et des pieds complètement explosés que je me retrouve dans la salle juste pour le début de la prestation des Londoniens. 
Il arrive fréquemment pour un concert qu’on ait le droit en premier au « local band » traditionnel et c’est le cas ici avec Steak, le quatuor londonien. Sauf que bien souvent, personne ou presque ne connait ce local band, encore moins ceux qui viennent de loin. Mais le petit monde du stoner et ses forums sympathiques vous permettent de découvrir des tas de groupes excellents, y compris des groupes locaux et c’est en connaisseur que j’attends la prestation de Steak. La salle est loin d’être remplie lorsque le groupe vient nous chauffer les oreilles. Elle le sera un peu plus par la suite mais nous sommes bien loin du sold out. 
A l’image de ce que produit le groupe sur disque, j’ai été totalement convaincu par leur prestation scénique. Et ce n’est pas un petit souci d’ampli de guitare vers la fin du set qui viendra ternir mon opinion. Le groupe défend avec conviction ses compos et la prestation est solide. J’irai même jusqu’à dire qu’un titre comme Black Milk rend mieux en concert avec son tempo un poil plus rapide. Et pour ajouter au plaisir, de là où j’étais placé, le batteur est un régal à regarder avec un jeu vivant et enthousiaste, un très bon batteur dans l’esprit de cette musique qu’on aime tant. Excellente prestation d’un groupe qui mérite d’être découvert sur disque ou en live si ce n’est déjà fait. 
Après la petite pause réglementaire, voici les barbus de Valient Thorr qui débarquent. Ce genre de groupe que je n’apprécie pas plus que ça sur disque mais qui à chaque fois, vous assure d’une prestation mémorable tant leur énergie scénique est palpable. Et une fois de plus, ces excités pur jus nous balancent un show complet, ne s’économisent pas et vous en filent pour votre argent. Alors déjà, rien que la musique d’intro, Also sprach Zarathustra de Richard Strauss vous met dans le bain… ces mecs sont dingues et ils y vont à fond. 
Les associations d’idées sont parfois assez bizarres et laissez moi vous partager la mienne… Certains associeront cette intro au film de Kubrick 2001, odyssée de l’espace… sauf que moi j’avais carrément l’impression que j’allais voir débarquer sur scène Elvis Presley comme dans les années 70 et que les premières mesures de See See Rider allaient retenir ! 
La comparaison n’est finalement pas si anodine lorsqu’on voit que le front man du groupe ne s’économise pas un instant et se retrouve en sueur au bout de quelques secondes de show ! 
La scène est petite, les trois guitaristes ne peuvent pas bouger comme ils le veulent mais ne sont pas en reste quand même. Mais le chanteur lui n’en a que faire du peu d’espace. Donnez-lui un mètre carré et il arrivera à vous faire un show mémorable sans sourciller. Il nous aura donc tout fait ce loustic, jusqu’au traditionnel passage dans le public pour faire s’accroupir tout le monde. A côté de cela, le groupe enchaîne avec tout son attirail de rock indéfinissable, impossible à classer et fichtrement efficace. La performance est une fois de plus solide, bougrement divertissante et le public félicite en fin de set comme il se doit ce groupe qu’il faut avoir vu sur scène au moins une fois dans sa vie.
Et c’est après cette superbe prestation que notre tête d’affiche du soir s’apprête à entrer sur scène. Alors que Vista Chino est en pleine tournée européenne, Nick Oliveri est lui aussi en Europe mais pour une tournée avec son propre groupe, Mondo Generator. C’est à n’y plus rien comprendre mais en même temps, je crois qu’il y a bien longtemps que tout le monde a abandonné l’idée de piger les tenants et aboutissants de comment ce mec peut gérer sa carrière. Autant pour Steak, je découvrais en live et ne savais pas encore à quoi m’attendre, pour Valient Thorr j’étais certain d’en prendre plein la figure, autant pour Mondo Generator j’étais un peu perplexe et vraiment très attentif aux premières notes qui donneraient le ton du reste du set. Il faut dire que la dernière fois que j’ai vu Mondo Generator en concert, la prestation ne m’avait pas vraiment emballé, la faute à un groupe complètement à côté, devant simplifier les riffs, les compos, jouant sur un tempo plus lent, bref, c’était poussif. 
Et je n’en suis que plus heureux d’avoir pris une bonne grosse claque de derrière les fagots avec un concert énergique au possible et très divertissant par moment (le mec nu sur scène et la femme voulant absolument faire de même n’y sont pas pour rien). 
Côté setlist, on ne se le cache pas, Mondo Generator nous sert la même chose depuis des années et le dernier album n’est que peu, mais très bien, représenté. A côté de cela, on retrouve comme toujours du Qotsa, du Kyuss, le petit Wake Up Screaming de The Subhumans mais après tout, c’est pour cela qu’on l’aime bien ce groupe. Et la prestation est hyper convaincante. Tous les reproches que j’avais pu faire la dernière fois que je les ai vus sont ici balayés et de la meilleure des manières. Si on peut juger la prestation d’un groupe par la réaction du public alors je dirais que nous avons eu là un concert punk rock de haute volée et que certains ont du avoir un bon mal de dos le lendemain. 
Nick est en super forme, crie comme toujours, joue avec conviction et ça fait du bien de voir ça. Le guitariste leader est excellent ! Et ça, c’est quand même une sacrée bonne nouvelle ! Il n’hésite pas à se montrer et ne reste pas en retrait d’un Nick pourtant omniprésent. Un show là encore hyper énergique et un vrai plaisir de voir Nick Oliveri au top de sa forme. 
Je finis donc mon premier jour à Londres totalement épuisé mais ça en valait la peine, j’ai passé une excellente soirée et vu trois très bons concerts! 

Un grand merci à Matt Kotsa pour son aide et son acceuil.

Shinkibo

Valient Thorr, 5 août 2013, Volcom Ramprock, Anglet, France

Dans un contexte très similaire, et à l’initiative des mêmes gars très cools, on avait assisté il y a quelques années à un concert de Karma To Burn avec les musiciens suspendus sur une plateforme en bois de 2 m² au bord d’une rampe de skate. L’événement de ce soir transpire le même feeling : concert gratuit, bières gratuites, des rampes de skate à gogo (le concert se déroule dans les bureaux mêmes de Volcom, qui disposent au rez de chaussée d’un énorme hangar dédié aux skaters), une pub minimale (via facebook et le bouche à oreilles “local”)… Coefficient coolitude au top !

En arrivant sur place, confirmation : à quelques encablures de la plage, le soleil cogne encore, l’endroit est rempli de skaters, tout le monde est relax… Les musiciens du groupe viennent taper la discute, on voit même le bassiste Nitewolf s’essayer à la grande rampe de skate avant le concert ! La configuration de la scène, en revanche, fait un peu peur : une mini estrade de vingt centimètres de haut, une mini-table de mixage rudimentaire (reliée aux micros par un câble suspendu au plafond !), quatre ampoules de couleur posées sur un pied en fond de scène en guise de lightshow, deux enceintes sur pieds en plus des amplis… Roots ! Vers 22h, le groupe monte sur scène sur le modeste “Ainsi parlait Zarathoustra” de Strauss et entame avec un virulent “Heatseeker”, un titre assez ancien au coefficient percussif non négligeable. La suite sera à l’avenant : le rapide “Infinite lives”, le classique “Goveruptcy”. Puis le groupe nous délivre les premiers titres issus de son dernier opus, à commencer par le martial “Master Collider”.


Scéniquement, le spectacle offert par le quintette est toujours aussi spécial : déjà, ils se la donnent devant ces quelques dizaines de spectateurs comme si les bonhommes étaient en tête d’affiche devant 100 000 personnes. Chaque solo est arraché comme si leur vie en dépendait, chaque ligne vocale est éructée avec rage, chaque frappe de caisse claire est violemment asséné… Evidemment, même si les chœurs constituent une composante importante de la musique de VT, c’est Valient Himself au chant qui mène la barque : le charisme inéluctable du chanteur perturbe d’abord, son physique approximatif (cheveux longs, calvitie naissante, bide velu protubérant, chaussures de catcheurs sur jean moulant…) n’évoquant pas forcément le bellâtre de base. Ses vocaux en revanche sont inattaquables : dans un registre puissant, il donne l’impression de hurler tout le temps, mais n’est jamais mal à l’aise dès que des passages plus mélodiques sont nécessaires (il nous fera même penser à feu-Bon Scott sur certains passages). Au-delà de sa performance vocale, il faut le voir courir dans tous les sens, haranguer les gars du premier rang, faire asseoir tout le public pour le rejoindre et le faire “pomper”… la communication avec le public est continue. Par ailleurs, il sait aussi rendre à César ce qui est à César, et par la même rendre hommage au Dieu guitare : il faut le voir s’agenouiller et se prosterner devant ses gratteux dès lors qu’ils crachent un solo stellaire comme ils en ont le secret. Car il serait temps de leur rendre honneur : la paire de gratteux de Valient Thorr est énorme, aussi à l’aise sur les rythmiques que sur les innombrables soli, impeccablement exécutés. Une belle paire de shredders, portée de mains de maîtres par un Nitewolf toujours dans le registre de la force brute derrière sa basse.

Niveau set list, on a droit à plus d’une douzaine de morceaux (plus d’une heure de set), issus de toute la carrière du groupe. Les moments forts seront bien sûr le terrible “Double crossed”, ou encore les mélodiques “Torn apart” et “No strings attached” issus du dernier album. Quand le groupe termine son set par le furieux “Sleeper awakes” et son refrain-hymne, enquillé du classique “Tough customer”, tout le monde a le sourire et voit le groupe quitter la scène un peu triste, mais rassasié. C’est mal compter sur nos gaillards : Valient Himself remonte seul sur scène, vite rejoint par ses collègues pour exécuter (c’est le cas de le dire) un “Mask of sanity” définitif, qui aurait manqué à cette set list par ailleurs impeccable. On notera à cette occasion l’attitude remarquable des américains, qui, face à un public plutôt peu nombreux (plusieurs dizaines de spectateurs, une centaine peut-être, skaters compris…), n’hésite pas à remonter sur scène pour jouer un titre initialement non prévu, pour faire plaisir à un public conquis, à peine musicalement défloré.

Bref, une fort bonne soirée, comme on aimerait en voir plus : une sorte de démarche désintéressée, ouverte, une expérience à part… Merci Volcom pour organiser ça !

Laurent

STONED FROM THE UNDERGROUND 2013, 11 au 13 juillet, Erfurt, Allemagne

Réunion de famille

Après un trajet désormais bien connu et un campement dont on pouvait être fier (on s’améliore chaque année), l’impatience de rentrer dans l’enceinte du festival se faisait sentir. Beau temps prévu sur l’ensemble du weekend, très bon programme sur scène, quelques nouveautés… 
A commencer par des horaires moins tardifs. En effet, une poignée de bungalows bordent dorénavant la rive opposée du lac, et de nouvelles réglementations ont été imposées à l’orga à la toute dernière minute. Il est désormais interdit de jouer sur la grande scène passé minuit, et si j’ai bien compris, ceci est déjà une exception, puisque l’horaire normal dans ce genre de cas serait de 22h, comme partout en Allemagne. On ne sait pas à l’heure actuelle si la règle des 22h devra être appliquée à la lettre l’année prochaine, et par conséquent, si le festival se déroulera toujours sur ce bout de terre qu’on affectionne tous énormément… On redoutait donc tous beaucoup que la présence d’une zone résidentielle de l’autre côté du lac ne vienne troubler la fête, mais il n’en fut rien. 

JOUR 1 

Le premier jour de concerts débute par une petite mise en bouche correcte servie par ISOPTERA, très peu de monde devant la scène mais une ambiance très bon enfant se dégage déjà. 

MIRROR QUEEN débarque et envoie une bonne petite dose de rock’n’roll qui rameutera le plus gros des troupes, pour enfin passer au premières têtes d’affiche qui taperont fort ce soir. Mirror Queen accompagne donc The Atomic Bitchwax et Earthless en tournée, rien que ca, mais ce serait oublier Pelican qui se greffera à la soirée et donnera une affiche béton à la première soirée. Tellement béton qu’elle sera exceptionnellement payante, le jeudi soir étant traditionnellement gratuit ! 

Si mes souvenirs sont bons, The Atomic Bitchwax avaient un certain retard et PELICAN ont dû jouer à leur place. Ils étaient apparemment prêts à envoyer du gros en toute circonstance, les assauts du groupe instrumental de Chicago ont résonné dans pas mal de nuques le lendemain matin. 

EARTHLESS a cédé sa place de tête d’affiche pour jouer juste après. Je dois dire que j’aurais préféré les voir dans une petite salle, mais leur son était tout simplement divin sur un système pareil. Mario Rubalcaba remporte d’ores et déjà le titre de meilleur batteur du fest, son jeu est hypnotique, mais TAB arrivent et se préparent… 

THE ATOMIC BITCHWAX ferment donc les hostilités avec un set bien mixé, oldies comme choses plus récentes, la traditionnelle reprise « Kiss the Sun », l’hymne « Hope you Die » chanté à l’unisson par un public révolté mais aucun passage de The Local Fuzz, assez compliqué à placer dans un set d’une heure. Changer l’ordre de passage de la soirée n’aura été que bénéfique, cela aura été une superbe soirée qui se termine sur un set furieux. Mais il est minuit, et personne ne veut aller se coucher. La tente merchandising accueille donc une disco rock/métal jusqu’à environ deux heures du mat, tout le monde boit un bon coup, danse sur Pentagram, achète son t-shirt préféré, fait coucou aux mecs d’ElvisDead qu’on revoit toujours avec plaisir (le poster du fest est magnifique d’ailleurs, achetez-le !)… 

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JOUR 2 

La journée suivante commence tôt planning oblige, TREKKER ouvre sur du bon stoner de base tandis que OPERATORS mettra une sacrée ambiance sur scène, une grosse surprise ressemblant à un distributeur de vodka ambulant innarrêtable… (la vodka dispensée dans une bouteille en forme de mitrailleuse Thompson, pour être précis). 

Les danois de PET THE PREACHER prennent la scène par la suite, au plus grand plaisir de la gent féminine qui n’hésitera pas à manifester leur sex drive quand le chanteur tatoué se montrera… Heureusement, le groupe produit aussi un bon show, des compos de qualité, c’est plus mon genre… 

HORISONT enchaîne et on se dit que ce samedi est désormais tout aussi béton que la veille, le hard rock old school des suédois souvent cités aux cotés de Graveyard comme groupe à découvrir fera mouche pour pas mal d’entre nous, bien que probablement surfant sur la vague rétro toutes voiles dehors. 

Autre surprise, le duo belge SARDONIS, guitare + batterie, un instrumental sludge qui puise dans toutes les bonnes influences de Weedeater à Mastodon, un jeu de batterie impressionnant et pas mal de présence scénique au final pour deux mecs relativement inconnus au bataillon. 

TROUBLED HORSE ne restera pas dans les annales faute à un chanteur plutôt médiocre, il faut l’avouer. On aura espéré tout du long qu’il pourrait blâmer une absence de retour, ou quoi que ce soit d’autre, pour justifier une perf pareille. 

Inutile de présenter TRUCKFIGHTERS sur ce site, désormais connus de par le globe et décrété meilleur groupe du monde par Josh Homme himself, le power trio se pointe sur la scène avec la grosse banane et un public déjà en transe. Que dire, autre que cette première tête d’affiche du vendredi est passée comme une lettre à la poste, bien trop vite et dans une bonne humeur imbattable. Les fans se comptaient par centaines et le groupe le leur a bien rendu. Un sans-faute. 

Truckfighters a néanmoins beau avoir un statut tout acquis dans ce genre de festival, ce sont de véritables légendes du style qui vont fouler la scène de cette édition 2013 quelques 20 minutes plus tard. En effet, ACID KING est de passage en europe et, avec seulement trois albums depuis le début des années 90, restent une des plus grosses références du genre. Du haut de son 1m50, Lori en impose par son son et ses riffs, nuancés par son chant planant bourré de reverbe. Les headbangs étaient lancés pour ne s’arrêter qu’une heure plus tard. On pourra regretter que le son aurait pu être plus fort, plus imposant, mais ceux qui au premier abord n’étaient pas convaincus sont repartis adeptes et ceux comme moi qui mourraient d’envie d’enfin voir ce groupe en chair et en os repartiront avec un souvenir impérissable et une grosse envie de plus. 

Pour finir la soirée, le groupe MUSTASCH (des suédois, encore) produit un métal limite indus, limite comique, mais bien efficace, pour nous remettre la banane après un changement de rythme drastique. La disco reprend du service, les cris et les rires se font de plus en plus entendre et on se dit à demain. 

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JOUR 3 

Dernier jour, temps toujours au beau fixe, on prend des couleurs, des coups de soleil, en fonction du degré de préparation (coups de soleil pour ma part, j’ai un peu déconné)… On commence avec un concert improvisé dans le camping, le groupe MOTHER ENGINE a sorti les amplis et le kit sur les coups de midi pour attirer une petite centaine de personnes sous le soleil, façon generators party. Vraiment génial ! [lien vers vidéo youtube du set] Un sacré coup de pub pour un groupe qui devrait ouvrir l’année prochaine si tout se passe bien… 

Ensuite, direct à 14h avec un groupe bien sympa du nom deHYNE, pas mal d’amis dans le public, et une distribution généreuse d’EP en fin de concert. Cool. On remarquera ça tout au long de la journée d’ailleurs, tout le monde est trèèès cool, relax, les festivaliers ont adopté un rythme où il ne fallait pas trop leur en demander, mais les sourires béats se remarquent un peu partout. 

Un groupe un peu « what the fuck » va quand même un peu troubler tout ça. Les allemands de HERCULES PROPAGANDA débarquent sur scène avec tout l’attirail british heavy metal, cuir moustache, talons compensés de la gay pride et le chant de Rob Halford qui va avec, autant dire que ça déteint pas mal par rapport au style des groupes qui se sont pointé pour le moment. Rien à dire sur le concert, la musique étant à l’image du groupe, c’était n’importe quoi, mais ça en a fait délirer plus d’un, c’est l’important. 

BLACK BOMBAIM amenaient leur jam psyché du Portugal, en shorts s’il vous plait. Il était assez difficile de passer dans ce registre après Earthless, mais je pense qu’ils s’en sont bien sortis et avaient déjà un certain nombre d’aficionados dans le public. 

Les autrichiens de BEEN OBSCENE auront probablement été la grosse révélation mélodique du festival. Des compos de très bonne qualité, une sorte de QOTSA tyrolien sans complexe et à l’aise en live, on a passé un très bon moment devant ce groupe qu’aucun d’entre nous n’avait entendu auparavant. 

LORD VICAR nous a fait sourire… parfois grincer des dents… mais le père Vicar avait une pêche assez communicative, il faut l’avouer. M’enfin tout ça n’était vraiment pas bien en place, et le groupe le savait bien (« Welcome to rehearsal !»). Bref, suivant !

Le suivant n’était autre que FIVE HORSE JOHNSON, plutôt rares en Europe et attendus mais aussi méconnus par beaucoup, moi y compris. Le fait est que ce groupe était peut-être le plus imposant sur scène, un chanteur ultra charismatique avec une très bonne voix, des musiciens impeccables, un groove et un son d’enfer. Les compos blues crasseuses parsemées d’harmonica collaient parfaitement et on se prend à danser très facilement sur les compos du dernier album qu’ils ne manqueront pas de promouvoir. 

Pour finir en beauté, LOWRIDER jouaient là leur troisième concert depuis leur reformation à l’occasion des Desertfest (Berlin et Londres, en avril). Le concert de Berlin auquel j’ai eu la chance d’assister était un moment très fort du festival, cette fois-ci rien n’a changé. Du gros son, des riffs lourds, de l’énergie, il était temps que ces mecs reprennent la scène, c’était vraiment génial. On ne pouvait pas clore le festival de meilleure manière. Quoique, sous la tente merch, avec des bières et du son… 

Le lendemain matin fut assez difficile, mais le camping était au ralenti, les petits déjeuners fleurissaient un peu partout, les tentes se pliaient doucement, les potes se disaient au revoir, les vans VW partaient sous le soleil de midi et dans la poussière, on se régalait à écouter les dernières phrases avec l’accent de Thuringe. On a vraiment l’impression de quitter une famille et de leur dire d’office à l’année prochaine. Allez, à l’année prochaine, pour la sixième année consécutive. 

Textes et photos : Mathieu Springinsfeld

HELLFEST 2013 – Jour 3, The Sword, Graveyard, My Sleeping Karma, Down, 23 juin 2013, Clisson, France

Ce matin on n’est pas là pour la déconne : finies les grasses mat’ et les nuits de plus de cinq heures de sommeil ! Ce matin on sait qu’on va se faire poutrer les cages à miel à l’aube, et on arrive donc sur le site au plus tôt, sous une très fine pluie qui durera jusqu’au début de l’après-midi, avant un soleil radieux. Finalement on arrive presque trop tôt, on passe donc rendre visite à la Altar qui accueille les ensanglantés espagnols de Haemorrhage. Rigolos. Mais les choses sérieuses se mettent en branle du côté de la Valley, on presse donc le pas…


Quand on est programmateurs en festival, on a deux possibilités, confrontés à TRUCKFIGHTERS : se baser sur sa renommée factuelle (un groupe scandinave aux ventes de disque confidentielles qui n’a que rarement atteint nos frontières ces dernières années) et donc placer le groupe très bas sur l’affiche (et donc très tôt) ou bien se baser sur la réputation scénique du trio, imaginer un gros carton, et viser une place dans le haut de l’affiche. L’option 1 était l’erreur du jour, et il a suffi des premières mesures de “Desert Cruiser”, l’intro incontournable du groupe, et le premier saut de cabri de Dango pour le faire comprendre aux heureux présents pour ce moment d’exception. Tandis que la tente est composée pour un tiers de puristes aficionados, un tiers de curieux et un tiers de gars pas encore bien réveillés, les premiers riffs massifs de ce set ont tôt fait de faire ouvrir les yeux bien grands à plusieurs centaines de spectateurs qui goûtent chaque instant de ce déluge de fuzz et d’énergie. En enchaînant sur “Traffic”, le groupe affiche sa polyvalence, c’est cool et couillu sur un set de trente minutes. Même si ce titre recèle quelques subtilités de compos catchy mais atypiques, il passe comme une lettre à la poste devant un public qui n’en peut plus de voir nos deux loustics sauter et courir en tous sens tandis que le vaillant Poncho explose ses fûts méthodiquement. Même type de morceau avec “Monte Gargano”, un morceau bien branlé mais au refrain catchy en diable. Encore une fois, succès. En réalité, au vu de l’énergie déployée sous nos yeux, je pense que même si les gars se lançaient dans une reprise de Hughes Aufray ils déboîteraient tout quand même. Alors quand en plus les chansons sont bonnes, les planètes sont alignées et Ragnarök débarque sur scène. Le groupe termine sur “In search of (the)”, déluge fuzzé s’il en est, en sueur, devant un parterre de langues pendues et de sourires béats. Le set se clôture avec Ozo qui vient au premier rang pour faire passer sa basse dans le public pour un final bruitiste fun. Notons au passage que les trois loustics avaient perdu une part de leur équipement dans l’avion, et ont donc bidouillé à l’arrache avec leurs collègues musiciens de la Valley pour se faire prêter pédales d’effets, jacks, etc… On n’y a vu que du feu !


On est un peu rassasié de décibels, là, et il est à peine midi, on décide donc de rester sous la Valley, rendue électrique, pour être sûr de ne pas rater la suite des événements… Car à peine plus de trente minutes plus tard, c’est au tour de MY SLEEPING KARMA de prendre la scène. Ils étaient passés en 2011 au Hellfest et avaient joué en fin de matinée. Deux ans plus tard ils jouent… un peu après midi… Dans une ou deux décennies ils passeront en fin d’après-midi ! Là encore, le choix de programmation est étonnant quand on observe ce qui se passe sous la Valley. Comme à son habitude, le groupe allemand entame les hostilités assez modestement, aujourd’hui avec un “Ahimsa” bien senti, qui comporte toutes les composantes du groupe : un riff accrocheur, une basse ronde, des nappes de synthé “spacy”, une montée en puissance efficace… Pas de surprise non plus avec la suite “23 Enigma”, qui montre un revers plus “fluctuant” de la musique du groupe, avec des envolées puissantes qui ont tôt fait de conquérir un public qui n’attendait sans doute pas une telle énergie positive. Parce que oui, ce qui se passe en ce moment sous la Valley est stupéfiant : on sent une sorte d’osmose entre le public d’un côté (littéralement sous le charme de la musique et de l’attitude du groupe) et le groupe de l’autre côté, sur scène, qui sourit, salue copieusement le public, le remercie, le félicite… Il est rare de sentir de manière aussi tangible une telle émotion dans un concert, je ne pense pas exagérer. L’entente au sein du groupe est, elle aussi, impeccable, à l’image de ces échanges instrumentaux entre Seppi (guitare) et Matte (basse), animés par la frappe de Steffen. Lorsque pour conclure son set le quintette engage l’un des extraits les plus efficaces de son dernier album “Soma”, en l’occurrence l’épique et audacieux “Psilocybe”, l’apothéose est atteinte, une connexion étroite entre plusieurs milliers de personnes et un groupe de musique, sans aucune autre communication que les ondes transmises par les instruments (pour rappel, MSK est un groupe complètement instrumental). Très très fort.

Encore un peu dans les nuages, je décide d’aller me frotter à “la vraie vie” (et accessoirement à la lumière du jour) pour aller voir ce qu’est devenu MUSTASCH, ce combo de gros bourrins suédois dont j’avais pu apprécier les premières productions vinyliques il y a une grosse décennie. Je ne sais pas si je dois attribuer ce ressenti au violent contraste avec le concert précédent, mais j’avoue avoir eu du mal à capter la moindre émotion en voyant ces quatre musiciens posés là, sur une scène immense, plantés à dix mètres les uns des autres, et surtout à quinze mètres du public. Ralf Gyllenhammar doit le ressentir de manière criante, puisqu’il décide de descendre sur la plateforme, puis de traverser la fosse pour aller à la rencontre de son public (et boire une gorgée de bière au passage). Au delà de l’anecdote éloquente, la musique n’accroche pas trop non plus : les compos du groupe sont péchues (plus vraiment le gros stoner metal graisseux qu’on a pu connaître), mais un peu répétitives. Devant cette faillite émotionnelle globale, je décide de rejoindre la Valley au plus tôt pour retrouver cette ambiance de “cocon” musical…


Surtout que les très hype GRAVEYARD sont attendus au tournant. Auréolés d’un dernier album au succès remarquable mais relativement mou du genou, on attendait de voir ce que le groupe avait vraiment dans le bifteck. En commençant leur set par “An industry of murder” issu donc du fameux “Light Out”, on est plutôt satisfait : l’un des titres les plus efficaces du disque, ça laisse présager du meilleur. En enchaînant avec l’éponyme extrait de “Hisingen Blues”, puis par “Seven Seven”, le groupe démarre bien. Mais le virage est pris avec la très belle mais aussi très soporifique “Slow Motion Countdown”, qui n’emballe pas vraiment un public qui n’est pas venu pour ça. Le groupe, intègre, continue sa set list “de base” sans trop se préoccuper de son audience. Pour un public de festival (de festival à connotation metal, qui plus est), cette posture audacieuse (et un chouilla prétentieuse voire mégalo sur les bords) peut décontenancer. Et ce qui devait arriver arriva : bâillements, intérêt poli, hochements de têtes modérés dans le public… Quand en plus les quatre zicos sous nos yeux restent plantés comme des piquets de tomates sans esquisser le moindre sourire, sûrs d’eux, on se dit que les suédois l’ont sans doute jouée “gagné d’avance”. Peut-être sont-ils parvenus au résultat qu’ils visaient, mais moi je me suis un peu emmerdé.


Après un petit passage sur la main stage pour voir un bout de set bien efficace de Danko Jones, je re-gagne la Valley pour accueillir comme il se doit les vieilles gloires suédoises SPIRITUAL BEGGARS. Soyons honnêtes, j’étais un peu circonspect, voire dubitatif quant à leur présence sur cette affiche. En commençant son set par “Left Brain Ambassadors”, le groupe a su me caresser dans le sens du poil, même si côté interprétation, tous les feux n’étaient pas au vert. Puis s’enchaînent des titres de toutes les époques (disons la dernière décennie quand même, en majorité), dont par exemple un vigoureux “Wonderful world” ou encore un bon “Fools Gold”. L’élaboration de la set list est soignée : piochant dans toutes les séquences de sa carrière, le groupe espère donner à son dernier vocaliste Apollo Papathanasio l’occasion de briller, de montrer qu’il est aussi bon que ses prédécesseurs. Sauf que non, ce n’est pas le cas. Dans un registre metal haut perché, le bonhomme, en alignant une technique de chant sans doute impeccable, manque le coche : il ne comprend pas que l’interprétation de ces vieux morceaux lui fait presque du tort, tant ils sont connotés par les tessitures vocales bien particulières de ses prédécesseurs… Il faut dire que les précédents vocalistes de SB avaient chacun des organes bien particuliers, chaleureux, et ils ont largement marqué leurs compositions de leur trace. Ce nouveau chanteur presque aseptisé, sans relief, détonne trop pour susciter l’intérêt. Même un final particulièrement “old school” (“Euphoria”, mmmmh) ne me tire pas un sourire. Je suis déception.


Je profite du petit break ensuite pour aller écouter quelques titres un peu répétitifs de Newsted, puis pour aller siroter tranquille quelques gouttes de nectar interdit aux mineurs, et me requinquer un peu… Mais pas le temps de faire la sieste, car THE SWORD est attendu sous la Valley, que je regagne au pas de course. Le combo du père Cronise n’a plus à faire ses preuves sur scène : il a toujours copieusement défendu ses (bons) albums en Europe (et ailleurs). Scéniquement, The Sword c’est un peu la force tranquille. Ca débite du riff par pack de douze sans sourciller, mais bon, ça regarde quand même plutôt sa gratte que le public: la communication est réduite à son minimum. J.D. Cronise a beau avoir un peu une bille de clown avec sa coupe de cheveux improbable, sa moustache et ses pattes d’eph’, il se comporte en pur frontman : il envoie les leads de gratte avec générosité et ses vocaux sont impeccables. Musicalement, le doom du groupe, plutôt tendance heavy, a tout ce qui faut pour contenter le public, qui répond en conséquence. En bon connaisseur, le quatuor a pondu une set list variée (pas forcément ancrée uniquement sur la promo de son dernier disque), à commencer par l’efficace “Arrows in the dark”, issu de “Warp Riders”.Chaque titre est impeccablement servi, et les amateurs de The Sword sur disque y retrouvent leur compte. Faut dire que les compos se suffisent presque à elles mêmes. On notera particulièrement un dernier tiers de concert remarquable, avec le très instrumental et très épique “To Take The Black”, l’efficace “Tres Brujas” et bien sûr l’incontournable “Freya” et son riff bourre-crâne impeccablement porté par les assauts de batterie de Jimmy Vela, arrivé depuis deux ans au poste de batteur. Le groupe y glisse un bout du “Cheap sunglasses” de ZZ Top, en hommage à ces légendes natives elles aussi du Texas, avant de cloturer leur set sur le titre éponyme de leur dernier album, “Apocryphon”, et son intro “Bontempi” du plus profond ridicule, vite contrebalancé par le reste du morceau, excellent. Bref, pas grand-chose à redire, The Sword est au niveau attendu, et le public, qui slamme beaucoup, en redemande. Par contre, tout ça manque un peu de surprise, de variété aussi, et d’un comportement scénique un peu plus “fougueux”, sachant que la musique du groupe y est propice. Un bon concert, mais pas plus.


On décide de ne pas quitter la Valley après le set, car le concert à venir s’annonce important et suscite un intérêt presque électrique, rapidement confirmé par les hordes de curieux qui, malgré un soleil éclatant, viennent se caler au plus près de la scène sous la tente. Petit rappel : 48h plus tôt, Clutch a annoncé l’annulation de tout le reste de sa tournée européenne du fait d’un événement intervenu dans leur famille proche, les obligeant à rentrer chez eux en urgence. L’orga du Hellfest a trouvé une parade assez excitante sur le papier : DOWN, en day off ce jour-là, était OK pour rester un jour de plus à Clisson, pour proposer un set “spécial”. Du coup, les rumeurs ont couru – la plus stupide (et la plus persistante malheureusement) étant que l’on aurait droit à un set de reprises de Pantera. Bref, le moment venu, le groupe monte sur scène en vrac, “à la Down” : on voit des mecs partout, avec ou sans instruments, ça sourit, c’est relax… D’ailleurs, le set commence cinq minutes plus tôt. On va pas se plaindre, hein ! Ca commence par deux titres de Down assez peu joués il est vrai, “Rehab” suivi de “Swan Song”. Bien. On est contents mais bon, on a vu Down hier, quoi… Les choses prennent un peu plus de piquant quand le groupe s’embarque sur deux reprises de Eyehategod, deux de leurs classiques, en l’occurrence “Sisterfucker (Part I)” et son riff simplissimement efficace, et “Blank”. Ca devient limite incestueux quand, après avoir ainsi mis en avant “l’autre groupe” du père Bower, on passe à une paire de titres de celui de son pote Kirk Windstein : Crowbar. Mais bon, ce ne sont toujours pas des raretés, puisque le collectif (on a du mal à appeler cette entité polymorphe un “groupe”) a choisi de reprendre “High Rate Extinction” et “Conquering”, deux classiques du groupe. Toujours dans la même veine, c’est maintenant le groupe de cœur de Pepper Keenan, Corrosion Of Conformity, qui récolte deux cartouches dans la set list : deux titres issus du sublime “Deliverance” (vieux de presque vingt ans, soit dit en passant) : “Clean My Wounds” et “Albatross”, portés par un Pepper Keenan (vocaux + guitare) de haut niveau. A noter que Jason Newsted, qui traîne sur le bord de la scène comme 125 autres personnes (inédit en 3 jours : l’orga a mis en place une barrière sur le bord de la scène, tant les VIP se pressaient au bord !) monte sur scène sur “Clean…” pour quelques secondes bordéliques et inutiles (le temps de prendre une basse, de jouer quelques notes inaudibles en tête à tête avec la batterie, et de reposer la basse). Quel foutoir ! Je ne l’ai même pas mentionné, mais sur plusieurs titres un barbu que je ne connais pas a joué de la gratte un bon moment (il a été cité par Anselmo, mais je n’ai pas capté son nom), l’épouse du susmentionné Anselmo quelques vocaux sur les deux reprises de Eyheategod pendant que lui-même était appliqué à la gratte, et puis Keenan et Anselmo sont sortis de scène pendant les titres de Crowbar… bref, le bordel improvisé de bout en bout ! La dernière reprise, plutôt atmosphérique, m’était inconnue, mais le groupe y inclut un chaotique bout de refrain du “Walk” de Pantera. Soulagement de certains… Et puis le groupe quitte la scène, en faisant scander “Clutch – Clutch – Clutch” par le public. Bon, ils finissent vingt minutes avant l’heure de fin prévue, mais pour un concert improvisé, même si on n’a pas eu quelque chose d’une efficacité remarquable, on a à coup sûr assisté à un concert dont on pourra dire dans quelques années encore “j’y étais”.

Les groupes qui terminaient la soirée du dimanche étant moins palpitants pour les lecteurs de Desert-Rock, nous avons terminé tranquilles. Et à l’heure de faire les bilans, même si sur le papier l’affiche “stoner” semblait plus faible, et si les annulations de dernière minute s’étaient multipliées ces derniers jours, le festival fut excellent, plein d’événements hauts en couleur, de découvertes, de confirmations, et un sacré paquet d’excellents concerts. Je pense qu’on reviendra !

Photos : Laurent

HELLFEST 2013 – Jour 2, Down, Witchcraft, Red Fang, Karma To Burn, 22 juin 2013, Clisson, France

On est un peu trop limites ce matin niveau timing pour pouvoir choper le set des très “hypés” Regarde Les Hommes Tomber… On attendra donc que la nature fasse bien les choses et que la musique du groupe français parvienne à nos oreilles une fois passé le buzz…

On commencera donc cette matinée avec les lorrains de SURTR sous la Valley. Le trio déroule un doom mélodique somme toute assez traditionnel pendant trente minutes devant une tente à peu près à moitié remplie. Le public est un peu passif, voire hagard, et on ne peut pas dire que le groupe, au jeu scénique plutôt apathique, fasse grand-chose pour le réveiller. Adeptes de riffs répétitifs et les rythmiques lancinantes, genre oblige, le groupe ne communique par ailleurs quasiment jamais avec le public : alors qu’ils parlent français, et qu’il s’agit là d’une occasion inestimable de créer un contact privilégié avec plusieurs centaines de personnes d’un coup, ce mutisme paraît un choix pour le moins étrange… Bref, il manquait un sérieux quelque chose pour rendre ce concert mémorable. Dommage, c’était une bonne occase.


Le temps que les techos montent le backline du groupe suivant sous la Valley, on se balade un peu sans conviction sur le site, sans découvrir quoi que ce soit de bien excitant sur les autres scènes. On revient donc assez rapidement pour les doomeux chiliens (modérément) cultes de PROCESSION. Le groupe nous prévient d’ailleurs dès l’intro : “you’re about to get doomed”… Et il n’y a pas mensonge sur la marchandise : dans une veine de doom bien plus métallique et dynamique que leurs prédécesseurs, on est surtout pris par surprise par le dynamisme scénique de ce quatuor qui contraste fort avec ses prédécesseurs : poses de guitar hero, dialogue constant avec le public, présence scénique… Musicalement, on pense à du Candlemass milieu de carrière, ou plus récemment à Grand Magus, par exemple… Pas vraiment du doom tel qu’on se l’imagine, lent et sous-accordé. Doté d’une discographie hétéroclite (deux albums, des EP, splits…), le quatuor pioche un peu partout en favorisant son dernier album (avec notamment l’excellent morceau éponyme “To reap heaven’s apart” ou encore “Conjurer”) mais la longueur de ses titres (huit minutes en moyenne) rend cette set list trop peu diversifiée. Un bon set, d’un groupe à revoir dans un contexte plus approprié (qu’une tente en milieu de journée en plein jour)…


Toujours rien à se mettre sous la dent entre les sets de la Valley, on attend donc sagement de pouvoir voir un peu de quel bois se chauffe vraiment UNCLE ACID AND THE DEADBEATS. Faut dire que la hype ces derniers mois n’a pas faibli autour du groupe, dont le dernier fait d’arme, annoncé quelques semaines avant le Hellfest, est d’avoir raflé la première partie la plus enviée du moment : celle de la prochaine tournée de Black Sabbath. Lorsque les anglais montent sur scène, la tente est donc pleine, signe que l’intérêt et la curiosité du public pour ce groupe au sobriquet rigolo est grande (et signe aussi que la pluie qui rince le site de Clisson incite à la convivialité sous la tente…). Même si les musiciens sont bien dedans, la musique du groupe ne se prête pas non plus aux postures enjouées ou aux sauts de cabris : la musique du quatuor de Cambridge est plutôt lente, d’obédience doom mélodique à forte connotation psyche, servie par des chœurs lancinants parfaitement appropriés. Niveau set list, les fans du dernier album “Mind control” (excellent) sont ravis puisque plus de la moitié du set lui est consacrée ! On notera en particulier les très efficaces “Valley of the dolls” ou encore “Poison apple”, qui confirment la bonne conversion en live de ces compos à la fois classiques et ultra-référencées sur album, mais aussi plutôt atypiques, dont le groupe a le secret. Les titres défilent ainsi sous la coolitude tranquille toute british de ces rejetons de la terriblement perfide Albion, et même si K.R. Starrs, en leader incontesté, attire tous les regards (chant, soli, leads incisives), les deux autres bretteurs font tourner la baraque et assurent leur part de chœurs. Le set se termine par le sublime “Over and over again” (quel riff !) qui met tout le monde d’accord : le succès du groupe n’est pas volé, et ils l’ont prouvé aujourd’hui avec un set de haute volée.


Jusqu’à quelques jours du festival, WITCHCRAFT était toujours incertain : ayant été contraints d’annuler (pour motif de maladie…) une partie de sa tournée européenne ces derniers mois (souvenez-vous, le Desertfest…), les suédois ont laissé planer un doute sournois sur la tenue de cette date, et ce n’est que lorsque l’on les voit enfin fouler les planches de la Valley que l’on est complètement rassurés. Le groupe s’est doté d’un atypique, simpliste mais bienvenu rideau rouge en fond de scène, qui les distingue du coup “graphiquement” des 58 autres groupes qui défilent sur la même scène – bien vu. A noter aussi la présence de leur batteur Oscar Johansson sur le côté droit de la scène, et non pas au fond comme on en a l’habitude. Concernant la set list, le groupe fait confiance de manière assez insolente à son dernier album qui a vu son explosion récente (ou plutôt la confirmation de sa notoriété croissante), “Legend” : il ne m’a semblé compter qu’une seule incartade hors de cet excellent album, via “No Angel or Demon” issu de leur premier opus. Tout le reste a priori était extrait de leur dernière offrande ! Un bon coup de promo, et en tous les cas un choix payant dans l’absolu, puisque leur set fut en tout point excellent. On notera en particulier “It’s not because of you”, larvé de solos multiples jouissifs. Scéniquement déjà, Witchcraft se distingue d’abord par la présence hantée de Magnus Pelander au micro, qui se dodeline maladroitement de manière arythmique, mais qui peut se reposer sur son organe vocal si particulier et charismatique. A ses côtés, ça joue très bien, et à sa droite surtout, le duo Henriksson (basse) et Solomon (guitare) se la donnent à 100%, en particulier ce dernier, qui enchaîne les soli avec une énergie qu’il fait bon prendre en pleine face. Se reposant sur des compos efficaces (et qui apparaissent moins linéaires que sur album) et sur une attitude scénique impeccable, le set de Witchcraft fonctionne bien auprès d’une Valley remplie jusqu’à la gueule.

Au pas de course on rejoint la main stage pour aller choper le set de DOWN dont on rate les premiers accords (faut dire que ces enflures ont commencé cinq minutes plus tôt…). Quand dès le second titre le groupe nous colle un extrait de son dernier (correct mais pas exceptionnel) E.P., on commence à craindre une set list toute pourrie. Heureusement la suite va nous donner tort, avec une large proportion de morceaux issus du premier album (“Lifer”, toujours dédicacé à Dimebag Darrel, “Hail the leaf”, etc…), à peine deux du second, et aucun du troisième ! Miam ! Les gars ont la pêche (on ne pourra jamais reprocher au groupe son manque d’envie sur scène), et on est content de voir que Patrick Bruders (Crowbar), qui a repris la basse après le départ de Rex, s’en tire avec les honneurs. Anselmo est en voix (d’outre tombe – faut l’entendre grommeler avec sa voix caverneuse entre les titres…) et le fait savoir. Les deux gratteux ne sont pas en reste, avec un Pepper Keenan – et son T-shirt The Obsessed – qui manifestement assume avec autorité une sorte de leadership instrumental légitime. Comme on y est habitués aussi avec Down, le bord de scène est complètement blindé de curieux, musiciens, famille, amis, strip teaseuses, etc… Niveau son, le vent qui tournoie devant la main stage gâche un peu la fête, mais au final, ça sonne quand même pas mal (on regrette un peu notre petit confort douillet de la Valley…). En décidant d’enquiller en clôture les trois bombes que sont “Losing all”, “Stone the crow” et “Bury me in smoke”, le groupe est sûr de son effet et sait qu’il met la barre très haut. Les traditions étant ce qu’elles sont, avec un concert de Down en festival on a forcément l’éclatage de micro du sieur Anselmo sur son front, et la conclusion bordélique : on y voit défiler Jason Newsted, Matt Pike, et autres zicos non identifiés, et au final ça donne toujours ce sentiment d’ambiance festive, de générosité et de partage qui rendent chaque concert de Down attachant. Quand en plus il se pare d’une set list de ce niveau, on ne peut que ressortir de là conquis.


Passés les derniers accords, on court rejoindre la Valley pour le set très attendu de KARMA TO BURN, qui joue devant une tente pleine à craquer. Quelques jours avant cette date, on a cru que le groupe ferait lui aussi partie de la longue liste des annulations dont a été victime le Hellfest cette année, puisque les quelques dates précédent ce concert ont été annulées. Heureusement, le groupe monte sur scène à l’heure et… sonne bizarre. De là où on se trouve (cachés derrière les amplis sans vue directe de la scène), on soupçonne un problème de sono que l’on espère voir résoudre au plus vite. Sauf qu’en prenant un peu de recul pour avoir une vue complète de la scène, on comprend mieux le phénomène : il manque Rich Mullins à la basse ! Will Mecum et Evan Devine (le batteur qui a remplacé Rob Oswald, parti avec perte et fracas il y a plus d’un an maintenant) tiennent seuls la scène, et enquillent les riffs, en essayant d’occuper le plus de strates sonores possibles. Sentant bien qu’il manque quelque chose, Will, un peu imbibé par ailleurs, se lâche complètement, et son comportement scénique contraste avec ce à quoi l’on était habitué : le bonhomme bouge sur scène, va à la rencontre du public, joue en interaction avec Devine, et parle au micro (miracle !). Précisons que le gars est d’une lourdeur assez remarquable et ses réparties frisent la maladresse un peu pathétique (“Donnez moi un ‘hey’ !!”). Mais au final on n’est pas venus pour qu’il nous compte fleurette, on va donc se pencher sur la musique du “duo”. Niveau set list, ils tentent pas le diable et optent pour les classiques : ça commence par “19”, qui marche pas trop mal, mais déjà sur “36” le manque de la basse galopante et ronflante de Mullins se fait sentir. Mecum envoie du steak, pas de soucis, il bastonne, et Devine l’aide bien en enrobant le tout de force cymbales et autres artifices soniques. Mais même s’ils font illusion sur 80% des passages musicaux, certains breaks ou certains soli ne passent pas, tout simplement. Que dire de “8” et ses passages harmonisés soutenus par la mélodie de basse de Mullins ? Il ne vaut plus que pour son couplet / riff remarquable, il est vrai. Et ça déroule comme ça tout du long, dans un contraste perpétuel : un public qui s’éclate complètement (faut voir le nombre de slammers et les headbangers frénétiques des premiers rangs) et un malaise musical tangible. Quel étrange set…
[Même si l’on ne peut pas donner l’ensemble des informations expliquant l’absence de Mullins sur cette tournée européenne, disons simplement à ce stade qu’il y a eu un problème –réel – d’organisation de son vol vers l’Europe, sachant qu’il vit à plusieurs milliers de kilomètres de ses collègues et que donc son avion était différent].


Après avoir noyé ce petit malaise dans une paire de Jack Daniel’s bien sentis, on retrouve la Valley un peu plus tard pour un set qui s’annonce bien plus réjouissant, avec (encore !) RED FANG. On est d’ailleurs pas les seuls à les attendre, tant on a du mal à se frayer un chemin dans le public pour se rapprocher de la scène. Ces derniers mois et années, les ricains ont arpenté tout ce qui ressemblait à une scène en France et ailleurs et… ça se sent ! Niveau efficacité ils sont juste au top niveau : se reposant sur un package de compos complètement imparables, les bonhommes sont tous de bonne humeur, dynamique, énervés… ils ont une réputation à défendre et ils se la jouent pas en roue libre ! Aaron Beam, au centre de la formation, attire les regards et l’attention par son seul charisme (on peut pas dire que ça soit par son look de premier de la classe), sans jamais priver ses collègues de leur part de “lumière”. L’entité Red Fang est bien huilée, chacun y a sa place, et c’est désormais devenu une véritable machine de guerre. On parlait des compos, faut voir que Red Fang ne manque pas de hits désormais, essentiellement issus de “Murder the Mountains” : “Malverde” et son riff écrasant, le très catchy et heavy “Wires”, ou le virulent “Hank is dead” voient les slammers débridés se lâcher complètement. Evidemment, le classique “Prehistoric doc” et son riff de deux notes conclut les hostilités avec la fureur qui caractérise ce set. Il est maintenant urgent que les gaziers enquillent sur un nouvel album pour transformer l’essai et passer à l’étape supérieure, ce qu’ils ont le potentiel de faire.


Sur ce, on file avaler un sain sandwich pour essayer en même temps de capter quelques notes de CONVERGE (j’en sors déçu par la débauche d’énergie un peu stérile de Jacob Bannon qui se démène mais ne parvient pas à faire exploser le public de la Warzone) puis de ZZ TOP (à peine plus d’une petite heure de concert pour cette tête d’affiche, et une set list qui, sous ce format réduit, accorde une place étonnamment réduite aux hits du groupe). On se dirige ensuite à nouveau vers notre “maison d’accueil”, la Valley, pour aller capter ce que l’on peut appeler l’anomalie de cette programmation. On n’est d’ailleurs pas les seuls à être quelque peu déstabilisés : la tente est à moitié vide pour assister à ce set de MANILLA ROAD ! Malaise tangible, quand on sait qu’en plus de ça le samedi est la journée qui compte le plus de monde sur les trois jours de festival, et que la concurrence sur le site sur ce créneau horaire est juste médiocre… On accorde le bénéfice du doute au groupe, et on se rapproche (sans problème, donc) des premiers rangs. Evoluant dans une sorte de vieux metal vaguement progressif et doté de quelques relents doom “vieille école”, le combo américain joue bien, et le groupe sait bien tenir la scène. Mark “The Shark” Shelton est (et ça se voit…) le seul membre fondateur du groupe restant, les autres étant sensiblement plus jeunes, à l’image de son vocaliste Bryan Patrick, son ancien tour manager. Shelton a beau ne plus être tout jeune, il tricote toujours pas mal sur sa Warlock old school, et baragouine quelques mots de français. Est-ce que ça rend le concert intéressant ? Pour moi, au bout de quatre ou cinq chansons, la messe est dite. Clairement, on n’est pas au niveau de ce que l’on a pu voir quelques heures auparavant sur la même scène. Le fait qu’un groupe existe toujours après plus de trente ans ne suffit pas à le rendre “culte”… et encore mois à le rendre intéressant ! Triste et décevant.


On finit notre soirée par une incartade sous la tente bicéphale “extrême”, puisque les doom métalleux old school de CANDLEMASS se produisent entre deux groupes de black metal sous la tente Altar. C’est avant tout l’occasion de jauger le nouveau (énième !) vocaliste du groupe, le petit jeune suédois Mats Levén (Y. Malmsteen, Krux…). Ce dernier se défend bien, son organe étant bien adapté au répertoire classique du groupe. Les autres musiciens, malgré leur génération d’écart, se défendent bien, à commencer par le fondateur Leif Edling ou encore le guitariste Lars Johansson, tous les deux assurant le show en bons vétérans rodés à la scène qu’ils sont. Même si je suis moins familier du répertoire récent du groupe, je suis toujours content de réentendre des titres comme “Bewitched” ou “At the Gallows end”, catchy et remportant leur petit succès. Lorsque le quatuor termine sur le classique “Solitude”, il clôture un set honorable, efficace, mais manquant un peu de relief et d’éclat. Mettons à leur profit le fait d’avoir “tenu” un public conséquent alors que KISS joue à quelques centaines de mètres à peine…
J’essaye ensuite d’éviter la Valley où jouent Cult Of Luna (pas ma came, désolé) pour rentrer penaudement vers une nuit de sommeil afin de recharger les batteries pour la journée du dimanche, qui s’annonce haute en couleurs…

[A suivre…]

Photos : Laurent (sauf Down : Ian Arné / Noise Culture)

Laurent

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