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Lorène, je sais que tu étais là avec nous ce soir mais laisse-moi quand même te raconter ma soirée, que tu puisses voir à quel point tes amis et moi en particulier étions vraiment contents d’être là ce soir.
Pour moi tout commence avec la route à faire, départ 15h30 de la maison, certes c’est tôt mais il est hors de question pour moi d’arriver trop tard pour cette soirée.
Un t-shirt et quelques CDs, voilà tout ce dont j’ai besoin avant de partir. Pour le t-shirt, j’ai choisi celui de la tournée 2005 des Queens. C’est lors de cette tournée que j’ai eu la chance de te rencontrer en chair et en os pour la première fois même si on se côtoyait virtuellement depuis pas mal de temps. Tu portais ton chapeau à l’époque si mes souvenirs sont bons. Côté CDs, ma playlist est simple pour ce voyage aller, deux disques.
Pour commencer je me mets le premier album des Queens, tu sais bien l’album… éponyme… Et je pense à cette facette de toi que certains ne connaissaient même pas. Ta maitrise de la langue française et ton travail de traductrice qui allait avec. Je repense à une discussion sur ce fameux terme éponyme qui t’agaçait tant il est utilisé à tort et à travers. Et par la même occasion je me dis que plus jamais je ne rencontrerai de personne qui utilise le mot « putassier » aussi naturellement que toi… c’est bête non ?
En parlant de Qotsa, je me souviens aussi de ce fantastique concert à l’Ancienne Belgique pour y jouer cet album en entier, mémorable soirée où tu étais arrivée tellement en retard que tu avais presque tout loupé. En retard… impossible pour moi aujourd’hui. Alors continuons le chemin.
Le second album qui m’accompagne alors que les kilomètres défilent c’est un live de Thièfaine. Forcément, j’ai le cœur qui pleure lorsque j’entends “Lorelei Sebasto Cha” et je te le répète, plus jamais je n’entendrai cette chanson sans penser à toi. Je me remémore notre discussion sur cette chanson…
Il y en a une autre qui me fait tant penser à toi maintenant, “Petit Matin 4.10 heure d’été”… je me dis que c’est dommage, on n’a jamais pu parler du dernier album de HFT, j’aurai bien aimé avoir ton avis.
« Je n’ai plus rien à exposer
Dans la galerie des sentiments
Je laisse ma place aux nouveaux-nés
Sur le marché des morts-vivants. »

Lorsque j’arrive devant le Klub, il y a déjà quelques personnes devant l’entrée, à boire un verre, sans le moindre doute à ta santé. Je salue quelques personnes et entre. Il me faut absolument aller voir les photos de toi qui sont en vente, je ne peux repartir sans l’une d’entre elles et avec la règle du premier arrivé premier servi, tu penses bien que je voulais arriver à l’heure !
J’ai énormément de chance, je suis le premier à choisir… Un choix difficile mais pourtant évident. Alors je ne sais pas encore où je vais exposer cette photo de Josh Homme… dans mon couloir entre deux posters ou dans mon bureau, à côté de cette photo de moi, Scott et Bruno que tu avais prise.
Il y avait dix-sept de tes photos mise en vente ce soir, dix-sept magnifiques photos que j’ai pris un long moment à regarder, seul dans ce couloir en pensant à toi et toutes tes heures passées dans la fosse des photographes.
Je ressors de la salle, la foule est plus fournie, les gens discutent et attendent 22h, l’heure à laquelle commencera le concert. Je discute encore, je fais même des rencontres inattendues tu sais, je passe déjà comme tout le monde présent ce soir-là, un excellent moment grâce à toi.
Et puis je retourne encore devant la scène, pour préparer mon matériel pour enregistrer le concert. Tu me connais, jamais sans mon Edirol ! Et puis je dois aussi préparer mon appareil photo car je compte bien immortaliser la soirée et prendre quelques clichés qui, s’ils ne rivaliseront jamais avec ton boulot de photographe, me feront d’excellents souvenirs.
Sauf que voilà, c’était écrit par avance que la soirée serait exceptionnelle. Alors largement avant 22h, Louise, Lo S. Data, Pablo et Rodrigue s’installent sur scène. Car si le règlement du Klub empêche de faire du bruit avant 22h, il n’empêche pas de prendre deux petites guitares et de chanter quelques trucs comme ça, en impro complète.

Regarde-moi Lo’ ces sourires sur leur visage. N’est-ce pas là le signe d’une soirée qui s’annonce certes chargée en émotions mais avant tout festive et joyeuse. Je suis sûr que tu as apprécié la reprise de Depeche Mode par exemple car toi qui étais connue pour ton attachement au stoner et au heavy en tous genres, nous savons aussi que tu ne crachais pas sur un bon petit truc New Wave ou post punk.
Les quatre compères improvisent donc quelques chansons alors que la plupart de tes amis sont encore dehors sans savoir que ça a déjà commencé.
Cédric de Face Down et Sam de Flesh and Dust prennent le relais pour un pur moment de rigolade. Ils enchaînent les intros de tout un tas de tubes rock au plus grand bonheur de ceux qui sont déjà là. Un vrai moment convivial entre amis, sans prise de tête, c’était juste parfait.


Il n’est toujours pas 22h. Louise au chant et Nico E. Wilhelm à la guitare acoustique s’installe discrètement sur scène pour nous faire vivre un très joli moment d’émotion en interprétant “Hit the City” de Mark Lanegan de fort belle manière. Lanegan, on ne peut pas dire que tu sois la dernière de ses fans et tu as du apprécier cette très belle version j’en suis certain. Ils sont rejoints ensuite par Fred Quota de DearDevil et Pablo de Loading Data pour faire les chœurs sur “Down by the Water” de PJ Harvey. C’est magnifique.


Totalement improvisé encore histoire d’attendre l’horaire prévu, Pablo reste sur scène avec Louise, prend une guitare et nous interprète “Heart Shaped Box” de Nirvana. Me reviens alors des discussions sur ce groupe, sur leur performance au Reading Festival en 92. Tu as aimé à coup sur cette version dépouillée et pourtant si forte. On sent la conviction et la sincérité dans le jeu de Pablo et le chant de Louise, tout en retenue n’en est que plus beau.

La première partie de la soirée s’achève. Elle était improvisée, tu as adoré j’en suis certain. Un vrai moment comme tu les aimais, comme on les aime tous. Des moments simples et précieux.
22h précise, le Lorelei Fest premier du nom peut véritablement commencer. Oui oui, commencer car après tout, ce qui vient de se passer n’était pas vraiment prévu.
Et qui de mieux pour entamer le set que ton partenaire dans Sleaze Amine à la guitare accompagné par Clément et Ben. “Thee Ol’ Boozeroony” et “Mudfly” de Kyuss pour commencer, que dire si ce n’est que c’est un excellent choix. Le public présent apprécie tout autant que moi et c’est vraiment une entrée en matière parfaite pour cette soirée rock’n roll au possible.

Les musiciens et chanteurs changent, s’échangent leur place et cette première partie verra défiler sur scène Fabian Belleville, Clément, Bapt et Goeff de Coffin on Tyres ainsi que Sam pour enchainer “Born To Hula”, “Auto Pilot” de Qotsa et “Burning Beard” De Clutch. Inévitablement je repense là à ce concert de Clutch en première partie de Volbeat dont on a loupé le début tellement j’étais en retard ce jour-là avec la circulation parisienne. Je te dois toujours un demi-concert de Clutch, je n’oublie pas!
On termine cette première partie avec un bien puissant “A Song for the Dead” de Qotsa. J’ai une énorme pensée pour toi à ce moment précis, me disant que c’est le dernier titre des Queens que tu as vu en live lors de leur dernière tournée.

La seconde partie commence sur un surpuissant “Wish” de Nine Inch Nails, débordant d’énergie. Tu as vu ça comme tes amis se donnent sur scène, c’est beau à voir n’est-ce pas ?
Et on s’enchaine sans aucun lien et ça c’est rock ‘n roll avec un Rodrigue totalement survolté et c’est peu de le dire pour trois reprises de Eagles of Death Metal (“I Only Want You”, “Don’t Speak” et “Speaking In Tongues”). Nico E. Wilhelm est à la gratte, Clément à la basse et Fred Quota à la batterie. Quel pied sérieusement. Ça déborde d’énergie aussi bien sur scène que dans le public !!!
Impossible de voir ça sans repenser à l’une des photos de toi que je préfère, celle où tu es sur scène aux côtés de Jesse lors de leur concert à l’Ancienne Belgique en 2009. Quel souvenir merveilleux que ce concert, un de plus avec toi.

Mais pas le temps de se laisser gagner par la nostalgie car nos loustics sur scène sont chauds bouillants ! Et là c’est du lourd qui se prépare puisque Robin de Loading Data à la batterie, Fab Corn de Coffin on Tyres à la guitare, Rodrigue toujours au chant et guitare et Nakat ancien membre de Loading Data à la basse associent leur force et leur énergie pour trois reprises stratosphériques de Fu Manchu (“Evil Eye”, “Anodizer” et “King of the Road”). J’imagine déjà comment tu as du crier de toutes tes forces comme j’ai pu le faire sur King of the Road says you move too slow !!!!!!!!!

Alors qu’on nous annonce une petite pause, Lo Data et ses amis reviennent sur scène pour nous jouer “Third Man on the Moon” de Masters of Reality. J’imagine la joie que tu as ressentie en entendant cette superbe version. Quelle réussite.
Après une petite pause donc et une bonne boisson fraiche, nous voilà de retour pour la suite et je trépigne d’avance en me demandant quelles autres surprises nous attendent. Tu dois être tout aussi impatiente et je pense que tout comme moi tu as été littéralement cueillie par ce “Wedding Dress” de Lanegan. Alors que l’émotion est à son comble, Lo Data et sa bande enchaîne avec une longue et superbe version de “Revival” des Soulsaver’s. Que dire ? Quels mots trouver pour exprimer ce que l’on ressent dans pareil moment. Tu es touchée par l’hommage, surement encore plus que je le suis.

Et cette émotion est loin de retomber lorsque retentissent les premières notes de “Makin a Cross” des Desert Sessions. Je dois ici souligner que, parmi les milliers de chansons qu’il était possible de choisir pour te rendre hommage, les choix sont réellement parfaits. On sent que ceux qui ont préparé ce concert te connaissent.
Mais j’entends l’écho de ton rire devenu mythique pour toutes les personnes qui te connaissent après la blague de haute volée que Lo Data nous sort avant le morceau. Quel déconneur ce Lo’.
Cette partie se termine par une annonce de Lo Data que j’ai trouvée si symbolique. Une naissance à venir, celle de la fille de Robin. Certains partent, d’autres arrivent, ainsi va la vie.
Après la toute petite pause, c’est au tour de Loading Data avec Nakat à la basse de venir sur scène pour quelques titres de leur répertoire. Lo Data nous rappelle d’ailleurs comme tu as pu les soutenir dans leur carrière. “Circus Blues” pour commencer et sa patte groovie que j’adore. Le groupe enchaine ensuite avec le superbe “Do it on the Beach” qui pousse le public à crier le refrain même si personne n’osera monter sur scène pour chanter avec eux comme Lo Data l’avait demandé. Trop timide ce public ? Moi je suis certain que si tu avais été là physiquement avec nous, tu te serais précipitée pour aller t’éclater derrière le micro. “Alright” vient tout de suite en enchaînement, rock’n roll à souhait.

“Song for a Friend”, dernier titre du groupe pour ce soir. Tu n’as jamais entendu ce morceau Lorène j’en suis sûr. En fait ce bien joli morceau a été écrit spécialement pour toi, juste après que tu sois partie rejoindre tous nos amis trop tôt disparus. Go Wake Up, Go Wake Up the Maker, With Booze, and Fuzz & Funny Cigarettes. Un bien bel hommage pour toi mon amie.
Après ce joli moment d’émotion, on aurait très bien pu en rester là. Mais il fallait surement mieux te laisser sur une notre plus rock’n roll. Et c’est exactement ce qui t’a été donné.
Coffin on Tyres monte sur scène et nous interprète une puissante version de “Stinkfist” de Tool.
It’s not enough
I need more
Nothing seems to satisfy
I don’t want it
I just need it
To feel, to breathe, to know I’m alive.
Quelle était cette chose pour toi, cette chose qui t’a tant manquée ?
La version que j’entends ce soir a une résonnance toute particulière, c’est si puissant, si fort. Et me voilà encore avec des souvenirs qui remontent. Ce concert de Tool au Zenith il y a quelques années auquel je ne peux aller. Et je te file la place pour que tu puisses t’y rendre alors qu’on discute de tout le bien que tu penses de Maynard James Keenan… Quelle rigolade encore une fois.
Pour nous achever et terminer en beauté cette partie, le groupe nous envoie un de ces “Green Machine” de Kyuss absolument dantesque. Difficile de faire mieux que toute cette rage qui sort, toute la frustration que l’on crie, que l’on expulse comme ces quatre loustics qui beuglent derrière le micro à s’en faire exploser les cordes vocales. C’est puissant, c’est tellement puissant.

Il est environ une heure du matin lorsque, pour terminer la soirée, les musiciens montent sur scène pour un jam qui nous mène au bout de la soirée. Cette première édition du Lorelei Fest est une totale réussite. C’est un vrai bonheur de te rendre hommage comme cela, c’était parfait.
1h30 du matin… le temps pour moi de reprendre la route. Pour le retour je me réécoute une partie de la soirée, je monte le son dans la voiture, je revis la soirée.
Il est presque 4h10 du matin quand je me couche, c’est ironique je trouve. Le réveil sonne dans 2 heures. Et là, je repense à cette fois où tu m’as hébergé chez toi et où on a discuté toute une partie de la nuit pour finalement se coucher, vers la même heure environ.
Je tiens à remercier toutes les personnes présentes ce soir-là, les musiciens, le public, tout le monde.
En particulier un grand merci à Rodrigue pour son accueil et Robin pour son aide.
Rendez-vous je l’espère l’an prochain pour une deuxième édition tout aussi réussie.
Mesdames et messieurs bienvenue en ce vendredi 9 mai 2014 au salon de l’auto-stoner ! De belles mécaniques présentées ce soir, des plus récentes aux plus classiques, que du beau, du bon, du gros. Organisée pas nos amis fidèles des Stoned Gatherings cette soirée forte de quatre modèles, pris place au QG habituel : le Glazart.
Début des festivités à 19h avec Abrahma, la belle française avec ses finitions rétro est pourtant bien ancrée dans le présent. Quatre roues motrices pour profiter pleinement de la puissance de son moteur, ça sent à chaque morceau la qualité de la ligne de montage, des pièces et de la main d’œuvre. 30 minutes de show qui passent vite tellement le groupe nous emmène loin en si peu de temps. Dès les premières résonances des guitares et de la basse, on sent le décollage imminent et une fois la première enclenchée, la route défile. La lourdeur de la rythmique se laisse entraîner dans des passages plus envoûtants et la mécanique étant bien huilée, on ne s’ennuie pas un instant. Chanceux que nous sommes nous avons même le droit à un nouveau morceau, un nouvel album étant en chemin, et c’est une excellente impression qui s’en dégage. Le groupe reste fidèle à son heavy-rock-psychédélique. Eux-mêmes transportés, un petit moment de flou sur le timing ne leur laisse malheureusement pas le temps de nous en offrir plus. La qualité à la française a de belles heures devant elle. Dommage que le public fut si clairsemé en ce début de soirée. Ce n’est pas rendre justice aux qualités scéniques des parisiens.
Après que le seul représentant de la fabrication française soit passé sur le podium, c’est un festival de belles américaines qui va défiler sous nos yeux et faire vrombir leurs moteurs.
En premier lieu : Satan’s Satyr. Retenez ce nom, vous en entendrez parler dans les prochaines années. Ca ressemble à un corbillard mais ils ont dû faire un tour chez Pimp My Ride pour avoir autant de chevaux sous le capot voire de la nitro dans les lignes droites. Assemblé en Virginie par trois jeunes mécaniciens, je peux vous dire qu’une fois la gomme des pneus chaude ça dépote. Ca commence comme du doom groovy, début de set instrumental, et plus les minutes passent plus la nitro fait effet. Au final les jantes punk’n roll claquent et leur doom’n roll scotche tout le monde au passage. C’est Black Sabbath qui s’est fait tuner par le MC5. Au chant et à la basse, nouveau membre de Electric Wizard soit dit en passant, Clayton Burgess est un leader charismatique pour son jeune âge. Croisement improbable entre Mick Jagger et Lee Dorrian. Empruntant des mimiques à l’un et à l’autre mais sans avoir leurs voix respectives, il dirige la cérémonie de main de maître. Le chant punk est soutenu par des riffs d’une efficacité rare. Tout ce qu’il y a eu comme gimmicks de plus accrocheurs depuis les années 50 y passent. Basse et batterie se font plaisir tout en laissant la place à la guitare de s’embarquer dans des solos. Le public est conquis. On se voit bien manger des kilomètres en leur compagnie.
Entre en scène The Ultra Electric Mega Galactic. Le chef d’atelier ne vous est certainement pas inconnu : Monsieur Ed Mundell, ex-Monster Magnet , ex-Atomic Bitchwax et toujours lead-guitariste culte. C’est une belle mustang, fichtrement bien montée que ce trio là. Finitions chromées, vous avez toutes les options pour un confort de conduite totale et une tenue de route optimale. Et la route est bien tenue ! Parce que Ed (pour les intimes) ne s’est pas entouré d’une équipe de bras cassés pour son jam-band instrumental. Loin de là. Autant nous connaissons les qualités de solistes du grand blond et de ses riffs jouissifs à tomber le toit pour se la jouer décapotable, autant ses compagnons d’armes n’ont pas la même aura avant de faire parler leurs instruments. Derrière les fûts Dan Joeright, qui remplace Rick Ferrante (de même pour Sasquatch), assure toute l’assise nécessaire pour laisser ses comparses s’exprimer. C’est carré, varié, groovy à souhait, il y a les amortisseurs qui faut pour encaisser les cahots de la route et la carrosserie est robuste. Qui dit trio instrumental, pense souvent concert « clinique »… mais c’est sans compter sur la bonne humeur ambiante du groupe et sur les qualités d’animateur du bassiste : maître Collyn Maccay. Echanges pleins d’humour avec le public, partage du plaisir qui est le leur d’être ici, un vrai… leader ? Parce qu’il n’y a pas qu’en tant que speaker officiel qu’il assure le bougre, c’est un tueur à la quatre cordes. Ed a trouvé son juste alter ego pour animer les riffs et mélodies du projet. Vous voulez connaître toutes les capacités de cet instrument qu’est la basse : regardez Collyn jouer. La claque ! En vrai maestro et amoureux de la musique, le groupe se laisse même à jammer en compagnie de Keith Gibbs (guitariste de Sasquatch) pour finir le set. La classe à l’américaine ! Savoir faire le show tout en faisant démonstration de toutes leurs qualités de composition comme d’interprétation.
Pour clore l’évènement, un beau truck typique du pays de l’oncle Sam. Vous savez le gros camion qui en jette un max et qui avale les kilomètres de la route 66. Celui qui rutile et qui suinte en même temps. C’est un classique du genre qui est présenté ce soir : Sasquatch. Un modèle qui connaît une seconde vie depuis 2010 après un petit hiatus autour de fabrication de la bête. L’idée de ce genre de camion, ce n’est pas d’être original, c’est d’être efficace. Le genre de mécanique qui sert de mètre étalon pour toutes les autres confections automobiles. Carré pour tenir la route, groovy pour faire brûler l’asphalte, rugueux pour décourager les prétentieux de faire la course, mélodique pour adoucir les virages et accrocheur pour tomber les tenancières de motels. Du Stoner pur huile, point barre. Faut pas se couper les cheveux en quatre pour comprendre le message : faisons-nous plaisir tous ensembles. Partageons rires et sueurs, headbanging et voix rauques, ce soir le truck vous a transporté son lot de petit-bois et il en envoie en masse. C’est rôdé, ça déroule sans accroche, ça joue bien, ça joue fort, des solos, des chœurs du bassiste, des blagues, de la bière, une fosse en délire. Plus que de bons morceaux, un bon chant et de bonnes mélodies, la musique du trio prend là tout son sens : prendre son pied. Ceux qui y étaient comprendront, ceux qui n’y étaient pas n’auront pas raté le concert de l’année, mais un ‘tain de bon moment. Ce soir Sasquatch a mis sa photo dans le dictionnaire pour définir un set jouissif.
Ce fut une très grOsse soirée. Merci tonton !
En arrivant devant l’Heretic, célèbre petite salle associative du centre ville de Bordeaux, on commence à sentir que même si sur le papier toutes les conditions sont réunies pour une soirée d’exception, on ne peut pas maîtriser tous les éléments… En l’occurrence, un concert rock dans une ville éminemment estudiantine un vendredi de “pont” un lendemain de jour férié… ça ne rameute pas les foules ! Ajoutez à ça un public bordelais réputé apathique (après cinq ans de vie bordelaise et malgré quelques faits d’armes d’exception, difficile de contredire ce triste état de fait : Bordeaux n’est pas franchement une ville rock), et on ne peut pas dire que ça se presse devant la scène lorsque les marseillais de Rescue Rangers font gronder les premiers accords de guitare…

Mais ce n’est pas notre seule surprise en voyant le quatuor (!) évoluer devant nos yeux : du Rescue Rangers que l’on connaissait, ne subsiste que Pascal, emblématique frontman de la formation phocéenne. Autour de lui, un nouveau bassiste et un nouveau batteur, mais aussi un second gratteux dans un coin, qui nous rappelle vaguement quelque chose… C’est en fait Seb, frontman d’Abrahma, qui assurera donc ce soir deux sets d’affilée ! Nouveau line-up, donc, définitif ou pas (alors que l’on apprenait quelques jours plus tard que le groupe se séparait de son dernier bassiste Renaud), ça sent le malaise… Et bien non, bien au contraire ! Déjà à la balance, ça déconnait dur. Mais sur scène, l’entente est simplement parfaite, les musiciens sourient, se donnent à fond dans le set… C’est carré, rondement exécuté… Rien à redire ! Musicalement, Rescue Rangers n’a pas volé sa place à l’affiche de ce soir : leur musique est pleine de reliefs et d’ambiances différentes – à l’image des copains d’Abrahma – et est aussi chargée d’énergie, une sorte de gros coup de pied au cul plein de gros riffs – et en cela ils plairont aussi aux fans de Los Disidentes Del Sucio Motel. Mais les Rescue Rangers ne sont pas un vulgaire ersatz, et ils déroulent leur set efficace avec une fougue qui emporte le maigre public présent pour ce début de soirée. Moi qui n’avait encore jamais eu l’opportunité de voir ce groupe sur scène (et pourtant les bonhommes ont roulé leur bosse depuis le temps…) j’ai déjà envie de les revoir. Les gars en ont sous la pédale, c’est évident. Espérons que ce virage dans leur carrière leur soit en tout point positif… Ca a l’air bien parti pour !

Un peu d’air frais, une petite boisson houblonnée, un peu de discut’ avec les groupes de la soirée, et le sol de l’Heretic se met à trembler, signe dans ce club que la musique reprend et qu’il est temps de descendre dans la salle de concert ! Et c’est reparti cette fois pour le set d’Abrahma. Le quatuor parisien démarre sur les chapeaux de roue avec le puissant “Tears Of The Sun”, un morceau puissant et tortueux, signe que les gars sont pas venus pour se la raconter au coin du feu. Bonne surprise (pour ceux qui comme moi n’avaient pas eu l’occasion de voir le groupe live jusqu’ici), avec des moyens finalement assez simples (pédales d’effets guitares normales, et juste un second micro avec effets), le groupe parvient à retranscrire avec la même efficacité la complexité des arrangements de leur album, et ce morceau en est une belle illustration. Niveau énergie, en tout cas, ça envoie du steak. C’est là aussi une agréable surprise : l’album étant si riche, on pouvait craindre de voir des musiciens austères, uniquement focalisés sur leur instrument, leurs effets, etc… Rien de tel ! Tandis que Nicolas est plutôt concentré sur son jeu (faut dire que les parties de gratte du combo le justifient), Guillaume est au taquet avec sa basse. Quant à Seb, aussi à l’aise derrière ses micros qu’à débiter ses parties de gratte, il est juste complètement son set, à fond dedans, et c’est pas pour la déconne ! Un jeu de scène dense, jamais ennuyeux, qui maintient le set en tension sur toute sa longueur. Du travail de pro ! Plus loin dans le concert, l’efficace et accrocheur “Neptune of Sorrow” fait bien headbanguer le public présent, qui a beau ne pas être très nombreux, est content d’être là et participatif. Couillu, le groupe se lance dans un combo “Headless Horse” / “The Maze” aux relents dark presque doom, tempo lent et rythmiques lourdes et ronflantes… Et là, le groupe annonce une surprise : au bout de quelques mesures, on comprend qu’il est en train de se lancer dans un inédit probablement présent sur son prochain album. En première impression, le titre est lourd, sombre, pas aussi lent que le titre précédent toutefois, mais en tous les cas très puissant. Ca donne envie ! En conclusion de set, “Honkin’ Water Roof” est tout à fait approprié, avec en particulier un final qui fonctionne bien, avec ses percées de guitares presque larmoyantes. Super concert et super performance.

Re-pause, re-appel des décibels pour ruer dans la salle et ne pas rater les premiers accords de Los Disidentes Del Sucio Motel. Et faut dire que côté riff lourd, les strasbourgeois mettent les petits plats dans les grands en commençant par l’un des titres les plus heavy de leur dernier album, “Kraken”, enchaîné à un autre gros morceau, “ATARI”. Bien vu, ce choix permet de convaincre le public dès les premières minutes. Comme d’habitude, et ça fait toujours le même plaisir à voir, chaque membre du groupe est complètement dans le trip : les gars se donnent comme s’ils faisaient la première partie des Stones à Wembley. Chaque riff est interprété avec ferveur, chaque solo (et ça aussi ça fait plaisir d’en entendre) est joué comme si c’était le dernier de l’humanité, chaque ligne de chant sort des tripes de Sonny, Francky ou même Bobby, et chaque frappe de Billy lui arrache des grimaces que l’on pourrait presque croire de douleur (maso !). Evidemment, l’empathie aidant, le public est juste en phase parfaite. Les titres du dernier album s’enchaînent pour démontrer si besoin était que d’une part l’album passe super bien sur scène (bluffant, même constat que pour Abrahma : tous les arrangements de l’album passent l’épreuve du live haut la main), et d’autre part que sa richesse permet de varier la teneur d’une set list entière… Car oui, le groupe compose ce soir sa set list quasi uniquement à partir de leur “Arcane” – un signe de confiance justifié, on vient d’en faire le constat, mais un petit brin de regret nostalgique de la part des aficionados de leur première galette… Histoire de varier les ambiances (et les plaisirs) le groupe cale quand même en plein milieu de set (faut une sacrée paire de roubignoles) une reprise bluffante du “Teardrop”… le classique de Massive Attack ! Attitude et audace emportent le pompon sur ce titre qui aurait pu, sur le papier, en faire pâlir plus d’un… Un peu plus loin, “Lucky Man” prouve son potentiel de hit puissant et mélodique, enchaîné au désormais classique “Z”, plus lourd, qui voit encore une fois les têtes du public hocher en rythme. Comme un clin d’œil, le groupe finit par un petit passage par son premier album, avec notamment une conclusion arrachée de justesse à l’horloge de l’Heretic, avec un “From 66 to 51” qui rappelle que dès ses premières heures, le groupe avait le sens du riff qui percute et des refrains hurlés en chœur. Le quintette tire sa révérence après une grosse heure de gros rock superbement interprété, et nous laisse sur un sentiment mêlé de satisfaction et d’interrogation : pourquoi ce groupe ne tourne-t-il pas plus ? Il a tout pour rassembler un public à la fois large et exigeant… Il serait temps de mettre un coup d’accélérateur (et aux tourneurs de les solliciter un peu plus).
Au final, une fichtrement bonne soirée, dont je regretterai, le cœur un peu gros, qu’elle ne fut pas plus longue (on en reprendrait jusqu’au bout de la nuit… même s’il est une plombe du mat quand on quitte l’Heretic) mais surtout qu’elle ne fut pas partagée par un public plus fourni. Les absents n’ont pas eu tort, ce soir… ils ont juste à coup sûr passé une bonne grosse soirée de merde en comparaison de ce qu’ils ont raté. En tout cas on félicite et remercie les Make It Sabbathy d’avoir organisé ce plateau qui a fini de nous confirmer la qualité des groupes français.
On ne le dira jamais assez dans ces colonnes : rien ne vaut la Belgique pour assister à un concert (quel qu’il soit d’ailleurs).
C’est donc sans hésitation aucune que j’ai décidé d’échanger une poignée d’euros contre un ticket pour le concert de Clutch au Trix, petit club convivial d’Anvers, en ce dimanche 27 avril.
Malheureusement, mon entrée dans cette salle est immédiatement synonyme de cruelle déception : Lionize ne joue pas ce soir. Le combo reggae-rock, produit par Jean-Paul Gaster, et qui est pourtant omniprésent sur la tournée européenne de Clutch, n’assure pas la première partie en ce dimanche. Pas de ‘Dr Linvingston’ donc ce soir pour mes oreilles, et plutôt que d’écouter l’obscur groupe qui ouvre ce soir (et dont j’ai d’ailleurs oublié le nom), je préfère me diriger vers la terrasse du Trix, une bière à la main, et retrouver quelques connaissances.
Après ces retrouvailles arrosées (avec modération), il est grand temps, tel un Moïse des temps modernes, de fendre la foule pour se frayer un passage jusque devant la scène, et d’attendre les messies du rock’n’roll. Et comme d’habitude, l’attente vaut largement le coup. Les premiers accords de ‘Earth Rocker’ résonnent à peine que le public est entièrement acquis à la cause Clutch.
Comme d’habitude, Neil est habité et nous offre une prestation « physique » et vocale incroyable. Comme d’habitude, Gaster martèle ses fûts comme Cetautomatix ses pièces forgées (et les romains).

Comme d’habitude, Sult est dans son coin, casquette vissée sur sa tête baissée, entièrement concentré sur son manche de gratte. Et comme d’habitude, Dan Maines est un peu en retrait sur scène, stoïque et battant la mesure avec son pied tout en groovant avec sa 4 cordes. Comme d’habitude donc, Clutch est en grande forme.
Le combo du maryland est sur le vieux continent pour défendre son dernier album en date, ce qui aura un impact sur le set de ce soir. Le gig, on l’a dit, débute par ‘Earth Rocker’, suivi de ‘Unto The Breach’, ‘Crucial Velocity’ et ‘Book, Saddle, & Go’. Après nous avoir offert un tiers de son dernier opus, nos 4 lascars s’en vont explorer des contrées plus lointaines et visiter leur répertoire de « Elephant Riders » et « Blast Tyrant ». Que du très bon donc avec, dans le désordre, ‘The Soapmakers’, un subtil ‘Subtle Hustle’ sur lequel il fait bon se trémousser, ou un ‘Profits of Doom’ de haute volée. Le concert, déjà bien jouissif, gagnera encore en intensité avec l’excellentissime ‘The Regulator’, son intro toute en finesse et cette montée en puissance capable de défriser le plus velu des hipsters. Après cette méchante première claque, la seconde arrive deux morceaux plus tard, et plus violente encore, avec un retour 19 ans en arrière pour un ‘Spacegrass’ de toute beauté (et sur lequel la voix de Neil laisse éclater toute sa puissance).
Après cette virée en Delorean, il est temps de repartir tranquillement vers le futur. Le groupe lâche alors la bride pour le furieux ‘Burning Beard’ et le fédérateur ‘50000 Unstoppable Watts’. La cocotte minute du Trix est prête à exploser, et le moment donc donc venu pour relâcher la pression avec l’acoustique et western ‘Gone Cold’ qui marquera le retour au dernier opus pour clotûrer le show (‘The Face’, ‘Oh, Isabella’ et ‘The Wolf Man Kindly Requests…’). Vient enfin le temps du rappel, avec un 9ème titre de « Earth Rocker », et le classique enchaînement ‘Electric Worry / One Eyed Dollar’.
Certaines mauvaises langues se plaindront certainement de ne pas avoir eu assez de « vieux » morceaux pour satisfaire leurs oreilles. Il n’en reste pas moins que qu’avec son répertoire énormissime, Clutch prouve une fois de plus qu’il est un maître incontestable et inconstesté du live.
Stonerpope
Jour 3 sur 3 : En arrivant en ce début d’après-midi sur le site (sous ce soleil encore éclatant, quel plaisir), avec encore une liste longue comme le bras de groupes à voir sur scène (et accessoirement d’interviews à faire au milieu…), on ne sent pas vraiment le sprint final arriver… On est juste à fond !
DOCTOR DOOM

Pourtant, la journée commence plutôt penaudement avec les français de DOCTOR DOOM. Bien contents de retrouver les ariégeois sur la scène du Desertfest (alors qu’ils n’ont qu’une autoprod de trois titres sous le bras à défendre pour le moment, en attendant leur album), on est un peu moins contents de les voir lancer les hostilités un peu après 14 heures devant un public trop clairsemé à notre goût. Cet horaire, assez tôt, et – répétons-le – un soleil écrasant (plus propice à déjeuner en terrasse ou commencer sa digestion par une petite sieste sous les arbres du Beergarten) en sont probablement les principales raisons. Le groupe n’en prend pas ombrage (sic) et entame joyeusement son set par deux morceaux de leur EP autoproduit susmentionné. Les titres sont bien représentatifs du genre musical du quatuor : un rock/hard-rock assez old school et vintage, aux rythmiques plutôt “enjouées”. On aurait peut-être aimé une entame de journée un peu plus franche du collier, avec un peu plus de saturation sur les guitares, un chant un peu plus rauque ou incisif… mais on ne peut pas dénaturer le groupe, qui joue son set sérieusement. Les passages de guitares harmonisées, le chant de Jean-Laurent, bien carré, la rythmique robuste… tout montre que le groupe sait ce qu’il fait, et le fait bien, aucun soucis d’exécution à déplorer. Et les extraits de son premier album à paraître sous peu nous montrent qu’a priori, le niveau sera maintenu sur la suite. En revanche, il manque un petit quelque chose pour mobiliser le public de l’Astra en ce début d’après-midi… Dommage !
POWDER FOR PIGEONS

Aux suivants comme disait Jacques et c’est le duo de Perth qui s’installe sur la même scène que la bande de l’Ariège. Vite en place – remarquez il n’y avait que deux instruments à régler pour le couple des antipodes – Madame derrière la batterie (de cuisine) et Monsieur au manche de la Fender vintage. Les Australiens envoyèrent le son dans une salle à peine plus fréquentée que pendant le set des Français. Pourtant, on avait dit le plus grand bien du duo actif dans un registre plus dans la veine alternative US des années 90 que dans le stoner pur sucre. Tant pis, nous ne sommes pas là pour voir défiler une colonie de clones sur les deux scènes de ce généreux festival. Alors donc, la donzelle bat la mesure et le mâle se tortille sur sa gratte en assurant les lignes des voix pour un set bien ficelé aux sonorités assez proches des Breeders au final et carrément pas dégueu qui fleure bon certaines prestations que Sonic Youth a pu délivrer dans le passé. Il faut dire qu’avec la tonne de gras que nous avions avalée la veille ça faisait du bien de se taper des trucs un poil plus rapide et soft même si la paire ne fait pas précisément dans la dentelle non plus. Les textes de leurs deux productions sont scandés et nous ne pouvons pas qualifier la personne qui débite dans le micro de véritable chanteur ; l’absence de basse et son engagement à la guitare devant déjà bien mobiliser son énergie. La batterie demeurera quasi tout le set dans un registre speedé qui aurait presque été super redondant si “More To Lose” – et ses faux airs de “Born To Hula” – n’était venu joué les empêcheurs de tourner en rond. Nonobstant des échanges avec le public très limités, Powder For Pigeons a rallié à sa cause une poignée de nouveaux fans européens au terme de ses quarante minutes de show et le temps était venu pour nous d’aller refaire le concert dehors avec nos amis festivaliers le temps qu’une autre formation se prépare à nous transporter sous d’autres latitudes.
CASTLE

Le trio US faisait figure d’orphelin ce jour-là à Berlin tant son style aurait collé avec la programmation de bourrins qui était celle du vendredi. Bref, même si la prestation du groupe serait achevée avant l’heure officielle de l’apéro, ils allaient faire monter la température du Foyer avec leur doom stoner plutôt heavy, mais rendu aérien par les vocaux de leur frontwoman Elizabeth qui s’avérera au final une bassiste au groove très efficace. Partageant son micro avec son acolyte Mat qui est en charge du déluge de riffs overdrivés à la guitare, elle mit un gros boulet qui tira le public de l’ambiance gueule de bois qui avait un peu prédominé parmi les troupes présentes dans la salle depuis le début de la journée (le reste du public étant demeuré dehors pour siffler des bibines). Il faut dire que le temps radieux mobilisa ce samedi une bonne partie du public dans le Beergarten : on a connu bien pire comme lieu propice aux échanges en festival. Bref, Mat reprend le micro pour chanter, toujours très concentré sur son jeu lorgnant par moments vers le sludge, et le dernier membre du groupe, Al, à la batterie, envoie du gros bois avec une précision métronomique. Nous sommes rapidement conquis par la bande de San Francisco qui n’en est pas à sa première pépite dans le registre doom stoner. Comme le son que déploie la formation ne tape pas dans le côté le plus inabordable du doom, le public présent se met à hocher du chef en réponse aux incantations maléfiques de Castle. C’est d’ailleurs au beau milieu de ce set que le desert-rocker ayant passé la soirée précédente sans se protéger les oreilles se remit à entendre correctement des deux cages à miel. Déjà auteurs de quelques productions en ligne avec ce qui a été interprété à Berlin, la bande des trois fait preuve d’une maîtrise impeccable de son répertoire en truffant ses titres de soli de guitare bien sentis ainsi que de plans hérités de Black Sabbath (ce qui n’était pas sans nous ramener un an plus tôt avec un autre groupe de San Francisco : Orchid). Un setlist très basique balancé sans fioritures, mais avec une redoutable efficacité, toujours en headbanguant, et l’affaire était entendue : la grand prêtresse aux airs de la Cassandra de Wayne avec sa basse blanche et son gilet en jeans pouvait mettre un terme à son culte sataniste avec la satisfaction du devoir accompli. Un peu d’air printanier allait pouvoir emplir l’espace du Foyer alors que nous allions rejoindre Jesus sur la grande salle pour le premier verset à s’y dérouler en cette ultime journée de frénésie stoner.
STONED JESUS

Les gars de Radar Men From The Moon devaient jouer sur la main stage à cet horaire, mais manifestement ils avaient pris un peu de retard sur la route. On a donc demandé à Stoned Jesus de les remplacer. Même si ces derniers perdent théoriquement cinq petites minutes de set et une place un peu plus haut sur l’affiche, ils raflent au passage l’opportunité de jouer sur la Main stage plutôt que sur la petite scène Foyer… Tout bien considéré, c’est donc plutôt pas mal pour eux. Quelques étourdis n’ayant pas vu l’info ont malheureusement zappé tout ou partie du set de ce groupe… Fallait pas comater sous le soleil dans le Beergarten les gars ! La situation géopolitique en Ukraine est pour le moins tendue, et on pouvait imaginer ses rejetons musicaux se révéler fermés, énervés et aigris. Le choc en voyant se pointer Stoned Jesus sur la scène, tout penauds, n’en est que plus frappant. Les bonhommes sont cools, leur musique est cool, et manifestement ils ne sont pas là pour se prendre la tête (ce en quoi on peut bien les comprendre aussi). Musicalement, Stoned Jesus est emblématique de ces groupes récents, nés dans un maelstrom d’influences assumées, mais qui pour autant ne peut pas être cantonné dans un genre particulier : fondamentalement, ils jouent une sorte de stoner classique à tendance psyché, mais ils prennent des penchants doom dès qu’on a le dos tourné dix secondes, ou s’engagent dans un solo influencé par les maîtres du blues juste après. Et tout ça au service de compos qui fonctionnent plutôt bien, sur un set de trois quarts d’heure qui passe très vite. A l’image de leur musique pleine de reliefs, la prestation scénique des bonhommes ne déçoit pas : Sergii à la basse est à fond dans son trip, il est tour à tour concentré puis monté sur ressort, et le nouveau batteur Viktor, super concentré, vit chacune de ses frappes, qu’il illustre d’un rictus à chaque fois différent. Quant à Igor, chanteur-guitariste-leader-géniteur de ce beau bébé, il assure tout simplement, communique régulièrement avec le public avec son accent sympathique, et plus généralement, colle occasionnellement ses vocaux efficaces sur ses plans de gratte, quand il ne s’engage pas dans des envolées de soli bien sentis. On passera sur son sens de l’esthétique vestimentaire (soit son jean est bien trop slim, soit le bonhomme est très heureux de nous voir…) pour garder en mémoire son talent évident et son oreille bien particulière : alors que le trio quitte la scène, on a le sentiment que ce groupe nous réserve des surprises discographiques pour l’avenir, et encore des prestations scéniques remarquables. Ils en ont encore sous la pédale, clairement…
SARDONIS

Décidément, il y aura eu pas mal de duos sur cette édition du Desertfest ! Sardonis se compose donc assez traditionnellement (si l’on peut dire, s’agissant d’un duo…) d’un guitariste et d’un batteur, et quand ils décochent les premiers accords de “Burial of Men”, c’est-à-dire la même intro que leur dernier album en date, le sobrement nommé “II”, on comprend vite que ces gars-là ne vont pas faire dans le jovial. Gros titre doom assez classique, avec le même riff de quatre notes qui tourne sur un gros tiers du morceau joué à deux kilomètres à l’heure, il part ensuite sur des passages de pur metal, voire des embardées thrash metal (blast beat en option de temps en temps). Et il en va ainsi sur toute la durée de leur set solide : ça bastonne tout du long, c’est gras, c’est lourd… Et c’est lorsque les passages doom se font les plus suffocants que ces assauts rageurs de metal bien saignant se révèlent bienvenus pour reprendre une bouffée d’air frais, à l’image de “The Drowning”, autre extrait de leur second album, alternant tempi super lourds et riffs nerveux. Scéniquement, en revanche, c’est pas la joie : même si Jelle se démène derrière son kit, Roel, le guitariste au look d’assureur en goguette, reste vissé sur ses deux pattes arrières, exprimant par une mimique renfrognée chaque tension de rage contenue dans ses riffs énormes. Faut dire que ses attaques de cordes ont un certain poids, et insidieusement s’emploient méthodiquement à laminer le cerveau des quelques centaines de spectateurs présents, qui n’auront mis que deux ou trois morceaux à rentrer pleinement dans le trip. Deux ou trois titres difficiles à identifier ont été joués, probablement extraits du prochain album (faut dire que la scène étant dénuée de micro, la communication avec le public est inexistante…), et sont clairement dans la même veine. On peut donc s’attendre à un nouveau charcutage en règles. Reste au groupe à essayer de dynamiser un peu son impact “scénographique”, comme disent les pros, et la claque sera juste totale.
SASQUATCH

Un autre fleuron de l’écurie Small Stone monte sur la Main Stage sous nos yeux, à savoir les Californiens de Sasquatch. Le trio, avec ses treize années d’existence, fait partie des vétérans de cette édition, et la robustesse de leur carrière repose aussi sur leur indéfectible fidélité à Small Stone, qui a sorti tous leurs albums depuis leur premier, subtilement appelé “I”, il y a plus de dix ans maintenant. Et faut dire que les premiers albums ont abondamment tourné sur les platines des plus vieux stoner heads d’entre nous. C’est donc avec un large sourire que l’on voit monter les trois angelenos sur scène et dérouler pendant trois quarts d’heure ce qui s’apparente fortement à un best of de leur carrière : ils piochent ainsi dans toutes leurs galettes certains de leurs meilleurs titres, pour le bonheur de tous (autant de titres de leur premier album que de leur dernier en date par exemple). Clairement, les bonhommes jouent la carte plaisir plutôt que la carte promo. Trucker hat vissée sur la tête, Keith Gibbs mène la barque avec une assurance et un engagement qui forcent le respect : ses parties en rythmiques sont juste impeccables, portées par des riffs monolithiques toujours aussi efficaces, et ses interventions solo sont toujours bien senties. Evidemment, on reconnaîtrait ses lignes de chant entre mille, et c’est aussi ce qui aide à distinguer Sasquatch de la “masse”. Derrière, ça joue aussi, même si l’on est surpris de retrouver, aux côtés de Jason à la basse, un batteur redoutablement efficace mais… qui ne ressemble pas vraiment à Rick Ferrante ! Et pour cause : le batteur originel, qui doublait ce soir ses interventions (il est aussi batteur pour le TUEMG de Ed Mundell), étant souffrant, les deux combos ont décidé de recruter un autre batteur ayant le don d’ubiquité, le peu connu mais très doué Dan Joeright : si ce dernier assure méchamment ce set, c’est avec le père Mundell qu’il nous bluffera encore plus un peu plus tard. Mais pour l’heure on continue de déguster le stoner heavy et groovy de Sasquatch jusqu’à la lie. On espère que le groupe se saisira d’autres opportunités à l’image de cette tournée “à deux têtes” pour revenir malmener le public européen avec tant de maestria.
RADAR MEN FROM THE MOON

Après un set aussi carré et robuste, on risque le grand écart de la cervelle, puisqu’on s’oriente vers un trip de space rock psychédélique pur jus. Rien de tel pour préparer une méningite aiguë… Et pourtant, les Desertfest-ivaliers doivent avoir la tête dure et les cages à miel en béton armé, car le public se masse bien nombreux devant la Foyer pour le trio (ici quatuor…) hollandais de Radar Men From The Moon. Finalement, ce changement de créneau horaire les amenant sur la petite scène n’est pas trop préjudiciable, cette salle étant parfaitement propice à une immersion musicale intense – et manifestement le public, composé d’une large part de connaisseurs du groupe, n’attend que ça. Faut dire que la réputation du combo dans ce genre n’est plus à faire, et en tout cas sur les trois jours, peu de groupes ont produit un set aussi immersif et planant – or sur ce thème, la concurrence était quand même là et bien là ! Accompagnés d’un grand échalas dédié à balancer les samples science-fictionnels et autres sons et triturages venus de l’espace, les néerlandais volants envoient les riffs les plus planants qui viennent rebondir sur tous les murs de la salle, pour venir au final se noyer dans les méandres cotonneux des lignes de basse colossales délivrées par l’imperturbable Verkuijlen. C’est d’ailleurs sur cette observation que le bât blessera un petit peu : voir les gars jouer leurs quarante-cinq minutes avec un visage quasi-impassible, en se regardant les uns les autres au mieux, ou focalisés sur leurs godasses au pire, tout ça alors que l’on sort d’un set comme celui de Sasquatch où les gars se donnent à fond vers leur public… le contraste est percutant. D’un autre côté, je vois mal les bonhommes sauter dans tous les sens du haut de leurs amplis alors qu’ils nous amènent sournoisement vers un état d’hypnose au bout des quinze premières minutes du set… C’est donc vraiment juste une perception d’écart entre chaque concert, un contraste d’ambiance dans lequel on se retrouve presque “volontairement pris au piège” (et accessoirement, c’est aussi ce qui rend le Desertfest si attrayant et excitant). Le set des RMFTM déroule donc sans accro, sur une perspective spatiale qui s’affirme petit à petit, et ce n’est que quand les trois quart du public ondulent en mode pilotage automatique, les yeux fermés, en volant à vingt centimètres au dessus du sol, que les bonhommes posent les instruments et nous laissent nous réveiller, encore un peu la tête dans le cul après ce trip aérien.
THE ULTRA ELECTRIC MEGA GALACTIC

Nous allions rapidement nous faire rattraper par un autre trip aérien qui nous enverra à quelques mètres du sol avec la formation d’Ed Mundell qui s’avérera de fait être plus un réel groupe qu’une star de la guitare flanquée d’une section rythmique dans l’ombre. Comme vous avez pu le lire plus haut, c’est Dan Joeright qui officiera ce soir à la batterie et même s’il remplaçait le titulaire du poste nous avions plutôt une pointure devant nous. A la basse, et détenteur du seul micro, c’est l’incroyable Collyn McCoy qui va nous ravir d’une présence scénique hors pair ainsi que d’un jeu de toute beauté aux doigts principalement (les types qui détestent les bassistes à médiators seront aux anges d’apprendre ceci). Dès le début du set tous les regards convergent vers le rouquin qui a quitté Monster Magnet après “Mastermind” ; ils ne tarderont pas à le lâcher pour se consacrer aussi aux deux autres membres de ce trio de ténors qui assurent décidément sur scène autant que sur les rares traces laissées jusqu’à présent dans le sillon. Au passage, le merch déplorera très rapidement une rupture de stock de “Through The Dark Matter” leur dernière galette arrivée à Berlin toute fraîchement sortie de presse donc pas encore totalement sèche. Ce genre d’indice nous indiquera que nous n’avons pas été les seuls à être carrément transportés par ce véritable orgasme musical qui nous aura captivé durant près de cinquante minutes. Un pur régal du plus pur style jam et au sein duquel nous aurions droit à un authentique jam d’anthologie. Le public transcendé adhérant à ce show somptueux ne s’y trompait pas. D’ailleurs Jean-Paul Gaster – à nos côtés dans le public – partageait ce ressenti. Visuellement, nous étions interpellés par les énormes gouttes de sueur que l’ex-Atomic Bitchwax laissait glisser le long de ses doigts magiques. Il faut dire que les spots verts ou rouges fixés sur lui durant ses longs soli mettaient particulièrement en avant ce qui était bien plus qu’un détail. Il faut dire que – comme vous le lirez dans l’interview que nous avons eu la joie de faire avec ces très sympathiques rockers – ces Californiens ne sont pas les plus grands adeptes du soleil et de la chaleur de leur lieu de résidence. Mais passons au-delà de ces quelques considérations d’ordre esthétique pour consacrer quelques lignes au rock psychédélique instrumental qui était balancé dans les enceintes de la Main Stage. Les trois pointures n’avaient inscrit “que” sept titres sur leur setlist et du premier accord au final épique sur “Stratus”, une reprise du jazzman Billy Cobham, nous avons été transcendés par leur son à la limite de la jouissance. C’était précis, c’était technique et c’était – et est toujours – magnifique aussi en terme de compos. “The Third Eye”, tirée de l’album éponyme, constituant certainement la meilleure plage de cette extraordinaire performance intégralement musicale durant laquelle seul Collyn – et son t-shirt des Bruins – s’exprimera au micro laissant Ed concentrer son talent sur sa Stratocaster. Les longues jams planantes ayant aussi laissé quelque espace à des titres plus carrés comme “Exploration Team”, “7000 Years Through Time” ou “Rockets Aren’t Cheap Enough’ qui firent figure de véritables leçons de rock’n’roll dispensée par des mecs humbles qui n’avaient en rien l’air de professeurs ès Musique. Avec Clutch plus tard dans la soirée, nous aurons deux sets de toute grande classe interprétés par des cadors de la zikmu ceux-ci contrasteraient avec les performances plus instinctives voire spontanées que livrèrent des groupes plus orientés du côté obscur. Et c’est là que nous devons tirer un grand chapeau aux organisateurs et programmateurs qui ont fait se côtoyer des formations proches, mais pas similaires, durant trois jours sans jamais nous lasser la moindre seconde. Qu’ils en soient ici chaleureusement remerciés : vous faite un boulot remarquable !
THE GRAVIATORS

Après avoir littéralement été envoutés par Ed et sa bande, nous redescendons dans l’underground Foyer pour une prestation fort attendue. Il faut dire que The Graviators bénéficient d’une sacrée visibilité en ayant intégré l’écurie Napalm depuis la plaque précédente déjà. Il faut ajouter aussi que les visuels de toute beauté qui ornent leurs pochettes aident sans doute ce groupe à atteindre son public avec ses productions déclinées en moult exemplaires tous plus beaux les uns que les autres. Bref, dans le petit monde du stoner, les Suédois peuvent se targuer d’avoir réussi rapidement à toucher un grand nombre de rockers au-delà même de la scène des intégristes du mouvement. Ils déploient un hard rock daté, mais ô combien efficace que ce soit lors de leurs prestations scéniques ou en heavy rotation dans le salon voire dans la voiture. Ces forts sympathiques velus ont aligné une centaine de shows depuis leur naissance il y a quatre ans et ils font preuve d’une sacrée envie de continuer à répandre leurs riffs aux quatre coins du globe (vous en saurez un peu plus en lisant l’interview réalisée par nos soins dans la capitale allemande). Bien qu’au terme d’une tournée intense et arrivés en fin d’après-midi sur les lieux, nos potes grimpent sur scène en super forme et prêts à en découdre durant trois-quarts d’heure avec un public encore perdu dans les volutes du show précédent. Ils envoient donc le gros son d’entrée de jeu pour mieux souligner leur présence et la mayo prend très rapidement. Il faut dire que devant des spectateurs ayant fait le déplacement pour se taper du rock daté, leur style est particulièrement bien adapté. Les plans plus instrumentaux s’aventurant sur les rives du fleuve doom ravirent même une partie du public se trémoussant rapidement de manière lancinante alors que Johan, le bassiste de la bande, envoyait du gras sur Ricken à torse nu. Le lascar n’avait pas complètement tort car la température avait pris un sacré coup d’accélérateur depuis que les chevelus et leurs chaînes de portefeuille se balançaient sur scène dans un registre rappelant le Sabbath des débuts. Avec “Motherload” fraîchement sorti (moins d’un mois avant la manifestation teutonne) le groupe a balancé du son de l’intégralité de ses propres productions pour le plus grand plaisir de l’auditoire présent. Il est à noter que les puristes ont été ravis de voir qu’Henrik, l’homme assis derrière ses fûts, nous envoyait son martellement sur du matos utilisé jadis par le batteur d’un groupe qui aura marqué son temps : The Awesome Machine. Grosse sensation donc avec nos amis venus du froid même si Niklas, au chant, peine parfois à savoir où se placer sur la petite scène du Foyer lorsque le groupe se lance dans d’épiques plans instrumentaux leadé par leur guitariste Martin dont le solo sur “Leifs Last Breath / Dance Of The Valkyrie” restera un des meilleurs moments de cette prestation qui a envoyé du beau bois. Le public ayant bien adhéré à leur style avait l’air un peu groggy lorsque la lumière des plafonniers de l’Astra lui a rappelé qu’il était désormais l’heure de retourner du côté de la grande scène pour se brancher sur une autre longueur d’onde.
RADIO MOSCOW

Après la prestation un peu brute (dans tous les sens du terme, en fait) des Suédois, on se translate pour la énième fois de ce week end de quelques dizaines de mètres pour se poster devant la Main Stage, avec l’assurance que le concert qui arrive sera classieux, tout simplement. Et ça ne manque pas. Parker Griggs monte sur scène avec ses deux mercenaires – une belle paire de zicos néanmoins, dont on espère une plus grande longévité dans la formation ricaine que leurs prédécesseurs dans la fonction ! Pourtant, le père Griggs a franchement plus une tête de nounours gentil que de frontman tyrannique de son power trio… Faut dire que Radio Moscow c’est lui, et basta ! Par contre, musicalement (“instrumentalement” ?), faut pouvoir le suivre, et on peut confirmer que ses récentes recrues (à peine un an) ont du répondant. Stratégiquement, commencer son set avec un morceau inconnu (probablement extrait de sa nouvelle galette, pas encore sortie au moment du concert) relève en tout cas au mieux du faux-pas, au pire d’une faute de jugement… mais c’est fait avec panache, donc on excuse tout, et ce démarrage un peu boiteux est vite compensé par le dynamisme du titre (un morceau de blues-rock bien heavy, achevé par un solo de gratte qui mettra tout le monde d’accord). Pour la suite, la setlist s’avèrera redoutable d’efficacité et de variété, même si elle se repose très largement sur un album en particulier : de manière assez surprenante l’assez ancien “Brain Cycles” (2009) est mis à l’honneur sur la moitié de la setlist environ ! Faut dire que l’album le vaut bien, mais quand même… Il y en a eu trois autres depuis ! Mais ne gâchons pas notre plaisir d’être là et de regarder les bonhommes devant nous se la donner. Peu de sourires sur les visages des deux gringos en mission “rythmique” sur le côté gauche de la scène : ces gars là ne sont pas ici pour la déconne – ça bastonne, ça groove, ça jamme, mais ça plaisante pas… Un peu plus débridé, Griggs se lâche sur des soli juste remarquables et amène vers des impros en mode dérapage contrôlé. Ses parties de chant ne sont pas forcément son atout principal, mais sa voix subtilement rauque et chaleureuse fonctionne parfaitement. On ressort de cette heure de concert bien remonté, remplis d’ondes super positives, et parés à attaquer le sprint final de ce Desertfest avec le sourire. Super musique, mais aussi super vibes.
THE MACHINE

Après les vibes moscovites, c’est d’autres vibes qui allaient emporter le public. Celles-ci viennent des proches Pays-Bas et sont elles aussi le fait d’un trio. Nous sommes quelque peu déstabilisés lorsque nous nous pointons devant la scène et apercevons le bassiste de la bande arborer un survêt, des chaussettes de “cascadeur”, un couvre-chef de spéléologue et sa Rickenbacker rouge. La touche spéléologue est de fait une caméra à la mode de nos jours avec laquelle il jouera – et donc enregistrera en vue subjective – la totalité du premier titre “D.O.G.” issu de leur dernier opus qui engageait un véritable festin psychédélique. The Machine a carrément hypnotisé le public comprimé dans la petite salle faisant face au Foyer. Cette parfaite communion entre le groupe et ses spectateurs nous a immédiatement ramené un an plus tôt lorsque My Sleeping Karma avait aussi transformé cette salle en chapelle hallucinée, baignée par des ambiances bleutées et au cœur de laquelle les musiciens et leurs fans ne faisaient plus qu’un en livrant leur culte au Dieu stoner. Ce show restera comme l’un des plus intenses de ce festoche dans le registre de la dévotion du peuple stoner avançant sur place les yeux grands fermés pour capter mieux encore les sons envoyés par la sono. Nous devons ici confesser qu’une fois la centaine de prises de vues effectuées, nous avons déserté l’Eglise pour nous rendre de l’autre côté du rideau magique afin d’assister à la balance de la tête d’affiche. Nous étions donc deux, plus le type qui pousse les boutons sur la console, à nous gaver de Clutch : Clutch en privé et oui pardon The Machine nous nous sommes égarés quelques instants, mais maintenons que c’était pour la bonne cause, soit notre bonheur. Cette interlude effectuée nous rejoignîmes l’antre bouillonnante pour nous frayer un passage jusqu’aux enceintes et nous laisser happer par la machine. Ca a été presque divin : soyons clair ! Avec un setlist réduit, vu la longueur des titres interprétés, The Machine assuma pleinement son rôle de dernier groupe avant le headliner ! Et ils éclipsèrent presque l’attente du public en le ralliant à sa cause. Bel effort réalisé quasi uniquement avec des titres issus du split avec Sungrazer sorti l’an passé et de “Calmer Than You are” leur dernier long format en date sorti un an avant le split qui était le “chant du cygne” de la formation qui le partagea avec eux. Le final “Sphere (… or Kneiter)” a été grandiose et nombreux furent ceux qui avaient oublié à ce moment là qu’une formation du Maryland allait encore prendre la scène d’assaut pour le dernier acte musical d’un festival absolument génial dont The Machine restera un des grands moments. Le gros son psychédélique a encore visiblement de beaux jours devant lui.
CLUTCH

Tête d’affiche incontestable de cette édition du Desertfest, Clutch aura laissé une trace sur cet événement… et ce avant même le concert ! Professionnels jusqu’au bout des ongles, les zicos sont arrivés sur le site en tout début d’après-midi (quasiment douze heures avant leur horaire de début – tandis que certains groupes sont encore sur l’autoroute à siroter des bières dans le van une heure avant leur set…), et ont assuré la promo de manière impeccable (interview à venir sur Desert-Rock !), et trituré leurs instruments tout l’après-midi ! Fallait voir JP Gaster jouer sur son mini-kit de batterie installé derrière le bus pendant des heures et des heures, seul avec ses écouteurs, ou Dan Maines jouer sur sa basse dans un fauteuil tout l’après-midi… Clairement, on n’arrive pas à ce niveau de reconnaissance par accident, c’est le message que l’on retiendra dans un premier temps.
Mais arrive minuit, et là c’est la musique qui va parler. Clutch clôture complètement cette édition (après eux, plus personne ne joue… tel Attila et ses Huns, plus rien ne repousse après leur passage !), et Fallon – vêtu d’un t-shirt Fu Manchu du meilleur effet – commence par féliciter dès son arrivée le public qui “est arrivé jusqu’au bout” de l’événement. C’est sur l’efficace “Earth Rocker” que le groupe entame son set, et il n’en faut pas beaucoup plus pour se mettre le public dans la poche. Avec “The Mob Goes Wild” d’affilée, c’est l’efficacité qui prime : en vieux routiers expérimentés du live, le quatuor enchaîne une claque suivie d’un uppercut… pour mieux cueillir les derniers récalcitrants avec un bon vieux coup de coude derrière la nuque bien vicelard, avec le groovy “Cypress Grove” – censé montrer aux sceptiques éventuels que Clutch excelle dans de nombreux domaines. Démonstration est faite, on peut maintenant se lâcher, et revenir à “Earth Rocker” pour quelques titres. A partir de là, on atteint l’effet cliquet : le public est convaincu, reste à le maintenir en tension pour le reste du set ; une formalité. Mais le groupe n’est pas venu pour cachetonner facile, ils ressortent donc des placards un bon vieux “Spacegrass” (un titre qui doit bien avoir vingt ans maintenant !) et dissémine d’autres perles dans cette setlist qui reste fortement connotée “Earth Rocker”. On aura entre autres droit au groovy “Subtle Hustle”, qui fait danser quasiment tout le public, tout comme l’irrésistible “Gravel Road” et son boogie rock impeccable, mais aussi à “Burning Beard”, qu’il est très agréable de revoir apparaître dans la setlist, tant il se mêle bien aux derniers titres du groupe. Pas de surprise concernant le jeu de scène : Fallon (at)tire à lui tous les regards en arpentant la scène de long en large, en haranguant le public, et plus globalement par son charisme naturel incontestable. A ses côtés Dan Maines reste le plus souvent en fond de scène concentré sur ses lignes de basse, à l’image de Tim Sult, qui occasionnellement s’avance en front de scène… pour actionner l’une de ses pédales d’effet ! Jean-Paul Gaster, lui, vit complètement son set : ses mimiques et ses sourires tandis qu’il aligne des plans irréels sont toujours un spectacle hypnotisant. Il trouve bien sa place sur ce concert, avec des impros bien senties ici ou là, un petit solo des familles, etc…
Sur la fin du set, Clutch finit de célébrer la dernière production du quatuor yankee, avant de voir le groupe quitter la scène après presque une heure trente qui a parue ne durer que quinze minutes. A leur habitude, le groupe revient pour un rappel constitué de titres définis au dernier moment, en l’occurrence “Unto The Breach” et – on aurait eu du mal à s’en passer – un “Electric Worry” purement dévastateur. Le groupe salue enfin généreusement le public avant de s’éclipser, et de mettre ainsi le point d’arrêt scénique de cette nouvelle somptueuse édition.

Nous reste, dans l’euphorie générale (Clutch a vraiment mis tout le monde dans un super état d’esprit), à arpenter une dernière fois notre terrain de jeu de ces derniers jours, en saluant les exposants, les copains, les GO (Gentils Organisateurs – dénomination parfaitement adaptée ici !), tout en espérant revoir tout ce beau monde pour une édition 2015 dont la date est déjà validée !
Chris & Laurent
Après avoir parfait un peu notre culturisme dans certains lieux touristiques de la capitale allemande et avoir grillé quelque argent dans les échoppes des agitateurs underground du Kreuzberg, vos deux reporters de chocs ont repris leur bordel pour une deuxième journée d’orgie à la gloire du Dieu stoner. A peine le temps de passer en coulisse prendre la température – qui était en parfaite osmose avec le temps radieux qu’il faisait au dehors – et de saluer le fort sympathique crew du fest qu’il était déjà l’heure de rejoindre le Foyer sur la scène duquel les festivités s’apprêtaient à débuter.
RED STONER SUN

Le trio de vétérans nous avait interpellé avec son patronyme que nous trouvions bien peu inspiré pour tout dire. Un bref regard dans le rétroviseur pour constater que c’est il y a seize piges que le blaze du groupe a été choisi et une petite tape derrière la nuque dès les premiers accords nous remirent rapidement les idées en place et gomma – telle une baquette magique – toutes nos appréhensions à l’égard de ce groupe. Red Stoner Sun déploie un savant mélange de stoner très traditionnel, mais pas daté, et de spacerock à l’allemande : c’est foutrement efficace et le public était déjà conquis au terme d’un premier titre savoureux qui n’était pas sans nous rappeler Kyuss d’après “Blues For The Red Sun”. Quelques incursions en terres grungisantes, quelques parties chantées par l’homme assis derrière la batterie, une autre par celui aux commandes de la six-cordes, les electro-harmonix en action, l’ambiance underground de la petite scène et l’affaire était dans le sac. Eazy, Hensen et Marceese avaient gagné la partie ce qui n’était pas joué d’avance vu les onze longues années qui séparent les deux dernières productions de la bande du Kreuzberg. A en juger par les sourires que nous croisons dans la salle alors qu’il est à peine l’heure du goûter, nous en concluons que nous ne sommes pas les seuls à avoir apprécié cette première prestation de la journée qui laissait augurer le meilleur pour la suite et une soirée qui s’annonçait longue et riche en décibels.
THE MOTH

Pas de Main Stage pour les deux premières prestations de la journée ; un changeover aura donc lieu ce qui nous laisse le temps de sortir nous aérer les poumons, de papoter un peu avec nos potes ayant fait le déplacement depuis la francophonie et de soigner notre bronzage sous le soleil teuton. La clope finie, les protège-ouïes remis pour certains et les appareils photo en mains, nous réintégrons le Foyer pour une seconde formation allemande : The Moth. Le jeune trio de Hambourg n’ayant à son actif qu’un seul album, “They Fall”, distribué de manière confidentielle – pour cause : il a été tiré à 100 copies selon la bio – nous ne savions pas encore très bien à quoi nous serions confrontés lorsque Cécile, Freden et Tiffy monteraient sur scène. Nous avions toutefois visé juste : ce serait bourrin et le shirt de Spirit Caravan n’était pas sur scène que pour la forme… Et, pour notre plus grand plaisir, ça a été bourrin : quelle claque ! Le public – encore congru dans la place – en a eu pour son pesant de gras. Les trois complices balancent un sludge bien lourd empreint de gimmicks doom et c’est du plus bel effet. La bassiste en short envoie du bois sur trois cordes seulement – et nous ne voulons pas entendre, dans l’assistance, des remarques sur la limite des capacités multitâches de la gente féminine – et partage le chant avec son collègue guitariste en empruntant des registres similaires. L’osmose des chants est parfaite et donne un rendu fort dynamique très plaisant. Derrière le duo à micros, ça envoie du lourd à la batterie et le headbanguing se généralise très rapidement dans l’assistance car, les enfants, c’est une prestation d’excellente facture qui nous est délivrée par ce groupe actif depuis 2012 seulement. L’attitude terriblement rock’n’roll est au rendez-vous tout au long de ce set de fou et, même si les interactions verbales avec le public sont quasi-inexistantes, nous sortons du chaudron en mode smiley et les oreilles un peu entamées quand-même. Une deuxième belle surprise pour cette journée avec deux formations que nous n’attendions pas spécialement, mais qui ont emporté notre adhésion grâce à l’intensité et à l’authenticité de leurs performances. Auteurs de compositions particulièrement bien abouties (un peu comme “The Moth” qui demeure un des meilleurs titres joués par les hamburgers, qui ont pioché dans le registre plutôt “pied au plancher” de leur modeste répertoire), ces allemands, comme leurs prédécesseurs, ont prouvé à leur tour la richesse du style que nous chérissons sur ces pages.
BLACK RAINBOWS

A peine remis de la performance de The Moth, nous dégourdissons nos gambettes – la nuque c’est fait – et partageons nos impressions avec nos potes sur place puis traversons le rideau tendu entre les deux lieux consacrés à la musique pour aller constater de visu de quoi les Transalpins de Black Rainbows sont capables sur scène. Ca fait un moment déjà que le trio est actif et que nous écoutons les nombreuses productions qu’ils ont disséminées depuis presque une dizaine d’années, mais rares ont été les occasions – pour nous – de les rencontrer en chair et en os. Nous attendions des plans fuzz et psychédéliques directement influencés par les maîtres Kyuss et, Alberto, Dario ainsi que Gabriele nous ont donné exactement ce que nous étions venu chercher. Très traditionnels dans leur approche et pas franchement novateurs, les Italiens nous ont envoyé en direct dans les seventies de manière plaisante car ils savent plutôt bien faire les choses. Au terme de cette prestation durant laquelle les soli de guitares furent nombreux et les parties chantées réduites, jamais nous n’eûmes l’impression d’avoir affaire à une pâle bande de repompeurs, loin de là même. Une belle débauche d’énergie envoyée par des vétérans du stoner transalpin qui font preuve sur scène aussi d’une excellente maîtrise de leur art en envoûtant leur public dans leurs volutes psychédéliques. Un groupe de stoner confirmé, qui a balancé un stoner dans les règles de l’art, dans un festival tout entier dédié au stoner : la formule était programmée pour marcher et ça a rudement bien marché ! Grazie mille é alla prossima ragazzi !
GRANDLOOM

L’année dernière on avait ironiquement glosé sur le retard “no panic” du leader de Danava qui avait repoussé leur concert aux dernières heures de la nuit, et on était un peu plus fâché de la défection de Witchcraft, une des têtes d’affiche du festival, qui avait annulé deux jours avant… Cette année, tout semblait rouler, jusqu’à l’annonce le vendredi matin de l’annulation des français de Huata (dont un des musiciens se retrouvait dans l’incapacité formelle de rejoindre Berlin), qu’on se faisait une joie de voir sur scène. La plupart des festoches auraient rallongé de 15 minutes les sets des groupes suivants pour rattraper le créneau laissé béant dans la programmation, mais Sound Of Liberation est d’un autre calibre, et a bataillé pour dégoter en quelques heures un remplaçant de choix, avec Grandloom. Le groupe n’est pas avare de prestations scéniques (et nous-mêmes on les avait vus au Up In Smoke 2013), et c’est avec la banane qu’ils montent sur scène pour dérouler les premiers accords de leur stoner rock psyche instrumental. Les premiers titres nous emmènent de manière assez jouissive dans leur univers musical, une sorte de Karma To Burn un peu plus déstructuré, plus groovy et ouvert aux impros. En tout cas, tout ceci est foutrement carré, ça jamme, c’est aéré et souple, certes, mais c’est rondement bien mené par un trio qui se connaît sur le bout des doigts (même si le batteur a incorporé le trio depuis moins d’un an). Scéniquement, alors que Thomas est la plupart du temps noyé dans un rideau de cheveux et ondule / headbangue selon les rythmes des titres qu’il cisèle avec sa gratte, Hans à la quatre-cordes est plus extraverti, affichant un sourire ultra-brite constant, sans négliger ses lignes de basse groovy et rondes. Par ailleurs, la synchro basse-batterie, un élément clé, on le sait, pour ce type de format instrumental en trio, est d’une puissance remarquable (il faut voir le batteur ne pas lâcher Hans du regard une seule minute). Dans ce genre musical, on a tendance à penser qu’avec Grandloom on ne peut pas se tromper : psyche et planant mais pas trop ennuyeux, propice aux jams mais jamais démonstratifs ou trop longs, alternant différents tempo et ambiances musicales… Une prestation juste impeccable, même si dans un genre radicalement différent de Huata, qu’on pleure toujours un petit peu quand même… Pris dans leur élan, les allemands qui voient leur set toucher à sa fin se lancent néanmoins dans un titre long, tendance psyche planant… et emplafonnent ainsi le timing ! Pas grave, personne ne leur en tirera rigueur.
GOZU

Gozu, éminent membre du roster Small Stone, se pose en pur représentant du gros stoner ricain emblématique du label de Detroit, MI. Avec deux albums sous le bras, le groupe a bien vite été catalogué dans la partie “sans surprise” de cette écurie de champions : Small Stone compte son lot de groupes très diversifiés, mais aussi une poignée de groupes musicalement assez carrés, qui se retrouvent derrière une vision partagée du gros rock – un truc assez crasseux, doté de riffs acérés presque metal, et des compos catchy et percutantes qui sentent bon l’americana. Et bien pas de surprise donc avec Gozu : c’est exactement ce qu’ils nous donnent en pâture. Mais avec la manière ! Les gars tiennent la Main stage comme si c’était leur propre salon – ils sont ici chez eux, à l’aise, ils contrôlent. Et heureux d’être là aussi, ça se voit, en particulier chez Gaff, leur charismatique frontman. Ce dernier mène les hostilités avec maestria, redoutable en guitariste rythmique et remarquable pour sa voix puissante et subtile à la fois, une qualité rare qui place Gozu dans une catégorie un peu à part. Le reste du groupe se donne à fond, et enquille les morceaux issus alternativement de leurs deux albums (de mémoire, quasiment moitié-moitié du set). De ce maelstrom d’une efficacité redoutable, on se rappellera en particulier le viral “Meth Cowboy” enchaîné à un percutant et groovy “Mr Riddle”, mais le reste du set n’est jamais en reste. Un groupe généreux sur scène, professionnel et efficace. Ca manque peut-être un peu de chaleur dans la relation au public, mais dans le style, c’est juste inattaquable.
PRISMA CIRCUS

Un move jusqu’au Foyer – désormais bien rempli – pour aller nous confronter aux Ibères pas rudes de Prisma Circus. Nous avions déjà croisé le quatuor avant qu’il ne monte sur scène et la tension était perceptible. Il n’y avait pourtant pas de quoi car le public du Desertfest est toujours bienveillant et les Espagnols sont plutôt talentueux, n’empêche : Alex, Joaquin et Oscar ont gravi les trois marches les séparant du sol avec la boule au bide et ont débuté leur set dans ces conditions alors que franchement il n’y avait pas à se faire de bile. Bon, ce sentiment bizarre qui était perçu par les spectateurs s’est heureusement estompé au cours de leur prestation pour le plus grand bonheur de tous. Plutôt statiques sur scène, et drôlement harnaché pour leur bassiste et chanteur qui avait la sangle de sa Rickenbacker autour de la taille pour un jeu quasi-vertical, le trio à la dégaine datée a délivré une performance de rock psychédélique très orientée jam dans le plus pur esprit des lointaines seventies. Ca fleurait bon le MC5 dans la capitale économique de l’Europe et certains de nos potes n’allaient pas cesser de tarir d’éloges à l’endroit de ces garçons qui alignèrent peu de titres au total, mais étirèrent avec panache des plages extraites de leurs deux productions : le long format “Reminiscences” sorti l’an passé et son cadet de quatre titres sobrement intitulé “Prisma Circus” dont “Paradox” fût surement le point d’orgue. Après les derniers accords du bien nommé “Asylum’s Gate”, le moment était venu de glisser vers le côté sombre de la planète stoner pour un programme nippon ni mauvais qui allait satisfaire les amateurs de gras nombreux dans l’assistance, à l’heure habituelle à laquelle les concerts de rock débutent alors même que nous n’en étions qu’à la moitié de cette journée de dingue.
CHURCH OF MISERY

Les japonais de Church Of Misery investissent une mainstage finalement assez dépouillée, baignés dans une pénombre et des contre-jours ajoutant à l’aspect lugubre de leur réputation. L’édition du Desertfest de cette année est moins orientée doom que celle de l’année dernière, et tandis que nos oreilles résonnent encore des accords de stoner pur jus des ibères Prisma Circus, le choc musical est rude dès la première déflagration nippone. Le son est gras, dense, et les japonais sont possédés, débridés (faut dire qu’il auront traîné sur le site pendant deux jours, au milieu du public, tout calmes et souriants – le contraste est d’autant plus marquant…). On est plutôt contents de retrouver au micro Hideki Fukasawa, après le passage de Negishi pendant quelques années (dans la carrière du groupe, ce poste n’a jamais été très pérenne). Tandis que ce dernier faisait office de fou dangereux derrière son micro (ce qui finalement n’était pas un casting si stupide au vu des paroles déjantées du combo…), Fukasawa est plus posé, plus “incantatoire” aussi, et son chant plus “doom” paraît mieux rendre justice à la noirceur de la musique du combo. Il ne se met pas non plus autant en avant que son prédécesseur, et la maîtrise scénique paraît désormais mieux partagée entre les musiciens : Tatsu Mikami, jouant comme à son habitude avec sa basse au niveau des chevilles, est toujours bien à fond et pas avare en poses metal bien cliché, tandis que Ikuma Kawabe est plus introverti mais pas moins impliqué ni efficace, à l’image du batteur, perdu en fond de scène et abattant ses rondins dans une ambiance lumineuse toujours aussi sinistre au fil du set. Le groupe jouera une demi-douzaine de titres pendant un peu moins d’une heure (faut dire que les bonhommes ont peu de compos sous la jauge des six minutes…), dont on retiendra surtout les classiques issus de “House Of The Unholy”, le puissant “Born to Raise Hell” (chargé comme d ‘hab’ de soli impeccables mais aussi d’interventions “space” au synthé de Fukasawa…) ou l’incontournable et pachydermique “El Padrino”. Les nouveaux titres joués ce soir ne mettent pas autant en transe que les anciens, même si le set n’a pas faibli un seul instant, et que le public headbanguait comme un seul homme au moindre riff. Belle efficacité sur ce set, parfaitement positionné dans le début de soirée pour faire un peu monter la tension musicale suite à un début de journée que l’on pourrait presque qualifier de “bon enfant”. Finie la déconne, la suite de la journée sera grasse ou ne sera pas !
HULL

Le premier acte de cette programmation garantie zéro pourcent light était assuré par l’incroyable quatuor de Brooklyn qu’est Hull et il était écrit que le desertrocker qui se pointe sans protection auditive à leur show n’aurait pas les oreilles débouchées avant le lendemain. Je vous laisse imaginer la puissance employée par ces ricains pour nous ramoner les cages à cérumen. Alignés, faisant front au public, les trois micros réglés à hauteur d’homme attendirent quelques instants avant que montent ces fous furieux sur les planches du Foyer. Le public, clairsemé certes, était néanmoins très réceptif au tabassage en règle que le groupe allait déployer tout au long d’un set placé sous le signe de l’extrême violence. Car si la formation sait être subtile et presque aérienne sur disque, le setlist ne laissa aucune place à leur répertoire apaisé, et concentration fût effectuée sur les titres les plus rentre-dedans. Ce fût donc magique pour une partie de l’auditoire et certainement pénible pour ceux qui n’étaient pas dans le mood tant certains plans empruntés au vieux thrash étaient éloignés de la galaxie stoner. Avec hargne, les frontmen se sont succédés, voire même joints, pour vociférer leurs textes malsains sur un véritable déluge de riffs ravageurs et de rythmiques assassines. Le pays des Bisounours semblait à mille lieux de l’Astra alors que Hull déployait la quintessence de son mix de sludge, de thrash et de plans doomesques dont le sublimissime “Beyond The Lightless Sky” qui est une pépite du genre (et qui tombait fort bien à propos à ce moment de la soirée). Si Prisma Circus avait marqué certains esprits, ces Américains allaient en marquer d’autres qui allaient opérer une véritable razzia au Hippie Market pour acquérir leurs œuvres dont le dernier EP en date “Swamp Goat” dont l’unique plage “The Legend Of Swamp Goat” a été envoyée sur scène durant un set sanglant qui vit le groupe se dépenser sans compter pour notre plus grand bonheur.
CAUSA SUI

La soirée commence à prendre des tournures de boucherie cérébrale, avec les déflagrations successives de Church of Misery et Hull, et à venir Kvelertak, Elder et Mantar. Compréhensifs (et magnanimes) l’orga du Desertfest a eu la bonne idée de nous coller une rasade de CAUSA SUI au milieu de cette orgie, afin de calmer un peu les tympans et solliciter un peu plus les neurones. Faut dire en plus que le concert de ce soir est exclusif, et connaissant la réputation live du combo, on ne peut que saliver d’avance. En se posant devant la mainstage, on accueille donc avec bienveillance les premiers voluptueux accords du combo danois. Scéniquement, le light show est chiadé, hypnotisant, avec des projections immenses sur le backdrop magistral ornant le fond de scène. Faut dire que si on comptait sur les musiciens pour participer à l’animation scénique, on serait fort déçus, tant leur agitation sur scène s’apparente à celle de phasmes apathiques pendant leur sieste : les musiciens sont concentrés, se regardent entre eux occasionnellement, mais plus globalement s’immergent dans leurs nappes soniques pendant la poignée de titres que leur heure de concert leur permet d’aligner. Musicalement, ça plane haut, très haut : le psych-rock du quatuor est hypnotique, séduisant et lancinant, et le public, qui ondule presque inconsciemment au rythme des morceaux, semble apprécier. N’ayant pas eu l’opportunité d’écouter leur dernier album, le morceau qui m’est apparu le plus intéressant et représentatif fut cette interprétation de haute volée de “Red Valley”, un titre qui sonne vraiment comme une chute studio psyche issue du “…Circus…” de Kyuss, sans le chant of course, et se terminant par un solo de gratte presque Hendrixien impeccablement emmené. Même si ici sur Desert-Rock on n’est pas du genre à coller des allusions à Kyuss (ou QOTSA d’ailleurs) à tout bout de champs pour définir des artistes, les échos de la formation du haut-désert californien résonnent occasionnellement à nos oreilles sur plusieurs passages du set, qu’il s’agisse d’attaques de batterie rageuses, d’un son de guitare “familier”, ou plus globalement de rythmiques heavy et enlevées. Mais le tout sonne comme du miel sur nos petits tympans musclés, et nos synapses, reposées, disent en cœur “merci Causa Sui”. Une belle expérience scénique.
ELDER

Retour dans l’antre qui pue la sueur de dessous les aisselles pour une nouvelle débauche d’énergie en perspective avec la formation de Boston. Nous vous l’avions dit : le vendredi c’était la journée du gros son qui poutre et cette nouvelle salve pourtant attendue allait nous laisser un peu dubitatif. Non pas que la formation soit en petite forme ou que les compos alignées ce soir-là soufrent d’un quelconque manque d’inspiration voire de talent, non nous croyons que l’alignement Moth, Grandloom, Church Of Misery et Hull avait grandement entamé notre côté gras. La perspective de se taper Kvelertak au dessert a aussi joué son rôle bien évidemment. Nous avons goûté au stoner-doom du trio, mais ne sommes pas pour autant ressorti du show avec un sourire béat aux lèvres. La performance des américains était d’ailleurs plutôt de bonne facture et la foule compacte devant la scène ne partagera à coup sûr pas le sentiment des desertrockporters que nous sommes. Car, tandis que les gars secouaient leurs tignasses sur scène en alignant des titres longs, remplis de riffs de grattes et de vrombissement de basse, la foule hurlait son plaisir durant les longues plages hypnotiques. Peut-être attendions-nous d’atteindre un autre niveau dans la violence, car soyons honnête : la formation n’a pas démérité une seule seconde. Promis, la prochaine fois on fait dans le léger avant de s’envoyer une rasade d’Elder sur scène.
KVELERTAK

Nombreux étaient ceux qui avaient été interpellés par l’arrivée du sextuor norvégien sur l’affiche de cette fiesta dédiée au stoner et aux genres voisins tant Kvelertak semble éloigné de la tradition de ce style. Il se trouve qu’en dépit de son étiquette peu propice à agiter les foules stoner, la formation qui se produisait en tête d’affiche a fait un carton plein. Le public stoner – que l’on sait par ailleurs peu sectaire – a carrément pris son panard durant le show intense qu’a délivré la bande de Scandinaves. Même en s’inscrivant dans son registre usuel qui emprunte au punk, au metal, au hardcore, au death – et nous en passons – nos lascars n’avaient pas usurpé leur place d’headliner de la soirée. Ce fût magique, voire même au-delà de ça. Tout débuta avec l’arrivée de leur hurleur paré de sa mythique tête de hibou – c’était chouette dès le début – au milieu de ses acolytes pour envoyer “Åpenbaring” en ouverture soit le premier titre de leur dernier effort en date : “Meir”. Et le ton était donné : ça allait poutrer non-stop durant la prestation de Kvelertak et les spectateurs n’auraient guère de répit durant presque une heure et demie ; remarquez nous en aurions bien repris une petite dernière pour la route, mais bon, ça faisait déjà super plaisir de se taper un show avec cette formation en haut de l’affiche plutôt qu’en ouverture d’une grosse pointure ricaine. Alors après une ouverture sur les chapeaux de roues, les Norvégiens ont envoyé une bonne moitié de leur dernière production : “Kverlertak”, “Spring Fra Livet”, l’imparable “Undertro” ainsi qu’une poignée d’autres missiles plus des morceaux plus anciens – tout est relatif – datant de leur premier chef-d’œuvre. En plus d’être talentueux en matière de composition, ces types ont le toupet d’avoir une sacrée prestance sur scène en n’ayant de cesse de bouger pour bien remplir l’espace (même si c’est toujours plus aisé à six qu’à trois). Ils ont exhibé de superbes instruments qui ont fait pâlir d’envie les zicos présents dans la place et même si leur frontman ventripotent qui jouait à torse poil n’était pas des plus remarquable esthétiquement parlant, tout le monde enviait l’aisance avec laquelle ils semblent tous exercer leur art. Une réussite, que dire, une énorme réussite scénique avec quelques effets de manche bien sentis dont le masque du début et l’étendard géant agité par leur vociférateur en chef juste avant les rappels convenus. Ceux-ci étaient composés d’un tiercé d’obus issus de leur première galette : “Sjøhyenar (Havets Herrer)”, “Mjød” et “Utrydd dei Svake” : un titre plus long et un peu en dessous du reste question intensité – attention : nous sommes restés du côté bourrin – au cour duquel les musiciens ont livré le reste d’énergie qu’il leur restait en réserve pour nous en foutre plein la vue et escalader les amplis pour certains. Une show exceptionnel pour un public d’exception : nous pouvions quitter la Main Stage heureux pour rejoindre une autre bande de bourrins qui n’allaient pas tarder à envoyer leur sauce épicée alors que la nuit était déjà bien entamée.
MANTAR

Lorsque Mantar a été annoncé à l’affiche du Desertfest, on a commencé par s’interroger sur ce duo germano-turc (?!), et puis on a vite compris qu’ils faisaient partie de cette petite liste de groupes que Sound Of Liberation glisse toujours sournoisement dans ses événements, qui sont des groupes d’avenir, à découvrir avant qu’ils n’obtiennent une plus large reconnaissance. En voyant le frêle Hanno finir d’installer son matos sur la petite scène, brancher fébrilement les derniers câbles ici ou là sur son rack de pédales de un mètre de large, sans oser regarder le public qui se masse devant la scène après l’assaut en règle pris avec Kvelertak, on se dit que le bonhomme n’est peut-être pas de taille… Et le début du set, un peu chaotique (il renverse une bouteille d’eau sur sa tête d’ampli, se prend les pieds dans son matos…) ne nous rassure pas. Le bonhomme est tendu… L’impression étrange continue alors que le groupe se lance dans l’interprétation du heavy “The Berserker’s Path”, sur lequel on entend des vocaux… sans qu’il ne se mette derrière son micro ! Il s’agit en fait de bandes samplées, mais les gens dans le public, qui ne connaissent pas encore les chansons du groupe, se regardent bizarrement au début … Et puis finalement, il aura suffi de lancer un titre plus énergique, et que Hanno s’empare enfin du micro et déglutir ses boyaux comme il se doit pour convaincre un public qui retrouve – après un autre beau spécimen de hurleur chez Kvelertak –un pur agresseur phonique complètement barré, là, sous ses yeux qui commentent à briller d’émotion. Et la suite est à l’avenant, allant de bonne surprise en bonne surprise. Musicalement, le groupe évolue au confluent de plein de genres différents, une sorte de sludge dégraissé, teinté de vapeurs doom, bercé par des rythmiques qui pourront rappeler Motörhead, et un aspect parfois “clinique” du son (on pense aux Melvins, à Meshuggah sur certains passages…). Le petit gars Hanno, se révèle vite complètement déjanté, dans le genre habité par sa musique. Doté d’un son de gratte vicieux et incisif, il décoche ses rythmiques avec la furieuse envie d’en découdre – il vise le K.O. technique dès que possible, pas le temps de faire des courbettes. Il se contorsionne dans tous les sens, frappe frénétiquement du pied sur ses pédales d’effets et balance ses riffs haineux sans jamais faiblir. Son pote Erinc derrière son kit de batterie, forcément moins visible, ne le quitte pas des yeux, et cale tout son jeu sur la dynamique imposée par son copain gratteux. L’exercice de la musique en duo ne souffre pas d’approximation, et le batteur cogne ses fûts avec fougue mais toujours en parfaite symbiose avec son collègue. Le duo utilisera cette grosse demi-heure pour décocher quelques cartouches bien rouillées à bout portant vers ce public rassasié par sa journée bien remplie. Par ce dernier uppercut, Mantar marque un paquet de points au “top découverte” du week end, et donne surtout une furieuse envie d’aller les revoir jouer sur scène dès que l’occasion se présentera à nouveau.
Allez, dodo, faut prendre des forces pour la journée de demain…
(A SUIVRE…)
Chris & Laurent
On avait pris un pied assez incroyable l’an dernier lors de ces trois jours de rêve à Berlin : musique sensationnelle (des révélations, des valeurs sûres…), super ambiance dans le public, lieu atypique et convivial… Bref, dès les premières annonces de cette édition 2014, on n’a pas hésité longtemps avant de commander nos billets d’avion pour la capitale germanique, qui devient de fait la capitale mondiale du stoner pendant trois jours.

En arrivant sur les lieux du crime, avant même d’encaisser le moindre décibel, la simple vue du ciel nous donne la patate : un soleil radieux, propice à siroter des bières peinard au Beergarten avec les potes entre chaque concert, en se baladant dans le market à hippies ou en discutant avec les musiciens ou artistes, qui se mixent au public pendant tout le week end avec un naturel et une humilité qui font plaisir à voir… Toutes les conditions d’une nouvelle édition d’exception sont réunies !
COJONES

Contrairement à ce que son patronyme peut laisser croire, Cojones est un quatuor croate et non pas hispanique… mais qui paraît doté de sérieuses paires de “cojones” quand même ! Bien conscients de la responsabilité qui repose sur leurs frêles épaules (en gros : en l’introduisant, donner le ton de cette nouvelle édition) les zagrébois entament un peu fébrilement leur set, et l’excitation atteint vite son point culminant… quand Bojan pète sa corde de guitare dès le premier titre ! Les deux ou trois titres suivants seront joués sans guitare pour le frontman du combo, sans que nous sachions clairement si c’était prévu ou pas (on sait que le groupe évolue sur certains titres alternativement avec une ou deux guitares). Se concentrant sur ses vocaux, il fait montre d’un coffre intéressant et d’une belle puissance, faisant même, au détour de certains refrains pêchus, penser à un certain Dave Wyndorf. Quoi qu’il en soit, c’est aussi à ce moment que le groupe semble se débrider, et son set gagner en dynamisme. Le gros rock des jeunes stonerheads est bien exécuté, les titres sont balancés avec une belle assurance, et le public, déjà nombreux devant la petite scène Foyer, headbangue avec satisfaction devant ce stoner bien carré, teinté de soupçons psyche subtils mais bienvenus pour aérer le tout. Une excellente introduction !
ANCIIENTS

Pour cette première journée du festival, le programme étant plus light que pour les jours suivants, il appartenait à la deuxième formation de la journée d’inaugurer la Main Stage du Desertfest. Les jours suivants, les premières formations se succéderont sur la Foyer Stage dans une configuration underground qui sied plutôt pas mal à certaines “dérives” du style vénéré durant ces trois jours de folie. Mais ne nous égarons pas et revenons à nos moutons de Vancouver : un quatuor classique et pileux qui envoie un son énorme lorgnant méchamment vers le metal pur sucre ! En fait, les tournées avec Sepultura, Death DTA et Lamb Of God ont certainement aussi influencé le son des Canadiens en plus de leur prestance scénique (laquelle s’approche sensiblement de celle de Valient Thorr) : headbanging et pieds sur les retours sont de la partie tout au long de ce set qui aurait gagné en intensité s’il avait eu lieu dans le bouillonnant Foyer. Délivrant les pépites de leur seul long format “Heart Of Oak” sorti l’an passé : “Raise The Sun”, “Giants” et “Overthrone” ainsi que “Built To Die” extrait du single “Shakebeard”, les viieux ont foutu un gros boulet bien pugnace à cette première journée en déversant de manière brute leur gros son. La subtilité présente sur leurs albums restant en retrait pour un set très carré, placé et rondement mené sous le signe de la puissance. C’était bien foutu en live et c’est plutôt pas mal sur disque. C’est surtout ce qu’on aurait bien aimé comme style sur les derniers Mastodon tant Anciients reprend les choses là où les nouvelles stars des charts les ont laissées après leurs premiers efforts.
THE MIDNIGHT GHOST TRAIN

Une petite clope pour l’un, un changement d’objectif pour l’autre, et direction la petite scène pour se régaler du show de Steve, Brandon et Mike que nous attendions avec impatience tant leur prestation au dernier Up In Smoke nous avait littéralement scotchés ! Nous avions déjà échangé dans la journée avec le trio jetlagué qui foulait ce jour-là le Vieux Continent pour une tournée de six semaines, et les gars étaient positifs à bloc à l’idée de mettre le feu à Berlin dans la soirée : nous ne serons pas déçus ! Les deux imposants manipulateurs de manche ont donné le La en battant le plancher du Foyer dès les premiers accords d’une prestation au poil, durant laquelle ils ont balancé du nouveau son et, croyez-nous les enfants, ça vaut son pesant de schnitzel berlinois ! Grosses grattes saturées, rythmiques pachydermiques et la voix de bluesman éraillée au Jack Daniel’s de Steve ont à nouveau fait mouche dans nos cages à miel ! On en a eu pour notre fric et nous pouvions nous coucher tranquilles : cette soirée était déjà une réussite à l’issue de ce show dévastateur au cour duquel le trio du Kansas ne s’est une fois de plus pas ménagé. Si la musique de The Midnight Ghost Train semble fomentée pour la scène, nos potes assurent aussi bien le spectacle en se trémoussant, en effectuant des mimiques incroyables et en interagissant verbalement avec les spectateurs – heureux – tout au long de ce show dont le seul bémol sera sa longueur, tant nous aimerions encore passer du temps en compagnie de cette formation taillée pour le live et définitivement hyper rock’n’roll !
SIENA ROOT

Après cette sérieuse déculottée prise devant la scène Foyer, le changement d’ambiance proposé par le set de Siena Root est bienvenu. Les suédois (encore un nom de groupe fait pour nous faire perdre nos repères géographiques…) entament leur set par leur dernier single, “Conveniently Blind”, un titre plutôt percutant, et attendent leur second titre, “Waiting for the Sun”, pour mettre en avant leur son bien spécifique, un mix de rock psyche old school planant, baigné parfois de nappes bluesy ou orientales. Visuellement, le groupe s’est d’ailleurs un peu pris les pieds dans une faille spatio-temporelle : bassiste vêtu d’une sorte de toge rituelle du plus bel effet, chanteur aux pattes d’eph’ et pilosité faciale tendance “Jésus est parmi nous”, un organiste à la coupe au carré somptueuse et au ravissant petit gilet sans manche en cuir… Chez les scandinaves, on est dedans à fond, et pas uniquement pour l’esthétique : sur scène ça joue, et ça joue même plutôt bien, on se croirait vraiment devant un jam band directement débarqué des 60’s. Et petit à petit, l’alchimie opère : l’ambiance se fait béate, la musique ensorcelante, une sorte de trip champis… sans champis ! Exactement la musique qu’il fallait à ce moment de la soirée (chapeau bas aux programmateurs, choix audacieux mais finalement bien vu !). L’apothéose sera atteinte avec un “Rasayana” d’une petite dizaine de minutes, propice aux jams les plus aériens. Un bon trip ! De quoi en tout cas nous refaire une petite santé avant le tir de barrage qui nous attend à quelques dizaines de mètres dans dix minutes…
SIXTY WATT SHAMAN

Après le trip babacool venu du nord de l’Europe, le moment est venu de repasser le rideau séparant les deux espaces dévolus au son du festival et voilà le moment de se taper un des groupes que nous attendions le plus. La formation pionnière de Baltimore avait disparu de nos écrans radar depuis belle lurette. Pourtant ces lascars n’avaient jamais réellement mis un terme à leur aventure musicale commune. Ils ont d’ailleurs aligné pas mal de projets depuis leur dernière trace vinylique, “Reason To Live” sortie en 2002 (ah ouais ça ne date pas d’hier…). Ayant par ailleurs partagé pas mal – que ce soit en tournée ou sur disque – avec d’autres grosses pointures du festival (Clutch et Spirit Caravan par exemple) nous n’étions pas les seuls à nous taper un bain de jouvence et à espérer un truc de fou. Soyons clair : la surprise collaborative ne vint jamais (nous venons donc de tuer le suspense pour la lecture de la review du jour trois). Néanmoins, la prestation du quatuor nous ravira tant ces types avaient jadis composés des classiques du genre et tant ils nous ont transmis de leur énergie positive tout au long d’un set mené tambour battant sur la scène du Foyer qui, bien que de taille concise, fit superbement marcher l’interaction du groupe avec son public. “Cactus” – tiré de leur premier effort – ouvrit les feux et ce fut une déferlante du meilleur de Sixty Watt Shaman qui s’abattit sur nous durant le temps alloué au groupe jusqu’au final “Red Colony” (tirée de “Seed Of Decades”). Le duo initial composé de Daniel Soren et de Jim Forrester fonctionne à la perfection sur scène avec les deux nouvelles recrues que sont Chuck Dukehart (à la batterie, qui est aussi actif dans un groupe fort intéressant répondant au nom de Foghound que nous vous recommandons particulièrement) et Todd Ingram (de King Giant, remplaçant le guitariste original Joe Selby avec brio). Malgré des dégaines plus proches de celles qu’on rencontre en se défoulant dans les moshpits hardcore, ces types sont restés fidèles à leur style originel et des perles assez planantes comme “Poor Robert Henry” invitent toujours le spectateur à laisser onduler son corps de manière lascive même s’il n’a pas fait cinquante-deux arrêts au bar depuis son arrivée sur les lieux du festoche (ou fumé de l’herbe qui fait rire). C’est gonflé à bloc que ces Etasuniens sont de retour aux affaires et nous devrions avoir de leurs nouvelles très rapidement vue la dynamique avec laquelle ils abordent ce retour sur les devants de la scène stoner ! Notre attente a été plus que comblée avec ce concert qui restera comme l’un des meilleurs de cette édition. Le fait qu’il ait été donné par des mecs on ne peut plus sympathiques et ouverts – en parfaite osmose avec leurs fans – n’a été que bonus !
SLEEPY SUN

A peine remis, il est temps de ramper jusqu’à la main stage pour se refaire un peu une santé. Sleepy Sun, à cet instant précis, apparaît comme le groupe idéal pour cela. Le quintette californien propose un stoner psychédélique efficace, dont le vaporeux mais efficace “Marina” en intro montre une bonne image. La rupture stylistique est un peu violente toutefois : difficile de rentrer dans le trip après avoir encaissé en pleine face toutes les cartouches de Sixty Watt Shaman une par une pendant presque une heure. Mais Sleepy Sun est rodé à tous les contextes scéniques, et leur expérience l’emporte : malgré un public un peu apathique au début, les bonhommes ne se démontent pas et enquillent leur setlist sans se laisser perturber, habitués à rallier à leur cause musicale à chaque fois un public qui finit conquis. Même si les tempi ne s’emballent jamais de trop, le groupe sait varier les plaisirs, et enchaîne des titres immersifs, planants et ondulatoires, souvent chargés en efficaces salves guitaristiques, à l’image de ce “New Age” en conclusion, long titre propice à un festin de soli du meilleur effet. Cette dose homéopathique de cinquante minutes est bien adaptée dans ce contexte de festival, où les scandinaves se retrouvent en alternance avec la scène Foyer où jouent aujourd’hui des groupes foncièrement plus pêchus. On peut toutefois imaginer que Sleepy Sun gagne à être vu en tête d’affiche, sur un set complet, pour bien “rentrer dedans”. C’était en tout cas un bon avant-goût aujourd’hui.
ASG

Poursuivons dans cette alternance entre psyche et gros rock qui tâche (une alternance qui a été le point fort de ce milieu de soirée) avec le set d’ASG. Il faut dire que les américains sont très attendus : leur dernier album a fait à peu près l’unanimité depuis un an, et leur expérience scénique est reconnue et bien documentée. Sur le papier, ce concert s’annonce donc un peu comme une garantie sans risque, et quand les américains montent sur la petite scène du Foyer (bien trop petite pour eux, honnêtement, ils auraient botté encore plus de culs sur la Main Stage), on a tout l’air d’être partis pour un set bien carré. Jason Shi, leur incontestable leader, apparaît un peu frêle derrière son micro au premier abord, mais sa maîtrise impeccable et ses vocaux bien particuliers font mouche. Le set d’ASG met évidemment en avant leur dernier effort studio, “Blood Drive”, avec notamment en extrait le sur-heavy binôme composé du morceau éponyme et de “Day’s Work”. C’est du lourd, et le public acquiesce avec le front et la nuque. Le quatuor ne se prive pas pour autant de quelques incursions dans son précédent excellent opus “Win Us Over”, avec par exemple le percutant “Low End Insight” ou “Right Death Before”, un titre à la fois puissant et aérien, qui fait onduler le public comme un seul homme. Tout du long, une impression de robustesse se dégage de ce set, avec une setlist impeccable d’efficacité. Pour autant, la bonne humeur de Shi et la communication avec le public empêchent cet excellent concert de devenir une sorte de machinerie un peu aseptisée, et le groupe ne donne jamais l’impression d’avoir enclenché le pilote automatique. ASG est clairement un groupe d’une efficacité redoutable, à voir sur scène, et ce set ne fait que le confirmer.
SPIRIT CARAVAN

Spirit Caravan a toujours été un groupe un peu spécial dans nos petits cœurs de stoner-heads mélancoliques et émotifs… C’est un peu le groupe “rebond” ayant permis au cultissime Wino de s’engager dans un nouveau projet après l’arrêt de The Obsessed, et ce fut le début ensuite d’une longue série de projets et featurings du maître qui ont fait et continuent de faire notre bonheur depuis des années. Le trio (qui voit le vénal Gary Isom remplacé derrière les fûts par le copain Henry Vasquez, qui joue avec Weinrich dans St Vitus) débarque donc sur la Main Stage en terrain presque conquis, tête d’affiche incontestée de cette première journée. Avec seulement deux véritables albums, on pouvait craindre un set un peu court, avec un groupe qui se regarde le nombril. Et ben on a tout le contraire, avec un groupe bien dedans (ces dates américaines qui sont suivi la récente reformation du groupe lui ont manifestement été bénéfiques), qui construit son set en tapant dans tous les tiroirs, pour remplir plus que copieusement un set d’une heure quinze roboratif et jouissif : ses deux albums bien sûr (et surtout “Jug Fulla Sun” en l’occurrence) mais aussi ses EP, ses singles, des titres inédits parus sur leur compil, des reprises… Ils s’autorisent même quelques solos… Faut dire que les zicos se défendent : Vasquez a un jeu ample derrière ses fûts, généreux et robuste, qui laisse à penser qu’il s’est complètement approprié le répertoire du groupe. Dave Sherman, plus statique, assure ses lignes de basse “lead” de manière remarquable : avec un son sursaturé (une approche instrumentale similaire au jeu de Lemmy dans MOTÖRHEAD, en gros, dans un genre différent), le spectre musical est clairement plutôt dans le complément à la gratte que dans la base rythmique lourde, bien calée au fond des amplis. Quant au père Wino, même s’il pue le charisme à cent mètres à la ronde (et ce malgré un superbe petit gilet sans manches en peau retournée et franges, porté sur un torse nu plus vraiment tout jeune ; une tenue du plus bel effet vraiment…), il ne se met jamais en avant, bien au contraire, restant simplement au service de chaque titre. Une posture qu’il a finalement toujours adoptée dans ses groupes et projets. Il laisse occasionnellement le micro à Sherman (qui soit manque un peu de coffre, soit souffre d’un micro un peu à la ramasse dans le mix…) et la plupart du temps reste dans son coin à enquiller les leads féroces, les riffs lancinants ou les soli chaleureux. On se permettra de voir émerger de la set list par ailleurs impeccable des titres comme les catchy “Healing Tongue” ou “Retroman” (après une intro basse sympa), et un petit plaisir en final avec le “Ice Monkey” de ST VITUS. Un concert de haute volée, généreux, bien au niveau de nos (grandes) espérances vis-à-vis de ce groupe culte.
PET THE PREACHER

Après s’être cogné le trio de légende sur la scène la plus importante de cette manifestation, il était – déjà – venu le moment de rejoindre le Foyer pour le dernier acte d’une journée à la hauteur de ses promesses qui était déjà une réussite avec les formations s’étant succédées sur scène et un public en parfaite osmose avec les groupes et les lieux. Les Danois de Pet The Preacher seraient donc les derniers pour cette journée (en fait on était déjà le lendemain) pour une prestation un peu particulière. Le trio a eu la drôle d’idée de vernir son nouvel album en festival : une belle manière pour clore cette première journée du Desertfest édition 2014. Nous nous radinons donc dans l’antre plutôt dédiée aux formations bourrines pour faire connaissance avec le successeur de “The Banjo” et découvrons les mecs de Copenhague grimés au charbon ; ce seront les seuls à déployer ce genre d’artifices sur ce festival si l’on excepte les tenues de scène extravagantes de Siena Root et un masque chouette le vendredi soir. Les trois petits ramoneurs des Misérables ont donc pris la scène devant un public clairsemé – hé ouais m’sieurs dames, on explosait carrément les une plombe du mat quand la release party de “The Cave & The Sunlight” (sorti chez Napalm si jamais) débutait. Ce set consacré à la plaque fêtée ce vendredi-là demeura sous le signe de l’innovation : ces lascars ont enchaîné les nouvelles compositions de belle manière. Les amateurs de performances inédites se sont frottés les pognes, par contre les quidams restés tardivement debout pour se taper des classiques du combo de stoner traditionnel resteront sur leur faim. Tant pis pour eux ! Une mention spécial à “Remains”, une pépite issue de “The Cave & The Sunlight”, qui fut une réussite sur scène autant qu’elle l’est sur la plaque.
Une fois la Flying V débranchée, c’est les jambes bien lourdes que nous avons traversé une énième fois de la journée le Beergarten et jeté un dernier coup d’œil aux stands de merch, pour enfin rejoindre nos pénates afin d’être un minimum requinqué pour un peu de tourisme au petit matin et un retour quelques heures plus tard à l’Astra pour continuer à se faire plaisir.
(A SUIVRE…)
Chris & Laurent
Dans la grande famille du stoner, je demande l’oncle Stoned Gatherings ! Les Stoned Gatherings c’est un peu notre super tonton à nous ! Celui qui nous permet de voir des groupes que l’on n’aurait jamais espéré croiser sur le sol français. Celui qui nous pousse à découvrir des groupes dont on n’avait jamais entendu parler. Celui qui s’investit à fond pour que l’on puisse toutes et tous, ces petits neveux et nièces, en profiter de manière régulière et abordable. En un mot comme en cent les Stoned Gatherings font vivre la famille et ce soir au menu : du doom. Première soirée des « Doomed Gatherings » qui prirent place en ce week-end pascal de 2014 au Glazart.
Intitulée « Doom Heaviness », l’affiche s’annonce prometteuse (comme toujours quand tonton est à la barre) avec quatre groupes au compteur tous réunis pour une date unique en France. Ca fait plaisir. C’est devant un bon burger que déjà quelques bruits courts que nos invités du soir sont arrivés avec quelque peu de retard. Ce qui explique le délai d’ouverture des portes et de début des concerts. Rien qui n’empêchera finalement le bon déroulement de la soirée.
Hull ouvre les festivités. Hull c’est quatre gaillards tout droit venus de Brooklyn et qui ne font pas dans la dentelle. Le terme « doom heaviness » leurs colle à ravir. Ça envoie effectivement du lourd, son massif, riffs tout aussi costauds et chant guttural pour la plus grande partie. Pour la plus grande partie parce que le chant se partage chez Hull et si deux des comparses sont franchement dans l’écorché, le troisième larron est plus clair. Autant sur album le chant peut faire ressortir des harmonies vocales, en live ça dépote avant tout. Musicalement les chansons sont riches, les passages doom groovy font parfois place à du sludge pure crasse qui peut nous dégueuler un riff plus métal pour dégraisser l’ensemble. C’est du post-sluge-doom-core en quelques sortes. Comme l’hydre à plusieurs têtes, Hull nous écrase vite fait, bien fait. Une bonne découverte en pré-écoute d’avant concert, le live ne leurs a pas rendu justice sur la subtilité dont ils peuvent savoir faire preuve sur album. Ils ont misé sur l’efficace et le rentre dedans, c’est gagné.
Inter Arma prend le relai. A voir l’acharnement du batteur à bien faire consumer son encens, une certaine atmosphère semble vouloir être installée. Verdict : ça sentait bon l’encens mais musicalement ce n’est pas ma tasse de thé. Inter Arma c’est un chanteur possédé, ou en tout cas qui fait comme si, deux guitares, une basse et un batteur possédé aussi mais dans le sens qui ne laisse pas une minute de répit à ses fûts. Le ptit gars ne chôme pas et sort vraiment du lot. Pour le reste en live ça sonne comme du black à petits relents de doom. Autant sur album les passages black sont contrebalancés par des passages plus atmosphériques, avec un chant moins présent pour justement laisser planer, là en live c’était concrètement très (trop) orienté là-dessus pour me chatoyer. Voix hurlé, simili-blast etc. certainement que 30 minutes ne permettent pas à ces messieurs de développer toute leur richesse progressive, dommage.

Enfin Elder entre scène. Le groupe que tout le monde adore et attend mais qui ne passe que trop trop rarement par chez nous. Merci tonton ! Les premières notes résonnent et la foule est conquise. Ca groove entre le batteur et le bassiste. Belle assise rythmique pour laisser la guitare aller et venir entre riffs pachydermiques et envolés solitaires. Les trois de Boston ont la banane. De toutes évidences ravis d’être là, ils vont nous dérouler leur setlist psychédélistonedoomique à faire headbanguer les morts. Le chant n’est pas la force du trio, on le sait, en live ça s’entend mais on n’est pas venu pour ça non plus. On est dans la frange mélodique de la soirée. Ça paraît bien léger après les deux précédents combos mais c’est tellement efficace. Le son fait honneur à toute la richesse des riffs et des solos ainsi qu’aux lignes de basses voyageuses. Tout paraît fluide entre eux. La complexité des morceaux à tiroirs, dont ils connaissent le secret, coule de source. Passage « dans ta face », solo psyché, pose le groove, envoie la sauce, passe la troisième, freine, mets nous un petit coup de mélodie. Etc. etc. Bref tout le monde jubile. Ca passe bien trop vite. Le temps semblait s’être suspendu et en même temps filer vitesse grand V. Des shows comme ça pourrait durer plus longtemps qu’on ne serait toujours pas rassasier de cette lourde classe qu’est la leur.
Après cette démonstration signée Elder, Windhand vient clore une soirée déjà bien riche. En provenance de Richmond, Virginie, le quintet mené par la voix de Dorthia Cottrell est un peu la sensation doom du moment. Seul groupe du soir à jouer du doom « classique » comme les maîtres du genre l’ont précédemment défini, Windhand se démarque par ce chant habité, presque lointain. En live l’impression reste identique. Le risque à personnifier ce genre de voix est de démystifier l’ensemble, mais la discrétion derrière le micro est de mise. Un petit merci à l’occasion, un petit headbanging au ralenti et souvent dos au public, Dorthia nous fait nous tourner vers ses collègues de lourdeur. L’innocence du chant est complètement débauchée par la roublardise dont fait preuve la musique. Les riffs sont bons, l’ensemble est carré et bien rôdé pour laisser la magie opérer. Ce n’est pas l’originalité des arrangements ni des mélodies qu’il faut venir chercher, mais l’essence même de cette musique qui nous est chère. Riffs et solos classes par leurs apparentes simplicités, section rythmique présente, son saturé et crade comme il se doit pour nous envoûter. Et envoutée l’audience l’est. De la première à la dernière note, la barque descend paisiblement le court du Styx et nous sourions tous béat des jolies enluminures qui décorent notre moyen de locomotion. Frustration encore de voir le set se finir si vite malgré une chanson en rappel, Windhand met les pieds dans la cour des grands en toute simplicité.
Quatre groupes qui s’enchaînent à cette vitesse c’est limite trop. Moins de groupe pour plus de temps de jeu aurait peut être permis à tout le monde d’offrir tout ce qu’il a à donner. On chipote Tonton. On revient quand tu veux, on te fait confiance.
Ain’t One
Réussir la deuxième édition d’un festival participe du même challenge que de réussir son second album. Quand on a envoyé la sauce sur son premier essai, il faut confirmer, ne pas décevoir, justifier les attentes et espoirs placés en vous. Bref, serrer les miches, être sincère dans la démarche et honnête avec ses envies. Ne faisons pas durer le suspens plus longtemps, l’essai est transformé haut la main. Il est même satellisé, artistiquement et techniquement.
C’est donc le vendredi 18 avril 2014 que je retrouve avec plaisir la salle du Clacson à Oullins, cet antre du rock et de la sueur, où Kadavar et Mars Red Sky m’avaient explosé les entrailles l’année dernière. Et le moins que l’on puisse dire c’est que le festival démarre fort. Là où un an auparavant j’étais dubitatif sur certaines premières parties, je dois admettre que cette année les groupes chargés d’ouvrir les hostilités ont foutrement rempli leur rôle. Déboule donc Dätcha Mandala, des bordelais bourrés d’influences 70s, explosifs, à l’aise techniquement, se fendant d’une reprise du Sabbath Black, histoire de planter le décor du week-end et se permettant quelques fulgurances grasses de stoner massif. Mis à part le bandana et quelques attitudes un peu surjouées, ils méritent qu’on les suive sérieusement. Bière, clope, abdos (non, j’déconne), changement de plateau. The Squared Circle prennent ensuite possession de la scène pour un set éthéré et hypnotique. Les compos du groupe portent en elles le germe mélodique de Joy Division, elles s’étirent en nappes de synthés et guitares incisives portées par les vidéo psychées qui défilent en arrière-plan. J’aurai aimé cependant que les morceaux durent plus longtemps, que le groupe prenne encore plus le temps de développer son univers. Planant. Clope, bière, cardio-training (oui oui c’est la running-joke de ce report). Domadora pose ensuite ses petits petons sur le plateau du festival. Précédé d’une coquette réputation live et porté par son album Tibetan Monk, le trio va mettre la première grosse baffe du week-end. 45min de heavy-jam massif et jouissif. Le guitariste, aux faux-airs détachés de Woody Harrelson, nous emmène aux confins du solo, essayant de faire plier la section rythmique en s’éloignant du canevas des morceaux. Las, le batteur et le bassiste envoient du lourd, c’est un outil de précision dans le corps d’un éléphant, et soutiennent les délires de leur six-cordiste. Natural Born Killers. On vient d’assister à trois quart d’heures intenses de jam et de progressions orgasmiques. Messieurs merci. Mais il fait soif, mon cours d’aérobic va commencer et nous devons laisser DeWolff se préparer. DeWolff, le trio made in Hollande (le pays bien sûr) remplace Blues Pills qui a dû annuler sa tournée pour raison de santé. Encore un coup de maître de l’organisation car ces trois jeunes loups ont livré un show puissant et électrique à souhait. Le début du set me laisse perplexe pourtant. La zic, deep purplienne, déboîte, le trio est en place, carré, impressionnant techniquement mais quelque peu figé, peut-être fatigué du voyage. Erreur cher moi-même ! Car lorsque retentit « Don’t you go up the sky » le public se met à pogoter méchamment entraîné par le riff dévastateur du morceau, et le groupe de suivre l’énergie de la salle. Car le pogo est tel le feu ; sans oxygène pas de brasier. Ce soir-là n’étant pas sold-out, la place fut suffisante pour décupler le furieux mouvement du jeune en joie, l’explosion fut immense. Et emporta le groupe avec lui pour le reste du set. S’en suivit un live magistral et enlevé de la batterie nerveuse à l’orgue Hammond. Le claviériste, fils de John Lord, frère de barbe de Kadavar, finit de m’achever sur un morceau incestueux entre les Doors et le Take Five de Brubeck. Gros live, grosse prestation, quelle bande de bataves ! Je pense qu’ils ont pris un énorme pied, et que cette date surprise les a convaincus de revenir dans notre contrée. C’est le souffle court que je sors du Clacson pour boire ma dernière clope et fumer mon dernier verre de la soirée. A demain Stone Rising Festival !

Samedi 19 avril 2014, 17h30. Je suis arrivé plus tôt pour interviewer The Socks. J’en profite aussi pour faire le tour des stands de merchandising (c’est comme les soldes, faut toujours repérer le vinyle qui va vous mouler le boule comme il se doit), tailler le bout de gras avec Jo Riou, un graphiste rocailleux qui expose ses merveilleuses illustrations le temps du festival, zieuter le stand de Sentenza, un fabriquant de pédales d’effet. Déjà 19h30 et un running-order serré, Horta prend place. Belle surprise, les morceaux du quartet se construisent patiemment, méthodiquement. J’ai l’impression de voir un gratte-ciel se construire devant moi, émergeant sous les notes empruntées à Pink Floyd et plus proche de nous, sous le sens artistique de RIEN, les grenoblois. Et tendre vers RIEN, c’est déjà beaucoup. Une demi-heure et puis s’en va, place maintenant aux cinq moustachus, barbus, poilus de Brutus, place à la sueur et la bière, à un show garage et sexy malgré un son de grosse caisse dégueulasse qui déroutera un peu mon sens rythmique. Mais peu importe, le gobelet du chanteur (sosie de Philippe Katerine) nous toise et le groupe nous balance ses petites bombes, Personal Riot et Big Fat Boogie, dans la face. Ça commence à dodeliner sérieusement de la tête et olfactivement, on sent bien que ce soir est sold-out. Y a plus d’aisselles qu’hier, c’est certain. Comme sur album, Brutus est meilleur quand il ralentit le tempo, la voix prenant tout son sens. Et à mon grand regret, ils ne joueront pas Reflections. Ce set mérite tout de même que j’achète un Lp histoire de participer à la tournée, les bougres ayant perdu une bonne partie de leur matos dans un incendie, deux semaines avant de partir. L’ambiance est toujours au beau fixe grâce à l’organisation aux petits oignons, au public merveilleux et une temporalité maîtrisée. Aussitôt dit, aussitôt prêt, les ténébreux Aqua Nebula Oscillator acidifient l’ambiance. La musique du combo à géométrie variable est un buvard de LSD sexué, malsain et désirable. Quand il reste dans les structures, la profondeur des mélodies fait corps avec la gravité de la voix, mais je décroche quand le groupe part en jam psyché. Je suis peut-être un peu affamé et conventionnel mais quand surgit une paire de bongos dans le mix, je décide qu’il est grand temps de croquer dans un de ces sandwichs qui me draguent depuis une heure. Et bien m’en fut pris car des forces j’allais en avoir besoin pour supporter la déflagration qu’allaient être les concerts de The Socks et Radio Moscow. La belle histoire de The Socks, sa signature chez Small Stone, son album incroyable, ses instruments vintage, ses cheveux soyeux, la fiancée lyonnaise prend place sur scène, le public prêt à l’étreindre sans réserve. La salle est bondée, la tension palpable, la magie noire du rock dans les starting blocks. Some Kind Of Sorcery. Le concert est monstrueux, les harmonies vocales en place dès le premier morceau nous uppercutent les esgourdes, les riffs enflamment la façade. Oui, The Socks envoie un heavy rock 70s efficace, il a tout bien appris de ses aînés, mais le son, la puissance, l’originalité de ses compositions en font un groupe bien dans son époque, les guitares sont énormes (quand elles ne disparaissent pas d’un coup, la faute à une tranche de console capricieuse j’imagine) et la voix à vous fendre une petite culotte en deux. La section rythmique explose littéralement sous Holy Sons et son incroyable frappe de caisse claire. Autant vous dire que ça pogote, que ça slame, que ça lève le poing à tire-larigot dans la fosse. C’était la première date de la tournée pour The Socks, ce fut monstrueux. Allez, on va se prendre un LP et une petite pinte pour fêter ça ! J’épanche ma soif, j’éberlue mes yeux devant le bleu merveilleux de la Socks galette, puis je repars dans la salle. Je me fraye un chemin sur le côté jardin de la scène et je tends l’autre joue pour en prendre une bonne grosse de la part de Radio Moscow. Parce que oui, la fin du festival est dantesque. La radio de l’est n’usurpe pas son succès. Le trio est énorme et nous balance un blues-rock puissant et aérien, tranchant et suintant le groove. Parker Griggs est un maître de cérémonie démoniaque protégé par Hendrix, John Mayall, par Jeff Beck, par tous ces putains de génies de la guitare. Tous ses solos sont inspirés, techniques et profondément soul, encadrés et cajolés par une section basse-batterie ronflante, précise. J’ai encore la chair de poule en repensant à ces montées et descentes de manche tout en souplesse, quand on y réfléchit c’est une musique hyper phallique. Mais point de branlette dans ce show, que de l’utile, de l’efficace, du direct qui te prend aux tripes. Une fois de plus les oiseaux ont la gueule d’un public qui slame, il ne vole pas bien haut mais sa joie d’être là est contagieuse et il hurle à chaque fin de morceaux. Mon ptit pref, 250 miles, sera joué, j’ai le sourire aux lèvres et le sang au tympan.
Voilà, le Stone Rising Festival 2014, 2ème édition est terminé. Stoned Box association a une nouvelle fois fait des merveilles. Programmation, organisation, accueil, bien servis dans cet écrin rock qu’est le Clacson. On ne peut qu’espérer une troisième édition avec encore plus de groupes merveilleux, d’artistes talentueux et chevelus, de guet-à-pintes et autres réjouissances gustatives, de gentil public éclectique et de riffs en pagaille. Merci et bravo à tous.
Flaux
Il n’y a pas si longtemps le mardi c’était permis (je vous parle d’un temps que les moins de 25 ans ne peuvent connaitre) et en ce mardi 8 avril permission était donnée d’aller s’euphoriser en compagnie d’Uncle Acid and the Deadbeats. Le crime s’est produit à la Maroquinerie, munis de guitares, basse, batterie et Black Moth comme témoin.
Black Moth nous vient tout droit de Leeds, Royaume Uni, et propose un stoner/doom de facture classique et efficace. Le riff est épais, une belle basse ronde, ça tabasse bien derrière les futs. On sent que les Anglais sont rôdés et nous proposent un set efficace autour de leur « originalité » à eux en la personne de Harriet Bevan au chant. Harriet est une maitresse de cérémonie tout en simplicité, petits échanges sympas avec le public, voix claire et posée. Rien de si original en fait. A chaque début de chanson on se surprend à taper du pied, à hocher la tête, l’énergie du groupe est communicative et puis ça déroule sans se démarquer. Malgré quelques petits soucis techniques avec la deuxième guitare, qui offre un moment de solitude pour les autres membres du groupe et un certain énervement pour le guitariste concerné, les morceaux s’enchainent. Forcément avec un début de set à 19h30 pétantes et en 30 minutes toute l’audience du soir ne pouvait être présente pour le groupe. La salle commence à bien se remplir et est réceptive au dynamisme du quintette.
Une bonne première partie qui chauffe l’atmosphère sans la faire bouillir.
Petit détour par la case hydratation du corps due à une température ambiante qui commence à monter devant l’autel dédiés au rock obscur de tonton acid et ses bons à rien. Le planning horaire affiché saute alors aux yeux, le concert ne durera que 1h10 ! Encore une de ses soirées expédiées au lance pierre. La pression est donc sur les frêles épaules du headliner d’assurer en peu de temps. Pour les avoir vu l’année dernière au cours d’un festival majeur dans l’ouest français, je garde un souvenir d’un set pro et efficace, sans esbroufes. Qu’en est-il un an après ?
Le groupe entre en scène sur une musique non identifiée et déjà Uncle Acid a.k.a K.R Starrs a.k.a le leader du quartet prononce plus de mots que l’année dernière en saluant la Maroquinerie maintenant bien remplie. Il faut dire que le groupe en fin de tournée a étendu son aura suite aux premières parties de la tournée de Black Sabbath. C’est avec « Mt. Abraxas » premier titre du dernier né que le show se lance. Le cachet 60’s du son n’a pas sa place ce soir, priorité est donnée à l’impact live. K.R Starrs assène autant de coup au sol qu’il attaque lourdement sa 6 cordes. Le chant arrive, les harmonies avec le second guitariste sont en place. Tellement en place que ça en devient bluffant. En un morceau on comprend que ce line up constant depuis un an n’a pas chômé. Le groupe est allé à bonne école avec les pionniers du genre, ça a joué, ça a tourné, ça c’est trouvé. Belle énergie déployée en un titre qui s’enchaine sur « Mind Crawler » et l’audience est déjà euphorique. Deuxième utilisation de ce terme parce que le buzz qu’a créé le groupe en si peu d’années se situe bien là. Souvenez-vous de ce sourire niais et béat que vous avez eu la première fois que vous avez entendu leurs albums. Et bien ce sourire est de retour. En live Uncle Acid et sa bande ont sur-vitaminé les tempos, ont gonflé le son et ont peaufiné l’impact du chant. Et aujourd’hui ça ne se la joue pas rétro, c’est bien vivant et énergique que le quartet balance les riffs, matraque la batterie et se laisse enrober par la basse.
Troisième morceau de la soirée tout droit sorti de leur premier introuvable album, annoncé par tonton lui-même, Crystal Spiders déboule. Les stéroïdes font toujours leurs effets. On sent le groupe content d’être là mais on n’est pas là pour s’épandre non plus. Un petit remerciement entre chaque morceau, on annonce le titre du suivant et pam dans votre tronche. La folie gagne la fosse à l’intro de I’ll cut you down. Ca pogote, ça slame, qui aurait cru qu’en live ce groupe délivrerait autant de puissance, du heavy doom ! La setlist est variée, faisant honneur à tous leurs albums. On passe des ténèbres à la lumière, du lourd au plus léger, des sombres mélodies aux riffs entraînants, à chaque enchainement. Le groupe est au cordeau. La batterie imprime une cadence élevée à chaque titre, les guitares s’en donnent à cœur joie avec des solos plus débridés. La basse bien présente dans le son n’est pas en reste et donne toute l’épaisseur nécessaire à cette grande messe. On aurait eu tendance à oublier que ces quatre là savent jouer. On sent l’influence des groupes des années 60/70 qui maitrisent leurs instruments autant que l’art subtil de la compo qui te rentre dans le crane. Belle entente entre les deux guitares qui se cherchent et se répondent durant tout le show. Mention spéciale au chant, tout en harmonie à deux ou trois voix. Les Beach Boys du doom m’sieurs dames. Sans hésitation, sans accroche, cette particularité a de la classe en live. Il s’émane de ce groupe, et surtout de son mind-controller, un certain charisme qui envoute en live. Si Mister Starrs mène la barque, ses acolytes se font plaisir aussi et ne servent pas de faire valoir : quelques cris de ci de là et une présence scénique légitime. Un deuxième extrait du Vol.1 est joué. Notre oncle Kevin s’en joue de nous en demandant qui a cet album : en réponse aux quelques mains levées, un « fucking liars » bien senti.
Déjà l’heure du rappel. Le groupe sent l’audience conquise et 13 Candles est dédié à ce public qui depuis le début soutien et fait que ce groupe est là aujourd’hui bien présent au devant de la scène. 1h10 pile ! C’est frustrant. On en aurait bien repris quelques dizaines de minutes supplémentaires. Le groupe n’a pas perdu son temps. Soirée simple, efficace et trop courte.
Setlist :
Mt. Abraxas
Mind Crawler
Crystal Spiders
I’ll cut you Down
Death’s Door
Poison Apple
Valey of the Dolls
Over and Over Again
Vampire Circus
——————
13 Candles
Whitered Hand of Evil
Desert Ceremony
Décidément le Divan du Monde est un endroit où il fait bon vivre. La raison de notre venue à tous en ce dix-huitième jour du troisième mois de l’année deux mille quatorze se nomme Rockrevelation ! Tournée qui rassemble The Vintage Caravan, Zodiac, Audrey Horne et Grand Magus… Oui là comme ça sur le papier on se demande ce qui lie tous ce petit monde… et à l’écoute aussi.
Le problème de compatibilité entre ces mini-festivals et l’impératif de finir les concerts tôt entraîne à commencer à 18h pétantes les hostilités et malheureusement pour moi à 18h30 pile The Vintage Caravan était en train de remballer leur matos… Dommage, mon écoute pré-concert m’avait donné un très bon sentiment sur ce jeune groupe islandais. L’ambiance de la salle semble excellente, j’en conclue donc qu’en live ils ont assuré également. Je me consolerai avec leur clip haut en couleur « Expand your Mind ». Un groupe à suivre très certainement.
Zodiac s’installe tranquillement, fait ses balances et là on se dit que ça va être bon, très bon. Rien que pendant les balances le groupe se lance dans une petite impro et on sent déjà le feeling qui passe entre les quatre allemands. Ils n’ont fait que régler leur son et on en demande déjà plus. Le groupe entame enfin son set et nous voilà parti pour 40 minutes de bonheur. Petite intro lancée par la guitare rythmique de Stephan Gall, qui permet à tout le monde de le rejoindre sur scène les uns après les autres et « A Bit of Devil » déboule. Excellent son, belle dynamique entre les instruments et Nick Van Delft se met à chanter. Monsieur, voilà un bien bel organe que le vôtre. Belle voix claire, profonde et chaude, un petit côté rocailleux quand il « s’énerve » un peu. Voilà un chanteur qui sonne en live comme sur album. On sent le groupe content d’être de la fête, échange de sourires, communication avec le public et hop voilà « Free » sorti de leur dernier album en date. La magie opère toujours et quand on demande à une audience déjà envoutée si elle aime ZZ Top, on ne peut qu’emporter l’adhésion générale. « Blue Jean Blues » reprise des texans nous emmène donc au fin fond d’un bar miteux où toute la tristesse du jour suinte du comptoir imbibé de whisky. Le plus lumineux « Moonshine » prend la suite et on nous annonce déjà le dernier morceau. Mais comme pour nous rassurer Nick nous informe que « Coming Home » aura le droit à son jam. Set sans faute jusqu’à présent, la section rythmique formée par Ruben Claro et Janosh Rathmer ayant fait son boulot de fort belle manière, les solos étant bien sentis, on se dit qu’un petit jam ne nous fera pas de mal dans ces conditions. Intro du morceau, Nick fait de la slide guitar avec sa bouteille de bière (quand on vous parle de musicien de grande classe) et arrive la cerise sur le gâteau. La basse prend le lead, lance son motif, tout le monde suit sans broncher et s’éclate. La claque. Voilà comment on met tout le monde d’accord. Zodiac est bon, Zodiac a du feeling, Zodiac sait jouer, Zodiac assure en live, Zodiac plays « that blues rock thing » selon leurs propres termes.
On en oublie presque qu’on a raté un groupe après cela et Audrey Horne entre en scène. Les norvégiens font du heavy classic rock, comme il est dit. Ca joue bien, le public en grande majorité s’est déplacé pour ces messieurs et ils leur rendent bien. Ca chante en cœur, des inédits sont joués, les guitares sont fièrement brandies pendant chaque morceau, des coups de pied lancés à chaque intro, un petit tour dans la fosse et voilà. Pas forcément ma came, donc pendant une heure les morceaux s’enchainent et pour le coup je n’aurai pas de révélation sur ce groupe.
Le public reste nombreux pour l’arrivée de Grand Magus. Dès leurs apparitions pour les balances, les cris fusent, le groupe y est réceptif. S’annonce une belle entente entre les suédois et l’audience se soir. Que penser de Grand Magus aujourd’hui ? Ancien fer de lance d’un blues-hard 70’s-doom, les voilà catalogués en heavy metal. Le tempo a peut être été accéléré, le chant va peut être plus souvent flirter avec les hautes sphères, les solos sont peut être plus typés « metal » qu’avant mais il reste un sens de la mélodie, du feeling et du groove qui n’a jamais quitté le groupe depuis le premier album. Et ce soir plus que jamais le groupe va nous en faire la démonstration. Pour les deux du fond qui n’auraient pas suivi, depuis deux ans maintenant, se tient aux côtés de JB et Fox derrière les fûts ni plus ni moins que Ludwig Witt. Pour ceux encore plus au fond encore, Ludwig Witt c’est l’assurance que le groove reste présent, c’est le haut du panier des batteurs sauce Bonham, c’est Spiritual Beggars, The Quill, Firebird et plus si affinités.
Intro traditionnel/viking et « I, The Jury » attaque les cervicales. Le groupe est effectivement en forme, JB est très en voix et première démonstration est faite qu’avec le sieur Witt aux baguettes même les morceaux les plus heavy gagnent en chaleur. En fait le trio a perdu en froideur (si l’on peut dire) que ce soit au niveau du son tout comme au niveau de l’ambiance et de la communication avec le public. JB commente chaque morceau, chauffe la salle et les pépites des quatre derniers albums s’enchaînent. Déjà cinq morceaux et on a le droit à un solo de batterie. JB le souligne bien : des batteurs comme ça on n’en trouve plus beaucoup. JB s’essaye au français, nous parle de son attachement à l’école (dixit le « fuck school »). Le drakkar compresseur poursuit son chemin, le groupe est aux anges, on sent une vraie cohésion dans le trio et ce soir, le public est le quatrième membre. Vient l’heure du rappel, exceptionnellement pour la France une chanson bonus sera jouée par rapport à la setlist prévue. « Hammer of The North » vient ensuite clore la soirée avec ses chœurs puissants venant de la salle. Le groupe en est bluffé, les chœurs n’en finissent pas, le concert est fini qu’ils retentissent encore. C’est encore touché par ce public dédié que les suédois quittent la scène mais JB revient vite nous remercier une ultime fois. La voix était au top, les solos débordaient de feeling, la basse tenait la baraque et dégoulinait de gras, la batterie emballait le tout : 1h10 d’un concert première classe avec pour seul bémol un oubli total des trois premiers opus. Promis ils reviennent avant la fin de l’année, on espère parce que le power trio n’a jamais aussi bien sonné. Quelle que soit la classification musicale ça fait chaud aux cages à miel.
Setlist :
I, The Jury
Sword of the Ocean
On Hooves of Gold
Ravens Guide our Way
Like the Oar Strikes the Water
Drum Solo
Steel vs Steel
Valhalla Rising
Iron Will
Rappel :
Triumph & Power
The Shadow Knows (bonus français)
Hammer of the North
Ain´t-One
28 février… Deux longs mois d’attente avant le premier concert d’une année 2014 qui s’annonce déjà riche en bons évènements. Il faut dire que ces dernières années le public français (et parisien principalement) a été gâté. Les groupes trouvant enfin leur public grâce aux efforts combinés des nombreux acteurs adeptes de musique de qualité. Et comment mieux lancer la saison qu’avec une affiche aussi alléchante dans une salle de qualité.
L’endroit : Le Divan du Monde, ancien théâtre du XIXème rénové récemment. Une bonne atmosphère se dégage de ce lieu, combiné à la qualité du son et une scène surélevée pour que tous vos sens se délectent.
L’affiche: Valley of the Sun, White Miles et Truckfighters.
Arrivé en avance il paraît raisonnable de faire le plein de bonnes énergies avant d’attaquer la soirée, le bar/brasserie du coin de la rue me fait de l’œil et pas qu’à moi apparemment vu que les stars du jour s’y installent également quelques instants plus tard pour un apéro d’avant concert. Note pour plus tard, penser à revenir dans ce bar, de toute évidence de bonnes rencontres à y faire.
Vient l’heure de rentrer dans la salle qui est déjà bien remplie, avec un petit tour par le stand merch de rigueur. Le stand merch est un bon reflet de la soirée : de qualité. Du choix pour les trois groupes, des produits « originaux », pour moi un vrai signe que le but de cette tournée pour nos amis suédois n’est plus juste de se faire connaître et de séduire. Aujourd’hui les Truckfighters ont marqué l’essai mais ils leur restent encore à le transformer, écrire pour la postérité leur nom dans le marbre.
Valley of the Sun entre en scène et c’est parti pour 30 minutes de stoner classique soit, mais d’excellente facture. Première signature sur le label Fuzzorama (de nos chers suédois) et on comprend pourquoi. Basse groovy à souhait, riff affutés, rythmes effrénés, voix juste avec ce qu’il faut de grain, pour un cocktail d’efficacité signé Cincinnati Ohio (comme nous le précise le groupe). On sent le groupe content d’être là, sourire aux lèvres, bonne communication, actifs sur scène et ils emportent avec eux l’unanimité du public. Le batteur donne tout ce qu’il a et bien plus encore, pensez à Dave Grohl survitaminé. Le résultat est simple : 3 titres = 2 baguettes de cassées. Heureusement pour les trois titres suivants il arrêtera là sa participation à la déforestation. En six morceaux VOTS (pour les intimes) tapent dans leurs différents albums (c’est toujours eux qui nous le précisent) et nous montrent et démontrent qu’ils sont définitivement un groupe à suivre. Il y a suffisamment d’efficacité et de variété dans ce qu’ils proposent pour nous donner envie de mieux les connaître.
Rapide changement de matériel et voilà les White Miles qui attaquent. Le groupe autrichien qui s’annonce comme originaire de Madagascar (première private joke de la soirée) nous propose un stoner/blues épuré à sa substantifique moelle : Guitare/voix + batterie. Pour faire dans l’analogie de base les White Miles sont les White Stripes du stoner sauf que cette fois madame gère la guitare et le chant et monsieur la batterie. Maintenant je ne crois pas qu’ils soient frère et sœur pour ceux que ça intéresse. Au fil des huit titres que vont nous offrir le groupe, les riffs sont bons, la batterie à bloc (je crois que ça doit être de rigueur pour cette tournée), le chant prenant. Le groupe échange beaucoup avec le public (seconde private joke avec quelqu’un dans la fosse) mais aussi avec la personne qui gère le merch (troisième private joke). On sent que la bonne humeur et le bon esprit règnent au sein de cette tournée. Maintenant les WM offrent un bon set mais qui pour ma part (et à vu de nez pour une partie de l’audience aussi) fait un peu retomber le soufflé.
Nouvelle intervention des roadies et des membres des groupes et résonne enfin dans la salle “Altered State” en guise d’intro/ mise en ambiance. Troisième fois que je m’apprête à voir Truckfighters en live. Après une prestation bonne mais un peu décevante pour ma part au Stoned Gatherings et un set rouleau compresseur au Hellfest, je suis plus que ravi de les voir en tête d’affiche dans de bonnes conditions pour juger le « meilleur groupe du monde » dixit JH.
C’est donc sur la douce mélancolie d’”Altered State” que Dango monte sur scène bientôt rejoint par Ozo et… mais c’est pas Poncho ! C’est quoi son petit nom déjà à ce batteur ? Désolé là je sèche et pour finir avec les analogies, Truckfighters sont les Spinal Tap du stoner définitivement.
Quoi qu’il en soit Dango nous balance l’intro de leur nouvelle offrande en date, “Mind Control” et c’est parti pour 1h30 de fuzz à gogo. Fidèle à leur image du fuzz il y en a, beaucoup ça c’est bien mais un peu trop compressé sur la gratte ce qui rend certains passages mélodiques trop étouffés.
Ce sont ces passages qui font la richesse du groupe et il est dommage que le son live ne leurs rendent pas justice. Ce sera le seul bémol de la soirée parce que sinon ça déboite.
“Atomic” pointe le bout de son nez ensuite et ne semble pas vouloir s’arrêter, signe que le groupe est là pour profiter avec nous du moment et pas juste en mode « pas le temps, on enchaine ».
“Universe” est sorti, il faut le défendre ! Ozo demande à la foule s’il doit commencer à jouer et une fois validation eue, il nous lance un petit “Get Lifted”.
Déjà deux morceaux du nouvel album et le verdict est simple : ça passe trèèès bien l’épreuve du live. Dango se risque à des reprises en cœur sur la chanson mais on peine à l’entendre. En même temps je ne vois pas comment il pourrait avoir assez de souffle pour chanter vu la débauche d’énergie dont il fait preuve tout le long d’un show. Parce que oui le gaillard en 1h30 ne s’arrête jamais, un accord = saut, et entre chaque bon : sautillement permanent. Il se donne physiquement à chaque concert et c’est communicatif ! C’est bien, rien qu’en le regardant j’ai fait mon sport pour l’année.
Ozo lui est très en voix. Quelques petites faiblesses par endroit mais je ne l’avais jamais entendu si juste et il n’est pas fainéant en terme d’investissement physique non plus donc je suis d’autant plus agréablement surpris. Le groupe visite l’ensemble de ces albums en jouant les « classiques », “Last Curfew” avec une intro jazzy étirée, “Manhattan Project”, “Traffic”.
Troisième échantillon du dernier né : “The Chairman”. Cette chanson démontre une fois de plus que le groupe compose de manière subtile sur album mais qu’une fois en live ça prend une autre ampleur. Un vrai coup de cœur pour ce morceau.
“Monte Gargano” déboule, le groupe fait une fois de plus durer le plaisir à la fin du morceau et Ozo n’y résiste pas et plonge dans la foule. L’interaction est totale avec le public. A partir de là les stage divings vont pleuvoir et quiconque monte sur scène est le bienvenu, le groupe jouant avec eux avant le fatidique saut ! “In search of (the)” achève l’audience avant un mini break. En guise de rappel quatrième représentant de Universe, “Prophet” qui lui aussi trouve sa place en live.
Ozo consulte ensuite le public conquis pour choisir l’ultime morceau de la soirée. Les demandes hurlées sont nombreuses et variées mais c’est “Desert Cruiser” qui l’emporte. Le public chante sur tous les refrains, le groupe se donne à fond, le bassiste finit une nouvelle fois dans la fosse.
Fin du show, c’est passé vite, trop vite. Démonstration est faite que Truckfighters assure plus que jamais en live et que si on leur laisse le temps il vous offre un vrai show original et bien pensé. C’est quand le prochain ?
Setlist :
Altered State
Mind Control
Atomic
Get Lifted
Last Curfew
Manhattan Project
Traffic
The Chairman
Monte Gargano
In Search Of (The)
Prophet
Desert Cruiser
Ain´t-One
Nos amis de Sound Of Liberation, à qui l’on doit aussi le formidable Desertfest de Berlin, avaient déjà monté quatre tournées sous le label “Up In Smoke” depuis 2011. C’est ainsi que des formations telles que Monkey3, Glowsun, Colour Haze, The Atomic Bitchwax, My Sleeping Karma et une poignée d’autres ont déjà sillonné l’Europe sous la bannière de ce festival itinérant. La nouvelle formule sédentaire propose quinze formations du meilleur tonneau qui se sont succédées sur deux scènes : une petite et une grande (qui l’eût cru ?) dans la salle bâloise, de l’heure du repas jusqu’à très tard dans la nuit…
Le choix de l’épicentre pharmaceutique et chimique suisse était judicieux pour voir converger des Suisses (ben tiens !), des Allemands et des Français dans cette cité à cheval sur les trois pays. C’est donc au chant du coq que vos deux envoyés spéciaux se sont tirés de leurs pénates respectives pour se chopper à l’aéroport de Bâle-Mulhouse où le représentant du Sud-Ouest se rendait en avion (on n’est pas bien payé par Desert-Rock, mais on rigole bien, ça compense) afin d’y être recueilli par le petit Suisse.
La salle est dans sa configuration habituelle, avec une partie des groupes sur la grande scène statique du club et une petite scène au niveau du public organisée sur le côté gauche du hangar. L’avantage d’une telle disposition est qu’à part pour fumer, bouffer ou s’aérer un peu les neurones (car il nous en reste un peu…), on peut assister à tous les concerts en n’ayant qu’à se tourner (c’est un peu comme à Roland Garros, mais en version plus rock’n’roll). Les petits futés que vous êtes auront noté au passage que si les concerts ne se chevauchent pas, c’est grâce à une organisation bien huilée qui envoie pile à l’heure tous les sets.
Nos horaires respectifs ne nous ayant pas permis d’être sur place à midi à l’ouverture des portes, nous n’avons pas pu assister au set de Marant (c’est pas drôle !) et de Joules. C’est donc avec SHEVER que nous avons commencé ce Up In Smoke dans la lourdeur de leur doom aux tempi fort ralentis. Expérience commune aux shows de doom : ça envoie du gras, ça réveille, ça fait bouger la nuque et déconcerte un peu le public, encore congru à cette heure de la journée, venu soit pour des groupes de stoner, soit pour Pentagram (les quidams avec leurs vestes à patch) soit – et ils étaient nombreux – pour la nouvelle coqueluche des newbies du stoner : Truckfighters ! La formation helvétique à majorité féminine nous assène donc ses rythmiques pachydermiques accompagnées de vociférations féminines hallucinées durant presque une demi-heure soit le temps qui leur était alloué pour séduire le public à l’heure du dessert. Les inconditionnels du groupe qui a déjà sorti quatre productions dans le circuit underground ont goûté aux interactions verbales de la frontwoman qui a échangé dans le dialecte local avec eux.

CAROUSEL
Sitôt les dernières salves lancées depuis la Main Stage, c’est CAROUSEL qui a envoyé un rock nettement moins bourrin sur la Small Stage. La formation américaine se distingue dans un tout autre registre que leurs prédécesseurs. Empreint de sonorités seventies, leur hard rock lorgnant vers le psychédélisme est fort appréciable en live. C’est la plupart des brûlots de “Jeweler’s Daughter” qui ont été balancés par le groupe qui avait sorti pour l’occasion ses grattes d’un autre temps. Enfin, d’un autre temps pour le quidam moyen, mais certainement pas pour ces types qui semblent avoir le compteur bloqué sur le début des années quatre-vingt lorsque les soli agrémentaient tous les titres fomentés par des chevelus. Ca groove incroyablement bien même si la voix aiguë et nasillarde de l’imposant chanteur à chemise de bûcheron dépareille avec sa stature. Croyez-nous les enfants, quand l’Explorer croise le fer avec la SG sur leurs riffs bien foutus, on comprend pourquoi Tee Pee a sorti la plaque de cette bande de chevelus au potentiel impressionnant.

BRIGHT CURSE
Nous quittons la scène raz du sol pour assister à la prestation d’un second groupe non autochtone : c’est au trio de BRIGHT CURSE que revient l’honneur d’ouvrir les hostilités internationales sur la main stage de ce Up In Smoke. Le groupe pour partie français, établi en Angleterre, nous avait fait kiffer avec leur premier jet et nous attendions avec impatience de voir ces garçons dans le brouillard en live maintenant qu’ils se sont confrontés plusieurs fois à cette exercice (ce qui n’était pas le cas lorsqu’ils ouvrirent pour Naam à Genève au printemps dernier). Le moins que l’on puisse dire c’est que le côté plutôt aérien et psychédélique de leur son prend une énorme paire de couilles sur scène où ils envoient des versions nettement plus lourdes de leurs compositions. La setlist est calée sur le premier album, chose qui n’est pas très étonnante pour un groupe n’ayant qu’une production à son actif, mais l’efficacité scénique du trio le distance de la division amateur même s’ils avouèrent en fin de set n’avoir jamais joué devant un public si nombreux : continuez comme ça les gars et ça devrait se reproduire assez vite ! Très à l’aise sur cette grande scène malgré des lights vissées quasi uniquement sur le frontman de la formation (Romain), Bright Curse a assuré un show impeccable et nous devrions entendre parler de ces types très rapidement vu le stoner de qualité qu’ils fomentent.

GRAND LOOM
Et hop, quart de tour sur la gauche pour ne pas rater les allemands de GRANDLOOM qui finissent de préparer la petite scène à leur assaut. Le trio, visiblement ravi d’être là (ça tombe bien, nous aussi !), engage les premiers accords de son stoner instrumental teinté de bon vieux heavy rock 70’s et de quelques passages subtilement planants. Ils ont la pêche, et manifestement ont décidé de se donner à fond sur les trente minutes qui leur sont allouées. La formule musicale standard de tout trio instrumental est exigeante en soi : elle n’autorise ni l’approximation ni l’incompétence. Grandloom ne se heurte jamais à aucun de ces écueils. Le groupe en fait la démonstration dès “Orbit Wobbler” en intro, un titre épique et groovy d’une dizaine de minutes, qui permet à Thomas de déverser quelques seaux de fuzz devant un public ravi, tandis que Hans, qui gardera le sourire aux lèvres pendant toute la durée du set, se défonce pour former une ligne de basse consistante, ronde et punchy à la fois. Lui et le nouveau batteur du groupe, Tim, constituent une base rythmique impeccable. Au milieu d’un set peu copieux (trois ou quatre longs titres rempliront vite ce petit créneau) le trio dégainera aussi le punchy “Woodbridge” (toujours issus de son premier – et seul véritable – album), un titre efficace, même si donnant une impression un peu déstructurée en live (des breaks en veux-tu en voilà). Un groupe intéressant, et en tout cas un vrai bon groupe de scène, qu’il est probablement intéressant de voir sur un set plus long, où il a le temps de dresser des ambiances plus “profondes”…

STEAK
Pas le temps de se poser, on court vite vers la main stage pour ne pas rater une minute des très hype STEAK (bon, on va pas vous la faire, on a au passage un peu abusé des dix minutes de pause entre les groupes pour faire quelques passages au bar…). Quoi qu’il en soit, on est bel et bien au premier rang lorsque le quatuor londonien pose les premiers accords de “Black Milk” et de son riff bien crade et lancinant, qui fait se rapprocher le public. On évalue très vite les forces en présence : un chanteur charismatique (qui même si sa technique vocale n’est pas irréprochable, compense par un coffre et une puissance impeccablement appropriés), un guitariste un peu poseur (mais qui le vaut bien) et une base rythmique moins démonstrative mais fichtrement bien en place. Du coup, ben on a tout ce qu’il faut, là sous nos yeux, et on apprécie. Les riffs de Reece sont tour à tour vicieux et chargés de fuzz, ou plus planants, accolés à un bassiste bien dans son trip. Même si les britons évoluent globalement dans un cadre musical plus propice aux mid-tempi, la charge en règle que représentent les riffs de morceaux comme “Whiskey Mule” ou “Liquid Gold” génère une énergie phénoménale, et assez contagieuse. On aurait néanmoins apprécié que la machine s’emballe un peu : sur la demi-heure de set qui lui était réservée, on aurait pu glisser quelques passages un peu plus “nerveux” peut-être pour se démarquer un peu, et remuer un peu un public qui a déjà enquillé quelques concerts bien sympas à cette heure. Pas la révélation attendue, mais un groupe qui assure, à voir assurément sur un set plus long.

THE MIDNIGHT GHOST TRAIN
Petite séance d’aération des poumons et retour dans le chaudron bâlois, qui commence à être furieusement bien rempli et voit donc des sourires illuminer le minois des organisateurs (c’était pas gagné d’avance), pour se diriger vers la petite scène où le trio étasunien MIDNIGHT GHOST TRAIN s’apprête à foutre un boulet énorme ! C’est clairement la révélation du festival qui s’apprête à envoyer du rock bien gras à l’image de ses membres qui sont un peu l’antithèse physique de Kadavar. Passées ces considérations visuelles, nous sommes aspirés vers la scène où le groupe déploie une énergie incroyable pour nous faire vibrer, nous secouer la nuque et taper du pied voire plus si affinité. C’est un set digne de celui gravé dans le sillon lors du dernier Roadburn (le “Live At Roadburn 2013” en fait) dont le groupe nous gratifie et à voir les bananes fleurir sur les bobines du public présent, nous ne sommes pas les seuls à être conquis par ce trio de hard rock bien seventies qui sait être tantôt subtil tantôt superbement grailleux. Mention spéciale à son leader charismatique Steve Moss dont la voix éraillée a fait mouche dans nos cages à miel surtout sur des brûlots tels que “Woman Of Hate” qui suinte par tous les pores le rock de dégénéré aux relents blues. Vivement la prochaine !

MONKEY 3
On se dégourdit les jambes quelques mètres en se frayant un passage au milieu des fumeurs et des amateurs de junk food puis retour à la case Grande Scène pour une ultime formation helvétique ; pas n’importe laquelle puisque c’est au tour de MONKEY 3 d’envoyer du son dans le Z7. “The 5th Sun” n’est pas encore dans les bacs, mais les aficionados ont déjà parcouru le web et écouté le split pour se faire une idée de l’orientation musicale qu’a pris le quatuor instrumental : ils n’ont pas été déçus car la formation lausannoise persiste dans son style tout en montant en puissance albums après albums ! Boris, Walter, Picasso et son chapeau ainsi que dB nous proposent un set à quelques encablures de ses précédentes prestations en s’éloignant des setlists auxquelles nous sommes habitués, ce qui est assez cohérent vue la sortie de leur nouvelle plaque. Ces lascars attaquent bille en tête avec un nouveau titre fleuve : “Icarus” qui désoriente un tantinet les quidams venus pour les standards de nos chouchous, mais quel énorme panard nous avons pris avec ce titre énorme dans tous les sens du terme qui nous a carrément transcendé d’entrée de jeu. Le reste du show fût du même tonneau et ce n’est pas demain la veille que nous allons nous lasser de cette formation incroyable, même si Boris a abandonné son légendaire marcel ! Du tout grand art au programme et notre forte incitation à aller découvrir la dernière galette en date pour ceux qui ne l’auraient pas encore fait (nous avons les noms !).

GLOWSUN
Certes, on ne dénombre dans la journée qu’un seul et unique groupe français, mais quand la machine GLOWSUN se met discrètement en place sur la petite scène et commence à faire pleurer les riffs de “Death’s Face”, on comprend que niveau qualité, on est dans le haut du panier. L’intro et ses ambiances éthérées (quelques passages de wah-wah bien sympas) laisse sa place à une montée en tension fiévreuse sur la fin du titre, qui donne le ton des trois petits quarts d’heures qui constitueront l’un des points d’orgue de cette journée (qui décidément méritait bien le déplacement !). Tandis que Ronan et Fab sont concentrés sur les fondations rythmiques de cet édifice colossal, Johan est à fond dedans. Quand on connaît le personnage en dehors de la scène, posé et discret, le voir aussi furieux et expressif derrière sa gratte est une surprise en soi. Après un groovy et percutant “Virus” parfaitement exécuté (seul extrait de leur première production), le trio enquille les perles issues de son classique second LP. Les soli sont envoyés sans interruption, enchaînés à l’avalanche de riffs de ce set, au son énôôôôrme. En fait, il faut vraiment voir Glowsun sur scène pour comprendre la puissance du choc : quand on est habitués à leurs albums finement ciselés et efficacement mis en son, entendre les mêmes titres avec toute la puissance du groupe et un son dix fois plus gras est une nouvelle surprise. La setlist fait la part belle à “Eternal Season” (dont le design orne deux beaux socles lumineux verticaux sur la scène, une excellente initiative pour sortir un peu du lot !), et joue un titre encore inconnu (sur le prochain album ?) comme un cadeau donné aux fans, et notamment les nouveaux fans gagnés aujourd’hui, en nombre. Ce soir Glowsun n’a pas simplement convaincu, ils ont mis la barre du stoner hexagonal très très haut, et après ça, les successeurs restant à passer sur l’affiche de ce bien nommé Up In Smoke vont devoir s’accrocher. Carton.

TRUCKFIGHTERS
Un autre trio, suédois cette fois, prend la suite sur l’affiche : les très attendus TRUCKFIGHTERS, auréolés d’une série de tournées dans le monde entier, de quelques apparitions remarquées en festival (le Hellfest cet été, une belle claque), viennent presque en terrain conquis, bien préparés à botter quelques culs. Ca commence très bien et très fort avec (surprise…) “Desert Cruiser”, toujours lui. Mais avouons que son riff simplissime remarquable, déluge de fuzz blindé d’une basse ronflante, est une introduction dont il est difficile de se passer de la part des trois suédois. Un peu après rugissent les premiers accords de “Monte Gargano”, un titre assez exceptionnel et très sous-estimé lui aussi, dont a minima le refrain à contretemps et son riff plus élaboré sont des petits trésors d’inventivité et d’efficacité. Mais les choses se gâtent un peu lorsque le groupe se lance dans le morceau titre de son dernier E.P., “The chairman”, un titre alambiqué, plein de breaks, au tempo un peu “bâtard” (ni rapide ni lourd), sans riff remarquable, des soli peu impressionnants… et ce sur plus de huit minutes ! Le titre désarçonne un peu un public qui vient de s’enquiller un paquet de super concerts jusqu’ici, et attend un set percutant et efficace. Clairement pas la pièce maîtresse à dégainer en milieu de set, encore moins enchaînée au pourtant très bon “Last Curfew”, trop subtil à ce moment stratégique de la setlist. Et de fait, la fin du concert sera un peu lourdingue, et les sauts de cabri désormais légendaires de Dango (qui feront grincer quelques dents dans le public – sans doute des gens qui ne comprennent pas que le stoner n’est pas forcément introspectif et nombriliste…) n’y feront rien. Un peu moins d’une heure dont on ne retiendra en terme d’efficacité pure que le premier tiers du concert. Notons néanmoins que la majorité du public aura passé le concert entier à fond dans le set, et en ressortira objectivement pleinement satisfait.

MY SLEEPING KARMA
Comme c’était déjà le cas il y a quelques mois au dernier Desertfest de Berlin, MY SLEEPING KARMA se retrouve sur la plus petite des scènes et comme c’était déjà le cas il y a quelques mois, Matte, Seppi, Steffi et Norman ont foutu un énorme boulet à la salle qui les accueillait ce soir-là ! L’intensité scénique que délivre ce quatuor instrumental nous transcende carrément à chacune de ses apparitions et nous ne nous sommes pas fait prier pour friser l’orgasme durant le concert des Allemands ! Seppi, impérial, accompagné de son acolyte Matte font rapidement disparaître l’absence de chanteur dans le groupe en occupant physiquement bien la scène et captivant aisément tout le public qui se retrouve très rapidement comme envoûté par les mélodies aériennes et hypnotiques délivrées par le quatuor. Des nappes synthétique bien présentes, des riffs psychédéliques, une rythmique bien calée, un public qui prend un énorme plaisir, des influences bouddhistes et un groupe qui prend son pied sur scène : c’est les ingrédients qui ont une nouvelle fois transformé un show de rock de My Sleeping Karma en un pur moment de bonheur terrestre ! Le groupe nous a gratifié de titres extraordinaires dont seuls ils ont le secret, à l’image de”Tamas”, “Pachyclada”, “Psylocybe” et bien sûr l’énormissime “Glow 11” qui doit être un des morceaux les plus géniaux jamais composés !

COLOUR HAZE
Alors que Matte salue le public, les mecs de COLOUR HAZEattendent patiemment sur scène, les musiciens prêts, les réglages faits et l’attitude aussi expressive que celle qu’ils auront durant tout leur set. Il est à noter que le format festival a contraint les Allemands à adapter une setlist restreinte, rentrant dans la durée qui leur était allouée. Beaucoup plus percutant quand il s’agit de se laisser à aller à jammer sans limite, Colour Haze a néanmoins balancé un set de belle facture qui n’a toutefois pas conquis la totalité du public. Il faut dire que si le groupe compte une grosse poignée d’adeptes par delà la planète stoner, il n’est pas composé des personnalités les plus extraverties qu’il soit. En fait c’est un peu comme si des profs de musique faisaient étalage de leurs prouesses techniques et ça, ça passe assez mal après le délire qu’a été le show de leurs compatriotes de My Sleeping Karma. Ces virtuoses que nous adorons sur disque ont peiné à nous convaincre ce soir-là à Bâle. Peut-être avions nous placé la barre trop haut ou vu trop de bonnes formations se succéder sur scène car c’est pas que nous ne soyons pas réceptif à l’art de ce tiercé de grosses pointures du stoner, mais jamais durant ce concert nous nous sommes sentis transportés par la musique de ce groupe. Dommage parce que sur le papier c’est un des groupes qui nous a fait bouger et ce n’est pas demain la veille que nous allons cesser de les écouter. Il est fort à craindre que ce manque d’osmose avec les vétérans de Munich est aussi à créditer sur le syndrome exprimé ci-après. Comme ce n’était pas notre première confrontation avec ces superstars du stoner européen, il y a fort à parier que dans une configuration moins rigide, nous allons prendre un énorme panard lorsque nous recroiserons la route de Colour Haze.

RADIO MOSCOW
Cher lecteur, le moment est venu de te narrer les aléas existentiels liés à la triste condition du chroniqueur, des aléas dont certains groupes sont souvent, injustement, la victime. Debout depuis dix-sept heures de temps, deux avions (pour l’un, ou quelques centaines de kilomètres pour l’autre), treize concerts jusqu’ici, quelques bières, quelques boissons énergisantes pour tenir le coup (pros jusqu’au bout !), ledit chroniqueur (qui n’est qu’humain, rappelons-le) voit son métabolisme de guerrier fléchir pendant une petite heure autour de minuit… et ce jour-là, c’est malheureusement les très attendus RADIO MOSCOW qui en font les frais. Les américains (comme leur patronyme ne le laisse pas présumer) ne déméritent pourtant pas : tandis que le bassiste et le batteur sont plutôt du style introvertis, tous les regards se focalisent vers l’unique leader du groupe, Parker Griggs, excellent guitariste et vocaliste de son état. Le trio joue bien, son stoner rock assez classique présentant néanmoins des atours assez variés (blues, psyché, heavy, doom “light” même…). Seulement, malheureusement, le groupe dans ces conditions ne présente pas d’élément marquant qui parvienne à faire émerger cette prestation du maelstrom que constitue déjà ce Up In Smoke : light show atone, jeu scénique basique, musique qui ne se démarque pas radicalement de ses prédécesseurs (ce qui ne diminue ni la qualité des compos ni le talent des instrumentistes)… Aveu d’échec, cher lecteur, on n’a pas été à la hauteur de ce groupe, que l’on meurt d’envie de revoir dans de bonnes conditions. On est passés à côté.
PENTAGRAMUn mal pour un bien, au final, car ce petit passage à vide nous aura bien requinqué pour l’indiscutable tête d’affiche de cette journée, PENTAGRAM, et quand Bobby Liebling et son regard de vieux vicelard tordu monte sur scène sur le riff sur-heavy de “Treat me right”, les sourires sont omniprésents dans le Z7. Le vocaliste, dont l’énergie semble intacte malgré le poids des années, attire légitimement tous les regards : ses poses étranges, ses regards incroyablement glauques, ses gesticulations (entre la danse lugubre et la pantomime naïve) font le bonheur d’un public d’afficionados qui n’en demande pas tant. Sa voix n’est plus celle de ses vingt ans (bon sang, le bonhomme un peu cinglé qui s’agite devant nous va quand même terminer sa sixième décennie !), mais il assure quand même bien le niveau attendu (rappelons quand même que le point fort de Pentagram n’a jamais été le coffre de son vocaliste plutôt que sa personnalité et sa tessiture vocale, subtilement nasillarde). Illustration est faite sur le bien glauque “Forever My Queen” ou un peu plus tard encore le classique incontournable “Sign of the Wolf” très appréciés par un public au taquet ! Les musiciens qui accompagnent papy Bobby ne déméritent pas, signe si besoin était de confirmer le talent du vieux roublard pour s’entourer de zicos impeccables : sa plus récente recrue, le taciturne Matt Goldsborough à la gratte, débite les riffs impeccables du combo comme si de rien n’était, et son toucher fait mouche sur les innombrables soli que devant lesquels Bobby se prosterne sans arrêt (témoin ce superbe “Dying World”). Le duo basse-batterie ne démérite pas, jouant par ailleurs d’une complicité apparente qui fait plaisir à voir. Le quatuor, pro jusqu’au bout des ongles, déroule donc son set constitué essentiellement de classiques ; efficacité garantie. On aura tôt fait de regretter peut-être un léger manque de prise de risque dans le choix des titres joués ce soir, mais au final, le set tourne super bien, et après quinze concerts aujourd’hui, l’on peut aussi présumer qu’on n’aurait peut-être pas forcément apprécié un titre obscur et peu connu, issu de la disco fournie du groupe. On ne boude donc pas notre plaisir de terminer notre soirée avec un Pentagram en bonne forme.
Voilà qui clôt de fort belle manière un festival très réussi sous cette forme ! Réjouissez-vous bande de petits veinards, la formule ayant été fort concluante, vous pouvez déjà noter au marker rouge la date du samedi 4 octobre 2014 car une deuxième édition de ce festival aura lieu au même endroit. On ne change pas une équipe qui gagne ! Rendez-vous l’an prochain !
Chris & Laurent
L’honneur est sauf quand l’on rentre dans la Dynamo, cette sympathique salle toulousaine de capacité honorable… car le remplissage en début de soirée est loin d’être ridicule ! Même si les préventes n’étaient pas au niveau attendu, les toulousains ont su répondre présent et faire de cette soirée une étape réussie supplémentaire de cette mini-tournée prestigieuse sur le papier, mais audacieuse néanmoins : My Sleeping Karma et Colour Haze sont portés depuis plusieurs années par une réputation inattaquable… plutôt dans la partie Centrale du continent ! Leur venue en ces contrées plus occidentales (Ouest, Sud-Ouest de la France, Espagne…) est complètement inédite, et leur fanbase est à construire. Au vu du succès de cette tournée, gageons que l’objectif est bien parti pour être atteint et que le reste du continent est prêt à succomber…
On commence la soirée avec Aerisian, un trio que l’on présume local, qui n’apporte pas grand-chose à la soirée si ce n’est lancer l’activité du bar. Les trois gaillards, assis sur des tabourets, enquillent des compos à trois guitares sèches. Pas inintéressant en soi (y compris un dernier titre presque épique dans sa structure et son interprétation) mais pas non plus une entrée en matière appropriée à l’ambiance développée par nos têtes d’affiche.

Ce n’est que lorsque MY SLEEPING KARMA monte sur scène que les affaires démarrent donc vraiment. La montée se fait très progressivement avec le désormais habituel “Pachyclada”, un titre lent, inspiré et juste catchy comme il faut. Il n’a pas suffit de plus pour emporter le public, et le sentiment est partagé, puisque dès lors les sourires s’imposent sur les visages des musiciens. La scène est de petite taille (et le kit de Steffen est posé devant celui de Manfred, le cogneur de Colour Haze, ce qui restreint encore un peu la surface) mais le groupe s’en accomode, et les musiciens évoluent dessus sans obstacle : ils vivent étroitement leur musique, comme une sorte d’osmose entre eux trois – clairement les échanges scéniques se font uniquement dans le cadre du trio guitare-basse-batterie, le claviériste (aussi essentielles que soient ses nappes sonores dans la musique du groupe) faisant son truc de son côté. Il suffit d’un clin d’œil, d’un sourire, d’un hochement de tête pour qu’ils se plongent dans un break ou ne se rattrapent au branche après un petit passage modestement jammé. C’est beau à voir ! La set list verra défiler sur l’heure de set les meilleurs titres de toutes leurs productions (puisqu’ils remontent jusqu’à leur première sortie, notamment avec le désormais classique “Glow 11” et ses violentes montées en puissance). Les sourires sincèrement reconnaissants vis-à-vis d’un public de connaisseur sont omniprésents, et Matte n’hésitera pas à s’adresser autant que possible aux spectateurs dans leur langue d’origine, un effort louable ! Une belle claque en tout cas, pas la première avec le groupe.

Quand COLOUR HAZE prend place sur scène (après un court intermède), l’ambiance reste la même dans le public, en moins “animée” peut-être, la musique du second groupe allemand ce soir étant un peu plus introspective dans son approche, plus largement planante, même si les passages plus incisifs et rythmés ne manquent pas. Il faut dire aussi que l’attitude scénique de nos trois lascars laisse un peu pantois quand on les voit pour la première fois. Par politesse, on passera sous silence la posture de Philipp à la basse, faisant passer les concerts de Brant Bjork & the Bros pour un concert de Dillinger Escape Plan… Le gars ne bronche pas, planté immobile sur ses deux pieds. Au final, on aura néanmoins du mal à valoriser son collègue cordiste Steffan, qui n’est pas beaucoup plus animé derrière sa guitare : pieds nus derrière son rack de pédales d’effets, le bonhomme au visage largement dissimulé par sa chevelure “Tahiti Bob” ne lève que rarement la tête pour s’enquérir du ressenti du public. Mais au final, on aurait du mal à le critiquer pour sa posture : d’une part, il assure des lignes de gratte absolument remarquables : rythmiques, soli, breaks maîtrisés, impros impeccables… il abat à lui seul une quantité de boulot remarquable. Et par ailleurs, le bonhomme est complètement immergé dans l’ambiance musicale qu’il tisse avec ses potes. Avec un design visuel scénique inexistant (quasiment pas de light show, rien de décoré), pas plus de dix mots adressés au public dans toute la soirée, tout est clairement orienté sur la musique, et rien ne s’en dévie, jamais. Et du coup, portés par une qualité de riffs et de compos effectivement inattaquable, l’adhésion se fait assez vite. Les gars ne sortent jamais de leur trip, et enquillent les titres sans effort. On notera un all-star man de l’ombre, avec un batteur impeccable, qui alterne sans efforts des styles de frappe tantôt jazzy, tantôt bluesy, tantôt heavy… Je préfère ne pas m’engager sur la set list pratiquée, ayant été contraint pour motifs personnels de quitter la salle aux alentours de minuit, après déjà plus d’une heure d’un set qui ne semblait pas près de s’achever, devant un public ravi, qui n’en demandait pas tant, et qui aura passé une fichtrement bonne soirée.
Laurent
J’aime la façon dont le stoner (au sens large) évolue dans notre pays. Bien sur j’aimerais que tout soit plus rapide mais tout vient à point à qui sait attendre et nous pouvons finalement être heureux de la tournure des choses.
Il y a dix ans, si on m’avait dit que deux groupes allemands, l’un 100% instrumental, l’autre en grande partie, rempliraient une salle comme le Divan du Monde pour donner deux superbes concerts devant une public conquis d’avance et très enthousiaste, je n’aurais pas misé un euro la dessus, surtout à plus de 25 € la place.
Sauf que voilà, cela fait des années que des gens y croient, cela fait des années que certains s’investissent corps et âmes pour que ce genre de soirée puisse avoir lieu et c’est avec une satisfaction vraiment sincère que je me rends à Paris pour cette affiche magnifique, Colour Haze précédé de My Sleeping Karmapour la première des quatre dates en France, oui vous avez bien lu, quatre dates en France.
Le quatuor de My Sleeping Karma vient nous offrir ce qu’ils font de meilleurs pour ouvrir la soirée. Et quand je dis ce qu’ils ont de meilleurs, je pourrais même dire de la meilleure des façons possibles. Avec de splendides interprétations de certains de leurs excellents morceaux, Seppi et ses acolytes nous ont offert cinquante minutes de pur bonheur. Energique et planant, totalement maitrisé, le concert, de la première à la dernière seconde, vous transporte ailleurs, vous file des frissons et vous mets le sourire aux lèvres instantanément. En plus de cela vous ajoutez un excellent son qui permet d’apprécier pleinement la performance du groupe, tant dans l’équilibre que dans la puissance.
Le groupe alterne les passages planants, aux rythmes répétitifs pour d’un coup vous plonger dans un break psyché ou une envolé heavy de toute beauté.
Une excellente prestation, les applaudissements me font dire que je ne suis pas le seul à avoir apprécié le show.

Place au trio de Colour Haze pour un peu moins de deux heures d’un show là aussi réellement intéressant et particulièrement maîtrisé. Colour Haze, c’est le genre de groupe qui peut commencer son concert avec un She Said de plus de vingt minutes… C’est bluffant, c’est magnifique, c’est jouissif. Le groupe maîtrise ses compos de façon impressionnante. L’entente entre les trois membres est une évidence. De nombreux coups d’œil entre eux, une complicité, une alchimie parfaite qui rejaillit sur leur musique, qui montre et traduit cette cohérence de façon tellement plaisante pour un public qui ne s’y trompe pas et applaudit là aussi généreusement.
Le groupe enchaîne ensuite avec Moon et à titre personnel, voilà, je suis aux anges. Un titre que j’affectionne particulièrement et qui est magnifiquement interprété… C’est du tout bon, c’est duColour Haze des grands jours.
La setlist est exclusivement consacrée aux quatre derniers albums du groupe à l’exception d’un nouveau titre qui, sur les impressions que peuvent laisser une découverte en concert semble encore présager du meilleur avec un rythme légèrement oriental en intro.
Le groupe nous laisse comme il nous a accueillis avec un Peace, Brothers & Sisters! de plus de vingt minutes. Le public est pleinement satisfait, le groupe est chaleureusement remercié par des applaudissements nourris.

Une excellente soirée donc, comme on en rêvait il y a plus de dix ans et qui est maintenant une réalité. Un grand merci à ceux qui ont cru qu’un jour ce genre de concert aurait sa place dans la capitale. Ils ont eu raison d’y croire et les voilà récompensés par un public pleinement satisfait.
Setlists:
My Sleeping Karma
Pachyclada
23 Enigma
Ephedra
Glow 11
Ahimsa
Tamas
Psylocybe
Colour Haze
She Said
Moon
Lights
Aquamaria
Nouveau titre.
Transformation
Slowdown
Love
Tempel
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Peace, Brothers & Sisters!
Shinkibo
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