Categories

Archives

A sample text widget

Etiam pulvinar consectetur dolor sed malesuada. Ut convallis euismod dolor nec pretium. Nunc ut tristique massa.

Nam sodales mi vitae dolor ullamcorper et vulputate enim accumsan. Morbi orci magna, tincidunt vitae molestie nec, molestie at mi. Nulla nulla lorem, suscipit in posuere in, interdum non magna.

CROWBAR, HANGMAN’S CHAIR, WITCH MOUNTAIN, TOMBSTONES – 10 juin 2014 – Paris (Flèche d’Or)

afficheCrowbar redevenu priorité de ce bon vieux Kirk, il ne faut plus désormais attendre des siècles pour voir le combo Louisianais de ce côté-ci de l’atlantique. A peine deux ans après leur venue au Nouveau Casino, revoici le quartet à Paris, pour promouvoir Symmetry In Black, leur petit dernier. L’affluence s’annonçait catastrophique ce 10 juin 2014 mais l’annulation du concert de Megadeth qui devait se tenir le même jour et le rajout sur l’affiche du plateau Witch Mountain/Tombstones a permis de sauver les meubles. Nul doute qu’un autre choix de salle aurait permis un meilleur score, puisque l’habitué des concerts parisiens sait pertinemment que la Flèche d’Or ne permet pas de jouer a un volume suffisant pour ce genre de musique, info dont l’organisateur du soir ne semble pas vouloir tenir compte. A défaut d’un public hétéroclite, les fans fidèles, habile mélange de stoned heads et coreux avinés se donnent tout de même rendez-vous dans le 20ème pour leur dose de riffs doomy. Tombstones attaquent d’ailleurs très tôt, devant un parterre plus que parsemé et n’ont le temps de proposer que 25 petites minutes de leur doom nordique que les habitués des Stoned Gatherings ont pu découvrir en février dernier. Très vite ils laissent la place à Witch Mountain, a qui il ne sera alloué qu’à peine plus de temps. Quelle frustration de ne pas pouvoir profiter plus longtemps de ce mix idéal entre doom ricain, crasseux et tendu et cette voix parfois pop, parfois lyrique. « The Ballad of Lanky Rae » et « Shelter » seront les bons moments de ce set éclair. Viennent ensuite Hangman’s Chair, fierté Parisienne du grunge/heavy rock dangereusement imbibé, que l’on a l’habitude désormais de voir sur toutes les premières parties de certaines prods. On ne va s’en plaindre qu’à moitié, vu le talent du combo. Ces derniers balancent 7 titres aux tempi lourds, jouant le meilleur de leur discographie « I Am The Probleme », « The Saddest Call » ou « No Rest I’ve Found » et proposant trois nouveaux titres dont les noms n’ont pas filtrés. Désormais accompagné de projections vidéo renforçant l’identité du combo, qui verse dans l’histoire sordide des baffons d’un Paris dépressif aujourd’hui un peu disparu, Hangman’s Chair déverse son rock aux relents de pigeons cancéreux et la pisse de sdf, un univers qui leur va bien. Seul le chant de Cubi amène une touche d’espoir dans le tableau dépeint par ces quatre marmules sur fond de guitares saturées.

Le temps d’un changement de plateau et les stars du soir prennent place sur la petite scène de la Flèche avec simplicité et décontraction. La quatuor balaye sa riche discographie en empruntant les meilleurs titres à chacun de leurs opus, servant une set lis en forme de best of, finalement assez attendue quoique jouissive. Seul « Walk With Knowledge Wisely » sera extraite de Symetry In Black amorçant l’avalanche de hit en fin de gig. « Planets Collide » sera évidemment le point culminant de la soirée mais amène indubitablement la réflexion suivante : Quand Crowbar se décidera enfin à jouer Odd Fellow Rest en intégralité ? Attendons 2018 pour les 20 ans de l’album ! Reste que le concert du soir sera de bonne facture, quoique dénué de véritable surprise, et l’affluence en berne (confirmée sur l’ensemble de la tournée) montre qu’il va falloir pour Crowbar trouver quelque chose de neuf et d’excitant à proposer, au risque de voir sa réputation décliner. Allez, un bon coup de pompe dans la tronche d’un slammeur, comme au Maryland Deathfest le 22 mai dernier, ça serait déjà un bon début non ?

Lien : youtube

Crowbar Setlist :
Burn Your World
High Rate Extinction
The Lasting Dose
Sever The Wicked Hand
Liquid Sky And Cold Black Earth
Vacuum
New Dawn
Walk With Knowledge Wisely
The Cimetery Angels
Planets Collide
Conquering
All I Had (I Gave)
Self-Inflicted

CLUTCH – 20 juin 2014 – Paris (Nouveau Casino)

 

clutchnewcaz

Ma bière a tenu quatre petits pas… avant de venir nourrir abondamment mon T-shirt… le Nouveau Casino est plein ce soir ! La foule est dense, impatiente. Je n’ai jamais vu cette très bonne petite salle dans cet état. Je n’ai jamais vu non plus ce groupe en live et le connaît d’ailleurs depuis peu. Vous aurez donc droit à ma vision première de Clutch qui vient pourfendre les tympans des parisiens restés au bercail avant une date au Hellfest.  Gentille attention car nous voici en plus devant la seule date française en club pour une tournée plutôt chargée ailleurs en Europe. Étant arrivé pile poil pour le début du show, pas de DJ de première partie pour moi pour me chauffer mais ce ne sera pas la peine.

Les musiciens prennent places aux points clés de la scène et Neil salut la foule. Et c’est parti. Première particularité qui saute aux yeux pour quelqu’un qui, comme moi, découvre le groupe, c’est la gestion de cette scène justement. Le guitariste et le bassiste sont fixés au sol et il me semble qu’ils n’ont pas bougé de plus de 3 centimètres autour de leur point de départ. Le batteur, vous l’imaginez, reste à sa place. L’espace est donc complètement libre pour que Neil l’occupe. Et il l’occupe. Il communique au moins autant par le chant que par les gestes d’ailleurs. On l’observe faire les cents pas, montrer du doigts les trois quarts du public et le ciel, souvent le ciel. Aucune ironie ici, l’homme possède un talent trop rare, celui de communiquer son énergie au monde. On oublie finalement un peu le reste du groupe pour se concentrer sur lui.

Enfin, au moins visuellement, parce que musicalement ça tabasse entre heavy metal, hard rock et de gros retours de blues tout en gardant une forte homogénéité. Le set commence par une rareté “Sea of Destruction” qui est pas mal joué sur cette tournée et qui est accueilli comme il se doit par le public. Suivent 3 morceaux du dernier méfait “Earth Rocker” dont “Crucial Velocity” ultra-efficace avec son refrain fait pour déchaîner le public, tout simplement. Encore 5 morceaux de cet excellent album seront joués dont le très doux “Gone Cold” qui précèdera “D.C. Sound Attack!”, sortant du lot, car Neil y utilise un harmonica et tape sur une cloche (visiblement piquée à une vache). Suivront également des classiques comme “The Mob Goes Wild” ou le plus posé “The Regulator” qui permettra de reprendre son souffle en milieu de set. Si la quasi-totalité de “Earth Rocker” est joué, le groupe piochera néanmoins dans nombreuses de ses productions comme “Blast Tyrant”, “Robot Hive / Exodus” et “From Beale Street to Oblivion”. Ils finissent comme assez souvent par l’enchaînement “Electric Worry” / “One Eyed Dollar” et c’est assez efficace ! Pour revenir sur les musiciens, chacun aura en quelque sorte son heure de gloire à travers par exemple des espaces laissés à la basse ou le temps d’un solo de batterie à l’ancienne.

Le public de son côté chante, se travaille gentiment les côtes, joue au concours de la nuque la plus souple et tente le plus possible de se rapprocher de son idole en levant les mains au ciel. Bref, un consensus populaire de bonheur.

Le groupe a donc envoyé des kilotonnes d’énergie que le public a su mettre à profit. Dire que la soirée fut bonne serait un euphémisme. A bientôt Clutch !

 

Cosmic Mo

HELLFEST 2014 – Jour 3 (Unida, Spirit Caravan, Dozer, HOBP,…), 22 juin 2014, Clisson

La journée qui commence s’annonce compliquée : il y a des concerts dans tous les sens, à ne plus savoir où donner la tête, des interviews, etc… Une chose est sûre, on ne va pas s’ennuyer, ce qui nous évitera de ressasser que, ça y est, c’est la dernière journée…

BLUES PILLS
j3-bluespills


Par contre, mauvais départ, on rate Year Of The Goat sur la Main stage n°2 en “début de matinée” (10h30)… Damned ! On rattrape ce faux pas en assistant au concert des suédois (OK, moitié suédois) de BLUES PILLS sur… la Main stage n°1 !! On savait le groupe en phase de carrière ascendante, et sa récente tournée (prévisionnelle car interrompue au milieu), très ambitieuse, montrait leur envie d’accélérer cet état de fait. Mais nous faire regarder un concert à la lumière du jour, alors qu’on a passé deux jours sous une tente, c’est cruel ! Toujours est-il que Blues Pills… fait du Blues Pills ! Le quatuor d’émanation très 60’s/70’s tendance psyche et blues, déroule des titres carrés, assez longs, à l’exécution impeccable. Difficile donc d’opposer des critiques objectives par rapport à leur musique : obligés de constater que les zicos assurent (ce jeune soliste frenchie est quand même doué), obligés aussi de reconnaître qu’Elin a une voix absolument remarquable. Notons aussi que pour commencer un festival à onze heures du mat, leur musique accompagne parfaitement une montée en pression assez tranquille. Merci pour tout ça, respect. Mais pour le reste, et même si le public semble apprécier (enfin, c’est pas comme si ça pogotait non plus, hein… le public reste assez cool et clairsemé à cette heure…), tout ça manque cruellement d’énergie et de gras : les tempi s’emballent bien trop rarement, le son de gratte est désespérément clair… Allez, même si ce n’est pas très politiquement correct de le dire ouvertement tandis que tous les médias commencent à encenser le groupe, mais on n’a jamais eu peur d’être à contre-courant : on s’ennuie !…

SCORPION CHILD
j3-scorpionchild


On se translate de quelques dizaines de mètres sur la Main Stage n°2 (mais qu’est-ce qu’ils ont aujourd’hui avec ces Main stages ?!) pour assister au set de SCORPION CHILD. Bon, on gagne peut-être une petite décennie dans le flash back, par rapport à Blues Pills, mais on est bien en plein dans un trip 100% vintage là aussi. Y’a beaucoup de Led Zep, un peu de Purple et de Free, et une dose de Uriah Heep / Blue Cheer pour le pendant subtilement psyche de tout ça. Rien de mal à ça. Le chanteur aussi sonne un peu comme un ersatz de Plant, les mecs sont dedans, le public apprécie nonchalamment… Mais on ne va pas se voiler la face, c’est pas non plus le feu sacré ! Pas super original, pas le coup de pied au cul attendu (espéré ?), et en plus ce petit crachin et ce ciel nuageux ne fait rien pour améliorer notre humeur… On décide de retourner à la “maison”, notre Valley chérie, après deux titres…

SATAN’S SATYRS
j3-satanssatyrs


… et grand bien nous fit ! Puisque sur le même créneau horaire (salauds à la prog !) sévissent les excellents SATAN’S SATYRS ! Le combo mené par Clayton Burgess, le nouveau bassiste d’Electric Wizard, anime la Valley depuis quelques minutes déjà, donc, mais il nous faut moins d’une chanson pour confirmer qu’on a fait le bon choix et qu’il vaut mille fois mieux passer le reste de cette petite demi-heure avec nos trois furieux. Look old school, musique old school… Là aussi, la “vague” vintage n’est pas passée complètement à côté du combo, sauf qu’il y a une énergie punk dans le rock de Satan’s Satyrs qui rend le groupe cent fois plus excitant que les dizaines de groupes qui s’embarquent dans cette veine musicale très hypée. Faut voir nos lascars se donner à fond dans leur set pour comprendre qu’ils ne sont pas là pour la représentation ou pour rafler quelques lauriers faciles ; ils auront le public par les tripes ou rien ! Burgess s’affirme en frontman efficace, son chant nasillard fonctionne bien, et les autres ne sont pas en reste, avec un batteur digne d’Animal, le batteur déjanté de Sesame Street avec sa tignasse énorme, et un gratteux plus discret mais bien présent néanmoins, toujours dispo pour croiser le fer (ou le manche) avec son collègue sur des dizaines de soli impeccables. Energie, rock old school, fuzz, authenticité… Fatalement, ça marche. Et du coup, ça a même fait revenir le soleil ! Dommage pour ceux qui appréciaient ce petit rafraîchissement pluvial – c’est reparti pour un cagnard terrible pour tout le reste de la journée…

ZODIAC
j3-zodiac


Apparemment on est bien enfoncés dans le trip vintage, puisque c’est maintenant aux allemands de ZODIAC de monter sur scène. Et là aussi, c’est du sérieux : ils ont beau avoir l’air souriants, ils sont pas là pour la déconne, ils sont venus pour rentabiliser ces quarante petites minutes en mettant tout ce qu’ils ont sur la table. Du coup le concert est dense, énergique, diversifié… Sacré professionnalisme, on ne s’ennuie pas une minute. Faut dire que sur scène, on n’a pas des guignolos qui se regardent les godasses pendant trois quarts d’heure : menés par un parfait leader charismatique en la personne de Nick van Delft, le groupe est complètement en harmonie et dispense la même énergie, avec une unité qui force le respect. Toutes les facettes du combo y passent, les titres les plus énergiques, les balades bluesy (une bonne version de “Cortez the killer”, le titre de Neil Young, avec quelques soli bien sentis et une belle performance vocale de Van Delft, qui fait montre ici d’une chaleur dans son chant tout à fait remarquable) ou les jams boogie à rallonge, avec quelques connotations sudistes occasionnelles : ainsi, lorsqu’à quelques minutes de la fin du set ils annoncent “this is our last song… but we’re gonna make this fucker long”, on est contents de les voir se lancer dans l’épique “Coming Home”, presque leur “Freebird” à eux en live, un titre lent puis mid tempo qui se termine en machine à jams sur fond de basse ronflante… Carton plein.

CROWBAR
j3-crowbar


Alors là… le bad trip je pense, je sais pas… Toujours dans l’ambiance de la fin du set de Zodiac, dans l’atmosphère chaleureuse (j’ai failli dire “feutrée”…) de la Valley, on se lance en courant vers la Main Stage n°1 pour ne pas rater CROWBAR sous un soleil de midi déjà étouffant, dans la poussière, avec une barre de son monolithique et sans relief, avec trois gars complètement paumés sur une scène de 80 mètres de large et 60 de haut (trois gars parce qu’autant vous dire que sur une scène surélevée de deux mètres, on voit pas beaucoup Tommy Buckley derrière ses fûts)… Pour je ne sais quelle raison, ça fait quinze fois que Crowbar joue au Hellfest (OK, disons deux ou trois fois…), et à chaque fois ils atterrissent sur la Main Stage. Mais cette fois, la transition est trop rude et ma cervelle se bloque dans un mouvement d’auto-protection qui va malheureusement à l’encontre de mes affinités musicales. Car je me faisais une joie de revoir Crowbar ! Mais je pense que les riffs de Windstein sont faits pour rebondir sur les murs et le plafond d’une salle pour mieux vous écraser la nuque, et que ses lignes de chant vous prennent aux tripes avec dix fois plus d’impact lorsque vous croisez en même temps son regard de trucker maniaque… Du coup, je me cale au fond, et je regarde le set à 700 mètres de la scène, peinard mais résigné, sans y prendre le plaisir escompté… Forcément, entendre le groupe cracher ses classiques glaviots sludge que sont “All I had”, “High Rate Extinction” ou “Planets Collide” fait toujours son petit effet, mais aujourd’hui, entre moi et Crowbar, les étoiles n’étaient pas alignées.

LOWRIDER
j3-lowrider


Peut-être que l’une des causes de ma déception vis-à-vis du concert de Crowbar trouvait sa source dans mon excitation de revoir LOWRIDER sur scène ? Toujours est-il qu’il ne faut pas me prier pour regagner la Valley après le dernier riff louisianais pour voir les suédois monter tranquillement sur scène. En choisissant de lancer leur set comme commence leur unique album, avec “Caravan”, ils remettent tout de suite les choses en place, là où elles n’auraient jamais dû s’arrêter, il y a plus de dix ans de cela. Sur scène, les gars sont imperturbables, en tout cas la paire de gratteux, Niclas et Ola, décochent difficilement un sourire, même si on a du mal à les prendre en défaut sur l’exécution impeccable des morceaux… A leurs côtés toutefois, Peder, bassiste, vocaliste et leader / frontman du combo kiffe ce trip Hellfest jusqu’au bout des ongles : il ne tient pas en place, il a le sourire vissé aux lèvres, il communique avec le public presque entre chaque titre… Certes, il est un peu à la peine sur certaines lignes vocales (les parties les plus perchées de “Dust Settlin'” sont un peu limites…) mais il emporte le public sur son enthousiasme… et sur les compos du groupe ! La tente est blindée en ce début d’après-midi, et le public est au taquet : ça chante, ça headbangue, ça slamme… Le son sous la Valley est, cette fois encore, excellent, le pied. Surprise, alors que l’ambiance commençait bien à monter et que cette douce chaleur nostalgique commençait à nous faire gentiment planer, le groupe se lance dans l’interprétation de pas moins de deux inédits ! “Leaning Times”, présenté par Peder comme “un nouveau titre, que nous avons écrit il y a dix ans… that’s how we roll !”, donne rapidement l’impression d’être très catchy, même s’il n’emballe pas complètement en première écoute, l’impression d’un manque de “lourdeur” en quelque sorte… A réécouter sur album. “Red River” à ce titre est plus emblématique de ce que l’on connaît et aime chez Lowrider, vocaux, riff, groove… Après ces petites friandises, retour sur le chemin des classiques avec “Lameneshma” qui amène un tunnel de titres issus de leur LP pour conclure ce set. On retiendra surtout “Texas Pts 1-2” et sa conclusion jouissivement Kyussienne, enchaîné à “Convoy”, un des riffs les plus lourds depuis la création de la six-cordes. A la scandinave, les gars sortent de scène à peine expressifs, mais leur sourire en coin ne laisse pas de doute sur leur ressenti : ils ont tué, et ils le savent bien. Maintenant, finie la déconne, va falloir remettre le couvert, et pas dans cinquante ans.

BLACK TUSK
j3-blacktusk


Les mecs de BLACK TUSK se sont chauffés au Whisky bas de gamme tout ce début d’aprem backstage, on commençait à les sentir chauds comme la braise avant leur montée sur scène. Apparemment c’est un bon combustible, parce que le groupe n’a pas fait de quartier durant ses cinquante minutes de set. Une vraie boucherie. Pour ceux qui ne connaissent pas le trio ricain, c’est une sorte de sludge aux rythmiques plutôt rapides, un truc au croisement du thrash et du stoner. Les trois zicos se partagent les vocaux, ce qui est toujours impressionnant en tout cas pour un batteur. Au niveau du public, disons que placer Black Tusk entre l’heure de la digestion et l’heure du thé est sans doute un choix de programmation assez judicieux – ça évite le coup de mou ! Les musiciens sont au taquet, tout sourires, ils sont clairement là pour s’éclater, et ceci décuple l’énergie de leur set, qui se transmet par mimétisme au public, déchaîné. Les premiers (et rares) pogos naissent d’ailleurs sous la Valley durant leur set. Andrew et Jonathan sont complètement dedans, arpentent la scène sans répit, et abattent des riffs cinglants par dizaines. Étonnant d’ailleurs de voir deux musiciens aussi en phase “scéniquement”, ils sont tous les deux souriants, interagissent, vont voir le public… On notera par ailleurs l’efficacité confirmée des titres du dernier album, avec en particulier un doublon “Enemy Of Reason” / “In Days Of Woe” pour conclure un set brutal mais efficace. Exactement ce qu’il fallait pour faire monter la tension dans cette tente jusqu’ici emplie de “cool vibes”… Une tuerie.

HOUSE OF BROKEN PROMISES
j3-hobp


Après leur set dévastateur l’an dernier au Desertfest Berlin, on ne va pas se la jouer “surpris” : on sait qu’on va prendre une claque avec le set de HOUSE OF BROKEN PROMISES. Voir Arthur Seay faire les cent pas comme un lion en cage backstage pendant une demi-heure en attendant l’heure du set, en jouant des soli imaginaires non stop, son médiator à la main, on sent le bonhomme prêt à en découdre. Bingo. Quand les gars montent sur scène, ils sont immédiatement à fond dedans. A l’américaine : ils font le show ! On savait Seay excellent (sous-estimé) guitariste, soliste hors pair et gros générateur à riffs. On savait aussi que le frêle Mike Cancino devenait une véritable machine à tuer derrière son kit de batterie minimaliste. On aura désormais la confirmation que le casting de Joe Mora ne doit rien au hasard : bassiste impeccable, il prend en charge désormais sans réserve la plupart des vocaux, et se révèle un chanteur doué, avec une énergie similaire à ses collègues (bref : au taquet). Faut les voir haranguer le public, le prendre à parti, communiquer entre eux… Quant aux poses et grimaces non stop de Artur Seay, c’est un spectacle en soi ! Niveau set list, le trio n’est pas vraiment calculateur et se la joue au feeling : ils n’hésitent pas à coller quatre nouveaux titres en plein milieu de leur set list, des titres inconnus de tout le monde… Pourquoi pas ?! A l’image des autres productions du groupe, ces titres de pur stoner metal sont diversifiés, catchy, et percutants. Ca devrait le faire pour leur prochaine rondelle ! Pour le reste, les classiques sont bien là, entre “Blister” en intro, le heavy “Physco Plex”, ou encore le percutant “Highway Grit”, et même s’ils n’ont pas joué le très attendu “Obey the Snake”, on n’a pas matière à se plaindre. Le groupe choisit l’impeccable “The Hurt (Paid my Dues)” pour clôturer un set haut en couleur, qui aura démontré que HOBP n’est pas que “la pièce rapportée de Unida” : leur set jouissif et généreux aura lessivé et collé le sourire à plusieurs milliers de personnes sous la Valley aujourd’hui.

DOZER
j3-dozer


Après le set “over the top” des ricains, on sait par avance que la deuxième livraison suédoise de la soirée sera scéniquement un peu plus austère. On a papoté un peu avec Tommi, le leader de DOZER un peu avant leur set aujourd’hui, un gars posé, calme, gentil… Alors quand on le voit monter sur scène complètement déchaîné, faisant voler sa traditionnelle casquette dès le  premier headbang de “Feelgood Formula” qui introduit le concert, on comprend quand même que les scandinaves ne sont pas venus que pour se détendre non plus. A son habitude, la prestation de Dozer sera aujourd’hui encore impeccable : une set list de tueur, une interprétation sans faille, des musiciens en ordre de bataille… La set list, parlons-en : encore une fois le paquet est mis sur l’album “Through The Eyes of Heathens” avec notamment des interprétations énormes de classiques comme “Big Sky Theory”, l’aérien “Until Man Exists No More” ou le brutal “From Fire Fell”. Mais tous les albums seront honorés de quelques extraits (avec un seul extrait de leur dernière production), une sorte de petit best of. Faut dire que le groupe sait ce pour quoi il est attendu, et à ce titre il fait montre d’une belle générosité envers son public. Sur scène, Fredrik assume pleinement son rôle de frontman : même si ses vocaux n’ont pas la profondeur qu’elles ont sur disque, il n’est jamais en difficulté et assure impeccablement toutes ses lig “Fishermnes vocales (est-ce dû au fait que le bonhomme se gave de bonbons “Fisherman’s Wharf”… pendant tout le concert ?!). Rien à dire sur ses rythmiques, épaulées par les lignes de basse robustes de Johan. Quant à Tommi, il est juste à fond, il headbangue come un furieux, virevolte, harangue le public… Bref, le groupe fait tout ce qu’il faut pour assurer un concert impeccable, et mettre à l’honneur la qualité de leurs compos plutôt qu’eux-mêmes en tant qu’individus, se mettant au service d’un collectif parfaitement rôdé. Encore et toujours une machine scénique impressionnante, qui ne laisse rien au hasard. Tandis que le combo termine son set par le vieux classique “Supersoul”, on se dit quand même que la trop rare activité scénique du combo représente un vrai gâchis. On se félicite d’autant d’avoir pu revoir les suédois sur un concert de cette qualité.

SPIRIT CARAVAN
j3-spiritcaravan


Après avoir été bluffés de la prestation scénique de SPIRIT CARAVAN lors du dernier Desertfest Berlin, on savait que ce set était immanquable. Et apparemment, on n’était pas les seuls à s’être passé le mot, tant le public est bien tassé sous la tente (pas blindée non plus, faute à la concurrence de Black Sabbath qui se prépare sur la Main Stage) et que les bords de scènes sont pleins de la fine fleur des musiciens du week end : l’intégralité de Electric Wizard headbangue en chœur, Witch Mountain, Acid King, Nick Oliveri et Joey Castillo qui sont à fond et connaissent les titres par cœur, etc… Le trio monte sur scène sur le classique “Healing Tongue” et son riff quintessentiel. Sa posture scénique est inchangée : au-delà du charisme tout relatif de chacun (sans manquer de respect pour les deux autres, avouons-le : Wino écrase tout le monde avec un simple battement de cil), chaque musicien adopte une position et un comportement parfaitement équilibré, respectueux du groupe avant ses individus. Wino interprète ses rythmiques et ses leads sans en faire des tonnes, Sherman balance des lignes de basse redoutables et impeccables d’efficacité rythmique (parfois plus proches de la guitare rythmique, d’ailleurs), et intervient même occasionnellement au chant (comme sur le sournois “Fang”), le tout avec une aisance et une autorité naturelle qui intiment le plus grand respect. Quant au p’tit nouveau Henry Vasquez, sa batterie posée en front de scène entre nos deux lascars (sans plateau surélevé, notons-le), son jeu généreux et démonstratif le rendent passionnant à regarder, lui aussi. Du coup, avec trois personnalités de cet acabit, et une set list composée de classiques indémodables, on ne s’ennuie pas une minute et on dévore le concert, cette heure passant à la vitesse de la lumière. Faut voir l’osmose de nos vieux loubards stoner, à l’image du passage instru groovy sur la fin de “Brainwashed”, où Sherman et Wino se retrouvent de part et d’autre du kit de Vasquez pour une jam frénétique… Le groupe termine par le désormais classique “Inside Looking Out” de Grandfunk Railroad, hymne de truckers par essence, efficace en diable. Le trio l’affirme à nouveau comme si c’était nécessaire : Spirit Caravan n’est pas juste un vieux combo culte, né à nouveau de ses cendres dans un trip revival mal assumé… Au contraire, ils se posent en groupe bien vivant, référentiel et culte, certes, mais puissant et complètement ancré dans le présent. Il ne leur reste plus qu’à cracher quelques nouvelles compos et on sera aux anges. Je cite un Nick Oliveri aux anges à la fin du set : “it was so fucking badaaaass”. Pas mieux.

UNIDA
j3-unida


Par acquis de conscience, on va capter une paire de titres du set calamiteux de Black Sabbath: les petits sauts d’enfant de six ans d’Ozzy, sa voix fausse, chevrotante et fébrile, la prestation scénique robotique de Iommi et Butler (hop, je m’avance de cinq pas pour le solo, hop je reviens à ma place, hop je m’avance un peu…), nous confirment que même ce soir c’est sous la Valley que ça va se passer.
L’annonce de UNIDA en tête d’affiche de la journée (et, disons-le entre nous, un peu la tête d’affiche de la Valley sur le week end pour beaucoup d’entre nous…) en a motivé plus d’un à prendre leur ticket pour le festival de l’Enfer cette année. Les voir calés dans le Running Order en synchro parfaite avec Black Sabbath pouvait faire grincer quelques dents… Et alors que l’on traverse une Valley désertique (oui, c’est un peu sa raison d’être, c’est vrai…) à quelques dizaines de minutes du début du set, on se dit que niveau affluence, ça sera pas gagné ce soir… Heureusement, pas mal de monde a fait comme nous, et après quelques titres de Sabbath, le public rejoint progressivement une Valley qui se gonfle d’expectative… A l’heure prévue, les zicos montent sur scène pour lancer le riff jubilatoire de “Wet Pussycat”, ce qui fait vite arriver un John Garcia vers qui, inévitablement, tous les regards se tournent. Faut dire que Cancino et Seay, en purs team players, adoptent une posture bien plus posée et en retrait que durant House Of Broken Promises. C’est Curt Christenson, le bassiste de Dixie Witch, qui prend en charge la quatre-cordes sur cette tournée, et c’est un foutrement bon casting : le bassiste a du groove à revendre, et rappelle furieusement le type de jeu rond et organique de Scott Reeder. Garcia, en revanche, n’est pas à fond dans le set au démarrage. Il part chercher ses lunettes au milieu du premier titre (la chanson continue sans lui !), il bugge sur un couplet de “Thorn” (confronté à un “trou”, il s’interrompt sur une mesure ou deux, reprend en cours de route)… On l’a vu plus à l’aise que sur ce début de concert : même si son professionnalisme cache son inconfort, le gars n’est pas encore bien dedans… Mais petit à petit, il rentre dans le set et les titres suivants sont impeccables. On peut d’ailleurs le remarquer : il se permet des petites impros ou nouveaux aménagements de certaines lignes vocales généralement bien sentis, signe d’un confort grandissant de sa part. La set list enchaîne les perles, pour une large part issues de l’album “fantôme” du groupe, avec toujours vis-à-vis d’un public bouillantissime la même efficacité. Se détacheront de nos souvenirs enfumés “Human Tornado” et son riff redoutable, le langoureux “Summer”, mais aussi les plus anciens “Red”, super efficace, et “Nervous”, propice à une démo riff-esque de Arthur Seay cette fois encore, MVP de la journée. Étonnamment, les titres les plus percutants du “dernier” album, que sont “MFNO” ou “Puppet Man / Coffee Song” ne sont pas ceux qui fonctionnent le mieux sur scène (ils n’ont objectivement ni la même pêche que sur disque, ni le même son non plus, pas de secret…). Tout ça est chaleureux, et alors que le rugissant “Dwarf it” vient amorcer la dernière partie du set, tout le monde est incandescent. A la fin de “Hangman’s Daughter” qui le suit, petit moment surréaliste : Garcia vient voir Arthur Seay et lui dit d’improviser un instrumental, avant de s’échapper discrètement sur le bord de scène. Ni une ni deux, Seay échange deux mots avec Cancino et Christenson, et s’engagent dans une jam au début un peu balbutiante, à base de blues rock classique pour commencer, qui va vite prendre son essor et permettre notamment au guitariste de montrer l’étendue de son potentiel. Cette jam épique dure bien une petite dizaine de minutes, pendant lesquelles Garcia regarde ses copains en fumant une cigarette (si si, mauvaises langues !) sur le bord de scène. A ce moment-là, le public (qui croit que tout ça est prévu !) est complètement rentré dans cette jam complètement hallucinée, et le groupe a emplafonné depuis longtemps le créneau horaire qui lui était attribué (sans conséquence, étant donné qu’ils étaient les derniers à jouer ce soir). Garcia revient enfin sur scène et s’empare du micro devant ce parterre mi béat mi médusé, pour se lancer dans un “Black Woman” absolument jouissif, qui finit de mettre la Valley sur les genoux. On n’aurait pu imaginer meilleure fin de set et de journée…

A l’heure où l’on fait traditionnellement le bilan d’un tel événement, les souvenirs et les sensations s’entrechoquent, et il semble encore tôt pour en faire la synthèse. On sait qu’on aura eu notre lot de découvertes en live, mais aussi une quantité importante de confirmations, sachant qu’aucun groupe n’est passé à côté ou ne nous a foncièrement déçu. Un public de connaisseurs, respectueux, nombreux, une scène parfaitement adaptée (un peu petite désormais), avec un son superbe, des musiciens fous de joie d’être là… Tous les ingrédients d’un festival de haute tenue étaient réunis, et l’alchimie a bien fonctionné. Avec une affiche de cette qualité et les mêmes conditions (on peut le rêver, le soleil tous les ans ?), on signe chaque année sur les dix ans à venir.

Laurent

HELLFEST 2014 – Jour 2 (Clutch, Monster Magnet, Acid King,…), 21 juin 2014, Clisson

Une poignée d’heures de repos, à nos âges, c’est peu… Cette reprise à 10h30 du matin fait mal, on peut le dire ! Heureusement, le ciel bleu au dessus de nous annonce un second jour aussi radieux que la veille, pas l’ombre d’un nuage à l’horizon, et il fait déjà chaud en ce milieu de matinée ! Ca s’annonce torride pour cette journée…

HARK
j2-hark


C’est donc HARK qui ouvre les hostilités aujourd’hui sous la Valley. Hark, ou le nouveau projet de Jimbob Isaac, leader de feu-Taint, frontman charismatique, versatile et impliqué dès la première note dans la réussite de son tout jeune trio. Les compos sont alambiquées, audacieuses, déroutantes de par leurs structures, heavy as fuck, cependant  desservies par un mix un peu brouillon en façade. Le Jimbob (qui se filme pendant tout le concert avec une caméra fixée au bout de son manche de guitare…) rentre toujours autant dans son micro, communique, sourit, on sent qu’il est heureux dans ce projet et nous le rend bien. Ses deux compères ne sont pas en reste et se donnent tout autant ; Hark dégage résolument une très bonne énergie pour introduire cette journée ! Le public matinal est aux anges et la demi-heure de set donne un peu plus l’envie d’aller farfouiller “Crystalline”, le premier album du trio. Excellente performance, qui donne envie de revoir le power trio gallois sur un set plus long.

HERDER
j2-herder


Vient alors le tour des hollandais de HERDER qui déboulent le couteau entre les dents pour une demi-heure de gros sludge tendance metal, voire hardcore parfois, ou post-core même comme disent les jeunes, occasionnellement baigné de quelques vapeurs doom. Venus défendre leur récent dernier album, “Gods”, ils n’en joueront finalement que trois ou quatre extraits (dont le dévastateur morceau titre) sur un set d’une grosse dizaine de morceaux joués à cent à l’heure. De temps en temps, leur vocaliste adressera quelques mots au public, en français notamment, mais le reste du temps est mis à profit pour développer leur petit commerce de charcuterie fine. Et là-dessus, vous pouvez compter sur le vocaliste Ché Snelting pour mettre du cœur à l’ouvrage : le bonhomme vomit ses tripes avec une vigueur qui force le respect : il beugle fort, certes, mais le batave hurlant possède aussi un coffre singulier, apportant quelque profondeur à ses vocalises. Un point commun qu’il partage avec l’ancien beugleur du combo, Nico, invité sur scène pour interpréter le terrifiant “Feet Eager To Run To Evil” avec ses anciens acolytes. Bon esprit ! Au final, un concert qui déboîte bien, mais peut-être pas ce que mon cerveau était prêt à digérer à ce moment-là de la journée…

MOS GENERATOR
j2-mosgenerator


Un trio à la pilosité strictement inverse à celle de Herder foule maintenant les planches de la Valley : MOS GENERATOR est attendu, et ils le savent. Un peu nerveux en début de set, il ne faut guère que les quelques minutes de “Beyond the Whip” à Tony Reed pour rentrer dans son set, lâcher la pression et répandre la bonne parole stoner dans cette tente bien remplie. Le chant profond et rocailleux du guitariste fait sensation sur des titres comme “Lonely One Kenobi” ou le furieux “Silver Olympus”, et le bonhomme ne se prive pas de caler ses soli sur quasiment chacun des morceaux. Pour le reste, ça aligne riff sur riff, on ne s’ennuie jamais, et les zicos profitent de chaque espace qui leur est alloué dans les chansons pour introduire des jams toujours impeccables. Même si le dernier album passe bien l’épreuve du live sur ses deux ou trois extraits joués aujourd’hui, le trio se fait plaisir en piochant dans toute sa discographie pour composer sa set list du jour. Plus impressionnant encore, Tony Reed nous confiera après le concert qu’en montant sur scène, ils avaient uniquement décidé du morceau d’intro, et que le reste de la set list a été constitué en direct au fil du concert ! Apparemment c’est une habitude chez eux… Cela produit un effet un peu décousu, mais aboutit fort opportunément à une conclusion certes un peu planante (“This is the Gift Of Nature”), mais surtout propice à une jam remarquable, qui met le public à genoux (faut voir les applaudissements retentir jusqu’au fond de la tente !). L’approche musicale audacieuse du combo force le respect, et sa musique, généreuse et efficace, n’aura pas mis longtemps à convaincre un public plutôt sur la retenue au début, qui leur mange maintenant dans la main et en reprendrait bien un peu plus pour la route !

SUBROSA
j2-subrosa


Le contraste musical avec SUBROSA qui passe juste après fait un peu mal, avouons-le. Le doom-metal quasi-lyrique du combo largement féminin est  par essence plus froid, plus policé et parfois même “synthétique” (ah, cette paire de violons électriques, c’est un peu comme des synthétiseurs… faut aimer !). Pourtant, le combo ne démérite pas et jette toutes ses armes dans la bataille : l’énergie est là et l’ambiance développée sur album est bien restituée (voir l’épique “The Usher” issu de leur dernier album). On pourra avoir des réserves sur les vocaux de Rebecca Vernon, dont les passages les plus graves sonnent presque faux, mais c’est une question d’oreille (la mienne est visiblement plus habituée au sable et au son de gratte craspec). Reste que l’expérience musicale délivrée par le quintette est assez inédite : le genre musical adopté est original, composé de longues séquences où Rebecca à la gratte et Levi à la basse font tourner de gros riffs lancinants, laissant à la paire de violonistes l’occasion de s’engager dans des envolées en harmonie généralement bien amenées. Ca se laisse écouter sans déplaisir, et force est de constater que le public est bien dedans, headbanguant au rythme (lent) des morceaux, et applaudissant copieusement la fin du set des américains (terminé cinq minutes plus tôt, ce qui s’avère piégeux pour un groupe dont la durée moyenne des chansons est au dessus des dix minutes…). Sympa, mais pas complètement enthousiasmant.

WITCH MOUNTAIN
j2-witchmountain


Respect aux programmateurs : il y a une belle cohérence dans l’enchaînement de certains groupes sous cette Valley, qui force l’admiration. Caler ainsi les ouest-américains de WITCH MOUNTAIN juste après Subrosa et avant Acid King, c’est vraiment trouver le chaînon manquant entre le doom le plus épique et mélodique et le doom le plus lourd, lent et traditionnel. Comme nous le confiera Rob Wrong en interview après leur performance, le quatuor monte sur scène intimidé mais remonté et avec l’envie de se donner à fond. Le groupe entame les hostilités comme souvent sur le classique “The Ballad of Lanky Rae” qui permet à sa chanteuse Uta de donner un premier aperçu (probant) de ses capacités vocales. “Veil of the Forgotten” joué d’affilée vient rapidement permettre à la chanteuse de montrer toute l’étendue de son spectre vocal, passant de vocalises suraiguës à des vocaux d’outre-tombe que l’on a du mal à imaginer sortir de cette petite chanteuse presque timide ! Elle a beau assumer pleinement son rôle de frontwoman, elle garde sa posture modeste et discrète qui contribue à valoriser les autres membres du groupe et à conforter cette idée de cohésion où chacun joue parfaitement son rôle : une section rythmique robuste et un guitariste polyvalent qui enchaîne les riffs efficaces et élaborés avec les soli limpides, qui viennent élever certains passages de plus haute volée. Charles Dingus à la basse dresse des rythmiques lugubres parfaitement adaptées et cruciales dans la musique du combo, notamment pendant les passages de Wrong en lead. Globalement, c’est lent mais finalement jamais “trop” lourd, laissant toujours une place importante à la mélodie, comme des vieux Candlemass ou Pentagram, dans un autre genre. Avec “Never Know”, le groupe s’engage dans un titre épique, laissant la part belle aux soli (parfois d’inspiration blues), particulièrement apprécié du public. Au final, la prestation sincère du combo aura recueilli un beau succès, mérité, malgré la faible notoriété du groupe dans nos contrées.

ACID KING
j2-acidking


Lori et ses copains d’ACID KING traînent sur le site du Hellfest depuis la veille, l’occasion de mater quelques concerts et de prendre la température du lieu… Ils ont donc eu tout le temps de se préparer. Et pourtant, à l’heure précise du début de leur set… il n’y a personne sur scène ! Joey Osbourne se calle derrière sa batterie, Mark Lamb s’empare de sa basse, et tout le monde regarde backstage pour chercher Lori du regard ! Petit mouvement de panique donc, avant que Lori, se précipitant sur scène, n’engage l’intro de “Busse Woods”. Mais ce petit aléa devient vite anecdotique alors que la blonde guitariste enquille les riffs patauds de ce classique instrumental. A partir de ce moment, la démonstration doom peut commencer. Faut dire que le trio a soufflé ses vingt printemps récemment, et même si sa carrière avance au même tempo que ses rythmiques anémiques, leur expérience scénique et la robustesse de leur interprétation ne souffrent simplement aucune critique. Alors que le combo enchaîne avec le superbe riff de “2 Wheel Nation”, les nuques commencent à onduler nonchalamment dans le public, de manière presque incontrôlée… Lori est alors bien calée derrière son pied de micro, alternant lignes de chant hypnotiques et attaques de cordes lourdes et viscérales. Elle n’est pas Joe Satriani et elle le sait ; mais en enchaînant une poignée d’accords par chanson, au bon rythme et avec la bonne énergie, elle parvient en quelques minutes à convaincre un public qui prend là sa troisième rasade doom de l’après-midi. Faut voir ledit public enchaîner les slams sur toute la durée du set, propices à se laisser voguer sur la mer de mains créée par une Valley en transe… Osbourne est toujours efficace derrière les fûts, caressant crash et ride entre des frappes lourdes sur ses fûts, tandis que Mark Lamb est complètement immergé dans son set, efficace pour dresser des rythmiques plombées, et agrémentant son jeu de basse solide de quelques effets type Wah-Wah parfaitement bienvenus. Au final, le groupe ne jouera que des extraits de “Busse Woods” et “III”, et glisse dans son set un ou deux inédits (du pur Acid King, si les fans ont besoin d’être rassurés…). Pas une claque énorme pour qui connaît Acid King, mais encore une performance solide et efficace à mettre à leur actif.

CLUTCH
j2-clutch


De manière a priori inexplicable, la tension ambiante est palpable alors que l’heure du set de CLUTCH se rapproche. Il faut voir aussi la tente se remplir petit à petit, et le public continuer à se rapprocher et se masser inexorablement, entassés jusqu’à largement hors des limites de la tente. Et même sur le côté de la scène, on sent que “quelque chose se passe” en voyant les musiciens de Monster Magnet, Acid King, Witch Mountain, la paire Nick Oliveri / Joey Castillo (anciens de QOTSA, les deux lascars se retrouvaient avec Bl’ast !, un combo hardcore punkoïde qui jouait l’après-midi sous la Warzone), etc… se masser avec le sourire pour essayer de voir un bout de la performance ! Il y a une électricité et une tension remarquables dans l’air au moment où le combo monte sur scène sur le rythme funky de Chuck Brown qui leur sert d’intro depuis quelques années. De manière assez frustrante, Clutch a moins d’une heure de set ce soir. Le quatuor en a pleinement conscience, et devra faire dans la dentelle niveau set list. En engageant les hostilités sur “The Mob Goes Wild”, enchaînée à deux titres de “Earth Rocker”, ils passent un message clair au public, qui l’entendait bien de cette oreille : ce soir, des culs vont être bottés, par milliers. En calant “Gravel Road” en milieu de set, ils rappellent inéluctablement cet événement qui (je le pense) fut décisif dans leur lancement de carrière “tardif” en France, à savoir leur passage il y a cinq ans sur la mainstage où, alors quasi inconnus, ils entamaient leur set par ce même titre, l’un des plus audacieux de leur répertoire, bluffant (et embarquant) un public qui s’attendait à du hard rock classique. Même effet ce soir, mais devant un public qui les regarde avec la bave aux lèvres… Parce que le groupe est humain, ils se plantent un peu sur la transition “The Regulator” / “Mice and Gods”… Est-ce que ça diminue l’efficacité de ces petites bombes ? Je vous laisse imaginer la réponse, tandis qu’un parterre de fans à perte de vue saute dans tous les sens, slamme et chante les paroles le sourire aux lèvres… Le son, et on ne l’a pas assez souligné jusqu’ici (alors que ce fut une constante sous la Valley) est d’excellente facture, net, quasi cristallin, pointu… On a du mal à se réaliser qu’on est (presque) en open air ! Dans ses petits souliers, Neil Fallon reste sous tension sur toute la longueur du set, qu’il s’agisse de ses lignes vocales puissantes et toujours percutantes, de son jeu de scène énergique, ou de ses nombreuses interventions “instrumentales” (slide, électro-acoustique, “cloche”, etc…). Le reste du combo, comme d’hab’, reste surtout concentré sur ses parties, mais n’est encore une fois à aucun moment pris à défaut. Solide. Parce qu’il n’aura jamais été dit que Clutch se la joue facile, ils glissent même en milieu de set un inédit, un titre plutôt rapide et punchy qui cartonne sur un public qui n’en demandait pas tant. Le final sur “Electric Worry” et “The Wolf Man Kindly requests…” est juste impeccable, et achève une tente qui a vécu un rêve éveillé pendant une petite heure. Pour beaucoup, ce set de Clutch fut le point d’orgue du Hellfest. J’aurais bien du mal à trouver beaucoup d’arguments contradictoires.

MONSTER MAGNET
j2-monstermagnet


Disons-le tout net, la notoriété de MONSTER MAGNET n’atteint pas celle de Clutch vis-à-vis d’un large public rock / hard rock. Le quintette Est-Américain voit donc une ambiance plus apaisée installée dans son public, dans une tente néanmoins bien garnie. Et là aussi, s’il est dit quelque part dans les Dix Commandements du concert rock que le premier morceau donne la tonalité d’un set, alors en balançant “Superjudge” en intro, l’aimant monstrueux ne joue pas la facilité et laisse présager une ambiance space rock affirmée. Ambiance confirmée par le voluptueux mais épais brouillard qui envahit la scène sur toute la durée du set, fumée dans laquelle se distinguent à peine les silhouettes de nos cinq lascars. On se prend à détecter les prémices d’une set list de puristes alors que suivent “Medicine” et le classieux et trippant “Nod Scene”. Frissons, alors que s’enchaînent encore quelques vieux classiques (“Dopes…”, “Twin Earth”…). Scéniquement, on peut le dire, le groupe est “at the top of their game”, tout le monde est impeccable, et Wyndorf est impérial : vocaux sans failles, posture de frontman assumée, il est en forme et même souriant ! Les autres sont impeccables d’interprétation et de prestance, rien à redire, y compris Garrett Sweeny, qui confirme tout le bien que l’on pense de lui, qu’il s’agisse de ses leads incandescentes ou de ses rythmiques robustes. On était plus curieux de voir le remplaçant du puissant Jim Baglino à la basse, qui en son temps transmettait une énergie scénique appréciable. Son successeur est Chris Kosnik, le bassiste de… The Atomic Bitchwax (ça devient limite incestueux leurs conneries…). Sur scène, c’est le jour et la nuit : Kosnik est calé en fond de scène contre son ampli, et joue ses parties (impeccablement) en regardant ses collègues ou le bord de scène. Heureusement les autres maintiennent l’attention d’un public en état de semi-hypnose. Les surprises continuent à défiler sur scène, avec maintenant le puissant “Look to your Orb for the Warning”. Le set est immersif, efficace, et ne laisse pas au public l’occasion d’atterrir pour reprendre ses esprits même quelques minutes… Pris du même vertige, on s’aperçoit petit à petit qu’aucun des titres joués jusqu’ici n’a moins de… dix-huit ans ! N’étaient-ils pas supposés promouvoir leur dernier album, le superbe “Last Patrol” sorti il y a quelques mois à peine ? Quelle démarche commercialement suicidaire ! Pas stupides non plus, le groupe enquille en conclusion les traditionnels “Powertrip” et “Spacelord” (qui ont quand même plus de seize ans, pas non plus des titres très récents !). Succès garanti sur ces morceaux, qui laissent un public d’afficionados et de nouveaux convaincus exsangues, béats, qui planent un petit moment encore après le set dans une Valley qui prend quelques minutes pour atterrir et reprendre ses esprits… En voyant Dave Wyndorf quitter la scène fier comme un pape et avec un sourire jusqu’aux oreilles, on peut confirmer que ce sentiment du devoir (bien) accompli est assez unanimement partagé ce soir.

Après une telle journée, la perspective de voir une énième fois un concert chaotique du père Anselmo, défendre un album metal de faible intérêt pour le “standard Valley” nous encourage à regagner nos pénates pour récolter quelques précieuses heures de sommeil… Demain encore la journée commence tôt, et s’annonce intense…

[A SUIVRE…]

Laurent (et Flaux)

HELLFEST 2014 – Jour 1 (Electric Wizard, Kadavar, Conan,…), 20 juin 2014, Clisson

Quand on a vu, dès la fin 2013, la tournure que prenait l’affiche du Hellfest 2014, on ne va pas vous le cacher : on n’a pas attendu longtemps pour réserver notre week-end. Et sans vous dévoiler la teneur complète des chroniques de ces trois jours, on peut aussi vous le dire : on n’a pas regretté, ça a été le pied.

z_AMBIANCE-0807

La première journée en revanche, pour les stoner-heads que nous sommes, s’annonce plus proche d’une agréable montée en tension, une journée avec pas mal de bons concerts en prévision, mais sur un rythme raisonnable, laissant quelques plages de “repos” propices à visiter un peu le site et constater avec effarement la dimension impressionnante des structures du Hellfest depuis l’an dernier.

Pour commencer, le premier concert de la journée est l’un des plus intéressants du Hellfest et… nous n’y étions pas ! C’était prévisible : en programmant MARS RED SKY quelques dizaines de minutes après l’ouverture des portes, il était évident que la plus grosse part du public, avec toute la bonne volonté du monde, serait encore bloquée dans les files d’attentes de l’entrée du fest. On ne va donc pas s’appesantir dessus, mais c’est probablement LE gros regret du festival.

CONAN

j1conan


Le concert suivant sous la Valley (qu’on retrouve quasiment inchangée depuis les éditions précédentes, si ce n’est quelques détails dans la configuration de la scène) est celui des anglais de CONAN, très attendu lui aussi. C’est à l’heure de l’apéro (mais existe-t’il un horaire spécifique pour cet acte de sociabilité au Hellfest ?) que le groupe grand-britton prend place sur les planches. Le trio encapuchonné va profiter allègrement de la vingtaine de subs disposés en front de scène pour nous exploser la carotide avec son doom de ferrailleur. En une (trop) petite demi-heure, ils alignent à peine quatre titres, à savoir “Crown of Talons”, “Foehammer”, “Hawk As Weapon” puis “Altar of Grief” (soit une grosse majorité issue de leur excellent dernière offrande, “Blood Eagle”). Scéniquement, la performance de nos trois lascars se résume au minimum : chacun reste dans son coin de la scène, et les gars passent plus de temps à se regarder qu’à communiquer avec le public. Le light show lui-même est assez pauvre. Clairement, le paquet est mis sur la musique, et là-dessus, on en a pour son argent. Les anglais vont faire office de mise en bouche grasse, monolithique et massive sous la Valley encore un peu clairsemée. Après seulement quatre titres, on reste en revanche avec un léger goût de “trop peu” … Une performance qui donne envie de les voir dans un format plus long.

A peine relevés du rouleau compresseur britannique, la programmation de la Valley (avec une paire de groupes de post-bidules-rock d’un intérêt tout relatif pour le Desert-Rocker de base) nous offre quelques heures de répit, le temps d’aller se sustenter et de vaquer un peu sur le site, pour observer les différentes évolutions proposées par le staff du Hellfest cette année.

ROYAL THUNDER

j1-royalthunder


Les batteries (un peu) rechargées, il est temps de se préparer gentiment à une fin de journée plus costaude, qui commence avec les américains de ROYAL THUNDER, dont le parcours discographique nous a toujours laissé un peu dubitatif. Dubitatifs nous restons d’ailleurs après cette prestation un peu décousue, dont la set list sera composée en gros pour moitié-moitié de leur premier et de leur dernier album. Le groupe annonce la couleur avec le tortueux “Parsonz Curse”, un mid-tempo dont l’aspect sudiste un peu craspec est un peu affadi sur scène. Il en va de même des autres titres de “CVI”qui ne transcendent pas vraiment sur scène, et ce malgré l’énergie dispensée par leur chanteuse-bassiste Miny Parsonz, qui ne démérite pas derrière son micro. La musique du combo se transforme peu à peu en une sorte de post-rock vaguement sudiste qui m’aura laissé de marbre. On notera toutefois une tente déjà bien remplie, et un public qui connaît apparemment bien les compos du groupe. Un public un peu frustré toutefois, qui voit le groupe quitter la scène dix minutes avant la consigne : tout groupe de rock qui se respecte aurait bouffé chaque seconde mise à leur disposition pour asséner une paire de titres supplémentaires ! Dommage.

KADAVAR

j1-kadavar


Au tour de KADAVAR de fouler la scène maintenant. A l’image de leur jeu scénique, c’est tout penauds que les trois grand barbus longilignes rejoignent leur emplacement sur scène, dont ils ne se déplaceront que dans un rayon d’une paire de mètres ! Mais nos fiers lascars ne sont pas venus en représentation malgré ce que pourrait laisser penser leur look “unifié” (veste cuir ou en jean’s sans manche sur torse nu, pantalon noir et bottes pour tout le monde). Le public, qui se retrouve à blinder la Valley pour la première fois de la journée, attend manifestement cette prestation autant que nous, et n’est pas déçu tandis que le trio se lance dans un “Liquid Dream” introductif de bonne facture. S’enchaîneront ensuite les titres issus pour moitié de leur premier album et pour moitié de “Abra Kadavar”, leur plus récent, pour le plus grand plaisir de tous. L’exécution est sans faille, avec encore et toujours un Lupus en modeste mais assumé frontman, tandis que le nouveau (et parfaitement incorporé) Simon “Dragon” à la basse et Tiger à la batterie se la jouent cool mais robustes sur la rythmique. Les titres délicieusement 70’s du combo laissent une place appréciable aux soli et autres passages instru parfaitement emmenés, ce qui apporte cette touche de “vie” aux morceaux chaleureux du groupe. Musicalement, c’est jouissif, et le public en est lui aussi convaincu : les morceaux sont chantés en chœur, ça slamme un peu partout, et les gens continuent à se masser aux abords de la Valley, attirés par les vibes old school du groupe. Les salves se sont enchaînées sans interruption (on retiendra le duo “Goddess Of Dawn / Creature Of The Demon” mais aussi un très groovy “Come Back Life”, entre autres) et le groupe doit même demander au régisseur s’il peut dépasser de quelques minutes pour caler un dernier titre (accordé !). Un carton. Kadavar : la force tranquille.

ELECTRIC WIZARD

j1-electricwizard


Nouveau break “core-post-machin” pour moi avec Kylesa qui ne maintient ma fugace attention que 2min30, le temps sans doute d’essayer de comprendre notamment l’intérêt de deux batteurs jouant exactement la même chose… en vain ! Mais fi des critiques gratuites, c’est au creux de la nuit que les hostilités reprendront pour nous, après une attente rendue plus laborieuse encore par les feignasses de Godflesh, qui n’ont pas réussi à rejoindre le site assez tôt pour leur set (ils joueront finalement après Electric Wizard, à l’arrache… sans nous !). Rendez-vous maintenant avec ELECTRIC WIZARD, donc, qui voit son rituel doom commencer à minuit pile. Dès les premières mesures de “Supercoven”, on note un quatuor moins introspectif qu’à l’habitude. A ce titre l’apport du jeune et fougueux Clayton Burgess à la basse est un point positif à l’actif du combo pachydermique originaire du Dorset : en injectant la vigueur et l’insouciance de ce jeune quatre-cordiste, EW bénéficie de ce coup de pied au cul salvateur qui le fait un peu bouger de ses acquis un peu trop confortables ces dernières années. A la batterie, en revanche, même si le bonhomme est peu éclairé par des lights (comme toujours avec EW) assez rares, on voit assez vite que Mark Greening, pourtant revenu aux baguettes il y a quelques mois, n’officie pas aujourd’hui ; je n’ai pas reconnu son remplaçant, mais on peut en revanche attester qu’il est assez efficace, l’absence du vétéran ne s’étant jamais faite sentir. A l’évidence, les rythmes sont lourds, presque sournois, et le son est gras, trop gras presque, comme toujours, les deux guitares s’enchevêtrent de manière quasi orgiaque pour mieux assaillir les tortueux conduits auditifs jusqu’à bastonner les quelques bouts de cerveau encore actifs en cette fin de journée. Pour le reste, scéniquement, l’ambiance “soirée diapos” (noir total et projection en fond de scène de films érotiques old school) semble heureusement un peu oubliée, et l’on peut désormais voir (non, je n’exagère pas…) les musiciens jouer, et on détecte même (accrochez-vous) des sourires ici ou là, notamment sur les visages de Liz et Jus, de bonne humeur ce soir. L’ambiance reste quand même juste assez lugubre, rassurez-vous, et le groupe n’a pas abandonné non plus ses projections psychédéliques, juste plus discrètes. Niveau set list, dire que le sorcier électrique la joue facile est un euphémisme : un titre de chaque album à peu près, et l’affaire est torchée ! Forcément, on ne va pas se plaindre de ré-entendre cette sorte de best-of live composé de titres comme “Witchcult Today”, “Return Trip” ou encore le toujours douloureux “Dopethrone”, ou encore le trippant “Futuropolis” en clôture. Mais d’un autre côté, un peu de prise de risque redonnerait peut-être aux anglais cette aura de “danger” qui auréolait il y a quelques années encore la perspective de les voir sur une scène. Un très bon set, donc, c’est indéniable, et fort bien exécuté ici. Il n’y a donc pas matière à se plaindre, loin s’en faut. Mais les Wizard n’ont pas non plus délivré la claque que l’on pouvait imaginer et espérer.

Nos yeux mi-clos nous font alors comprendre que Kvelertak devra botter d’autres culs que les nôtres, qui vont regagner le lit pour une poignée de petites heures de sommeil devenues vitales…

[A SUIVRE…]

Laurent (et Flaux)

RADIO MOSCOW, BLACK BOMBAIM, BLACK WILLOWS – 4 Juin 2014 Paris (Stoned Gatherings – Glazart)

radiomoscowglaz

A peine arrivé dans le nouveau fief des Stoned Gatherings, le Glazart, et sans avoir eu le temps  d’observer la géographie du lieu, Black Willows entre en scène. Dès les premières secondes, l’ambiance est posée. La rythmique lourde et relativement lente est contrebalancée en partie par la guitare et les quelques lignes de voix rondes cosmiquement réverbérées. Niveau influence citons Naam. Une ambiance psychédélique très intéressante qui vous embarque sans forcer un mercredi à 20h quand notre cerveau n’a pas forcément eu le temps de faire la transition : royal. Le groupe est également ravi d’être parmi nous. Le public est d’ailleurs nombreux pour les applaudir. Petit détail qui ajoute à l’ambiance, les dreadlocks du batteur forment l’ombre de pattes d’araignées au plafond. Fin du set et j’apprends qu’ils sont Suisses. Le temps d’atteindre le bar que les loustics nous proposent un bon petit rappel.

J’ai maintenant le temps d’observer mon environnement, les petites cours, le merchandising. Mais pas trop non plus car on enchaîne rapidement avec Black Bombaim. Nous voilà repartis pour un set  psychédélique de 45 minutes. Pas de chant ici. Seulement un duo basse-batterie plus lourd que le précédent pour accompagner une guitare qui cisaille l’air. Les musiciens sont plus renfermés sur eux-mêmes, concentrés. Les motifs se mettent en placent, la guitare divague. Les morceaux sont très longs et on semble toucher du doigt la jam. On reste un peu sur sa faim niveau rythmique même si elle s’éveillera en fin de set. La foule est en tout cas aux anges. Les chevelus se brisent la nuque. Une sorte de ferveur populaire prend peu à peu place. Fin du set et les oreilles bourdonnent.

Le temps d’un tour sur moi-même et voilà le plat de résistance : Radio Moscow. Le temps d’un salut et les riffs 70’s sexy prennent places. Une base rock à la Led Zep transfigurée par des solos techniques et viscérals intenses. Parker Griggs, en plus d’une voix très reconnaissable, est un guitariste de génie. Le psychédélisme reste dans des breaks, des variations et des solos. Le look est en accord : cheveux longs, gilet sans manches et pattes d’eph’. Bref une machine à remonter le temps et qui traverse les limbes de notre cerveau.

Le groupe semble heureux, le son est excellent et encore une fois le public ne s’y trompe pas. Un nombre incalculable de slams vrillent la foule. Certains marchent au plafond, d’autres sur scène. Plus en arrière, une grande partie est en transe ou harangue le vide. Les autres sourient de bonheur. On aura le droit à quelques morceaux du prochain album “Magical Dirt” comme “These Days” et sa brisure centrale qui fait décoller terre.

Quelques minutes d’attente pour un énorme rappel avec un solo de batterie qui lance un des meilleurs solo de guitare de la soirée. Le guitariste traînera même ses guêtres parmi nous. Voilà une nouvelle bonne soirée qui s’achève.

Merci au Stoned Gatherings !

WO-FAT, MOTHERSHIP, LOS DISIDENTES DEL SUCIO MOTEL – 28 mai 2014 – Paris (Stoned Gatherings – Glazart)

Le printemps des Stoned Gatherings continue et les affiches à en faire baver plus d’un fleurissent à tour de bras. Pas une semaine ne se passe sans que l’on se retrouve au Glazart pour reprendre une dose de live bien méritée. Aujourd’hui c’est gras-tiné avec Los Disidentes Del Sucio Motel, Mothership et Wo Fat. L’annonce envoyait déjà du bois, le public est nombreux dès l’ouverture, il ne reste aux groupes qu’à nous donner ce pour quoi nous sommes venus : une claque ! Les trois groupes sont soit rares, soit trop rares, soit trop trop rares, soit inédits dans nos contrées. Quoi qu’il en soit les connaisseurs le savaient, il fallait être là. Et je confirme.
wo-fat-glaz

 – 1) Je pourrais d’abord dérouler de manière habituelle un live report policé où les mérites et morceaux de bravoures de chacun seraient vantés, décris et loués :
LDDSM et leur gros-stoner-rock fichtrement bien gaulé, fait de riffs efficaces mais surtout d’arrangements subtils, de lignes vocales originales et d’une énergie à faire pâlir l’homme qui valait 3 milliards. Amis français vous voulez voir où la barre se situe aujourd’hui pour faire un show qui marque, voilà le mètre étalon. Du fun sur scène, de la communion avec le public, du plaisir à partager, un sample du roi lion, des extraits de film de zombies, une fin de set dans la fosse pour les deux guitaristes. Tout est là. Horns up pour l’hommage à Lorène Lenoir avec une reprise de Massive Attack.
Mothership ou le rock américain à son top, un trio qui sue le rock, qui le vit. Envoie le groove, dérouille les solos, plaisante avec le public entre chaque morceau. T’as pas encore entamé ta bière qu’elle est déjà vide tellement la chaleur du bitume te consume. Faut dire que les allers-retours 60’s/70’s à aujourd’hui, ça fait du chemin. Le groupe convainc sans peine, tout le monde a la banane, ça suinte tellement le bon gros rock lourd que la simplicité apparente de l’ensemble made in Dallas envoie des volées de baffes à tour de riffs. C’est tout ce que l’on aime, prendre son pied avec du gros son.
Wo Fat et le « laisse les grands t’expliquer comment jam-stoner-psyche-rock ça s’épelle W.O.F.A.T ». Même si tu n’entends ma voix que comme si elle venait du fond des backstages de tout le concert, mes potos et moi ont va te démontrer qu’en fait enchaîner les riffs jouissifs, faire durer les morceaux jusqu’à ce que tu ne saches plus où tu en es et dérouiller vos nuques c’est la définition de Wo Fat. Si voir le guitariste de Mothership slammer pendant le show ne te suffit pas à te convaincre que TOUTE l’assemblée ne forme plus qu’un avec le trio et que ce soir rien ne pouvait stopper la jam-machine de faire son effet (pas même un court souci d’ampli), alors tu ne devais pas être au concert. Plus que la maîtrise des instruments, c’est l’osmose qui règne qui claque tout le monde.
– 2) Je pourrais sinon essayer de trouver les mots pour vous dire combien cette soirée était immanquable pour tout amateur de stoner. Le stoner tel que vous le décririez à vos parents pour leur faire comprendre qu’il n’y a que des bonnes choses dans cette musique, autant dans les chansons que dans l’attitude. Et les trois représentants de la scène ce soir on fait démonstration de tout cela et bien plus encore dans des styles et approches pourtant différents.
– 3) Sinon je pourrais juste ne rien dire. A ce niveau de classe et de maîtrise, un live report est superflu. Tu étais au concert ou tu n’y étais pas. Tu as une chance de voir un de ces groupes en live, fonce, ne perd pas de temps à lire ses lignes. Si en plus ils partagent l’affiche, invite tout ton entourage : c’est vital de voir du live comme ça.
Tout est dit, il n’y a rien à dire excepté :
MERCI aux Stoned Gatherings de nous offrir des soirées pareilles
DÉSOLÉ pour ceux qui n’y étaient pas
SANTÉ !

CONAN, BELZEBONG, The MOTH – 25 mai 2014 – Paris (Stoned Gatherings – Glazart)

Synonyme de fin de week-end, le dimanche soir c’est triste et en même temps plein d’espoir parce qu’une nouvelle semaine s’annonce ! Les  Stoned Gatherings l’ont bien compris et ont de ce fait réuni tous les ingrédients pour que ce dimanche 25 mai soit le juste reflet de tout cela : The Moth, Belzebong et Conan.
conan-glazart
The Moth ouvre le bal. C’est tout en décontraction que le trio d’Hambourg nous balance son sludge-stoner-metal dans la tronche. Le riff est direct, pas de détour pour être efficace et c’est le duo de voix que forme Cecile à la trois-cordes (oui parce que quitte à ne pas user de la quatrième corde d’une basse, autant l’enlever) et Freden à la six-cordes (le compte est bon pour une guitare) qui donne toute l’originalité au groupe. Les lignes de chant désenchantées apportent un aspect mélancolique à des chansons qui musicalement tapent dans le lard. Un contraste bien venu pour sortir le groupe du lot, qui serait sinon voué à être un énième représentant du riff bas-du-front mais qui réinvente pas la roue non plus. La modestie dont fait preuve le groupe démontre la sincérité de leur démarche, ils sont heureux d’être ici et même si la salle est clairsemée, on va partager un bon moment ensemble. Un son un poil brouillon malheureusement ne donne pas toute la juste puissance aux riffs et noie le chant dans l’ensemble. Le groupe est tout jeune, l’avenir les fera certainement se représenter devant nous et avec un son plus limpide la fosse ne pourra qu’être plus réceptive à cette formation prometteuse.
Le thermomètre commence à grimper, faut se désaltérer en attendant les polonais de Belzebong. Eh oui il n’y avait pas que les élections européennes aujourd’hui. Les quatre gaziers montent sur une scène « plus enfumée tu te cognes contre les amplis » baignée d’une douce lumière verte. Ce visuel ne bougera pas d’un iota pendant tout le set, le décor est planté à l’image de la plante de prédilection du groupe (comme son nom le suggère). Du premier larsen au dernier coup sur les fûts, nous voilà lancés dans plus de 50 minutes d’un déluge de riffs lourds et gras. Formation instrumentale, Belzebong ne fait pas dans la dentelle et emmène tout le public avec lui. Les morceaux sont longs et répétitifs pour mieux porter à un état de transe, mais quand le riff est juste à ce point pourquoi se limiter à 4 minutes ! La quintessence du stoner-doom suinte de tous nos pores. Le temps se suspend, les sens s’éteignent au fur et à mesure et l’envoutement devient total. Son puissant pour maintenir l’emprise de nos esprits, quelques samples d’extrait de film pour prendre notre respiration et la magie du fuzz opère. L’audience est conquise, nous voilà disciples du quatuor.  La salle n’est plus qu’une énorme vague de headbanging. La cohésion est totale entre le groupe et le public, ils ne pouvaient que faire un rappel (tant pis pour le timing). On se sera pris notre dose de riffs, de groove et de jubilation, sans jamais risquer l’overdose. La marque des grands.
Après ce coup de massue, on se demande bien ce que l’on va pouvoir encaisser de plus. Il ne faudra rien de moins que le doom guerrier de Conan pour se faire une place dans nos esgourdes et nous achever. Il n’y aura pas de répits, pas de trêve, pendant 1 heure ils nous ont mis (à ce niveau ce n’est pas juste la fièvre) une sacrée correction. Light show épuré, sweat à capuche pour la guitare et la batterie, on fait dans le rudimentaire parce qu’importe l’armure, ce soir il n’y aura pas de prisonniers, c’est la guerre façon directe. Nouveau duo de voix entre basse et guitare, le growl gras de l’un est contrebalancé par les cris de l’autre. La musique écrase, ne fait pas dans le détail, ça tape (lentement parce que c’est du doooooooooooom) dans le vif. Les voix sonnent le ralliement. Nous ne pouvons que suivre, béats que nous sommes face au charisme des anglais. Le son est puissant, sans concession. Toutes les cordes résonnent, les instruments sont matraqués et ce n’est pas du côté des mélodies qu’il faut chercher la subtilité. Parce qu’il y a de la subtilité quelque part ? Oh que oui et pas des moindres, dans le jeu de la batterie. Voilà un batteur de doom qui sait varier son appui rythmique. Petits motifs de cymbales originaux au milieu de la lourdeur des riffs, rythmes variés pour sortir du déluge de gras. L’emprise de la guitare est totale, soutenue par la basse massive et la batterie tache de nous maintenir aux aguets. Les instincts guerriers sont invoqués et le pit finit par se déchainer. Une fosse qui défouraille face à un groupe de doom, c’est vous dire si le trio est un rouleau compresseur d’efficacité brute. Le groupe n’a pas besoin d’être communicatif pour faire adhérer la salle, mais on les sent content d’être là. Un petit rappel pour être sûr de ne pas laisser de survivants derrière eux et voilà comment votre soirée du dimanche s’achève sous des applaudissements nourris.
Soirée ENORME organisée une nouvelle fois par les Stoned Gatherings. Ca fait du bien de se prendre une raclée le dimanche soir dans ces conditions.

THE MIDNIGHT GHOST TRAIN, COFFIN ON TYRES – 24 Mai 2014 – Ivry sur Seine (Le Hangar)

mgt-ivry

Glad Stone Asso a encore permis la création d’une belle affiche et cette fois en bordure de Paris. Après une arrivée tranquille sur les lieux, j’ai eu le plaisir de rencontrer Steve Moss de TMGT dont vous pourrez lire l’interview très prochainement.

Coffin On Tyres a pour charge de débuter la soirée. La salle n’est que partiellement remplie mais peu à peu la foule va se faire plus dense, attirée par un set furieux d’une heure. Le groupe, de plus en plus communicatif, semble prendre un grand plaisir à jouer ce soir. Le guitariste ne décrochera pas de son sourire un seul instant. Le chanteur interagit de nombreuses fois avec le public et les instrumentistes tiendront, après un début un peu timide, la scène de bien belle façon. Les 5 derniers morceaux auront été, pour moi, les plus communicatifs, les plus intenses et les plus possédés. Le groupe nous gratifiera aux environs des 3/4 du parcours d’une reprise de “Stink Fist” de Tool des plus qualitatives. En bref, du gras, de la mélodie et un chanteur charismatique avec un album prévu sous peu !

Petit entracte. Petite bière. Petites tergiversations pour la suite. Car cela sera ma première expérience live d’un groupe qui vit pour et par le live. Steve et ses comparses s’installent donc et commencent à tripatouiller leurs instruments et à prendre de nos nouvelles. La salle est alors en grande partie dépeuplée mais il ne faudra pas longtemps pour que les retardataires soient de retour. Avant le départ, petit briefing de la réalisatrice de la soirée. The Midnight Ghost Train tourne ce soir leur premier clip, ici ! On nous explique alors que le deuxième morceau joué est issu de leur futur troisième album et que pour multiplier les prises de vues, il sera joué deux fois. Steve ironisera sur le fait qu’il espère qu’on l’appréciera… Une autre précision nous informe qu’en dehors de ce morceau joué, deux fois donc, des prises de vues de nous, le public, seront réalisées pendant le reste du concert.

Il est maintenant temps de se prendre une dose de “Heavy Blues” dans les tripes. Dès la première note, une intensité considérable émane de la scène. Steve et Mike le bassiste sont face à face à deux doigts de se détacher le cou. Je ne sais pas si ce genre d’intensité peut être mesurée par la quantification des litres de sueurs versées. Si c’est le cas je pense qu’on peut dire qu’on était proche du maximum. Si l’intensité est en effet sur scène, elle l’est aussi dans la fosse. L’impact musical combiné à l’idée de figurer par l’image dans la postérité du groupe semble faire un bon catalyseur pour ambiancer une soirée. Certains de mes ami(e)s pourtant en retrait ne tarderont pas à faire les frais de la passion qui émane ce soir. A titre personnel, et avec un recul proche du néant, le morceau choisi pour la vidéo semble être un choix tout à fait approprié. Deux écoutes qui passent donc toutes seules. Steve n’avait pas à s’inquiéter, le public a répondu deux fois plus que favorablement à sa proposition musicale. Le morceau s’intitule d’ailleurs “Glad Stone”, vous apprécierez l’hommage. Le concert enchaîne de plus belle et l’économie n’y a définitivement pas sa  place. Les trois garçons font un travail monumental et toujours en interaction avec le public.

La fin du set commence à se faire sentir et le public perd la raison. Des “à poils !” fusent tels des fuites ingérables. Steve demandera une traduction et répondra amusé. L’attente avant le rappel fut courte sous la ferveur populaire. Un bon gros morceau de bois suivi d’un light show extatique et les voilà qui nous remercient d’être venus.

Mais le public en veut plus. Une dernière pour atteindre encore l’apothéose.  Après une grosse minute les voilà donc de retour pour la deuxième fois. Steve trottine vers sa guitare et dans un accès de folie, retire son T-shirt. Le bassiste et le batteur suivent, pendant que le premier détache sa ceinture en répétant que nous ne pourrons pas endurer cela. TGMT sait faire plaisir à son public et aime çà !

Après des remerciements chaleureux des deux côtés, c’est la fin d’une soirée qui laissera des traces à tous les niveaux.

Merci à Glad et au Hangar pour cette très bonne soirée !

Cosmic Mo

LORELEI FEST, 22 mai 2014, Le Klub, Paris, France

Lorène, je sais que tu étais là avec nous ce soir mais laisse-moi quand même te raconter ma soirée, que tu puisses voir à quel point tes amis et moi en particulier étions vraiment contents d’être là ce soir.
Pour moi tout commence avec la route à faire, départ 15h30 de la maison, certes c’est tôt mais il est hors de question pour moi d’arriver trop tard pour cette soirée.
Un t-shirt et quelques CDs, voilà tout ce dont j’ai besoin avant de partir. Pour le t-shirt, j’ai choisi celui de la tournée 2005 des Queens. C’est lors de cette tournée que j’ai eu la chance de te rencontrer en chair et en os pour la première fois même si on se côtoyait virtuellement depuis pas mal de temps. Tu portais ton chapeau à l’époque si mes souvenirs sont bons. Côté CDs, ma playlist est simple pour ce voyage aller, deux disques.
Pour commencer je me mets le premier album des Queens, tu sais bien l’album… éponyme… Et je pense à cette facette de toi que certains ne connaissaient même pas. Ta maitrise de la langue française et ton travail de traductrice qui allait avec. Je repense à une discussion sur ce fameux terme éponyme qui t’agaçait tant il est utilisé à tort et à travers. Et par la même occasion je me dis que plus jamais je ne rencontrerai de personne qui utilise le mot « putassier » aussi naturellement que toi… c’est bête non ?
En parlant de Qotsa, je me souviens aussi de ce fantastique concert à l’Ancienne Belgique pour y jouer cet album en entier, mémorable soirée où tu étais arrivée tellement en retard que tu avais presque tout loupé. En retard… impossible pour moi aujourd’hui. Alors continuons le chemin.
Le second album qui m’accompagne alors que les kilomètres défilent c’est un live de Thièfaine. Forcément, j’ai le cœur qui pleure lorsque j’entends “Lorelei Sebasto Cha” et je te le répète, plus jamais je n’entendrai cette chanson sans penser à toi. Je me remémore notre discussion sur cette chanson…
Il y en a une autre qui me fait tant penser à toi maintenant, “Petit Matin 4.10 heure d’été”… je me dis que c’est dommage, on n’a jamais pu parler du dernier album de HFT, j’aurai bien aimé avoir ton avis.
« Je n’ai plus rien à exposer
Dans la galerie des sentiments
Je laisse ma place aux nouveaux-nés
Sur le marché des morts-vivants. »
IMG_3131
Lorsque j’arrive devant le Klub, il y a déjà quelques personnes devant l’entrée, à boire un verre, sans le moindre doute à ta santé. Je salue quelques personnes et entre. Il me faut absolument aller voir les photos de toi qui sont en vente, je ne peux repartir sans l’une d’entre elles et avec la règle du premier arrivé premier servi, tu penses bien que je voulais arriver à l’heure !
J’ai énormément de chance, je suis le premier à choisir… Un choix difficile mais pourtant évident. Alors je ne sais pas encore où je vais exposer cette photo de Josh Homme… dans mon couloir entre deux posters ou dans mon bureau, à côté de cette photo de moi, Scott et Bruno que tu avais prise.
Il y avait dix-sept de tes photos mise en vente ce soir, dix-sept magnifiques photos que j’ai pris un long moment à regarder, seul dans ce couloir en pensant à toi et toutes tes heures passées dans la fosse des photographes.
Je ressors de la salle, la foule est plus fournie, les gens discutent et attendent 22h, l’heure à laquelle commencera le concert. Je discute encore, je fais même des rencontres inattendues tu sais, je passe déjà comme tout le monde présent ce soir-là, un excellent moment grâce à toi.
Et puis je retourne encore devant la scène, pour préparer mon matériel pour enregistrer le concert. Tu me connais, jamais sans mon Edirol ! Et puis je dois aussi préparer mon appareil photo car je compte bien immortaliser la soirée et prendre quelques clichés qui, s’ils ne rivaliseront jamais avec ton boulot de photographe, me feront d’excellents souvenirs.
Sauf que voilà, c’était écrit par avance que la soirée serait exceptionnelle. Alors largement avant 22h, Louise, Lo S. Data, Pablo et Rodrigue s’installent sur scène. Car si le règlement du Klub empêche de faire du bruit avant 22h, il n’empêche pas de prendre deux petites guitares et de chanter quelques trucs comme ça, en impro complète.
IMG_3147
Regarde-moi Lo’ ces sourires sur leur visage. N’est-ce pas là le signe d’une soirée qui s’annonce certes chargée en émotions mais avant tout festive et joyeuse. Je suis sûr que tu as apprécié la reprise de Depeche Mode par exemple car toi qui étais connue pour ton attachement au stoner et au heavy en tous genres, nous savons aussi que tu ne crachais pas sur un bon petit truc New Wave ou post punk.
Les quatre compères improvisent donc quelques chansons alors que la plupart de tes amis sont encore dehors sans savoir que ça a déjà commencé.
Cédric de Face Down et Sam de Flesh and Dust prennent le relais pour un pur moment de rigolade. Ils enchaînent les intros de tout un tas de tubes rock au plus grand bonheur de ceux qui sont déjà là. Un vrai moment convivial entre amis, sans prise de tête, c’était juste parfait.
IMG_3186
IMG_3210
Il n’est toujours pas 22h. Louise au chant et Nico E. Wilhelm à la guitare acoustique s’installe discrètement sur scène pour nous faire vivre un très joli moment d’émotion en interprétant “Hit the City” de Mark Lanegan de fort belle manière. Lanegan, on ne peut pas dire que tu sois la dernière de ses fans et tu as du apprécier cette très belle version j’en suis certain. Ils sont rejoints ensuite par Fred Quota de DearDevil et Pablo de Loading Data pour faire les chœurs sur “Down by the Water” de PJ Harvey. C’est magnifique.
IMG_3250
IMG_3252
Totalement improvisé encore histoire d’attendre l’horaire prévu, Pablo reste sur scène avec Louise, prend une guitare et nous interprète “Heart Shaped Box” de Nirvana. Me reviens alors des discussions sur ce groupe, sur leur performance au Reading Festival en 92. Tu as aimé à coup sur cette version dépouillée et pourtant si forte. On sent la conviction et la sincérité dans le jeu de Pablo et le chant de Louise, tout en retenue n’en est que plus beau.
IMG_3263
La première partie de la soirée s’achève. Elle était improvisée, tu as adoré j’en suis certain. Un vrai moment comme tu les aimais, comme on les aime tous. Des moments simples et précieux.
22h précise, le Lorelei Fest premier du nom peut véritablement commencer. Oui oui, commencer car après tout, ce qui vient de se passer n’était pas vraiment prévu.
Et qui de mieux pour entamer le set que ton partenaire dans Sleaze Amine à la guitare accompagné par Clément et Ben. “Thee Ol’ Boozeroony” et “Mudfly” de Kyuss pour commencer, que dire si ce n’est que c’est un excellent choix. Le public présent apprécie tout autant que moi et c’est vraiment une entrée en matière parfaite pour cette soirée rock’n roll au possible.
IMG_3312
Les musiciens et chanteurs changent, s’échangent leur place et cette première partie verra défiler sur scène Fabian Belleville, Clément, Bapt et Goeff de Coffin on Tyres ainsi que Sam pour enchainer “Born To Hula”, “Auto Pilot” de Qotsa et “Burning Beard” De Clutch. Inévitablement je repense là à ce concert de Clutch en première partie de Volbeat dont on a loupé le début tellement j’étais en retard ce jour-là avec la circulation parisienne. Je te dois toujours un demi-concert de Clutch, je n’oublie pas!
On termine cette première partie avec un bien puissant “A Song for the Dead” de Qotsa. J’ai une énorme pensée pour toi à ce moment précis, me disant que c’est le dernier titre des Queens que tu as vu en live lors de leur dernière tournée.
IMG_3281
La seconde partie commence sur un surpuissant “Wish” de Nine Inch Nails, débordant d’énergie. Tu as vu ça comme tes amis se donnent sur scène, c’est beau à voir n’est-ce pas ?
Et on s’enchaine sans aucun lien et ça c’est rock ‘n roll avec un Rodrigue totalement survolté et c’est peu de le dire pour trois reprises de Eagles of Death Metal (“I Only Want You”, “Don’t Speak” et “Speaking In Tongues”). Nico E. Wilhelm est à la gratte, Clément à la basse et Fred Quota à la batterie. Quel pied sérieusement. Ça déborde d’énergie aussi bien sur scène que dans le public !!!
Impossible de voir ça sans repenser à l’une des photos de toi que je préfère, celle où tu es sur scène aux côtés de Jesse lors de leur concert à l’Ancienne Belgique en 2009. Quel souvenir merveilleux que ce concert, un de plus avec toi.
IMG_3436
Mais pas le temps de se laisser gagner par la nostalgie car nos loustics sur scène sont chauds bouillants ! Et là c’est du lourd qui se prépare puisque Robin de Loading Data à la batterie, Fab Corn de Coffin on Tyres à la guitare, Rodrigue toujours au chant et guitare et Nakat ancien membre de Loading Data à la basse associent leur force et leur énergie pour trois reprises stratosphériques de Fu Manchu (“Evil Eye”, “Anodizer” et “King of the Road”). J’imagine déjà comment tu as du crier de toutes tes forces comme j’ai pu le faire sur King of the Road says you move too slow !!!!!!!!!
IMG_3455
Alors qu’on nous annonce une petite pause, Lo Data et ses amis reviennent sur scène pour nous jouer “Third Man on the Moon” de Masters of Reality. J’imagine la joie que tu as ressentie en entendant cette superbe version. Quelle réussite.
Après une petite pause donc et une bonne boisson fraiche, nous voilà de retour pour la suite et je trépigne d’avance en me demandant quelles autres surprises nous attendent. Tu dois être tout aussi impatiente et je pense que tout comme moi tu as été littéralement cueillie par ce “Wedding Dress” de Lanegan. Alors que l’émotion est à son comble, Lo Data et sa bande enchaîne avec une longue et superbe version de “Revival” des Soulsaver’s. Que dire ? Quels mots trouver pour exprimer ce que l’on ressent dans pareil moment. Tu es touchée par l’hommage, surement encore plus que je le suis.
IMG_3460
Et cette émotion est loin de retomber lorsque retentissent les premières notes de “Makin a Cross” des Desert Sessions. Je dois ici souligner que, parmi les milliers de chansons qu’il était possible de choisir pour te rendre hommage, les choix sont réellement parfaits. On sent que ceux qui ont préparé ce concert te connaissent.
Mais j’entends l’écho de ton rire devenu mythique pour toutes les personnes qui te connaissent après la blague de haute volée que Lo Data nous sort avant le morceau. Quel déconneur ce Lo’.
Cette partie se termine par une annonce de Lo Data que j’ai trouvée si symbolique. Une naissance à venir, celle de la fille de Robin. Certains partent, d’autres arrivent, ainsi va la vie.
Après la toute petite pause, c’est au tour de Loading Data avec Nakat à la basse de venir sur scène pour quelques titres de leur répertoire. Lo Data nous rappelle d’ailleurs comme tu as pu les soutenir dans leur carrière. “Circus Blues” pour commencer et sa patte groovie que j’adore. Le groupe enchaine ensuite avec le superbe “Do it on the Beach” qui pousse le public à crier le refrain même si personne n’osera monter sur scène pour chanter avec eux comme Lo Data l’avait demandé. Trop timide ce public ? Moi je suis certain que si tu avais été là physiquement avec nous, tu te serais précipitée pour aller t’éclater derrière le micro. “Alright” vient tout de suite en enchaînement, rock’n roll à souhait.
IMG_3570
“Song for a Friend”, dernier titre du groupe pour ce soir. Tu n’as jamais entendu ce morceau Lorène j’en suis sûr. En fait ce bien joli morceau a été écrit spécialement pour toi, juste après que tu sois partie rejoindre tous nos amis trop tôt disparus. Go Wake Up, Go Wake Up the Maker, With Booze, and Fuzz & Funny Cigarettes. Un bien bel hommage pour toi mon amie.
Après ce joli moment d’émotion, on aurait très bien pu en rester là. Mais il fallait surement mieux te laisser sur une notre plus rock’n roll. Et c’est exactement ce qui t’a été donné.
Coffin on Tyres monte sur scène et nous interprète une puissante version de “Stinkfist” de Tool.
It’s not enough
I need more
Nothing seems to satisfy
I don’t want it
I just need it
To feel, to breathe, to know I’m alive.
Quelle était cette chose pour toi, cette chose qui t’a tant manquée ?
La version que j’entends ce soir a une résonnance toute particulière, c’est si puissant, si fort. Et me voilà encore avec des souvenirs qui remontent. Ce concert de Tool au Zenith il y a quelques années auquel je ne peux aller. Et je te file la place pour que tu puisses t’y rendre alors qu’on discute de tout le bien que tu penses de Maynard James Keenan… Quelle rigolade encore une fois.
Pour nous achever et terminer en beauté cette partie, le groupe nous envoie un de ces “Green Machine” de Kyuss absolument dantesque. Difficile de faire mieux que toute cette rage qui sort, toute la frustration que l’on crie, que l’on expulse comme ces quatre loustics qui beuglent derrière le micro à s’en faire exploser les cordes vocales. C’est puissant, c’est tellement puissant.
IMG_3694
Il est environ une heure du matin lorsque, pour terminer la soirée, les musiciens montent sur scène pour un jam qui nous mène au bout de la soirée. Cette première édition du Lorelei Fest est une totale réussite. C’est un vrai bonheur de te rendre hommage comme cela, c’était parfait.
1h30 du matin… le temps pour moi de reprendre la route. Pour le retour je me réécoute une partie de la soirée, je monte le son dans la voiture, je revis la soirée.
Il est presque 4h10 du matin quand je me couche, c’est ironique je trouve. Le réveil sonne dans 2 heures. Et là, je repense à cette fois où tu m’as hébergé chez toi et où on a discuté toute une partie de la nuit pour finalement se coucher, vers la même heure environ.
Je tiens à remercier toutes les personnes présentes ce soir-là, les musiciens, le public, tout le monde.
En particulier un grand merci à Rodrigue pour son accueil et Robin pour son aide.
Rendez-vous je l’espère l’an prochain pour une deuxième édition tout aussi réussie.

Sasquatch, Ed Mundell’s The Ultra Electric Mega Galactic, Abrahma, Satan’s Satyr – 9 mai 2014, Glazart, Paris

Mesdames et messieurs bienvenue en ce vendredi 9 mai 2014 au salon de l’auto-stoner ! De belles mécaniques présentées ce soir, des plus récentes aux plus classiques, que du beau, du bon, du gros. Organisée pas nos amis fidèles des Stoned Gatherings cette soirée forte de quatre modèles, pris place au QG habituel : le Glazart.

Début des festivités à 19h avec Abrahma, la belle française avec ses finitions rétro est pourtant bien ancrée dans le présent. Quatre roues motrices pour profiter pleinement de la puissance de son moteur, ça sent à chaque morceau la qualité de la ligne de montage, des pièces et de la main d’œuvre. 30 minutes de show qui passent vite tellement le groupe nous emmène loin en si peu de temps. Dès les premières résonances des guitares et de la basse, on sent le décollage imminent et une fois la première enclenchée, la route défile. La lourdeur de la rythmique se laisse entraîner dans des passages plus envoûtants et la mécanique étant bien huilée, on ne s’ennuie pas un instant. Chanceux que nous sommes nous avons même le droit à un nouveau morceau, un nouvel album étant en chemin, et c’est une excellente impression qui s’en dégage. Le groupe reste fidèle à son heavy-rock-psychédélique. Eux-mêmes transportés, un petit moment de flou sur le timing ne leur laisse malheureusement pas le temps de nous en offrir plus. La qualité à la française a de belles heures devant elle. Dommage que le public fut si clairsemé en ce début de soirée. Ce n’est pas rendre justice aux qualités scéniques des parisiens.

Après que le seul représentant de la fabrication française soit passé sur le podium, c’est un festival de belles américaines qui va défiler sous nos yeux et faire vrombir leurs moteurs.
En premier lieu : Satan’s Satyr. Retenez ce nom, vous en entendrez parler dans les prochaines années. Ca ressemble à un corbillard mais ils ont dû faire un tour chez Pimp My Ride pour avoir autant de chevaux sous le capot voire de la nitro dans les lignes droites. Assemblé en Virginie par trois jeunes mécaniciens, je peux vous dire qu’une fois la gomme des pneus chaude ça dépote. Ca commence comme du doom groovy, début de set instrumental, et plus les minutes passent plus la nitro fait effet. Au final les jantes punk’n roll claquent et leur doom’n roll scotche tout le monde au passage. C’est Black Sabbath qui s’est fait tuner par le MC5. Au chant et à la basse, nouveau membre de Electric Wizard soit dit en passant, Clayton Burgess est un leader charismatique pour son jeune âge. Croisement improbable entre Mick Jagger et Lee Dorrian. Empruntant des mimiques à l’un et à l’autre mais sans avoir leurs voix respectives, il dirige la cérémonie de main de maître. Le chant punk est soutenu par des riffs d’une efficacité rare. Tout ce qu’il y a eu comme gimmicks de plus accrocheurs depuis les années 50 y passent. Basse et batterie se font plaisir tout en laissant la place à la guitare de s’embarquer dans des solos. Le public est conquis. On se voit bien manger des kilomètres en leur compagnie.

Entre en scène The Ultra Electric Mega Galactic. Le chef d’atelier ne vous est certainement pas inconnu : Monsieur Ed Mundell, ex-Monster Magnet , ex-Atomic Bitchwax et toujours lead-guitariste culte. C’est une belle mustang, fichtrement bien montée que ce trio là. Finitions chromées, vous avez toutes les options pour un confort de conduite totale et une tenue de route optimale. Et la route est bien tenue ! Parce que Ed (pour les intimes) ne s’est pas entouré d’une équipe de bras cassés pour son jam-band instrumental. Loin de là. Autant nous connaissons les qualités de solistes du grand blond et de ses riffs jouissifs à tomber le toit pour se la jouer décapotable, autant ses compagnons d’armes n’ont pas la même aura avant de faire parler leurs instruments. Derrière les fûts Dan Joeright, qui remplace Rick Ferrante (de même pour Sasquatch), assure toute l’assise nécessaire pour laisser ses comparses s’exprimer. C’est carré, varié, groovy à souhait, il y a les amortisseurs qui faut pour encaisser les cahots de la route et la carrosserie est robuste. Qui dit trio instrumental, pense souvent concert « clinique »… mais c’est sans compter sur la bonne humeur ambiante du groupe et sur les qualités d’animateur du bassiste : maître Collyn Maccay. Echanges pleins d’humour avec le public, partage du plaisir qui est le leur d’être ici, un vrai… leader ? Parce qu’il n’y a pas qu’en tant que speaker officiel qu’il assure le bougre, c’est un tueur à la quatre cordes. Ed a trouvé son juste alter ego pour animer les riffs et mélodies du projet. Vous voulez connaître toutes les capacités de cet instrument qu’est la basse : regardez Collyn jouer. La claque ! En vrai maestro et amoureux de la musique, le groupe se laisse même à jammer en compagnie de Keith Gibbs (guitariste de Sasquatch) pour finir le set. La classe à l’américaine ! Savoir faire le show tout en faisant démonstration de toutes leurs qualités de composition comme d’interprétation.

Pour clore l’évènement, un beau truck typique du pays de l’oncle Sam. Vous savez le gros camion qui en jette un max et qui avale les kilomètres de la route 66. Celui qui rutile et qui suinte en même temps. C’est un classique du genre qui est présenté ce soir : Sasquatch. Un modèle qui connaît une seconde vie depuis 2010 après un petit hiatus autour de fabrication de la bête. L’idée de ce genre de camion, ce n’est pas d’être original, c’est d’être efficace. Le genre de mécanique qui sert de mètre étalon pour toutes les autres confections automobiles. Carré pour tenir la route, groovy pour faire brûler l’asphalte, rugueux pour décourager les prétentieux de faire la course, mélodique pour adoucir les virages et accrocheur pour tomber les tenancières de motels. Du Stoner pur huile, point barre. Faut pas se couper les cheveux en quatre pour comprendre le message : faisons-nous plaisir tous ensembles. Partageons rires et sueurs, headbanging et voix rauques, ce soir le truck vous a transporté son lot de petit-bois et il en envoie en masse. C’est rôdé, ça déroule sans accroche, ça joue bien, ça joue fort, des solos, des chœurs du bassiste, des blagues, de la bière, une fosse en délire. Plus que de bons morceaux, un bon chant et de bonnes mélodies, la musique du trio prend là tout son sens : prendre son pied. Ceux qui y étaient comprendront, ceux qui n’y étaient pas n’auront pas raté le concert de l’année, mais un ‘tain de bon moment. Ce soir Sasquatch a mis sa photo dans le dictionnaire pour définir un set jouissif.

Ce fut une très grOsse soirée. Merci tonton !

Los Disidentes Del Sucio Motel, Abrahma, Rescue Rangers, 2 mai 2014, Heretic Club, Bordeaux

En arrivant devant l’Heretic, célèbre petite salle associative du centre ville de Bordeaux, on commence à sentir que même si sur le papier toutes les conditions sont réunies pour une soirée d’exception, on ne peut pas maîtriser tous les éléments… En l’occurrence, un concert rock dans une ville éminemment estudiantine un vendredi de “pont” un lendemain de jour férié… ça ne rameute pas les foules ! Ajoutez à ça un public bordelais réputé apathique (après cinq ans de vie bordelaise et malgré quelques faits d’armes d’exception, difficile de contredire ce triste état de fait : Bordeaux n’est pas franchement une ville rock), et on ne peut pas dire que ça se presse devant la scène lorsque les marseillais de Rescue Rangers font gronder les premiers accords de guitare…

rescue

Mais ce n’est pas notre seule surprise en voyant le quatuor (!) évoluer devant nos yeux : du Rescue Rangers que l’on connaissait, ne subsiste que Pascal, emblématique frontman de la formation phocéenne. Autour de lui, un nouveau bassiste et un nouveau batteur, mais aussi un second gratteux dans un coin, qui nous rappelle vaguement quelque chose… C’est en fait Seb, frontman d’Abrahma, qui assurera donc ce soir deux sets d’affilée ! Nouveau line-up, donc, définitif ou pas (alors que l’on apprenait quelques jours plus tard que le groupe se séparait de son dernier bassiste Renaud), ça sent le malaise… Et bien non, bien au contraire ! Déjà à la balance, ça déconnait dur. Mais sur scène, l’entente est simplement parfaite, les musiciens sourient, se donnent à fond dans le set… C’est carré, rondement exécuté… Rien à redire ! Musicalement, Rescue Rangers n’a pas volé sa place à l’affiche de ce soir : leur musique est pleine de reliefs et d’ambiances différentes – à l’image des copains d’Abrahma – et est aussi chargée d’énergie, une sorte de gros coup de pied au cul plein de gros riffs – et en cela ils plairont aussi aux fans de Los Disidentes Del Sucio Motel. Mais les Rescue Rangers ne sont pas un vulgaire ersatz, et ils déroulent leur set efficace avec une fougue qui emporte le maigre public présent pour ce début de soirée. Moi qui n’avait encore jamais eu l’opportunité de voir ce groupe sur scène (et pourtant les bonhommes ont roulé leur bosse depuis le temps…) j’ai déjà envie de les revoir. Les gars en ont sous la pédale, c’est évident. Espérons que ce virage dans leur carrière leur soit en tout point positif… Ca a l’air bien parti pour !

abrahma

Un peu d’air frais, une petite boisson houblonnée, un peu de discut’ avec les groupes de la soirée, et le sol de l’Heretic se met à trembler, signe dans ce club que la musique reprend et qu’il est temps de descendre dans la salle de concert ! Et c’est reparti cette fois pour le set d’Abrahma. Le quatuor parisien démarre sur les chapeaux de roue avec le puissant “Tears Of The Sun”, un morceau puissant et tortueux, signe que les gars sont pas venus pour se la raconter au coin du feu. Bonne surprise (pour ceux qui comme moi n’avaient pas eu l’occasion de voir le groupe live jusqu’ici), avec des moyens finalement assez simples (pédales d’effets guitares normales, et juste un second micro avec effets), le groupe parvient à retranscrire avec la même efficacité la complexité des arrangements de leur album, et ce morceau en est une belle illustration. Niveau énergie, en tout cas, ça envoie du steak. C’est là aussi une agréable surprise : l’album étant si riche, on pouvait craindre de voir des musiciens austères, uniquement focalisés sur leur instrument, leurs effets, etc… Rien de tel ! Tandis que Nicolas est plutôt concentré sur son jeu (faut dire que les parties de gratte du combo le justifient), Guillaume est au taquet avec sa basse. Quant à Seb, aussi à l’aise derrière ses micros qu’à débiter ses parties de gratte, il est juste complètement son set, à fond dedans, et c’est pas pour la déconne ! Un jeu de scène dense, jamais ennuyeux, qui maintient le set en tension sur toute sa longueur. Du travail de pro ! Plus loin dans le concert, l’efficace et accrocheur “Neptune of Sorrow” fait bien headbanguer le public présent, qui a beau ne pas être très nombreux, est content d’être là et participatif. Couillu, le groupe se lance dans un combo “Headless Horse” / “The Maze” aux relents dark presque doom, tempo lent et rythmiques lourdes et ronflantes… Et là, le groupe annonce une surprise : au bout de quelques mesures, on comprend qu’il est en train de se lancer dans un inédit probablement présent sur son prochain album. En première impression, le titre est lourd, sombre, pas aussi lent que le titre précédent toutefois, mais en tous les cas très puissant. Ca donne envie ! En conclusion de set, “Honkin’ Water Roof” est tout à fait approprié, avec en particulier un final qui fonctionne bien, avec ses percées de guitares presque larmoyantes. Super concert et super performance.

lddsm

Re-pause, re-appel des décibels pour ruer dans la salle et ne pas rater les premiers accords de Los Disidentes Del Sucio Motel. Et faut dire que côté riff lourd, les strasbourgeois mettent les petits plats dans les grands en commençant par l’un des titres les plus heavy de leur dernier album, “Kraken”, enchaîné à un autre gros morceau, “ATARI”. Bien vu, ce choix permet de convaincre le public dès les premières minutes. Comme d’habitude, et ça fait toujours le même plaisir à voir, chaque membre du groupe est complètement dans le trip : les gars se donnent comme s’ils faisaient la première partie des Stones à Wembley. Chaque riff est interprété avec ferveur, chaque solo (et ça aussi ça fait plaisir d’en entendre) est joué comme si c’était le dernier de l’humanité, chaque ligne de chant sort des tripes de Sonny, Francky ou même Bobby, et chaque frappe de Billy lui arrache des grimaces que l’on pourrait presque croire de douleur (maso !). Evidemment, l’empathie aidant, le public est juste en phase parfaite. Les titres du dernier album s’enchaînent pour démontrer si besoin était que d’une part l’album passe super bien sur scène (bluffant, même constat que pour Abrahma : tous les arrangements de l’album passent l’épreuve du live haut la main), et d’autre part que sa richesse permet de varier la teneur d’une set list entière… Car oui, le groupe compose ce soir sa set list quasi uniquement à partir de leur “Arcane” – un signe de confiance justifié, on vient d’en faire le constat, mais un petit brin de regret nostalgique de la part des aficionados de leur première galette… Histoire de varier les ambiances (et les plaisirs) le groupe cale quand même en plein milieu de set (faut une sacrée paire de roubignoles) une reprise bluffante du “Teardrop”… le classique de Massive Attack ! Attitude et audace emportent le pompon sur ce titre qui aurait pu, sur le papier, en faire pâlir plus d’un… Un peu plus loin, “Lucky Man” prouve son potentiel de hit puissant et mélodique, enchaîné au désormais classique “Z”, plus lourd, qui voit encore une fois les têtes du public hocher en rythme. Comme un clin d’œil, le groupe finit par un petit passage par son premier album, avec notamment une conclusion arrachée de justesse à l’horloge de l’Heretic, avec un “From 66 to 51” qui rappelle que dès ses premières heures, le groupe avait le sens du riff qui percute et des refrains hurlés en chœur. Le quintette tire sa révérence après une grosse heure de gros rock superbement interprété, et nous laisse sur un sentiment mêlé de satisfaction et d’interrogation : pourquoi ce groupe ne tourne-t-il pas plus ? Il a tout pour rassembler un public à la fois large et exigeant… Il serait temps de mettre un coup d’accélérateur (et aux tourneurs de les solliciter un peu plus).

Au final, une fichtrement bonne soirée, dont je regretterai, le cœur un peu gros, qu’elle ne fut pas plus longue (on en reprendrait jusqu’au bout de la nuit… même s’il est une plombe du mat quand on quitte l’Heretic) mais surtout qu’elle ne fut pas partagée par un public plus fourni. Les absents n’ont pas eu tort, ce soir… ils ont juste à coup sûr passé une bonne grosse soirée de merde en comparaison de ce qu’ils ont raté. En tout cas on félicite et remercie les Make It Sabbathy d’avoir organisé ce plateau qui a fini de nous confirmer la qualité des groupes français.

Clutch, 27 avril 2014, Trix, Anvers, Belgique

On ne le dira jamais assez dans ces colonnes : rien ne vaut la Belgique pour assister à un concert (quel qu’il soit d’ailleurs).
C’est donc sans hésitation aucune que j’ai décidé d’échanger une poignée d’euros contre un ticket pour le concert de Clutch au Trix, petit club convivial d’Anvers, en ce dimanche 27 avril.
Malheureusement, mon entrée dans cette salle est immédiatement synonyme de cruelle déception : Lionize ne joue pas ce soir. Le combo reggae-rock, produit par Jean-Paul Gaster, et qui est pourtant omniprésent sur la tournée européenne de Clutch, n’assure pas la première partie en ce dimanche. Pas de ‘Dr Linvingston’ donc ce soir pour mes oreilles, et plutôt que d’écouter l’obscur groupe qui ouvre ce soir (et dont j’ai d’ailleurs oublié le nom), je préfère me diriger vers la terrasse du Trix, une bière à la main, et retrouver quelques connaissances.
Après ces retrouvailles arrosées (avec modération), il est grand temps, tel un Moïse des temps modernes, de fendre la foule pour se frayer un passage jusque devant la scène, et d’attendre les messies du rock’n’roll. Et comme d’habitude, l’attente vaut largement le coup. Les premiers accords de ‘Earth Rocker’ résonnent à peine que le public est entièrement acquis à la cause Clutch.
Comme d’habitude, Neil est habité et nous offre une prestation « physique » et vocale incroyable. Comme d’habitude, Gaster martèle ses fûts comme Cetautomatix ses pièces forgées (et les romains).
Clutch-band-2013
Comme d’habitude, Sult est dans son coin, casquette vissée sur sa tête baissée, entièrement concentré sur son manche de gratte. Et comme d’habitude, Dan Maines est un peu en retrait sur scène, stoïque et battant la mesure avec son pied tout en groovant avec sa 4 cordes. Comme d’habitude donc, Clutch est en grande forme.
Le combo du maryland est sur le vieux continent pour défendre son dernier album en date, ce qui aura un impact sur le set de ce soir. Le gig, on l’a dit, débute par ‘Earth Rocker’, suivi de ‘Unto The Breach’, ‘Crucial Velocity’ et ‘Book, Saddle, & Go’. Après nous avoir offert un tiers de son dernier opus, nos 4 lascars s’en vont explorer des contrées plus lointaines et visiter leur répertoire de « Elephant Riders » et « Blast Tyrant ». Que du très bon donc avec, dans le désordre, ‘The Soapmakers’, un subtil ‘Subtle Hustle’ sur lequel il fait bon se trémousser, ou un ‘Profits of Doom’ de haute volée. Le concert, déjà bien jouissif, gagnera encore en intensité avec l’excellentissime ‘The Regulator’, son intro toute en finesse et cette montée en puissance capable de défriser le plus velu des hipsters. Après cette méchante première claque, la seconde arrive deux morceaux plus tard, et plus violente encore, avec un retour 19 ans en arrière pour un ‘Spacegrass’ de toute beauté (et sur lequel la voix de Neil laisse éclater toute sa puissance).
Après cette virée en Delorean, il est temps de repartir tranquillement vers le futur. Le groupe lâche alors la bride pour le furieux ‘Burning Beard’ et le fédérateur ‘50000 Unstoppable Watts’. La cocotte minute du Trix est prête à exploser, et le moment donc donc venu pour relâcher la pression avec l’acoustique et western ‘Gone Cold’ qui marquera le retour au dernier opus pour clotûrer le show (‘The Face’, ‘Oh, Isabella’ et ‘The Wolf Man Kindly Requests…’). Vient enfin le temps du rappel, avec un 9ème titre de « Earth Rocker », et le classique enchaînement ‘Electric Worry / One Eyed Dollar’.
Certaines mauvaises langues se plaindront certainement de ne pas avoir eu assez de « vieux » morceaux pour satisfaire leurs oreilles. Il n’en reste pas moins que qu’avec son répertoire énormissime, Clutch prouve une fois de plus qu’il est un maître incontestable et inconstesté du live.
Stonerpope

DESERTFEST Berlin – Jour 3 (Clutch, Ed Mundell’s TUEMG, Sasquatch, Radio Moscow,…), 26 avril 2014, Allemagne

Jour 3 sur 3 : En arrivant en ce début d’après-midi sur le site (sous ce soleil encore éclatant, quel plaisir), avec encore une liste longue comme le bras de groupes à voir sur scène (et accessoirement d’interviews à faire au milieu…), on ne sent pas vraiment le sprint final arriver… On est juste à fond !

DOCTOR DOOM

doctordoom


Pourtant, la journée commence plutôt penaudement avec les français de DOCTOR DOOM. Bien contents de retrouver les ariégeois sur la scène du Desertfest (alors qu’ils n’ont qu’une autoprod de trois titres sous le bras à défendre pour le moment, en attendant leur album), on est un peu moins contents de les voir lancer les hostilités un peu après 14 heures devant un public trop clairsemé à notre goût. Cet horaire, assez tôt, et – répétons-le – un soleil écrasant (plus propice à déjeuner en terrasse ou commencer sa digestion par une petite sieste sous les arbres du Beergarten) en sont probablement les principales raisons. Le groupe n’en prend pas ombrage (sic) et entame joyeusement son set par deux morceaux de leur EP autoproduit susmentionné. Les titres sont bien représentatifs du genre musical du quatuor : un rock/hard-rock assez old school et vintage, aux rythmiques plutôt “enjouées”. On aurait peut-être aimé une entame de journée un peu plus franche du collier, avec un peu plus de saturation sur les guitares, un chant un peu plus rauque ou incisif… mais on ne peut pas dénaturer le groupe, qui joue son set sérieusement. Les passages de guitares harmonisées, le chant de Jean-Laurent, bien carré, la rythmique robuste… tout montre que le groupe sait ce qu’il fait, et le fait bien, aucun soucis d’exécution à déplorer. Et les extraits de son premier album à paraître sous peu nous montrent qu’a priori, le niveau sera maintenu sur la suite. En revanche, il manque un petit quelque chose pour mobiliser le public de l’Astra en ce début d’après-midi… Dommage !

POWDER FOR PIGEONS

powderforpigeons


Aux suivants comme disait Jacques et c’est le duo de Perth qui s’installe sur la même scène que la bande de l’Ariège. Vite en place – remarquez il n’y avait que deux instruments à régler pour le couple des antipodes – Madame derrière la batterie (de cuisine) et Monsieur au manche de la Fender vintage. Les Australiens envoyèrent le son dans une salle à peine plus fréquentée que pendant le set des Français. Pourtant, on avait dit le plus grand bien du duo actif dans un registre plus dans la veine alternative US des années 90 que dans le stoner pur sucre. Tant pis, nous ne sommes pas là pour voir défiler une colonie de clones sur les deux scènes de ce généreux festival. Alors donc, la donzelle bat la mesure et le mâle se tortille sur sa gratte en assurant les lignes des voix pour un set bien ficelé aux sonorités assez proches des Breeders au final et carrément pas dégueu qui fleure bon certaines prestations que Sonic Youth a pu délivrer dans le passé. Il faut dire qu’avec la tonne de gras que nous avions avalée la veille ça faisait du bien de se taper des trucs un poil plus rapide et soft même si la paire ne fait pas précisément dans la dentelle non plus. Les textes de leurs deux productions sont scandés et nous ne pouvons pas qualifier la personne qui débite dans le micro de véritable chanteur ; l’absence de basse et son engagement à la guitare devant déjà bien mobiliser son énergie. La batterie demeurera quasi tout le set dans un registre speedé qui aurait presque été super redondant si “More To Lose” – et ses faux airs de “Born To Hula” – n’était venu joué les empêcheurs de tourner en rond. Nonobstant des échanges avec le public très limités, Powder For Pigeons a rallié à sa cause une poignée de nouveaux fans européens au terme de ses quarante minutes de show et le temps était venu pour nous d’aller refaire le concert dehors avec nos amis festivaliers le temps qu’une autre formation se prépare à nous transporter sous d’autres latitudes.

CASTLE

castle


Le trio US faisait figure d’orphelin ce jour-là à Berlin tant son style aurait collé avec la programmation de bourrins qui était celle du vendredi. Bref, même si la prestation du groupe serait achevée avant l’heure officielle de l’apéro, ils allaient faire monter la température du Foyer avec leur doom stoner plutôt heavy, mais rendu aérien par les vocaux de leur frontwoman Elizabeth qui s’avérera au final une bassiste au groove très efficace. Partageant son micro avec son acolyte Mat qui est en charge du déluge de riffs overdrivés à la guitare, elle mit un gros boulet qui tira le public de l’ambiance gueule de bois qui avait un peu prédominé parmi les troupes présentes dans la salle depuis le début de la journée (le reste du public étant demeuré dehors pour siffler des bibines). Il faut dire que le temps radieux mobilisa ce samedi une bonne partie du public dans le Beergarten : on a connu bien pire comme lieu propice aux échanges en festival. Bref, Mat reprend le micro pour chanter, toujours très concentré sur son jeu lorgnant par moments vers le sludge, et le dernier membre du groupe, Al, à la batterie, envoie du gros bois avec une précision métronomique. Nous sommes rapidement conquis par la bande de San Francisco qui n’en est pas à sa première pépite dans le registre doom stoner. Comme le son que déploie la formation ne tape pas dans le côté le plus inabordable du doom, le public présent se met à hocher du chef en réponse aux incantations maléfiques de Castle. C’est d’ailleurs au beau milieu de ce set que le desert-rocker ayant passé la soirée précédente sans se protéger les oreilles se remit à entendre correctement des deux cages à miel. Déjà auteurs de quelques productions en ligne avec ce qui a été interprété à Berlin, la bande des trois fait preuve d’une maîtrise impeccable de son répertoire en truffant ses titres de soli de guitare bien sentis ainsi que de plans hérités de Black Sabbath (ce qui n’était pas sans nous ramener un an plus tôt avec un autre groupe de San Francisco : Orchid). Un setlist très basique balancé sans fioritures, mais avec une redoutable efficacité, toujours en headbanguant, et l’affaire était entendue : la grand prêtresse aux airs de la Cassandra de Wayne avec sa basse blanche et son gilet en jeans pouvait mettre un terme à son culte sataniste avec la satisfaction du devoir accompli. Un peu d’air printanier allait pouvoir emplir l’espace du Foyer alors que nous allions rejoindre Jesus sur la grande salle pour le premier verset à s’y dérouler en cette ultime journée de frénésie stoner.

STONED JESUS

4-STONED-JESUS-8010


Les gars de Radar Men From The Moon devaient jouer sur la main stage à cet horaire, mais manifestement ils avaient pris un peu de retard sur la route. On a donc demandé à Stoned Jesus de les remplacer. Même si ces derniers perdent théoriquement cinq petites minutes de set et une place un peu plus haut sur l’affiche, ils raflent au passage l’opportunité de jouer sur la Main stage plutôt que sur la petite scène Foyer… Tout bien considéré, c’est donc plutôt pas mal pour eux. Quelques étourdis n’ayant pas vu l’info ont malheureusement zappé tout ou partie du set de ce groupe… Fallait pas comater sous le soleil dans le Beergarten les gars ! La situation géopolitique en Ukraine est pour le moins tendue, et on pouvait imaginer ses rejetons musicaux se révéler fermés, énervés et aigris. Le choc en voyant se pointer Stoned Jesus sur la scène, tout penauds, n’en est que plus frappant. Les bonhommes sont cools, leur musique est cool, et manifestement ils ne sont pas là pour se prendre la tête (ce en quoi on peut bien les comprendre aussi). Musicalement, Stoned Jesus est emblématique de ces groupes récents, nés dans un maelstrom d’influences assumées, mais qui pour autant ne peut pas être cantonné dans un genre particulier : fondamentalement, ils jouent une sorte de stoner classique à tendance psyché, mais ils prennent des penchants doom dès qu’on a le dos tourné dix secondes, ou s’engagent dans un solo influencé par les maîtres du blues juste après. Et tout ça au service de compos qui fonctionnent plutôt bien, sur un set de trois quarts d’heure qui passe très vite. A l’image de leur musique pleine de reliefs, la prestation scénique des bonhommes ne déçoit pas : Sergii à la basse est à fond dans son trip, il est tour à tour concentré puis monté sur ressort, et le nouveau batteur Viktor, super concentré, vit chacune de ses frappes, qu’il illustre d’un rictus à chaque fois différent. Quant à Igor, chanteur-guitariste-leader-géniteur de ce beau bébé, il assure tout simplement, communique régulièrement avec le public avec son accent sympathique, et plus généralement, colle occasionnellement ses vocaux efficaces sur ses plans de gratte, quand il ne s’engage pas dans des envolées de soli bien sentis. On passera sur son sens de l’esthétique vestimentaire (soit son jean est bien trop slim, soit le bonhomme est très heureux de nous voir…) pour garder en mémoire son talent évident et son oreille bien particulière : alors que le trio quitte la scène, on a le sentiment que ce groupe nous réserve des surprises discographiques pour l’avenir, et encore des prestations scéniques remarquables. Ils en ont encore sous la pédale, clairement…

SARDONIS

5-SARDONIS-8169


Décidément, il y aura eu pas mal de duos sur cette édition du Desertfest ! Sardonis se compose donc assez traditionnellement (si l’on peut dire, s’agissant d’un duo…) d’un guitariste et d’un batteur, et quand ils décochent les premiers accords de “Burial of Men”, c’est-à-dire la même intro que leur dernier album en date, le sobrement nommé “II”, on comprend vite que ces gars-là ne vont pas faire dans le jovial. Gros titre doom assez classique, avec le même riff de quatre notes qui tourne sur un gros tiers du morceau joué à deux kilomètres à l’heure, il part ensuite sur des passages de pur metal, voire des embardées thrash metal (blast beat en option de temps en temps). Et il en va ainsi sur toute la durée de leur set solide : ça bastonne tout du long, c’est gras, c’est lourd… Et c’est lorsque les passages doom se font les plus suffocants que ces assauts rageurs de metal bien saignant se révèlent bienvenus pour reprendre une bouffée d’air frais, à l’image de “The Drowning”, autre extrait de leur second album, alternant tempi super lourds et riffs nerveux. Scéniquement, en revanche, c’est pas la joie : même si Jelle se démène derrière son kit, Roel, le guitariste au look d’assureur en goguette, reste vissé sur ses deux pattes arrières, exprimant par une mimique renfrognée chaque tension de rage contenue dans ses riffs énormes. Faut dire que ses attaques de cordes ont un certain poids, et insidieusement s’emploient méthodiquement à laminer le cerveau des quelques centaines de spectateurs présents, qui n’auront mis que deux ou trois morceaux à rentrer pleinement dans le trip. Deux ou trois titres difficiles à identifier ont été joués, probablement extraits du prochain album (faut dire que la scène étant dénuée de micro, la communication avec le public est inexistante…), et sont clairement dans la même veine. On peut donc s’attendre à un nouveau charcutage en règles. Reste au groupe à essayer de dynamiser un peu son impact “scénographique”, comme disent les pros, et la claque sera juste totale.

SASQUATCH

6-SASQUATCH-8234


Un autre fleuron de l’écurie Small Stone monte sur la Main Stage sous nos yeux, à savoir les Californiens de Sasquatch. Le trio, avec ses treize années d’existence, fait partie des vétérans de cette édition, et la robustesse de leur carrière repose aussi sur leur indéfectible fidélité à Small Stone, qui a sorti tous leurs albums depuis leur premier, subtilement appelé “I”, il y a plus de dix ans maintenant. Et faut dire que les premiers albums ont abondamment tourné sur les platines des plus vieux stoner heads d’entre nous. C’est donc avec un large sourire que l’on voit monter les trois angelenos sur scène et dérouler pendant trois quarts d’heure ce qui s’apparente fortement à un best of de leur carrière : ils piochent ainsi dans toutes leurs galettes certains de leurs meilleurs titres, pour le bonheur de tous (autant de titres de leur premier album que de leur dernier en date par exemple). Clairement, les bonhommes jouent la carte plaisir plutôt que la carte promo. Trucker hat vissée sur la tête, Keith Gibbs mène la barque avec une assurance et un engagement  qui forcent le respect : ses parties en rythmiques sont juste impeccables, portées par des riffs monolithiques toujours aussi efficaces, et ses interventions solo sont toujours bien senties. Evidemment, on reconnaîtrait ses lignes de chant entre mille, et c’est aussi ce qui aide à distinguer Sasquatch de la “masse”. Derrière, ça joue aussi, même si l’on est surpris de retrouver, aux côtés de Jason à la basse, un batteur redoutablement efficace mais… qui ne ressemble pas vraiment à Rick Ferrante ! Et pour cause : le batteur originel, qui doublait ce soir ses interventions (il est aussi batteur pour le TUEMG de Ed Mundell), étant souffrant, les deux combos ont décidé de recruter un autre batteur ayant le don d’ubiquité, le peu connu mais très doué Dan Joeright : si ce dernier assure méchamment ce set, c’est avec le père Mundell qu’il nous bluffera encore plus un peu plus tard. Mais pour l’heure on continue de déguster le stoner heavy et groovy de Sasquatch jusqu’à la lie. On espère que le groupe se saisira d’autres opportunités à l’image de cette tournée “à deux têtes” pour revenir malmener le public européen avec tant de maestria.

RADAR MEN FROM THE MOON

7-RADAR-MEN-FROM-THE-MOON-8546


Après un set aussi carré et robuste, on risque le grand écart de la cervelle, puisqu’on s’oriente vers un trip de space rock psychédélique pur jus. Rien de tel pour préparer une méningite aiguë… Et pourtant, les Desertfest-ivaliers doivent avoir la tête dure et les cages à miel en béton armé, car le public se masse bien nombreux devant la Foyer pour le trio (ici quatuor…) hollandais de Radar Men From The Moon. Finalement, ce changement de créneau horaire les amenant sur la petite scène n’est pas trop préjudiciable, cette salle étant parfaitement propice à une immersion musicale intense – et manifestement le public, composé d’une large part de connaisseurs du groupe, n’attend que ça. Faut dire que la réputation du combo dans ce genre n’est plus à faire, et en tout cas sur les trois jours, peu de groupes ont produit un set aussi immersif et planant – or sur ce thème, la concurrence était quand même là et bien là ! Accompagnés d’un grand échalas dédié à balancer les samples science-fictionnels et autres sons et triturages venus de l’espace, les néerlandais volants envoient les riffs les plus planants qui viennent rebondir sur tous les murs de la salle, pour venir au final se noyer dans les méandres cotonneux des lignes de basse colossales délivrées par l’imperturbable Verkuijlen. C’est d’ailleurs sur cette observation que le bât blessera un petit peu : voir les gars jouer leurs quarante-cinq minutes avec un visage quasi-impassible, en se regardant les uns les autres au mieux, ou focalisés sur leurs godasses au pire, tout ça alors que l’on sort d’un set comme celui de Sasquatch où les gars se donnent à fond vers leur public… le contraste est percutant. D’un autre côté, je vois mal les bonhommes sauter dans tous les sens du haut de leurs amplis alors qu’ils nous amènent sournoisement vers un état d’hypnose au bout des quinze premières minutes du set… C’est donc vraiment juste une perception d’écart entre chaque concert, un contraste d’ambiance dans lequel on se retrouve presque “volontairement pris au piège” (et accessoirement, c’est aussi ce qui rend le Desertfest si attrayant et excitant). Le set des RMFTM déroule donc sans accro, sur une perspective spatiale qui s’affirme petit à petit, et ce n’est que quand les trois quart du public ondulent en mode pilotage automatique, les yeux fermés, en volant à vingt centimètres au dessus du sol, que les bonhommes posent les instruments et nous laissent nous réveiller, encore un peu la tête dans le cul après ce trip aérien.

THE ULTRA ELECTRIC MEGA GALACTIC

8-ULTRA-ELECTRIC-MEGA-GALACTIC---ED-MUNDELL-8706
Nous allions rapidement nous faire rattraper par un autre trip aérien qui nous enverra à quelques mètres du sol avec la formation d’Ed Mundell qui s’avérera de fait être plus un réel groupe qu’une star de la guitare flanquée d’une section rythmique dans l’ombre. Comme vous avez pu le lire plus haut, c’est Dan Joeright qui officiera ce soir à la batterie et même s’il remplaçait le titulaire du poste nous avions plutôt une pointure devant nous. A la basse, et détenteur du seul micro, c’est l’incroyable Collyn McCoy qui va nous ravir d’une présence scénique hors pair ainsi que d’un jeu de toute beauté aux doigts principalement (les types qui détestent les bassistes à médiators seront aux anges d’apprendre ceci). Dès le début du set tous les regards convergent vers le rouquin qui a quitté Monster Magnet après “Mastermind” ; ils ne tarderont pas à le lâcher pour se consacrer aussi aux deux autres membres de ce trio de ténors qui assurent décidément sur scène autant que sur les rares traces laissées jusqu’à présent dans le sillon. Au passage, le merch déplorera très rapidement une rupture de stock de “Through The Dark Matter” leur dernière galette arrivée à Berlin toute fraîchement sortie de presse donc pas encore totalement sèche. Ce genre d’indice nous indiquera que nous n’avons pas été les seuls à être carrément transportés par ce véritable orgasme musical qui nous aura captivé durant près de cinquante minutes. Un pur régal du plus pur style jam et au sein duquel nous aurions droit à un authentique jam d’anthologie. Le public transcendé adhérant à ce show somptueux ne s’y trompait pas. D’ailleurs Jean-Paul Gaster – à nos côtés dans le public – partageait ce ressenti. Visuellement, nous étions interpellés par les énormes gouttes de sueur que l’ex-Atomic Bitchwax laissait glisser le long de ses doigts magiques. Il faut dire que les spots verts ou rouges fixés sur lui durant ses longs soli mettaient particulièrement en avant ce qui était bien plus qu’un détail. Il faut dire que – comme vous le lirez dans l’interview que nous avons eu la joie de faire avec ces très sympathiques rockers – ces Californiens ne sont pas les plus grands adeptes du soleil et de la chaleur de leur lieu de résidence. Mais passons au-delà de ces quelques considérations d’ordre esthétique pour consacrer quelques lignes au rock psychédélique instrumental qui était balancé dans les enceintes de la Main Stage. Les trois pointures n’avaient inscrit “que” sept titres sur leur setlist et du premier accord au final épique sur “Stratus”, une reprise du jazzman Billy Cobham, nous avons été transcendés par leur son à la limite de la jouissance. C’était précis, c’était technique et c’était – et est toujours – magnifique aussi en terme de compos. “The Third Eye”, tirée de l’album éponyme, constituant certainement la meilleure plage de cette extraordinaire performance intégralement musicale durant laquelle seul Collyn – et son t-shirt des Bruins – s’exprimera au micro laissant Ed concentrer son talent sur sa Stratocaster. Les longues jams planantes ayant aussi laissé quelque espace à des titres plus carrés comme “Exploration Team”, “7000 Years Through Time” ou “Rockets Aren’t Cheap Enough’ qui firent figure de véritables leçons de rock’n’roll dispensée par des mecs humbles qui n’avaient en rien l’air de professeurs ès Musique. Avec Clutch plus tard dans la soirée, nous aurons deux sets de toute grande classe interprétés par des cadors de la zikmu ceux-ci contrasteraient avec les performances plus instinctives voire spontanées que livrèrent des groupes plus orientés du côté obscur. Et c’est là que nous devons tirer un grand chapeau aux organisateurs et programmateurs qui ont fait se côtoyer des formations proches, mais pas similaires, durant trois jours sans jamais nous lasser la moindre seconde. Qu’ils en soient ici chaleureusement remerciés : vous faite un boulot remarquable !

THE GRAVIATORS

9-THE-GRAVIATORS-8967


Après avoir littéralement été envoutés par Ed et sa bande, nous redescendons dans l’underground Foyer pour une prestation fort attendue. Il faut dire que The Graviators bénéficient d’une sacrée visibilité en ayant intégré l’écurie Napalm depuis la plaque précédente déjà. Il faut ajouter aussi que les visuels de toute beauté qui ornent leurs pochettes aident sans doute ce groupe à atteindre son public avec ses productions déclinées en moult exemplaires tous plus beaux les uns que les autres. Bref, dans le petit monde du stoner, les Suédois peuvent se targuer d’avoir réussi rapidement à toucher un grand nombre de rockers au-delà même de la scène des intégristes du mouvement. Ils déploient un hard rock daté, mais ô combien efficace que ce soit lors de leurs prestations scéniques ou en heavy rotation dans le salon voire dans la voiture. Ces forts sympathiques velus ont aligné une centaine de shows depuis leur naissance il y a quatre ans et ils font preuve d’une sacrée envie de continuer à répandre leurs riffs aux quatre coins du globe (vous en saurez un peu plus en lisant l’interview réalisée par nos soins dans la capitale allemande). Bien qu’au terme d’une tournée intense et arrivés en fin d’après-midi sur les lieux, nos potes grimpent sur scène en super forme et prêts à en découdre durant trois-quarts d’heure avec un public encore perdu dans les volutes du show précédent. Ils envoient donc le gros son d’entrée de jeu pour mieux souligner leur présence et la mayo prend très rapidement. Il faut dire que devant des spectateurs ayant fait le déplacement pour se taper du rock daté, leur style est particulièrement bien adapté. Les plans plus instrumentaux s’aventurant sur les rives du fleuve doom ravirent même une partie du public se trémoussant rapidement de manière lancinante alors que Johan, le bassiste de la bande, envoyait du gras sur Ricken à torse nu. Le lascar n’avait pas complètement tort car la température avait pris un sacré coup d’accélérateur depuis que les chevelus et leurs chaînes de portefeuille se balançaient sur scène dans un registre rappelant le Sabbath des débuts. Avec “Motherload” fraîchement sorti (moins d’un mois avant la manifestation teutonne) le groupe a balancé du son de l’intégralité de ses propres productions pour le plus grand plaisir de l’auditoire présent. Il est à noter que les puristes ont été ravis de voir qu’Henrik, l’homme assis derrière ses fûts, nous envoyait son martellement sur du matos utilisé jadis par le batteur d’un groupe qui aura marqué son temps : The Awesome Machine. Grosse sensation donc avec nos amis venus du froid même si Niklas, au chant, peine parfois à savoir où se placer sur la petite scène du Foyer lorsque le groupe se lance dans d’épiques plans instrumentaux leadé par leur guitariste Martin dont le solo sur “Leifs Last Breath / Dance Of The Valkyrie” restera un des meilleurs moments de cette prestation qui a envoyé du beau bois. Le public ayant bien adhéré à leur style avait l’air un peu groggy lorsque la lumière des plafonniers de l’Astra lui a rappelé qu’il était désormais l’heure de retourner du côté de la grande scène pour se brancher sur une autre longueur d’onde.

RADIO MOSCOW

10-RADIO-MOSCOW-9215


Après la prestation un peu brute (dans tous les sens du terme, en fait) des Suédois, on se translate pour la énième fois de ce week end de quelques dizaines de mètres pour se poster devant la Main Stage, avec l’assurance que le concert qui arrive sera classieux, tout simplement. Et ça ne manque pas. Parker Griggs monte sur scène avec ses deux mercenaires – une belle paire de zicos néanmoins, dont on espère une plus grande longévité dans la formation ricaine que leurs prédécesseurs dans la fonction ! Pourtant, le père Griggs a franchement plus une tête de nounours gentil que de frontman tyrannique de son power trio… Faut dire que Radio Moscow c’est lui, et basta ! Par contre, musicalement (“instrumentalement” ?), faut pouvoir le suivre, et on peut confirmer que ses récentes recrues (à peine un an) ont du répondant. Stratégiquement, commencer son set avec un morceau inconnu (probablement extrait de sa nouvelle galette, pas encore sortie au moment du concert) relève en tout cas au mieux du faux-pas, au pire d’une faute de jugement… mais c’est fait avec panache, donc on excuse tout, et ce démarrage un peu boiteux est vite compensé par le dynamisme du titre (un morceau de blues-rock bien heavy, achevé par un solo de gratte qui mettra tout le monde d’accord). Pour la suite, la setlist s’avèrera redoutable d’efficacité et de variété, même si elle se repose très largement sur un album en particulier : de manière assez surprenante l’assez ancien “Brain Cycles” (2009) est mis à l’honneur sur la moitié de la setlist environ ! Faut dire que l’album le vaut bien, mais quand même… Il y en a eu trois autres depuis ! Mais ne gâchons pas notre plaisir d’être là et de regarder les bonhommes devant nous se la donner. Peu de sourires sur les visages des deux gringos en mission “rythmique” sur le côté gauche de la scène : ces gars là ne sont pas ici pour la déconne – ça bastonne, ça groove, ça jamme, mais ça plaisante pas… Un peu plus débridé, Griggs se lâche sur des soli juste remarquables et amène vers des impros en mode dérapage contrôlé. Ses parties de chant ne sont pas forcément son atout principal, mais sa voix subtilement rauque et chaleureuse fonctionne parfaitement. On ressort de cette heure de concert bien remonté, remplis d’ondes super positives, et parés à attaquer le sprint final de ce Desertfest avec le sourire. Super musique, mais aussi super vibes.

THE MACHINE

11-THE-MACHINE-9416


Après les vibes moscovites, c’est d’autres vibes qui allaient emporter le public. Celles-ci viennent des proches Pays-Bas et sont elles aussi le fait d’un trio. Nous sommes quelque peu déstabilisés lorsque nous nous pointons devant la scène et apercevons le bassiste de la bande arborer un survêt, des chaussettes de “cascadeur”, un couvre-chef de spéléologue et sa Rickenbacker rouge. La touche spéléologue est de fait une caméra à la mode de nos jours avec laquelle il jouera – et donc enregistrera en vue subjective – la totalité du premier titre “D.O.G.” issu de leur dernier opus qui engageait un véritable festin psychédélique. The Machine a carrément hypnotisé le public comprimé dans la petite salle faisant face au Foyer. Cette parfaite communion entre le groupe et ses spectateurs nous a immédiatement ramené un an plus tôt lorsque My Sleeping Karma avait aussi transformé cette salle en chapelle hallucinée, baignée par des ambiances bleutées et au cœur de laquelle les musiciens et leurs fans ne faisaient plus qu’un en livrant leur culte au Dieu stoner. Ce show restera comme l’un des plus intenses de ce festoche dans le registre de la dévotion du peuple stoner avançant sur place les yeux grands fermés pour capter mieux encore les sons envoyés par la sono. Nous devons ici confesser qu’une fois la centaine de prises de vues effectuées, nous avons déserté l’Eglise pour nous rendre de l’autre côté du rideau magique afin d’assister à la balance de la tête d’affiche. Nous étions donc deux, plus le type qui pousse les boutons sur la console, à nous gaver de Clutch : Clutch en privé et oui pardon The Machine nous nous sommes égarés quelques instants, mais maintenons que c’était pour la bonne cause, soit notre bonheur. Cette interlude effectuée nous rejoignîmes l’antre bouillonnante pour nous frayer un passage jusqu’aux enceintes et nous laisser happer par la machine. Ca a été presque divin : soyons clair ! Avec un setlist réduit, vu la longueur des titres interprétés, The Machine assuma pleinement son rôle de dernier groupe avant le headliner ! Et ils éclipsèrent presque l’attente du public en le ralliant à sa cause. Bel effort réalisé quasi uniquement avec des titres issus du split avec Sungrazer sorti l’an passé et de “Calmer Than You are” leur dernier long format en date sorti un an avant le split qui était le “chant du cygne” de la formation qui le partagea avec eux. Le final “Sphere (… or Kneiter)” a été grandiose et nombreux furent ceux qui avaient oublié à ce moment là qu’une formation du Maryland allait encore prendre la scène d’assaut pour le dernier acte musical d’un festival absolument génial dont The Machine restera un des grands moments. Le gros son psychédélique a encore visiblement de beaux jours devant lui.

CLUTCH

12-CLUTCH-9519


Tête d’affiche incontestable de cette édition du Desertfest, Clutch aura laissé une trace sur cet événement… et ce avant même le concert ! Professionnels jusqu’au bout des ongles, les zicos sont arrivés sur le site en tout début d’après-midi (quasiment douze heures avant leur horaire de début – tandis que certains groupes sont encore sur l’autoroute à siroter des bières dans le van une heure avant leur set…), et ont assuré la promo de manière impeccable (interview à venir sur Desert-Rock !), et trituré leurs instruments tout l’après-midi ! Fallait voir JP Gaster jouer sur son mini-kit de batterie installé derrière le bus pendant des heures et des heures, seul avec ses écouteurs, ou Dan Maines jouer sur sa basse dans un fauteuil tout l’après-midi… Clairement, on n’arrive pas à ce niveau de reconnaissance par accident, c’est le message que l’on retiendra dans un premier temps.
Mais arrive minuit, et là c’est la musique qui va parler. Clutch clôture complètement cette édition (après eux, plus personne ne joue… tel Attila et ses Huns, plus rien ne repousse après leur passage !), et Fallon – vêtu d’un t-shirt Fu Manchu du meilleur effet – commence par féliciter dès son arrivée le public qui “est arrivé jusqu’au bout” de l’événement. C’est sur l’efficace “Earth Rocker” que le groupe entame son set, et il n’en faut pas beaucoup plus pour se mettre le public dans la poche. Avec “The Mob Goes Wild” d’affilée, c’est l’efficacité qui prime : en vieux routiers expérimentés du live, le quatuor enchaîne une claque suivie d’un uppercut… pour mieux cueillir les derniers récalcitrants avec un bon vieux coup de coude derrière la nuque bien vicelard, avec le groovy “Cypress Grove” – censé montrer aux sceptiques éventuels que Clutch excelle dans de nombreux domaines. Démonstration est faite, on peut maintenant se lâcher, et revenir à “Earth Rocker” pour quelques titres. A partir de là, on atteint l’effet cliquet : le public est convaincu, reste à le maintenir en tension pour le reste du set ; une formalité. Mais le groupe n’est pas venu pour cachetonner facile, ils ressortent donc des placards un bon vieux “Spacegrass” (un titre qui doit bien avoir vingt ans maintenant !) et dissémine d’autres perles dans cette setlist qui reste fortement connotée “Earth Rocker”. On aura entre autres droit au groovy “Subtle Hustle”, qui fait danser quasiment tout le public, tout comme l’irrésistible “Gravel Road” et son boogie rock impeccable, mais aussi à “Burning Beard”, qu’il est très agréable de revoir apparaître dans la setlist, tant il se mêle bien aux derniers titres du groupe. Pas de surprise concernant le jeu de scène : Fallon (at)tire à lui tous les regards en arpentant la scène de long en large, en haranguant le public, et plus globalement par son charisme naturel incontestable. A ses côtés Dan Maines reste le plus souvent en fond de scène concentré sur ses lignes de basse, à l’image de Tim Sult, qui occasionnellement s’avance en front de scène… pour actionner l’une de ses pédales d’effet ! Jean-Paul Gaster, lui, vit complètement son set : ses mimiques et ses sourires tandis qu’il aligne des plans irréels sont toujours un spectacle hypnotisant. Il trouve bien sa place sur ce concert, avec des impros bien senties ici ou là, un petit solo des familles, etc…
Sur la fin du set, Clutch finit de célébrer la dernière production du quatuor yankee, avant de voir le groupe quitter la scène après presque une heure trente qui a parue ne durer que quinze minutes. A leur habitude, le groupe revient pour un rappel constitué de titres définis au dernier moment, en l’occurrence “Unto The Breach” et – on aurait eu du mal à s’en passer – un “Electric Worry” purement dévastateur. Le groupe salue enfin généreusement le public avant de s’éclipser, et de mettre ainsi le point d’arrêt scénique de cette nouvelle somptueuse édition.
Z--AMBIANCE-9694
Nous reste, dans l’euphorie générale (Clutch a vraiment mis tout le monde dans un super état d’esprit), à arpenter une dernière fois notre terrain de jeu de ces derniers jours, en saluant les exposants, les copains, les GO (Gentils Organisateurs – dénomination parfaitement adaptée ici !), tout en espérant revoir tout ce beau monde pour une édition 2015 dont la date est déjà validée !
Chris & Laurent

DESERTFEST Berlin – Jour 2 (Kvelertak, Church Of Misery, Elder, Gozu,…), 25 avril 2014, Allemagne

Après avoir parfait un peu notre culturisme dans certains lieux touristiques de la capitale allemande et avoir grillé quelque argent dans les échoppes des agitateurs underground du Kreuzberg, vos deux reporters de chocs ont repris leur bordel pour une deuxième journée d’orgie à la gloire du Dieu stoner. A peine le temps de passer en coulisse prendre la température – qui était en parfaite osmose avec le temps radieux qu’il faisait au dehors – et de saluer le fort sympathique crew du fest qu’il était déjà l’heure de rejoindre le Foyer sur la scène duquel les festivités s’apprêtaient à débuter.

RED STONER SUN

1-RED-STONER-SUN-6286


Le trio de vétérans nous avait interpellé avec son patronyme que nous trouvions bien peu inspiré pour tout dire. Un bref regard dans le rétroviseur pour constater que c’est il y a seize piges que le blaze du groupe a été choisi et une petite tape derrière la nuque dès les premiers accords nous remirent rapidement les idées en place et gomma – telle une baquette magique – toutes nos appréhensions à l’égard de ce groupe. Red Stoner Sun déploie un savant mélange de stoner très traditionnel, mais pas daté, et de spacerock à l’allemande : c’est foutrement efficace et le public était déjà conquis au terme d’un premier titre savoureux qui n’était pas sans nous rappeler Kyuss d’après “Blues For The Red Sun”. Quelques incursions en terres grungisantes, quelques parties chantées par l’homme assis derrière la batterie, une autre par celui aux commandes de la six-cordes, les electro-harmonix en action, l’ambiance underground de la petite scène et l’affaire était dans le sac. Eazy, Hensen et Marceese avaient gagné la partie ce qui n’était pas joué d’avance vu les onze longues années qui séparent les deux dernières productions de la bande du Kreuzberg. A en juger par les sourires que nous croisons dans la salle alors qu’il est à peine l’heure du goûter, nous en concluons que nous ne sommes pas les seuls à avoir apprécié cette première prestation de la journée qui laissait augurer le meilleur pour la suite et une soirée qui s’annonçait longue et riche en décibels.

THE MOTH

2-THE-MOTH-6354


Pas de Main Stage pour les deux premières prestations de la journée ; un changeover aura donc lieu ce qui nous laisse le temps de sortir nous aérer les poumons, de papoter un peu avec nos potes ayant fait le déplacement depuis la francophonie et de soigner notre bronzage sous le soleil teuton. La clope finie, les protège-ouïes remis pour certains et les appareils photo en mains, nous réintégrons le Foyer pour une seconde formation allemande : The Moth. Le jeune trio de Hambourg n’ayant à son actif qu’un seul album, “They Fall”, distribué de manière confidentielle – pour cause : il a été tiré à 100 copies selon la bio – nous ne savions pas encore très bien à quoi nous serions confrontés lorsque Cécile, Freden et Tiffy monteraient sur scène. Nous avions toutefois visé juste : ce serait bourrin et le shirt de Spirit Caravan n’était pas sur scène que pour la forme… Et, pour notre plus grand plaisir, ça a été bourrin : quelle claque ! Le public – encore congru dans la place – en a eu pour son pesant de gras. Les trois complices balancent un sludge bien lourd empreint de gimmicks doom et c’est du plus bel effet. La bassiste en short envoie du bois sur trois cordes seulement – et nous ne voulons pas entendre, dans l’assistance, des remarques sur la limite des capacités multitâches de la gente féminine – et partage le chant avec son collègue guitariste en empruntant des registres similaires. L’osmose des chants est parfaite et donne un rendu fort dynamique très plaisant. Derrière le duo à micros, ça envoie du lourd à la batterie et le headbanguing se généralise très rapidement dans l’assistance car, les enfants, c’est une prestation d’excellente facture qui nous est délivrée par ce groupe actif depuis 2012 seulement. L’attitude terriblement rock’n’roll est au rendez-vous tout au long de ce set de fou et, même si les interactions verbales avec le public sont quasi-inexistantes, nous sortons du chaudron en mode smiley et les oreilles un peu entamées quand-même. Une deuxième belle surprise pour cette journée avec deux formations que nous n’attendions pas spécialement, mais qui ont emporté notre adhésion grâce à l’intensité et à l’authenticité de leurs performances. Auteurs de compositions particulièrement bien abouties (un peu comme “The Moth” qui demeure un des meilleurs titres joués par les hamburgers, qui ont pioché dans le registre plutôt “pied au plancher” de leur modeste répertoire), ces allemands, comme leurs prédécesseurs, ont prouvé à leur tour la richesse du style que nous chérissons sur ces pages.

BLACK RAINBOWS


A peine remis de la performance de The Moth, nous dégourdissons nos gambettes – la nuque c’est fait – et partageons nos impressions avec nos potes sur place puis traversons le rideau tendu entre les deux lieux consacrés à la musique pour aller constater de visu de quoi les Transalpins de Black Rainbows sont capables sur scène. Ca fait un moment déjà que le trio est actif et que nous écoutons les nombreuses productions qu’ils ont disséminées depuis presque une dizaine d’années, mais rares ont été les occasions – pour nous – de les rencontrer en chair et en os. Nous attendions des plans fuzz et psychédéliques directement influencés par les maîtres Kyuss et, Alberto, Dario ainsi que Gabriele nous ont donné exactement ce que nous étions venu chercher. Très traditionnels dans leur approche et pas franchement novateurs, les Italiens nous ont envoyé en direct dans les seventies de manière plaisante car ils savent plutôt bien faire les choses. Au terme de cette prestation durant laquelle les soli de guitares furent nombreux et les parties chantées réduites, jamais nous n’eûmes l’impression d’avoir affaire à une pâle bande de repompeurs, loin de là même. Une belle débauche d’énergie envoyée par des vétérans du stoner transalpin qui font preuve sur scène aussi d’une excellente maîtrise de leur art en envoûtant leur public dans leurs volutes psychédéliques. Un groupe de stoner confirmé, qui a balancé un stoner dans les règles de l’art, dans un festival tout entier dédié au stoner : la formule était programmée pour marcher et ça a rudement bien marché ! Grazie mille é alla prossima ragazzi !

GRANDLOOM


L’année dernière on avait ironiquement glosé sur le retard “no panic” du leader de Danava qui avait repoussé leur concert aux dernières heures de la nuit, et on était un peu plus fâché de la défection de Witchcraft, une des têtes d’affiche du festival, qui avait annulé deux jours avant… Cette année, tout semblait rouler, jusqu’à l’annonce le vendredi matin de l’annulation des français de Huata (dont un des musiciens se retrouvait dans l’incapacité formelle de rejoindre Berlin), qu’on se faisait une joie de voir sur scène. La plupart des festoches auraient rallongé de 15 minutes les sets des groupes suivants pour rattraper le créneau laissé béant dans la programmation, mais Sound Of Liberation est d’un autre calibre, et a bataillé pour dégoter en quelques heures un remplaçant de choix, avec Grandloom. Le groupe n’est pas avare de prestations scéniques (et nous-mêmes on les avait vus au Up In Smoke 2013), et c’est avec la banane qu’ils montent sur scène pour dérouler les premiers accords de leur stoner rock psyche instrumental. Les premiers titres nous emmènent de manière assez jouissive dans leur univers musical, une sorte de Karma To Burn un peu plus déstructuré, plus groovy et ouvert aux impros. En tout cas, tout ceci est foutrement carré, ça jamme, c’est aéré et souple, certes, mais c’est rondement bien mené par un trio qui se connaît sur le bout des doigts (même si le batteur a incorporé le trio depuis moins d’un an). Scéniquement, alors que Thomas est la plupart du temps noyé dans un rideau de cheveux et ondule / headbangue selon les rythmes des titres qu’il cisèle avec sa gratte, Hans à la quatre-cordes est plus extraverti, affichant un sourire ultra-brite constant, sans négliger ses lignes de basse groovy et rondes. Par ailleurs, la synchro basse-batterie, un élément clé, on le sait, pour ce type de format instrumental en trio, est d’une puissance remarquable (il faut voir le batteur ne pas lâcher Hans du regard une seule minute). Dans ce genre musical, on a tendance à penser qu’avec Grandloom on ne peut pas se tromper : psyche et planant mais pas trop ennuyeux, propice aux jams mais jamais démonstratifs ou trop longs, alternant différents tempo et ambiances musicales… Une prestation juste impeccable, même si dans un genre radicalement différent de Huata, qu’on pleure toujours un petit peu quand même… Pris dans leur élan, les allemands qui voient leur set toucher à sa fin se lancent néanmoins dans un titre long, tendance psyche planant… et emplafonnent ainsi le timing ! Pas grave, personne ne leur en tirera rigueur.

GOZU


Gozu, éminent membre du roster Small Stone, se pose en pur représentant du gros stoner ricain emblématique du label de Detroit, MI. Avec deux albums sous le bras, le groupe a bien vite été catalogué dans la partie “sans surprise” de cette écurie de champions : Small Stone compte son lot de groupes très diversifiés, mais aussi une poignée de groupes musicalement assez carrés, qui se retrouvent derrière une vision partagée du gros rock – un truc assez crasseux, doté de riffs acérés presque metal, et des compos catchy et percutantes qui sentent bon l’americana. Et bien pas de surprise donc avec Gozu : c’est exactement ce qu’ils nous donnent en pâture. Mais avec la manière ! Les gars tiennent la Main stage comme si c’était leur propre salon – ils sont ici chez eux, à l’aise, ils contrôlent. Et heureux d’être là aussi, ça se voit, en particulier chez Gaff, leur charismatique frontman. Ce dernier mène les hostilités avec maestria, redoutable en guitariste rythmique et remarquable pour sa voix puissante et subtile à la fois, une qualité rare qui place Gozu dans une catégorie un peu à part. Le reste du groupe se donne à fond, et enquille les morceaux issus alternativement de leurs deux albums (de mémoire, quasiment moitié-moitié du set). De ce maelstrom d’une efficacité redoutable, on se rappellera en particulier le viral “Meth Cowboy” enchaîné à un percutant et groovy “Mr Riddle”, mais le reste du set n’est jamais en reste. Un groupe généreux sur scène, professionnel et efficace. Ca manque peut-être un peu de chaleur dans la relation au public, mais dans le style, c’est juste inattaquable.

PRISMA CIRCUS

6 PRISMA CIRCUS-6838


Un move jusqu’au Foyer – désormais bien rempli – pour aller nous confronter aux Ibères pas rudes de Prisma Circus. Nous avions déjà croisé le quatuor avant qu’il ne monte sur scène et la tension était perceptible. Il n’y avait pourtant pas de quoi car le public du Desertfest est toujours bienveillant et les Espagnols sont plutôt talentueux, n’empêche : Alex, Joaquin et Oscar ont gravi les trois marches les séparant du sol avec la boule au bide et ont débuté leur set dans ces conditions alors que franchement il n’y avait pas à se faire de bile. Bon, ce sentiment bizarre qui était perçu par les spectateurs s’est heureusement estompé au cours de leur prestation pour le plus grand bonheur de tous. Plutôt statiques sur scène, et drôlement harnaché pour leur bassiste et chanteur qui avait la sangle de sa Rickenbacker autour de la taille pour un jeu quasi-vertical, le trio à la dégaine datée a délivré une performance de rock psychédélique très orientée jam dans le plus pur esprit des lointaines seventies. Ca fleurait bon le MC5 dans la capitale économique de l’Europe et certains de nos potes n’allaient pas cesser de tarir d’éloges à l’endroit de ces garçons qui alignèrent peu de titres au total, mais étirèrent avec panache des plages extraites de leurs deux productions : le long format “Reminiscences” sorti l’an passé et son cadet de quatre titres sobrement intitulé “Prisma Circus” dont “Paradox” fût surement le point d’orgue. Après les derniers accords du bien nommé “Asylum’s Gate”, le moment était venu de glisser vers le côté sombre de la planète stoner pour un programme nippon ni mauvais qui allait satisfaire les amateurs de gras nombreux dans l’assistance, à l’heure habituelle à laquelle les concerts de rock débutent alors même que nous n’en étions qu’à la moitié de cette journée de dingue.

CHURCH OF MISERY

7 CHURCH OF MISERY-6991


Les japonais de Church Of Misery investissent une mainstage finalement assez dépouillée, baignés dans une pénombre et des contre-jours ajoutant à l’aspect lugubre de leur réputation. L’édition du Desertfest de cette année est moins orientée doom que celle de l’année dernière, et tandis que nos oreilles résonnent encore des accords de stoner pur jus des ibères Prisma Circus, le choc musical est rude dès la première déflagration nippone. Le son est gras, dense, et les japonais sont possédés, débridés (faut dire qu’il auront traîné sur le site pendant deux jours, au milieu du public, tout calmes et souriants – le contraste est d’autant plus marquant…). On est plutôt contents de retrouver au micro Hideki Fukasawa, après le passage de Negishi pendant quelques années (dans la carrière du groupe, ce poste n’a jamais été très pérenne). Tandis que ce dernier faisait office de fou dangereux derrière son micro (ce qui finalement n’était pas un casting si stupide au vu des paroles déjantées du combo…), Fukasawa est plus posé, plus “incantatoire” aussi, et son chant plus “doom” paraît mieux rendre justice à la noirceur de la musique du combo. Il ne se met pas non plus autant en avant que son prédécesseur, et la maîtrise scénique paraît désormais mieux partagée entre les musiciens : Tatsu Mikami, jouant comme à son habitude avec sa basse au niveau des chevilles, est toujours bien à fond et pas avare en poses metal bien cliché, tandis que Ikuma Kawabe est plus introverti mais pas moins impliqué ni efficace, à l’image du batteur, perdu en fond de scène et abattant ses rondins dans une ambiance lumineuse toujours aussi sinistre au fil du set. Le groupe jouera une demi-douzaine de titres pendant un peu moins d’une heure (faut dire que les bonhommes ont peu de compos sous la jauge des six minutes…), dont on retiendra surtout les classiques issus de “House Of The Unholy”, le puissant “Born to Raise Hell” (chargé comme d ‘hab’ de soli impeccables mais aussi d’interventions “space” au synthé de Fukasawa…) ou l’incontournable et pachydermique “El Padrino”. Les nouveaux titres joués ce soir ne mettent pas autant en transe que les anciens, même si le set n’a pas faibli un seul instant, et que le public headbanguait comme un seul homme au moindre riff. Belle efficacité sur ce set, parfaitement positionné dans le début de soirée pour faire un peu monter la tension musicale suite à un début de journée que l’on pourrait presque qualifier de “bon enfant”. Finie la déconne, la suite de la journée sera grasse ou ne sera pas !

HULL

8 HULL-7193


Le premier acte de cette programmation garantie zéro pourcent light était assuré par l’incroyable quatuor de Brooklyn qu’est Hull et il était écrit que le desertrocker qui se pointe sans protection auditive à leur show n’aurait pas les oreilles débouchées avant le lendemain. Je vous laisse imaginer la puissance employée par ces ricains pour nous ramoner les cages à cérumen. Alignés, faisant front au public, les trois micros réglés à hauteur d’homme attendirent quelques instants avant que montent ces fous furieux sur les planches du Foyer. Le public, clairsemé certes, était néanmoins très réceptif au tabassage en règle que le groupe allait déployer tout au long d’un set placé sous le signe de l’extrême violence. Car si la formation sait être subtile et presque aérienne sur disque, le setlist ne laissa aucune place à leur répertoire apaisé, et concentration fût effectuée sur les titres les plus rentre-dedans. Ce fût donc magique pour une partie de l’auditoire et certainement pénible pour ceux qui n’étaient pas dans le mood tant certains plans empruntés au vieux thrash étaient éloignés de la galaxie stoner. Avec hargne, les frontmen se sont succédés, voire même joints, pour vociférer leurs textes malsains sur un véritable déluge de riffs ravageurs et de rythmiques assassines. Le pays des Bisounours semblait à mille lieux de l’Astra alors que Hull déployait la quintessence de son mix de sludge, de thrash et de plans doomesques dont le sublimissime “Beyond The Lightless Sky” qui est une pépite du genre (et qui tombait fort bien à propos à ce moment de la soirée). Si Prisma Circus avait marqué certains esprits, ces Américains allaient en marquer d’autres qui allaient opérer une véritable razzia au Hippie Market pour acquérir leurs œuvres dont le dernier EP en date “Swamp Goat” dont l’unique plage “The Legend Of Swamp Goat” a été envoyée sur scène durant un set sanglant qui vit le groupe se dépenser sans compter pour notre plus grand bonheur.

CAUSA SUI

9 CAUSA SUI-7280


La soirée commence à prendre des tournures de boucherie cérébrale, avec les déflagrations successives de Church of Misery et Hull, et à venir Kvelertak, Elder et Mantar. Compréhensifs (et magnanimes) l’orga du Desertfest a eu la bonne idée de nous coller une rasade de CAUSA SUI au milieu de cette orgie, afin de calmer un peu les tympans et solliciter un peu plus les neurones. Faut dire en plus que le concert de ce soir est exclusif, et connaissant la réputation live du combo, on ne peut que saliver d’avance. En se posant devant la mainstage, on accueille donc avec bienveillance les premiers voluptueux accords du combo danois. Scéniquement, le light show est chiadé, hypnotisant, avec des projections immenses sur le backdrop magistral ornant le fond de scène. Faut dire que si on comptait sur les musiciens pour participer à l’animation scénique, on serait fort déçus, tant leur agitation sur scène s’apparente à celle de phasmes apathiques pendant leur sieste : les musiciens sont concentrés, se regardent entre eux occasionnellement, mais plus globalement s’immergent dans leurs nappes soniques pendant la poignée de titres que leur heure de concert leur permet d’aligner. Musicalement, ça plane haut, très haut : le psych-rock du quatuor est hypnotique, séduisant et lancinant, et le public, qui ondule presque inconsciemment au rythme des morceaux, semble apprécier. N’ayant pas eu l’opportunité d’écouter leur dernier album, le morceau qui m’est apparu le plus intéressant et représentatif fut cette interprétation de haute volée de “Red Valley”, un titre qui sonne vraiment comme une chute studio psyche issue du “…Circus…” de Kyuss, sans le chant of course, et se terminant par un solo de gratte presque Hendrixien impeccablement emmené. Même si ici sur Desert-Rock on n’est pas du genre à coller des allusions à Kyuss (ou QOTSA d’ailleurs) à tout bout de champs pour définir des artistes, les échos de la formation du haut-désert californien résonnent occasionnellement à nos oreilles sur plusieurs passages du set, qu’il s’agisse d’attaques de batterie rageuses, d’un son de guitare “familier”, ou plus globalement de rythmiques heavy et enlevées. Mais le tout sonne comme du miel sur nos petits tympans musclés, et nos synapses, reposées, disent en cœur “merci Causa Sui”. Une belle expérience scénique.

ELDER

10 ELDER-7393


Retour dans l’antre qui pue la sueur de dessous les aisselles pour une nouvelle débauche d’énergie en perspective avec la formation de Boston. Nous vous l’avions dit : le vendredi c’était la journée du gros son qui poutre et cette nouvelle salve pourtant attendue allait nous laisser un peu dubitatif. Non pas que la formation soit en petite forme ou que les compos alignées ce soir-là soufrent d’un quelconque manque d’inspiration voire de talent, non nous croyons que l’alignement Moth, Grandloom, Church Of Misery et Hull avait grandement entamé notre côté gras. La perspective de se taper Kvelertak au dessert a aussi joué son rôle bien évidemment. Nous avons goûté au stoner-doom du trio, mais ne sommes pas pour autant ressorti du show avec un sourire béat aux lèvres. La performance des américains était d’ailleurs plutôt de bonne facture et la foule compacte devant la scène ne partagera à coup sûr pas le sentiment des desertrockporters que nous sommes. Car, tandis que les gars secouaient leurs tignasses sur scène en alignant des titres longs, remplis de riffs de grattes et de vrombissement de basse, la foule hurlait son plaisir durant les longues plages hypnotiques. Peut-être attendions-nous d’atteindre un autre niveau dans la violence, car soyons honnête : la formation n’a pas démérité une seule seconde. Promis, la prochaine fois on fait dans le léger avant de s’envoyer une rasade d’Elder sur scène.

KVELERTAK

11 KVELERTAK-7561


Nombreux étaient ceux qui avaient été interpellés par l’arrivée du sextuor norvégien sur l’affiche de cette fiesta dédiée au stoner et aux genres voisins tant Kvelertak semble éloigné de la tradition de ce style. Il se trouve qu’en dépit de son étiquette peu propice à agiter les foules stoner, la formation qui se produisait en tête d’affiche a fait un carton plein. Le public stoner – que l’on sait par ailleurs peu sectaire – a carrément pris son panard durant le show intense qu’a délivré la bande de Scandinaves. Même en s’inscrivant dans son registre usuel qui emprunte au punk, au metal, au hardcore, au death – et nous en passons – nos lascars n’avaient pas usurpé leur place d’headliner de la soirée. Ce fût magique, voire même au-delà de ça. Tout débuta avec l’arrivée de leur hurleur paré de sa mythique tête de hibou – c’était chouette dès le début – au milieu de ses acolytes pour envoyer “Åpenbaring” en ouverture soit le premier titre de leur dernier effort en date : “Meir”. Et le ton était donné : ça allait poutrer non-stop durant la prestation de Kvelertak et les spectateurs n’auraient guère de répit durant presque une heure et demie ; remarquez nous en aurions bien repris une petite dernière pour la route, mais bon, ça faisait déjà super plaisir de se taper un show avec cette formation en haut de l’affiche plutôt qu’en ouverture d’une grosse pointure ricaine. Alors après une ouverture sur les chapeaux de roues, les Norvégiens ont envoyé une bonne moitié de leur dernière production : “Kverlertak”, “Spring Fra Livet”, l’imparable “Undertro” ainsi qu’une poignée d’autres missiles plus des morceaux plus anciens – tout est relatif – datant de leur premier chef-d’œuvre. En plus d’être talentueux en matière de composition, ces types ont le toupet d’avoir une sacrée prestance sur scène en n’ayant de cesse de bouger pour bien remplir l’espace (même si c’est toujours plus aisé à six qu’à trois). Ils ont exhibé de superbes instruments qui ont fait pâlir d’envie les zicos présents dans la place et même si leur frontman ventripotent qui jouait à torse poil n’était pas des plus remarquable esthétiquement parlant, tout le monde enviait l’aisance avec laquelle ils semblent tous exercer leur art. Une réussite, que dire, une énorme réussite scénique avec quelques effets de manche bien sentis dont le masque du début et l’étendard géant agité par leur vociférateur en chef juste avant les rappels convenus. Ceux-ci étaient composés d’un tiercé d’obus issus de leur première galette : “Sjøhyenar (Havets Herrer)”, “Mjød” et “Utrydd dei Svake” : un titre plus long et un peu en dessous du reste question intensité – attention : nous sommes restés du côté bourrin – au cour duquel les musiciens ont livré le reste d’énergie qu’il leur restait en réserve pour nous en foutre plein la vue et escalader les amplis pour certains. Une show exceptionnel pour un public d’exception : nous pouvions quitter la Main Stage heureux pour rejoindre une autre bande de bourrins qui n’allaient pas tarder à envoyer leur sauce épicée alors que la nuit était déjà bien entamée.

MANTAR

12 MANTAR-7673


Lorsque Mantar a été annoncé à l’affiche du Desertfest, on a commencé par s’interroger sur ce duo germano-turc (?!), et puis on a vite compris qu’ils faisaient partie de cette petite liste de groupes que Sound Of Liberation glisse toujours sournoisement dans ses événements, qui sont des groupes d’avenir, à découvrir avant qu’ils n’obtiennent une plus large reconnaissance. En voyant le frêle Hanno finir d’installer son matos sur la petite scène, brancher fébrilement les derniers câbles ici ou là sur son rack de pédales de un mètre de large, sans oser regarder le public qui se masse devant la scène après l’assaut en règle pris avec Kvelertak, on se dit que le bonhomme n’est peut-être pas de taille… Et le début du set, un peu chaotique (il renverse une bouteille d’eau sur sa tête d’ampli, se prend les pieds dans son matos…) ne nous rassure pas. Le bonhomme est tendu… L’impression étrange continue alors que le groupe se lance dans l’interprétation du heavy “The Berserker’s Path”, sur lequel on entend des vocaux… sans qu’il ne se mette derrière son micro ! Il s’agit en fait de bandes samplées, mais les gens dans le public, qui ne connaissent pas encore les chansons du groupe, se regardent bizarrement au début … Et puis finalement, il aura suffi de lancer un titre plus énergique, et que Hanno s’empare enfin du micro et déglutir ses boyaux comme il se doit pour convaincre un public qui retrouve – après un autre beau spécimen de hurleur chez Kvelertak –un pur agresseur phonique complètement barré, là, sous ses yeux qui commentent à briller d’émotion. Et la suite est à l’avenant, allant de bonne surprise en bonne surprise. Musicalement, le groupe évolue au confluent de plein de genres différents, une sorte de sludge dégraissé, teinté de vapeurs doom, bercé par des rythmiques qui pourront rappeler Motörhead, et un aspect parfois “clinique” du son (on pense aux Melvins, à Meshuggah sur certains passages…). Le petit gars Hanno, se révèle vite complètement déjanté, dans le genre habité par sa musique. Doté d’un son de gratte vicieux et incisif, il décoche ses rythmiques avec la furieuse envie d’en découdre – il vise le K.O. technique dès que possible, pas le temps de faire des courbettes. Il se contorsionne dans tous les sens, frappe frénétiquement du pied sur ses pédales d’effets et balance ses riffs haineux sans jamais faiblir. Son pote Erinc derrière son kit de batterie, forcément moins visible, ne le quitte pas des yeux, et cale tout son jeu sur la dynamique imposée par son copain gratteux. L’exercice de la musique en duo ne souffre pas d’approximation, et le batteur cogne ses fûts avec fougue mais toujours en parfaite symbiose avec son collègue. Le duo utilisera cette grosse demi-heure pour décocher quelques cartouches bien rouillées à bout portant vers ce public rassasié par sa journée bien remplie. Par ce dernier uppercut, Mantar marque un paquet de points au “top découverte” du week end, et donne surtout une furieuse envie d’aller les revoir jouer sur scène dès que l’occasion se présentera à nouveau.
Allez, dodo, faut prendre des forces pour la journée de demain…
(A SUIVRE…)

Chris & Laurent

Se connecter