RITE – décembre 2002

Sans crier gare, vient de débouler de Finlande un groupe ravageur (et ravagé) répondant au doux patronyme de Rite. Détruisant tout sur son passage, le premier album du quintette, “Shoot Skull For Jackpot” (qui sort sur un label français décidément de plus en plus actif et intéressant) fait mouche et impressionne par son son énorme, la qualité de ses compos et une puissance remarquable. Juste assez en tout cas pour piquer notre curiosité, ce qui nous a poussé à poser quelques questions au batteur du groupe, Juha, pour nous aider à comprendre un peu le phénomène… Résultat concluant, jugez-en par vous-mêmes ci-dessous.

 

Premièrement, peux-tu brièvement nous présenter la courte vie de Rite ?

Juha : Rite est un groupe de rock’n’roll composé de cinq membres, et nous venons de la froide Finlande. Notre histoire remonte quand même à 1994, au moment où nous avons changé le nom de notre groupe d’alors pour devenir Rite (trois d’entre nous jouions dans ce groupe à l’époque). Nous avons enregistré quatre démos jusqu’en 1999, dont la dernière est sortie en vinyl. Notre premier album, “Shoot Skull For Jackpot” est sorti en novembre 2002. Il y a aussi l’une de nos chansons sur la compilation “Mighty Desert Rock Avengers” et sur divers CD samplers sur des magazines ici ou là… Hormis ça, il faut juste signaler que nous avons eu seulement deux changements de line-up dans notre histoire, et que le groupe est donc actuellement composé de Jarkko au chant, Sami et Janne aux guitares, Manu à la basse et moi à la batterie.

Comment définirais-tu votre musique ? J’aurais moi-même du mal à la résumer eu un seul terme – peut-on par exemple dire qu’il s’agit d’une sorte de mélange heavy power rock’n’roll metal saturé ?…

Hahaha, oui, tu es assez proche ! Je ne pense pas que nous sommes très proches du Power Metal, mais tant que tu cites les mots “heavy metal” et “rock’n’roll”, tu as forcément raison ! Ce que je veux dire c’est que nos racines sont clairement ancrées dans le metal, même s’il y a une très grosse touche rock’n’roll dans nos chansons.

De même, j’ai du mal à identifier des influences directes dans votre musique, en avez-vous ?

Les pères du heavy metal, Black Sabbath, sont l’un des groupes qui font l’unanimité au sein de Rite, et je pense que tu peux entendre leur influence dans certaines de nos chansons. Mais au delà de ça, bien entendu, tous les groupes que l’on apprécie influencent plus ou moins nos compositions, même sans que l’on y pense vraiment… Nous écoutons du heavy rock quasiment depuis notre naissance, il serait donc impossible de mentionner tous les groupes que nous aimons, mais peut-être que les plus importants sont Entombed, Danzig, Black Sabbath, Kiss, Xysma (un groupe finlandais) et Slayer.

 

Votre son de guitare sur cet album est assez incroyable, très brutal et pourtant très clair à la fois, une sorte de mélange entre Meshuggah, Entombed et Motörhead. Est-ce que le travail du son de guitare a été l’un de vos soucis majeurs au cours de la production de cet album, ou bien est-ce qu’il s’agit d’un élément qui a toujours été propre au groupe ?

Notre but était effectivement d’obtenir un son brut, violent en quelque sorte, pour les guitares. Avant de rentrer en studio, nous savions déjà un peu le type de son que nous souhaitions, mais n’étions pas sûrs de comment l’obtenir concrètement. Arttu Sarvanne (le mec qui a produit et enregistré l’album en collaboration avec nous) nous a énormément aidé à trouver ce son que nous voulions. Et je dois bien dire que nous sommes très heureux du résultat et du travail d’Arttu en général !

Je suis peut-être à côté de la plaque sur ce coup, mais en se penchant un peu sur Rite, votre site web, votre livret de CD, vos paroles parfois, etc… il semble qu’il y ait autour du groupe une sorte de sens de l’humour un peu décalé, mais omniprésent. Est-ce une volonté d’ajouter une touche de déconne autour de la musique ?

Avant tout, faire partie d’un groupe est totalement fun. C’est ainsi que ça doit être, dans le cas contraire, il n’y a aucun intérêt à faire ce que nous faisons. Et je pense que tu as de toute façon raison à propos de ce sens de l’humour un peu décalé au sein du groupe ; nous ne cherchons pas à tout prix à être drôles et à sortir des vannes à tout bout de champ, mais cet humour vient de notre attitude générale, de notre approche de la vie. Nous prenons toutefois notre musique très au sérieux, ça c’est sûr, mais en même temps il y a toujours quelque chose de drôle dans chaque situation que nous rencontrons, et on aime bien mettre cet aspect en avant lorsque l’on en a l’occasion.

 

Et qu’en est-il de cet énigmatique titre d’album, “Shoot Skull For Jackpot” ?

Ce titre vient en réalité d’un flipper sur lequel nous jouions très souvent dans un pub près de chez nous ! Manu, et surtout Sami, sont de grands fans de flippers, et un jour Manu a trouvé que ce slogan sur le flipper ferait un super titre d’album. C’était en 2000, ce qui signifie que nous avions déjà un titre pour notre album plus d’un an avant même qu’il ne soit enregistré !

On entend de plus en plus de groupes scandinaves dans le rock heavy en général, plus particulièrement des groupes suédois, mais Rite est l’un des premiers évoluant dans un genre similaire, qui est issu de Finlande. Comment se porte la scène rock finlandaise ? Penses-tu que d’autres groupes finlandais vont suivre vos traces et commencer à se faire connaître ?

Wow, c’est flatteur d’être le premier groupe de la sorte… le Heavy Rock se porte bien en Finlande. Il y a de nombreux groupes qui tournent dans le monde (Children Of Bodom, Sentenced, Stratovarius…), et beaucoup d’autres groupes, pas aussi célèbres, parviennent tout de même à rendre la vie en Finlande intéressante ! Dans un futur proche, vous devriez entendre parler d’un groupe finlandais appelé Total Devastation : ils enregistrent leur album très bientôt, et si vous aimez bien le metal brutal killer, vous allez adorer ! Le groupe Zerocharisma devraient aussi faire parler d’eux avec leur super nouvel E.P. “Chiefs and Captains”.

Votre album sort sur un label français, Water Dragon Records. Comment l’avez-vous choisi ?

Après avoir enregistré notre dernière démo, “Goddamn”, en 1999, nous l’avons envoyée à divers labels un peu partout dans le monde. Je peux dire que nous n’avons pas choisi Water Dragon, mais plutôt que ce sont eux qui nous ont choisis ! Water Dragon a donc voulu sortir ces enregistrements sur un single à travers leur site web, mais cela ne s’est finalement pas fait, et ils ont préféré le sortir en tant que 7″ vinyl en 2000. Et je peux te dire qu’on est fiers de cette sortie ! Nous avons donc souhaité poursuivre cette collaboration, et notre premier album sort donc chez eux. Je remercie donc encore très, très chaleureusement Matt et Xavier chez Water Dragon !

 

Prévoyez-vous une tournée pour la sortie de cet album ? Si oui, envisagez-vous de passer près de chez nous ? Et concrètement, c’est une chose dont les gens ne se rendent pas toujours compte, est-ce qu’il est facile de monter une tournée européenne pour un groupe de taille moyenne comme le vôtre ?

Malheureusement, aucune tournée européenne n’est prévue, tout du moins pour le moment. Bien sûr nous adorerions jouer partout, mais une tournée en Europe, par exemple, ne se fait pas aussi facilement. S’il y a un tourneur qui lit ceci, le message est clair : “Rite est prêt à envahir l’Europe !”. En ce qui concerne le financement, je peux te dire que tourner est certainement la pire option à choisir si ton seul but est de devenir riche ! Toutefois, si on arrive à gagner assez d’argent en faisant des concerts pour payer l’essence et la bière, nous n’avons pas besoin de quoi que ce soit d’autre, ça c’est clair, et nous partons sur le champ !

Quels sont vos plans pour les mois à venir ?

Et bien, nous allons faire quelques concerts en Finlande, alors si vous traînez dans le coin, vous êtes les bienvenus ! Nous sommes par ailleurs en train d’écrire de nouveaux morceaux pour le prochain album, nous avons déjà cinq chansons prêtes, et dès que nous en aurons dix ou onze, nous retournerons en studio. J’espère vraiment que ce sera en 2003 !

Bon, voici le moment fatidique où tu as ta dernière chance de t’adresser librement à nos lecteurs …

Et bien je veux juste leur rappeler que “Shoot Skull For Jackpot” est disponible sur internet directement sur notre site web à www.riffrock.com/rite. Une fois que vous aurez l’album, vous pourrez vraiment vous détendre et apprécier la vie comme il se doit en l’écoutant ! J’espère aussi que nous aurons l’occasion de vous voir un jour à un concert de Rite ! Et mes derniers mots seront : soutenez l’underground et restez heavy !

décembre 2002 par Laurent.

SPIRITUAL BEGGARS – septembre 2002

Passionnés par les seventies, Michael Amott et ses compères de Spiritual Beggars font revivre à chaque album l’esprit de Deep Purple, Led Zeppelin et Black Sabbath. “On Fire”, leur cinquième opus ne fait pas exception à la règle. Plus qu’un hommage à ses aînés, cet album redéfinit complètement le style en proposant un étonnant mélange de puissance et de mélodie. Sonner moderne tout en ayant capturé l’esprit des seventies, voici le challenge que ces messieurs ont réussi à emporter haut la main. Notre ami Laurent Divergent s’est entretenu avec Michael lors de son passage à Paris en septembre dernier.

 

La grosse différence entre l’album précédent “Ad Astra” et le nouveau “On Fire”, c’est le changement de chanteur. Peux-tu évoquer les circonstances du départ de Spice ?

A vrai dire, je ne sais pas vraiment pourquoi il est parti. Nous n’avons pas parlé ensemble de ce départ. Il a simplement contacté notre manager pour lui dire qu’il voulait quitter le groupe. J’ai essayé de le contacter mais en vain. Tu sais, je commence à être habitué car ce n’est pas la première fois qu’il nous fait le coup. Cela s’est produit au moins à quatre reprises. A chaque fois, nous lui demandions de revenir, mais la différence, c’est que cette fois nous l’avons laissé partir. Si quelqu’un ne se plaît pas dans le groupe, c’est son droit le plus strict. On ne peut l’en empêcher. On a vécu avec Spice de grands moments. Cela a été une surprise d’apprendre son départ. C’est ainsi…

Peux-tu présenter J.B. (également chanteur de Grand Magus) son remplaçant ?

C’est un chanteur fantastique. Je ne savais pas ce qu’il faisait avant mais quand j’ai entendu sa voix, j’ai tout de suite su que ce serait un bon chanteur pour nous. Il évolue un peu dans le même style que Spice mais en plus mélodique et il est tout aussi puissant. Il met beaucoup d’âme dans son chant. J.B. a été influencé par les plus grands comme David Coverdale et Ronnie James Dio. Il a un feeling assez blues, ce qui n’est pas inintéressant dans le cadre de Spiritual Beggars. Il nous a vraiment aidés à aller de l’avant, à nous renouveler.

Et qu’en est-il du nouveau bassiste Roger Nilson ?

Il vient du groupe The Quill. On le connaît bien car on le rencontrait souvent à nos shows. C’est un vrai fan de Spiritual Beggars, tout comme J.B. d’ailleurs. Quand on les a rencontrés, ils connaissaient tous les deux notre ancien répertoire, ce qui était appréciable.

N’avais-tu pas peur que le départ de Spice changerait un peu trop votre identité musicale ?

On n’avait pas le choix. Il ne nous a pas fallu cinq minutes pour nous décider à continuer sans Spice. Ludwig (batterie), Per (claviers) et moi-même adorons jouer ensemble. Pourquoi est-ce qu’on s’en priverait ? Il était certes délicat de trouver les bons remplaçants mais nous avons été chanceux sur ce coup-là !

 

Comment pourrais-tu nous présenter “On Fire” ?

Actuellement, je ne peux me montrer objectif car j’ai travaillé beaucoup trop dessus. J’en suis très heureux. Nous avons travaillé très dur pour essayer de proposer un album supérieur à “Ad Astra”. Notre but en faisant “On Fire” était de proposer une musique très heavy avec des rythmiques plombées, des vocaux rageurs, mais nous voulions en même temps un album dynamique et mélodique. J.B. est un chanteur polyvalent. Etant le compositeur des paroles et des parties vocales, cela a constitué un nouveau challenge pour m’adapter à son style et pour composer en fonction de ses possibilités. ‘On Fire’ a été à la fois excitant à réaliser et complètement éreintant. Ce disque est maintenant dans les mains des fans. C’est à eux de décider de la qualité de ce dernier.

Quel a été l’aspect le plus difficile à réaliser pour cet album ?

La structure de base des morceaux a été très facile à mettre en place. Elle résultait de jams, d’improvisations en répétitions. Ces premières idées viennent souvent un peu de nulle part, comme par magie. Tu n’as qu’à jouer et le reste suit. Mais après cela, c’était une autre paire de manches car il fallait s’occuper du chant, des paroles, des arrangements. C’est comme un énorme puzzle que tu assembles petit à petit. Il n’est pas rare de changer les choses jusqu’à la dernière minute, en studio, car on s’aperçoit qu’une idée ne fonctionne pas comme il se doit. Je suis assez pointilleux en ce qui concerne les arrangements. C’est cet aspect du travail qui me prend le plus de temps.

Est-ce qu’il y a une phase dans la composition que tu préfères faire tout seul ?

Oui l’écriture des paroles et des mélodies vocales. En fait, c’est surtout parce que personne d’autre dans le groupe ne voulait le faire (rires).

Comment expliques-tu l’amour que tu portes à la musique des années 70 ?

En fait, ce n’est pas la musique que j’écoutais lorsque j’étais gamin. J’ai grandi avec le punk, le hardcore, le thrash à la Slayer/Metallica, le death metal . Ce sont mes vraies racines. J’ai découvert cette musique bien plus tard, au début des années 90 avec d’obscurs combos des seventies. Ça se passe toujours de la même façon. Un ami te fait découvrir certains groupes, puis tu te rends dans un magasin de disques en découvrir d’autres, et ainsi de suite. Je trouvais que le mouvement heavy rock datant de cette époque était très excitant. Ces guitares distortionnées étaient révolutionnaires pour l’époque. J’ai alors voulu expérimenter moi-même ce type de musique, à ma façon. Cependant, je ne pense pas que Spiritual Beggars soit un groupe totalement rétro. Quelque part, rétro veut dire ennuyeux. Nous avons préféré nous imprégner de l’état d’esprit de cette musique plutôt que de la copier. Notre musique n’est pas nouvelle. De toute façon rien n’est nouveau dans le rock. Mais je pense qu’elle apporte de la fraîcheur au style.

 

Est-ce que pour toi Spiritual Beggars peut montrer à la nouvelle génération combien la musique des années septante était bonne ?

Oui, je le pense. Les plus jeunes fans qui sont totalement dans Korn ou Slipknot doivent penser qu’un groupe comme Deep Purple est beaucoup trop vieux ou trop ringard pour eux. J’espère que Spiritual Beggars leur prouvera le contraire.

Que pense ton jeune frère (second guitariste de Arch Enemy) de Spiritual Beggars ?

Il aime beaucoup. Nous avons à peu près les mêmes goûts. Il a d’ailleurs joué un peu de slide guitar dans “Ad Astra”. Il nous a également aidés en jouant de la basse avant que nous recrutions Roger.

A quoi ressemble un concert de Spiritual Beggars ?

Je ne pourrais te le dire exactement car nous n’avons pas encore joué avec le nouveau “line-up”. Mais ce que je peux te dire, c’est que ce sera du rock bien heavy et hautement énergique. Notre public a toujours été très diversifié. Tu as devant la scène des vrais headbangers qui s’éclatent comme des malades, au milieu des gars d’une quarantaine d’années, des jeunes de quinze ans avec des T-shirts de Korn, des hippies, des fans de Arch Enemy et au fond de la salle des filles qui dansent. J’aime cette mixité.

Peux-tu me dire à présent quelle est ton opinion sur les formations ‘seventies’ suivantes :

Iron Butterfly : Je ne connais pas très bien. Je ne connais en fait que leur titre phare “In A Gadda Da Vida” que je trouve intéressant. Par contre, j’ai plus suivi la carrière de leur guitariste Rhino qui a formé le groupe Captain Beyond.

Jimi Hendrix : Je n’aime pas trop sa période psychédélique dans les années soixante. Je préfère sa période avec The Band Of Gypsy’s (en 1969/1970). Je peux te citer les titres “Easy Rider”, “Freedom”. C’est la période où il faisait des vrais riffs. Les concerts de cette époque étaient terribles.

Rainbow : Fantastique, surtout la période avec Ronnie James Dio. C’était également un groupe à apprécier sur scène.

Status Quo : Je pense qu’actuellement ce qu’ils font est horrible. Je peux en témoigner, je les ai vus il y a quelques mois. Je pense que leur période heavy/boogie à la “Pile Driver” ou “Quo” est leur meilleure période. A écouter de toute urgence.

 

Quels sont tes projets immédiats pour Spiritual Beggars ?

Nous allons simplement nous réunir pour répéter et vous concocter un show digne de ce nom. J’attends cette tournée avec impatience. Je peux déjà annoncer que nous jouerons de très vieux morceaux que nous n’avons jamais interprétés en live. Nous avons un nouveau line-up, d’excellents musiciens motivés. Tout cela est très excitant. Je ne veux pas voir trop loin dans l’avenir. J’attends de voir la réaction des gens face à “On Fire”. S’ils aiment, ce sera cool car nous avons donné tout ce que nous avions. Cet album est un peu comme notre bébé. S’ils ne l’aiment pas, cela nous fera de la peine mais c’est leur droit. Quand un album sort, c’est comme un “teenager” qui s’en va de la maison, tu n’as plus de contrôle sur lui, c’est aux fans de décider.

Et que penses-tu du pouvoir de certains journalistes qui peuvent décider ou non si un album est bon ?

En fait, je ne réagis ni aux bonnes, ni aux mauvaises critiques. Tous les jours, je reçois vingt mails qui me disent combien je suis un grand guitariste. Personnellement, je ne peux me considérer comme un dieu de la guitare. Parfois, on me dit que ce que je fais est minable. Je m’en fous complètement. Je suis quelqu’un de pragmatique, de stable. Je garde la tête sur les épaules, et je fais ma musique. C’est le seul moyen de continuer à faire ce que je fais. Bien sûr, des bonnes chroniques aideront à rassurer la maison de disques qui pourra supporter le disque un peu plus longtemps. Mais je crois surtout en mon noyau dur de fans, pas à la parole des journalistes. Lorsque je joue sur scène, c’est la réaction du public et l’échange que j’ai avec mes fans qui restent importants. C’est ce “feedback” auquel on doit prêter de l’attention, pas celui des journalistes. Ces derniers reçoivent dix CDs par jour. Ils sont souvent blasés, cyniques. Pour moi la musique n’est pas du cynisme, c’est une vraie passion.

septembre 2002 par Laurent Divergent.

HERMANO – août 2002

Quelques semaines à peine après la sortie de son projet Orquesta Del Desierto, Dandy Brown remet le couvert en sortant un enregistrement vieux de quatre ans, qui nourrit les fantasmes des plus grands fans de stoner depuis que la rumeur de son existence a commencé à courir… Hermano (‘frère’, en espagnol…), ou l’histoire un peu folle d’un doux rêveur qui réunit ses idoles autour d’une poignée de chansons incroyables, pour en sortir un album sublime, “…Only A Suggestion” … Après un concert magique, des hectolitres de bière et Jaegermeister consommés par les deux groupes (Hermano et Spoiler) et votre serviteur, des centaines de photos et autographes signés, on retrouve Dandy, sur son petit nuage, pour recueillir ses impressions sur tout ça…

 

Peux-tu nous résumer la genèse d’Hermano et de tout le projet ?

Dandy Brown : Bien sûr. Une fois que j’ai monté mon propre studio à Cincinnati, je pensais vraiment tirer un trait sur mon expérience de musicien. Puis je me suis remis à écrire, j’ai composé quelques chansons plutôt Hard Rock, et je me suis alors dit : ‘Je devrais appeler tous mes musiciens de Hard Rock favoris et monter une sorte de projet’, tu vois le genre, des musiciens plutôt underground que j’adorais. J’ai donc d’abord appelé ce type de Lexington, Dave Angstrom, qui est dans un groupe appelé Supafuzz, et je lui ai demandé : ‘Veux-tu prendre part à ce projet, et jouer de la guitare dans ce groupe ?’. J’ai ensuite réfléchi à qui je voulais comme chanteur, j’avais plusieurs idées, et finalement je me suis juste dit : ‘Oh, et bien je devrais peut-être simplement appeler John Garcia pour voir si ça l’intéresse’. Je l’ai donc appelé, et il était à fond dans le concept, dès la première minute, il était d’accord pour venir à Cincinnati jouer dans ce groupe ! Une fois John Garcia dans le groupe, il fallait absolument que je fasse venir mon vieil ami Steve Earle au poste de batteur – il a quitté les Afghan Whings en 1993 et a fait beaucoup de travail de session depuis… C’était la dernière pièce du puzzle. J’envisageais le groupe simplement composé de quatre musiciens à ce moment-là… Par ailleurs, j’étais ingénieur du son pour un groupe punk rock local dans mon studio. Ils faisaient la première partie d’un groupe de Cleveland appelé Disengage, et ils m’ont demandé de venir les voir en concert le soir même. Et j’étais ivre mort, mec, une fois leur concert fini je n’avais qu’une envie, c’était me barrer et aller me coucher, mais ils m’ont convaincu de rester. Donc je décidais de rester pour une ou deux chansons de Disengage et je me préparais à partir… Et putain, mec, ils se sont pointés sur scène, et ils ont été incroyables, un concert fantastique ! J’y ai vu ce gamin, Mike Callahan, qui était guitariste pour eux, et je suis resté pour tout le concert ! A la fin de leur set, j’étais complètement bourré ! Je suis allé le voir et je lui ai dit un truc genre [mime un mec ivre] : ‘blah blah… projet… blah… tu jouerais dedans…’ Il a dû croire que j’étais un débile profond ! (rires) Mais étonnamment il m’a recontacté, et il est devenu le cinquième membre du groupe. On a commencé en 1998, on a fait quelques démos, mais je ne savais pas vraiment ce que j’allais en faire – j’étais encore un peu dégoûté de ce milieu, je ne voulais pas vraiment y remettre les pieds. J’ai fait quatre ou cinq copies de ces enregistrements et les ai envoyées à des amis un peu partout dans le pays. Et quinze jours plus tard, je suis allé consulter mes e-mails, et j’avais une trentaine de messages de labels ou de compagnies de management qui voulaient en savoir plus… Je trouvais ça incroyable ! Je savais que les enregistrements sonnaient super bien, que la musique était géniale, mais je ne savais pas quoi en faire. Je suis rentré en contact avec quelques maisons de disques – il y avait des majors dans le lot, mais je ne voulais pas avoir à nouveau affaire avec ce genre de grosses boîtes, après mon expérience avec Capitol… A l’époque tout le monde me vantait les mérites de Man’s Ruin Records, et comme leur offre paraissait bonne, je me suis engagé avec eux. Malheureusement les ennuis ont commencé lorsque John a signé un contrat avec American Recordings pour son groupe Unida, un contrat qu’il ne pouvait décemment pas refuser, et dont une clause interdisait que l’on sorte Hermano moins de neuf mois après la sortie de l’album de Unida ! Ca a été difficile à encaisser, surtout lorsque l’on considère la situation actuelle de Unida [ndlr : à l’heure où cette interview a été réalisée, l’album de Unida est bloqué contractuellement par Island, qui a racheté American Recordings après leur signature, mais refuse de sortir l’album, dont ils veulent revendre les droits au groupe à l’heure actuelle…], mais heureusement pour Hermano, la clause du contrat a donc été rompue, et nous avons donc eu le droit de sortir le disque. Mais Man’s Ruin ayant fait faillite l’été dernier, nous avons dû trouver un autre label, et nous avons choisi Tee Pee Records pour sortir l’album.

 

La dernière fois que l’on s’est rencontrés, c’était il y a un an, à Palm Springs, où tu étais en train de mixer l’album d’Orquesta Del Desierto. Que s’est-il passé depuis ?

Depuis l’été dernier, j’ai quitté le désert et suis parti avec ma femme et ma fille en Floride, m’installer près de mes parents. J’ai un peu arrêté de faire de la musique l’année dernière. Je suis professeur d’anglais dans un lycée là-bas en Floride, et j’adore ça, travailler avec des jeunes… Puis l’album d’Orquesta Del Desierto est sorti et tout est redevenu cool, en fait. Je ne pouvais m’attendre à quoi que ce soit de mieux concernant cet album : sa réalisation a été géniale de bout en bout, tout s’est fait très vite finalement, et il en ressort une telle intégrité, une telle beauté…

L’album est sorti il y a quelques mois maintenant, que peux-tu nous dire concernant la façon dont a été perçu Orquesta Del Desierto ?

Oh ça a été génial ! Je pense que beaucoup de monde ne savait tout simplement pas comment prendre cet album : il est si ‘brut’, puis si rapide et intense… Un peu à l’image de la beauté du désert, je pense, je ne sais pas trop… C’est l’une des choses les plus incroyables en ce qui concerne ce disque : je pense qu’il ‘capture’ le désert ! Je pense que si tu connais le désert, alors cet album te touchera particulièrement, tandis que si tu ne connais pas le désert, la perception que tu en auras pourra varier, tu pourras le comprendre d’une façon ou d’une autre… Je ne sais pas, il y a tant de beauté dans ma vie actuellement, tout semble se passer comme dans un rêve ! Ce soir par exemple, le concert était incroyable, tout comme tous les concerts de cette tournée jusqu’ici d’ailleurs…

Revenons donc à Hermano. Peux-tu nous résumer les raisons qui t’ont poussé à choisir spécifiquement chacun des musiciens du groupe ?

Bon sang, mec, comment aurais-je pu envisager de ne PAS prendre quelqu’un comme Steve Earle, pour commencer ? Steve Earle fait partie de ces batteurs qui peuvent jouer n’importe quoi, de tous les genres : il a une sorte de sens inné du rythme, tu vois ce que je veux dire ? Et bénéficier d’une section rythmique comme cela, pour quelqu’un comme moi, c’est extraordinaire – je n’ai même pas envisagé d’autre option… Quant à ce putain de cinglé de Dave Angstrom, il est… Et bien, je manque de mots ! Il n’est pas seulement l’un des tous meilleurs guitaristes que j’aie entendus de toute ma vie, mais en plus de cela, pouvoir jouer à ses cotés, voir l’esprit qu’il apporte au rock’n’roll, et la façon qu’il a de le transcender tous les soirs sur scène… Je trouve cela incroyable. En ce qui concerne John Garcia, et bien… Tu sais ce que c’est, je n’ai pas besoin de dire quoi que ce soit sur John Garcia, il est ce qu’il est… Il est phénoménal, tu vois ce que je veux dire…

 

Justement, sur quelle base as-tu établi ton choix pour John ? Je sais que tu as produit l’album de Supafuzz sur lequel il a enregistré des backing vocals… Est-ce plutôt à cause de ces enregistrements, ou bien de son travail dans Kyuss ?

Je suis venu à Kyuss sur le tard, en fait, un peu à la traîne… J’ai produit un album de Supafuzz, en 1996 je crois, et c’est à cette époque que j’ai entendu Kyuss pour la première fois. Je ne les connaissais pas du temps de l’existence du groupe. John avait enregistré des voix pour l’album de Supafuzz, mais je n’avais pas eu l’occasion de le rencontrer. J’avais simplement entendu sa voix sur les parties de guitare de Dave Angstrom en fait, ce qui me permettait finalement d’avoir déjà un bon point de vue du rendu de leur collaboration : il fallait absolument les réunir à nouveau sur disque ! Donc, lorsque je me suis retrouvé avec tous ces riffs pour Hermano et qu’il a fallu penser aux musiciens à choisir, j’avais déjà ce choix à l’esprit.

Comment ressens-tu le fait que pour beaucoup, Hermano soit ‘le nouveau groupe de John Garcia’ ?

Génial, mec, je trouve ça génial… John Garcia est vraiment extraordinaire…

D’accord, mais c’est pourtant loin d’être ‘son’ groupe…

Je m’en contrefous, mec ! Je n’ai pas envie de penser en ces termes, je ne veux pas jouer à ce jeu-là, tu vois ce que je veux dire ? Je suis juste là pour faire de la musique… Kyuss est génial, John Garcia transforme tout ce qu’il touche en or, alors… Je pense au contraire que c’est un honneur extraordinaire d’être associé à quelqu’un d’aussi grand que John Garcia. Et de toute façon, nous savons tous ce qu’il en est réellement, nous savons à quel point chacun dans le groupe a contribué à apporter à l’album… Il n’y a pas de vrai ‘leader’, ce serait comme laisser quelqu’un contrôler ta vie, tu vois ce que je veux dire ? Qui voudrait cela ?

 

Qu’est-ce que tu ressens à la vue de cet album, qui sort enfin dans les bacs après toutes ces années ?

Je me sens euphorique… ‘Euphorique’, c’est le seul mot qui me vient à l’esprit. Ca fait 4 ans…

Dave Angstrom : Putain, mais de quoi vous êtes en train de parler ?! [ndlr : on vous épargne la version déjantée de plusieurs minutes de l’historique d’Hermano par Angstrom, dans laquelle Gene Simmons est en fait le vrai leader caché du groupe, ou encore John Garcia le chanteur d’un groupe de reprises du Grateful Dead…]

Hum… Alors, que penses-tu de la façon dont ‘Only A Suggestion’ a été reçu, des premiers échos que tu en as eus ?

Dandy Brown : Je trouve ça absolument incroyable, mec, vraiment hallucinant de voir des gens qui s’intéressent autant à cet album. Jamais de ma vie je n’aurais pu imaginer que les gens seraient aussi excités à propos de ce disque, un disque qui a longtemps représenté une sorte d’Arlésienne pour tout le monde… A un certain moment j’en étais même arrivé à penser que je ne referai plus jamais de musique ! Je pensais, après ces années passées dans mon studio d’enregistrement, au début des années 90, que je ne me lancerai plus jamais dans ce genre d’aventure, j’étais un peu blasé par tout ce milieu, j’imagine… Mais la réaction des gens a été si amicale et chaleureuse, que je n’en crois toujours pas mes yeux, c’est tout simplement hallucinant…

Il y a donc eu une période où tu en es arrivé à penser à tout arrêter ?

Oui, mais je savais quand même au fond de moi que le disque sortirait. Je savais qu’il finirait bien par sortir, je connaissais les limites du contrat, je savais à partir de quelle date il pouvait sortir. Le plus frustrant à mon avis, c’est lorsque les gens qui ‘contrôlent les contrats’ te disent un jour : ‘OK, on y va, sortons-le’. Mais par la suite, ils te disent : ‘Non, oublie ce que je viens de dire, on ne veut plus le sortir’. Et c’est arrivé plusieurs fois, et dans ce cas tu es fou de rage : ‘Non mais, bande de connards, vous venez de me dire qu’on allait le sortir, et maintenant vous me dites que si on le sort vous allez nous coller un procès aux fesses, et que vous allez coller un procès à Frank Kozic de Man’s Ruin Records ?!’… Je fais de mon mieux pour ne plus trop parler de toute cette merde, je me dis que ces personnes se façonnent leur propre Karma, tu vois ce que je veux dire ? Finalement le disque sort, et on dirait presque qu’ils nous ont aidé, en un sens, et pour ça je leur serai presque reconnaissant, parce qu’ils ont sans le vouloir créé un grand bouche à oreille pour ce disque, les gens étaient impatients de l’entendre… Ils ont voulu jouer à un petit jeu avec nous, et au final, c’est quand même nous qui avons gagné ! On est remontés au score dans les dernières secondes de jeu et on a gagné la partie, c’est superbe ! Quant à l’album, il a toujours autant d’énergie, autant de cœur, il a gardé tout ce qu’il avait déjà en 1998 lorsque tout a commencé…

 

Comment se déroule la tournée jusqu’ici ?

Cette tournée est absolument phénoménale… C’est phénoménal d’avoir l’accueil que l’on reçoit, de recevoir toutes ces bonnes ‘ondes’ que l’on reçoit de la part du public chaque soir. Je suis déjà venu en Europe plusieurs fois, et j’ai déjà assisté à de nombreux concerts en Europe. J’y ai vu des concerts où les gens avaient des visages rigides, inexpressifs, durant tout le concert… Tandis que sur cette tournée, je regarde le public tous les soirs et je vois des sourires, je vois les gens qui réagissent, qui applaudissent ; et pourtant, ça reste du hard rock, tu vois ce que je veux dire ? Le fait est que ces ondes que l’on reçoit, et les ondes que l’on transmet, font que les gens ressentent le bonheur que l’on ressent – et je pense que c’est ce qu’il y a de plus cool sur cette tournée. Le plus incroyable, c’est bien ça, en fait : c’est aussi génial pour le public que ça l’est pour nous, et je pense que l’on se ‘rencontre’ quelque part au milieu de tout ça… C’est cette connexion quelque part qui est aussi fantastique, totalement inimaginable, et ça me rend ivre de bonheur, parce que je n’aurais jamais imaginé de toute ma vie que cela puisse atteindre une telle intensité…

Pourquoi avoir choisi de commencer cette tournée en Europe, on peut imaginer que cela aurait été plus facile pour vous de commencer par les Etats Unis ?

Je ne peux pas vraiment te répondre, mec… Dès lors que l’album a été prêt à sortir, Tony de Tee Pee Records m’a appelé et m’a dit : ‘Vous devriez faire une tournée en Europe, je peux vous organiser quelques concerts si vous le voulez, il vous suffit de le décider’. Nous avions déjà parlé entre nous d’une tournée en Amérique avant cela, mais les gars y ont réfléchi et ont finalement dit : ‘Allons en Europe, mec ! Je n’ai encore jamais été en Europe, je pense être prêt pour cette expérience !’… Nous allons tourner aux Etats-Unis, tu sais, il y a très certainement des gens là-bas qui voudraient assister à un bon concert, et nous avons vraiment envie de jouer pour eux. Je pense que ça sera en novembre, nous pensons faire cinq ou six concerts là-bas. Nous prévoyons ensuite d’enregistrer le prochain album, puis de revenir ici l’été prochain, j’espère…

Peux-tu nous expliquer pourquoi Mike Callahan, qui a enregistré l’album, n’est pas en tournée avec vous ?

Mike a des engagements, il joue avec son nouveau groupe, Earshot, à l’heure actuelle, et il était vraiment déçu de rater cette tournée à cause de ses obligations. C’est quelqu’un de totalement intègre, toutefois, et il se devait de remplir ses engagements avec eux. De toute façon, tout le monde dans le groupe sait pertinemment que Mike jouera à nouveau dans Hermano. En fait, ce sera sans doute le cas pas plus tard qu’en novembre prochain, avec la tournée que nous ferons aux Etats-Unis, puis l’enregistrement de l’album en décembre.

Qui est Eric Belt, son remplaçant, et comment l’as-tu choisi ?

Eric est un excellent guitariste, et partager la scène avec lui sur cette tournée est un réel plaisir, je suis content qu’il ait pu remplacer Mike. J’ai entendu le jeu d’Eric sur des démos de Supafuzz, et c’est un excellent choix, he simply rocks ! Nous avions par ailleurs déjà joué quelques concerts avec Country Mark Engel dans le Midwest des Etats-Unis il y a quelques années, et la décision a été vraiment difficile à prendre, de choisir entre lui et Eric. Mais Eric et Dave Angstrom jouent ensemble depuis un moment au sein de Supafuzz, et il y avait déjà une certaine alchimie entre eux… De plus, Eric et Dave vivent tous deux à Atlanta, et ça a rendu les répétitions pour la tournée plus faciles… Eric et Country Mark sont tous deux excellents. C’est finalement une question de logistique qui les a départagés, sincèrement…

As-tu craint à un certain moment que la ‘magie’ propre au groupe ne serait plus la même sans Mike ?

Oh, bien sûr, j’ai eu beaucoup de réserve sur le fait de ne pas avoir Mike au sein du groupe, car il fait partie du cœur et de l’âme d’Hermano ! Mais d’un autre coté, je ne pouvais pas trouver quelqu’un de meilleur qu’Eric pour nous accompagner en tournée… Eric fait preuve d’autant d’intégrité dans son jeu que tous les musiciens que j’ai pu connaître.

 

Peux-tu me dire deux mots sur Spoiler, le groupe qui partage l’affiche avec vous sur cette tournée ?

Je trouve que Spoiler est un super groupe, je pense qu’ils feront une grande carrière. C’est un excellent groupe de rock, ils ont vraiment apporté beaucoup à cette tournée. Ce sont les mecs les plus sympas du monde, ils sont aussi chaleureux que les membres d’Hermano, l’entente a donc été immédiate entre les deux groupes. C’est une chose de plus en plus difficile à trouver de nos jours, des gens qui ont une certaine dignité, qui n’essaient pas à tout prix d’attirer l’attention à eux en offensant d’autres personnes toutes les deux secondes, tu vois ce que je veux dire ? Ils ont par ailleurs un sacré sens de l’humour, c’est vraiment génial d’être en tournée avec Spoiler… C’est un excellent, excellent groupe de rock and roll, et tout le monde devrait aller acheter leur album sur le champ !

Quels sont tes plans pour les mois à venir ?

J’ai des choses prévues pour Hermano, bien sûr… En fait, nous sommes en train de discuter un peu du prochain album, que nous prévoyons d’enregistrer en décembre. Je pense qu’il y aura quelques autres surprises sur le prochain album. Le fait de vivre en Floride, de vivre en bord de mer en Floride, de voir la culture là-bas, la région dans laquelle je vis, je pense que tout cela se fera ressentir dans la direction que prendront les prochaines compositions d’Hermano, ou bien le prochain album d’Orquesta Del Desierto, ou même le prochain disque que je produirai pour quelqu’un. Ne t’inquiète pas, je ne prévois pas de m’éloigner trop de la tendance ‘hard rock’ d’Hermano… Je pense simplement que les gens qui l’entendront lorsqu’il sera fini pourront ressentir l’influence de mon nouvel environnement et des nouvelles choses dans ma vie.

Pour résumer tout cela, que dirais-tu à nos lecteurs qui pourrait leur donner envie de se précipiter chez leur disquaire afin de se procurer ‘Only A Suggestion’ ?

Et bien je pense que si vous aimez le rock, si vous aimez le heavy blues, si vous aimez le hard rock, et si vous aimez que l’on ajoute un peu de piquant à tout cela, alors vous aimerez très certainement ‘Only A Suggestion’, ainsi que le prochain album d’Hermano !

août 2002 par Laurent.

SOLARIZED – mai 2002

Solarized a sorti il y a quelques mois “Driven”, un album rutilant, rock, metal, 70’s, 80’s, 90’s, tout ça en même temps, une vraie rondelle de bonheur en plastique qu’il vous faut vous procurer de toute urgence. En attendant, entretien avec leur leader Jim Hogan …

 

Peux-tu nous présenter rapidement Solarized et nous dire un peu comment, des cendres de Daisycutter, est né le groupe…

Jim Hogan (chant, guitare) : Le groupe est composé de moi, de Regina Satana (batterie), Dave Topolenski (guitare) et Mike Fiore (basse). Reg et moi jouions effectivement dans Daisycutter auparavant. C’était une sorte de cirque un peu dingue, quarante minutes d’un spectacle, qui ressemblait à une sorte de Famille Addams, baigné de lumières stroboscopiques malsaines. C’était une sorte de heavy noise rock brutal, mais il y avait un côté psychédélique étrange. Pur chaos.

En quoi Solarized est différent de Daisycutter ?

Solarized est une réinvention. L’arrêt quasi radical de Daisycutter était inéluctable, nous avions besoin de changer musicalement pour nous adapter à des mélodies vocales ; Daisycutter n’était tout simplement pas fait pour ça. Je pense que la mélodie, surtout par le chant, peut capturer une plus grande variété d’émotions en s’appuyant sur une base plus traditionnelle, et les méthodes les plus traditionnelles sont basées sur le blues. Ceci, mélangé à l’air du temps, est la raison pour laquelle on nous qualifie de “stoner rock”. D’ici quelques années ils appelleront cela différemment. C’est toujours comme ça que ça se passe !

 

Votre premier album, ” Neanderthal Speedway”, est sorti chez Man’s Ruin Records ; comment avez-vous vécu la faillite de ce label mythique ?

En fait notre nouvel album “Driven” devait lui aussi sortir chez Man’s Ruin. Ils avaient une assez longue liste d’attente d’albums à sortir, et nous-mêmes nous essayions à l’époque de sortir l’album au plus vite, donc Meteorcity a débarqué et s’est accommodé de notre planning. La banqueroute de Man’s Ruin fut triste, mais ce n’était pas une surprise. Moi-même je dirigeais un label indépendant durant les 80’s et début des 90’s, et je sais trop bien à quel point les contrats de production et de distribution peuvent parfois te mener directement au cimetière. Je le savais par expérience. Le label grandissait, mais leur distribution était faible. Ils cherchaient un meilleur distributeur et ont pensé l’avoir trouvé. Mais apparemment ils n’étaient pas payés, et recevaient plus de retours que prévus. Rajoute à ça les frais de fonctionnement, ils ne pouvaient pas survivre. Je sais pourtant que le propriétaire du label, Frank Kozik, donnait des milliers de dollars de son argent personnel pour payer les frais et les salaires. Mais il est arrivé un jour où il a été obligé de dire stop. C’est vraiment triste. C’était un super label, mené par des individus passionnés.

Comment s’est fait le contact avec Meteorcity après cet épisode ?

Nous avions déjà travaillé avec eux sur le split CD Solarized / Solace appelé “Jersey Devils”. Il s’agit d’ailleurs du CD qui a lancé le ‘buzz’ autour de Solarized à l’époque… Sans l’enthousiasme de Meteorcity envers notre première démo, jamais notre album “Neanderthal Speedway” n’aurait eu un si bon accueil. C’était l’étincelle qui a fait démarrer le feu autour de l’album, et dès lors, quant il fut temps de choisir un label pour distribuer ‘Driven’, Meteorcity était le meilleur choix possible, sans l’ombre d’un doute.

Tu es satisfait de leur travail jusqu’ici ?

Ouais. Jadd Shickler dirige un super label. Meteorcity a considérablement grandi depuis notre première collaboration, mais il reste juste assez petit pour encore donner à chaque groupe l’attention qu’il mérite. Il a une campagne de promotion solide au travers de Earsplit, et a tout fait pour assurer à ” Driven” une sortie en Europe à travers People Like You Records et Century Media. Toutes ces choses sont importantes et nous font aller de l’avant.

 

Vous travaillez beaucoup sur votre site web, y voyez-vous un bon outil de promotion ?

En fait, c’est bien plus qu’un simple outil de marketing. C’est quelque chose qui personnellement me passionne. C’est comme créer une chanson ou un album : un travail créatif. Evidemment, c’est aussi une manière de nous faire connaître, mais c’est bel et bien une entité à part. C’est probablement à ce jour l’un des plus grands sites web sur un groupe de rock. Il y a les rubriques habituelles sur le groupe, des petits trucs plus personnels sur nous, des jeux vidéos, et des milliers de liens vraiment bizarres. C’est plutôt une sorte de complexe de loisirs de la sous-culture moderne, quelque chose comme ça. En tout cas vraiment pas le site web typique d’un groupe de rock.

Vous êtes du New Jersey, et hormis Bon Jovi, aucun groupe de vrai rock de ce coin ne me vient à l’esprit… OK, je retire Bon Jovi, il y a aussi Monster Magnet, mais sérieusement, comment est la scène rock du New Jersey ?

Tu sais comme moi que le point de vue mainstream n’a jamais été une représentation correcte de n’importe quel style. Penser à l’héritage musical du New Jersey en ne pensant qu’à Bon Jovi ou Bruce Springsteen c’est donc faire abstraction de tout le reste. Ce sont pour nous des artistes pop. Bon Jovi est si mielleux et acidulé qu’il filerait du diabète à quelqu’un en parfaite santé ! On ne peut pas le considérer comme un groupe de ‘rock’ ; comment le pourrait-on en sachant que son public est constitué de fillettes de dix ans ?! Bien sûr, il y a plein de groupes ici qui font du vrai rock. Atomic Bitchwax, Lord Sterling, Solace, Core, Shovelhead, Halfway To Gone, Six Sigma… Ils apportent tous quelque chose à cette scène de vrai rock heavy. Prends l’album ” Scene Killer” par exemple, il s’agit d’un collectif de membres de plusieurs groupes, parmi les meilleurs de la région, tous genres confondus. Et tout fonctionne parfaitement bien ensemble, ça jamme, les genres se mélangent, et l’on obtient une sorte de chaos d’un genre inédit. J’ai entendu dire que cet album devrait sortir en Europe, essaye de mettre la main dessus, il déménage !

Il est évident que vous baignez dans cette sorte de ‘pop’ culture américaine des années septante et quatre-vingts, que ce soit au niveau des films, séries TV, etc… A quel niveau cela vous influence-t-il en tant que groupe ?

Effectivement, c’est une réelle influence, mais ce n’est pas tant la “culture populaire” qui nous intrigue, que l’underground et la culture “anti-pop” surtout. Tout ce qui n’a jamais vraiment explosé au grand jour niveau popularité, mais qui était si loin du mainstream qu’il a acquis un public dévoué et un statut culte. C’est la culture déviante, socialement atypique qui nous nourrit. J’ai toujours considéré Solarized comme une sorte de film de série B. Si l’on me donnait le choix entre regarder un grand classique qui a remporté plein d’Oscars et un bon vieux film de kung-fu des années septante au budget minuscule, je prends le film de kung-fu sans hésitation.

Est-ce que cette influence se retrouve aussi dans vos paroles ?

Je pense que oui, au niveau des paroles, ça doit se sentir à un niveau ou à un autre, même si ce n’est qu’au niveau de la suggestion, mais en tous les cas ce n’est pas une volonté consciente, quelque chose que l’on recherche. Quel que soit le genre de parolier que je suis, mes influences se révèlent sans aucun doute inconsciemment ici ou là dans mes paroles, j’en suis persuadé… Je pense que tout artiste met un peu de lui-même dans tout ce qu’il crée.

 

D’où tirez-vous vos influences musicales ?

Nous pourrions te citer des milliers de groupes dans des milliers de genres, mais cela semblerait n’avoir vraiment aucun sens à quiconque a entendu notre musique. S’ils pensent Black Sabbath ou Blue Cheer, nous pensons probablement Black Flag et Killdozer. Nous ne nous attendons vraiment pas à ce que quiconque comprenne nos influences. De toute façon, la plupart sont assez obscures… On s’estime heureux que tant de personnes apprécient ce que nous faisons. Parfois il faut s’en contenter, ne pas aller chercher plus loin. Le meilleur compliment que l’on m’ait fait jusqu’ici a été lorsque l’on a comparé Solarized au Motörhead de la période “boogie-rock” de la fin des 70’s. Pour moi, il ne peut tout simplement pas exister de plus grand compliment.

Justement, en ce début de 21ème siècle, comment définirais-tu ta musique ?

Kick ass rock’n’roll sans compromis. Une éthique punk rock. On se moque des gros contrats de maisons de disques, ou bien des rêves de rock stars au rabais. Trop de groupes tombent dans ce piège. Dès lors qu’un groupe devient saturé et trop exposé, comme ce fut le cas avec le grunge, il semble que les groupes jugent nécessaire de dénoncer toutes les choses qui faisaient que les gens ont commencé à les aimer ! Il y a un besoin constant d’être accepté en tant que groupe “cool”, ce qui, comme tout le monde sait, dépend uniquement de la dernière mode. Le problème est qu’il semble être embarrassant de faire partie d’un groupe de rock… Pas pour nous. Peu m’importe comment on appelle le genre, ou quelle est la mode du moment. Tout cela n’a aucune importance pour nous. Solarized est un groupe de rock. En ce qui concerne la musique, tout ce que l’on fait c’est brancher nos instruments et vous faire tomber sur le cul, et tu ne nous verras jamais, jamais nous excuser pour ça. C’est un peu une idéologie de casse-cou, mais ça fonctionne bien en ce qui nous concerne.

 

Je serais curieux de savoir qui joue les parties de guitare solo dans l’album, car on a parfois l’impression que la guitare lead apparaît lorsque le chant s’arrête, et donc joue le rôle d’une sorte de second chanteur… Je sais, ça a l’air bizarre…

Non, ce n’est pas du tout bizarre. La guitare lead et le chant doivent tous deux porter une sorte de mélodie. Dave et moi nous partageons les soli, nous n’avons pas à proprement parler de guitariste solo. On regarde simplement lequel de nous deux a un style qui servira le mieux tel ou tel riff sur lequel le solo intervient, on choisit simplement ce qui sonne le mieux. Ce sont vraiment les chansons elles-mêmes qui définissent tous ces choix.

Quels sont vos plans pour les mois à venir ? Une tournée européenne en vue ?

Un jour ou l’autre, je suis à peu près certain que nous traverserons l’océan, mais pas pour cet album. Suite à notre précédente tournée, des disputes internes ont failli détruire le groupe. Nous étions victimes des prises de bec habituelles au milieu musical. Il semble que ce soit dans la nature intrinsèque de tout groupe de rock de se battre et de travailler comme des malades, et d’imploser dès que l’on atteint enfin un niveau supérieur. Cela a failli nous arriver. Bref, nous avons dû remplacer certains membres du groupe et prendre le temps de nous “retrouver”. Nous avons perdu beaucoup de temps et beaucoup d’opportunités, mais nous avons survécu. Actuellement nous sommes en train de composer un nouvel album, et d’essayer de solidifier ce nouveau line up en tant que force créatrice. Nous devons des chansons à certains labels, alors nous essayons d’honorer ces contrats avant que le paysage musical ne se modifie encore.

Que dirais-tu à quelqu’un qui n’a jamais entendu parler de Solarized pour l’inciter à écouter votre album ?

Si tu cherches un bon album de rock déjanté pour pousser le volume à fond et faire chier tes voisins, alors tu devrais sérieusement envisager de dépenser ton argent si durement gagné en achetant “Driven” !

mai 2002 par Laurent.

HONCHO – mai 2002

Honcho a beau évoluer en terrain connu et balisé (le gros rock heavy stoner metal qui tache made in Scandinavie), les cinq Norvégiens tirent leur épingle du jeu grâce à leur talent, leur attitude, et leur originalité… Ils méritent clairement d’être connus et écoutés, donnez-leur une chance, vous ne le regretterez pas. Donnons la parole à Trond, leur sympathique chanteur, pour défendre leur excellent album “Corporate Rock”. Rock’n’roll !!!

 

Quelle est l’histoire du groupe ?

Fin 1999, Steinar (basse), Kenneth (batterie) et Trond (moi, chant) avons commencé à jouer ensemble et à composer des chansons. On avait un seul guitariste à l’époque (Mathias), qui a décidé de nous quitter, ce qui nous a forcé à recruter non pas un, mais deux nouveaux guitaristes, ce qui ajoute plus de puissance aux chansons. Après notamment un EP (‘Evil Women’), et quelques apparitions sur des compils, nous avons finalement eu la possibilité d’enregistrer notre premier album, ‘Corporate Rock’, en mai 2001, grâce entre autres à notre producteur Hugo Alvarstein. A noter que cet album est entièrement auto-produit et qu’il ne nous a coûté en gros qu’environ $3000 [ndlr : une aberration au vu du son énorme de la rondelle].

Et quid du sujet qui fâche : la main mise totale de la Scandinavie ces trois dernières années sur le ROCK, ça s’explique comment ?

Une seule raison à ça : les Vikings ! Surtout lorsqu’il s’agit de hard and fast rock’n’roll ! Il nous reste probablement un peu de leur sang dans les veines, et cela s’entend dans le son scandinave et aussi notre manière de penser (rires). Une autre explication peut être que finalement, après des années de vie dans les ténèbres et cachés du reste du monde, nous avons finalement réussi à franchir un pas et à dépasser l’étroitesse d’esprit typiquement scandinave. Un développement logique, finalement…

 

Dans le même sujet, des sonorités proches de groupes de compatriotes comme Sparzanza ou The Awesome Machine sont perceptibles sur ‘Corporate Rock’.

Ce n’est pas la première fois que l’on nous parle de The Awesome Machine, je pense personnellement que cela vient surtout du chant, notamment en ce qui concerne les montées en puissance sur certaines chansons. Mais je trouve que Honcho a notamment un côté blues plus marqué. En tout cas il s’agit de l’un de nos objectifs : faire du pur rawknroll qui groove et qui file le blues. Je pense que c’est une bonne manière de définir notre musique. En ce qui concerne Sparzanza, on a déjà joué quelques fois avec eux, et on s’entend vraiment super bien, des mecs super et d’excellents musiciens (si Johan et Calle de Sparzanza lisent ça, dis-leur que l’on m’a payé pour le dire…).

C’est cela, oui… Tandis que les traditionnelles influences seventies se font clairement entendre, on distingue aussi des sonorités très modernes sur cet album.

Bien entendu, nous avons été influencés par des artistes comme Deep Purple, Black Sabbath, Led Zeppelin, Jimi Hendrix, Thin Lizzy, les premiers Iron Maiden, Free, Cream, Kyuss ou Soundgarden. En ce qui me concerne, mon préféré est Soundgarden, je trouve que Chris Cornell est le meilleur chanteur qui existe (Dieu le bénisse, et pourvu qu’il reste parmi nous encore longtemps). L’émotion est une inspiration, aussi… Lorsque je m’assois, le soir, pour écrire des paroles, je recherche une sorte d’infini. Ecrire des paroles peut paraître facile à certains, mais en ce qui me concerne, je dois travailler des mois sur certaines paroles, et même des années, afin qu’elles sonnent enfin comme je le souhaite. Les sujets que j’aborde sont très variables, cela peut traiter de thèmes très généralistes, comme la misère, l’individu contre le monde, les femmes, ou même Dieu ou Jésus. Parfois il fait vraiment des trucs tordus… (Je vais sans doute recevoir des messages d’insultes de la part des conservateurs maintenant ! Hahaha) Parfois j’essaye aussi d’incorporer un message à mes paroles, sur comment vivre sa vie, ou bien comment le monde peut être dingue parfois…

 

Tout un programme… Daigneront-ils venir nous voir et jouer quelques concerts dans le coin ?

Nous avons joué quelques concerts après la sortie de l’album. Nous essayons en ce moment même de mettre en place une tournée européenne, et si ça fonctionne, la France sera évidemment l’un des premiers endroits que nous visiterons, comme la Suisse. Nous sommes aussi en ce moment en train de travailler sur un clip vidéo, tout est prêt, il ne nous manque que l’argent…

Bien sympathique tout cela, mais dans ses rêves, si Honcho pouvait faire partie d’une affiche imaginaire idéale, avec qui jouerait-il ?

Mmmh, je dirais Japan et Led Zeppelin, ça serait énorme ! La même chose avec Soundgarden, dommage qu’ils se soient séparés. Ou même Elvis… Imagine le King avec un bon paquet de FUZZ (rires) ! Enfin, bref, la liste est trop longue de toute façon…

Allez, hop, un dernier mot avant la sentence…

Que vous soyez un mec ou une fille, une lesbienne, un hétéro, grand-père ou bébé capricieux, une seule minute de ‘Corporate Rock’ vous fera pousser des poils sur la paume des mains et dans le dos ! Le rawk va tout renverser, et fera sombrer Britney-chewing-gum ! Viva la rawk !

Amen ! La messe est dite !

 

mai 2002 par Laurent.

ROLLERBALL – mai 2002

AC/DC, Rose Tattoo, … Silverchair… Hum, les grands groupes australiens sont rares. Et si le prochain était Rollerball ? Un outsider, un vrai, plus que prometteur, et en tout cas plus que méritant… Interview de Dave Talon, leur guitariste, à l’occasion de la sortie de leur album “Rollerball” (en fait une sorte de compilation d’inédits, raretés et mini-albums du groupe) sur le label WaterDragon…

 

Une petite présentation du groupe pour se chauffer ?

Nous sommes quatre (moi, Ten Pin Boland au chant, Cracker Roach à la batterie et Guv McLaughlin à la basse), nous avons formé le groupe en 1998 dans l’état du Queensland en Australie. Bon, ben c’est la base de tout, inutile de détailler, le reste est ennuyeux (rires).

Comment expliques-tu que le groupe soit encore si peu connu jusqu’ici ?

Rollerball ne bénéficie pas de la moindre promotion ailleurs qu’en Australie. Nous avons vendu à peine quelques disques aux USA (surtout par des magasins en ligne comme Meteorcity). Le magazine online allemand DareDevil a sorti un morceau de nous sur une compil’ il y a quelques années, et on a sorti un EP disponible en import ici ou là en Europe. Water Dragon est le premier label européen à sortir un de nos albums, et nous sommes très contents de leurs efforts pour promouvoir notre musique sur ce continent. Nous sommes persuadés que l’Europe est le meilleur endroit pour notre genre de rock.

 

Comment trouves-tu la scène australienne actuelle ?

La scène rock est au-dessus de la moyenne, mais avec une population si faible et de si grandes distances entre les villes, il est difficile de gagner sa vie, et organiser des tournées coûte vraiment très cher, avec des voyages en van très longs : nous avons déjà joué des concerts pour lesquels il nous a fallu conduire dix heures, jouer, reprendre la route pour douze heures, jouer à nouveau, boire, dormir, et rentrer après dix autres heures de route… Pas facile… Sinon, il y a d’autres bons groupes sur notre label australien, Giants Of Science et Forte sont vraiment très bons, je te conseille d’essayer de les découvrir.

J’ai personnellement été particulièrement impressionné par la profondeur du son sur votre album, la quantité de sonorités…

Ouais, il y a résolument plein de facettes dans le son de Rollerball ! Je ne connais rien de pire que sortir un CD sur lequel toutes les chansons sonnent de la même manière. Bien entendu, tu as toujours besoin d’avoir une base, quelque chose en commun à toutes les chansons, mais une variété de rythmes est déjà un bon début pour rendre un album plus intéressant. Les membres du groupe adorent plein de groupes différents. Surtout du rock australien d’ailleurs. AC/DC sont très importants (ils savent rester sur une même idée, la diluer et la garder toujours excitante). Les Easy Beats, Rose Tattoo, Stevie Wright, ainsi que plein d’albums du monde entier : Sabbath, Deep Purple, ZZ Top, Budgie, Scorpions, Blue Oyster Cult, Rush… je pourrais continuer pendant des heures (rires) ! Il y a aussi des groupes plus récents : Fu Manchu, Kyuss, Monster Magnet, etc…

 

De quoi parlent vos paroles ?

Nos chansons ne sont pas vraiment des chansons très explicites, faciles à comprendre, pas vraiment non plus des chansons d’amour ou des histoires de cul (ce qui semble être à la mode). Toutes les paroles sont écrites par notre chanteur Ten Pin. Ses messages sont cryptés, ils viennent du plus profond de son esprit… ses paroles font le voyage des lointaines contrées spatiales, et atterrissent directement dans notre local de répétitions ! Tout est possible… L’esprit humain examiné sous tous les angles imaginables, ainsi que les relations entre êtres humains – mais pas seulement des garçons et des filles en train de baiser (rires) !

Quels sont vos plans maintenant que votre album est sorti ?

Nous allons à nouveau rentrer en studio sous peu pour enregistrer un nouvel album. Ensuite nous ferons quelques concerts en Australie, puis avec un peu de chance quelques festivals d’été en Europe. On adorerait venir en Europe ! On le ferait tout de suite si possible, mais c’est un gros investissement pour nous et il faudrait que nous vendions quelques disques… Nous avons eu des propositions de gros labels, mais ce n’étaient pas des contrats honnêtes. Nous avons besoin d’un minimum de liberté, mais d’un autre coté, nous avons besoin de moyens financiers pour faire connaître notre musique… Heureusement, des articles comme celui-ci nous aident beaucoup dans ce sens… Merci !

 

mai 2002 par Laurent.

AWESOME MACHINE – février 2002

Encore un groupe en provenance des nordiques et prolifiques contrées suédoises, The Awesome Machine est un quatuor encore peu (re)connu, et pourtant au potentiel énorme. Compositeurs et musiciens émérites, ils se démarquent d’un traditionnel stoner rock auquel ils ont trop souvent été affiliés en le distillant avec des sonorités inédites, un son incroyable et une puissance étourdissante. A l’occasion de la sortie de “Under the influence”, discussion avec le sympathique Tobbe… Laissez-vous bercer par cette incroyable machine !

 

Pourrais-tu te présenter et présenter brièvement le groupe ?

Tobbe : Je m’appelle Tobbe Bovik, je suis le batteur de la machine… Le groupe existe depuis quatre ans, nous avons changé de bassiste et de batteur une fois, et le groupe est constitué de Anders à la basse, Christian à la guitare, Lasse au chant, et moi-même. Nous avons signé un contrat avec le label People Like You (ndlr : le vrai nom du label est ‘I used to fuck people like you in prison’ records…) en 1999 et avons sorti notre premier album ‘… It’s Ugly Or Nothing’ au printemps 2000. Nous avions auparavant auto-produit et sorti un 10″. Nous avons fait une grosse tournée en compagnie de Karma To Burn en décembre 2000, passant en Allemagne, Hollande, France, Belgique… C’était génial ! Il me tarde tant la prochaine tournée… En rentrant chez nous, nous avons immédiatement commencé à composer de nouvelles chansons pour l’album “Under The Influence” qui vient de sortir… Voilà, c’est là qu’on en est aujourd’hui ! J’imagine…

Je me suis toujours demandé d’où venait cet étrange nom de groupe…

Oh c’est une histoire marrante en fait… Les fondateurs du groupe (Christian et Stefan le premier bassiste) voulaient un nom de groupe en trois mots et voulaient avoir “The” dedans car tous les groupes les plus cools des sixties avaient “The” dans leur nom. Stefan trouvait que “Machine”était un mot plutôt cool, ils avaient donc “The Machine”. Puis un jour ils sont allés voir Kiss en concert, et en plein milieu du concert, Paul Stanley a crié au public “You’re AWESOME !” (“Vous êtes incroyables !”). Christian et Stefan se sont alors regardés et se sont dit “Ça y est ! The Awesome Machine…” En conclusion, on doit un verre à Paul Stanley !

Tu ne faisais pas partie du groupe à ses débuts, dans quelles circonstances l’as-tu rejoint ?

J’ai joué dans plusieurs autres groupes depuis que j’ai commencé à jouer de la batterie (en 1986… Pfiou, je me fais vieux ! Hahaha !). Le groupe dans lequel je jouais avant The Awesome Machine s’appelait Feel, mais des problèmes personnels ont empêché le groupe de continuer. Christian a appelé chez moi un jour par hasard, et j’en ai profité pour lui dire de parler de moi si jamais il entendait parler d’un groupe qui cherchait un batteur. Le lendemain il m’a rappelé et m’a dit : “Hey ! J’ai un groupe pour toi ! Ça s’appelle The Awesome Machine !” Je lui ai répondu : “Hey, mais c’est ton groupe ?” – “Ouais je sais… On vire notre batteur.” J’ai écouté une démo de “God Damn Evil” (qui fait partie des chansons du dernier album d’ailleurs) et j’ai été sidéré par ce son de guitare si heavy ! Une semaine plus tard je rejoignais donc TAM, et à peine un an plus tard c’est le bassiste Stefan qui a décidé de partir pour terminer ses études… Alors j’ai appelé un vieux pote, Anders, avec qui j’avais joué dans mon premier groupe, et il a accepté de nous rejoindre. Et voilà !

 

J’ai été très impressionné par ton jeu de batterie sur des chansons comme “Desire” ou “One”, soit de par leur rapidité ou bien leur rythme particulier… Elles doivent être assez difficiles à jouer, est-ce un problème lorsqu’il s’agit de jouer ces chansons live ?

Merci ! Ouais, “Desire” est géniale… La rythmique est en 5/4 et se termine par une sorte de solo de batterie où mon pied droit frappe si fort que ma jambe me fait mal pendant des jours à chaque fois que je la joue ! En fait je ne sais pas si je la jouerai live, on est en train de la répéter ces jours-ci… Peut-être la jouerons-nous avec un arrangement différent, je ne sais pas. Ce n’est pas tant qu’elle soit difficile à jouer en fait ; c’est juste qu’elle est éreintante ! On a joué “One” live pour la première fois vendredi dernier lors de la “release party” de l’album et ça a très bien marché… Certaines chansons sont faites pour rester sur l’album et ne pas forcément être jouées en concert, d’autres sont faites pour jouer en public. Mais j’ai confiance en tous les membres du groupe, nous ne sommes peut-être pas les meilleurs musiciens du monde, mais nous travaillons vraiment bien ensemble et on sait comment ‘groover’ ensemble…

Est-ce que vous pensez à la façon dont les chansons vont ressortir en live lorsque vous composez ? Et est-ce que vous avez tendance à composer des passages plus faciles à jouer en concert, ou bien est-ce que vous préférez les passages plus délicats qui représentent plus de “challenge” ?

Eh bien… Un peu des deux en fait ! J’aime les défis justement, je pense que c’est le seul moyen de progresser, que cela soit à la batterie, à la guitare ou bien même au chant. Mais d’un autre coté, il est souvent préférable de garder certaines chansons aussi simples que possible, comme “God Damn Evil” par exemple : on pourrait gâcher le groove du morceau en improvisant des breaks de batterie ou autre, et il faut toujours garder en tête ce qui est bon pour la chanson. Mais j’essaye bien entendu de jouer les chansons le mieux possible en concert.

On remarque facilement que ton jeu de batterie est très subtil, très varié, et je me demandais quels batteurs avaient pu t’influencer dans cette voie ?

Oh j’ai été influencé par beaucoup de batteurs en quinze ans de pratique de la batterie… Mais ma principale influence, mon gourou en quelque sorte, c’est le regretté Mr. John Bonham des incroyables Led Zeppelin. Il savait vraiment comment frapper une batterie Ludwig pour la faire sonner au mieux… Il était incroyable. Il est vraiment mort trop tôt. Mais j’essaye de piocher des influences un peu partout. Il y a quelques années j’ai été estomaqué par le jeu de Brant Bjork (Kyuss). Et auparavant j’ai aussi beaucoup aimé Tommy Lee, Tommy Aldridge, Ian Paice.

Toujours en ce qui concerne les influences, ce qui est marquant dans la musique de The Awesome Machine c’est qu’on ne discerne pas un genre précis ou une influence majeure dans vos chansons, et là encore je serais curieux de connaître vos influences en tant que groupe ?

Wow, franchement je ne saurais trop dire… Je pense que ça vient des goûts différents de tous les membres du groupe. Regarde Lasse, par exemple, il est fan de Tool, Anders adore Thin Lizzy, Christian est dingue de Creedance Clearwater, tandis que moi j’écoute énormément de musique psychédélique des sixties… Notre son si particulier est aussi dû au fait que nous utilisons le même matériel tout le temps. Tant que tu nous laisses la possibilité de jouer sur notre matériel, tu peux être sûr que tu retrouveras le son TAM. Et puis notre inspiration pour composer est différente chaque jour, nous n’écrivons pas pour nous inscrire dans un genre… Le genre se crée tout seul à partir de la chanson au besoin !

Pour clore ce sujet des influences, peux-tu nous expliquer le titre de votre album, “Under The Influence” ?

Trouver un titre pour un album est toujours le plus difficile… Nous avions le choix parmi de nombreuses propositions de titres, et celui-ci provient d’Anders et nous trouvions qu’il sonnait bien. L’auditeur peut lui-même choisir le nom à placer à la fin de la phrase “Under The Influence” (“Sous l’influence”…) : nous pourrions tout aussi bien être sous l’influence d’une musique, de la vie, du sexe, de drogues (ce n’est pas vraiment le cas, mais si tu trouves que ça correspond à la chanson, alors pas de problème…), bref n’importe quoi… C’est très ouvert.

 

Que représente la pochette de l’album ?

C’est l’une des roues d’un tank de la seconde Guerre Mondiale… C’est une super photo qu’a prise mon ex-petite amie il y a quelques années, et lorsque je l’ai vue, je me suis immédiatement dit : “Wow, il faut absolument qu’on utilise cette photo !” J’ai ensuite trouvé cette photo de vitre cassée qui s’adaptait bien au concept, et que nous avons mise sur le CD lui-même. Nous voulions que l’auditeur/auditrice se sente après l’écoute de l’album comme s’il ou elle s’était fait(e) écraser par quelque chose d’aussi puissant qu’un tank ! C’est toute l’essence de The Awesome Machine…

Comment composez-vous, est-ce le fruit de jams ou bien composez-vous séparément ?

Très souvent ça vient de jams… On adoooore jammer ! On peut rester des heures dans une salle de répétition à jammer sur le même riff… et on enregistre tout. On a une sorte de magnétophone spécial qui nous permet d’enregistrer jusqu’à huit heures… d’affilée si on veut ! On en ressort ensuite les meilleures parties et on commence à développer la chanson. Nous formons d’abord la structure de la chanson, puis Lasse essaye d’y placer quelques paroles par- ci, par-là… Ensuite nous retirons les parties superflues pour descendre si possible sous les cinq minutes. Mais c’est généralement Christian ou Anders qui proposent les premières idées de riffs…

Il y a plusieurs invités spéciaux sur l’album, qui sont-ils et comment se sont-ils retrouvés impliqués dans l’album ?

Nous étions tous d’accord sur le fait que nous voulions des invités sur l’album. Nous avons donc commencé à appeler plein de musiciens dans différents groupes. Nous avons donc invité Ralph Gyllenhammar le chanteur de Mustasch, qui grogne sur ‘Emotion Water’ et fait des choeurs sur “God Damn Evil”. C’était génial ! Il est venu au studio après avoir descendu une bouteille de whisky à lui seul ! Il a trouvé un jouet dans le studio, une petite voiture en plastique, avec une aiguille dessous. En fait tu peux mettre la petite voiture sur un disque et écouter la musique en laissant la voiture rouler dessus en rond ! Bref, on avait mis le “Sergent Pepper” des Beatles comme ça par terre et Ralph est devenu complètement cinglé ! Il a failli se mettre à pleurer… Il n’arrêtait pas de dire : “C’est incroyable… putain c’est incroyable…”, et puis il est rentré dans la cabine d’enregistrement et a crié comme un malade. On a aussi invité Anders Iwers du groupe Tiamat qui joue un solo/duo de guitare avec Christian à la fin de “Kick”. On a été aussi super content d’avoir Jesper et Bjorn d’In Flames pour jouer un solo de guitare chacun à la fin de “Under The Veil”… Le truc le plus cool est que tous ces groupes sont de Gotheburg comme nous ! On adore ces groupes et nous avons toujours été amis, donc les choisir a été un processus très naturel en fait. Les mecs d’In Flames par exemple ont un type de jeu tout à fait différent du nôtre, ce qui rend l’album d’autant plus intéressant…

Vous avez produit l’album vous-mêmes, est-ce que vous n’avez jamais jugé utile d’avoir un point de vue extérieur lors de l’enregistrement ?

Eh bien, nous ne sommes pas parvenus à trouver un producteur disponible au moment d’enregistrer l’album. Nous avons donc pris la décision de le produire nous-mêmes, car nous savions vraiment très bien ce que nous voulions obtenir… Nous voulions enregistrer un album qui plaise non seulement aux fans de ‘stoner rock’, mais aussi et surtout aux gens qui aiment juste le bon gros rock’n’roll. À mon avis la présence d’un producteur n’aurait fait que retarder la sortie de l’album et aurait causé plus d’engueulades en studio ! Cela ne signifie pas que nous ne voulons plus jamais enregistrer avec un producteur, mais pour cette fois cela ne nous convenait tout simplement pas… Mais tu as raison, c’est toujours bon d’avoir l’opinion de quelqu’un d’extérieur au groupe, c’est important. Nous avons donc réalisé de nombreux mixes ‘tests’ afin de faire écouter à nos amis et recueillir leur opinion avant de réaliser le mixage final.

 

J’ai entendu dire que vous avez envisagé il y a quelques temps de ne pas inclure certains titres sur l’album de manière à ce que tout l’album puisse rentrer sur un vinyl 33 tours. Comment cela se fait-il ? Est-ce que le support vinyl est important pour vous ou bien est-ce une exigence de votre maison de disques ?

On adore le vinyl mec ! Nous sommes vraiment reconnaissants à notre maison de disques de sortir nos albums en vinyl… Lorsque l’album a été terminé, nous avions 54 minutes de musique, ce qui est trop pour un 33 tours. Nous avons donc commencé à réfléchir à quelles chansons nous pourrions mettre de coté. Mais nous n’arrivions pas à nous mettre d’accord, il restait donc une unique option : dire à notre maison de disques que nous voulions un double vinyl ! Quand nous avons proposé d’y rajouter notre premier 10″ en face 4, ils ont dit “OK, allons-y !”.

Est-il vrai que vous avez déjà composé et enregistré plusieurs nouveaux morceaux tandis que cet album n’était même pas encore sorti ? Vous vous ennuyez déjà ou quoi ?

(rires) On est vite frustré ! On a enregistré l’album en août, puis il ne sort qu’en février… Que faire entre temps ? Ecrire de nouvelles chansons ! Nous avons de nouvelles idées sans arrêt et nous avons la possibilité d’utiliser un petit studio pas trop cher dans la ville natale d’Anders, donc… Le résultat n’est pas parfait, mais ça sonne bien ! Et puis c’est bien d’avoir la possibilité d’enregistrer des chansons sitôt après les avoir composées, ça te donne immédiatement une idée de la manière dont elles vont ressortir sur album, la manière dont sonne tel riff de guitare ou tel break de batterie, si ça convient ou pas à la chanson. Nous avons déjà deux chansons prêtes et enregistrées, l’une apparaîtra sur un 7″ finlandais sur un label qui s’appelle World records, accompagnée d’un remix complètement différent d’une des chansons qui figure sur l’album.

Quels sont vos plans pour les mois à venir ? Il y a votre tournée avec les excellents Mushroom River Band, est-ce que vous prévoyez de venir en France et en Suisse avec eux ?

Avant cette tournée on va jouer autant que possible en Suède, chez nous, puis nous partons pour Londres le 24 avril. Je crois que la Suisse est prévue, je ne me rappelle plus ce qu’il en est pour la France… Mais on ne sait jamais, de nouvelles dates se rajoutent chaque jour ! Nous avons joué à Nancy au cours de notre dernière tournée, et c’était génial ! C’était au sous-sol d’un vieux petit bar, probablement la plus petite salle dans laquelle nous n’aillons jamais joué !

Et après cette tournée, que prévoyez-vous ? Une tournée américaine peut-être ? Ou bien déjà un nouvel album ?

Nous adorerions tourner aux Etats-Unis mais nous n’avons aucun plan dans ce sens pour le moment… Nous aimerions jouer dans quelques festivals ici en Suède et au Danemark. Puis il sera temps de composer et enregistrer un nouvel album, mais je ne pense pas qu’il sorte avant l’été 2003. Nous essayerons de sortir quelques 7″ et singles en attendant.

Pour conclure l’interview, que souhaiterais-tu dire à nos lecteurs ?

Achetez l’album, écoutez-le à fond sur votre chaîne hi-fi, ouvrez une bière et ressentez le groove !! On se voit en tournée très bientôt !

février 2002 par Laurent.

ORQUESTA DEL DESIERTO – février 2002

Il en a fallu peu pour piquer notre curiosité… La vague rumeur d’un projet qui traînait dans l’air, appelé “Desert Orchestra” à l’époque, regroupant quelques noms mythiques : Pete Stahl, Mario Lalli, Alfredo Hernandez, entre autres, et cet inconnu, Dandy Brown, au milieu… Quelques investigations plus tard, on retrouvait ce même Dandy Brown impliqué dans un autre projet tout aussi hallucinant et excitant, “Hermano”, avec John Garcia (Unida, ex-Kyuss), et une poignée de musiciens au moins aussi doués… Et puis bien vite, on s’aperçoit que le même Dandy Brown ne fait pas que participer à ces projets : il les a créés ! Il n’en fallait pas plus pour nous inciter à aller rencontrer le personnage sur son domaine, dans le désert californien, à Palm Springs, dans le studio où il mixait les bandes de son dernier chef d’œuvre, Orquesta Del Desierto…

 

Dandy Brown : Tout le concept de Orquesta Del Desierto vient d’un état de fait : j’ai joué et écouté du Hard Rock pendant très longtemps, et mon but a été de prendre ces influences-là, puis de prendre en plus ces nouvelles influences latines, et simplement de jouer en les mélangeant, afin d’obtenir quelque chose qui me rappelle le sentiment que j’éprouve en regardant ces montagnes, là, juste dehors. Parce que c’est de cette manière qu’a été écrite cette musique, dans cette ambiance de chaleur presque malsaine, ce soleil, ce sable… Je pense que tout cela ressort bien dans cette musique. Si vous connaissez le désert, quel que soit le temps que vous y ayez passé, et que vous écoutez cette musique, je pense que vous ferez immédiatement le rapprochement avec tous ces éléments ; c’est vraiment une sorte de mélange entre du Hard Rock assaisonné d’une forte saveur latine… C’est incroyable, la manière dont sonne l’ensemble, comment tous ces éléments fonctionnent ensemble, c’est vraiment dingue… Il y a eu bien évidemment des moments difficiles tout au long de l’élaboration de ce projet, tu l’imagines, mais aussi des moments merveilleux, et au final, tout s’agence à la perfection et le résultat est incroyable. Je pense que cela vient du fait que l’énergie de tout le monde était en accord. Pourtant je n’aime généralement pas parler en termes d’énergie, ces trucs spirituels genre “New wave”, mais en l’occurrence nos énergies se sont bien accordées et ont parfaitement fonctionné ensemble…

 

Est-il possible de décrire la musique d’Orquesta Del Desierto ?

Je dirais qu’il s’agit de rock, de pop, de salsa, de flamenco, c’est une sorte de mélange dont le résultat ne ressemble à rien de ce que j’ai pu entendre jusqu’ici. Je suis persuadé que ça peut plaire à tout le monde, à tous les goûts. Il y a une sensibilité pop dans le fait que les chansons ne sont pas vraiment des morceaux épiques de huit minutes de long chacun, mais il y a aussi une sensibilité rock qui fait qu’il ne s’agit pas de pop trop légère, désuète. Il y a aussi ces influences latines, qui donnent à l’ensemble une saveur vraiment inédite, avec les cuivres, les guitares acoustiques, toutes les percussions… Je pense sincèrement que c’est quelque chose de fabuleux… Mais bon, il s’agit de mon projet, ais-je le droit de dire ça ? (rires) Je trouve le résultat fabuleux. Ca plaira forcément, même aux gens qui s’attendront peut-être à un produit un peu stéréotypé en provenance du désert : on entend souvent parler de “desert rock”, de “stoner rock”, et ils pourraient croire que tout ce qui provient du désert sonne toujours aussi “hard”, c’est donc probablement à ce genre de musique qu’ils s’attendront.! Ils écouteront le CD une première fois, et ils seront frappés dès la première écoute ; beaucoup de ceux qui s’attendaient à quelque chose comme Goatsnake, ou bien le nouveau Ché ou le nouveau Kyuss, vont être surpris ! Et certains pourraient ne pas aimer… Mais il se pourrait bien qu’ils l’écoutent juste une seconde fois, et se disent : “Wow, je vais peut-être l’écouter encore une fois”… et ainsi de suite ! De tous les projets que j’ai montés ou sur lesquels j’ai joué, c’est la première fois que tout le monde apprécie unanimement l’album : toutes les personnes à qui je l’ai fait écouter, des jeunes, des vieux, des trentenaires, des garçons, des filles, des hommes, des femmes, ils ont tous aimé.

Ce qui n’est pas forcément une mauvaise chose…

Non, c’est génial ! Tout le monde veut que le plus de gens possible puissent entendre sa musique ! Et il n’y a rien que je ne souhaite plus au monde que de voir plein de monde acheter ma musique, de manière à ce que je puisse encore faire plein de musique, et donc faire ce que j’aime le plus dans la vie, à savoir : jouer de la musique ! C’est donc juste une évolution naturelle des choses, c’est ce que tu peux espérer de mieux…

Concernant tous ces musiciens différents, est-ce que ce n’est pas frustrant de travailler avec eux en sachant qu’ils ont tous, de toute façon, un autre groupe prioritaire ?

Oh si, bien sûr ! Je peux imaginer une tournée se monter un jour, peut-être même un autre album un jour, mais lorsque tu essaies de produire un projet de cette envergure, en essayant de rassembler des gens qui viennent d’autres groupes, et que tu leur demandes de donner de leur temps pour un tel projet, cela devient très vite un cauchemar à produire ! Cela demande énormément de patience. Le simple fait de produire un “vrai” groupe, c’est très facile, car ils sont bien ‘présents’, en tant que groupe. Mais lorsque tu tentes de produire un tel projet, ça devient très vite : “Tu pourras venir tel jour ? Quels soirs as-tu des concerts avec ton groupe ? Quand répétez-vous ?”… Monter un tel projet devient très vite une vraie prise de tête, c’est difficile…

 

Evidemment, concilier tous ces emplois du temps a dû être compliqué… Comment dans ce cas avez-vous pu tout enregistrer en même temps ?

Nous avons enregistré toutes les parties rythmiques en même temps, mais nous avons enregistré le chant, les soli et la plupart des percussions séparément. Je tenais à éviter que la batterie “n’étouffe” les percussions (dont le volume est plus faible), de même pour tous les petits détails que tu peux entendre sur le disque. J’avais réalisé des enregistrements de toute la musique sur un quatre-pistes, et je les avais donnés aux membres du projet, et par la suite tout le monde s’est retrouvé ici, et le groupe a répété un petit peu ensemble, une sorte de grosse fête, avec une grosse jam. On a débarqué, on a joué les chansons, et à l’instant même où l’on a joué ces morceaux tous ensemble, on s’est tous dit : “Bon sang, on a vraiment quelque chose de spécial, là !”…

Si jamais tu parviens à monter une tournée d’Orquesta Del Desierto, mais que l’un des musiciens ne peut pas se libérer, est-ce que tu envisagerais de jouer sans lui, avec un autre musicien pour le remplacer ?

J’ai envie de croire que dans un monde parfait nous pourrions avoir les mêmes musiciens… J’aurais du mal à faire venir dans le groupe un musicien qui n’était pas sur l’album, de toute manière. Je trouve vraiment que la participation de chacun a été déterminante dans le son de l’ensemble et dans la façon de jouer du groupe. Toutefois, si l’opportunité se présente, que c’est une chance à ne pas rater et une offre que l’on ne peut décemment pas rejeter, et que l’un de nous ne pouvait pas y prendre part, j’imagine qu’il me dirait : “Engage quelqu’un d’autre et allez faire cette tournée”… Mais comment par exemple jouer un seul concert sans Pete Stahl ? Il est la pièce angulaire du projet, il est la voix du groupe ! C’est impossible… Peut-être que c’est possible, après tout, peut-être pourrions-nous trouver un chanteur dont nous apprécions aussi la voix, mais il ne chanterait pas avec son cœur comme Pete le ferait…

 

As-tu déjà envisagé de monter ton propre groupe ?

Et bien, dans un certain sens Hermano et Orquesta Del Desierto sont des vrais groupes, ils feront probablement des tournées… Mais je vois ce que tu veux dire. Lorsque Dock Ellis, mon premier groupe, s’est arrêté, j’ai sorti deux albums sous le nom de “Dandy”. Je chantais moi-même sur ces albums, et des musiciens de session ont joué dessus. Je suis un chanteur très correct, mais je ne suis pas le meilleur chanteur, et surtout je ne suis pas le chanteur que j’ai envie d’entendre… Je ne suis pas le chanteur avec lequel j’ai envie de partager une scène de concert. J’ai donc sorti ces albums mais je me suis dit ensuite que ce n’était pas la voie que je souhaitais emprunter à l’avenir… J’aime le concept de “projet musical”, j’aime travailler avec des influences différentes. Par ailleurs, je ne me suis jamais installé à un endroit assez longtemps pour vraiment mettre en place quelque chose sur le long terme. Et je pense que c’est une des composantes majeures de ma manière d’écrire : lorsque je me plonge dans une culture, je ressens cette culture, je ressens les choses évoluer dans mon environnement, et ma musique devient un reflet de tout cela. Et je pense que je ferai un autre disque lorsque je déménagerai et que j’irai m’installer ailleurs… Je pense que le prochain endroit sera l’océan, je serai donc proche de l’océan, je ressentirai cette présence et cette influence…

Bien sûr, et tu finiras par écrire des chansons des Beach Boys !

Ha, je ne pense pas que j’irai jusque là ! (rires) Mais bon, qui sait ?…

Avec quel musicien souhaiterais-tu jouer à l’avenir ?

Oh il y en a plein… Tu sais, j’ai déjà joué avec Greg Dulli (Afghan Whigs) par le passé, et lui et moi avons essayé de se retrouver sur divers projets au cours des seize ou dix-sept années depuis la dernière fois que l’on a joué ensemble. Mais il y a toujours un événement de dernière minute qui nous empêche de nous retrouver à jouer ensemble. Je pense qu’il est probablement l’un des paroliers les plus géniaux de notre époque, en tout cas au niveau des émotions que j’aime percevoir dans une chanson. Ce mec peut écrire des paroles incroyables ! Et avoir ces mêmes paroles sur ma musique, c’est quelque chose qui, je l’imagine, arrivera bien un jour…

 

As-tu composé la musique et les paroles tout seul ?

J’ai écrit toute la musique sauf pour une chanson que Mike Riley a écrite, et c’est Pete Stahl qui a écrit toutes les paroles de l’album. J’avais d’abord écrit toutes les paroles moi-même, tout était prêt, mais tant qu’à recruter un chanteur dans ce projet, je tenais à ce qu’il chante avec son cœur. Et je ne veux pas mettre mes mots dans sa bouche. De toute façon, Pete a écrit des paroles fantastiques…

De quels instruments joues-tu ?

Quand j’étais gosse, j’ai commencé à jouer de la basse. Mais au bout de quatre ans, je suis sorti avec une fille, et elle avait une sublime Alvarez acoustique, alors je me suis mis à l’acoustique. Puis lorsque nous avons rompu, je lui ai échangé ma chaîne Hi-Fi contre son Alvarez ! Je joue donc désormais de la basse et de l’acoustique, puis je me suis ensuite essayé un peu à la guitare électrique, et je joue aussi un peu de piano… En fait, à peu près n’importe quel instrument que je touche…

As-tu suivi un enseignement musical ?

Non, pas du tout ! J’étais un de ces gosses qui se mettait à jouer avec les écouteurs sur les oreilles jusqu’à ce que je comprenne ce que je jouais… J’ai acheté quelques livres, appris quelques gammes, et à partir de là j’ai progressé simplement en traînant avec mon cousin batteur et son ami guitariste : on fumait des joints dans la cave, on s’éclatait deux ou trois heures sur un même riff, puis on allait en voiture jusqu’au parc fumer encore un peu, et on revenait pour jouer encore plus de musique… Ca résume mes débuts dans la musique !

Je sais que tu es venu en Europe et que tu y es resté longtemps. Penses-tu que cette expérience t’a changé et a influencé ta musique ?

Oh, j’ai été complètement “ouvert” par mes expériences en Europe… Notre culture est vraiment jeune ici aux Etats-Unis, et en provenant de cette culture, je n’avais pas vraiment idée de ce qui était vraiment ‘vieux’ et important. Et donc en allant en Europe, je me suis imprégné de ces cultures, on sentait dans l’atmosphère que des milliers d’années de civilisation avaient précédé. La première fois que je suis venu à Paris, j’avais ces rêves en tête de devenir romancier, et j’ai continué dans cette voie quelques années… Je ne saurais pas dire à quel niveau l’Europe m’a ouvert musicalement, mais culturellement et dynamiquement en tant que personne, le simple fait de me retrouver imprégné de cette culture a été fabuleux.

 

Je suis assez curieux de savoir le genre de musique et d’artistes que tu écoutes en ce moment, et la manière dont cela influence ta musique…

Mes goûts musicaux sont vraiment très éclectiques, très ouverts. Je déteste d’ailleurs me fermer l’esprit à quoi que ce soit. Bien entendu il m’arrive de me lasser de certaines choses, mais je pense que dans tous les genres il y a de très bonnes choses, mais aussi des trucs nuls, évidemment. J’adore toutes sortes de musiques… Par exemple, j’ai énormément écouté Cream récemment, mais avant ça, c’était Sade : je suis fan de cette chanteuse depuis toujours, je la trouve absolument fabuleuse… Mais j’écoute vraiment de tout, dans tous les genres, et je retire des influences de l’ensemble.

D’où vient le nom du groupe ?

Et bien nous sommes d’abord partis d’un concept, “un orchestre pour le désert”, avec tous les sons du désert dont je m’étais imprégné, les cuivres, les percussions, et tout ce que tu retrouves dans l’album ! Je tenais à ce que cela soit quelque chose de “gros”, et le nom semblait assez évident… Il semblait convenir à la perfection. Au début nous voulions l’appeler “Desert Orchestra”, puis je me suis dit qu’il y avait déjà les “Desert sessions”, et d’autres choses avec lesquelles les gens auraient pu confondre, or la musique n’avait rien en commun… Et puis de toute façon, au point où nous en étions, tout le monde appelait déjà le projet “Orchestra”, donc je me suis simplement dit que nous l’appellerions pareil mais en espagnol, ce n’est pas plus compliqué !

Depuis que ce projet est terminé, as-tu déjà composé de nouvelles chansons ?

J’ai quelques nouveaux riffs, mais j’attends de m’installer dans la prochaine ville, dans un nouvel environnement, et d’en retirer de nouvelles influences… Je joue quasiment tous les jours, je n’écris pas tout le temps, parfois je peux même jouer le même riff pendant des mois… L’écriture est un procédé très spontané, tu ne sais jamais à l’avance quand ça va arriver. Je me retrouve en train de jouer, et subitement cela se produit : “Bon sang, j’aime bien ça !”, et puis ça devient de la pure mégalomanie sur ce même riff, je le joue sans arrêt, encore et encore, et puis le riff change, évolue, je peux même y rajouter des choses, et ça devient une chanson…

Quels sont tes plans pour les mois qui viennent ?

Penser au futur, que ce soit pour Orquesta Del Desierto ou pour Hermano, n’est pas chose aisée, en tout cas au delà des dates de sortie des albums respectifs. Pour ODD, la situation est difficile : Pete a passé cinq ou six mois en tournée récemment, Mario prépare la sortie de son nouvel album avec Fatso Jetson, Mike travaille comme ingénieur du son, Alfredo a un nouveau projet situé à Seattle… Landetta et Country Mark sont les deux seuls qui ont sans doute quelques heures à consacrer à une éventuelle tournée, mais de toute façon ces deux là sont prêts à tout pour un peu d’aventure ! Mais il semblerait que Hermano ait plus de chance de tourner en premier. Nous allons attendre que l’album sorte dans quelques mois, puis nous envisagerons la situation sur ces bases en temps voulu ! En attendant, je profite paisiblement de la vie en Floride avec ma femme Analisa et ma fille Carlie… en tout cas jusqu’à ce que les albums sortent et que ma petite vie ne s’affole à nouveau !

 

février 2002 par Laurent.
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