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J’avais eu beaucoup de plaisir à écouter Plasmatic Idol il y a déjà trois ans et c’est avec excitation que cette année je pose mon oreille sur le nouveau Giöbia, Acid Disorder. Pour les distraits du fond de la classe, apprenez que Giöbia est un prolixe quartette transalpin de Milan signé chez Heavy Psych Sounds et que leur musique verse quasi inconditionnellement dans un space rock d’excellente facture.
Dernier étage d’une fusée mise sur orbite, ce nouvel album Acid Disorder nous renvoie les échos de sa quête spatiale. “Circo Galactico” , “Acid Disorder” sont des rapports d’observation du vide, j’en suis sûr! Un endroit psychédélique à la fois chaud au soleil et froid comme l’acier une fois l’immensité spatiale obscurcie. :Queen Of Wands” qui introduit la plaque quant à elle l’annonce, on est en plein trip au milieu des étoiles. Un parfum de Floyd flotte dans l’éther y compris lors de l’attaque de “Conscientiousness Equal Energy”, morceau phare d’un trio de titres où s’ajoutent “Screaming Souls” et “Blood Is Gone”. Ce regroupement de pistes constitue le centre de l’album. Il est forgé dans des riffs de gratte énergiques qui fusionnent avec la reverb tout en trouvant une réponse dans des nappes de synthé résolument psyché et kraut.
Même lorsque les morceaux sont plus en retrait comme “The Sweetest Nightmare” et “In Line”, il se passe quelque chose. Les compositions ont systématiquement un véritable équilibre et des choses à dire.
Giöbia réalise une fois de plus un beau spécimen extra-terrestre. “Acid Disorder” la piste éponyme raconte l’ histoire de Giöbia, quatre gars en orbite qui ne semblent pas prêts de redescendre pour nous envoyer à intervalle régulier les plus belles images du cosmos. Ce soir, calez vous leurs messages dans les esgourdes et levez la truffe au ciel, vous y verrez peut être évoluer nos camarade de l’espace.
Il y a quelque chose d’anormal, voire d’injuste dans le manque de couverture dont bénéficie The Machine. On devrait tous s’en sentir un peu coupables, tant ce groupe, album après album, prestation scénique impeccable après prestation scénique remarquable, enchaîne les réussites, tout en restant sous les radars. Cette séquence de profond dépit est le fruit direct de l’écoute prolongée de ce disque, encore un excellent LP à rattacher à leur déjà intéressante discographie. Détachés de Elektrohash Records depuis leur album précédent (après avoir y passé quelques années un peu dans l’ombre de Colour Haze), Wave Cannon est hébergé chez Majestic Mountain records, un label suédois discret et peu productif, mais nous ayant souvent démontré un goût certain dans la sélection de son roster.
Si vous n’avez jamais eu la chance de faire la connaissance de The Machine, sur scène ou sur disque, Wave Cannon représente une excellente synthèse de leur carrière jusqu’ici : ayant déja exploré sur leurs diverses productions plusieurs nuances musicales plus ou moins prononcées, le trio en retranscrit ici un parfait amalgame, un équilibre réussi où chaque ingrédient occupe la juste place, et produit le juste effet. Stoner, heavy rock, cold wave, psyche, kraut, space rock… les étiquettes défilent, virevoltent, sans que jamais l’on ne lève un sourcil réprobateur ni dubitatif. Le travail mélodique est toutefois prépondérant, et à ce titre, on pourra envisager la musique du trio comme une sorte de grunge psych rock (!!), à l’image de ce “Glider” au riff de bucheron gentiment fuzzé, chant discret, pour un mid-tempo qui hante longtemps les cages à miel. Ce qui n’empêche pas l’audace, avec des titres comme “Wave Cannon”, qui convoque à la fois les mélodies pop-rock et les relents cold wave, posés sur un lit de saturation et de rythmiques quasi-kraut.
Désormais seul membre originel du groupe, David Eering ne fait pas que mener la barque, il éclabousse littéralement chaque titre de son talent de guitariste (riffs remarquables, soli étourdissants…) et de son inspiration / talent de compositeur. Même ses lignes de chant, discrètes (et même parfois “gommées” par des choix de production), viennent sporadiquement apporter un peu de variété et de relief à des titres par ailleurs sinon largement instrumentaux. A l’image des prestations live du groupe, la musique repose sur une construction à trois, mais inexorablement Eering prend les choses en main à coups d’envolées guitaristiques surgies de nulle part, pour amener chaque titre dans des sphères lointaines. Ecoutez par exemple “Genau or Never”, où le guitariste prend place discrètement sur une rythmique basse-batterie rondouillarde, d’abord avec quelques discrètes harmonies, l’installation d’un riff, quelques leads space rock un peu lointaines, pour progressivement mettre en place un véritable déferlement sonique à grands renforts de pédales d’effets. Mais ne laissons pas passer l’impression d’un one-man band : une écoute de ce prodigieux “Return to Sphere (Kneiter II)”, brillant brulot psych-prog jammesque vertigineux de plus de 10 minutes, joué le pied enfoncé sur l’accélérateur (évoquant parfois certaines belles pièces de Earthless), devrait suffire à confirmer la pertinence de ce line-up et l’osmose musicale qui le caractérise – chacun y connaît sa place, sa force, et sert le morceau au plus juste.
Wave Cannon vous l’aurez compris est non seulement l’un des meilleurs (le meilleur selon votre serviteur) disque de The Machine, mais il constitue surtout un excellent point d’entrée pour le découvrir si vous êtes dans cette situation. Maintenant faudrait voir à pas rater le coche encore une fois…
Le trio norvegien, Wolfnaut rejoint l’écurie Ripple Music et signe son quatrième album qui avec son titre Return Of The Asteroid annonce la couleur d’une plaque forée dans le stoner. L’exercice semble évident sur le papier mais dans la foule des prétendants le groupe arrivera t-il à sortir son épingle du jeu?
Pas facile, c’est le premier sentiment qui pourtant s’estompe vite une fois passé les limites du chant qui décroche presque sur “Brother Of The Badlands”. On découvre alors un stoner nerveux, un rien psyché aux entournures et grassement fuzzé. Wolfnaut fait un job honorable et assez envoûtant oú la batterie vient inscrire les titres à coup de blast comme sur “Crash Yers Asteroid”. Le trio ne délaisse pas la suavité du chant sur la contiguë balade “Arrows” ou encore “Crates Of Doom” où rythmiques et chant s’allient pour embarquer petit à petit la nuque de l’auditeur dans un headbanging de bon aloi.
Laissant la bride sur le cou de l’album, on s’enjaille volontiers sur “G.T.R” et “Something More Than Night” avec un plaisant son crunchy. Enfin la conclusion “Wolfnaut’s Lament” est un résumé à elle seule de cette plaque qui oscille entre subtilité et poutres grassouillettes et basses avec toujours sous jacent un esprit blues du plus bel effet.
On retrouve facilement ses repères sur Return Of The Asteroid, les amateurs de Slomosa devraient trouver un nid douillet pour leurs esgourdes dans “My Orbit Is Mine” tandis que “Something More Than Night” a un arrière goût de Duel.
Bref avec Return Of The Asteroid, Wolfnaut livre un bon album du genre et il aurait été dommage de laisser glisser l’objet entre nos doigts. Une galette plaisante, à ranger dans sa discothèque en attendant la suivante.
Il y a de ces groupes que l’on sait excellents, que l’on aime depuis longtemps, mais qui ont emprunté des chemins musicaux qui les ont éloignés de nos préoccupations premières. C’est le cas de Blood Ceremony, un groupe dont on est bien conscients du potentiel et du talent, mais qui a adopté depuis quelques années un virage assez clair qui l’ancre profondément dans le sillon musical des groupes de rock folk/prog 70’s.
Plein d’espoir (pas trop, en vrai), on s’est donc jeté sur cette galette pour tirer le constat au bout de 3 ou 4 titres que non, on pouvait toujours rêver, le groupe ne revenait pas à ses racines rock doomesques old school et s’enfonçait au contraire dans ce penchant pour les bluettes aériennes, à grands renforts de guitare en son clair, de flute traversière, de cuivres discrets et de tambourin.
Que vient donc faire ce disque dans nos pages ? En réalité, le disque a tourné sur nos platines, tourné, tourné… et il s’y est gentiment installé. S’il fallait une preuve du profond talent de ce groupe, il faut la trouver ici, dans cette capacité à composer des titres fluides, riches mélodiquement et absolument mémorables. On vous conseille de vous jeter sur le redoutable « Eugenie » pour en faire la preuve : après une seule écoute vous pourrez l’entonner à nouveau à loisir. Les « Lolly Willows » et autres « The Bonfires at Belloc Coombe » et son refrain folk (attention, de légères traces de saturation pourraient se cacher discrètement sur le couplet de ce titre) arrivent pas loin derrière en terme de titres bien accrocheurs et mémorables.
On clôture donc par un bilan tout à fait factuel : si vous cherchez la saturation, le fuzz et le gras, évitez ce disque comme la peste. Si vous cherchez un disque plus aérien, tour à tour enjoué et mélancolique, au top en terme d’aboutissement mélodique, à l’écriture fine et en parfait alignement avec les productions 70’s (un chef d’œuvre d’authenticité/d’intégrité), ce disque pourrait vous plaire.
En termes de musique inspirée des grandes heures 70’s (voire un spectre couvrant un bout des 60’s jusqu’aux 80’s), on peut assurément avoir confiance dans l’appréciation de Rise Above Records. La maison de Lee Dorrian, bien tenue, est au global la démonstration d’une réelle intégrité dans le genre, et même si le prisme musical de ses groupes couvre un nombre de genres musicaux significatif, le frontman de feu-Cathedral a rarement été pris à défaut concernant la qualité de ses productions. Se jeter sur cette galette est donc une opération que l’on considère « sans risque ».
Le diagnostic confirme vite cette hypothèse : qualitativement, on est bien sur une fort séduisante formation, un trio-devenu-quatuor qui propose un heavy rock 70’s d’école. Un groupe jeune toutefois (c’est leur premier LP, après une paire de formats courts sortis sur ces quelques dernières années), en provenance d’un terroir propice aux petites perles musicales comme aux pires calamités : le Texas. On vous rassure, on est plutôt dans le premier cas ici.
L’énergie déployée sur cette galette, les différentes pistes musicales explorées, rendent l’écoute de ce premier effort parfois un peu confusant. Ça commence par le très énergique « Invisible Hand », un petit brulot de power rock 70’s drivé par une batterie frénétique emmenant une rythmique heavy blues à fond les ballons, et larvé de soli débridés absolument jouissifs pendant presque 5 minutes. Une bien belle entrée en matière, en somme. Le titre suivant « Pathless Forest » montre une autre facette du groupe, un titre plus posé (on est quand même un peu plus rapide que du mid-tempo classique…) mais reposant sur un gros riff principal et une ligne vocale / refrain implacables (l’occasion de mettre en lumière le chant rocailleux de Mario Rodriguez, absolument enthousiasmant). Probable point culminant du disque, « Sacrificial Altar » vient coiffer l’ensemble de toute sa majesté, bien servi par un gros riff sur plus de trois minutes, puis enchaînant une succession de séquences stylistiquement sans queue ni tête, tout en déroulant des tombereaux de soli orgasmiques dans des genres très variés.
Et ça continue ainsi dans un torrent musical littéralement débridé, sur 9 titres (pour 42 minutes, on est pas loin du Nombre d’Or de la production musicale), où le groupe pioche dans le blues, le psych rock, le hard rock, le jazz (ce break et ce petit solo de batterie sur « Magick Circle », la première moitié de « A Thousand Days in the Desert », le break au milieu de « Sacrificial Altar »…), et même country et flamenco (les titres de transition respectivement « Fried Vanilla Spider Trapeze » et « Recurring Nigthmare »), tout en déroulant sur la longueur une leçon de boogie impeccable – on peut tourner autour du pot comme on veut et essayer de se défaire du cliché, ça reste un dénominateur commun des meilleurs groupes texans.
Bien aidé par une prod efficace et respectueuse de la généalogie du groupe (on retrouve les codes sonores 70’s, y compris lorsque le groupe use de gimmicks assez discutables, comme ce traitement vocal « chevrotant » sur « Magick Circle » et « Sacrificial Altar », à l’image de facéties parfois saugrenues que l’on retrouvait dans certaines productions d’époques), ce premier album ressemble fort à une démonstration de tout le potentiel de cet enthousiasmant jeune groupe. Vous l’aurez compris, l’aspect un peu « chien fou » de ce combo, qui part un peu dans tous les sens, pourra déstabiliser l’auditeur plus habitué à des codes plus clairs et des disques plus « cadrés ». Mais la créativité du groupe, et surtout son talent, font vite pencher la balance du côté « on en reveut ». L’attente qui vient juste derrière est de retrouver le quatuor sur des planches, où leur sens du groove devrait faire un malheur (bien porté par une rythmique que l’on sent propice aux jams et des solistes prometteurs).
Présents sur la scène depuis 2003 les quatre de Danava font office de vieux routards du circuit. Ils reviennent avec un étendard du nom de Nothing But Nothing qui affiche les couleurs vite et fort. Il était temps car les américains n’avaient plus rien livré de vraiment tangible depuis 2011 année de sortie de leur troisième LP. Cette plaque enfin livrée est placée sous le signe du hard rock et du heavy, c’est la maison de disques Teepee records qui le dit, voilà suffisamment d’indices pour nous mettre l’eau à la bouche et entamer un cycle d’écoutes et vous en faire le retour.
Voilà une chronique qui va aller aussi vite que l’album. Danava fait un heavy teinté de stoner et non l’inverse. le Quartette ricain joue à toute blinde de “Nothing But Nothing” à “Strange Killer”. On reprend peu à peu son souffle, et on apprécie les descentes de fûts qui inondent la plaque et la frappe constante du cuivre de la cymbale devient obsédante alors que les grattes jouent le plus grand nombre de notes possibles et à l’unisson dès que l’occasion s’en présente.
La plaque sonne heavy old school tant du point de vue de ce qui est évoqué ci avant que du chant, qui comme sur “Enchanted Villain” nous fait penser aux origines du genre, on vous laisse le soin d’aller les chercher plutôt que de jouer les name dropping fastidieux.
Danava livre des titres qui allient la cavalcade guitaristique, à la façon de l’instrumental “Season Of Vengeance”, au souffle épique d’un chant utilisé à bon escient sur “At Midnight You Die”. Bref ça joue vite et ça joue fort on l’a déjà dit et pourtant on déniche deux curiosités sur la plaque qu’il faut aller chercher tout au fond. On y découvre d’une part le psychédélique “Nuthin But Nuthin” et “Cas” qui, sonnant étrangement, nous poussera à rechercher son origine et nous apercevoir qu’il s’agit d’une reprise d’un titre composé en 1979 par le (“world famous”) duo Tchèque Skupina Františka Ringo Čecha et Jiří Schelinger – voilà un titre de plus à mettre au crédit de la culture slave qui compte nombre de pépites anonymes et qu’il n’est en rien mauvais de déterrer de temps à autres.
Nothing But Nothing est un album qui apporte beaucoup de satisfaction à l’auditeur, il ne demande pas beaucoup d’efforts à l’écoute et pourtant ne se contente pas d’une composition monomaniaque. Sans livrer une perle, Danava nous gratifie d’une poignée de compos qui font le job et le font bien et on en reprendra bien un louche à coup sûr.
Le dernier album des sud-africains de Ruff Majik, The Devil’s Cattle, s’était avéré une très belle surprise, très marquée par l’ajout de Evert Snyman, partenaire de longue date du groupe, au line up officiel, en véritable partenaire de l’hégémonique leader Johni Holiday. Bye bye Snyman, on retrouve Holiday en chef d’orchestre omniprésent. Après tout, c’est son groupe, ce n’est pas forcément mauvais signe…
Il ne faut pas longtemps pour retrouver le « package Ruff Majik », puisque dès « Hillbilly Fight Song » en intro les ingrédients de la mixture sont déjà tous là : riffing de qualité, gros son, chant caractéristique (très nasillard mais ça fonctionne bien) souvent repris en double, mélodie redoutable, structure « droit à l’essentiel » (la plupart des chansons durent moins de trois minutes, une rareté de nos jours !). Autre composante clé du groupe : le rapprochement avec le QOTSA des trois premiers albums reste significatif, de manière quasi troublante parfois (voir le premier single, « She’s still a Goth », avec ses leads décalées rappelant les licks mélodiques de Josh Homme, sa rythmique robot-rock emblématique, son son de guitare rythmique, sa ligne vocale en fond de refrain…). Même constat un peu plus loin sur « Queen of the Gorgons » par exemple… On comprendrait que ça sonne un peu malaisant pour certains puristes, mais on reconnaîtra à Ruff Majik le fait que non seulement ils ne basent pas tout leur socle musical sur cette tendance (la galette foisonne de références variées), mais qu’en plus ils ont un paquet d’autres arguments à faire valoir. Parmi ceux-ci, le plus notable est cette capacité à pondre des titres catchy et super efficaces, sans pour autant faire dans la simplicité absolue (on n’est pas dans des titres punk rock basiques : on évolue dans un environnement de compos à tiroirs, riches en breaks bienvenus, arrangements audacieux, parenthèses sonores…).
Les illustrations sont nombreuses, et la plus flagrante intervient avec le redoutable « Rave to the Grave » : tempo pied au plancher, gimmick de clavier bienvenu, chœurs et « clappings » parfaitement adaptés, mélodie immédiatement mémorable et refrain à l’avenant, petit solo rafraîchissant… On peut aimer le style ou pas, en attendant il n’y a pas des dizaines de groupes capables de composer des petits brulots de cet acabit. Même le groovy « Cement Brain » déroule sa nonchalance crooner sans paraître saugrenu… Petit bémol, comparé à l’album précédent, Elektrik Ram comporte plusieurs titres moins réussis : c’est le cas selon votre serviteur de la triplette finale, à commencer par le molasson (mais efficace) « A song about Drugs (with a clever title) ». Ces trois derniers titres lents/mid-tempo, bien moins punchy, auraient été plus efficaces en guise « d’aération » dispersés en milieu d’album, plutôt que d’être rassemblés en fin de disque, pour une conclusion un peu lourdingue…
Moins impressionnant ou surprenant que The Devil’s Cattle (qui nous avait bien désarçonné), Elektrik Ram met sur la table un sacré paquet d’arguments en sa faveur. Déjà, si vous aimez votre stoner plutôt léger et punchy, chargé en chansons à chanter à tue-tête, et que vous appréciez les premiers QOTSA, il ne fait pas de doute que vous devez vous pencher sur ce disque. Sa quantité de compos quasi-jouissives compense largement les quelques rares passages à vide qu’on pourrait mettre à son débit.
Lorsque le retour en studio du quatuor a été annoncé sur les réseaux sociaux de boomers, j’ai twerké debout sur ma chaise (et heureusement personne ne m’a vu faire une chose pareille). Dozer c’est un peu ma madeleine de Proust question heavy rock et c’est un groupe d’une fiabilité incroyable autant pour l’exécution scénique que pour leurs enregistrements même si honnêtement Beyond Colossal se situe en deçà du reste de l’incroyable production commise jadis avant l’interminable hiatus.
Ma petite culotte séchée, je me suis lancé dans la découverte du nouveau chapitre dans l’histoire d’un groupe emblématique de la genèse du stoner européen. Une formation qui avait laissé sur sa faim l’ancienne génération d’aficionados du genre, délaissée par la bande de Borlänge repartie user leurs futes sur les bancs d’école et/ou se lançant dans diverses aventures musicales aux destins divergents. Cette renaissance débute sur un titre implacable n’ayant pas eu la chance d’une défloration anticipée (le casting du teasing me laissant pantois au passage) : « Mutation/Transformation » dont le compteur (plus de 7 minutes) interpelle pour une ouverture. L’entrée en matière, balancée bille en tête comme pour prouver que nous avons encore à composer avec un groupe appartenant au monde des vivants, est un concentré de la signature Dozer et elle a un relent de Call It Conspiracy commis il y a une vingtaine d’années (ça fait mal).
Se suivent trois titres, dont deux envoyés en avant-première, qui évoluent dans un registre très similaire et ne constituent pas, selon ma lecture, des pépites à proprement parler même s’ils se laissent écouter. Ils balisent le terrain pour « No Quarter Expected, No Quarter Given », un brûlot tirant sur le metal – stigmates d’Ambassadors Of The Sun ? – qui ne tient pas la rampe en regard des deux titres finaux.
En avant-dernier nous retrouvons certainement le meilleur titre de l’album : « Run, Mortals, Run! » qui allie vocaux aériens et rythmiques galopantes comme au bon vieux temps. Le pied bat la mesure et les cervicales entrent en action : on renoue avec le Dozer d’une époque bénie des dieux du rock’n’roll (reviens Lemmy !). Vieilli en canettes alu de bière, Dozer place un titre de toute beauté au moment où l’auditeur qui fait connaissance avec ce nouvel opus se disait que c’était mieux avant. Tant pis pour ceux qui n’auront pas poussé la curiosité jusqu’ici.
Le rideau tombe sur « Missing 13 » qui s’inscrit dans la tradition des morceaux longs des Suédois. La montée en pression d’un riff basique déployé en solo, un placement de la section rythmique qui vient rehausser le fameux riff à prime abord plutôt abscons, puis la voix qui se module pour une phase tout en retenue jouant les préliminaires et, biiim !, après trois minutes une première incursion en terres sauvages, un retour à l’accalmie et un gros final, avec toujours ce même riff, déployé de manière débridée, qui fait hocher du chef. La connexion se fait immédiatement avec « Big Sky Theory » même si ce dernier se situe quelques crans au-dessus. Pas grave c’est efficace !
Malgré l’inactivité en studio et la présence restreinte sur scène, Frederik, Johan, Sebastian et Tommi, qui ne nous fait pas du Greenleaf (c’était une option), nous prouvent qu’ils ne sont pas prêts à foutre leurs instruments au placard. A la question fatidique relative à l’achat de cet objet, la réponse est clairement positive même s’il est inégal car c’est Dozer et que certaines compos nouvelles viennent clairement challenger les meilleures du groupe !
Point Vinyle :
Aux côtés de l’infatigable digipack qui ravira les ceusses qui consomment encore du CD en 2023, Blues Funeral a bien fait les choses pour les vinylophiles avec la commercialisation du test press en quantité homéopathique noire, une déclinaison transparent coral red limitée à 300 unités et une version en violet, comme ça il y en a pour toutes les bourses ainsi que pour tous les goûts. La satisfaction du consommateur est à nouveau au rendez-vous et le rendez-vous du collectionneur avec son banquier le guette après la salve de rééditions couvrant tous les spectres Pantone, ou presque, commises il y a quelques années par la crémerie Heavy Psych Sounds Records.
Si vous ne connaissez pas 1782, quelques traits significatifs de sa musique devraient rapidement vous orienter sur votre attrait ou pas pour la musique qu’ils développent : on est dans du stoner doom d’école, celui des premiers Electric Wizard, poussé dans ses retranchements. Rythmiques super-lentes, guitares telluriques, sons de basse et de guitare pachydermiques, gros riffs gras, une ligne de chant très-très loin bien au fond dans le mix, une batterie minimaliste, un chant lexical exclusivement tourné vers l’occultisme… Tous les ingrédients sont là. Tous. Si vous n’aimez pas le doom, passez donc votre chemin, vous n’aurez probablement pas d’épiphanie avec ce disque. Si vous aimez le doom aventureux, original, hybride, vous aurez du mal à trouver pleine satisfaction ici. Pour les autres, amateurs d’un doom classique, référencé, vous devriez trouver votre bonheur dans ce Clamor Luciferi.
Du riff, du riff, du riff, il nous en tombe dessus par tombereaux : une chanson = un riff, et du costaud. Ça commence par le surgras « Succubus » : gros riff en couplet, subtile déclinaison en refrain, et le reste c’est du lead lent, du break lent, le tout dans une pataugeoire de goudron. « Demons » reprend sur les mêmes bases, puis « Black rites », puis… Ah ben c’est pareil tout du long en fait. Et c’est là que le néophyte aura du mal, peut-être, car cette constance est, souvent, ce qui fait la solidité des disques de doom de cet acabit. Chaque riff est bien ciselé, l’ensemble est bien écrit (quasiment toutes les compos tournent autour des 5 minutes), avec quelques breaks et aménagements qui les distinguent les uns des autres : du coup on ne s’ennuie pas et l’album défile, en boucle, avec un certain plaisir pour le doomster de base (que votre serviteur peut être, parfois). Le headbang (lent) intervient occasionnellement, sans qu’on y pense vraiment, ce qui est bon signe.
Le classicisme proposé le dispute à l’intégrité de l’approche, qui n’est pas à questionner : ces gars font ce qu’ils aiment et ce qu’ils savent faire. Ils le font bien, avec efficacité et conviction. Fondamentalement, on aimerait dire qu’ils apportent quelque chose de neuf, mais ce serait mentir. A contrario, ce serait aussi mentir que de dire que l’album est médiocre et qu’il ne procure aucun plaisir aux amateurs : c’est le contraire… à condition de bien être associé à cette population de niche ! Pour initiés, donc.
Quatre ! Cet énigmatiquement dénommé Enveletration est rien moins que le quatrième disque de ce groupe étasunien passé largement sous les radars, après pourtant plus d’une douzaine d’années d’existence. Enchaînant les labels obscurs, rien, hormis un coup de chance, n’aurait pu laisser préjuger que cette situation change un jour, tant la notoriété et la force de frappe promotionnelle de leur nouvelle maison d’accueil, Satanik Royalty Records, ne sont pas vraiment reconnues. Et pourtant, quel disque ! Qu’il aurait été dommage de passer à côté…
Sandrider c’est un peu l’enfant caché de ASG et de Torche, où se mèle un peu la puissance et l’énergie débridées du Mastodon début de carrière (quand il se détachait un peu de ses penchants thrash et ne versait pas encore dans les travers proggy…). De la mélodie, du refrain qui imprime, du riff qui attaque, et encore un peu de mélodie pour la route. La rythmique tabasse et groove, tandis que Jon Weisnewski tapisse la texture mélodique de beaux pans de guitare, riches, omniprésents.
On sourit un peu au début, gentiment, au fil des premières écoutes, en particulier de ces refrains, qui souvent semblent se cantonner à gueuler de manière répétitive le titre (mono-mot, toujours) de la chanson. Mais les tours de disque s’enchaînant, on entre la tête la première et on se laisse absorber insidieusement dans cette succession quasi enivrante de chansons : les hits s’enchaînent à haute vitesse et haute densité (10 compos en 36 minutes, c’est un déferlement de torgnoles, et que du maigre).
Se démarquent quelques titres néanmoins, tel ce furieux “Tourniquet”, le très accrocheur “Weasel” (le petit gimmick de guitare qui suit la rythmique sur le couplet, juste impeccable), le refrain aux limites de la dissonance de “Priest”, le heavy “Ixian”et son final protéiforme, et “Grouper” en cloture, empruntant au hardcore sur son premier segment pour se terminer sur quelque chose de plus riche, posé et lourd.
Avec 2 ou 3 titres moins marquants, ce disque n’est pas parfait. Il propose toutefois une musique non seulement de qualité, mais aussi inventive, solidement ancrée dans son territoire (Seattle, terre de grunge s’il en est), développant un talent mélodique tout à fait remarquable. Une fort belle galette, de celles qu’on aimerait trouver tous les mois dans nos haut-parleurs. Et même sa couverture, aussi énigmatique que son titre (mêlant réalisme dans sa technique, et imaginaire avec son code couleur décalé…), est réussie. Zéro réserve.
Emmenés par une frontwoman à la voix charismatique et fine connaisseuse du circuit stoner, Red Cloud fait ses armes depuis deux ans sur scène, on avait eu le plaisir de les découvrir dans l’écrin magique des Volcano Sessions en 2021. On retrouve également au claviers Laura, que l’on connaissait pour tenir la guitare chez Fuzzy Grass. Autant vous dire que ce combo de cinq frenchies était un peu attendu de votre serviteur sur un premier album et voici donc que ses vœux sont exaucés dans une autoprod de belle facture.
Dès les premières écoutes on est happé par la forte attractivité des morceaux qui recèlent tous un swing de dingue. La chaleur de la voix qui monte en puissance sans s’érailler à cause de l’excès de l’effort et toujours encline à un dosage réussi.
De son côté l’orgue ne parle jamais plus que de raison, il est à la fois l’ appui de la voix et le moteur des autres instruments. Ces derniers ne s’effacent pourtant pas face à tant de présence, carrosserie rutilante d’un bolide résolument rock’n’roll.
Comme Red Cloud ne fait pas les choses à moitié il essaime les tubes, le swing de “Bad Reputation” ou de “Skeleton Jigsaws” ne peut pas laisser l’ auditeur indifférent, le sexy “Swallow Me” gravite autour d’un mid tempo sensuel envoûtant et “Velvet Trap” sort des griffes aux estafilades desquelles on s’offre sans retenue jusqu’à ce que le titre se termine parfaitement sur un rythme haletant.
Ce premier album est une ode à la musique, un cri puissant qui raconte le bonheur de vivre par et pour les notes. Red Cloud dépeint la musique comme carburant, maîtresse, muse et fantasme et cela touche toujours juste.
Red Cloud effleure les nuages et les peints des plus belles couleurs. Assemblage fin et fédérateur il y a peu de chances que le groupe ne fasse pas la moisson d’auditeurs et n’attire pas à lui rapidement quelque beau label. Espérons cependant que cette perle n’y laisserait pas son âme. En attendant offrez-lui vos esgourdes c’est encore le plus sûr moyen de lui garantir un réceptacle à mesure.
Jamais loin d’un bon coup, le label transalpin Argonauta a capté et ramené au bercail ce jeune quatuor finlandais, auteur jusqu’ici d’une poignée de démos et formats courts confidentiels. Bonne pioche : Heezer s’avère un combo frais et furieusement enthousiasmant.
Sur ce premier essai en long format (qui reste assez « ramassé », avec 35 petites minutes pour neuf chansons quand même) le groupe arrive à faire émerger de manière assez franche quelques caractéristiques claires – une vraie identité qui, en dépit de son jeune âge, sont un véritable signe de maturité. L’ensemble du disque s’appuie sur un son à la fois riche (plusieurs sons de guitare, arrangements judicieux…) tout en restant dans un heavy rock fuzzé assez franc – une valeur sûre en terme d’efficacité pour nos oreilles. Autres signes distinctifs : le chant de Sami Kääriäinen (puissant, chaleureux et subtilement rocailleux, un véritable atout), des soli efficaces, … mais surtout un sens mélodique assez remarquable, évident du début à la fin de cette galette..
On en prend très vite la mesure avec le haut potentiel catchy de son « Fourth Line » introductif, mid tempo énergique fort bien modelé, avec un couplet étonnant : tout en riff et en chœurs, il rappellera de manière surprenante quelques standards de hard rock old school (bien aidé en cela par un ensemble de soli qui ne détonne pas) ; même ressenti sur le glorieux refrain de « Red Giant », qu’on se voit bien entonner en mode yaourt, une bière à la main et l’autre poing levé en rythme. « Spacegod » (avec son couplet qui ravive nos souvenirs humides des défunts Solarized, avec son riff gras fuzzé et sa rythmique groovy) développe encore un peu le son de Heezer, sur un mid-tempo au refrain fédérateur, ici aussi soutenu en chœurs (ça sent le dénominateur commun). Un peu plus loin, « Dream machine » vient gentiment emprunter au rock « high energy » emblématique des pays scandinaves (voir son couplet appuyé par un arrangement discret de clavier « à une touche »). A l’opposé, le groupe semble aussi à l’aise sur des tempi lents, à l’image de « I the Sun », qui traîne sa lancinance sur cinq grosses minutes, en se rapprochant parfois presque (sacrilège !) de quelques power balads emblématiques.
Avec quasiment un sans faute (pas plus d’un ou deux titres moyens / perfectibles – on pense à « Mother Rain », « Growing On »…), Heezer propose avec ce Sungrinder un bon disque de stoner costaud et mélodique, un de ces disques qui, s’il ne marquera pas l’histoire, aura apporté plusieurs heures de vrai plaisir d’écoute à tous les curieux qui se seront penchés sur ce groupe inconnu, mais aussi un certain espoir de voir ce groupe continuer à se développer sur ces bases séduisantes.
C’est des Pays-Bas que nous vient le quatuor Thammuz – comme quoi Argonauta Records ne propose pas que des groupes compatriotes. Après un disque autoproduit sorti en pleine phase COVID mondiale (bref : complètement inaperçu) ils se retrouvent signés sur le label italien pour leur second disque, Sons of the Occult.
On comprend assez vite pourquoi Argonauta s’est intéressé au groupe : Thammuz propose un stoner rock d’excellente facture, porté par un son de gratte totalement emblématique. On pourrait citer plusieurs groupes qui ont proposé des albums répondant à cette unique définition. On y mettra bien volontiers des titres comme le dévastateur “Electric Sheep” (qui rappelle les vieux The Awesome Machine), ou le morceau titre de l’album, ou bien encore le mid tempo très accrocheur “Had a Blast”, sa fuzz roborative et son riff impeccable. Le groupe a fait ses gammes et maîtrise le genre, à l’image de ce presque Kyuss-ien “People from the Sky”, qu’il emmène en conclusion sur des terrains groovy vraiment bien foutus.
En parallèle, on reconnaîtra à Thammuz une démarche visant à proposer plus de diversité stylistique (sans jamais trop déborder des chemins grassement fuzzés qu’il emprunte). Ainsi le groupe propose trois petits instrumentaux vraiment bien foutus, dont l’excellent “Guayota” qui propose une déclinaison très intéressante, avec une montée en régime envoûtante qui pourra même rappeler My Sleeping Karma. Autre exemple un peu plus loin, “Self-taught Man” déroule son couplet tout en bonhommie envoûtante, qu’il jumelle d’un refrain bien gras (quel son !) fort bien senti.
Avec dix titres pour 37 minutes, Thammuz fait dans le synthétique, et ne tire pas ses morceaux en longueur ; c’est une bonne chose. De plus, ces dix chansons proposent ainsi une large gamme de chansons, autant de couleurs dans la palette stoner développée par le groupe. Evidemment certains sont plus dispensables, mais la qualité générale est bonne, voire très bonne.
Dans notre chronique de leur compilation God Damn Rare il y a moins d’un an (lire ici), on appelait de nos vœux en conclusion un éventuel volume 2… Si jamais nous devions évaluer l’influence de Desert-Rock sur le marché du disque, la preuve éclatante nous est apportée ici, sous la forme de cette nouvelle offrande vinylique ! On vous renvoie vers la susmentionnées chronique pour un rappel introductif de l’importance de TAM dans l’histoire du stoner européen, on va éviter la redite et se concentrer sur cette nouvelle production de Ozium records, un confidentiel petit label qui, dans l’ombre, continue son impeccable travail de réhabilitation des trésors oubliés du stoner, via des rééditions ou, comme ici, la mise en lumière de raretés.
Onze nouvelles offrandes, comme autant de sucreries pour les nostalgiques, à travers des titres qui n’auront pour la plupart tout simplement pas eu l’opportunité de trouver leur place dans les quelques albums du groupe. Et pourtant la qualité est au rendez -vous… de même que la variété. Cette nouvelle galette a beau racler les fonds de tiroir, elle propose un généreux lot de raretés et d’inédits.
Ca commence fort avec la version démo de “Hunt You Down” (un morceau de leur dernier disque), qui n’a rien à envier à la version studio. Gros riff groovy, mid-tempo, fuzz crasseuse… on est bien. On retrouve un peu plus loin “Holy Moment”, un pur inédit (issu des sessions du troisième album) que nous connaissons bien, à Desert-Rock, puisqu’il y a une vingtaine d’années on vous le proposait en exclu mondiale. Même origine pour “Burden Fall” (un titre pas follement original mais qui reprend de A à Z la recette sonore du groupe) ou l’instrumental très intéressant “House on Haunted Hill”, qui a servi de trame pour le morceau-titre de l’album, “The Soul of a Thousand years”. Petit flashback aussi avec le rare “Life in Hypercolor”, riffue torgnole présente sur un vieux split avec leurs compatriotes Rickshaw.
Le reste de la galette, comme une bonne part du “Volume 1” est constituée de titres de travail qui avaient été composés et enregistrés (au stade de pré-productions) en 2004 dans le but de figurer in fine dans le mort-né quatrième disque de TAM. Tous ces titres mis bout à bout, on arrive petit à petit à se figurer ce qu’aurait pu devenir ce disque si le groupe n’avait pas déclaré forfait en cours de route : un disque énervé, qui aurait proposé une intéressante palette musicale. On passe ainsi du speed et énervé “Stand Out, Beat it up” et son collègue agité “My Way”, au groovy-doom “Gods Broken Stone” et son refrain addictif, en passant par un “Make me Crawl” qui évoquera une sorte de grunge metal. “Nail Inside Your Head” quant à lui, un peu moins produit, propose une sorte de synthèse du lot (un refrain catchy, une rythmique groovy, un son puissant, un chant hargneux…).
Du coup, alors que le plaisir berce chaque écoute, c’est plutôt la tristesse teintée de nostalgie qui nous accable un peu, en regardant ce disque pour ce qu’il est, avec un peu de recul: un aperçu à peine dissimulé de ce qu’aurait pu proposer The Awesome Machine en continuité de sa carrière. Leur quatrième album aurait proposé, on le sait désormais, du matériel qualitatif, le groupe n’étant pas en manque d’inspiration… Finalement, un peu bêtement, on aurait presque préféré y retrouver le reflet d’un groupe exsangue, sans inspiration, avare en proposition… ça aurait permis de faire passer la pilule et de justifier la fin de carrière prématurée du quatuor. Or il n’en est rien, et à en juger par la qualité de cette nouvelle volée de démos, il y a fort à parier que ce disque mort-né aurait pu trouver une place fort honorable dans la continuité de sa discographie.
Alors maintenant, quoi ? Un volume 3 à venir ? On sait que le groupe a été prolixe en splits, EPs et autres contributions, cela pourrait constituer un matériau qualitatif pour une nouvelle dose de nostalgie en rondelle – que l’on appelle de nos voeux, bien sûr. On sait aussi que les musiciens ont arrêté le groupe sans heurts ou griefs, et pour certains officient dans d’autres combos, donc s’il leur venait à l’esprit un jour de se remettre en studio pour réenregistrer ces titres sous la forme d’un vrai quatrième album, on ne cracherait pas dessus non plus ! Mais ne rêvons pas trop, et en attendant profitons de ce que l’on a.
Vieux routards de l’ instrumental, Rotor énumère une liste d’albums depuis 1998. Ils sortent cette année leur album Sieben, le setptième donc chez Noisolution. Nous avions pu louer les mérites de ce groupe Berlinois aux contours stylistiques mal définis mais aux compositions brillantes et fédératrice où le traitement des grattes se fait toujours dans l’originalité sur fond de rythmiques épileptiques. Voyons donc ce que nous réserve l’ovni Rotor cette fois-ci.
Le constat est qu’une fois encore le groupe a décalé son style avec ce nouvel album, allant chercher un peu plus dans ses ressorts kraut et math rock, notablement sur “Reibach” et “Schabracke”. Chaque accord est implacable, d’ une propreté saisissante marque de fabrique d’un groupe qui a longtemps fourbi ses armes sans s’attarder à coller à un style précis.
Les titres s’enchaînent cependant sans qu’ un seul soit plus mémorable que l’autre faisant de cet album comme ceux auparavant un bloc assez délicat à intégrer. Je dis qu’ aucun morceau n’est plus mémorable…c’ est aller un peu vite en besogne la perle se cache un peu il faut aller gratter du côté de “Kahlshlag” pour que le quartette se fasse plus uni, la musique plus massive et viscérale, plus doom en somme avant de conclure sur le léger “Sieben”. On le comprends dès lors avec cette transition, Rotor livre un travail en pleins et déliés les pistes sont toutes le lieu d’expérimentations entre accords percutants et compositions plus fines, ce travail étant valable tant du côté des guitares que de la rythmique.
On passe un bon moment avec Sieben, Rotor à embarqué dans cet album tout son talent de technicien et a su faire évoluer positivement sa musique pour la rendre encore plus réfléchie. Il restera cependant difficile de placer précisément le curseur de son préciation sur cet ensemble qui oscille tout de même entre le très bon et l’excellent.
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