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Domkraft est un trio Suédois qui sort son deuxième LP Flood, chez Magnetic Eye Records. Ils avaient déjà retenu mon attention lors de leur précédente sortie de 2016 The End Of Electricity par leur approche Post-Metal du genre Doom. Voici donc l’album Flood, tournons nous vers la platine et voyons ce que cela donne.
Galette qui sonne Doom, voix plaintive, basse lourde comme une tonne de plomb, guitare appuyée aux riffs lents et frappes de batterie qui tombent de très haut. “Landslide”englobe la marque de fabrique d’un Doom à la Black Sabbath mais ne fuyez pas trop vite de peur d’être lassés, il y a aussi des choses bien à eux dans tout ca. On se prend à hocher la tête avec une petite sensation de contentement. Pédale fuzz, chant proche dans l’esprit de celui de Windhand effectivement il y a de quoi se laisser porter.
On retrouve chez Domkraft une direction prise dans nos genres de prédilection ces derniers temps, à savoir un attrait pour le post Rock. peut être n’est ce que l’effet du chant hurlé en sourdine mais on se prend tout de même à penser que l’on rentre là dans un courant que pas mal de leurs confrères du Doom empruntent (Devrais je parler de post-doom comme certains parlent de post-Monolord?)
La filiation avec Monolord n’échappera d’ailleurs à personne sur “The Watchers” , crochet guitare/basse qui prend l’auditeur et laisse planer le chant qui néanmoins sonne un rien terne, à la limite du manque de coffre.
En fait ce manque de puissance vocale pousse un peu à la lassitude, rien de vraiment désagréable mais une sensation de trop peu, surtout lorsque toute la compo tourne en boucle comme sur un titre éponyme qui fout le vertige à force d’effets et de phrases répétées (Nous rappelons que l’utilisation de psychotropes n’est pas encouragée par la rédaction).
“They Appear To Be Alive” joue sur un thème plus léger et hypnotique plus par les sonorités que par la répétition. On retrouve l’esprit du Post-Rock et ce n’est pas un tort. Cependant, une piste de 1’23 minutes c’est un peu léger pour se satisfaire.
“Sandwalker” possède un rythme Funeral Doom qui prends lentement mais sûrement le virage du métronome pour s’accélérer toujours dans cet esprit minimaliste constant. Puis gentiment le rythme redescend puis remonte. J’ai une pensée pour certaines composition de Mother Engine. De fait Domkraft peut aussi séduire les amateurs de riffs psychédéliques obstinés et lourds.
L’album décolle un peu sur “Octopus” et curieusement on se met à en attendre un peu plus du batteur (Effet lié au titre?) et la frappe se fait plus fournie et l’esprit global du titre est un rien plus léger (J’ai bien dit un rien) avec un rythme Mid-Tempo agréable à l’oreille.
La bouffée d’oxygène arrive enfin sur “Dead Eye, Red Sky”, il était temps car il s’agit du dernier morceau de l’album. Sur un rythme plus rapide, les riffs de guitare prennent en consistance et enfin on sent que les doigts de Martin Widholm commencent à s’échauffer, la basse tient toujours sa place de monolithe mais cela sert d’autant mieux le jeu du guitariste et du batteur, ce dernier lâchant un peu plus les chevaux sans nous emporter vers des monts de grâce absolue. Le chant semble également se libérer en particulier sur l’outro plus mélodique avec l’abandon du cri, cette conclusion pour Flood finissant comme à bout de souffle.
Tout au long de l’album on trouve des inflences Stoner qui se glissent dans les compositions. L’utilisation du Fuzz et de la Wawa rendent l’album doucement polymorphe et lui confèrent une certaine richesse. Flood est un album qui demande de l’effort pour rentrer dedans. Il ne révèle pas tout son intérêt à la première écoute, mais au fil des auditions on commence à apprécier sa moelle. Répétition pour répétition, c’est un album à mettre en abyme avec lui même et il y a fort à parier qu’il s’agit d’un vaisseau de transport en Live.
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Il y a Pink Floyd et il y a “The Wall” de Pink Floyd ! D’un côté une légende du rock psychédélique (qui a marqué le stoner quoi que certain de mes proches s’autorisent à penser) et de l’autre un concept album issu du cerveau tourmenté de Roger Waters, jadis l’âme de la formation britannique. Il y a à ma gauche des skeuds pour hippies à vestes à franges et à ma droite une démarche résolument nihiliste orchestrée pour être livrée sous la forme d’une véritable performance live genre, genre opéra déglingué, de sa genèse à son apocalypse. Il y a le goret qui vole au-dessus de Battersea Station et il y a l’œuvre cinématographique d’Alan Parker qui a sublimé « The Wall » dont la musique est à jamais associée aux images d’un film qui a fait date. Il y a aussi moi-même qui découvre ce joyau du rock alors que je commence à voir mon faciès se consteller de points noirs et blancs des plus disgracieux. Il y a ce petit suisse qui commence à avoir des émanations malodorantes qui s’échappent d’aisselles se couvrant d’un duvet de poils et qui use jusqu’à la corde la cassette sur laquelle la sœur d’un de mes potes a enregistré ce chef d’œuvre. Il y a ma pomme qui grandit avec cette masterpiece qu’il a acheté dans de multiples déclinaisons et sous toutes ses formes ou presque. Joie fût mienne quand ce double album sortit sur ce nouveau format qu’était alors le CD, ravissement fut mien lorsque des brigands sortirent des captations live que le groupe interpréta alors que je n’étais encore qu’un jeune padawan, mais déception fut aussi mienne lorsque certains audacieux firent leurs les titres de ce mythe. Rage fut mienne quand des artistes de renom (#balancescorpions) se cassèrent les chagnottes en dénaturant, saccageant, voire dégradant de manière outrancière ces joyaux appartenant à notre héritage commun de rocker !
Échaudé par les moult tentatives de réinterprétation de ces ogives, je me suis attaqué à cette énième réinterprétation de ma madeleine qui proute ne sachant si j’allais tenir le choc ou si cette production rejoindrait mes étagères sans même effectuer un deuxième tour sur ma platine avant de se parer de poussière pour l’éternité. Le résultat est bandant, brillant, époustouflant et le génie de l’écriture de cette œuvre à charge conjugué à celui des formations s’étant attelées à réactualiser ces bandes vintage en font une pièce que tout esthète du rock se doit de détenir dans sa discothèque ; il n’y a pas photo, il n’y a pas d’excuse et il y aura sanctions ! « The Wall » est une œuvre majeure du siècle passé et les zicos invités à en donner leur relecture – parfois peu aventureuse en ce qui concerne l’éloignement par rapport à l’original je le concède – font mouche à tous les coups. Comme diraient des Germains : « No Fillers – Just Killers ». Parmi les tueurs il y a du beau monde : The Melvins, Sasquatch, Greenleaf, ASG, Mos Generator, Mars Red Sky (cocoricoooooo), Solace ou le mythique Scott Reeder (et j’en passe). Vous en voulez plus ?
Allez poser vos fabriques à cérumen sur la chavirante version de « Vera » que nous livre Ruby The Hatchet avec une touche féminine qui sied à merveille à ce titre qui transpire le mal de vivre par tous les pores et prolongez la sentence avec « Nobody Home » par Mark Lanegan tout seul avec une ligne acoustique laissant tout le champ à son timbre dépressif : une déclinaison sur laquelle Nick Cave n’aurait pas craché. Allez vous plonger dans l’envoûtante relecture que Summoner fait de l’hymne « Hey You » en faisant sienne la suite d’accords plaqués jadis avec maestria par les Anglais pour la délurer à grands renforts de rythmique bien stoner avec des saturations bienvenues. Faites vous du bien avec « When the Tigers Broke Free », titre essentiel de cet opéra rock relégué sur l’album The Final Cut, mais présent sur cette plaque par l’entremise de Year Of The Cobra qui lui ajoute vociférations et en prime une ligne de basse tueuse en première ligne. Prenez-vous en à vous-même avec « Empty Spaces » transposé par Domkraft qui incarne merveilleusement bien le propos de ce titre en lui donnant les atours psychotiques qu’il mérite. Rejoignez la frénésie avec « Run Like Hell » déployé de manière véloce, mais pas dénaturé pour autant, par Pallbearer.
Bordel ! Courrez chez votre disquaire procéder à l’acquisition de cette réussite qui aligne la fine fleur du stoner pour l’allier à la créativité du génie torturé et vindicatif de Roger Waters qui commit encore le prolongement de « The Wall » avec « The Final Cut » (vous savez l’album où nous retrouvons des titres de ce chef d’œuvre qui figurent au générique d’un film pour lequel Alan Parker n’a pas reçu une Palme d’Or pourtant méritée) avant de tourner le dos à Pink Floyd, mais pas à « The Wall » qu’il trimbale encore par-delà le vaste monde histoire d’alimenter son plan retraite. Pendant que vous y êtes écoutez aussi l’original : il est très bon et matez le film qui retranscrit avec brio le désespoir d’une génération entière de Britanniques, repensez à sa réinterprétation avec des guests (dont certains approximatifs dans leur approche de morceaux légendaires ; que faisait la police du rock ?) à Berlin lorsqu’il incarna la chute du mur séparant deux mondes et des milliers de familles ; considérez ensuite les murs en construction en Europe, aux Etats-Unis et au Moyen-Orient… bref découvrez, écoutez, redécouvrez et réécoutez cette chose auréolée qui le vaut bien !
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“Olaf, t’as mis les fusils dans le Pick-up avec les Bières?
– Ouais, let’s Go!”
Ce sont les dernières paroles dont je me souvienne, je me revois mettre la clé USB dans la prise et démarrer le camion, c’est tout. Nous devions passer le weekend à la chasse et on s’est réveillé au bout de la rue encastrés dans un réverbère… Pour essayer de savoir ce qui est arrivé, repassons nous ces premiers instants. On remonte donc dans le Pick-up avec l’ami Olaf, je branche la clé et là, l’autoradio affiche Greenleaf – Hear The River. Mais c’est bien sur! le 7e album des Suédois nous a fait disjoncter! Une prod Napalm enregistrée par Karl Daniel Lidén ex-Dozer, ex…Greenleaf… Il n’en fallait pas plus!
Il ne faut pas longtemps pour que la profondeur de son et le mix mêlant lourdeur instrumentale à mélodie du chant de Arvid Hällagård nous propulse sur la route à plus de 150km/h. “Let It out!” est une entrée en matière qui porte merveilleusement son nom, solo aux riffs sabbathesques, profondeur amplifiée par une reverb constante ont le chic pour nous projeter dans l’album à toute blinde. On ne change pas fondamentalement de registre vis à vis des deux dernières productions mais on retrouve des pistes avec quelques tours bien malins. J’en appelle à “Sweet Is The Sound” au refrain en Negro Spiritual, surprise rafraîchissante sur une piste faite de Stoner. “Good Ol’ Goat” nous envoie un coup de pied au cul Rythm’n’Blues des bords du bayou, résurrection d’un blues organique dans un emballage maîtrisé et pro. Ce dernier morceau est d’ailleurs un agréable changement d’ambiance sur l’enregistrement des voix qui deviennent plus granuleuses pour un chant en chœur et une rythmique entêtants . Enfin on passe à deux doigts d’une rythmique Rockabilly épileptique sur “High Fever”. Ces compléments épicés sur un album qui aurait pu être attendu en rehausse la qualité.
On comprend bien qu’après un changement régulier de Line-up, Greenleaf s’engage dans un voie qu’il a lui même formé sur la base de ses influences et anciens participants. “A Point Of Secret” navigue entre la patte d’un Clutch et l’esprit fantôme de Truckfighters mais reste cependant du Greenleaf pur jus, alternance de pains dans la gueule et d’émotions bien plus douces. Cette dichotomie c’est d’ailleurs sans doute ce qui qualifie le mieux la formation actuelle du groupe avec en prime les passages de chant tout en légèreté mélodieuse qui impriment une identité forte à la formation. Dans le même registre “The Rumble and The Weight” et “We are The Pawns” sont dans la droite lignée de ce qui avait déjà été fait auparavant.
En définitive, ce Hear The Rivers ne fera peut être pas l’album de l’année compte tenu des sorties qui ont pu se distinguer depuis janvier, cependant il me conforte dans l’idée que désormais il faut attendre Greenleaf dans un créneau bien marqué. La qualité d’exécution autant que la maîtrise de la voie empruntée font de nos Suédois un groupe qui restera parmi les classiques du genre. Petit regret, le peu de renouveau dans l’artwork du disque qui ne le distingue pas vraiment du précédent. Finalement il s’agit peut être d’un choix artistique total que cette continuité, la volonté d’imposer son style tant sur le contenant que sur le contenu.
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Après s’être fait remarquer en 2017 avec leur première sortie (un album live c’est assez rare), le groupe suédois sort son premier album studio simplement titré Hazemaze.
Officiant dans un style stoner/doom assez propre, la musique du groupe peut faire penser à Saint Vitus sur quelques aspects. Mais la comparaison s’arrête là.
On a souvent évoqué le problème de certains groupes à sortir du lot en particulier avec cette mode du revival seventies. Certains y arrivent avec brio, d’autres non. Hazemaze est à mi-chemin entre les deux. Pas assez lourd pour porter haut l’étiquette doom le groupe sort ici un album trop académique. Des recettes cent fois appliquées le sont ici sérieusement, mais trop sérieusement justement. Il manque une touche personnelle, il manque ce petit quelque chose qui pourrait faire la différence. Hazemaze est, j’en reviens à ce terme, trop propre. C’est bien fait mais ça sonne un peu creux. Les plans de basse par exemple sont cool certes mais cela manque d’audace. La batterie accompagne et c’est tout. Pas de véritable envolée, de mise en avant, le batteur fait le job sans plus. La guitare quant à elle ne dénote pas particulièrement. Peu de solo, manque d’autorité sur les chansons, le guitariste se permet quelques petites choses mais cela reste sur du sans risque, du terrain déjà exploré mille fois. L’homogénéité est parfois un atout, ici cela dessert l’ensemble.
Ne me faites pas dire que c’est mauvais, au contraire, c’est agréable à écouter. Mais si vous cherchez de l’originalité, un truc qui vous prends aux tripes à la première écoute, passez votre chemin.
Difficile de dire si Hazemaze a un fort potentiel et si ce groupe est à surveiller de près. J’en doute.
Point vinyle :
Le vinyle est pressé en vinyles noir ainsi qu’en marbrés rouge/blanc/noir. La version black est pressée à 100 exemplaire tandis que la marble à 200 exemplaires. Cette dernière voit ses 111 premiers exemplaires numérotés.
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Formé en 2004 en Suède, Deville sort son sixième album studio intitulé Pigs with Gods chez Fuzzorama Records (Truckfighters, Valley of The Sun).
Il faut le dire, la qualité sonore de la production est au rendez-vous : son gras, lourd et bien dosé. Vous avez notamment un équilibre basse batterie clairement mis en avant et des guitares qui enveloppent le squelette des morceaux. L’utilisation des effets reste simple et efficace afin de laisser beaucoup plus la place à la grosse distorsion, plus proche des productions Métal que du Stoner. « Gold Sealed Tomb » résume bien cette tendance à un Rock plus Sludge qu’avant. Côté chant, il faut l’avouer, la prestation vocale rocailleuse et bien grasse d’Andreas Bengtsson est légèrement noyée dans le mix, mais ça fonctionne très bien.
Si on entre un peu plus dans l’album, on constate rapidement que les Suèdois se sont concentrés avec beaucoup de brio sur la composition et l’arrangement de nombreux titres. « Cut it Loose », qui par ailleurs rend un charmant hommage au chef d’œuvre cinématographique d’Ingmar Bergman et son Septième Sceau par le biais d’un clip vidéo, le prouve avec un dosage instrumental riche et varié. C’est en effet, le métissage mélodique et gras qui sont à l’honneur avec par exemple l’excellent « Lightbringer » : lourd, sensible, lent et progressif à souhait. Les refrains planants et entêtants comme sur la très bonne « Hell in The Water » rappellent entre autres des groupes comme Alice In Chains ou Soundgarden.
Et on a même le droit à des chansons très progressives (« Acid Meadows » ou encore la charmante conclusion « In Reverse »), voire instrumentales (« Dead Goon »). C’est pour ainsi dire, un album riche en ambiances qui nous fait très vite oublier les quelques essoufflements d’originalité en début et milieu d’album comme avec les deux premiers titres « Lost Grounds » et « Pigs with Gods » : largement en dessous et plus académiques que le reste des compositions.
Pigs with Gods est donc à la fois un album qui surprend grâce à un son terrible, à des titres très efficaces et originaux, mais qui souffre aussi de quelques longueurs. Il n’empêche que Deville commence à trouver son style en s’éloignant d’un Stoner traditionnel pour offrir un univers riche en nuances Grunge et Rock Alternatif. On ne peut qu’espérer de bonnes choses pour la suite.
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Le quatrième album des canadiens de We Hunt Buffalo, Head Smashed In sort chez Fuzzorama Records ce mois-ci et devait être attendu par les amateurs de Fuzz corsé au delà des limites de Vancouver. Il propose en 43 minutes neuf titres en demi teinte. J’ai retourné l’album dans tous les sens, l’ai trituré au possible pour me faire une idée de son contenu et force est de constater que la direction prise par le groupe est surprenante, voici pourquoi.
Tout ceci commence sous de bons auspices avec un Heavy Low ou un Angler Must Die lourds et entêtants mais par la suite bien que les riffs mid-tempo influencés par le grand frère Truckfighters semblent conduire les compositions dans la droite ligne de ce qui était fait au cours des précédents albums, il faut bien avouer que la puissance n’y est pas égalée. La voix rappelle parfois les composition d’un Red Fang (Mais également l’instrumentale de “Industry Woes” qui fait partie des meilleurs moments de l’album) mais dévie quasi systématiquement, en arrivant souvent à minorer l’impact de la musique. Il s’agit pourtant d’une tentative louable de sortir du chemin tout tracé du Fuzz sauce jalapeño et d’apporter un peu de fraîcheur dans ce monde vite saturé.
Les thèmes bouclés sur eux même conduisent rapidement à la lassitude et les cris de Ryan Forsythe ne suffisent pas à redonner du souffle aux compositions. “Angel Must Die” oscille entre rage et passages plaintifs assez vite. J’ai été pris d’un malaise, d’une sensation de déséquilibre et les morceaux format radiophoniques ne dépassant jamais les 5 minutes n’aident pas à redresser la barre. C’est une furieuse impression de déjà entendu et de lassitude qui s’empare de moi au fil des pistes, “Prophecy Wins” joue le même riff jusqu’à l’écœurement., les effets ne suffisant pas à compenser un morceau sirupeux à la guitare excessive sur basse monomaniaque.
Pour autant il y à quand même de belles initiatives, “Get in the van” dont l’intro donne une furieuse envie de bouger contient ce qui fait le plaisir Fuzz, batterie en cascade, effets de gratte en fond sonore, jeu vif et entraînant débouchant cependant sur des solos trop démonstratifs. Je crois à la reflexion le chant responsable d’une grande partie du déplaisir ressenti. Je ne peux pas dire que ce ne soit pas maîtrisé bien au contraire mais je trouve tout ceci mou et sans profondeur. Une véritable impression de redite tout au long de la plaque. “The Giant Causeway” ou “God Games” forcent cette tendance larmoyante au format entendu. Néanmoins j’enrage! Il serait si facile de dire que cet album n’est complètement pas à la hauteur, mais les sursauts rythmiques et mélodiques attirent l’attention donnant envie de s’y pencher encore et encore afin de s’en convaincre peut être la mayonnaise finira-t-elle par prendre?
Au final Head Smashed In est une galette en trois tiers dont la recette repose sur la frustration de voir We Hunt Buffalo ne pas se maintenir au niveau, proposer des idées entendues mais agréables et d’imposer malgré tout de talentueux passages. Cet album viendra garnir agréablement les sets Lives mais en résumé, je ne sais pas quoi faire de l’objet, alors je vous pose ça là, la meilleure option restant de vous faire votre propre avis après quelques écoutes.
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On a beau avoir assisté à quelques prestations scéniques décoiffantes et rafraîchissantes du trio américain ces dernières années, Castle reste un groupe un peu confidentiel, en tout cas pas au niveau de notoriété et de reconnaissance que l’on peut imaginer pour un groupe qui existe depuis bientôt une décennie, et dont la discographie est déjà riche (4 albums sous le coude, ce Deal Thy Fate est leur cinquième… pas mal en moins de 10 ans !). Désormais accueillis dans l’écurie Ripple Music, on peut espérer les voir profiter dans les prochains mois de ce support plus dynamique pour faire connaître leurs productions et parcourir les salles obscures du vieux continent à un rythme plus intensif. C’est donc avec un œil bienveillant qu’on accueille cette nouvelle offrande du groupe.
Castle évolue dans un genre musical très old school, qui trouve ses ramifications dans les meilleurs terreaux du metal US/UK essentiellement : on y croise du doom old school à la Pentagram, des assauts heavy à la Judas Priest, des rythmiques galopantes à la Iron Maiden, des attaques de gratte sèches et nerveuses et des rythmiques à la Slayer ou Megadeth… Pas très stoner tout cela… D’ailleurs le groupe ne s’en est jamais directement revendiqué. Néanmoins, le charme suranné de l’ensemble, son embarquement chez Ripple Music, ou encore le lien organique qui est souvent fait avec des groupes de notre « scène » musicale de prédilection (on parle de dizaines de tournées en compagnie de têtes de pont du doom ou stoner, de participations remarquées à des festivals type Desertfest…) en font un groupe « à suivre » pour tout amateur de stoner.
Pour peu que l’on ne soit donc pas rebuté par les influences sus-mentionnées, n’importe qui devrait pouvoir prendre son pied en écoutant cet album : il propose un metal généreux et débridé, servant des compos parfaitement ficelées, sans rien qui dépasse, orientées efficacité (toutes les chansons durent entre 4 et 5 min, sauf une… à 5 min 01 !). Le riff, essentiel dans la musique du combo, est toujours clinquant et catchy, et pose les fondations de titres tous impeccables : les heavy rampant « Haunted » ou « Can’t Escape the Evil », les nerveux « Deal Thy fate » ou « Skull in the Woods », les mid-tempi de « Hexenring » ou « Firewind »… Castle n’en met pas une à côté sur ce Deal Thy Fate. Rajoutez à ça l’un des meilleurs sons qu’ils aient eu jusqu’ici, et les ingrédients semblent réunis pour faire de cette galette leur meilleure à ce jour.
A noter que le trio instrumental n’est en réalité dans les faits qu’un duo, puisque le groupe a toujours été emmené par la charismatique Liz Blackwell (basse et chant) et Mat Davis à la guitare (et un peu de chant). Les batteurs vont et viennent au sein du groupe, qui ne s’embarrasse même plus à justifier de la présence de l’un ou l’autre, qu’il s’agisse de mercenaires de studio ou de requins de tournées… Il faut dire que les deux compères sont en phase, partageant parfois des lignes de chant (plus généralement assurées par Liz), mais plus généralement en se répartissant les armes de manière parfaitement complémentaires : riffs saignants et soli généreux pour Davis, rythmiques teigneuses et support mélodique pour Blackwell.
Un album à recommander aux metalheads en premier lieu, mais aussi aux amateurs d’un stoner doom nerveux et délicieusement suranné (mais jamais vieillot), qui trouveront là de la matière à quelques dizaines d’écoutes enthousiasmantes et un potentiel de headbanging au top.
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Groupe de Prog qui aurait été engendré par la fine fleur des précurseurs du Spacerock et des descendants de la jeunesse de Judas Priest. Second Sun nous livre sa seconde production Eländes Elände. Le quartette qui porte fièrement sa langue en chantant exclusivement en Suédois et démontre avec cet album qu’il est possible de faire du neuf avec du vieux.
Les claviers apportent une touche surannée qui glisse souvent vers le Prog le plus complet rappelant les belles heures des Camel, Jethro Tull et consorts. D’ailleurs l’influence d’un Camel est prégnante tout au long de la plaque. Un “Enda Sunda Maenniskan i Vaerlden” devrait t’en convaincre rapidement. Et cette filiation tant du point de vue rythmique que mélodique n’est pourtant pas un simple plagiat.
Le chant est scandé et mélodieux, la langue se prête tout à fait à cet univers daté et jouissif. Véritable machine à remonter le temps on retrouve dans Eländes Elände du Deep Purple dans les structures des morceaux ( Cf le solo de claviers sur “Du Ska Se Att Det Blir Samre”) Comme du The Stranglers dont la filiation est assumée par Second Sun. Celle-ci expliquant peut-être l’impression d’écouter un album du bloc de l’Est à la charnière 70-80 tant The Stranglers semble en avoir influencé le rock. On navigue entre Proto Métal et Hard Rock. “Panikangestattack” est la pépite excitée de l’album, apogée punk qui nous fait échouer dans les années 80 . S’il est clair que le claviers font la plus grosse partie du job et portent l’album de bout en bout, le chant n’est pas un élément mineur, il donne toute leur force aux compositions tant de part la sonorité du suédois que de part ses envolées lyriques régulières en choeur.
Le dernier titre éponyme rentre immédiatement en tête. Petit tour de passe-passe composé sur le gimmick d’intro de l’album etla boucle est bouclée pour cette galette divisée en deux grandes parties à cause d’un enregistrement en deux temps. Il est curieux de d’entendre au fil des pistes des sonorités venues des frontières du Rock Disco dans un premier temps et de revenir à un Rock Prog dans un second, mais tout cela s’emboite parfaitement et c’est une preuve indéniable de talent.
Tout ceci pourrait être d’une ringardise absolue mais c’est sans compter l’intelligence de Second Sun qui fait ressurgir des limbes les débuts du métal et livre une galette qui a pleinement sa place parmi nos chroniques. Et au milieu de toute cette joie de vivre si tu te mets à courir nu dans les champs la tête ceinte d’une couronne de fleurs c’est donc tout à fait normal.
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Ici le monde se divise en deux catégories, ceux qui n’ont jamais vu Kadavar en Live et ceux qui les ont vus à chaque passage à proximité de chez eux. Me classant dans la seconde catégorie, je pourrais craindre de m’attaquer à cet album en toute “inobjectivité”, mais votre serviteur saura rester fort et prendra soin de livrer une analyse cohérente de la situation. Depuis 2010, le trio des Christoph Allemands (et un peu Français de part son bassiste Simon, soit 33.33% de cocorico) aura pondu avec cet enregistrement 6 albums de qualité dont 2 Lives. Alors pourquoi remettre le couvert avec ce Live in Copenhagen alors que le Live in Antwerp aurait pu suffire ? La réponse réside dans le fait que Kadavar est un pur groupe de scène. Les gars passent la majeure partie de leur temps en tournée et en font un sacerdoce pour permettre à tout un chacun de venir honorer le corps bien vivant du rock 70’s.
Une fois ceci dit, il faut se poser la question de la valeur ajoutée de la Set-List. Ce live comporte les titres “Doomsday Machine”, “Black Sun”, “Living In Your Head”, “Forgotten Past”, “Purple Sage”, “All Our Thoughts” et “Come Back Life”qui étaient déjà présents sur le précédent album et composent donc la moitié des 14 titres du présent opus. Le fond de commerce est donc là depuis le Live in Antwerp, pour le reste on ne note qu’un titre pour Kadavar et Berlin et quatre titres issus du dernier Rough Time
Sorti de cette analyse structurelle attaquons la qualité de l’enregistrement et là, petite déception sur les premier morceaux, la voix de Lupus semble faiblarde et ne pas tenir la note, constat assez régulier d’ailleurs en Live et horreur, une dose de reverb sans fin. Celle-ci remplissant les oreilles jusqu’aux prises de paroles entre les morceaux. On en arriverait presque à se demander si l’enregistrement n’a pas été fait dans un stade vide. Ce défaut dure sur 4 morceaux avant que cela ne rentre dans l’ordre à partir de “The Old Man”, la voix revenant au naturel et gagnant en intensité. À noter que la remarque était déjà valable pour le Live in Antwerp saturé de reverb et d’imperfections.
Le tournant est assuré avec “Die Baby Die” et on imagine parfaitement la tornade Teutonne emporter le public sur son passage bien que le mix ne laisse judicieusement qu’une place intermédiaire à celui-ci. Coté instrus tout y est et confirme les tendances du groupe. Un Tiger qui fait le show à la force de la baguette, tout en puissance et en contre temps. Dragon aura mis quelques temps à passer sur le devant de la scène et il s’implante à présent parfaitement dans le groupe. Les riffs de basse envoient leur puissance et l’artiste assène sans mollir ses harmoniques pas piquées de vers. Une fois de plus La comparaison entre les deux lives tend à montrer l’importance prise par le gars au fil des tournées.
Finalement ce live est organique, il évolue au fur et à mesure des morceaux avec ses imperfections et ses pépites, un vrai Live qui ne triche pas, une seule prise, peu de montage et un savoir faire assumé. Si tu as déjà assisté à une prestation de Kadavar tu y retrouveras des sensations connues, pour le néophyte il y aura probablement beaucoup d’interrogations mais il ne devrait pas t’échapper qu’il va falloir creuser la question en prenant ta place pour le prochain show du groupe.
Point Vinyle:
Comme à l’accoutumée, Nuclear Blast voit les choses en grand et propose outre le classique double LP Noir, quatre autres couleurs: 500 copies Transparentes, 300 copies en version tourbillon rouge et blanc, 300 copies en version tourbillon noir et crème et 300 autres en version tourbillon bleu et jaune
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Est-il encore la peine de présenter le groupe Uncle Acid & the Deadbeats? Le quartette de Cambridge évolue depuis 2010 dans les sphères du Heavy Psychédélique à tendance Doom avec pour fil conducteur des sonorités 70’s trempées dans un malaise constant et ils sortent leur cinquième galette. (Ah ben merde, je les ai présenté). Voilà donc trois ans que nous étions sans nouvelle du groupe, la galette intitulée Wasteland était d’autant plus attendue des amateurs et rien que le titre offre quelques promesses au connaisseur des sons torturés de Tonton Acide.
Le groupe se démarque par sa constance à emmener l’auditeur vers un univers qui lui est propre. Droit dans ses bottes Uncle Acid réalise un job sans surprise mais délectable où le mélodique sert la vision d’une réalité dégueulasse. Wasteland convoque à chaque morceau le le malaise et l’apaisement. La puissance mélodique dégagée à chaque titre fait de l’album une rareté au sein des intentions du milieu Doom actuel. Uncle Acid ne cherche pas à être toujours plus lourd, au contraire, il tire vers le haut et l’aérien et ne conserve que la moelle déstabilisatrice du genre. C’est d’ailleurs un fait revendiqué par Kevin Starrs, Wasteland est un album de Heavy qui laisse libre court à une inspiration mélodique et saisissante.
On l’a dit mille fois, Uncle Acid c’est avant tout une appropriation des codes de la musique des années 70, “Shockwave city” fait la part belle à la réputation du groupe en sortant un son Crunchy et consistant comme un Black Sab’ des familles ou “Blood Runner”, idéalement Heavy entre un hymne 80’s sur un son de Les Paul de chez Led Zep’.
Afin d’imaginer l’appétit de Kevin Starrs pour le genre horrifique, il suffit de se pencher sur “No Return” qui fait office de cirque hanté, avec une composition très visuelle qui serait la mise en scène d’un Comics de Eric Powell par Jacques Tourneur. La recette de Uncle Acid tient en deux ingrédients principaux, du classique Heavy et un univers entre beauté et fantastique. Le titre éponyme “Wasteland” en dit d’ailleurs long sur le sujet, petit à petit la composition se dégrade, l’auditeur assiste à une déchirure dans le rideau et le monde se montre tel qu’il est, dégradé et pourrissant, se tordant de douleur et de frustration.
Le lancinant “Bédouin” et son gimmick appuyé ne laissent pas indemne, on cherche sans cesse à revenir sur l’écoute et le titre s’impose avec des sons de trompette qui restent en boucle dans la mémoire de l’auditeur. L’Équilibre délicat entre malaise et bien être fait de l’album un oxymore musical. “Exodus” clôture en oraison funèbre la galette, la grosse caisse devient un battement de cœur accompagné d’orgues pour une montée en puissance sur un rythme martial de caisse claire qui s’éloigne comme le passage d’un cortège mortuaire.
Les 46 minutes de Wasteland ne seront certes pas un monument d’originalité au sein de leur discographie cependant Uncle Acid & The Deadbeats font ce qu’il savent faire et le font bien. Tout au long de l’écoute on saura apprécier le mélange subtil d’influence et l’alchimie qui s’opère entre Rock Psyché, Pop, Folk et Blues. On remarquera enfin que le groupe s’oriente vers une musique plus mélancolique et touche juste avec son regard sur un monde en état d’urgence et nous laisse avec son spleen une fois la dernière note égrenée.
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Une fois encore Nuclear Blast investit dans le revival des 60-70’ avec The Vintage Caravan. Un choix n’étant plus un pari depuis longtemps pour ce style qui ne cesse d’envahir les scènes depuis la dernière décennie. Surtout pour un power trio comme celui-là ayant par deux fois fait ses preuves au sein du label allemand. Nos jeunes amis islandais proposent donc en cette fin d’été 2018, leur quatrième album intitulé Gateways. Une composition riche en nostalgie et pourtant pleine de vie.
Ici pas la peine de chercher les pistes s’étalant sur douze plombes avec d’interminables séquences de soli endiablés ou de psyché langoureux. Comprenez-moi bien, ces petits trésors constellent l’album, mais ils s’étalent sur presque une douzaine de morceaux ne dépassant que rarement les cinq minutes. D’où une certaine sensation de richesse. De cette façon, le titre d’introduction « Set your Sight » et surtout « Reflections » évolue sur les platebandes d’un hard rock énergique, ce qui évoque d’ailleurs pas mal Kadavar, tandis que « The way » apporte une fraîcheur bluesy s’achevant par un solo délicieux à souhait. Ici on s’approche de Radio Moscow sans le côté défrisage de brushing. Certains diront aussi Graveyard, et tout monde aurait raison.
En définitive, c’est le classic rock qui l’emporte. Des pièces dont la dimension narrative se pose au premier plan comme « On the Run » ou « Tune Out » en attestent. On réalise alors que le groupe s’avère capable de bien davantage que d’un simple pastiche de ce qui fut la gloire d’une période passée. Pour ces énergumènes âgés d’à peine un quart de siècle, assurer la survie du genre tout en apportant leur touche originale pleine de fraîcheur est admirable. Comme quoi le talent ne rime pas toujours avec l’âge.
Et en parlant fraîcheur, évoquons un instant « Nebula », une balade pleine de douceur dans un univers psychédélique instigué par des effets de voix très rétro eux aussi. Ce morceau, c’est la scène du petit déjeuner dans un film d’action ; c’est le changement de partenaire dans un bal ; la sauce sur le lit de pomme de terre. Elle participe à maintenir le rythme, à apporter de la tranquillité sans jamais frôler les rives dévastatrices de l’ennui. Ce qui nous permet d’apprécier au mieux les dix compositions des Islandais.
Puis l’on arrive sur le très réussi « The Chain », un cover de Fleetwood Mac faisant ici office d’épilogue. Vous l’aurez donc compris, ce quatrième opus de The Vintage Caravan oeuvre dans la lignée de ses prédécesseurs. Et s’il convient parfaitement aux oreilles d’un bagpacker amateur d’orgues Hammond en pleine traversée de l’Arizona, il comblera à merveille tous les adeptes de ces disques qu’on ne cesse d’écouter sans jamais parvenir à se lasser.
Farewell, my friends !
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Le précédent album des allemands de Earth Ship (Hollowed / 2016) montrait le quatuor atteindre un niveau de qualité remarquable, une sorte de pic dans leur carrière qui les voyait aussi bénéficier d’une sortie chez les gros Napalm records. Le rayon « stoner et consorts » de ces derniers ressemblant plutôt aux écuries d’Augias depuis un an environ, le passage d’Earth Ship n’y fut qu’épisodique, et les voilà revenir au bercail, chez les fidèles et pas rancuniers Pelagic Records. Autre changement, de taille (littéralement) : le quatuor est désormais trio ! Ou plus précisément redevenu trio, la greffe avec Marcel Schulz, apportant une indéniable richesse sur album, n’ayant apparemment pas pris sur le long terme. Jan Oberg se retrouve sans ambigüité principal artisan de son groupe (chose qu’il a toujours été, reconnaissons-le), s’appuyant sur sa femme Sabine à la basse (un rôle ô combien important pour un trio de metal à la musique aussi pointue et exigeante).
Ce Resonant Sun est donc particulièrement attendu au tournant, a fortiori par votre serviteur, un peu déçu du rendu live des titres de Hollowed en format trio, entendus juste après le départ de Schulz… Mais il faut croire que ce constat était probablement plus lié au manque de temps pour travailler de nouveaux arrangements, car ici, sur disque, jamais le manque d’une seconde guitare ne se fait sentir. Mieux encore : même si quelques lignes de guitare sont rajoutées ponctuellement, la majorité du disque s’astreint à ne s’appuyer que sur la guitare de Jan, sans artifice ; gageons que le rendu en live n’en sera que plus aisé, et donc fidèle. Par ailleurs, répétons-le, la production du disque n’en souffre aucunement, grâce aussi au bon travail de Sabine à la basse, qui parvient à combler les « vides » par un son riche et puissant en rythmique.
Au niveau des compos, on retrouve le Earth Ship qu’on avait quitté, sorte de combo metal aux relents sludge léchés, développant une large variété de styles musicaux à travers les huit titres de leur galette. Parmi les plus emblématiques, « A Handful of Flies » avec son riff super-catchy et son chant aux cordes vocales déchirées, fait office de fort logique premier single. Particulièrement efficace dans la production de bons gros riffs bien heavy, les berlinois sont en démonstration sur le binôme « Smoked Filled Sky » / « Barren », apportant aussi au passage une bonne vision sur l’éventail vocal de Jan Oberg : yell scream saccadé et rauque (tendance Dopethrone, la glaire en moins) sur le premier, et chant clair avec chœurs en harmonie sur le second. Autre exemple sur « Dormant » où il alterne les deux types de chant sur un même titre. « Whiplash » plus loin propose une entame qui ne dépareillerait pas chez Mastodon et se transforme en brulot nerveux, que l’on pourrait imaginer figurer sur la set list d’un bon vieux Pro Pain, tandis que « River of Salt » est un peu ce qui peut s’apparenter le plus au doom version Earth Ship : tempo lent, riff pachydermique répété à l’envie, chant déchiré et déchirant…
Mais l’un des titres les plus efficaces de l’album est inéluctablement cet imparable « Resonant Sun », empruntant au doom mélodique avec penchants gothiques. Mélodie addictive, break/refrain super efficace, rythmique simpliste mais parfaitement adaptée… Un titre évident, qui se calera immédiatement dans un coin de votre mémoire.
Bref, une belle palanquée de compositions soignées, efficaces, qui se révèlent encore une fois le véritable trésor de guerre sur lequel Earth Ship peut appuyer ses prestations live. Son challenge consiste en réalité à transformer son travail d’enregistrement en live. En effet, le son de l’album est parfait, riche, puissant, peaufiné pendant des mois par Oberg dans son propre studio. En retranscrire la finesse et la force sur scène sera délicat. Il nous tarde de voir… En attendant, on pourra écouter ce disque à l’envie, et on en suggèrera l’acquisition à la frange la plus « metal » de nos lecteurs, ouverte à un plus large spectre musical.
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Pas de répit pour Fvzz Popvli, en seulement 2 années d’existence, les Romains, signés chez Heavy Psych Sounds, comptent déjà à leur actif plus d’une centaine de dates à travers l’Europe, un EP, un album éponyme sorti l’an dernier et nous en propose un second en cet automne 2018: Magna Fvzz.
Dans la lignée de ses productions précédentes, le trio italien nous offre une dose de garage psychédélique dopé à la fuzz et cite comme principales influences Black Sabbath et les Stooges.
Les bases sont posées dès les premières notes : les morceaux sont massifs et interprétés dans un certain empressement qui transpire d’un esprit résolument rock’n roll tandis que les structures s’articulent, dans l’ensemble, autour d’un chant acide, gorgé d’effets et fortement mis en avant dans le mix.
La guitare, ornée d’une fuzz baveuse, joue le jeu de l’alternance et prend la relève dès que la voix se place en retrait. Entre soli (« And Let it Die… », « The Deal », « Get Me »), riffs couillus (« Napoleon », « Rvmpeltvm ») et passages d’avantage trippants dans lesquels les effets prennent une place importante (« Cherry Bowl », « Magna Fvzz »), Pootchie, particulièrement inspiré, fait usage de la richesse de sa palette avec une grande justesse.
A la section rythmique, Datio et George ne sont pas en reste et apportent une plus-value certaine à l’album grâce à un jeu maîtrisé et des plans inventifs qui enrichissent réellement les compositions (ligne de basse de « Cherry Bowl » et « Magna Fvzz, jeu de batterie sur « The Deal » et « Magna Fvzz »). Enfin, la production de la galette ajoute un caractère lo-fi bien pensé qui accentue l’aspect cohérent de l’œuvre, liant entre eux les instruments et les morceaux.
Morceau coup de coeur: « Magna Fvzz », pièce instrumentale dont le riff de départ est introduit par le duo basse-batterie et qui vrille progressivement en une longue jam qui s’aventure sur les terres du space-rock. En prime, Bazu, du groupe d’Acid Rock Giöbia, passe aux claviers pour venir prêter main-forte aux Romains qui, totalement débridés, terminent leur album dans un trip spatial.
Avec pertinence et talent, Fvzz Popvli offre une suite logique et affirmée à son projet et poursuit sa marche en avant. Magna Fvzz est un excellent album de rock’n roll et tous les amateurs de gros fuzz et autres délires psychédéliques seraient bien inspirés d’y arrêter une oreille (ou deux)!
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Cette chronique ne fera pas sens pour le commun des lecteurs, pas plus de sens en tout cas que les paroles de ce bon Matt.
Quelque part dans le temps (mais vachement dans les années 90 quand même) : Au commencement il y avait Sleep. Les 4 éléments comme ultime rempart contre le mal, conservés dans un temple quelque part dans le désert, avec Matt Pike en débardeur et Al-ziz Cisneros pour la lumière. Puis les 4 éléments ont été dispersés. La terre a servi à faire pousser de l’herbe et l’air à aspirer les vapeurs cannabiques récoltées. L’eau donna OM entité spirituelle aux drones de sonorités et le feu bien sûr forgera le métal le plus pur, celui d’High On Fire.
2018. Californie. Mais dans quelles vapeurs cosmiques, dans quel ziggourat mésopotamien Matt Pike va t’il puiser une telle inspiration? Après avoir assis ce que le monde compte de doomsters avec The Sciences en avril, monolithe musical déjouant les/mes pronostics quant à la pertinence d’un retour musical de Sleep en ces temps de cigarettes électroniques, l’homme à la célèbre raie de plombier revient avec un second album dans la même annualité calendaire. Avec High On Fire donc, flamboyante formation qui depuis désormais 20 ans nous inculque l’art du self-défense, le moustachu revient aux affaires dans un grand fracas d’acier et de fureur. Et je ne vous ferai pas passer des serpents pour le Divin, ce nouvel album est on ne peut plus solide. Par bien des égards en effet, High On Fire est à la crasse stoner metal ce que Motörhead est au heavy metal. Un groupe emblématique et respecté de toutes les sous-chapelles, privilégiant rythmiques galopantes et voix glaireuse comme si Matt Pike était enveloppé des ailes noires bénies de Lemmy Kilmister. Rien d’étonnant alors que le 8ème album de cet autre trio infernal soit dédié à cette légende aujourd’hui défunte. Un messie électrique, un être luminifère dans ce monde obscur nourrissant la paranoïa de Pike, convaincu d’être encerclé par les voleurs. La mort est cette communion nécessaire, permettant aux vivants de s’accrocher et de rêver à de meilleurs futurs. Et Electric Messiah est un album plein de vie.
S’il est toujours difficile de tout comprendre aux obsessions de Pike, ne tâchons pas forcement de percer le mystère des vers (selon ses termes certains titres de l’album sont des parties d’un opéra rock sumérien qu’il a écrit) mais attardons nous sur le fourmillement d’idée que renferme l’album. Toujours produit par Kurt Ballou (3 d’affilée, voilà qui ressemble à une vraie relation de confiance), le disque dégueule littéralement d’idées. Que ce soit le riff tourbillonnant de « The Witch and the Christ » ou la pièce de choix que sont les 10 minutes martiales et rampantes de « Sanctioned Annihilation », tout ici suinte la classe. Il y a « Electric Messiah » bien sûr, single frappant aussi sourdement qu’un lourd marteau, il y a « Spewn from the Earth » mais il y a tout le reste aussi et la définitive « Drowning Dog » clôturant sublimement ce disque, qui se place indubitablement parmi les plus belles réussites d’High On Fire. Et puis merde si ni mes mots, ni la pochette, entre sublime et abomination, ne vous ont pas convaincu, sachez que ce disque comporte un titre nommé « Steps of the Ziggurat / House of Enl ». L’un des albums de l’année, mais qui en aurait douté ?
Point Vinyle
Opaque n’est pas la couleur d’un des pressage mais bien la communication de E-one, le label, trop occupé à vendre du Ace Frehley aux quinquagénaires. Donc pour cet album vous avez deux ambiances possibles : soit le noir classique sur Amazon, fnac, votre disquaire etc. soit les bundles sur le site d’HoF permettant d’accéder aux pressages White (500 ex) et Purple (500 ex) pour 45 dollars (avec Tee shirts et goodies). Il semble qu’une version rouge soit dispo mais c’est aussi clair que le lien entre les reptiliens et le 11 septembre (si y a un lien, Matt Pike vous expliquera).
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À peine soufflées les bougies du second anniversaire de la formation actuelle, à peine le succès du magnifique Servant of The Salem Girl consommé que les fils du malin reviennent en ce début d’automne avec un nouveau rejeton. Une créature à six têtes, aux ascendances infernales indéniables et intitulée Of Blood And Wine. Et tout comme le DLC de The Witcher 3 duquel son nom est emprunté, cet album comporte de l’aventure, du rebondissement, des émotions et la marque d’un travail de qualité digne des meilleurs artisans.
Lors d’une précédente interview, le quatuor originaire de Poitiers stipulait avoir envie que les gens les reconnaissent, mais qu’ils soient aussi surpris par leurs idées, qu’ils sentent une certaine évolution finalement. Après quelques écoutes du nouvel opus, on ne peut que saluer la réussite du projet. Car si l’on reconnaît d’entrée la patte sinistre et incantatoire du groupe dès les premières notes de « Join the Dead Ones », on est aussitôt surpris par sa transition vers le premier couplet. C’est le départ du voyage en compagnie des quatre prophètes. Un voyage à la dimension épique cette fois qui sera confirmée par le côté heavy metal de l’album. Si Servant of The Salem Girl nous transportait au cœur du caveau sépulcral, Of Blood And Wine nous en éjecte l’épée et le sceptre en main pour un pèlerinage sanglant.
L’alternance de passages clairs et saturés au chant apporte toujours autant de profondeur à la musique, notamment dans des pièces comme « Lust » où le prélude doux et paisible danse avec les riffs électriques de Robin et les grognements enragés de Tom. Le tout offrant une atmosphère ambiguë, lugubre et finalement assez évocatrice de la luxure. La taille avoisinant les dix minutes du morceau se prête à l’exercice narratif. Mais il y a mieux.
« Erzebeth », du haut de ses 12 minutes 49, et disponible en exclusivité trois semaines avant la sortie officielle de l’album, est un conte. Une pièce invoquée par un doom électrique qui se met ensuite à galoper sur les platebandes du hardrock. Une balade entre des portions riffées à souhait, des soli frénétiques sans oublier des interludes au chant parlé qui, s’ils apaisent, n’existent que pour précipiter davantage dans la gueule du monstre. Derrière ce monument, la presque timide « Of Blood and Wine » passe pour un simple interlude harmonique du fait de ses 2 minutes 40.
Ce qui transparaît de cet album, c’est la liberté totale avec laquelle le groupe compose. Loin d’être mis sous pression par un label intéressé, ils s’adonnent à loisir au jeu de la création. Et ça marche. On ne peut ignorer qu’Of Blood And Wine détient moins de fougue que son grand frère, qu’il donne moins envie de secouer la tête, toutefois il se permet plus d’élaborations, il prend plus de risques. Le résultat est à la hauteur des espérances pour cette seconde signature chez Ripple Music et apporte la perspective de nouvelles tournées qui, on le souhaite, seront aussi spectaculaire que les précédentes.
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