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On le sait, quand les Stoned Gatherings et Garmonbozia Inc. travaillent ensemble, ça fait souvent des Chocapics. Et comme s’ils avaient encore des choses à prouver, les deux collectifs parisiens ont ramené jeudi dernier ni plus ni moins qu’Elder, Wo Fat, Sasquatch et Ancestors, pour notre plus grand plaisir. Une soirée au Glazart 100 % Américaine qui, pour paraphraser l’orga, fut forte en riffs et riche en cosmicité.
Ancestors
Les habitués le savent, au Glazart il s’agit de faire preuve de ponctualité. À peine le gong des 19 h retentit que le Progressif mêlé d’Heavy space rock aux accents doom d’Ancestors se met en branle. Bien que beaucoup trépignent encore d’impatience bloqués dans les transports ou au boulot, nombreux sont déjà là pour accueillir le quatuor made in Los Angeles. Leur style hybride tantôt d’une mélancolie pesante, tantôt d’une lourdeur cosmique se déploie en douceur et vient peu à peu rassembler les fidèles au-devant de la scène. Sans trop comprendre pourquoi, on se retrouve envoûté par ce mur de son, par ce chant aérien, céleste, qui survole des riffs puissants frappant comme les vagues d’une mer tumultueuse. Éventuellement cette tension finit par exploser à mesure que les titres s’enchaînent et que l’on abandonne l’influence Pink Floydienne du dernier album au profil de celle plus Earthlessienne des premiers. Le chant passe de clair à saturé, la batterie s’emporte et les invocateurs sinistres réussissent à agiter les nuques, mettant finalement l’audience dans les dispositions requises à la suite des hostilités.
Sasquatch
Une suite qui se fait un peu attendre. S’ils montent sur scène à l’heure et avec leur naturel décontracté habituel, les gaillards de Sasquatch souffrent de quelques problèmes techniques. Un soucis de micro du côté de Keith qui vaudra à ses deux copains de balancer quelques vannes en attendant la fin de ces interminables balances. Difficile de ne pas rigoler avec eux. Puis, une lampée de jack plus tard, ils allument la scène avec « More Than You’ll Ever be ». Premier constat, le chant manque de volume. Et en plus, il semblerait qu’aux premiers rangs nous souffrions de la malédiction du Glazart pour les voix ; avec des speakers positionnés juste derrière les deux colonnes jouxtant la scène. À l’arrivée de « The Message », je décide de reculer pour apprécier davantage les lyrics. Et tandis que situé pile dans le cœur du cyclone je devrais me faire balloter comme un bateau de noix dans la tempête, je remarque qu’aucun pogo ne se déclenche. Le stoner rock pourtant dévastateur des Américains ne met pas le feu aux poudres. L’humeur mi-figue mi-raisin de Keith semble se communiquer à l’audience qui se contente de hocher la tête, et ce jusqu’à l’ultime titre pourtant conçu pour pulvériser les fosses : « Chemical lady ».
Wo Fat
Toutefois, cette frilosité se soustrait très vite à une tout autre atmosphère lors du passage des Texans de Wo Fat. Devant une salle pleine à craquer, le trio balance un set monstrueux ; du solide travail de patrons. Les riffs fuzzés à souhait, crasseux, viennent se poser sur la rythmique tantôt frénétique, tantôt diablement percutante, de Michael Walter. Là-dessus, le chant rauque de Kent invite à déchaîner les passions, poussant les plus téméraires à enfin se sauter dessus. Les passages de psychédélismes plus tendres qui viennent quelque peu apaiser l’ambiance n’existent que pour mieux agiter les nuques en vue d’être paré pour la prochaine explosion. Explosion souvent accompagnée d’un vilain solo. « The Conjuring », « The Black Code », à chaque nouveau morceau c’est dix degrés supplémentaires pour la fosse du Glazart. Les deux comparses Keith Gibbs et Craig Riggs de Sasquatch s’invitent même sur scène, bière à la main, afin de donner eux aussi de leur voix.
Wo Fat + Sasquatch
À la fin de ce set remarquablement exécuté, les premiers rangs sont liquides et sentent la bière. Pourtant, personne n’est assez fou pour oser s’en plaindre.
Elder
Le temps d’une énième roteuse histoire de réhydrater la machine, et on file se replacer au cœur de la forge. Pour ce dernier concert, le fer s’apprête à être battu par Elder, ce groupe originaire de Boston que tout le monde attend (si on doit en juger par la proportion de fidèles prêts à s’agiter quinze minutes avant le lancement du premier riff). Sans surprise, la prestation met sur le cul. Déjà par la beauté des compositions admirablement bien retranscrite en live ; ensuite par toute la technicité déployée par chacun des membres. Et si Nick Disalvo, chanteur, guitariste et majoritairement auteur et compositeur du bousin reste planqué derrière son pédalier, ses claviers, son micro et son orgue à pied, c’est le bassiste Jack Donovan qui assure le rôle de frontman. À grand renfort de sourire, il lie ses trois compères entre eux, mais aussi avec le public. Et pas uniquement sur le plan visuel. Comprendre que la basse revêt le rôle d’instrument le plus important d’un groupe s’avère ici facile à admettre. Côté fosse, c’est la liesse. Lorsque tout le monde finit de hurler les lyrics de « Sanctuary », chacun se jette dans le chaos global lors du démarrage de « Compendium ». Ce chef d’œuvre met littéralement la pagaille. La prestation passe presque trop vite. À peine six titres et il faut déjà quémander (pas beaucoup non plus) le rappel. Une ultime panacée offerte grâce au titre « The Falling Veil » tronquée de sa douce et onirique introduction pour n’en conserver que la substance active. Puis le rideau tombe. Déjà.
À l’heure du bilan, on se dit qu’une douche ne sera pas du luxe. En dépit d’une qualité de son pas extraordinaire, le Glazart conserve sa place sur le podium des places fortes pour héberger le stoner dans la capitale. Une soirée à guichet fermée qui, bien qu’habitée de plusieurs styles, et ayant connu une ascension graduelle vers les hauteurs, a su rassembler les âmes sous une seule et même bannière. Celle du plaisir et de la gratitude.
Rendez-vous était pris à l’Olympic Café pour aller écouter The Devil and The Almighty Blues, avec en première partie The Well et Hyde. L’endroit est une salle miteuse aux peintures du plafond qui s’écaillent. Une insonorisation qui peine à contenir le crunch et les basses. Un carrelage antédiluvien aux couleurs de ces années où le troquet était un lieu de vie. en rentrant je me prends à penser “Voilà ce qu il reste des petites salles parisiennes, l’archétype de la peut-être prochaine cible des lois de sécurisation de la culture par l hygiénisme”. Ce sera encore un déchirement si l’Olympic devait subir le sort de ses consœurs comme La Mécanique Ondulatoire, le Batofar et autres Espace B. Car oui, ces lieux ne sont pas glamours, mais ils font vivre notre musique et je compte bien m’en payer un tranche ce soir.
Il est près de 20h lorsque Hyde ouvre le bal. Ce trio Parisien me semble faire montre d’un peu de stress mais l’envie d’en découdre prend le dessus. Le son est rapidement poussé plus fort pour abreuver une salle qui se remplit doucement. Le chant lorsqu’il cherche la mélodie est peut-être un peu approximatif, le fond de Fuzz et de Kyuss qui baigne les compositions offre à l’oreille ce terrain de jeu ou l’on s’éclate et où l’on ne cherche rien de plus qu’une mise en jambe facile d’accès. Pourtant il y à sur scène de belles surprises, lorsque le chant se fait cri, je découvre toute l’énergie qui peut se dégager de Hyde et le plaisir va crescendo. C’est déçus que nos trois acolytes doivent rendre la place avec un set écourté pour des raisons voisinage grincheux passé 22H. Le finish et son intro en forme de Jam qui nous entraîne vers un monde plus paisible aux sons hypnotiques et amers. L’outro gueularde et savoureuse de force fait de cette conclusion le morceau le plus complexe du set et le rend d’autant plus savoureux. Avant de quitter les planches on fête l’anniversaire d’un des membre de l’orga Below the Sun, un anniversaire braillard digne d’un tonneau de bière en perce. Finalement on est bien, là, en famille.
Après s’être fait refoulé du trottoir où visiblement même le fait de fumer une clope devient une gène, je redescend dans le ventre du café pour découvrir The Well. J’avoue ma méconnaissance du groupe…mais que s’est il passé, pourquoi m’aura-t -il fallu attendre pour les découvrir? The Well c’est une grosse énergie sur fond de blues. Les riffs sabbathesques mettent en joie. Je n’aurai pas été frappé par l’originalité du groupe d’emblée, mais quelle énergie se dégage du trio texan! Je suis sous le charme du duo de chant, d’une justesse rare. Le tout sous la houlette d’un check sound juste à souhait! Rien ne dépasse, le public scotche aux planches pour ne rien manquer, le jeu de scène est minimal, certes, mais les grimaces du guitariste Ian Graham hypnotisent le public et la menue Lisa Alley en impose derrière sa Rickenbacker. Au fond dans l’ombre Jason Sullivan s’applique à frapper juste ce qu’il faut, sans éclat de puissance et laissant ainsi un terrain de jeu propice aux deux autres. Sans forcer au renouveau c’est une musique qu’on chausse comme des pantoufles et ce qui est certain c est que les musiciens ne sont pas des manches. Les démonstrations de virtuosité sont contrôlées. Une musique qui fait le job plus que bien et j’ai hâte de revoir The Well de nouveau. Direction le merch donc, je veux creuser la question sur album.
Les maîtres de cérémonie The Devil and the Almighty Blues n’auront pas fait le déplacement depuis Oslo pour rien, c’est une salle pleine de près de 160 amateurs de croustillances bluesy qui sont venus admirer les quintette. A peine monté et ouvrant sur un “North Road” les Scandinaves emportent leur public. les gars sont positionnés et si le chanteur reste bras croisés lors de l’intro il est attendu de pied ferme pour son tour de chant. Alors oui, The Devil and the Almighty Blues ce n’est pas un monument d’originalité, il s’agit d’une bande de pote qui à intégré les standard du Rock, du Blues et du Stoner, mais qui a su l’élever au rang d’acte professionnel. Là, dans ce sous sol approximatif, il se passe quelque chose digne d’un studio. Les riffs collent à la perfection aux albums, la maîtrise est absolue et le public en prend plein la tronche. L’agressivité du bassiste soutient la rythmiques Blues, les guitares ont toutes les deux leur place et s’alternent en toute cohésion. L’ambiance monte d’un cran encore et on ressent bien que cette tête d’affiche était bel et bien attendue des initiés. Très vite la salle devient une étuve un cran à peine en dessous du sauna, la climatisation peine à compenser la fièvre des auditeurs. Il serait ingrat d’oublier la console qui fait un travail remarquable et offre une acoustique improbable dans une salle de ce type et même si le light show est statique il n’y a aucune faiblesse dans ce set qui va finir de déchainer les passions avec un “The Ghost of Charlie Barraccuda” qui clôture le set en jetant en pâture au public les dernières forces du groupe après un peu plus d’une heure de set.
Quittant la salle, le public est rendu aux rues sombres et crasseuses du quartier Poissonnière et on s’y sent bien, comme dans ces cafés concerts où l’on vit sans crainte que le ciel nous tombe sur la tête.
Encore enchantés de la journée de la veille (on ne s’attendait pas à une telle intensité, reconnaissons-le) c’est bien prévenus et mieux préparés que votre duo de serviteurs de choc se prépare à attaquer cette deuxième et dernière partie. La journée est déjà plus dense (deux fois plus de concerts que la veille !) et s’annonce riche en attentes autant qu’en découvertes… C’est sous un soleil radieux (qui ne nous aura pas quitté de tout le week end) que l’on rentre donc dans l’enceinte du Z7, motivés et prêts à en découdre.
HUMULUS
A midi pile on y est accueillis par les riffs bien lourds de Humulus : le trio transalpin n’est pas connu pour sa finesse, auréolé d’une réputation de gros bourrins fans de bière avant tout (les “Tankard du stoner” entend-on ici ou là…). Même si on n’est pas non plus au complet opposé de cette image d’Epinal (la passion du groupe pour le nectar houblonné est quand même TRES présente, à l’image de ces bouteilles à l’effigie du groupe qui traînent à leurs pieds – on n’est jamais si bien servis que par soi-même ! – qui une fois vidées sont même recyclées en bottlenecks improvisés) on découvre sur scène un trio plus riche en nuances. La musique du groupe se caractérise surtout par son efficacité, servie par une interprétation sans faille, solide. Certes, quelques passages sont moins performants (notamment sur des sections instru mid-tempo un peu moins prenantes et moins originales aussi) mais globalement on déguste cette introduction avec un plaisir non feint, et le stoner costaud des italiens nous donne la banane. On notera d’ailleurs que le public dès l’ouverture quasi matinale du festival est déjà dense. On est habitués en festival parfois à entamer la journée avec des groupes de qualité moindre, ce ne fut le cas ni hier ni aujourd’hui sur le festival, la barre étant haute dès le début !
MESSA
Deuxième formation de la journée, deuxième groupe transalpin et deuxième concert sur la scène extérieure : c’est au tour des Italiens, qui assurent l’ouverture de la campagne européenne de Dopethrone (pour les premières dates), de prendre place sur les planches à pile poil 13 heures. Petit bémol : quand l’horloge du clocher du village de Pratteln (ah ouais, nous avons attendu la sixième édition pour aller nous balader dans le village coincé entre les collines et les industries chimiques) sonne, nous voyons débouler le tourbus à la bourre dans le parking réservé aux groupes. La bureaucratie légendaire des fonctionnaires des douanes (suisses et italiennes) a contribué – à sa manière – à la prestation de Messa. Installé en un temps record, le groupe tirant sur le doom n’a, au final, que raccourci son show d’un seul titre, gagnant, au fil des morceaux, en intensité et éclipsant de leur prestance scénique les désagréments liés à leur arrivée tardive. Dans son t-shirt à l’effigie d’une vieille gloire du metal scandinave, Sara, la frontwoman à la rouge crinière, envoûte son public, même si la lumière de ce jour radieux ne constitue pas l’ambiance la plus propice pour savourer ce style musical auquel la noirceur sied comme un gant. L’encens brûlant sur le bord de la Side Stage a aussi contribué à l’atmosphère d’un concert assuré de main de maître par un groupe rompu à l’exercice scénique, qui aura déployé son doom assez abordable sans le confort d’un soundcheck voire d’un linecheck : chapeau c’t’équipe ! Mention spéciale à la vocaliste hors pairs qui fera encore parler d’elle à l’avenir vues ses compétences (et aussi au chauffeur-videur de van qui a limité les dégâts potentiels liés à ce départ décalé non prévu).
GLANVILLE
Le club des cinq de Darmstadt donne le coup d’envoi de son set à peine la prestation extérieure de Messa achevée (pas le temps de siroter un café avec des bulles pour les inconditionnels des bars). Les Allemands dépucèlent la Main Stage pour ce second jour en explorant un registre hard rock aux relents fort vintage. Ces gens citent le grand Rudolph de leurs compatriotes Scorpions, c’est vous dire l’inspiration des gars. Vu le style, et l’heure peut-être aussi, le public est clairsemé, malgré le dynamisme déployé sur scène. Il faut avouer que les Teutons touchent bien leur bille question technique et qu’ils ne semblent pas débuter (ah ouais on se sent entre contemporains avec ce genre de combos), mais question fréquentation on verra nettement plus impressionnant dans la journée. Les qualités du groupe sont clairement hors de cause parce que ça balance et c’est catchy. Le problème c’est le style qui visiblement ne touche ni les amateurs de fuzz, ni les inconditionnels de doom et pas franchement les bourrins présents dans la place. Au final, on ne se fait pas carrément chier, mais en vrai le combo et ses attitudes de rockstar ne nous touchent pas vraiment, et quand on considère les gens autour de nous on s’autorise à penser que Glanville rencontrerait un meilleur accueil de la part du public dans d’autres rassemblements musicaux plus orientés metal.
THE WELL
On a bien usé les deux excellentes galettes de The Well et on ne cache pas notre enthousiasme d’enfin voir le trio texan sur les planches, où il se fait trop rare (en tout cas sur le Vieux Continent). Il n’y a pas besoin de plus de 3 ou 4 accords pour nous rassurer quant à la qualité d’interprétation et à l’énergie développée sur scène. A croire que c’est dans leurs ADN (il doit y avoir un sacré paquet de trucs chimiques dans leur lait, faut dire), les combos texans ont généralement ce “truc en plus”, cette dynamique singulière et souvent débridée, cette assurance qui en fait de terribles machines de scène (cf. Duel, Dixie Witch, Mothership, Honky, Wo fat…). The Well confirme l’appartenance à cette lignée tout en proposant un heavy rock plus nuancé et moins nerveux : piochant dans des influences clairement old school, une main côté heavy doom US, l’autre main dans le proto-heavy rock 70s, le groupe propose une mixture aiguisée et emballante qui semble ravir le public. Scéniquement, le trio est impeccable, sans surjouer, en pleine capacité d’embarquer un public : Lisa assure peinard une rythmique galopante à grands coups de Rickenbacker et des lignes vocales impeccables, parfois aidée par Ian Graham, entre deux poignées de riffs cinglants et de soli réjouissants. On notera l’insertion de quelques samples ici ou là qui permettent de densifier les compos du trio (dans certains cas ces ajouts en live sont un peu foutraques, reconnaissons-le). Et ca déroule ainsi pendant 45 minutes qu’on ne voit pas passer, devant un public bien tassé qui lui aussi semble prendre son pied (en particulier les deux gros blaireaux hilares au premier rang et tout à fait confiants dans leur pouvoir comique qui se lanceront leur peluche requin pendant une bonne partie du set…).
ANCESTORS
Le moins que l’on puisse dire c’est que durant cette journée, on aura passé agréablement d’un style à l’autre et que, entre nous, on y aura trouvé notre compte la plupart du temps. Avec le style très progressif du quatuor californien, nous nous sommes lovés dans un cocon aérien baigné de volutes bleutées ; le quatuor de la Cité des Anges a dû user les productions de David Gilmour ainsi que celles de Roger Waters jusqu’à la corde pour en extraire ses influences principales. Un peu à la rencontre d’Earthless et de Monkey 3, les Américains déploient des titres qui s’étalent dans la durée en empruntant tous à un moment ou à un autre un chemin intimiste qui était souligné par l’impassibilité de ses membres ainsi que par un jeu de lumière résolument sombre (les photographes de l’assistance ont apprécié). Cette prestation planante (et parfois pompier) de quarante minutes a trouvé son public elle aussi même si vos deux serviteurs n’ont pas réellement été transcendés par le combo de Los Angeles qui demeure toutefois des plus intéressants sur disque. Leur set aura eu le mérite d’explorer un style assez en retrait de la programmation 2018 du Up In Smoke de cette année, mais clairement pas hors sujet pour les festivaliers. Au rayon rencontre du troisième type, quatre autres types allaient eux aussi nous emmener hors du cadre sur la scène extérieure, et nous avions hâte d’aller jeter un coup d’œil sur la suite des festivités.
THE NEW DEATH CULT
Inconnu de nos services, TNDC (comme on dit dans les milieux qui s’y autorisent) avait pas mal piqué notre curiosité en raison des grimages en cours sur ses membres durant les instants qui précédèrent leur set, voire aussi depuis que nous avions découvert leurs tronches à l’annonce de leur participation à la fête. Nous avons donc quitté l’univers planant régnant sans partage durant le show d’Ancestors pour nous faire télescoper par quatre rockers à la tenue de scène nous rappelant fortement Punish Yourself (vous voyez le genre de référence qu’on utilise sur un site dédié au stoner…). Les jeunes d’Oslo misent sur le visuel et franchement il n’y a pas à tortiller du cul : ça fonctionne régulièrement auprès d’un public rock peu sectaire, mais sur ce coup-ci leur répertoire entre Muse (nous vous laissons constater que nos références ratissent mainstream) et My Chemical Romance (nous allons cesser ici de citer des références qui pourraient discréditer une partie de notre rédaction et générer une lapidation en règle lors d’un prochain festival) n’a clairement pas provoqué de grosses turgescences sous la ceinture des spectateurs. Alpha, Beta, Gamma et Delta quittèrent l’estrade en avance et dans une indifférence certaine sans même que le moindre zozo aviné ne réclame un rappel. Dur ! Dur car c’est plus une erreur de casting qu’une mauvaise prestation qui a provoqué ce rejet massif du répertoire nerveux d’un quatuor fort dynamique sur scène. Ils n’avaient pas leur place ici, mais l’ont certainement auprès d’autres tribus de la grande famille du rock, et nous leur souhaitons vraiment le meilleur pour la suite auprès d’un public plus en lien avec leur style.
NAXATRAS
On a beau apprécier la discographie du trio grec, on sait aussi, tandis qu’on se dirige vers la main stage, que les groupes évoluant dans ce style musical jouent sur la corde raide, en équilibre précaire entre immersion trippante enthousiasmante et set ennuyeux et laborieux étiré en longueur via des pseudos jams mal inspirés. Vos serviteurs n’ayant jamais eu l’occasion de capter le groupe sur les planches auparavant, nous voyons nos doutes balayés au bout de quelques minutes, devant le simple constat d’une sorte de vague bienheureuse qui se déploie dans le public, qui ondule béatement pendant trois beaux quarts d’heure. Les trois jeunes musiciens, baignant dans un light show très bien étudié, déploient tranquillement un savoir faire remarquable, fait d’un talent d’interprétation inattaquable, et d’une inspiration dans les compos qui fait toute la puissance du set : basculant de passages psyche à des plans plus lourds, parfois chargés en grosses doses d’un space rock classieux, le groupe prend son public par le col et ne le lâche plus. Les quelques interventions sympathiques de John Vagenas ne viennent jamais complètement rompre l’enchantement des titres, parmi lesquels le groupe nous propose un avant goût de son prochain album à travers un morceau inédit. On ressort de cette expérience avec la farouche conviction qu’un nouveau grand groupe est en train d’émerger dans ce genre musical exigeant.
CHILD
Encore un peu embrumés par la prestation envoûtante et immersive du trio grec, c’est vers un autre trio que l’on se dirige, avec envie : les Australiens de Child ont toujours proposé des prestations live remarquables, basées sur une production vinylique tout aussi enthousiasmante. La formation emmenée par Mathias Northway entame un set classieux devant une assistance dense et intéressée. Malheureusement, les esprits et les corps semblent lourds et engourdis par la séance précédente sur la main stage (et se préparent sans doute aussi à l’assaut en 5 temps qui s’annonce juste ensuite), et ils ne répondent pas plus que par une attention soutenue, voire quelques phénomènes ondulatoires disséminés. Victime probable d’un créneau espace-temps défavorable, voire d’un alignement des planètes malheureux, nos trois larrons ne déméritent pourtant pas : leur hard rock fuzzé riche en plans psyche et blues est exécuté à la perfection. Un peu à l’image de Radio Moscow et de son frontman, Northway est un guitariste-vocaliste surdoué, propagateur d’un feeling indécent et d’un touché à la guitare sans pareille, qui mène sa barque avec une humilité tangible (voir la place accordée à ses compères) et un talent incontestable. Ses soli sont délicieux et on n’en perd pas une goutte. Malheureusement, on constate nous-même notre propre incapacité à s’immerger pleinement dans ce set… Parfois, on n’a juste pas la clé, et l’alchimie ne passe pas, sans qu’on ne puisse comprendre pourquoi. Un groupe remarquable, une prestation irréprochable, mais une date qui ne restera pas dans les annales.
ELDER
Elder sera le premier acte du quinté de folie qui a animé cette dernière journée de la manifestation (réjouissez-vous les enfants : on passe à trois jours dès l’an prochain). Le public était chaud bouillant pour cette suite d’anthologie et lorsque le – désormais – quatuor de Boston a ramené ses miches sur scène il régnait une ambiance des plus électriques dans la halle. Du côté de vos envoyés sur place c’était aussi la fête du slip vu que la prestation berlinoise à laquelle nous avions assisté il y a quelques mois nous avait bien laissé sur le cul ! Il faut dire que nous sommes assez fans de la bande de Nick DiSalvo (certainement pas le nom le plus simple à porter à Boston vu la proximité sonore avec Albert) et que la formule en quatuor qui nous avait tant fait nous interroger avant de la jauger sur pièce avait fini par nous convaincre. La foule des grands jours était au rencard et Elder a déroulé le grand jeu une heure durant en misant sur son jovial bassiste, Jack Donovan, pour assurer la partie un peu plus visuelle du spectacle tant ses compères sont focalisés sur la technique qu’ils déploient live. Tout comme d’habitude, le groupe de la Nouvelle-Angleterre a été ahurissant et comme à l’accoutumé nous avons été envoûtés par leur prestation dont le point d’orgue a été une nouvelle fois « Compendium » : l’énorme composition qui a largement contribué à placer Lore parmi les productions qui ont marqué le renouveau du style que nous chérissons en le désamarrant de ses ports d’attache scandinave ou californiens originels. Merci à ces lascars : ils sont magiques !
DOPETHRONE
Celles et ceux d’entre nous qui ont assisté à la prestation du trio québécois au dernier Hellfest sont restés sur un sentiment… d’inachevé, dirons-nous. Notre attente est donc double à l’entame de ce set des slutcheux (!!) de Dopethrone : d’une part prendre enfin la torgnole tant espérée en juin dernier, et d’autre part évaluer aussi la part de progrès dans la carrière du groupe, que malheureusement vos serviteurs n’avaient pas vus sur les planches depuis trop longtemps. Avouons-le tout-de-go : sur les deux objectifs, les résultats auront dépassé nos espérances. Armés d’un son redoutable, délicieusement gras et profondément lourd (pour l’anecdote, les déflagrations déclencheront même l’alarme du tour bus du groupe, garé derrière la scène…), les cartouches disséminées sans lever le pied par les canadiens font des dégâts considérables sur un public plus que consentant. Il faut dire que la set list est habile et audacieuse en même temps, proposant une poignée de beaux glaviots issus de leur récent Transcanadian Anger (mention spéciale au salement groovy “Tweak Jabber”), mais faisant quasiment l’impasse sur le pourtant puissant Hochelaga (seulement “Scum Fuck Blues”, quand même) pour plutôt mettre l’emphase sur le plus ancien mais néanmoins brutal Dark Foil, avec des brulots comme “Tap Runner”. Petite cerise sur le gâteau glaireux, leur copine Julie monte sur scène pour partager les vocaux avec Vince comme elle le fait sur albums pour “Zombie Powder” et “Miserabilist”, sauf qu’elle reste finalement une bonne part du set. L’idée est audacieuse (le groupe passe donc une large part de son set en format quatuor) mais réussie, le brin de voie délicieusement dégueulasse de Julie se mariant à la perfection au timbre subtilement déchiré de Vincent, pour des contrepoints du meilleur mauvais goût. La fosse, subtilement haranguée par Vincent pour qu’ils se jettent les uns sur les autres, ne se fait pas prier, et le mosh pit ne faiblit pas pendant presque une heure, duquel jaillissent slammers et stage divers occasionnels (chassés de scène à coups de pieds au cul). Un groupe au top de sa forme, un public ravi de se lâcher, ce set fut une totale réussite.
WITCHCRAFT
Après la débauche de sauvagerie livrée par Dopethrone devant un pit des plus animés, retour indoor pour l’avant-dernier acte à s’y produire : Witchcraft est dans la place et on est au taquet. Il faut dire qu’on avait loupé les Suédois en 2013 à Berlin en raison d’une défection de dernière minute (on s’était consolé avec des remplaçants de grande classe : Troubled Horse vus l’an dernier ici-même, et ça avait été mortel) et que nous apprécions pas mal le boulot du groupe d’Örebro qui a prouvé avec Nucleus, sorti il y a deux ans, que nous devions encore compter sur eux (pour ne rien vous cacher nous les pensions morts) ! Les 5 vikings ont ratissé dans leur répertoire de toute beauté pour nous enchanter avec leur stoner qui se décline alternativement de manière apaisée et de manière plus énergique (on ne va pas se mentir ça paraissait quand-même un poil calme entre les deux formations qui les encadraient sur la Side Stage). Ces gars assurent encore et toujours lorsqu’ils déclinent leurs morceaux sur scène et franchement ils nous en ont foutu plein la gueule tant leur prestation était techniquement maîtrisée. On notera aussi que Pelander n’occupe plus uniquement le rôle de vocaliste inspiré et talentueux qu’il est, mais aussi celui de troisième guitariste désormais (ses déplacements sont donc un peu plus limités qu’à l’époque où il se baladait partout sur la scène). L’accent a été mis sur la masterpiece Legend avec cinq titres dont le majestueux « It’s Not Because Of You » qui n’a pas pris une seule ride, l’intense « Dead End » et surtout l’entrée sur scène sur « Deconstruction » qui est une perle dans le genre bien traditionnel et soutenu. Une performance de haut vol pour un combo qui ne cesse de progresser sans altérer une formule qui nous est si chère !
ACID KING
La fin de ce Up in Smoke sera doom ou ne sera pas, qu’on se le dise. Et à ce jeu là, difficile de faire mieux que ce qui nous est proposé ce soir, et en premier lieu les vétérans de Acid King. La première étape comme à chaque fois avec Acid King consiste à évaluer les forces en présence : qui Lori a-t-elle embarqué cette fois pour l’épauler en tournée ? On retrouve en premier lieu Rafa, batteur extraordinaire de Black Cobra, que l’on retrouve comme souvent chez Acid King… à la basse ! Il faut dire que le cogneur est aussi un excellent bassiste (comme tous ceux qui se sont succédés sur ce poste au sein du Roi Acide) qui délivre une prestation excitante et enivrante pendant presque une heure de set. A la batterie, un petit nouveau dans cette formation : Bil Bowman, frappeur déja entendu derrière les fûts des très intéressants Hornss, un autre groupe de San Francisco. Bref, là non plus, rien à redire. Reste donc à la maîtresse des lieux Lori de fixer la tendance de ce soir. Et elle est en forme, donc tout va bien. Fidèle à elle-même, sans trop en faire, elle balance ses riffs sur-fuzzés lents et lourds et aligne des vocaux lancinants et hantés dont elle a le secret. Elle est impeccable, là où on l’attend. Dans une niche de doom old school fiévreux, Acid King devient petit à petit l’un des derniers gardiens du temple, une référence inamovible qui, sans jamais transcender complètement le genre, en apporte une interprétation toujours infaillible et hautement jouissive. Encore un excellent moment…
ELECTRIC WIZARD
On prend les presque mêmes et on recommence : comme en 2016, il revient aux Britanniques de mettre un point final au Up In Smoke sur la grande scène. Bien évidemment, vu le pédigrée de cette équipe, il y a du monde dans la place malgré les crêpages de chignon qui ont animé les réseaux sociaux à la sortie du petit dernier, Wizard Bloody Wizard. De cette dernière production, ils tireront le très lent « See You In Hell » avec son groove diablement efficace. Comme autre nouveauté : nous retrouvons sur scène un nouveau bassiste (encore !) ayant rejoint le quatuor depuis peu ; le garçon se débrouille correctement sur son instrument et scéniquement il est comme les trois-quarts du groupe : dans une obscurité certaine. Seul le père Oborn est parfois mis en valeur par des spots verts car visuellement ce sont les projections interlopes que cette formation aime à proposer en fond des scène qui captent les regards (en plus de Liz – la guitariste – je vous vois venir bande d’obsédés !). On souligne que ces grands professionnels étaient sur place aux aurores afin de veiller à ce que le système dispensant ses animations soit réglé aux petits oignons tout comme le son de leurs instruments ; ils ont soundchecké alors que la plupart des festivaliers étaient encore dans les bras de Morphée (c’est aussi ça la rock’n’roll attitude). Question setlist, rien de bien extraordinaire, mais une flopée de valeurs sûres alignées après avoir passé l’énorme « Procreation (Of The Wicked) » de Celtic Frost sur la sono, un titre qui fait partie intégrante du folklore local. On s’est tapé « The Chosen Few » que nous avions capté pour vous au Hellfest (coupure pub : vous le retrouverez facilement sur notre chaîne YouTube) et l’énorme « Incense For The Damned » qui a bastonné correct entre les murs du Z7. Pas franchement cascadeur comme choix de la part des programmateurs, Electric Wizard demeure néanmoins un bon groupe de scène qui a fédéré la plupart des festivaliers durant son set prouvant ainsi non seulement son statut d’icône d’un certaine approche du doom, mais aussi sa capacité à rassembler des amateurs de sensations plus épicées ou plus apaisées et c’est ça aussi la communauté stoner.
Le festoche se termine sur ces accords pachydermiques et une énième prestation de haute volée. A l’heure des bilans, on reste soufflé par la qualité de cette édition : alors que l’affiche pouvait apparaître sur le papier hétérogène et risquée, dans les faits il y aura eu très peu de points faibles, et au contraire des révélations, voire même des groupes pourtant déja vus et revus qui ont proposé des prestations au sommet de leur savoir faire. Rajoutez à celà une nouvelle configuration ajoutant une seconde scène à très grande capacité, dotée d’un son impeccable (sur les deux scènes, et quasiment sur tous les concerts du week-end), et toujours cette bonne ambiance dans le public (pas de prise de tête, sourires, respect…), et vous obtenez ce qui, selon vos serviteurs, est peut-être bien la meilleure édition de ce festival depuis sa création… On signe direct pour l’an prochain, où on nous annonce déjà une édition désormais sur 3 jours !
*** NOTRE VIDEO REPORT DE LA JOURNEE DE FESTIVAL : ***
Nous nous étions terminés avec les légendaires Saint Vitus l’an dernier en ces lieux et piaffions d’impatience d’y retourner pour une nouvelle – et généreuse – ration de riffs saturés. Ceux-là même que nous chérissons tant depuis belle lurette en ces pages virtuelles. Nous n’allions pas être déçu par cette – déjà – sixième édition d’un festival que nous n’avons jamais loupé et dont nous sommes de fervents supporters depuis ses débuts (voire même avant lorsque le concept Up In Smoke ne se déclinait qu’en version itinérante) ! On ne change pas une équipe qui gagne et c’est un peu comme les gens qui foutent leurs caravanes sur le même emplacement dans le même camping tous les 15 juillet que nous nous sommes radinés dans la place.
SIX MONTHS OF SUN
Alors que les rayons de l’astre solaire baignaient encore la banlieue bâloise, la formation suisse ouvrait brillamment les hostilités peu après l’ouverture des portes. Ils ont d’entrée de jeu positionné la manifestation à un niveau élevé, ont profité de l’occasion pour capter de nouveaux fans et ont foutu une bonne branlée à un public fort nombreux à l’heure de l’apéro. Le groupe de Genève représentait le volet local de la programmation même si son lac est à plusieurs centaines de bornes de la zone industrielle de Pratteln. Nous avions déjà eu le plaisir de voir le batteur du trio en ces lieux lors d’une édition précédente avec l’incroyable groupe Intercostal (qui s’est malheureusement terminé tragiquement). Ce véritable métronome, flanqué de ses acolytes à la basse ainsi qu’à la guitare, a envoyé du bois durant 40 minutes intenses qui virent la foule se presser devant la nouvelle structure extérieure du festival (et délaisser les bars d’ordinaire fort courus à ces heures voire même tout du long de l’événement). Au passage, nous notons avec satisfaction que la plus petite des deux scènes a été brillamment réorientée et rehaussée afin de pouvoir permettre à une audience plus nombreuse d’assister confortablement aux shows (le seul bémol sera la hauteur de la scène pour certains photographes de petite taille). Pour en revenir à Six Months Of Sun : ces garçons actifs dans un registre instrumental pas si éloigné que ça des Karma To Burn des temps jadis ont aligné leurs titres avec vigueur. Quelques samples de dialogues du cinéma pour épicuriens (mention spéciale aux chips), leur ont permis de reprendre leur souffle entre chacun des morceaux. Nous avons pris un putain de plaisir d’entrée de festival et vous incitons fortement à aller poser vos oreilles sur les deux LP commis par ces helvètes (dont le fantastique « Below The Eternal Sky » sorti l’an dernier).
GIANT SLEEP
Après la première mandale du week-end, place à une multinationale mi-suisse mi-allemande qui prend place sur la Side Stage le temps d’un petit changement de scène bienvenu pour aller se rassasier, s’abreuver ou magasiner au stand de merch du fest (sur lequel on trouvera durant les deux jours le matos des groupes au fil de leurs arrivées respectives en ces lieux). Actif dans un registre heavy rock ou glam un peu daté (ça dépend des références), Giant Sleep a assimilé ce que les porteurs de permanentes pratiquaient il y a une trentaine d’année et le recrache à sa sauce. Ce n’est pas franchement la révolution, mais ça fonctionne sur le public branché par le rock, voire le stoner, très traditionnel (les autres profitent d’aller s’hydrater parce qu’on ne badine pas par ces chaleurs automnales). Le vocaliste de la bande a un peu réveillé un public ondulant lorsqu’il a interagi avec lui en l’encourageant à répéter « Hey » (ça marche toujours dans ces contrées) ou quand il a changé de registre pour grogner efficacement dans son micro. Très efficace, à l’image de son guitariste chauve – arborant fièrement son t-shirt de Pentagram – et se distinguant dans le rayon soli, le groupe binational a assuré le job même si les amateurs de sensations plus épicées ont été contraints de ronger leur frein jusqu’à la performance suivante.
WHORES
En tournée sur le Vieux Continent, le groupe d’Atlanta a fait halte au Up In Smoke sans Heads. qui assurait la première partie des dates de cette campagne hors certains festivals dont celui-ci. Avec leurs tronches de premier de la classe, les quidams n’ayant aucune idée du marigot musical dans lequel le trio se plait à évoluer se sont pris une belle mornifle en pleine poire. A mi-chemin entre le sludge et le crust, ce putain de groupe déploie une rare sauvagerie sur scène : c’est la grande classe à l’américaine ! Trépidante et corrosive, la musique déployée par les Américains fait mouche auprès des Lourds de l’assistance qui dégustent, en fin connaisseurs qu’ils sont, des standards imparables comme le délicieux « Fake Life » (tout un programme). La formation avait déjà fait halte en terres helvétiques avec Big Business (qui sont des garçons polis si des fois vous vous posiez la question) et son hurleur a pris le temps de faire un éloge fort sarcastique du pays qui l’accueillait ce jour-là. Nous nous sommes bien fait ramoner les turbines à cérumen durant les quarante-cinq minutes de set qui étaient accordées sur la Mains Stage à la formation la plus ravageuse (et ravagée peut-être) de la journée. Les bourrins dans la place mouillaient leurs petites culottes (surtout ceux qui ont des affinités marquées avec The Melvins qui nous avaient gratifié de leur présence lors d’une édition antérieure) alors qu’un nombreux public se retrouvait à l’extérieur pour épargner ses chastes oreilles ou picoler voire les deux à la fois. Faut dire qu’il était déjà l’heure du journal du soir et que nous n’avions pas encore assisté à la moitié des concerts du jour.
FARFLUNG
La nuit est jeune désormais tandis que l’on ressort de la salle pour assister au set de Farflung, pile sous la voie lactée (bon, OK, sous la tente on voit assez peu les étoiles). La troupe de Tommy Grenas prend la scène dans une pénombre veloutée propice à l’immersion et le claviériste (et vocaliste occasionnel) lance ses premières boucles devant un public nombreux et attentif. Les premières minutes passent sans émotion particulière, mais assez vite – et c’est sans doute dû au talent et à l’expérience des américains – la sauce prend, et le space rock du quintette s’installe pour trois gros quarts d’heure qui ne présenteront pas un seul point faible. Sorte de Hawkwind plus dense et plus concentré, les californiens s’appuient exclusivement sur leur interprétation et un light show lent et hypnotique pour plonger le public en immersion (et heureusement, car ce n’est pas le dynamisme des musiciens qui apporte quoi que ce soit au set…). Les titres s’enchaînent sans quasiment aucune communication avec le public, mais on ne le déplore pas, tant il serait malheureux de rompre l’ambiance. Et on peut penser que les musiciens sont aussi bien dans le trip que le public, puisqu’ils débordent de l’horaire prévu de 10 bonnes minutes (sans aucun impact sur la suite, bravo l’orga). Farflung confirme son statut d’un des meilleurs groupes de space rock du moment.
V.I.C. (Villagers of Ioannina City)
On se présente en soirée devant la main stage avec l’idée d’observer l’intrus de la soirée : comment un groupe aussi discret que V.I.C. se retrouve aussi haut sur l’affiche, au vu de la qualité de ceux qui l’ont précédé ? Il ne faut pas plus de quelques minutes pour comprendre qu’on n’a pas affaire à des perdreaux de l’année. Musicalement, le quintette repose sur une structure instrumentale en trio classique, déroulant un heavy rock fuzzé solide et nerveux, chargé de plans psyche qui ne tombent jamais dans le trip lourdaud et lancinant. Spécificité du combo, les deux autres musiciens proposent des plans d’instruments plus atypiques (clarinette, didjeridoo, cornemuse…) qui apportent des arrangements franchement inédits et rafraîchissants. La dynamique globale du set est excellente, bien emmenée par le charismatique mais jamais exubérant frontman Alex, et le public, qui remplit bien la grande salle, prend son pied. Il faut croire que la Grèce devient l’un des meilleurs fournisseurs de groupes qualitatifs d’Europe.
SASQUATCH
Ca faisait longtemps que l’on n’avait pas eu l’opportunité de voir ce vétéran du stoner US fouler les planches, on ne s’est donc pas fait prier pour gagner le premier rang de la seconde scène dès les derniers accords de VIC terminés. Agréable constat : on n’est pas les seuls dans ce cas, la notoriété du groupe étant supérieure à ce que l’on imaginait, et donc leur place si haut sur l’affiche largement légitimée. Restait à transformer l’essai sur scène ; ce fut fait… et avec la manière s’il vous plaît ! Très très vite, le public entre dans le jeu et le pit est tout simplement en feu pendant l’heure de set du trio américain. En commençant par l’excellent “More than you’ll ever be” issu de leur dernière galette, ils donnent une tonalité heavy à la soirée, confirmée par l’enchaînement avec le terrible “The Message” (seul extrait du pourtant excellent IV), un brise-nuques particulièrement dévastateur dans un public où se mèlent volutes enfumées, vapeurs houblonnées et plus généralement bonne humeur et envie de s’amuser. En piochant très largement (trop, selon les puristes) dans son dernier très bon album, Maneuvers, nos lascars enchaîneront des mid-tempo propices au headbang comme ils en ont le secret (“Just couldn’t stand the weather”, le classique “Cracks in the pavement”) à des brulots nerveux (“Rational Woman”, le vieux “Chemical Lady”…) qui finiront de rassasier un public ravi (le groupe débordera même de 10 minutes sur son horaire de faim – il nous en reste un peu, on vous le met ?!). le tout est emballé scéniquement par un Keith Gibbs charismatique mais sans exhubérance, et un Casanova à la basse lui aussi impeccable vecteur d’énergie. Une véritable machine de guerre ! On est ravis de voir le groupe (que d’aucuns pensaient usé par le temps) dans cet état de forme, capable de générer ce qui fut probablement le pit le plus déchaîné des deux jours de festival. Quel pied !
KADAVAR
John Garcia était initialement prévu pour cette fiesta baloise et sa présence avait été teasée par l’orga il ya quelques mois. La légende californienne (ou le crooner en vogue qui n’a rien sorti de potable depuis un bail, c’est selon vos affinités) ayant annulé sa tournée n’était finalement pas de la partie, et les promoteurs de la manifestation n’étant pas des gens ingrats, ils se sont tournés vers le trio allemand pour assurer (et assumer facile les doigts dans le pif) le rôle de headliner du premier jour. La bande berlinoise s’est pointée sur scène en terres conquises, a devisé en allemand avec le public et surtout a foutu un énorme boulet dans le Z7 ! Même si nous les avions déjà vus cette année et même si Kadavar en live c’est un peu l’expérience que tout le monde a déjà vécue, c’est avec un sacré plaisir que nous avons pointé nos miches devant la scène pour assister cette performance. La disposition des Allemands sur la scène a à nouveau contribué à notre bonheur : batteur centré en bords de scène officiant comme pièce centrale de l’orchestre, gratteur-chanteur côté jardin protégé par ses retours et bassiste francophone qui investit le côté cour avec vigueur en y baladant son impressionnante stature (le niveau est haut dans tous les sens du terme).
Côté son : « Forgotten Past » en version super fat pour les sections heavy du titre a spécialement emballé l’un de vos serviteurs, mais pour être honnête, avec des titres désormais légendaires comme « Purple Sage » (que nous avions capté au Hellfest l’été précédent si ça vous intéresse), « Doomsday Machine » ou « Living In Your Head », Kadavar a carrément emballé la totalité des festivaliers dans la place, se payant même le luxe de déclencher des crowd surfing.
Les sourires niais qui ont embelli nos sympathiques minois durant ce set n’avaient toujours pas disparu quelques heures après la fin du concert, tandis que nous montions le résumé en image de cette belle journée (disponible en cliquant ci-dessous) dans le confort spartiate d’un hôtel plus fonctionnel que charmant, avant de profiter de quelques heures de repos pour affronter une deuxième journée qui vendait du rêve sur le papelard !
*** NOTRE VIDEO REPORT DE LA JOURNEE DE FESTIVAL : ***
Septembre, le mois de la rentrée, des impôts, des jours qui raccourcissent et de la veste qu’on porte que le matin et qu’on est obligé de se trimballer le reste de la journée, car « en fait, il fait plutôt bon ». Ces vicissitudes mises à part, c’est surtout l’opportunité de croiser une sacrée collection de tournées. Parmi elles, celle de Stoned Jesus en compagnie du trio survolté Mothership et des Londoniens d’Elephant Tree. Ce troupeau de solides énergumènes faisait justement halte sur la péniche du Petit Bain à Paris ce jeudi 27 septembre pour une soirée lourde et électrique offerte par Garmonbozia Inc.
Elephant Tree
Ouverture des hostilités par nos amis d’outre-Manche avec leur titre « Dawn ». La salle est déjà bien remplie pour un 19 h 30 sans pour autant compliquer l’accès au deuxième rang. Ainsi installé derrière l’armée de photographes scotchés à l’estrade, on avale à loisir une bonne dose de riffs. Entre autres choses. Les Anglais nous déballent alors leur doom pachydermique et au raffinement tel qu’il se garde bien de nous écœurer. Malgré une grosse caisse un peu forte au début et quelques écarts de justesse au niveau du chant, la prestation reste impeccable. La superposition des voix de Jack et Peter calées sur des riffs d’une lourdeur titanesque et une rythmique puissante contraste à merveille. Le tout donnant l’impression d’un vieux sage assis en tailleur sur le dos d’un cerbère lancé au pas de course. Entre leurs titres des deux premiers albums devenus rapidement des classiques, Elephant Tree nous offre le privilège de deux morceaux inédits : « Wasted » et la superbe « Bird »,qui ne sauront que galvaniser notre impatience naissante de découvrir le prochain opus. Puis, à l’occasion du dernier morceau « Aphotic Blues », Kyle Juett (le guitariste de Mothership) s’empare de sa six cordes pour venir secouer la tête sur scène avec ses copains. Et afin de s’assurer que plus personne ne souffre de raideur musculaire au niveau des cervicales, ils achèvent ensemble le set par une reprise méconnaissable de Paranoïd. La salle est pleine et le public à température.
Mothership
Et ça tombe bien, car débuter un show de Mothership à froid doit s’avérer au moins aussi dangereux pour le corps qu’un triple shot de téquila après une année de sevrage. Dès que les frères Juett et leur pote Judge Smith montent sur scène, on sent que ça va virer chocolat. Kyle est déjà torse poil et trempée de sueur du fait de son passage dans la fosse, Kelley nous demande s’il est possible de faire tanguer ce maudit bateau, quant à Smith… et bien, sa cymbale chinoise en lambeau parle pour lui. Sans surprise, le Heavy rock and roll déjanté des Américains emporte la foule dans un torrent de frénésie. Si les deux premiers titres résistent au chaos, dès le lancement du galopant « Crown of lies », c’est foutu. Le premier slam part, et très vite les pogos suivent ; au grand dam de ce pauvre monsieur (appelons-le Michel) qui n’avait jamais vu ça de sa vie et tente à plusieurs reprises de raisonner les bougres d’individus qui le bousculent. On s’excuse, Michel. La logique et la sanité n’ont malheureusement plus leur place dans ce temple d’hérésie. Une fois Michel en sécurité, on retourne se jeter dans la fosse. Les tritres comme « Cosmic Rain » s’enchaînent et parfois, entre deux, on répète un « Hell yeeeaaahh ! » lancé par Kyle. Une fois n’est pas coutume, Igor des Stoned Jesus se joint aux énervés de Dallas pour achever le set.
Mothership – Igor
Décidément, entre ça et les t-shirts à l’effigie des groupes de la tournée, on sent que tous s’apprécient beaucoup. La joie générale et le plaisir de tourner ensemble sont d’ailleurs palpables et se transmettront depuis le début d’Elephant Tree jusqu’au dernier rappel de Stoned Jesus. En ce qui concerne Mothership, ils clôturent leur impressionnante prestation par « Angel of Death ». Morceau phare dont le public conquis se plait à scander les paroles.
Stoned Jesus
La foule est dense pour accueillir la tête d’affiche du jour. Le trio made in Kiev vient justement de sortir son nouvel album Pilgrim, et il entend bien le défendre. Aussi, démarre-t-on avec trois extraits de ce dernier, dont « Thessalia » et « Feel ». Trois morceaux inédits bien différents des standards du groupe, mais qui savent pourtant secouer les fidèles venus quérir la bonne parole. Comme pour se justifier, Igor annonce qu’il y a aussi quelques classiques incontournables à venir. ” Don’t worry, there should be « I’m the moutain » somewhere”. Homme de parole, il la place au milieu du set. Juste après le vilain « Here come the robot » qui déchaîne totalement les passions. Les pogos explosent au moindre prétexte, les slams se succèdent, on prend les santiags en crocos de Kyle dans la tronche. Même Sergey se laisse porter par la foule à deux reprises tout en lâchant ses grosses lignes de basse. On pourrait supputer qu’après la tornade Mothership, l’énergie de Stoned Jesus perdrait de sa superbe, or il n’en est rien. Les riffs sont intenses, le chant est puissant, juste, et la rythmique parfaitement maîtrisée. On redécouvre littéralement leurs morceaux. On les goûte sous un nouveau jour, surtout avec la qualité sonore irréprochable du Petit Bain. « Feel », « Hand resist him », « Apathy » et bientôt c’est le premier rappel. Et quoi de mieux pour achever cette meute de chiens affamés que de leur lâcher ce bon vieux « Black Woods » issu du premier album. Toutefois, cela ne suffit toujours pas à rassasier les fidèles. Stoned Jesus surgit donc à nouveau avec « Water me » pour un ultime rappel. Un choix audacieux, qui viendra confirmer la volonté du groupe de jouer l’intégralité de son dernier album. Néanmoins, à en juger par l’ovation, le remplissage de la salle et la quantité de sueur répandue, le pari est réussi. Les Ukrainiens confirment que même avec un album ayant reçu une critique mitigée, ils sont capables d’enflammer les foules dans un torrent Stoner bien à eux.
Stoned Jesus
On remonte donc les marches du sous-sol avec une franche joie. Celle d’avoir assisté à trois shows d’une qualité impeccable, celle d’avoir partagé l’énergie bienveillante de musiciens heureux de jouer ensemble, proche de leur public et généreux ; même celle d’avoir collecté quelques bleus et des échantillons de sueur de singuliers individus, dis donc ! Que dire de plus ? Merci le Petit Bain, et merci Garmonbozia Inc.
[Attention, lecteur : cette chronique comporte quelques portions de musique non stoner. Leur innocuité a été prouvée en laboratoire, n’aie crainte, ça devrait bien se passer…]
C’est la deuxième journée du festival girondin, sachant que votre serviteur n’a pas pu assister à la journée de la veille, qui proposait pourtant (d’après les échos que l’on en a eus) d’excellentes prestations de Birth Of Joy, The Psychotic Monks, It It Anita, etc…
La première remarque en rentrant sur le site en ce samedi après-midi est que peu de choses ont changé depuis l’an dernier… Et c’est tant mieux ! Le festival est encapsulé dans un petit coin de verdure, dans un village en bordure du fleuve, adossé à une majestueuse ancienne maison de maître d’un domaine viticole, dans une sorte de petit bois dont les clairières accueillent le public des concerts. Autour, bars, food trucks, disquaire, merchandising, espace jeux,… Tout ce qu’il faut pour passer une bonne soirée, avec un personnel bénévole souriant et accueillant.
NEW KIDZ
Traditionnellement, le samedi après-midi accueille un concert gratuit pour les enfants. Et aujourd’hui c’est aux New Kidz d’essayer de réveiller les drôles, jusqu’ici plutôt attirés par tous les jeux mis à leur disposition par le festival. Mais le trio du « Nord du Sud Ouest » connaît son affaire et ne tarde pas à faire venir à eux tous les gamins et leurs familles. Imaginez trois mecs balançant des morceaux aux paroles parlant d’instits, des copains de récré, de super héros et de concerts de rock, le tout armé de grosses guitares, sur des sons qui rappelleront aux adultes les grandes heures de Rocket from The Crypt, AC/DC, les Hives, les Ramones, etc… Y’a pire ! Le tout est bien joué, par de vrais musiciens, c’est bienveillant, intelligent, bien écrit, marrant… De quoi bien développer l’éducation musicale des plus jeunes. A tester d’urgence si vous avez ou connaissez des enfants un peu trop réceptifs à Jul et Maître Gims, il n’est pas trop tard pour les remettre sur la voie !
I AM STRAMGRAM
Une petite heure pour se détendre au frais sous les arbres, la transition avec le « vrai festival » se fait en fin d’après-midi, en douceur : les locaux de I Am Stramgram prennent la grande scène dans la douce torpeur estivale et vont caresser les tympans d’un public encore un peu clairsemé et légèrement apathique, pendant une petite heure de concert. A l’heure de l’apéritif, les sonorités pop-folk du duo (guitare – batterie/samples) sont bienvenues et participent à une ambiance détendue sur l’ensemble du site. Sans représenter un grand intérêt pour l’amateur exclusif de gros décibels saturés, on reconnaît le talent du combo pour la conception de chansons variées, aux sonorités riches et travaillées, leur duo instrumental s’appuyant sur une large variété d’effets (voix, guitare, …) et de samples divers pour enrichir leur mise en son. Une agréable entrée en matière.
PAMPLEMOUSSE
Symptomatique de la démarche des programmateurs du Black Bass, le trio de Pamplemousse arrive directement de… la Réunion ! Aller-retour uniquement pour cette date ! On apprécie autant l’effort logistique que l’apport bienvenu de saturation qu’ils amènent avec leurs instruments sur la petite scène. Porté par des ambiances plutôt noise rock transpercées de fulgurances hardcore soft, le groupe peut faire penser à un Unsane plus gentil copulant avec les Pixies ou Fugazi pour les plans plus mélodiques. Rien de révolutionnaire sur le plan musical, mais c’est bien fait, et scéniquement c’est bien en place, ça fonctionne très bien et le public semble apprécier. La tension monte progressivement et la fée électricité commence à pointer le bout du nez, tandis que le crépuscule nous offre une ambiance superbe en ce début de soirée…
LANE
Le voilà donc le fameux groupe des « anciens Thugs ». LANE (Love And Noise Experiment) regroupe effectivement les frangins Sourice du groupe angevin culte, ainsi qu’une autre fratrie issue des plus jeunes Daria. Vous complétez le tout du jeune fils de Pierre-Yves Sourice à la gratte et vous obtenez un quintette pour le moins « familial », porteur d’un héritage fortement électrisé et de quelques centaines de concerts dans les jambes… Ça se ressent assez vite dans la maîtrise de la grande scène du festival : c’est solide, c’est pro ! Les trois guitares (!) et la basse nerveuse développent un son noise rock qui devrait rappeler de bons souvenirs aux anciens aficionados des Thugs (le chant toujours impeccable d’Eric Sourice n’est pas étranger à ces réminiscences…). Les mélodies sont bien travaillées, efficaces, et là encore on reconnaît la patte des deux groupes qui se sont « hybridés » autour de ce nouveau groupe/projet. L’ensemble est un peu linéaire sur une heure de concert, mais c’est aussi le genre qui veut ça. La prestation est néanmoins efficace et aura convaincu le public de plus en plus large qui s’est massé dans la fosse.
L’heure qui suit est dédiée au traditionnel et bon enfant concours de « Air Guitar », qui permet aux gratteux de salles de bain de briller devant un public rieur, le tout dans une ambiance décontractée.
1000MODS
Dire que le quatuor grec est attendu ce soir est un euphémisme. Leur montée en régime de ces derniers mois, en support de l’excellent Repeated Exposure to… a culminé au Hellfest en juin par un set coup-de-poing (de nombreux tee-shirts Hellfest dans le public laissent penser que pas mal de victimes consentantes sont venues tendre la deuxième joue ce soir). L’électricité est donc palpable dans la fosse pour la tête d’affiche de ce soir. Le tapis rouge ainsi déroulé, ne restent à nos quatre hellènes préférés qu’à actionner leur machine de destruction massive et faire cracher les amplis Orange. Ce qu’ils font en commençant par un enchaînement bien heavy de “Above 179” et “Road to Burn”. Bien lancés, le reste roule tout seul ensuite pendant une heure, délivré avec méthode, énergie et talent. Le groupe ne prend pas de risque en piochant dans ses titres les plus efficaces sur ses trois principales production : on constate évidemment une légère inclinaison vers son dernier rejeton (“Electric Carve” et “Loose” auront laissé quelques traces dans le moshpit) mais des brulots de la trempe de “Claws” ou des titres plus groove (“Low”, “Vidage”) remportent aussi leur petit succès.
Leur maîtrise scénique impeccable, doublée d’un light show remarquable et d’un son parfait (on ne se croirait pas en plein air) finissent de satisfaire un public exsangue et béat. Biens dans leurs baskets, ils bouffent carrément leur créneau horaire en empiétant de 10 bonnes minutes l’horaire de fin prévue, en dégainant en conclusion un « Super Van vacation » rallongé, groovy en diable, dont les breaks dévastateurs sont encore prétextes à une déferlante de slammers et même une paire de méchants circle pits ! L’effet de surprise en moins, le groupe a quand même mis ce soir tout le monde d’accord et a confirmé tout le bien que l’on pensait de lui. Il suffit de voir l’état du stand de merch après leur set pour confirmer qu’on n’a pas été les seuls convaincus…
TOYBLOID
Deux salles, deux ambiances, comme on dit : les derniers restes de feedback crachés par les amplis encore incandescents de 1000Mods s’éteignent à peine dans la nuit qu’une petite tornade rouge envahit la petite scène de l’autre côté du site : le trio parisien Toybloïd prend tout le monde par surprise en proposant un pop rock punky girly en mode fun. Occupant bien la scène, le duo féminin guitare-basse, en short-maillot de sport-baskets rouge vif, bouge dans tous les sens et dégaine des riffs dynamiques à qui en veut, sur des rythmiques qui ont dû user quelques dance floor ! Une petite bouffée d’air frais, un rafraîchissement salvateur dans cette prog costaud de la fin de soirée, bien appréciés par un public remuant aux hymnes rock acidulés du trio. Des rythmes auxquels même les taciturnes Hangman’s Chair auront du mal à résister, tandis qu’ils font leur balance de l’autre côté du site, un sourire quasiment carnassier au bord des lèvres… Saluons d’ailleurs, encore, l’audace de ces programmateurs à qui rien ne fait peur, qui proposent rien moins que d’enchaîner un groupe de pop punk punchy coloré monté sur ressorts à Hangman’s Chair, rois du mid-tempo sinistre et du riff glauque. Le choc auditif et mental extrême…
HANGMAN’S CHAIR
Le quatuor parisien foule les planches dans la pénombre tandis que la bande son de « Banlieue Triste » retentit, et lancent les hostilités sur un « Naive » puissant. Les premiers constats sont rapides : le son est limpide encore une fois, le light show est tout simplement excellent, et nos quatre gaillards sont en grande forme ! Dire que le set est solide est un euphémisme : les musiciens sont carrés, et sont tous les quatre à leur manière à fond dans leur set. Cédric assume son rôle de frontman à la perfection et parvient à retranscrire impeccablement des lignes vocales pourtant de plus en plus exigeantes sur le dernier Banlieue triste ; Mehdi martèle ses futs avec rage et conviction ; Clément comme à son habitude arpente son bout de scène dans tous les sens en donnant l’impression qu’il va bouffer le public ; Julien assure ses leads de guitare impeccablement, sorte de guitar hero non-conventionnel… Bref, les conditions sont réunies pour un super set, et c’est bien ce que l’on a ce soir.
La set list s’appuiera cette fois largement sur leur dernier album (le très bon Banlieue Triste, sorti il y a quelques mois), avec pas moins de deux tiers des titres joués ce soir. Il faut dire que la transition album-scène de titres pourtant très élaborés comme “04/09/16” est en fait très réussie, les chansons n’y perdent jamais en impact, et même les longs et complexes “Touch The Razor” ou “Full Ashtray” parviennent à maintenir la tension tangible sur vinyl. This is Not Supposed to be Positive est honoré à travers évidemment ses deux joyaux “Dripping Low” et “Flashback”, ainsi que le glauque “Cut up Kids”. Mais au delà de leurs deux dernière productions, seul “The Saddest Call” vient se rappeler à notre souvenir…
Après la paire de sets « high energy » que le public vient d’enquiller (l’enchaînement 1000Mods/Toybloïd) et la nuit bien entamée avec la fatigue qui va avec (le groupe finira son set à 2h du matin) une part de l’assistance quitte petit à petit le site avant la fin de leur concert, mais un large public goute les compos des franciliens jusqu’à la lie, à savoir la bande-son finale (la lecture de Georges Bataille qui clôt aussi l’album) qui voit le groupe quitter la scène dans la pénombre.
Il est temps de quitter le festival qui cette année encore a tenu toutes ses promesses. Site remarquable, ambiance chaleureuse, organisation sans faute… ce festival à taille humaine a déjà tous les atouts. Mais c’est sa programmation qui le rend plus attrayant et atypique que ses « concurrents » (qui ne le sont pas) : tandis que la plupart des festivals estivaux garnissent à peu de frais leur affiche des mêmes sempiternels artistes saisonniers itinérants, que l’on retrouve tous les week-ends dans tous les recoins de l’hexagone, le Black Bass choisit de se donner les moyens pour les groupes qu’ils VEULENT faire venir. Ça marche au coup de cœur et à l’envie plus que par logique économique. Cette année ils font venir les 1000Mods hors tournée pour un aller-retour Grèce-France exprès (leur seule date dans l’hexagone cette année avec le Hellfest), vont chercher les Birth of Joy dans le même contexte depuis leurs Pays-Bas, font prendre l’avion à Pamplemousse… Des exclus, des coups de cœur, et des choix pointus mais pertinents. Et ça fonctionne, en atteste un public encore au rendez-vous cette année. Autant vous dire qu’on attend déjà la prog de l’an prochain avec impatience…
Pour sa 4ème édition des Volcano Sessions, Black Owl a pris le pari de rester dans le cadre du Volcan de Montpeloux, lieu unique et écrin parfait pour ce Woodstock de la terre du milieu. Forts de l’expérience passée, les organisateurs ont su améliorer la logistique et l’accueil pour faire de cette édition une vraie réussite malgré le froid et l’humidité.
Un son toujours au poil, des lights faisant profiter de la majesté du lieu, un bar bien mieux placé et ces putains de pâtés de patates lestant l’âme et le corps… retour sur deux jours d’orgies musicales, d’orgues basaltiques, d’ogres pantagruéliques.
Le vendredi marquait donc le début des festivités avec 3 groupes jetés dans le cratère en guise de sacrifices au dieu stoner. Blackbird Hill, duo blues-rock crasseux efficace, se chargeait avec talent d’aiguiser les appétits, un petit exploit puisque les deux gonzes dérouillaient aujourd’hui leur seulement deuxième concert ensemble.
Le plat principal était servi par le trio bordelais Datchä Mandala, chantres d’un rock 70s très marqué. A défaut d’originalité, le groupe fera preuve d’une efficacité redoutable, échauffant sens et envies.
Le dessert en ce jour poisson fut apporté par The Necromancers, quatuor béni, oui-oui, délivrant un set puissant, brinquebalant un tantinet mais outrageusement efficace. Gros son, belle entrée en matière… ne restait qu’à se cailler les miches toute la nuit avant de reprendre les festivités de lendemain.
Les concerts ne reprenant que vers 17h, les organisateurs ont donc placé une ‘tite scène en entrée de camping pour un jam bucolique et champêtre en début d’après-midi. Bonne pioche pour un instant à la cool à chiller le fion sur la rocaille volcanique.
La reprise des choses sérieuses était assurée par Doctor Doom, le quatuor ariégeois distillant groove et bonne humeur, avec un touché technique extrêmement plaisant.
Les portugais de Vircator prenaient place ensuite sur la scène cratère, lui rendant hommage grâce à des titres aériens et puissants lorgnant par moments du côté de Russian Circles.
Un beau moment prolongé grâce à la virtuosité et la qualité des compositions d’Electric Monolith. Des petites bombes catchy, sabbathiennes en diable, que le trio espagnol assènera avec gourmandise. La belle surprise du festival pour ma part.
Pyramidal (Photo : Pitch)
Pyramidal me laissera quelque peu perplexe je dois dire. L’impression d’assister à un long line-check sera prégnante. Musiciens un peu perdus, guitare désaccordée, peu de communication. Voir le groupe sous un autre jour lui rendra peut-être justice.
Ruby The Hatchet clôturera avec classe et professionnalisme cette très belle édition des Volcano Sessions. Le set marquant la fin de leur tournée européenne, les américains ne seront pas avares en reprises et rappel. Un show puissant et maîtrisé, magnifié par le cadre.
Je ne m’étendrai pas sur la soirée post-concert mais tout le monde sait que la bière fait chanter faux mais chanter heureux. Nul doute qu’un paquet de sourires radieux s’est endormi bien au chaud sous sa couette ce soir-là.
Une ambiance un peu particulière entoure ce concert de Mother Engine… Déjà la date a été annoncée un peu tardivement, proposée par Make it Sabbathy dans le cadre de leurs “hors série”, gratuitement, comme un cadeau de fin de saison aux bordelais. L’ambiance à Bordeaux est relax, fin de journée, soleil, terrasses pleines, lendemain de victoire de l’Équipe de France… Gageons que le grand public a trop festoyé la veille car le très sympathique Bad Mother F. n’affiche pas vraiment complet. Quelques dizaines de personnes sont néanmoins venues assister au set des allemands. Quality over quantity, qu’ils disent…
Le set commence un peu dans la pénombre : le light show de la soirée sera travaillé, mais plutôt sombre (pour un bar, le Bad Mother F. est plutôt bien loti en éclairages, c’est appréciable !). Le trio s’installe tranquille… Mais quand on dit “tranquille”, on le pense : shorts et débardeur, pieds nus… C’est l’été, on vous dit, on va pas non plus se prendre la tête ! Le set commence par une phase un peu flottante, une sorte de mise en place de l’ambiance qui dure quand même 5 à 10 bonnes minutes, où le public reste encore un peu froid. Mais les allemands savent y faire et sont en confiance : leur rock psyche s’installe, enchaîne les plans heavy à des passages lancinants et planants, et le public se prend au jeu progressivement. La tension se met en place et le reste du set déroule devant un public conquis, mené par un groupe qui maîtrise son set, et dont l’efficacité live n’est plus à démontrer.
La bonne humeur est de mise sur tout le set, le trio (et en particulier son guitariste Chris Trautenbac, qui n’hésite pas à impliquer ses collègues dans ses vannes, même lorsqu’elles sont un peu foireuses…) communiquant non stop avec le public, blaguant… Tandis que leur dernier album, l’excellent Hangar, date de moins d’un an, ils n’hésitent quand même pas à jouer plusieurs nouveaux titres (ils nous annoncent de probables pains… on n’a rien vu), relax.
Alors que le set devait se terminer à 21h30, à 22h le groupe est encore sur scène. Bonne nouvelle : le proprio est d’accord pour pousser un peu l’heure du couvre feu, et le groupe propose donc un dernier titre au public, ravi.
Quelle bonne soirée… Dommage qu’elle ne fut pas partagée avec un plus large public, qui a raté l’occasion d’un super concert, gratuit qui plus est.
Bourlon est une petite commune située dans le Pas-de-Calais qui, si on en croit Wikipedia, comptait lors du dernier recensement 1 194 habitants. Ce village accueille depuis 2010 un festival très simplement appelé Rock in Bourlon. Très vite ce festival nous a fait du pied, nous amateurs de stoner & co en mettant à l’affiche des groupes comme Glowsun, Zodiac, The Midnight Ghost Train, My Sleeping Karma, Dopethrone ou encore Mars Red Sky (et bien d’autres !). Vous verrez au fil de cette chronique que cette année, c’est carrément les bras ouverts que le festival nous accueille avec un line-up plus que fourni et vraiment de qualité.
L’autre particularité de ce festival mis à part son lieu et sa programmation, c’est son modèle économique. En effet, Rock in Bourlon est un festival où la participation est libre ! Oui vous avez bien lu. Certains aiment dire qu’il est gratuit, ce n’est pas faux, mais on préfère tout de même dire à participation libre. Alors il y a déjà quelques sceptiques ici et là. Un festival gratuit ? Au beau milieu d’un village inconnu ? Vous me prenez pour un pigeon ?
Mais pas du tout mon bon ami. Boire et manger ne te coutera pas une fortune loin de là, le merchandising est à prix tout à fait correct et l’organisation est à mille lieues de faire des économies sur les installations et la sécurité. Bref, gomme tout de suite ce petit doute, Rock in Boulon c’est la petite perle dont tout le monde rêve. Un festival à taille humaine, très accessible et fichtrement bien organisé.
Nous voilà donc en pleine campagne, pas très loin de Cambrai pour le 1er jour du Rock in Bourlon, huitième du nom. Arrivant bien à l’avance on fait le tour des lieux. Des espaces bars, nourritures, merchandising ainsi qu’un espace exposition/vente (affiches, objets déco en rapport avec la musique…) et même un bar à thé. Le tout semble bien agencé et ça sent déjà bon le festival qui va bien.
La scène se prépare…
17h30, le premier groupe vient ouvrir le bal devant un public encore très clairsemé. Fleuves Noirs est un groupe lillois estampillé Noise/Krautrock. Pile le genre de groupe pour lequel vous vous dites soit « C’est quoi ce bordel » ou alors « c’est quoi ce bordel ». La nuance entre les deux étant l’indifférence dans le premier cas et la curiosité intéressée dans le deuxième. On est plutôt dans le deuxième cas avec ce quatuor développant une musique très brute et sans concession. Le chanteur à lui seul vaut le détour. Musicalement et vocalement on a l’impression d’être devant Devo qui aurait fusionné avec un groupe de Berlin période punk/noise/Kraut. Un concert bien barré.
Fleuves Noirs
Les parisiens de Baron Crâne prennent le contrôle de la scène et immédiatement attirent le public avec leur compos instrumentales dans un style très bien maitrisé. Belle surprise que ce groupe que le public ne connaissait pas forcément et nombreux sont ceux qui se laissent prendre par un jeu de basse que Flea des Red Hot ne renierait pas et par ce guitariste qui tout en discrétion vous sort des sons de sa guitare carrément prenants. L’alternance gros sons et sons plus aériens, solos bien sentis et riffs efficaces font de ce groupe une très belle découverte. Le public ne s’y trompe pas et les applaudissements sont nourris et mérités.
Baron Crâne
Le troisième groupe à venir est un de ceux qui ont surement attirés quelques personnes. J’ai nommé Ddent. Pour ceux qui ne les connaissent pas encore (vous vivez où ??), Ddent s’est classé dans notre Top 2017 avec son premier album et la chronique de leur deuxième effort sorti cette année se termine sur ces mots : « un album riche en nuances, mature, maîtrisé et beau ». La bonne réputation du groupe en concert les précède et ils ne vont pas la démentir, bien au contraire. Pour paraphraser nAn et sa chronique de Toro, disons que le concert fut riche en nuances, mature, maîtrisé et beau. Ajoutons sans hésitation puissant, puissant et puissant.
La musique de Ddent qui sur album est déjà bien solide prend une dimension supplémentaire en concert. Mais que c’est puissant ! Le public s’en ai pris plein les oreilles et en redemande encore et encore. Le quatuor joue à la perfection et leurs compos sont ici libérées des limites d’un enregistrement studio et développent leur potentiel totalement. Ddent est le groupe français à suivre, aussi bien par leurs albums à venir que par leurs prestations scéniques.
L’occasion de souligner ici une première fois la qualité du son (même si on va se contredire pour le set suivant mais il faut bien une exception). Car une bonne prestation passe en premier lieu par de bons musiciens et de la bonne musique mais combien de concerts ruinés par un son à la limite de la bouillie ?
Ici c’est tout l’inverse. Le son est vraiment très bon. Il faut dire que celui qui s’occupe de la console fait un boulot admirable en prenant bien son temps pour les balances et en ne laissant rien au hasard. Clairement dans les nombreux atouts de ce festival et la liste interminable des bons points, le son est à mettre au top.
Ddent
Les Lillois de Love Sex Machine auraient dû jouer la nuit tombée mais un le retard de Monolord (voir ci-dessous) a finalement avancé l’heure du show. Pas de souci pour eux, les quatre gaillards étaient prêts à envoyer leur mélange de sludge et de doom, gras à souhait. Même si le son était parfois un peu brouillon (balances trop rapides à cause du retard ?), les Lillois s’en sont sortis comme des rois. A la voix, c’est du gros growl à l’ancienne, efficace pour les amateurs du genre, un peu plus rébarbatif pour les autres. Une histoire de goût. Mais l’ensemble est plutôt bien exécuté avec des phases bourrines où les deux gratteux et la basse balancent les riffs à la chaîne pendant que le bûcheron derrière cogne ses fûts comme si sa vie en dépendait. Les parties instrumentales ont eu le mérite de rassembler le reste du public qui n’était peut-être pas trop chaud pour recevoir les cris de l’enfer en pleine tête. Love Sex Machine a terminé son set de meilleure manière qu’il n’avait commencé, avec beaucoup plus d’intensité. Il faut dire que passer juste avant Monolord ne doit pas être très rassurant…
Love Sex Machine
On attendait justement le trio suédois aux alentours de 21h mais un problème lié à leur vol a contraint les organisateurs à décaler le concert. Ce qui n’a pas empêché le public de répondre présent pour se prendre ce que beaucoup ont considéré comme la plus grosse baffe de la journée. On s’en doutait légèrement rien qu’en écoutant les balances et ce son de basse que nos tympans ont aimé détester. Et l’ensemble du show de Monolord restera sur la même teneur : du doom bien gras exécuté à la perfection. A la basse, Mika Häkki malmène son instrument et balance les riffs plus lourds les uns que les autres. Derrière lui, Esben Willems fait trembler les fûts pour créer cette rythmique ravageuse et bougrement efficace et ne cesse d’augmenter l’intensité au fil des morceaux. Thomas Jäger s’occupe du reste avec cette guitare bourdonnante et lancinante et sa voix qui, sans être originale, complète parfaitement le job des instruments. Déjà bien chaude, la foule se déchaîne de plus belle sur “Empress Rising”. Certains n’en sortiront pas totalement indemnes mais le jeu en vaut la chandelle. En plus d’une heure, Monolord a mis tout le public bourlonais d’accord. Tout simplement Impressionnant.
Monolord
La première journée se termine donc de façon épique. Cinq groupes aux styles très variés se sont succédé sur scène et ont chacun offert au public mêlant connaisseurs et curieux des prestations de qualité. Rendez-vous dans quelques heures pour la suite !
La veste à patch qui te confirme que tu es au bon endroit
La seconde journée débute comme la première avec un temps splendide et un site nickel. Il faut dire que nous avons vu hier un public très respectueux des lieux, utilisant les bidons/poubelles placés çà et là. Ce genre de petits détails qui, mis les uns à côtés des autres, prouvent encore une fois le sérieux de l’organisation.
Ce n’est pas la scène qui accueille le premier concert de la journée mais une tonnelle placée du côté du mini-market. Durant deux heures Koonda Holaa and The Absolute Never se la joue à la cool, sans pression. Un peu de psyché, une bonne touche de blues avec un petit soupçon d’expérimental. C’est parfait pour se remettre dans l’ambiance et commencer cette deuxième journée au programme bien chargé.
Les quatre Suédoises de Maidavale n’étaient peut-être pas les plus attendues de ce samedi ensoleillé mais leur set n’a laissé personne de marbre. Elles avaient déjà créé la surprise à Berlin, au DesertFest, et ont encore une fois répondu présentes à Bourlon. La chanteuse Matilda Roth est omniprésente avec sa voix que les fans de Grace Slick (Jefferson Airplane) ont apprécié. Le quatuor a profité de son passage en terres françaises pour présenter son nouvel album Madness is Too Pure et même si leur rock psychédélique n’a rien de très original, elles savent apporter une petite touche supplémentaire pour rendre leur show énergique. A la rythmique, basse et batterie accompagnent parfaitement les envolées fuzzy de la gratteuse qui alterne entre riffs bluesy et solos psychédéliques. Maidavale ne prend pas de risque mais a tout de même bien assuré. Le quatuor continue de faire son bonhomme de chemin dans la sphère stoner/psyché. C’est mérité.
Maidavale
On change complétement de style en passant de quatre suédoises à quatre mecs bien roots. Ecstatic Vision si vous ne les connaissez pas, c’est l’assurance de voir un concert bien rock avec un frontman qui conduit sa troupe et son public pour leurs faire sortir toute leur énergie. Si vous accrochez musicalement vous passerez un très bon moment, dans le cas contraire, vous regarderez ça de loin. Ecstatic Vision c’est une débauche d’énergie et de décibels. C’est un chanteur qui chante, crie et harangue les foules autant qu’il peut, n’hésitant pas à grimper sur les haut-parleurs (un grand classique chez lui). C’est aussi un guitariste/saxophoniste qui se donne sans compter et balance tout ce qu’il peut comme si c’était son dernier concert. Bref, vous l’avez compris, le groupe nous a sorti un set dans la pure tradition Ecstatic Vision. Le public se laisse prendre au jeu et l’échange public/groupe est parfait. Un très bon set d’un groupe qui se donne sans compter.
Ecstatic Vision
Typique d’un festival, on rechange encore de style avec le groupe suivant. Les blagues sur le nom du groupe n’ont pas manqué avant le passage des Hollandais… Mais une fois sur scène, Gold a su captiver le public pour un show en dents de scie mais tout de même intéressant. Au chant, Milena Eva fait office de chef de meute aux côtés de ses cinq musiciens. Il faut avouer que la présence de trois guitaristes n’est pas toujours cohérente mais n’empêche pas le groupe d’envoyer la sauce, à leur manière. Comment définir le style de Gold ? Difficile tant les influences sont nombreuses. Un peu de psyché par ci, du rock un peu plus lourd par là avec quelques passages calmes où la chanteuse prend possession de la scène. L’ensemble du show semble justement calé sur les envolées lyriques de Milena Eva, un peu trop par moments où on aurait aimé que les instrus prennent un peu plus de place, surtout avec trois guitaristes… La fin du concert est un peu plus rythmée mais les avis sont partagés: il y a ceux qui aiment et ceux qui détestent et jugent la prestation trop lancinante. Une affaire de goût.
Gold
La suite, elle, va mettre tout le monde d’accord. Karma To Burn égraine les scènes depuis plus de 20 ans. Seul membre originel encore dans le trio, William Mecum n’a plus grand chose à prouver… et presque plus rien à proposer de vraiment nouveau. Mais on s’en fout carrément. Et vu le nombre de T-shirts estampillés Karma to Burn en ce samedi, on n’était pas les seuls. Il suffit que les trois lascars originaires de Virginie branchent leurs instrus pour que la sauce monte en moins de trois secondes. Visiblement heureux d’être là, les Ricains de K2B (pour les intimes) balancent leurs plus vieux riffs avec toujours autant d’entrain. Casquette vissée sur la tête et lunettes noirs sur la tronche, Mecum envoie les premières notes de “Thirty” et laisse échapper un léger sourire en voyant la fosse jumper comme il se doit. Le son est bon, très bon même, et ce ne sont pas quelques légers problèmes techniques à la basse qui viendront contrecarrer les bonnes attentions des Ricains. Le trio enchaîne avec ses classiques issus de Wild Wonderful Purgatory et Almost Heaten avec une sérénité presque détestable. Le show est rôdé, équilibré et on ne voit pas le temps passer. “Tout le monde va bien ?”, demande William Mecum. La réponse est unanime, bien sûr que tout le monde va bien ! Sans surprise, K2B termine le set avec son traditionnel “Twenty” qui emporte tout sur son passage. “C’est du lourd” gueule un groupe de jeune une fois que le groupe a quitté la scène. “Ce sont eux les patrons”, surenchérit un autre mec un peu moins jeune. Tout est dit.
K2B
En parlant de patrons, certains étaient pour K2B, d’autres pour Eyehategod.
Qu’on aime ou qu’on n’aime pas, EyeHateGod se trouvait bien tout en haut de l’affiche de ce Rock in Bourlon 2018. Alors oui, il fallait assurer, avec un gratteux en moins qui contraint le groupe originaire de Louisiane à reprendre une formation à quatre. Le show démarre par un simple “Fuck you, we are EyeHateGod” signé Mike Williams qui en dit long sur leur motivation du soir. Le public est déjà bien acquis à leur cause mais les Américains vont faire bien plus que le contenter ; ils vont littéralement l’assommer.
Pétard au bord des lèvres, Jimmy Bower déballe les riffs les plus gras du jour. La section rythmique n’est pas des plus originales mais elle fait le boulot pour laisser la place aux deux foufous que sont Williams et Bower. Il ne faut pas se le cacher, on craignait que le chanteur s’autorise une sortie de route et se retrouve dans un état peu propice au chant mais il n’en est rien : Mike Williams donne tout ce qu’il a, malmenant son micro et le pied qui va avec dès qu’il en a l’occasion. Sur “Blank” comme sur les autres titres phares de EHG, le public headbang d’une seule tête, créant une ambiance fantastique.
Le quatuor termine en apothéose avant de quitter la scène sous la plus belle ovation du week-end… avant de revenir pour checker quelques poings et serrer des paluches, en tout humilité. Et si c’était ça la marque des grands groupes ? En tout cas à Bourlon, EyeHateGod a marqué les esprits pour un sacré moment.
Eyehategod
Difficile de s’en remettre mais il reste tout de même un concert pour clôturer cette magnifique édition du festival. Certes une partie du public, laminée par les deux sets précédents, a déserté le devant de la scène mais il reste un bon paquet d’irréductibles pour accueillir Five the Hierophant, groupe estampillé « Psychedelic Black Doom Jazz ». Et franchement oui, c’est exactement ça. Dans une tenue digne d’une messe noire, les londoniens proposent une musique très particulière et difficilement associable à quelque chose de connu. C’est très Doom et Black et c’est surtout très bien exécuté. Le son est excellent permettant pour celles et ceux qui ne les connaissent pas de pouvoir se faire une très bonne idée de leur musique et pour les fans de se régaler. Les festivaliers prennent ici une bonne dose de décibels avec un set très solide par un groupe qui a certainement gagné quelques adeptes.
Five the Hierophant
Difficile de quitter ce village mais voilà, l’édition 2018 du Rock in Bourlon se termine. A l’heure du bilan côté spectateur la conclusion est vite trouvée. C’était parfait. Le site, l’organisation, les groupes, l’ambiance, difficile de trouver la moindre chose à reprocher. Côté groupes, gageons que l’impression fut la même. Il faut dire que certains signes ne trompent pas. Bon nombre de musiciens se sont mêlés à la foule durant les concerts (mention spéciale aux membres de Ddent présents les deux jours) répondant parfois aux sollicitations très polies des fans les reconnaissant sans pour autant abuser en selfies et autres coutumes. Doug Sabolick (Ecstatic Vision) tranquillement au bar, Mike Williams (EHG) regardant une bonne partie du concert de Gold ou encore les quatre suédoises de Maidavale assistant au concert d’Ecstatic Vision (et facile vainqueur des photos avec le public), voici quelques exemples parmi tant d’autres.
L’édition 2019 est déjà annoncée (pas de groupes à l’heure de cette chronique bien sur) et si vous aviez en tête qu’un festival gratuit/à participation libre était forcément le genre d’événement à éviter (boisson/bouffe trop chères, groupes nazes ou en service minimum, organisation à la ramasse etc…) et bien nous ne pouvons que vous inciter à revoir votre jugement et à ne pas hésiter à faire quelques kilomètres (il y a un camping ! n’hésitez pas à venir de loin) pour vous en prendre plein les oreilles dans des conditions idéales avec un combo organisation/groupes/public au top.
“Les meilleures choses ont une fin”… “Jamais deux sans trois”… Difficile de trouver une proverbiale introduction adaptée au sentiment que l’on ressent invariablement chaque année, en foulant pour la troisième fois consécutive la verdoyante pelouse du Hellfest. Fatigue, excitation, nostalgie déjà, tout se mêle… Heureusement, on n’aura pas trop le temps de réfléchir et de nous apitoyer aujourd’hui : l’affiche du jour est encore riche en gros calibres sous la Valley ! Et certains pourront même faire quelques sprints pour aller capter quelques sets de fort bon cru du côté de la warzone… Bref, on est finalement remontés comme des coucous en ce milieu de matinée… Haut les coeurs !
DUST LOVERS
On commence la journée par les enfants du pays, enfin les enfants du même pays car les Dust Lovers (qu’on appelait encore The Texas Chainsaw Dust Lovers il y a quelques semaines) proviennent plus des environs de la Seine que des Côtes de l’Atlantique. Ces accoutumés des scènes hexagonales ne se priveront d’ailleurs pas de rappeler leur provenance et leur joie de jouer au Hellfest en adaptant – en français – les textes de leur premier titre, rallongé de quelques longueurs loin d’être inutiles pour attaquer ce dernier jour de festivités. Avec leurs dégaines qui ne dépareilleraient pas sur la pellicule de Tarantino et une attitude de rockers confirmés, les Français ont fait bien plus que représenter la scène francophone : ils ont balancé un set impeccable durant la demi-heure qui leur était accordée et se sont même tapé un beau délire avec leur saxophoniste qui, lui, dépareillait dans cette Valley où cet instrument est plutôt rare. La performance de ces représentants d’une scène français très active a placé la barre très haut car ces gars-là ne se sont pas déplacés pour faire de la figuration.
Set list : California Sur Marne/Camouflage/Car Crash/Martyr With A Plan/Summer Spleen/Born Bad
LUCIFER
Étrange placement pour les Suédois qui sortent au mois de juillet leur deuxième opus sobrement intitulé “II”. Ils sont coincés entre un groupe peu connu sur la scène internationale et des vielles gloires sur le retour qui mériteront toute notre attention. Déjà vu à Berlin quelques semaines auparavant, nettement plus haut sur l’affiche, Lucifer nous propose aujourd’hui un concert réduit à 30 minutes et fera donc une sélection des morceaux les plus abordables de leur concise discographie. Il faut dire aussi que leur batteur (Nicke Anderson pour ceux qui ne suivent pas) sera derrière son micro et sa guitare en fin de journée sur la scène Warzone à une heure de forte affluence en compagnie des mythiques Hellacopters. Le doom de la jeune formation, qui réunit des vétérans, fera bien le job pour un show avant l’heure de l’apéro, mais malgré l’engagement de la frontwoman Johanna Sadonis (en habits de lumière), nous devrons nous rendre à l’évidence en fin de set que Lucifer n’aura pas déchaîné les passions malheureusement, malgré une prestation fort correcte. Peut-être que le symptôme “veille du retour à la réalité” pour les spectateurs n’y était pas totalement étranger.
Set list : Anubis/Abracadabra/California Son/Dreamer/Phoenix/Faux Pharaoh
WARNING
Fondé en 1994 et mené par Patrick Walker (qui créera par la suite un autre groupe, 40 Watt Sun), Warning est surtout réputé pour son deuxième album sorti en 2006, Watching From A Distance, pur bijou de doom anglais de cinq longs morceaux où la mélancolie se mêle au désespoir. Ça tombe bien, car le groupe a décidé de nous le jouer dans sa quasi-intégralité, l’amputant de son dernier titre, « Echoes », pour des raisons de temps de jeu. Visuellement, les quatre membres de Warning sont plus proches du professeur de SVT en collège que du punk rockeur. Ils ne payent pas de mine, et la sobriété est de rigueur. Pour autant, l’interprétation est précise et d’une grande classe. Entre les morceaux, Patrick Walker se fait des rapides shots de miel afin de garder sa voix dispo : comme ses compositions, son chant clair s’étire souvent assez longuement, comme la complainte d’un homme abattu. En ce début de journée, les morceaux de Watching From A Distance plongent une Valley bien peu remplie dans un état de spleen total.
Set list : Watching From A Distance/Faces/Briges/Footprints
GRAVE PLEASURES
On l’aura compris sur cette édition 2018, la programmation de la Valley a largement franchi les barrières du stoner/doom, et Grave Pleasures en est une preuve parmi d’autres. Formé en 2010 sous le nom de Beastmilk puis rebaptisé Grave Pleasures suite à un changement de line up, le groupe de post-punk finlandais fait partie de ceux qui ont réussi à s’immiscer dans la sphère metal et à en séduire le public par l’imagerie et les thèmes qu’ils véhiculent, bien qu’ils en soient musicalement assez éloignés. L’ambiance est sombre et les paroles le sont tout autant, les morceaux sont froids et métronomiques, rapides et efficaces, entêtants et presque dansants. Une découverte agréable qui apporte un vent nouveau sous la Valley.
NEBULA
Mal servis par un son pas à la hauteur de leur légende, on était ressortis de la prestation berlinoise du trio U.S. un peu frustrés, et ce set au Hellfest tombe à pic. Grand bien jous a pris d’en chercher une nouvelle rasade : après quelques semaines sur la route, les automatismes se sont ré-installés, le power trio fonctionne en quasi-osmose, et le nouveau batteur Mike Amster a trouvé sa place dans le groupe (ce qui n’est pas une mince affaire dans un combo aussi orienté jam). Décidés à ne laisser rien au hasard, nos lascars balancent un set de grande classe, composé essentiellement de classiques mais aussi de petites perles parfois oubliées (“Aphrodite”). Ils varient avec talent les titres les plus punchy (la doublette “Full Throttle” / “Giant” aura mis pas mal de monde sur les genoux en début de set) aux mid-tempo efficaces (“Anything from you”, le trippant “Out of your head”, le bluesy et torride “Smokin’ Woman”…), injectant un break ici ou là, coupant tel ou tel morceau, sculptant des transitions qui n’existaient pas sur disque… Pour ne rien gâcher, le son puissant et clair est exactement ce qui convient à Nebula. Sur scène, Eddie Glass assure, le gars est en forme et fait le job : vocaux impeccables mais surtout leads de guitare jouissifs, le frêle frontman enchaîne les soli à grands renforts de fuzz et effets divers qui nous atomisent invariablement dans les hautes altitudes du meilleur space rock. Tom Davies n’est pas plus extravagant sur scène, mais son rôle dans le son du trio est massif, le bassiste tient la baraque. Ils se font plaisir et le public adhère ! Alors que l’heure de fin est déjà passée, ils lancent un terrible “Sonic Titan” pour finir en beauté. On ne cache pas notre satisfaction de retrouver ces gars aussi dynamiques, efficaces, et toujours aussi doués… Le stoner a retrouvé l’une de ses têtes de file, et avec des prestations de ce niveau, gageons que les gars vont vite retrouver la place qui leur revient. Un set impeccable d’un grand groupe.
Set list : Sun Creature/Full Throttle/Giant/Clearlight/Anything From You/Down The Highway/Aphrodite/Out Of Your Head/Fall Of Icarus/To The Center/Smokin Woman/Sonic Titan
ZEAL & ARDOR
Il y a deux écoles dès lors qu’on se frotte à Zeal & Ardor : ceux qui crient au génie et ceux qui crient à l’escroquerie. On est un peu entre les deux, dans l’équipe (et oui, on a le droit de ne pas prendre position : on compte un suisse dans nos rangs, la neutralité ça nous connaît !). Est-ce que le concert d’aujourd’hui nous aura fait pencher d’un côté de la balance ? Pas vraiment. Le côté “artificiel” du groupe est prépondérant, à tous niveaux. La mise en son déjà : les gars jouent tous avec des écouteurs dans les oreilles pour leurs retours (pas de moniteurs sur scène), dans leur monde, sans entendre le public donc. La scénographie ensuite, avec par exemple cette assez ridicule petite chorégraphie qui leur fait retirer leurs capuches en même temps sur le premier morceau, ces fringues entre tuniques moniacales et costards futuristes, ce light show froid… Ces deux choristes inexistants quand ils n’ont rien à chanter (c’est la plupart du temps) qui gesticulent, comme habités, génèrent plutôt du malaise. Musicalement, le père Gagneux est sur un concept bien à lui, rendons à César ce qui est à César. Sauf qu’on s’est déjà aperçus sur son récent second album, que le concept était déjà rebattu, rendu quasi stérile faute de renouvellement. Pour autant, le groupe suscite assurément passions diverses et intérêt réel (voir l’aréopage de tous bords constitué de profils disparates rassemblé en bord de scène pour observer le phénomène… la hype, on vous dit !), et le public est au rendez-vous. Le groupe n’est pas nuisible et sa musique loin d’être mauvaise. Pour autant, on ne peut s’empêcher de sourire face aux béats qui crient au génie et au renouveau du groove dans le rock… Le concert en aura marqué plus d’un, mais nous a laissé dubitatifs.
Set list : Sacrilegium I/In Ashes/Servants/Come On Down/Blood In The River/Fire Of Motions/Waste/We Can’t Be Found/Gravedigger’s Chant/Row Row/Devil Is Fine/Don’t You Dare/Baphomet
BARONESS
Parfois, le hasard fait bien les choses. John Baizley et Gina Gleason sont assis tous les deux sur le devant de la scène, chacun une guitare acoustique à la main. La nouvelle est tombée dans la journée, le batteur Sebastian Thomson a dû repartir en urgence aux Etats-Unis suite à un impératif familial. Plutôt que d’annuler le concert, Baroness a décidé de jouer 100% acoustique. « Nous avons bossé comme des fous depuis 13h aujourd’hui pour préparer ce concert, nous ne sommes absolument pas prêts et nous sommes très stressés » affirme le leader John Baizley. On veut bien le croire. Mais dès le premier morceau, “March To The Sea”, tous les doutes vont s’envoler. L’interprétation est grandiose, bluffante, déconcertante, d’une justesse incroyable et du niveau des meilleurs groupes de folk actuels. Les acclamations de la foule font trembler la Valley, et Gina jette un regard complice à John, signifiant « waou, ce qu’il se passe est incroyable », avant que tous les deux ne soient émus aux larmes. Les morceaux s’enchainent et l’émotion gagne tout le monde, on a la gorge serrée et on retient nos larmes, quand, à côté de nous, d’autres aux joues mouillées ont eu raison de ne pas faire cet effort. Un pur moment de grâce. Cela faisait un moment que plus grand monde n’attendait grand chose de Baroness. Ce soir, il nous a fait vivre à tous un moment inoubliable et rare. Merci infiniment.
Set list : March To The Sea/Chlorine & Wine/If I Have To Wake Up/ Green Theme/ Eula
KADAVAR
Toujours actifs sur scènes, il serait mensonger de dire que Kadavar nous a manqué ces derniers mois. Pour autant, leur montée en puissance de ces dernières années n’a pas fini de nous estomaquer, et c’est avec toujours autant d’envie qu’on aborde le set de ce soir. Anciennement l’un des premiers groupes de la vague retro-rock (désormais complètement saturée), s’appuyant essentiellement sur le jeu vivifiant et passionné du jeune “Lupus” Lindemann, le trio s’est progressivement solidifié avec le recrutement il y a quelques années du français Simon Bouteloup, mais a surtout vu les deux partenaires de Lupus prendre une place plus importante dans le groupe. Ainsi Tiger à la batterie est devenu petit à petit , non seulement un batteur remarquablement adapté à la musique du trio, mais surtout une bête scénique plus proche d’Animal du Muppets Show que d’un batteur de kermesse. N’ayons pas peur des mots : le gars est devenu l’attraction principale du groupe en live, ses grimaces et son jeu expressif derrière son kit transparent, posé en bord de scène, étant devenus un must. En complément ces denières années c’est Bouteloup à la basse qui a pris une assurance remarquable, gérant sa moitié de scène d’une main de maître, sans jamais négliger son jeu de basse, essentiel pour la base rythmique du groupe, et en particulier pour permettre à Lupus de s’éclater sur ses soli. Et le frontman ne s’en prive pas : ses interventions sont toujours empreintes de feeling et de passion, à travers des soli fiévreux qui décloisonnent des titres qui n’en finissent pas de tourner (ce “Purple Sage”, énorme), devant un public ecstatique. On peut aimer ou pas la musique de Kadavar (nous on aime), en tout cas on se doit de reconnaître la puissance délivrée par le trio en live. Ce set imparable ne fit pas exception. Une leçon, tout simplement.
Set list : Creature of the Demon/Pale Blue Eyes/Skeleton Blues/Doomsday Machine/All Our Thoughts/Into the Wormhole/Die Baby Die/Forgotten Past/Purple Sage/Thousand Miles Away from Home/Come Back Life
AMENRA
Dernier concert sous la Valley pour ce Hellfest 2018. Il est tard, il fait nuit, tout le monde attend de finir le festival en beauté. C’est à Amenra que revient cette épreuve, et on leur fait plutôt confiance pour faire honneur à leur mission. Le logo du groupe projeté au fond de la scène, une minute ou deux se passent dans un silence abyssal, avant que les flamands n’arrivent sur scène accompagnés de légers applaudissements. Dans la même lignée que Neurosis, Amenra n’est pas là pour séduire les spectateurs mais pour livrer un show sincère et à vif. Des images noir et blanc défilent en fond, et les lumières sont pâles. Depuis toujours, l’esthétique tient une grande place dans l’identité du groupe, et les voir en concert est avant tout une claque visuelle. Torse nu et souvent dos au public, Colin H. Van Eeckhout régurgite sur scène les souffrances qu’il semble avoir absorbé de toute l’audience, entièrement captivée par la prestation du groupe. Un final au clair de lune, où l’on plonge dans les ténèbres du genre humain.
Set list : Razoreater/Plus Près de Toi/Thurifer/Diaken/Nowena 9.10/Am Kreuz/Silver Needle / Golden Nail
L’instant tant redouté est donc venu de dire au revoir à la Valley, aux potes, à Clisson, aux décibels saturés, au soleil… La fatigue nous aide heureusement à extraire nos lourds et vieux corps du site, avec les oreilles qui sifflent et des moments de grâce (et de graisse) pleins les yeux et la tête. Encore une fois, Hellfest, tu ne nous auras toujours pas déçu, même si la programmation de cette année nous aura fait froncer les sourcils, tu étais bien là au rendez-vous. On pense donc être là nous aussi l’an prochain. On y pense déjà… Bien à toi.
Par Caïn, Chris & Laurent
(Photos Laurent)
*********** Notre live report vidéo de la journée : **************
Encore une fois un soleil radieux accueille nos premiers pas matinaux à Clisson, sans un nuage à l’horizon. Encore une superbe journée qui s’annonce… La programmation du jour est atypique, mélangeant certains des meilleurs groupes en exercice dans notre genre de prédilection à d’autres artistes plus atypiques, des curiosités propices aux découvertes pour les plus curieux (et aux pauses bouffe/bières pour d’autres). Dans tous les cas, il y a de quoi se faire plaisir, à confirmer…
BLACK RAINBOWS
En terme de valeur sûre, Black Rainbows se pose là. Solide d’une grosse poignées d’albums sans faux pas et d’une expérience live toujours convaincante, leur restait juste à confirmer sur une grande scène. On n’était pas tant inquiet, et les premiers accords du gros “Evil Snake” (très bien) choisi en intro, servi dès le début par un gros son, mettent l’assistance d’accord. La tente, encore peu fournie en cette toujours difficile matinée du 2ème jour, apprécie les gros riffs fuzzés de l’équipe de Gabriele Fiori. Professionnel et malin, le trio transalpin a choisi une set list punchy, servie par une exécution nerveuse et sans bavure. On notera le superbe “Grindstone” aux relents space rock acérés, avant une conclusion par “The Hunter”, l’un de leurs classiques, dont le gros riff aura fait quelques victimes consentantes dans les nuques des premiers rangs. Impeccable set, et impeccable lancement pour une riche journée.
Set list : Evil Snake/Riding Fast Till The End Of Time/The Prophet/High To Hell/Grindstone/The Hunter
MONOLORD
Depuis leur premier album en 2014, Monolord n’a eu de cesse de lustrer son manche jusqu’à réussir à se faire une place de choix dans la scène stoner/doom. Avec 3 albums ayant toujours fait l’unanimité auprès des amateurs du genre, les suédois sont désormais une valeur sûre et comptent bien nous le démontrer aujourd’hui. Le bassiste Mika balance sa basse autour de lui au rythme assommant des compositions majestueusement lourdes, en grande partie grâce à Esben, batteur à la puissance extraordinaire. La voix spectrale du chanteur et guitariste Thomas, bourré de delay et d’écho, semble venir d’un univers parallèle et fait voguer le groupe sur les rives embrumées du Styx. Le son est impeccable, l’exécution est magistrale. “Rust” et son intro à l’orgue parfaitement génial finit de nous plonger dans l’ambiance, et un long “Empress Rising” nous jette le sortilège final. Monolord s’impose définitivement comme une nouvelle valeur sûre.
Set list : Lord Of Suffering/Rust/Empress Rising
JESSICA93
« Salut, on est Jessica93 et on vient du 7-5 ». Tout ce groupe semble être construit sur un énorme troll et une volonté de ne pas se prendre au sérieux. L’attitude nonchalante des deux membres (dont un batteur faisant à moitié de la figuration, puisque toutes les batteries sont samplées : le bonhomme lance le sample en début de morceau puis s’occupe ensuite comme il peut sur ses fûts) suffirait à nous convaincre. Pourtant, la musique du groupe n’a rien de risible. Geoffroy Laporte, le membre à l’origine du groupe, gère tout seul la basse et la guitare de chacun des morceaux à l’aide d’une pédale loop, pour des morceaux à l’ambiance shoegaze et cold wave, rappelant parfois les Cure ou bien Placebo quand le monsieur se met à chanter. Une curiosité loin de la programmation habituelle de la Valley.
Set list : ylum/RIP In Peace/Karmic Debt/Uncertain To Me/Bedbugs/Anticafard 2000
1000MODS
L’affiche trônant au fond de la Valley et annonçant 1000MODS encadré de deux canyons ne laisse pas de place au doute. Le groupe grec formé en 2006 a depuis toujours persévéré dans la voix du desert rock le plus pur jus, hérité des saints patrons de Kyuss. Une grosse présence blues, beaucoup de soleil, du sable, de la sueur, et on est parti pour une bande son taillée pour des miles de route 66. A peine le “Above 179” démarré, c’est une vraie déflagration que nous inflige 1000MODS. Le groupe est déchainé, la Valley est pleine à craquer, on doit avouer qu’on ne l’avait pas vraiment vu venir. “Claws” continue de déchainer les foules, le public est bouillant, battant des mains en rythme jusqu’au fin fond de la tente, enchainant slams, mosh pit, et même des circle pits ! Rare sur ce type de musique… La machine grecque apparaît inarrêtable, si bien que le groupe semble ne pas vouloir mettre un terme à ce set de folie, relançant plusieurs fois le morceau final. Mais toutes les bonnes choses ont une fin, et ce concert n’y a malheureusement pas fait exception. L’une des sensations de cette édition.
Set list : Above179/Claws/Electric Carve/El Rollito/Vidage/Super Van Vacation
Ho99o9
Troisième et dernière formation de la série “les chiffres et les lettres” à Clisson, le duo de hurleurs lockés et leur batteur ont mis un boulet énorme à la Valley dans un registre peu habituel. Il faut dire que la structure n’est pas réputée pour recevoir des formations actives dans la fusion electro-rap-keuponne. Avec un son énorme et une énergie communicative, le trio qui n’a que la batterie en commun avec le reste de l’affiche (ou presque), aura marqué les esprits dans la vallée du Hellfest. Ils peuvent aussi se targuer d’avoir été le groupe à balancer les – infra – basses les plus puissantes du week-end (avec des subs en limite de rupture, les premiers rangs s’en souviennent…) ! Certes éloigné de notre rigoriste ligne rédactionnelle et du champ musical affectionné par les spectateurs de cette scène du festoche, Ho99o9 aura gagné dans la bataille quelques nouveaux fans tant le public était au taquet durant leur set ravageur.
DÄLEK
Deuxième ovni de la mouvance urbaine à se produire à la Valley ce jour-là (et dernier aussi), le trio ne bénéficiera pas du même accueil que ses prédécesseurs éloignés du stoner hantant cette vallée habituellement. Les vétérans n’en sont pas à leur première incursion en terres rock, même si seule une guitare sur scène rappelle ce style, vu qu’ils ont déjà pas mal écumé les salles en compagnie de formations électriques durant leur carrière, notamment avec les regrettés Isis en Europe. Leur hip hop très sombre et parfois dissonant prend un peu de l’altitude avec l’apport de guitares live et, après le reggae distillé par Burning Heads la veille sur une autre scène, nous notons que le Hellfest sait aussi laisser des espaces à d’autres styles que le metal et ses dérivés, en ne perdant pas son public qui apprécie visiblement ces interludes (même si l’affluence présente pour le rap alternatif de Dälek n’est pas celle rencontrée habituellement sous la Valley à cette heure).
ORANGE GOBLIN
23 ans déjà que la bande de Ben Ward distribue des mandales et ne compte pas décrocher de si tôt puisqu’un nouvel album fraîchement sorti vient d’atterrir, The Wolf Bites Back. Pour le défendre, mais aussi pour simplement passer un bon moment, Orange Goblin est venu rouster la Valley comme il sait si bien le faire. Du haut de ses 2 mètres, l’entertainer Ben Ward distille la bonne parole de son gobelin heavy stoner et sait parfaitement comment faire le show : douche de crachat d’eau, provocation de la foule de part et d’autre de la scène, gestuelle 100% rock’n’roll, tout est bon pour exciter le public. La musique n’est évidemment pas en reste puisqu’en plus de ses nouveaux titres, le groupe nous gratifie de ses classiques “The Devil’s Whip”, “Saruman’s Wish” et autres “Scorpionica.” Le taux de slam à la minute explose littéralement tous les records, c’est le signe indéniable que le show des anglais est réussi. Il ne manquera plus que le traditionnel “Red Tide Rising” pour clôturer le tout, pour terminer sur un sans faute.
Set list : Sons Of Salem/The Devil’s Whip/Saruman’s Wish/The Wolf Bites Back/Some You Win, Some you lose/Renegade/The Fog/The Filthy & The Few/Your World Will Hate This/They Come Back/Scorpionica/Quincy The Pigboy/Red Tide Rising
DEAD CROSS
Ça y est : la nouvelle créature fomentée par Patton et Lombardo est sur scène par ici et les épicuriens sont chaud patate pour apprécier cette débauche électrique et rythmique balancée par des techniciens hors pairs. La horde de dégénérés démarre en trombe et va aligner les titres frénétiques durant tout son temps de jeu, en se remettant d’aplomb durant les interventions entre les chansons de son entertainer de frontman. Mike Patton excelle dans cet exercice et il échangera quelques minutes (en italien surtout car le bougre n’entrave pas le français) avec un gamin qu’il a fait monter sur scène (il y a quelques années il avait fait le guignol en revêtant le t-shirt d’un membre de la sécu ici même avec le groupe qui l’a fait connaître). Cet énième projet du leader de Faith No More, très proche de Fantomas, a livré une prestation tueuse pour les cervicales des nombreux amateurs de sensations véloces tassés dans la Valley, pour une autre performance éloignée de notre style de prédilection, mais terriblement efficace. On note au passage que le batteur originel d’un des Big Four demeure impressionnant même après les années, à force de bosser son style ; d’autres devraient en prendre de la graine !
Set list : Seizure and Desist/Idiopathic/Obedience School/Shillelagh/Skin Of A Redneck/Bela Lugosi’s Dead/Divine Filth/Grave Slave/The Future Has Been Cancelled/My Perfect Prisoner/Gag Reflex/Church of the Motherfuckers
NEUROSIS
Neurosis est connu pour n’adresser aucun salut au public durant ses prestations live, comme si celui ci n’existait pas. Pour cause, les membres du groupe sont tellement investis dans leur prestation qu’ils ne voient tout simplement pas les spectateurs. Un live de Neurosis est une expérience qui dépasse celle du simple concert, plus proche d’une performance artistique d’un groupe de personnes venues déballer sur scène leurs douleurs individuelles. A l’image de ces luttes intérieures, leur musique est rugueuse, violente, parfois belle, mais surtout extrêmement sincère. Pour peu que l’on soit réceptif à ce message, assister à un concert de Neurosis frappe en plein cœur. En une heure qui passe à la vitesse de l’éclair, les américains piochent dans une discographie quasi-parfaite qui les a imposé comme maîtres absolus d’un genre dont ils sont les seuls à bord. Une expérience qui se passe de mot mais que n’importe qui doit avoir vécu au moins une fois dans sa vie. Bouleversant.
Set list : Given To The Rising/End Of The Harvest/A Shadow Memory/Burn/Reach/Through Silver In Blood
[A SUIVRE…]
Par Caïn, Chris & Laurent
(Photos Laurent)
*********** Notre live report vidéo de la journée : **************
Rendez-vous désormais incontournable chaque année, le pélerinage clissonais s’impose encore une fois comme une évidence pour l’équipe de Desert-Rock. Comme chaque année, l’affiche de la Valley, notre scène fétiche, alterne sur le papier des grosses surprises, des invités de marque, et un bon lot de découvertes…
Le premier jour en particulier affichait a priori la plus grande quantité de “valeurs sûres” ; restait à valider sur les planches que l’ensemble serait au niveau attendu.
Voici notre live report !
FANGE
Tout premier groupe de la Valley pour cette édition 2018, les rennais de Fange démarrent tôt le matin et viennent nous cracher des mollards dans notre café. Depuis l’intégration de l’ancien chanteur de Calvaiire, Matthias Jungbluth (au passage, le fondateur de Throatruiner Records, un label qui privilégie tout ce qui est sale et torturé), Fange déploie une violence aussi bien scénique que musicale. Le groupe nous assène un sludge ultra sombre qui terrorise, et Matthias semble bien prêt à tout détruire : le regard noir, il fait les cent pas, bouffe le micro, balance des crochets du droit dans le vide. Malgré la durée du set (30 minutes à peine), Matthias prête son micro à un collègue quelques instants, pour un rendu… à peu près similaire à sa propre performance, à savoir pour synthétiser : violent et hargneux. A l’avenant, Alexandre martèle sa batterie si fort qu’il perce sa peau de batterie et doit la changer avant de continuer… Une hostilité que Fange a parfaitement su transmettre au public d’une Valley encore un peu timide. Pas de meilleure façon que de nous souhaiter la bienvenue à Clisson. Charmant.
Set list : Cour Martiale/Ressac/Parmi Les Ruines/Chien de Sang/Agapes
MOS GENERATOR
Mos Generator nous force à opérer notre première (et unique) excursion en dehors de la confortable et ombragée Valley, pour rejoindre d’un pas hésitant et laborieux la (déja) lourde torpeur d’une Main stage baignée par un soleil de plomb. L’occasion d’observer de près le pavage effectué au sol devant les deux scènes… Mais on n’est pas là pour analyser la qualité de pose du revêtement à nos pieds – on est venus pour profiter du set “miracle” de Mos Generator, le groupe ayant été ajouté à l’affiche il y a quelques semaines à peine, dans un jeu de chaises musicales assez traditionnel dans les périodes précédent le festival clissonais, et dont il se retrouve heureux bénéficiaire. Plaisir partagé en ce qui nous concerne ! En arrivant devant la scène, on croise Tony Reed qui est dans le public, à environ quatre minutes de son set… pas stressé le bonhomme ! Et effectivement, il est sur les planches comme un poisson dans l’eau, avec ses acolytes qui ne démériteront jamais. Les titres s’enchaînent sans grosse surprise mais sans déplaisir non plus (les classiques “Lonely One Kenobi”, “Electric Mountain Majesty”…). Malheureusement, le public est apathique pour le moins, à l’image de ce que l’on observe généralement à cette période de la journée sur cette scène un peu trop large et impersonnelle pour des groupes de cette dimension. L’occasion est évidemment très bonne pour Mos Generator de faire entendre sa musique à un grand nombre, mais assister à un set de bonne qualité, en plein cagnard, devant un public qui n’attend que le dernier titre pour, dans ses premiers rangs seulement, sautiller légèrement… ne nous ravit pas complètement. Un très bon set de la bande à Reed, solide et efficace. Mais un contexte qui dessert un peu la prestation du groupe, même s’il n’a pas démérité, loin s’en faut
Set list : Silver Olympus/Lonely One Kenobi/Shadowlands/On The Eve/Catspaw/Electric Mountain Majesty
SONS OF OTIS
Trop rare sur disque (six ans depuis le dernier album !) et sur scène, Sons of Otis a fort à faire pour (re)conquérir un public qu’il a un peu négligé, en particulier sur le vieux continent. Et pourtant la discographie du groupe parle d’elle-même, ayant toujours proposé un doom de qualité, lourd et audacieux, sans jamais se départir d’une certaine orginalité et variété. Quoi qu’il en soit, malgré ses 25 ans de carrière, le trio de Ken Baluke doit remonter les marches petit à petit, raison pour laquelle leur place sur l’affiche du jour est si basse : second groupe de la Valley, ils commencent à jouer avant midi. Bien loins de s’en offusquer, les fils d’Otis montent sur scène et engagent un “Guilt” sur-heavy qui rappelle à une assistance plutôt fournie de quel bois se chauffent nos canadiens : le set du jour sera heavy, doom, lourd et gras. Pas de compromis possible pour un set aussi court (30 pauvres minutes), le trio se rassemble donc sur ses bases stylistiques. En revanche, il injectera presque trois quarts d’inédits (on avait déjà entendu “Blood Moon”), plutôt prometteurs, d’abord sur le fait que le groupe reste “actif” sur le champ de l’écriture, et d’autre part sur la qualité de ce qui se prépare… Surprise en revanche quand ledit “trio” monte sur les planches : Aubin et Sargeant ne sont aux côtés de Baluke ! Indispos sur cette opportunité de tournée, le socle rythmique du combo a laissé sa place à remplaceants, Franz et Jason, qui officient uniquement sur cette tournée (dixit Ken). En tous les cas le set est solide, et l’absence du trio complet ne se fait jamais sentir… mais c’est court, bien trop court pour prendre notre pied. On voit donc le combo quitter les planches après 30 minutes, bien remplies certes, mais insuffisantes pour un groupe de cette stature, avec sept albums solides sous le bras, pour développer un minimum son univers. Revenez-vite !
Set list : Guilt / Blood Moon (inédit) / JJ (inédit) / ? (inédit)
DOPETHRONE
« Hellfest Tabernacle ! ». Aucun autre groupe que Dopethrone ne peut se permettre d’ouvrir un concert comme ça, et c’est aussi pour ça qu’on les aime. Malgré l’enthousiasme des trois québécois, très certainement galvanisé par une Valley plutôt bien remplie, on va vite s’apercevoir que le groupe semble faire face à plusieurs problèmes techniques (nos soupçons seront confirmés en fin de concert) qui vont sérieusement entacher leur prestation. Au départ, la guitare de Vincent n’est que très peu audible, puis ce faible niveau sonore va laisser place à un son de guitare qui ne semble pas être le sien, comme passé à la lessiveuse et sans rien dans le bide. Conséquence, le batteur est perdu et fait plusieurs bourdes. Le résultat est que Vincent passe les deux tiers du concert tourné vers lui pour éviter au maximum les erreurs, en vain… Le récent “Killdozer” et les plus classiques mais non moins excellents “Darkfoil” et “Scum Fuck Blues” ne suffisent pas à nous faire passer un bon moment : on est tendu et on souhaite surtout que le massacre se finisse au plus vite. La participation de Benjamin Moreau de Fange au chant de “Dry Hitter” en conclusion n’y changera rien. Une grosse déception, mais pas à la charge du groupe. On espère vous revoir dans de meilleures conditions les gars !
Étrangement programmé après le train fou canadien, les Rhodaniens bénéficiaient enfin d’une reconnaissance sur un festival de ligue internationale dans l’Hexagone. Et pas dans n’importe lequel puisque c’est Clisson qui les voyait se produire alors que la formation lyonnaise a déjà enchanté plusieurs événements de renommée à l’étranger, et court toujours derrière une reconnaissance nationale voire même régionale. Ce n’est en effet que récemment que les Lyonnais ont pu les voir à nouveau sur scène dans leur ville d’origine (pour fêter l’arrivée du petit dernier « Infidèle(s) ») où leur absence était malheureusement de rigueur depuis belle lurette. Nous soulignons que le quatuor orienté metal avec forts accents black, sludge et hardcore n’a heureusement pas attendu ses compatriotes pour donner des ailes à sa carrière qui les voit conviés à côtoyer les fines fleurs du genre un peu partout à l’étranger. Habituellement cauchemar des photographes en raison de l’excès de fumée et des lights cantonnées à leurs lampes frontales rouge, les Gones ont été démasqués au Hellfest en raison de la capacité de la Valley aérée qui laissait s’échapper les volutes de fumi et nous permettait de découvrir le faciès de ces lascars qui nous ont bien botté le croupion !
BONGZILLA
S’il y a bien un veinard lors d’un concert de Bongzilla, c’est l’ingé lumière : le bienheureux n’a rien d’autre à faire que de passer tout au vert-cannabis et le tour est joué jusqu’à la fin du concert. Il ne manque plus qu’un peu de fumée artificielle à laquelle vient se mêler la fumée magique des spectateurs de la Valley, transformée pour l’occasion en fumoir géant, et les conditions sont réunies pour que débute le concert des américains. Tout au long de ses 25 ans de carrière, la recette des naturopathes de Bongzilla n’a pas vraiment changé : stoner vaporeux, riffs en pagaille et apologie du bienfait des plantes. Sur un set aussi court, le trio développe des versions assez “standard” de ses compos, n’ayant pas le temps de les laisser “déraper” comme il en a l’habitude… Ils sont si disciplinés qu’une fois leur set terminé leur manager vient les avertir qu’il leur reste plus de cinq minutes, durée largement suffisante au groupe pour proposer une nouvelle pépite enfumée. Un concert sans trop de surprise mais parfaitement exécuté, dont on sort engourdi et heureux.
Set list : Gestation/Greenthumb/?/?/HP Keefmaker/Earth Flower
CROWBAR
Entre les trois venues précédentes de Down et la présence de Crowbar en 2010 et 2014 au Hellfest, Kirk Windstein commence à être un habitué des lieux. On suppose donc qu’il est inutile de vous présenter ces patrons du sludge de la Louisiane, d’autant plus à toi Ô lecteur érudit de Desert Rock. Voir Crowbar sur scène est toujours l’assurance de se faire paradoxalement laver les oreilles par une belle boue estampillée NOLA, teintée de la voix si reconnaissable de l’auto proclamé « Riff Lord », à raison. Du riff, Kirk en a écrit une liste longue comme sa barbe grisonnante, il y a même dédié sa vie. Accompagné d’un énième nouveau bassiste (Todd Strange, le bassiste d’origine, avait réintégré le groupe en 2016, mais c’est ce soir le jeune Shane Wesley qui le remplace, du fait d’obligations familiales de Strange), la formation au line-up aussi mouvementé qu’un voyage sur le vol MH370 nous démontre une nouvelle fois que Crowbar a écrit de sacrés morceaux à l’efficacité inégalée : “All I Had”, “Walk With Knowledge Wisely”, “To Build A Mountain” et évidemment, l’incontournable “Planets Collide”, climax du concert qui mettra tout le monde d’accord. On regrettera simplement l’absence de “The Lasting Dose”, un classique du groupe absent de la setlist de ce soir.
Crowbar, None Heavier since 1989.
Setlist : Conquering/And Suffer As One/All I Had (I Gave)/To Build A Mountain/Cemetery Angels/Walk With Knowledge Wisely/To Carry The Load/I Am The Storm/Planets Collide/Broken Glass
CHURCH OF MISERY
On aura décidément bien profité des incursions européennes de Church of Misery cette année, et on arrive donc devant la scène ce vendredi après-midi en sachant avec quasi-certitude que le concert des japonais devrait faire des dégâts. Coupons court aux tergiversations : ce fut le cas. Le trio rassemblé autour de Tatsu Mikami est redoutable d’efficacité : Takano est un frontman impeccable (dynamique, souriant et au chant parfaitement adapté aux morceaux de ses prédécesseurs dans les différents line-up du groupe), et la paire Muraki / Yamamura fait plus que le job, en mode appliqué et efficace. Rien de neuf sur ce bord, on avait déjà constaté la qualité de ce line-up des doomeux nippons. En y associant une set list de classiques (seul “Murderfreak Blues” est issu du récent dernier album, pourtant excellent), le quatuor joue la sécurité, et il a raison. Quel pied que ce set ! La triplé gagnant en intro (“El Padrino”, “I, Motherfucker”, “Born to Raise Hell” enchaînés d’affilée) donne un peu l’impression que le groupe abat ses plus balles cartes d’entrée de jeu… mais le combo fait la preuve ensuite qu’il peut se reposer sur un catalogue solide, puissant, et qui parvient à conquérir une Valley bien pleine, qui finit par manger dans la main des japonais. Seule frustration : le groupe termine son set quasiment 10 minutes avant l’horaire de fin ! Il y avait le potentiel de rajouter 1 ou 2 morceaux bien sentis… Néanmoins, se retrouvant à jouer une paire d’heures plus tard que le créneau initialement prévu (échange de créneau avec Crowbar), ils font la démonstration qu’ils savent tirer leur épingle du jeu dans tous les contextes. Encore une claque dûment administrée. Merci.
Set list : El Padrino/I, Motherfucker/Born To Raise Hell/Brother Bishop/Killafornia/Shotgun Boogie/Murderfreak Blues
EYEHATEGOD
Un petit mois à peine après leur prestation berlinoise, les Ricains allaient à nouveau faire le bonheur de vos dépêchés sur place. Les quatre garçons des brumes du bayou ayant la veille foutu le dawa pour les Parigots lors d’une défaite de la musique qui fera date, c’est un peu fatigués que nous avons croisé les originaires de Nola. Mike IX Williams ayant survécu aux ouragans, à la prison, à ses excès et aux conséquences de ceux-ci, nous apparut aussi propret qu’à Berlin, mais nettement moins cireux et un poil plus ravagé. Rompu à ce type d’exercice, le quatuor a donné un air de Warzone à la Valley du premier larsen distordu de “Lack of almost everything” en intro, jusqu’au bout de sa prestation. « New Orleans Is The New Vietnam » demeurant le point d’orgue de la prestation de ces chantres déglingués de la came (qui tournent désormais plutôt au soda). La formule à quatre, plus économique, fonctionne à merveille avec le bedonnant Jimmy Bower remplissant tous les interstices disponibles avec ses riffs saturés. Le retour au Hellfest des dégénérés de Louisiane après quelques années est triomphal et leur placement dans le programme n’est que justice pour une formation qui a inspiré plusieurs des groupes l’ayant précédé en ces lieux ce jour-là. Il ne manquait que le public des autres scènes (sans doute assommé par le soleil ou l’excès de Muscadet) pour que la fête soit totale car les groupes affichés ailleurs à la même heure n’arrivaient pas à la hauteur des semelles du placide gratteux d’EGH qui en avait ce jour-là.
CORROSION OF CONFORMITY
Avec le retour de Pepper Keenan à la barre, et avec un nouvel album du line-up “classique” sous le bras (un album de qualité, qui n’aura pourtant pas eu le retentissement que l’on pensait), C.O.C. se retrouve bombardé tête d’affiche de la première journée de cette Valley. D’aucuns auront été surpris de ce statut, d’autant plus que l’affiche de la journée était pour le moins costaude en valeurs sûres. Charge donc au groupe de convaincre les esprits chagrins et d’assoir son statut à la force du manche et des baguettes. Bénéficiant d’un light show étudié (pas mal de contre-jour, de la fumée…) le groupe débarque sur une valeur sûre, “Bottom feeder”, première illustration d’une set list qui, si elle ne brille pas par son originalité renversante, est vouée à satisfaire un public qui est venu là pour un set de “C.O.C. avec Pepper”. En conséquence, la parenthèse des deux récents albums en trio Dean/Weatherman/Mullins est complètement passée sous silence, de même évidemment que les deux premiers albums, avant que Pepper ne rejoigne les rangs du groupe de Caroline du Nord. Mais on ne va pas s’en plaindre, tant la discographie du combo dans cette configuration est cohérente, et riche en classiques. Ils vont quand même rappeler qu’ils ont un nouvel album à défendre, avec deux extraits bien choisis “The Luddite” et “Wolf Named Crow”, bien incorporés dans la set list. Scéniquement, peu de surprises, ou en tout cas aucune mauvaise : Pepper, en confiance, fait le job et plus encore aux manettes du navire : vocaux impeccables, communication avec le public, interactions avec ses collègues… Le barbu est en grande forme. Sur les côtés, rien d’atypique pour qui connaît le groupe, Woody et son jeu de scène aussi jovial qu’improbable s’amuse et fait bien le job (on remarquera néanmoins qu’en configuration à 2 guitares le bougre aura pas mal de plages “inactives” où il va se réfugier en fond de scène), et Mike Dean, plus sérieux, est complètement immergé dans son set et prouve encore une fois si besoin était quel excellent bassiste il est. Derrière les fûts, les problèmes de “santé” de Reed Mullin l’ayant tenu éloigné des dernières activités du groupe, c’est à leur drum tech Jon Green qu’ils ont confié la batterie, et le bougre n’en met pas une à côté ! (à la place de Mullin on se mettrait un coup de pied aux fesses fissa pour retrouver le tabouret derrière le kit, parce que c’est pas gagné pour lui…)
Le set déroule, bien mené, avec un “Vote With a Bullet” qui ravira les 4 lascars de Eyehategod (qui ont passé le set entier assis cote à cote sur l’estrade en fond de scène), mais surtout avec un final brillant : “Albatross” puis évidemment “Clean My Wounds” (larvé d’impros groovy en diable) viendront cloturer le set et la journée de la meilleure des manières. Pas de doute, C.O.C. est en forme, et fut de taille à finir la soirée avec prestance et talent.
On repart les corps lours mais le coeur léger et le sourire aux lèvres, avec l’espoir de grapiller quelques heures de sommeil car la journée du samedi s’annonce elle aussi costaude…
Set list : Bottom Feeder/The Luddite/Broken Man/7 days/Paranoid Opioid/Vote With a Bullet/Wiseblood/Wolf Named Crow/Albatross/Clean My Wounds
[A SUIVRE…]
Par Caïn, Chris & Laurent
(Photos Laurent)
*********** Notre live report vidéo de la journée : **************
Chez Desert-Rock nous n’avons pas assez souvent l’occasion de profiter du climat nantais et pour une fois l’opportunité était là, j’ai donc fait mon baluchon pour aller rendre visite à l’emblématique Scène Michelet. Ce haut lieu du Métal accueillait ce samedi Jurassic Leaf, Major Kong et Weedpecker sous la férule des Stoned Orgies, brillante organisation qui attire à elle les talents tel un vieux en imper à la sortie d’une école les petits enfants. La Scène Michelet quant à elle c’est déjà un bar qui sert profusion de curiosités houblonnées et ensuite une cour terrasse sur l’arrière où se précipite à chaque concert toute la fine fleur des amateurs de Stoner. J’y étais donc pour ainsi dire en famille.
Jurassic Leaf
Le clairon est sonné par les premières notes de Jurassic Leaf et dès lors tout le monde se précipite à l’étage, ancienne salle de danse reconvertie en salle de concert exiguë mais chaleureuse. Ce groupe venu tout droit de Lille pour porter les couleurs du Festival Rock In Bourlon délivre son Doom conventionnel qui petit à petit séduit l’assistance. Les nuques se raidissent gentiment sous le feu de ce trio instrumental. J’admets volontiers que si certaines coupes un peu franches dans les thèmes me déstabilisent, l’ensemble est loin d’être désagréable. Une preuve qu’il n’est pas nécessaire de réinventer un genre pour en maîtriser les codes et donner du plaisir à son auditoire. Le son est massif, le jeu scénique posé en général mais le bassiste et le guitariste sortent parfois de leurs gonds avec des postures plus énervées et un son fuzzé de gratte pas piqué des vers qui ambiance immédiatement. Déjà le set se clôture et les gars nous offrent le meilleur d’eux même et la preuve qu’ils savent gérer un concert.
Major Kong
Si Michelet, revendique un certain nombres de palmes sur son fronton, la plus surprenante reste celle du meilleur Sauna et ce n’est pas Major Kong qui fera mentir cette revendication! Ce groupe de Doom venu de Pologne je l’attendais depuis un petit bout de temps et force est de reconnaître que je n’ai pas été déçu. Si ce trio instrumental se présente avec l’humilité de celui qui ne connaît pas encore le succès, il y a fort à parier qu’un certain nombre le gardera en mémoire après cette soirée. Leur Métal pêchu, tout dans la lourdeur et la vitesse sait se poser et enlever des séries de notes aériennes comme sur “Transdimensional Holiday”, morceau qui n’est pas sans rappeler le travail de Karma To Burn. Tout le set sonne juste, énorme et puissant, une placidité dans le jeu qui n’est qu’une façade pachydermique avec un mention spéciale pour l’agilité du bassiste qui tricote à merveille du manche ( Sic “Quantum Elephantum”). Peu importe que la lumière rouge orangée de La Scène Michelet appauvrisse l’ensemble visuel et donne du fil à retordre aux photographes, c’est avec talent que Major Kong marque la salle et donne le sourire aux plus exigeants. Ma seule frustration aura été que la setlist ne comporte pas “Supercluster”.
Weedpecker
Après une longue, très longue attente au bar, il est déjà l’heure de remonter dans le sauna et la moiteur tropicale du lieu vibre des notes psychédéliques de Weedpecker, compagnons polonais du groupe précédent, il marquent tout de suite les esprits par un look coloré de hippie orientalisants. Si la version studio démontre une grande maîtrise instrumentale, le live n’a rien à lui envier. L’influence de leurs ainés de Elder est nette et laisse planer la foule qui remplit petit à petit la salle. C’est un voyage 70’s poussé à fond sur les enceintes. Côté chant Weedpecker fait les frais d’un chant à quatre où un léger manque de maîtrise ajouté à un probable retour trop puissant me font un peu décrocher avec un sentiment de désaccord.. Cependant l’ensemble est riche, musicalement maitrisé et le public se gave de notes planantes, le set passe à toute vitesse et il serait ingrat de dire que ce n’était pas plaisant. Le quartet offre sans retenue son troisième album à l’épreuve du live et de l’avis de ceux présents c’est un succès.
La soirée est une réussite au vu du monde encore présent au bar quelques quarante minutes après la fin des derniers accord et personne ne sort vraiment sec de l’endroit.
Un grand merci à Gaël Hervé Photo pour les clichés qui illustrent ce texte.
Dans le cadre de la tournée printanière de Kaleidobolt, qui semble ne jamais s’arrêter un instant d’écumer les scènes européennes, on se retrouve ce soir derrière les cuisines de l’Espace B pour une soirée promettant son lot de frénésie. Afin d’accompagner les Finlandais survoltés, les Fuzzoraptors nous dégotent cette fois un quintet de Creil nommé Tremor Ama et les Bruxellois d’aSupernaut. Et l’ascension fiévreuse dans laquelle ces trois groupes nous emportent ne laisse personne indemne.
Tremor Ama
Devant une foule croissante, les cinq gaillards de Tremor Ama s’approprient la scène. Et si l’on assiste à de multiples intros au psyché indéniable, les mélodies aériennes dérivent souvent vers de lourds et puissants riffs avec pour objectif de tout déménager. Sur « Another Day », on comprend que ce Heavy Stoner détient plusieurs facettes. À l’image de Max, le batteur ; un charmant jeune homme au Tee-Shirt Gojira qui tantôt effleure sa ride avec toute la prévenance d’une mère pour son enfant tantôt martyrise sa cymbale chinoise comme s’il s’agissait d’un fer à battre. En dépit de ses quatre potes qui l’occultent de notre champ de vision, on ne peut guère l’ignorer. Cette énergie, qui semble constituer l’essence du groupe, se retrouve vite partagée avec Raph et Remitche. Ces deux-là gesticulent comme des possédés tout en balançant de vigoureux lyrics. De leur côté de la scène, Sy et Kévin paraissent plus en retrait et davantage dans l’introspectif, renforçant par la même la dualité de la musique. Une ambivalence présente tout le long de ce merveilleux set et qui, comme le prouve « Sylbaris » ne fait que renforcer la qualité du spectacle.
aSupernaut
Un couple de Ricard plus loin, on y retourne. Et c’est donc devant un public à température que le trio made in Bruxelles débarque. Hélas, et comme cela arrive parfois, aSupernaut essuie un petit problème technique. Une tête d’ampli capricieuse à priori, qui vaudra à Nico de jouer sans pédalier avant de finalement jeter sa basse au sol par frustration. Il va sans dire que devoir interpréter leur musique sans bénéficier des nombreux effets fuzzés et saturés a de quoi désappointer. C’est un peu comme bouffer un couscous sans les légumes, la sauce, ni même la viande en fait… Qu’à cela ne tienne ! On prend une pause à l’extérieur histoire de permettre aux ingés son de régler le problème et à peine un verre plus loin on entend de nouveau grogner la basse. Les Bruxellois déroulent alors leur set de heavy garage psyché qui ne tarde pas à agiter les têtes. Sur des lignes de basse crado à souhait et du martèlement de caisse claire, Thomas balance ses riffs avec une passion lui donnant des airs de malade en pleine crise de tétanie. Il accompagne le tout d’un chant bien saturé lui aussi, donnant au tout une impression d’une musique hybride du Stoner actuel et du punk new wave de la fin des années 80. Autant vous dire que l’espace B gagne encore quelques degrés à la fin du bazar.
Kaleidobolt
Pour cette dernière partie, le trio d’Helsinki porté sur un rock psychédélique survitaminé se met en position. Loin de se formaliser d’une foule qu’on aurait souhaité plus importante pour une tête d’affiche, ils attaquent. Incisifs et sans appel, comme à chaque fois. Les frénétiques lignes de basses de Marco fusent comme les balles sorties d’un canon, invitant les rythmiques toujours plus véloces de Valteri à y trouver leur place. Cet homme aux couleurs d’Eyehategod qui déroulent des triolets assassins dès qu’il s’agit de breaker, ou bien à chaque fois que ça lui chante, ne connaît pas de demi-mesure. Son solo de milieu de parcours nous fera comme toujours autant transpirer que lui. Sur ce terreau plus que fertile à toute démonstration technique, le maître du riff Sampo Kurki compose ses interminables soli et communique ainsi une agréable sensation de jam permanent. « Off the cuff », « The Crux », « Rocket to the Moon », autant de titres propices à y déployer un arsenal de virtuosité. Mais la richesse des gammes de son guitariste ou la nervosité de son batteur ne constituent guère les seuls éléments notables dans la technique du groupe. Car si l’on parle technicité, on aurait tort d’omettre sa propension à prendre les headbangers à revers. Tous ces délicieux contretemps, que ça soit en flinguant la sempiternelle métrique 4/4 ou bien simplement en claquant des pêches à l’endroit voulu, participent à donner sa patine si caractéristique au groove de Kaleidobolt. Et puisque l’on parle des empreintes du groupe, mentionnons l’incontournable « City of the Sun », leur pièce maîtresse, jamais deux fois la même en live, et qui sait rassembler les foules sous une seule et même bannière. Celle d’une impétuosité joyeuse et débridée.
Kaleidobolt
Ce dernier set de qualité se ponctue après minuit. Et malgré le faible nombre de spectateurs restant en ce jeudi soir, on gardera un goût de félicité en plus de quelques acouphènes. La saison des Fuzzoraptors s’achève une fois encore sur un succès et nous laisse avec une seule et simple interrogation. Quoi de prévu pour la rentrée ?
La dernière date de la saison organisée par les Make It Sabbathy (rien moins que la 48ème, voilà une belle machine qui roule…) et pas la moins intéressante : le Void accueille ce soir le plateau lourd du moment, avec Stonebirds et Witchfinder, qui partagent une tournée qui aura sillonné à travers toutes les contrées de l’hexagone.
On commence par Witchfinder, trio doom auvergnat qui entame les hostilités. Bon, il ne faut pas longtemps pour comprendre que les gars ont bien assimilé la recette : de très larges rasades de Electric Wizard (très…), et quelques pincées de tout ce qui se fait de pertinent dans le doom “contemporain” (on pense à Monolord, Toner Low, Conan – le bassiste avec un hoodie Conan ET la capuche sur la tête… coïncidence ?). Mais leur jeter la pierre pour le motif qu’ils manquent d’originalité serait fondamentalement injuste (on ne met pas au pilori Cough, Conan ou Monolord alors qu’ils sont coupables du même méfait, ou presque). Du coup le groupe déroule son set de presque une heure au rythme d’un pachyderme lymphatique, un set dont émergent ici ou là quelques riffs très efficaces, qui tournent nonchalamment souvent pendant plusieurs minutes. Seul problème : le son. La basse vrombit de manière exagérée et bouffe tout sur son passage. C’est gras, certes, c’est massif, c’est très fort… mais ça dessert le groupe. Personne n’y gagne, l’effet est raté, ça en est même parfois embarrassant. Mais le public, bienveillant et satisfait, passe outre et prend son pied.
Place aux Stonebirds maintenant. Les bretons s’appuieront essentiellement sur leur dernier album, l’excellent “Time”, pour composer leur set. Premier constat qui rassure : le son, sans être cristallin, est bien meilleur, et permet d’entendre tous les instruments (les vocaux un peu faibles néanmoins). On peut donc s’imprégner et s’immerger dans leurs titres à loisir, ce que le public fait immédiatement sans se faire prier. Fañch assure comme un chef pour reproduire en live très fidèlement les titres de l’album, aux sonorités pourtant très élaborées, en mode plutôt “concentré” devant son (impressionnant) rack de pédales. Sylvain à la basse est plus mobile, participant même au chant occasionnellement. Et le voir jouer sur sa 6-cordes fretless est toujours aussi impressionnant. Avec Antoine à la batterie, ils apportent une base rythmique et mélodique solide.
Côté set list, c’est la quasi-entièreté de “Time” qui passe à la moulinette, et le groupe se permet même d’y ajouter une nouvelle compo inédite : le nouveau titre s’intègre bien au set, et n’annonce pas de revirement radical du groupe dans un court avenir. Tout en contrastes d’ambiances, le titre donne envie d’être entendu à nouveau, c’est bon signe. Mais les titres de l’acabit de “Sacrifice”, “Shutter part 2″ et surtout” Animals” maintiennent le public en tension sur la grosse heure de set. Un public qui gueule si fort à la fin du set que le groupe est obligé de revenir sur scène pour un rappel sur “Angst Lover” de leur précédent album. Tout le monde repart avec le sourire. Quelle bonne soirée…