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Le Up In Smoke immobile c’est un peu le coup d’envoi de la saison des concerts pour les stonerheads européens ; ce festival étant d’une part le premier des week-ends d’octobre consacrés à la musique que nous chérissons sur ce site, et d’autre part le passage obligé des nombreuses tournées organisées dans le sillage des festoches précités qui nous permettent de nous taper, à la maison ou presque, des plateaux d’excellente facture (que l’on aimerait bien croiser tout au long de l’année sous nos latitudes). L’événement bâlois se déploie comme depuis sa deuxième édition sur 2 jours (alors que le Keep It Low et le Desertfest d’Anvers durent 3 jours) et permet aux publics suisses, allemands du sud et français de l’east side de se taper une kyrielle d’excellentes formations dans un lieu idéalement placé géographiquement parlant.
Nous pouvons faire confiance au bon goût de nos amis de Sound Of Liberation ainsi qu’à l’exemplaire sens de l’organisation des suisses gérant le Z7 pour être soignés durant toute la durée de ce grand raout, avec même l’option fort appréciée par certains festivaliers de pouvoir dormir dans la salle de concert à moindre frais une fois les amplis éteints. Si la gastronomie du terroir n’est pas le point fort de ce rassemblement, tout le reste en fait un incontournable de l’été indien pour tout fan de stoner qui se respecte la moindre.
C’est le sourire aux lèvres et la bave dégoulinant sur nos mentons que nous avons convergé à trois pour vous rapporter fidèlement (ou presque) notre expérience bâloise.
JACK SLAMER
Première formation à se produire lors de ces festivités du riff, Jack Slamer fait tout de suite bonne impression aux hippies de l’assistance. Enfants du pays, à la grosse louche puisqu’ils viennent de Winterthur à une centaine de bornes, le groupe a déjà effectué un beau parcours et ils ne détonnent pas du tout en ouverture de rideau. Ils dispensent un rock hyper vintage qui puise son inspiration dans les seventies. Échangeant quelque peu en allemand (comprendre en suisse-allemand) avec le public déjà assez nombreux en cette fin d’après-midi, ils maintiennent devant la petite scène les festivaliers qui entrent au compte-gouttes dans l’enceinte en raison d’une nouvelle configuration de l’entrée peu compréhensible aux non-germanophones. Le frontman à dreads focalise l’attention et les compos fort abouties font de cette première passe d’armes une excellente mise en bouche, même si la pluie a tenté de gâcher la fête (sans succès vu la nouvelle organisation de la petite scène plus haute, plus large et couverte sur une longueur plus importante). Bref on s’en bat les couilles des conditions climatiques et on tape du pied en mesure pendant que le tambourin vient souligner le côté vieille école de ce premier set.
USNEA
On change radicalement d’ambiance en se glissant (qui a eu la lumineuse idée de fermer un des battants de la halle pour optimiser les frottis frottas entre bipèdes lors des déplacements d’une scène à l’autre ?) dans le hangar où se situe comme à l’accoutumé la grande scène qui accueille les pointures les plus en vue du grand public. Peu loquaces et lovés de rouge, la formation doom de Portland (encore ?) nous assomme avec une prestation qui pulse terriblement. Les Ricains qui viennent à peine de sortir leur nouvelle salve de missiles Portals Into Futility ne s’embarrassent pas de décorums sophistiqués ; ils alignent les bûches en grognant sous leurs capuches avec des lights minimalistes. Leur performance procure aux Lourds de l’assistance des sensations fort agréables si l’on considère les sourires qui illuminent les faciès des bourrins amateurs de sensation doom. Les compositions alambiquées du quatuor résidents de Relapse (une boîte à qui on n’a jamais pu opposer grand-chose en ce qui concerne la qualité de ses sorties) qui passent par des plans ambients et hyper lents presque aériens avant de s’enfoncer dans le déluge sonore, ont participé à la montée en puissance de cette journée et ont même ramené le beau temps à l’extérieur. Bref on s’est pris une belle branlée alors que les moins prévenants rongeaient encore leurs freins sur les autoroutes suisses peu fluides en ce début de week-end : tant pis pour eux ; ils ne peuvent avoir que des regrets d’avoir loupé cette prestation déroulée avec maestria.
KALEIDOBOLT
Un tantinet groggys après le passage du rouleau-compresseur étasunien, nous regagnons la petite scène pour assister à la prestation du trio finlandais qui nous avait déjà fait forte impression sur scène par le passé. Hyper en place et en pleine campagne européenne, ces vikings se secouent la tignasse pour un set hard rock qui fleure bon les années quatre-vingt ! Que l’on soit fan ou pas de ce genre quelque peu daté, il faut concéder au groupe d’Helsinki qu’il touche sacrément sa bille et qu’à part si l’on a les conduits auditifs carrément obstrués par de la fiente de pigeon, il est difficile de réfréner des mouvements de nuques tant leur énergique prestation du jour, soignée aux petit oignons, est communicative. Compliqué pour eux de passer à côté des gros gimmicks du genre : soli de guitare et solo de batterie, mais c’est pour la bonne cause (celle de faire remuer nos flasques popotins) et ça plait visiblement aux spectateurs. Plutôt pugnace, leur set gagne en puissance au fur et à mesure qu’il se déroule. Un titre encore inédit sur disque vient se placer en avant dernière position et c’est devant un public acquis à sa cause que les Finlandais mettent un terme à une prestation qui aura mis tout le monde d’accord que l’on soit amateur de grosse sensation d’obédience bourrine ou nostalgiques des années soixante-dix (ou septante c’est comme vous la sentez !). Mission accomplie avec brio pour Kaleidobolt dont on attend avec impatience la prochaine plaque.
TROUBLED HORSE
Nous voilà donc bien échauffés, les muscles tout tendus et le cardio palpitant pour écouter, accoudés aux crashs de la scène principale, la prestation de Troubled Horse, combo suédois signé chez Rise Above Records et pas les derniers venus sur la scène stoner. La presta est aboutie, les riffs incisifs, l’échange entre zicos se fait naturellement, on oscille entre la créativité rock’n’roll d’un Greenleaf et le son d’un Graveyard (les couilles et la sueur en plus). Le chanteur Martin Heppich fait le taf, communique, le groupe se fait plaisir, bref, un vrai moment cool de rock 70s qu’on goûtera jusqu’à la dernière note.
RADIO MOSCOW
On devra, de fait, se frayer un chemin jusqu’à la petite scène dehors pour assister à la presta de la radio du Kremlin. La salle serait bien avisée l’année prochaine de profiter du double battant de la porte pour fluidifier les allers et venues du public, d’ailleurs. 1300 personnes dans un lieu aussi exigu et une demie-porte ouverte, c’est assez incompréhensible. Mais passons. Le trio est en place et commence à balancer sa sauce parfaitement connue maintenant. Et bigre, ça fonctionne toujours aussi bien. Du rock, de la dentelle de manche, de la note bendée à tire larigot, ça crunche et ça s’éraille les cordes vocales. On est dans le cuir et la frange et malgré une corde cassée dès le début du set et des p’tits soucis récurrents sur la Fender, le trio ne s’en laisse pas compter et le public le lui rend bien. Coup double pour l’esprit 70’s avec le set précédent donc. On arrivera même à s’abreuver de quelques effets psychédéliques peu présents cette année sur la programmation. Rassasiés, bien contents, on frôle le long stand de Wurtz, et on attend de passer la demie-porte pour assister au set suivant. Celui, bien attendu évidemment par une foule déjà bien présente de mister cool lui-même.
BRANT BJORK
… et vu l’affluence, on assistera au concert derrière la régie de face. En formation rodée et connue, le Bjork va faire du Brant et rassasier la masse acquise à sa cause. Rien d’original bien sûr mais on attend pas ça de lui. Du dernier album à Jalamanta, tout y passe. Une impression pourtant de joyeux bordel nous étreint. Même si la musique du monsieur se prête à la nonchalance, le set de ce soir revêt un aspect foutraque auquel on n’est pas habitué. L’apport peut-être de Sean Wheeler, un vieux machin du désert un poil en décalage avec la zic du combo. Reste que le concert est plaisant mais pas autant que les fois précédentes. La foule, elle, semble conquise et c’est le plus important.
UFOMAMMUT
Après ce set du grand frisé du désert, une autre figure emblématique du genre se prépare à se lancer dans la bataille : le trio transalpin Ufomammut se prépare tandis que le public termine sa translation vers la seconde scène. Sans projection vidéo, le set se basera sur la musique du groupe uniquement, et c’est finalement tout ce qui compte. On a digéré pas mal de contrastes musicaux assez violents aujourd’hui en passant d’un groupe à l’autre, grâce à une affiche riche et variée ; mais le contraste entre le chantre du desert rock US et les doomeux européens va s’avérer dur à encaisser pour les cortex les plus fragiles. Car Ufomammut, encore une fois, n’est pas venu pour faire dans la dentelle. Ça commence très fort et la tension reste au point fort sur tout leur set. Baignant dans un light show rougeâtre plutôt apathique (mais rien d’inédit ici chez Ufomammut) les trois musiciens s’engagent sur un set qui défrisera une part de l’assistance par son audace : voilà que nos bonhommes commencent leur prestation en se lançant dans l’interprétation par le menu de leur dernière galette, sortie il y a quelques jours à peine ! Audacieux ! Sacrée confiance en soi et en la qualité de ce (remarquable, il est vrai) disque. En conséquence, le public est un peu pris à froid au début, mais les nuques se réchauffent très très vite, et dès le premier quart du set, le headbanging-yeux fermés-sourcils froncés-mâchoire serrée devient le sport le plus pratiqué entre le premier rang et la table de mixage. Et l’art d’Ufomammut prend toute son ampleur dans cette nouvelle performance, envoûtant un public rapidement consentant à l’aide de ses riffs-pachydermes poussés ad libitum tendance hypnose lancinante, enchaînés par des breaks en forme de virages bienveillants pour amener les spectateurs jusqu’à la fin d’un set encore une fois impeccable. Classieux, en contrôle, efficace, Ufomammut tient une forme depuis plusieurs mois qui impressionne.
GRAVEYARD
Les voici donc enfin devant nous. Les inventeurs du fast-split. Les bougres avaient sacrément à se faire pardonner l’année précédente et les annulations des différents festivals suite à leur split (qui aura duré, rappelons-le, 3 ou 4 mois, LOL donc). Mais c’est Graveyard que nous avons devant nous quoi ! Leurs albums étant de vraies perles, nous n’allions pas bouder notre plaisir de les voir, enfin, les chantres d’un rock racé, à l’écriture d’orfèvre et à l’exécution au cordeau. Alors ? Quid de la prestation de la tête d’affiche de ce premier jour ?
Et bien pas grand chose à vrai dire. Si le concert tient, c’est par la valeur intrinsèque des compositions et non par leur exécution du soir. Il n’y a aucun intérêt à écouter un album moins bien mixé non ? C’est un peu l’impression qui nous assaille. Pas de véritable flamme, une communication a minima, rien qui déborde, pas de prise de risque, ni de véritable envie. Le froid nordique ? Peut-être. Reste un arrière goût d’inachevé quant à ce live. De beaux moments mais rien de vraiment bien bandant.
La journée aura néanmoins été riche, et il est temps de prendre un peu de repos en prévision de celle de demain, bien plus chargée encore !
Cela faisait un petit moment que les Stoned Gatherings n’avaient pas organisé de réjouissances sur Paris. Résultat : le peuple commençait à gronder aux portes du Glazart, prêt à tuer pour se mettre quelque chose sous l’oreille après ces quelques mois de disette. Sous la pression, les SG ont décidé de nous offrir une soirée qui devait rassasier tout le monde pour un petit moment, avec Satan’s Satyrs, Conan, Monolord et Windhand.
Suite à des problèmes logistiques chez Satan’s Satyrs, le line up de la soirée est légèrement modifié et c’est aux anglais de Conan d’ouvrir la soirée. Conan n’est plus vraiment à présenter, tant la hype qui gravite autour du groupe depuis un moment est devenue importante (agaçante?), c’est donc sans étonnement que la salle est déjà bien remplie. Accordons leur cela, voir Conan en live est toujours la garantie de recevoir une baffe auditive : c’est gras comme un sandwich beurre-saindoux et lourd comme un sketch de Bigard. Et au Glazart, ça donne un gros bourdonnement informe qui fait vibrer le slip, rien d’autre. Une fois décernée la palme de groupe le plus massif du moment, il ne reste malheureusement plus grand chose. « Crown Of Talons » ouvre le concert, ça fait toujours plaisir à entendre, mais tout ça devient vite ennuyeux et linéaire… En somme, c’est un concert à l’image de la discographie du groupe, qui peut se résumer à un copier-coller de Monnos, leur premier album. Conan s’épuise et ça fait peine à voir. Parfois, soigner ses artworks ne suffit pas.
Conan
Il est 20h40 et les suédois de Monolord présents sur scène et s’affairant aux derniers réglages techniques commencent à faire mourir d’impatience la foule amassée au pied de la scène, la chaleur n’arrangeant rien. Enfin, les premières notes de « Where Death Meets The Sea » de leur dernier album Rust résonnent et les têtes commencent à remuer. Oui, parce qu’impossible de faire autrement face à ces riffs ultra entêtants bourrés à la fuzz et à cette voix hypnotisante (que l’on peine un peu à entendre). Monolord est en effet assez doué dans l’art de la formule obsédante, et le morceau suivant « We Will Burn », vient à nouveau nous le démontrer. Après un Conan au jeu scénique proche du néant, l’énergie que dégage les trois suédois fait du bien et réveille la salle.
Monolord
Lorsque les membres de Satan’s Satyrs investissent la scène et démarrent leur set, on pourrait croire à une mauvaise blague. Entre les deux guitaristes moustachus et torse nu, le chanteur bassiste est habillé d’un débardeur panthère et nous rappelle plus Twisted Sister que Black Sabbath. Pourquoi pas, mais sur une affiche comme celle là, on ne s’attendait pas forcément à ça. Pourtant, on s’aperçoit rapidement qu’on est très loin de la légèreté glam : c’est couillu, riffesque à mort, et le public (largement moins présent qu’aux deux précédents groupes, il faut l’admettre) se prête au jeu et finit par prendre son pied. On pense à du hard, du heavy, un peu de punk, et aussi à Jagger periode Exile on Main St. Des problèmes de volume subsistent au niveau de la voix du chanteur, trop en retrait. Finalement, on ne l’avait pas vu venir mais Satan’s Satyrs a livré le concert le plus fun de la soirée.
Satan’s Satyrs
Après avoir allumé quelques bâtonnets d’encens, Windhand démarre son set avec « Orchard », extrait de l’excellent Soma. Un très bon morceau qui illustre parfaitement ce qu’est Windhand : une chanteuse à la voix envoutante arrosée d’une bonne dose d’écho, des riffs simples, lents et pesants auxquels viennent s’ajouter quelques petits soli lugubres déformés par une wahwah.
Windhand ne casse pas les nuques mais fait plutôt rentrer en transe, les yeux fermés et le corps engourdi et remuant lentement au rythme de ses longs morceaux sombres et fascinants.
Malheureusement, une fois de plus, la voix de Dorthia est trop peu perceptible à côté des instrus qui eux balancent le ketchup. Le set des américains reste parfait et nous a plongé dans une véritable léthargie jouissive.
Windhand
En conclusion et sans trop de surprise, les Stoned Gatherings nous ont à nouveau régalé avec une très bonne soirée, malgré des problèmes évidents sur les voix. Une déception tout de même avec Conan, qui m’a définitivement convaincu que ce groupe n’avait plus grand chose à apporter et commençait vraiment à manquer d’inspiration. Sans rancune.
Un concert de Mars Red Sky gratuit, en plein été indien (si si !), dans un parc arboré en bordure de ville… Autant dire qu’on n’a pas réfléchi longtemps avant de décider d’y aller. Le Sulfurock n’est pas un festival tout neuf, agitant depuis huit ans ce lieu agréable avec une armée de bénévoles souriants, une ambiance conviviale et une programmation rock sérieuse. Le succès est au rendez-vous, cette édition 2017 ayant rassemblé plus de 600 personnes.
On arrive sur le site aux derniers rayons du soleil couchant, tandis que le duo Équipe de Foot s’agite déjà sur la scène. Premier point qui se confirme alors qu’on avançait petit à petit à pied en direction du parc Séguineau : le son est massif, et clair. Très honorable pour un événement de cette dimension. Musicalement, ce qui se passe sous nos yeux n’est pas désagréable : les deux musiciens (guitare & batterie, vous l’aurez imaginé), grimés en footballeurs de l’équipe de France, évoluent dans un genre musical trouble, qui va piocher ici ou là dans le rock, la pop, baignant dans une atmosphère rock indé, avec quelques rythmiques qui tabassent. On pense à beaucoup de groupes, dont évidemment des combos comme Weezer pour cette capacité à aligner des rythmiques plombées avec toujours des plans catchy, quasi pop, dans les refrains ou couplets. En tout cas c’est agréable, les gars s’amusent et déconnent sur scène, et les sourires sont partagés dans le public.
On retrouve encore une fois Blackbird Hill, eux aussi un duo, eux aussi groupe local, que l’on avait (re)vus il y a quelques semaines sur la même affiche que les Truckfighters ou Hark. Pas décalés sur cette affiche, le groupe fait une nouvelle fois bonne figure et semble satisfaire un public bienveillant. Le concert ne change pas beaucoup par rapport à la dernière prestation (set list identique ou proche, scénographie similaire ou proche, code vestimentaire proche…), on n’en fera donc pas des tonnes dans le descriptif. Ça n’est encore une fois pas du stoner – et ce constat ne les rend pas mauvais pour autant. Juste un peu hors sujet eux aussi pour nos pages.
Il suffira de quelques instants pour installer la scène afin de recevoir le trio girondin de Mars Red Sky. On avait vu nos frenchies pour la dernière fois il y a quelques semaines au Hellfest. Contexte complètement différent aujourd’hui : tandis que, sous la Valley, le format resserré et la pression d’un public exigeant avaient poussé le trio à produire un set concis, efficace et dense, l’ambiance d’aujourd’hui est plus détendue : les sourires sont de rigueur (sur scène, et rappelons-le, dans le public), plusieurs messages sympas sont adressés au public (qui répond !)… Très bon feeling, détente et bonne ambiance.
Musicalement, on est sur du très costaud : on connaît la solidité du trio girondin, on constate ce soir que détente n’implique pas pour autant laxisme. Le set de ce soir est maîtrisé, avec une set list chiadée, signe que le groupe ne choisit pas la facilité, même devant “son” public local. Il faut dire que ledit public est bien à fond, avec même une grosse poignée de gros amateurs qui reconnaissent les titres un à un. Les musiciens se font plaisir, en proposant des arrangements travaillés de leurs chansons, des enchaînements originaux, aménageant ici ou là des plans subtilement improvisés. On reconnaîtra donc une part de leurs titres clés (“Hovering Satellites”, “The Light Beyond”, “Strong Reflection”…) mais souvent remaniés, tronqués… Fondamentalement, le set est dense musicalement, alternant les ambiances altières et les passages plus lourds et graves, bien chargés par une section rythmique massive ce soir. Julien Pras, tout en retenue dans sa posture, déclenche l’artillerie lourde guitaristique avec une nonchalance et une assurance bluffantes, surtout que ses vocaux ce soir encore sont irréprochables – il n’en mettra pas une à côté, même sur les plans les plus haut perchés. Le voir jongler avec ses pédales d’effets en plus de dégainer riff sur riff est un véritable enchantement.
Au final, on n’aura pas regardé la montre, et lorsque le groupe quitte la scène sur une outro bruitiste un peu étrange, après plus d’une heure de set, tout le monde en veut encore. Certaines personnes du public vont même derrière la scène pour supplier les musiciens de remonter pour un rappel ! On se contentera donc de ce qu’on a eu, mais c’est déjà énorme, et on repart ravis.
Les Volcano Sessions n’auront jamais mieux porté leur nom que cette année. Car oui, c’est un cratère baigné d’un lac qui nous accueille en ce premier jour du festival organisé par Black Owl. Petit comité, gros pâté de pommes de terre, bières fraîches et line-up sexy sont au programme des réjouissances, et on compte bien en profiter un maximum. Le temps pour nous de planter les sardines de notre Quechua malodorante dans les flancs du monstre endormi, de saluer les copains de la fuzz issus des 4 points cardinaux, qu’on se retrouve un demi-litre à la main devant le duo Powder for Pigeons.
La tâche n’est jamais aisée d’ouvrir, mais les conditions idéales, la joie ambiante et les riffs grungy du combo font que ça passe crème. Powder n’a rien d’un groupe révolutionnaire, ni dans son intention, ni dans ses idées, mais il dérouille les oreilles de belle manière. Ces dernières sont donc bien huilées pour la suite, le gosier fraîchement lustré et les envies aiguisées. On n’en demande pas plus.
Et c’est l’appétit grandissant que l’on goûte avec délectation au set de Mars Red Sky. On ne va pas vous faire l’affront de présenter les Bordelais tant on en parle régulièrement. On va juste vous dire que leur set résonnant dans un volcan, les projections sur les parois, la timidité d’un Julien Pras dans un lieu aussi magique,… bin merde, c’est grandiose quoi ! Magique. Bandant. Rien à dire. On n’entend pas vraiment les gens moufter d’ailleurs. Tout le monde semble conquis par la magie de l’instant. Nous le sommes, c’est une certitude.
Pas facile de passer derrière (si je puis me permettre), de clore la première soirée. C’est aux suisses de Sons of Morpheus (déjà vus en première partie de Karma to Burn l’année dernière) de s’y coller. Ca shred, ça déroule, pas de soucis concernant l’aspect technique mais un je-ne-sais-quoi qui nous empêche d’adhérer se fait ressentir tout le long du set. Peu importe. On passe quand même une première soirée à la cool et on n’en demande pas plus.
La nuit n’aura de conseils à donner à personne, le houblon se chargeant des opérations. Un peu de pluie, un peu de sommeil. Demain sera une autre belle journée.
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Jour 2 :
Le volcan est toujours éteint lorsque les êtres s’éveillent, les yeux embués par les excès de la veille, de Saint Nectaire et autres spécialités locales. Le ciel menace sans grande conviction et après quelques heures à visiter lacs et ruisseaux, nous remontons sur le site bien décidé à prendre notre seconde rasade de fuzz.
Nous avons à cet instant raté Hell’s Strippers, régionaux de l’étape dont le hard rock résolument 70’s aura, selon les informations glanées, réveillé comme il se doit les oreilles des spectateurs présents. Les parisiens de Montecharge sont quant à eux en piste depuis quelques morceaux déjà et finissent leur set sur une reprise préhistorique de Red Fang. Il faut bien que jeunesse se passe. L’ambiance est alors chargée mais la pluie vient, par quelques gouttes, doucher les hardeurs.
Le temps de laisser passer l’orage qui en est à peine un, et voilà que Glowsun s’installe devant le lac. J’ai beau avoir vu ce groupe cent fois, dans cent configurations différentes, les 3 indéboulonnables lillois mettent un feu de dieu, et le public devient alors dingue. Grosse prestation.
La nuit est désormais bien tombée et Cachemira prend la suite. Dur pour ces fans de Radio Moscow de soutenir la comparaison face à la tornade précédente. A défaut de trouver la salvation dans la musique, on prendra le temps d’apprécier les pantalons pattes d’eph’ des musiciens. Total look.
Pour clôturer la soirée, Saturna, espagnols eux aussi, prennent la relève. Quelque part entre Witchcraft et Alice in Chains, suintant la classe et porté par un chanteur aux qualités vocales indéniables, le groupe emporte la grosse centaine de spectateurs présents, malgré un batteur de remplacement (celui de Cachemira donc) plus appliqué qu’autre chose. Le set se finit par « Forever My Queen », hymne de Pentagram qui finira d’embraser le volcan. Grosse baffe.
C’est dans cette chaude ambiance, faite de concerts puissants dans un cadre idyllique et transporté par ce génial rassemblement de copains, tous esthètes de la fuzz, que nous rejoignons live notre Pompei des rêves.
Le Black Bass festival se tient au milieu des marais de la région de Blaye, à proximité de Bordeaux, depuis quatre ans maintenant. Festival modeste et sympathique, il privilégie l’ambiance et la qualité, mais ne revendique pas forcément une programmation musicale d’une grande « cohérence » : on y retrouvera au fil du week-end toutes les variations depuis gros rock qui tâche jusqu’à la pop, en passant par la folk, etc… le tout en électrique ou en acoustique !
A priori pas forcément de quoi réveiller le stoner-head de base, donc… sauf que cette année, l’affiche de la seconde journée avait a contrario de quoi intéresser… voire écarquiller les yeux ! Truckfighters pour la seule date française de cette tournée ? Hark aussi ? Rajoutez à ça quelques allusions bien appuyées à des groupes d’affinités desert-rock-iennes, et il ne nous en a pas fallu beaucoup plus pour nous décider à prendre la route…
On gagne le site en pleine rase campagne et très vite en arpentant la zone du festival on est agréablement saisi par l’aspect paisible et champêtre de la chose : deux scènes placées de part et d’autre d’une zone complètement arborée très agréable, calée entre des champs et un beau château anciennement voué à cet espace viticole. La zone est baignée d’un beau soleil de fin de journée, on se balade et on repère des food trucks, des buvettes, des stands de jeu, des stands de prévention… On a à peine le temps de faire le tour que les premiers accords de guitare acoustique résonnent sur la « petite » scène (de bonne taille néanmoins).
Quelques pas suffisent à nous rapprocher de Julien Pras, qui a la responsabilité de lancer cette seconde journée de festival avec un set solo. Et oui, LE Julien Pras à la tête du trio français Mars Red Sky ! On sait le chanteur-guitariste plutôt effacé dans son rôle de frontman, on n’est donc pas tant surpris de le voir prendre la scène avec timidité… Le talentueux vocaliste balbutie un peu son intro, et interrompt même son premier titre suite à un pain ou trou de mémoire… Plutôt que de décontenancer, cette attitude sincère et humble génère en fait une sorte d’empathie formidable, si bien que l’on se croirait plutôt dans la maison d’un pote musicien ou dans le fond d’un petit bar intimiste, plutôt qu’en open air en festival. S’ensuit un concert chaleureux, impeccablement exécuté (plus aucun pain, tout est fluide et maîtrisé), qui évidemment ne contentera pas la soif de décibels saturés du fan de stoner un peu basiques (on est dans un environnement 100% acoustique, orienté folk et pop plutôt que rock), mais qui donnera le sourire à une assistance conquise. Notons que Julien ne cherche pas à concentrer l’attention sur lui seul puisqu’il a invité la chanteuse et instrumentiste (percus, une sorte de harpe électro-acoustique…) Helen Ferguson, qui l’accompagne pendant tout le set. Les titres s’enchaînent, jamais dépressifs (le piège de l’acoustique…), toujours subtilement mélancoliques. Super performance d’ouverture.
Un DJ set rock vient occuper le temps nécessaire pour installer la scène pour Blackbird Hill sur cette même scène. Le duo girondin bénéficie d’une ambiance crépusculaire très propice aux efforts déployés pour l’aspect visuel de leur performance : fumée, lights travaillés, look étudié … Le groupe a pas mal joué ces derniers mois et sa mise en place est quasi impeccable : son boogie rock plus ou moins saturé ratisse large et cartonne auprès d’un public qui est bien dans le cœur de cible. De manière purement subjective, on regrettera un peu la vision très « construite » des morceaux, ne laissant que peu de place pour une prise de liberté un peu salvatrice, une impro, un plan un peu fun… Tout ça est très carré, et très sérieux… trop ?
Vient immédiatement ensuite le moment pour le public de se rassembler à la tombée de la nuit devant la grande scène qui pour certains s’apparentera ce soir à un lieu de rituel : Calc monte sur scène pour la première fois depuis une décennie, en gros. Le combo pop rock bordelais se reforme uniquement pour le festival, et son influence sur la scène locale (et nationale) se ressent sur les sourires dans le public. Accessoirement, Calc est aussi le groupe de… Julien Pras, toujours lui, qui occupe le poste de chanteur-guitariste, comme chez Mars Red Sky. Sauf que musicalement, la musique du groupe est quand même loin des space trip heavy proposés par le trio bien connu de nos pages. Calc fait plutôt dans le pop rock, intelligemment pop et subtilement rock, proposant des compos audacieuses, piochant ici ou là dans des plans new wave, misant sur la mélodie avant tout. C’est bon enfant, bien exécuté, bien travaillé (encore une fois très beaux lights et mise en son impeccable), tour à tour léger et grandiloquent (ce morceau de conclusion !). Un bon moment, même si la saturation n’était pas vraiment au rendez-vous.
Après un intermède « concours air guitar » assez convenu mais finalement sympathique, vient l’heure du set de Truckfighters. Le trio suédois a passé une bonne demi-heure sur son soundcheck, ce qui s’entend assez vite : à nouveau aujourd’hui, le son est clair, percutant. Le trio propose une entame / jam s’articulant autour de la paire « Atomic » / « Chameleon » ; ça n’est pas explosif mais ça embarque le public dans le genre musical du groupe. Le public est bigarré par nature sur ce genre de festival, mais un noyau dur de fans de truckfighters occupe les premiers rangs et le pit. L’affluence étant au rendez-vous, l’ambiance est au top ! Sur scène aussi d’ailleurs, où l’air de rien, ça joue : la paire Dango / Ozo est robuste (ce dernier impeccable aujourd’hui sur ses lignes de chant, et toujours doté – on le signale trop rarement – d’un son de basse impressionnant, une clé dans le son du groupe). A noter : on sait que le tabouret du batteur de la formation s’apparente plus à un siège éjectable, tant le duo a du mal à fidéliser un marteleur de fûts à ce poste. Aujourd’hui c’est le bon vieux Pezo qui occupe le poste (celui qui apparaît notamment dans le célèbre DVD « Fuzzomentary »), et l’on se prend à regretter qu’il n’ait pas suivi le groupe toutes ses années, tant il assure à son poste, frappant juste et fort, avec une énergie qui fait penser à un hybride entre Animal (le batteur des Muppets) et Tiger, le batteur de Kadavar à la crinière virevoltante. Clairement la première demi-heure du set suit son cours en mode un peu automatique, et c’est avec le fuzzé « Monte Gargano » que les choses sérieuses commencent, y compris dans le pit. Les scandinaves introduisent un autre nouveau morceau avec réussite, « The 1 » faisant bien le job dans cette séquence renforcée en testostérones. Le set prend fin évidemment sur l’indémodable « Desert Cruiser » en rappel. Un concert impeccable, à l’occasion duquel le groupe a encore proposé une set list audacieuse, et maîtrisée, ce qui lui permet à de multiples occasions de se lancer dans des impros du meilleur goût (permettant aussi de mettre en avant leur talent de musicien, trop souvent « sous-évalué » derrière les cabrioles un peu outrancières de son guitariste… Back to basics !). Le public repart ravi, récupérant au passage le pantalon trempé et les chaussures de Pezo, qui repart en caleçon, le sourire aux lèvres…
Les français de Lysistrata enchaînent sur la petite scène. Le vent en poupe, les trois jeunes musiciens développent une énergie scénique absolument emballante. Le public ne s’y trompe pas, qui lui réserve un accueil plus que chaleureux. Musicalement, on pense à un mélange de At The Drive In, The Dillinger Escape Plan, à la sauce rock indé frenchie, pied au plancher. Ça joue bien, très bien, c’est très saccadé, et les morceaux sont bien foutus. Derrière ces éléments tout à fait objectifs et factuels… ça manque un peu de gras et de poil à mon goût : le package « jean’s slims/ourlets – rasés de près– guitare et basse calées bien trop haut sous les aisselles – cheveux bien dégagés derrière les oreilles – son clair» a un peu détaché le vieux con blasé qui sommeille en moi. C’est complètement subjectif et un peu honteux, c’est vrai. Sans remettre en cause le talent du groupe (et son potentiel pour les années à venir) j’ai lâché l’affaire très vite pour me caler au 1er rang de la grande scène et attendre le groupe suivant…
Point négatif pour Lysistrata : le trio tire sur la corde et déborde son slot de 20 grosses minutes. A bientôt 2h du matin, dans le froid de la nuit en rase campagne, ça commence quand même à piquer un peu… Heureusement Hark est prêt depuis un moment et quelques secondes à peine après le dernier accord dissonant des frenchies, les gallois, remontés comme des pendules, attaquent la scène la bave aux lèvres, prêts à en découdre. Le quatuor est trop rare ces dernières années, on pouvait craindre de les retrouver en rodage. C’est tout le contraire dans les faits : Hark est devenu une véritable machine de destruction live. Clairement, et c’est le constat premier de ce set, le groupe a « metallisé » son propos : même si ses compos ne manquent pas de subtilités et de finesses techniques et sonores, le riff est devenu maître à bord, et l’efficacité prime. Tee shirts Coroner, Keelhaul, Downfall of Gaia, backpatch Iron Monkey… on le sentait venir en les voyant monter sur scène ! Côté set list, le groupe est en promotion de son nouvel album (le délicat « Machinations » fraîchement sorti) : confiant dans cette rondelle il compose sa set list pour moitié de tirs qui en sont issus (le reste venant de « Crystalline », bien sûr…). Moins familier des derniers morceaux, on les encaisse de plein fouet coup sur coup, et on commence juste à cligner des yeux en reconnaissant les plus classiques « Mythopoeia » et « Scarlet Extremities » qui viennent ponctuer la première moitié du set. Evidemment, sur scène, Jimbob mène ses troupes, toujours armé de sa caméra Go pro accrochée sur la tête de sa guitare (un peu chiant, avouons-le, tant ça attire l’œil). Mais sur les ailes et en fond de scène, on se regarde pas le nombril non plus : ça débite des bûches par stères entières, sans répit. Tout le monde est à fond, et les dégâts sont là, même si le public s’est un peu amoindri après les Truckfighters (notoriété du groupe moindre, genre musical plus exigeant, température ambiante rédhibitoire, fatigue…), remplissant néanmoins très convenablement le pit, et l’agitant bien comme il faut avec quelques moshers dont certains au premier rang un peu imbibés (ou très passionnés…). Les gallois achèvent leur set (et le public) avec le terrible « Palendromeda », mais décident de revenir pour un rappel imprévu (si si, ça existe encore ce concept !) qui finira de donner le sourire à tout le monde, eux compris. Une belle leçon.
On quitte le festival ravis, évidemment, par cette journée haute en émotions, et on reste bluffés par cette programmation exigeante compte tenu d’un festival qui se veut ouvert, destiné à un public large. Un coup de maître en tout cas, le festival ayant réalisé l’une de ses plus grosses affluences historiques… A suivre de près sur son édition 2018 !
Le 16 août dernier au Gibus à Paris, Fuzzoraptors et Fauchage Collectif nous ont concocté un plateau de 4 groupes qui pouvait se résumer en quatre lettres : doom. Les américains de Cough se payaient la tête d’affiche et les autres groupes n’avaient pas à démériter : labellisé 100% français, on retrouvait Malemort, Monarch ! et Witchthroat Serpent. Comme si la fête manquait de lascars, Sinister Haze, le side project du guitariste de Cough, s’est rajouté à l’affiche 2 jours plus tôt. Il ne m’en a pas fallu plus pour quitter mon transat et prendre le premier retour pour Paris (c’est faux, je n’étais pas en vacances).
Il est 18h30 et une petite foule commence à se former devant le Gibus toujours fermé, alors que Sinister Haze est censé monter sur scène à la même heure. Une info facebook vient nous signaler au même instant que le running order vient d’être modifié, la faute à un léger retard des membres de Cough. Finalement, c’est Malemort qui ouvre la soirée à 19h15 [ndlr : notons que ce n’est pas le même “Malemort” qui officiait en ouverture de Crowbar il y a quelques jours, sur la même scène, et que ce sont tous deux effectivement des groupes français… ?!]. Alors que la salle est déjà convenablement investie, le guitariste fait sonner un triton des familles dans – fait assez rare pour être signalé – le silence le plus absolu (preuve que les amateurs de doom sont des gens raffinés et respectueux, ne saisissant pas chaque silence pour beugler). Le calme vient vite laisser sa place à une tempête de saturation, lente et éprouvante. Les hurlements du batteur viennent assombrir l’ambiance déjà loin d’être joyeuse, et les voix plus rauques du guitariste et du bassiste – puisque tout le monde chante dans le groupe – s’ajoutent aux réjouissances mortuaires. Le groupe quitte parfois les charentaises du funeral doom anxiogène pour s’aventurer dans des cadences plus black, où il semble être moins à l’aise et plus hésitant. Mais avec son atmosphère malsaine, Malemort réussit sans mal à transformer le Gibus en fosse commune et à poser idéalement les prémices d’une soirée doomeuse.
Sous une scène baignée de rouge, Monarch ! démarre son oraison. Le groupe qui sort un nouvel album fin septembre chez l’excellent Profound Lore Records ne s’impose aucune limite dans l’expérimentation sonore. A la frontière du drone et du doom, la principale originalité de Monarch! réside dans sa chanteuse; derrière un autel d’effets en tous genres, elle module et déforme sa propre voix. Cette blonde au visage angélique – et dont le t-shirt Saint Vitus ne suffit pas à nous effrayer – fait résonner sa voix pure au milieu de l’agitation sonore menée par les hommes qui l’entourent. Ce personnage à la fois rassurant et envoutant contraste surtout avec le bassiste, vêtu d’un débardeur à moitié déchiré Bathory frappé d’une tête de bouc et dont la basse orpheline d’une corde est placée à une hauteur suggestive. Cette engeance du diable hurle dans son micro et se remue beaucoup trop pour n’être qu’un simple fanatique. Entre une bière sifflée d’une traite et un regard assassin vers la chanteuse, il incarne la lubricité et la débauche s’attaquant à celle dont les chants sonnent trop délicieux. De sa musique jusqu’à la scène, Monarch! mélange habilement la douceur et la furie. Une grosse claque.
Une odeur d’encens s’est répandue dans la salle ; on subodore en toute logique les toulousains de Witchthroat Serpent, puisque, rappelons-le, leur dernier album intitulé Sang Dragon sorti en 2016 faisait référence à un encens psychotrope. Les spectateurs seront-ils bientôt les victimes de visions hallucinogènes sous ces effluves résineuses? En tout cas, ils sont plus nombreux et la scène se fait de moins en moins accessible. Witchthroat Serpent balance un stoner doom mystique des plus efficaces mais qui n’a rien d’étonnant. En live comme sur disque, Witchthroat Serpent fait penser à Electric Wizard, du son des grattes aux riffs fumeux en passant par un bon usage de la wah wah pour un zeste de psychédélisme. Toujours est-il que le set des toulousains passe agréablement bien, offrant finalement une bouffée d’air frais entre les vapeurs toxiques des précédents groupes et de celui qui va suivre. La marijane a meilleure odeur que la mort.
Sinister Haze commence avec une longue intro sans batterie avec Brandon Marcey grattant quelques accords tout en chantant d’une voix claire et légèrement plaintive. Pour vous donner une idée d’à quoi ressemble le side project du guitariste de Cough, prenez les morceaux les plus calmes de Still They Pray, enlevez un peu de crasse et rajoutez quelques harmonies, c’est gagné, vous obtenez Sinister Haze. Si les débuts de ce groupe étaient largement orientée vers le stoner, il semblerait qu’il se soit maintenant tourné vers un rock psyché et planant, à grand renforts de claviers de l’espace, d’arpèges du futur ou carrément de violons. Sinister Haze, tout comme son papa Cough, garde un goût certain pour les ambiances maussades et nostalgiques, et transporte son auditeur dans une sorte de rêve éveillé. Les gaillards ont bien eu raison de se rajouter à la liste des groupes de ce soir.
Un orgue se met à sonner, la salle est pleine pour assister à la procession du soir, celle de Cough. Torture, souffrance, misanthropie, voilà les quelques thèmes de prédilection du groupe, qui triomphe superbement dans le morbide. Avec des riffs des plus sordides et une voix qui semble vomir de la haine, Cough est la parfaite bande son d’un film d’horreur ou d’une fin du monde apocalyptique, au choix. Pour une raison inconnue, David Cisco, qui partage habituellement les voix avec le bassiste Parker Chandler, n’est pas là ce soir. C’est donc Brandon Marcey qui s’y colle, et il s’en sort plutôt bien. Alors que Parker s’occupe des parties nerveuses, le visage caché derrière sa longue chevelure, Brandon gère les passages plus doux, pour peu qu’il y en ait.
La désolation de Cough fait petit à petit son effet ; un dégénéré s’esquinte le poing en tapant sur la scène avant de mettre fièrement sous le nez des malheureux près de lui sa main ensanglantée. Une fille qui doit juger la qualité de ses photos un peu mauvaise depuis la fosse décide de monter sur scène pour prendre des gros plans de chacun des membres. Un peu plus tard, une autre viendra montrer ses seins et sera rejointe par un autre, venu montrer ses seins lui aussi, mais qui recevra étrangement beaucoup moins d’encouragements que sa camarade. L’heure de la dernière chanson arrive, et le claviériste demande de la weed dans le public. Tout va bien.
Une très grosse soirée qu’aucun amateur de son lourd et dépressogène ne devait manquer. Sur plus de 5 heures de concert, on déplore quand même que toutes les sorties de la salle fussent définitives. Peut être que dans ce climat sombre et oppressant, la soirée se voulait ainsi plus réaliste.
C’est un pari risqué que d’organiser un concert en plein weekend du 15 août, qui plus est un dimanche. Qu’à cela ne tienne, à l’heure où la capitale est désertée, Cartel Concerts décide de faire venir le géant de la Nouvelle Orléans, Crowbar. Le groupe qui avoisine les 30 ans d’activité n’a plus grand chose à prouver et se pose incontestablement en maître du sludge marécageux, à grands renforts de riffs imparables et d’une voix délicieusement abimée par le temps. A priori, la soirée devrait donc être bonne.
La salle est loin d’être pleine mais on aurait pu s’attendre à bien pire pour un dimanche 13 août.
C’est aux français de Malemort d’assurer la première partie des américains. Le logo du groupe dans un style art nouveau est affiché sur l’écran au fond de la scène, et les chemises/cravates que portent chacun des membres se rajoutent à l’ambiance rétro. Premier constat, le son n’est pas terrible : les deux guitares se distinguent assez difficilement, la batterie semble légèrement en retrait, et il est quasi impossible de comprendre ce que raconte le chanteur, bien que ce soit du français.
Malemort pioche un peu partout : punk, heavy, parfois thrash, les français définissent leur genre comme du « metal libre » et ça se comprend. L’ensemble se veut quand même assez gentil et propret, entre les refrains sautillants et les frasques très théâtrales du chanteur, qui, accordons lui cela, comblent ses faiblesses vocales. Un groupe parfait pour Oui FM, mais pour une première partie de Crowbar, pas certain.
Des vidéos de skate old school défilent sur l’écran tandis que la scène se prépare doucement pour accueillir Kirk et ses compères. Le statut de légende du bonhomme ne l’empêche pas de faire lui-même ses réglages avant le début du concert, qui installe tranquillement son pied de micro et son sobre pedalboard fait de 3 pédales sous les regards attentifs de toute la salle. Ca balance deux trois accords pour un soundcheck final, et on est parti. Matt Brunson et Todd Strange, le bassiste d’origine réintégré depuis la sortie de leur dernier album The Serpent Only Lies l’année dernière, encadrent Kirk Windstein, dont la carrure n’a d’ailleurs pas à rougir face à ces colosses. Pour intégrer Crowbar, il faut boxer dans la catégorie poids lourd, le menu batteur Tommy Buckley serait l’exception confirmant la règle. Et rester debout à encaisser les baffes que nous assène le groupe n’est pas chose facile lorsqu’on connait la puissance néo-orléanaise du combo. Le son n’est toujours pas à la hauteur mais cela n’a plus trop d’importance car la finesse n’est plus de la partie. Entre deux glaviots du Riff Lord, les tubes se succèdent avec les classiques « All I Had (I Gave) », « To Build A Mountain », « Walk With Knowledge Wisely », le plus mélancolique « Planets Collide » et le plus récent et énérvé « I Am The Storm ». En fin de concert, Kirk lance un sondage auprès du public pour le choix de la dernière chanson. On aura beau hurler « The Lasting Dose », on ne l’entendra pas ce soir.
Todd Strange
Matt Brunson
Fuckin Crowbar
le Riff Lord en action
Voir Crowbar sur scène est souvent l’assurance d’une soirée réussie, tant le groupe possède une liste de tubes longue comme la barbe blanche de son leader. Ce dimanche 13 août ne dérogeait pas à la règle et on est ressorti les oreilles repues et le sourire au lèvre du Gibus qui décidément n’offre pas un son des plus merveilleux.
La chaleur étouffante qui a étreint Bordeaux aujourd’hui n’incite pas forcément à se rendre dans cette fournaise du Void, et encore moins à descendre dans son sous-sol, véritable étuve en été… Et pourtant, impossible de rater le passage de Karma To Burn, amenés en terres girondines par les incontournables Make It Sabbathy.
C’est aux subtilement dénommés Ethili que revient l’honneur d’ouvrir pour les gloires du stoner ricain. Une soirée de trio, quoi, même si nos trois girondins (issus du bassin d’Arcachon, un vivier peu réputé pour ses formations à guitares !) ne sont pas vraiment dans la même tonalité… Et notamment scéniquement ! En kilts et costumes faits maisons (thématique bière que l’on pouvait présumer au vu du nom du groupe), les joyeux énergumènes enchaînent les titres barrés, penchant avec un certain bonheur dans différents versants du stoner, avec autant de sérieux musical que de bonne humeur potache. Musicalement on regrettera parfois que certains titres ne s’assument pas complètement (un bon riff joué 2-3 fois seulement, et bim, un break vient y couper court… un passage bien accrocheur nous fait taper du pied et pam, un plan “de musicien” vient tout casser – genre rythmiques à mesures asymétriques ennemies du headbang). En revanche, on apprécie bien l’esprit barré et hors normes développé par le groupe (les chants floklo en chœur sur les riffs fuzzés, bizarrement ça marche…). Bref, un potentiel très intéressant, qui devrait se révéler d’autant plus si le groupe se recentre sur des compos plus punchy et directes.
La température est montée de quelques degrés avec l’arrivée du second trio, qui a su rameuter du monde ce soir (le Void n’est pas loin d’être plein – très bon signe sur la santé du public bordelais, mais très mauvais signe pour notre petit confort de ce soir… il va faire très chaud !). Pas de tergiversation, on est habitués : les gras ricains rentrent dans le lard avec un “30” qui déboîte. Très vite Evan Devine s’énerve derrière sa batterie, rencontrant un problème avec sa grosse caisse. Ni une ni deux, le bonhomme s’en empare et file backstage récupérer celle généreusement prêtée par Ethili pour finir le set. Le temps d’une petite impro de Will Mecum pour patienter (pas génial) et c’est reparti, avec un flightcase pour caler la grosse caisse qui va prendre cher ce soir. Scéniquement, on connaît K2B : rien ne change vraiment. Will est calé sur la droite, regarde parfois un peu sur le côté, bredouille deux ou trois fois quelques mots maladroits dans le micro, et se concentre sur ce qu’il sait faire de mieux : riffer. La mise en son est pas mal, avec quelques moments franchement gênants (ces passages de basse dissonants qui font “friser” les amplis et les tympans… yuck). La set list fait évidemment la part belle à la première triplette du combo, et force est de constater que les quelques incursions dans leur répertoire récent suscitent au mieux un discret headbang poli, plutôt qu’une franche adhésion. Du coup, au bout de trente minutes, on a un peu fait le tour et on commencerait presque à trouver le temps long… Il faut dire que scéniquement, le charisme cumulé de nos deux cordistes équivaut à peu près à celui d’une pelle à tarte ; tout repose donc sur la qualité des riffs et des compos, bien présentes heureusement (en tout cas pour les vieux titres). En revanche, ça manque sérieusement de groove… On un peu oublié que la paire Rob Oswald/Rich Mullins apportait au combo ce “southern groove” enthousiasmant qui complétait cette belle machine à riffs. Du coup on n’a plus que les riffs, et une rythmique efficace (faut voir Devine marteler comme une brute épaisse) mais un peu insipide. En clôturant par son désormais “classique” “20”, le groupe la joue facile mais confirme son efficacité. On ne peut pas lui enlever ça : Karma To Burn sur scène, c’est généreux et ça fonctionne, et le public ce soir est ravi, à juste titre. Mais le groupe devient peu à peu une sorte de clone de lui-même, pas toujours très inspiré, et un renouveau serait non seulement bienvenu, mais probablement salvateur si le groupe recherche un second souffle.
C’est bien connu, mois de juillet à Paris, été tout pourri. Fort heureusement, l’équipe des Stoned Gatherings est monté sur le ring et s’est battu pour faire de ce proverbe trop souvent pertinent un vieil adage périmé dont on pourra bien rire à la rentrée prochaine. Face à un combat d’une telle ampleur, pas de temps à perdre : le premier round commençait le 3 juillet dernier au Glazart, as usual, avec les lutteurs de XII Boar, Mothership, Egypt et Karma To Burn. Alors, le désœuvrement estival a t-il succombé aux assauts des masturbations de guitare ?
Avec un guitariste coiffé du bandana de Mike Muir de Suicidal Tendencies , un bassiste vêtu d’un débardeur Witchsorrow et un batteur en t-shirt Cannibal Corpse, difficile de se douter du genre musical dans lequel œuvre les anglais de XII Boar. Du brutal crossover doom ? Ils auraient au moins le mérite d’avoir inventé un nouveau sous-genre. Mais non, XII Boar est moins inventif, bien qu’il mixe tout de même plusieurs styles et arrive à surprendre. Tantôt heavy, tantôt rock’n’roll, le groupe et son chanteur à la douche voix abimée par quelques gitanes de trop tape dans des racines purement blues. « Does anybody like blues music here ?», balance le chanteur avant de se lancer dans un morceau d’un vieux crooner de bar. Ca réveille, c’est rapide et pas prise de tête. Parfait pour l’apéro.
En 2013, Mothership sortait son premier album éponyme avec le morceau « Hallucination » en ouverture : un démarrage slow tempo avant une brutale accélération et un riff à se taper la tête contre sa platine vinyle (à ne pas essayer). Quoi de mieux alors pour ouvrir leur concert de ce soir ? Les trois texans enchaînent sur le plus récent « Helter Skelter », tiré de leur dernier album « High Strangeness ». Les litres de sueur perdus par le guitariste torse nu ne l’empêchent pas de balancer des solis dopés à la testostérone de mammouth et de grimacer tout en même temps. L’énergie que dégage le bonhomme et son compaire bassiste/sosie de Bud Spencer version cheveux longs est sévèrement communicative, et le heavy rock poilu du groupe nous décroche une belle claque. Malgré ça, la fosse n’a bizarrement pas trop bougé.
Alors que la chaleur du Glazart commence à rejoindre celle du Sinaï, c’est tout naturellement au tour de Egypt de poursuivre la soirée. Avec son refrain supra-lourd, « Matterhorn » a le privilège d’ouvrir le set des trois américains et s’en sort carrément bien. D’emblée, nous voilà planté dans la fournaise d’un désert de cactus, accablé par le poids de ce stoner/doom égyptien. On trouve dans cette steppe aride de nombreux oasis de riffs blues infusés au rock, qui ferait headbanger n’importe quel touareg avec une minerve. Le groove de Egypt est incomparable, inégalable, et des titres comme « Endless Flight » ou le plus récent « Cracks and Lines » nous le prouve plus d’une fois. Egypt clôture son set sur le long « Elk River Fire », l’occasion pour le guitariste de montrer ses talents de soliste sur une jam qui pourrait durer jusqu’au lendemain. Mais toutes les bonnes choses ont une fin et il reste encore un groupe à qui l’on souhaite du courage, car la barre a été placé haute.
Karma To Burn envoie directement le pâté avec un son énormissime, ce qui déclenche (enfin) les premières agitations dans la fosse. Même sur des passages plus décontractés, le public est déchainé et il faut jouer des coudes pour rester vivant au sein du pit. C’est à se demander si le responsable de cette effervescence n’est pas la boisson dorée et gazeuse vendue au bar plutôt que Karma To Burn lui-même. Toujours est il que la machine à riff fait son effet et tout le monde semble conquis. Mais passé la première demi-heure, tout devient bien répétitif et l’énergie déployé au début retombe comme un soufflé au fromage trop cuit. Certes, Karma To Burn envoie de la bûche, soutenu entre autre par un batteur survolté, mais la bûche est trop lisse et linéaire pour capter l’attention de A à Z. Là où un My Sleeping Karma s’en sort habilement dans le registre stoner sans solo ni parole notamment grâce à des passages plus planants, Karma To Burn ne relâche que trop rarement la pression et n’offre finalement pas beaucoup de nuance. Résultat, Karma To Burn fait son job mais on s’ennuie un peu.
Les prochains numéros gagnants du loto? Non, la setlist de Karma To Burn.
Malgré tout, les Stoned Gatherings sortent une fois de plus vainqueurs en nous offrant cette belle soirée, dominée de loin par le grand Egypt.
Troisième jour. Comme chaque année, la 3ème matinée est un mix de sensations et d’émotions un peu étrange, mélange de fatigue, de courbatures, d’excitation aussi au regard de la programmation de la journée, envie de bien profiter du sprint final avant l’année prochaine, tout en regrettant déjà l’arrivée imminente de… “la fin” de cette édition 2017 qui a déjà tenu ses promesses. Haut les cœurs ! On repart au charbon… avec le sourire !
BRIGHT CURSE
Le public ne s’est pas déplacé massivement pour applaudir les Londoniens de Bright Curse, mais aucun de ceux ayant fait le déplacement ne l‘auront regretté. Le power-trio doom/psychédélique distille une musique aussi lourde que planante qui ravit les aficionados, et le groupe est récompensé par un public plus que réceptif. Le format court (et frustrant) des premiers sets de la journée ne permet pas au trio de développer ses titres à l’envie, mais le choix de la set list (essentiellement basée sur l’efficace dernier album “Before the Shore”) fait mouche, et ce même si le groupe n’a pas forcément choisi les titres les plus “directs” de son répertoire.
VÔDÛN
Pour Vôdûn, le public s’est déplacé en masse. Un mélange entêtant d’influences vaudous hawaïennes et de stoner pour une musique réellement sulfureuse et pleine d’une magie mystique. Une sorte de Black Sabbath soul qui sort des habituels sentiers battus stoners. Celles et ceux qui avaient déjà assisté à une prestation du groupe ces derniers mois y ont retrouvé les ingrédients clés qui font toute l’originalité du trio anglais… mais avec une maturité encore supérieure. Celles et ceux en revanche qui ne connaissaient pas le groupe (la plus grosse part de l’assistance) repartira abasourdi avec l’impression d’avoir pris une grosse claque.
THE VINTAGE CARAVAN
Nous avions déjà naguère à plusieurs des prestations généreuses du combo hardrockisant islandais à plusieurs reprises. Naguère, ils étaient encore des gamins – presque des ados boutonneux – et la confiance dont le trio faisait preuve sur scène flirtait avec l’arrogance. C’est sur un show en plein jour au Freak Valley 2015 que nous avions vu pour la dernière fois les Scandinaves, qui avaient gagné à leur cause de nouveaux fans, notamment lorsque le guitariste avait contourné la scène pour ressortir dans le public afin d’y déployer un généreux solo de gratte. Un tantinet sceptiques quant à l’évolution de la formation nous attendions cette prestation et – bordel ! – elle s’est bonifiée avec le temps comme le bon pif ! La maturité en plus, The Vintage Caravan perpétue son style hérité des meilleures formations de hard (comme on disait jadis en parlant de musique et qu’il ne faut pas confondre avec les émissions taguées ainsi sur le câble qui se consacrent à une autre forme d’expression plus ou moins artistique) et s’est encore amélioré musicalement. Putain ! Ils ont enchanté une Valley blindée (et pas uniquement à cause de l’effet canicule) avec leur côté entertainer certes mais pas que ! Ils nous ont gratifiés de brulots faciles à aborder qui furent propices aux reprises en cœur d’un public qui finit par les ovationner en fin de set juste après un final du bassiste sur les crash barrière parmi les corps dégoulinants et malodorants. On craignait la comparaison suite à la performance envoutante de Vôdûn, mais c’est pour les suivants que la journée s’annonce compliquée vu le niveau déjà atteint à l’heure du repas.
CRIPPLED BLACK PHOENIX
Ce n’est pas uniquement jour d’élection en ce troisième jour, c’est aussi l’anniversaire de Jonas l’un des trois (trois !!!) guitaristes de la formation britannique qui déploie son œuvre hors du contexte purement stoner. Pour la photo de famille, les photographes présents dans la place ont misé sur un objectif à l’angle XXL afin de faire rentrer les 8 protagonistes de cette chose sur un seul et même cliché. Si ça a sacrément de la gueule autant de monde aligné comme ça sur scène, si côté dégaine le groupe envoie – et se réfère à du – lourd et si la présence féminine fait toujours plaisir dans ce monde de brutes épaisses avinées par la bière, c’était un peu light quand-même question gros son. Si Crippled Black Phoenix est capable de prouesses envoûtantes, le groupe a aussi tout le potentiel de ramollir le public de la Valley (un peu comme celui de l’abus de Muscadet sur la bite des festivaliers de Clisson). Malheureusement, les Anglais ont opté pour un setlist très axé sur la partie calme de leur répertoire et leur show déployé sous une chaleur à la limite du supportable ne restera pas dans les annales comme la meilleure prestation de cette formation – nous les avons connus nettement plus énervés sur scène et ce registre leur sied plutôt vachement bien. La torpeur gagnant les âmes errant depuis trois jours sous la chaleur et dans la poussière en accumulant les courtes nuits de sommeil n’est certainement pas étrangère à notre ressenti ; tant pis pour nos gueules !
UFOMAMMUT
Sans parler d’heureuse surprise, l’on est content de retrouver le trio transalpin aussi haut sur l’affiche, bénéficiant d’un slot « charnière » de fin d’après-midi intéressant. Un signe aussi de reconnaissance qu’il leur faut maintenant valider ; on n’attend donc rien moins qu’un coup de massue pour les 40 minutes à venir. Et coup de massue il y eut. Voire plutôt bulldozer, tant le matraquage en règle appliqué au public fut long, répétitif et ininterrompu. Chaque titre défilant sur la set list « taylorisée » du groupe labourait un peu plus le sillon d’un doom désormais estampillé « Ufomammut » : riffs pachydermiques, rythmique massue, assénée de manière répétitive et lancinante, éructation vocales… La combinaison est désormais reconnaissable entre mille et fait montre d’une efficacité live simplement époustouflante. Par ailleurs, dégagés de tout impératif “promo”, le trio nous gratifie d’une set list impeccable, piochant un peu partout dans sa discographie, et incluant au passage deux nouveaux titres, extraits de son album à venir (et on vous rassure, en première écoute, ils semblent bien tabasser). Clairement, on est écrasés au sol pendant tout le set, et on finit les yeux grands ouverts, sans trop comprendre ce qui s’est réellement passé. Ufomammut atteint un statut indétrônable, maîtrisant l’exercice à la perfection. S’ils arrivent encore à se renouveler (à voir avec leur prochain album studio, imminent) sans dégrader leur performance scénique, on tient sous nos yeux un des rares groupes de doom capables d’élever le genre sur des scènes plus exposées, vers des publics plus variés.
PENTAGRAM
Pentagram sera le gros pincement au cœur de la journée. Non que la prestation ne soit mauvaise, loin de là, mais l’absence de Bobby, empêtré dans ses habituels déboires narco-judiciaires est comme un coup de poignard aux entrailles [ndlr : pour ceux qui auraient raté l’information, Bobby Liebling a été arrêté il y a peu pour de sombres raisons, et le groupe a décidé de continuer en trio sans son frontman]. Le concert est habilement exécuté, avec notamment un Victor Griffin en frontman toujours impeccable à la six-cordes, et pas ridicule derrière le micro, mais aussi un Greg Turley qui prend sa part du job et occupe bien la scène. Le choix de la set list est à la fois impeccable et sans aucune surprise, ne piochant jamais loin du “best of” traditionnel du groupe (propice à quelques perles comme cette excellente version de “20 Buck Spin” chargée en soli). Mais malgré tout, voilà, il manque la présence surréaliste de ce Garcimore halluciné. On croise le tourneur français du groupe, qui confirme : « C’est la dernière fois. Bobby va probablement mourir en prison. »
Ite missa est.
BLUE ÖYSTER CULT
Blüe Öyster Cult livrera par contre sûrement le meilleur show de la journée, et ravira les fidèles avec son hard rock teinté de psychédélique et de références parfois ésotériques, parfois geeks, parfois juste stupides ! L’enchaînement parfait “Godzilla”/ “(Don’t Fear) The Reaper” est obligé de mettre tout le monde d’accord, et le final sur “Cities on Flame With Rock and Roll” achèvera de coucher tout le monde.
CLUTCH
La présence de Clutch en headliner de la Valley est aussi peu surprenante qu’elle est légitime. Déjà il y a trois ans, la « machine » Clutch déroulait des concerts tous plus impressionnants d’efficacité, s’appuyant sur un excellent « Earth Rocker » à l’époque (et, accessoirement, presque 25 années de live dans les jambes, l’air de rien). Bref, c’est un peu l’assurance tous risques. Et de fait, l’heure de concert qui suit n’étonnera personne a priori, sauf ceux qui découvrent le quatuor U.S. en live : Clutch reste une redoutable machine de guerre en live, d’une efficacité quasiment à toute épreuve. Musiciens impeccables de maîtrise et de technique, qui s’entendent parfaitement, un frontman de plus en plus dynamique (Fallon assume complètement et efficacement son job de frontman), le seul point discutable sur un concert de Clutch tient au choix de la set list, en particulier sur un set court d’une heure, générant encore plus son lot de sacrifices. Faire la fine bouche en regrettant le peu d’incursions dans le back catalogue « ancien » du combo serait un combat d’arrière-garde : le groupe ne renie pas son passé, mais s’appuie (et c’est le cas depuis plusieurs années, donc pas la peine de feindre la surprise ou la déception) sur un set de titres plus récents à l’efficacité live (re)connue pour constituer le squelette de ses concerts. On apprécie toujours les vieilles pépites comme « Profits of Doom », « The Mob Goes Wild » ou ce rutilant « Burning Beard » en début de set. Par ailleurs, le groupe enquille les titres sans tergiverser, bien décidé à titrer le plus riche profit de ce slot de 60 minutes dans tous les cas frustrant ; pas de place à la parlotte ou la branlette de manches de guitares… On est donc un peu frustrés de voir débarquer le classique titre de conclusion « Electric Worry », et du coup assez contents de voir que les traditions évoluent puisqu’ils y associent un « X-Ray visions » surprise pour vraiment appuyer leur baroud d’honneur. Bref, Clutch a délivré une prestation de maestro, exactement au niveau de maîtrise et d’efficacité que l’on pouvait attendre. Prise de risque modérée, certes, mais toujours une machine live rutilante, impressionnante. Et dire qu’ils en ont encore sous la pédale…
HAWKWIND
Les légendaires Hawkwind font de nouveau escale à Clisson. La formation britannique pionnière du space-rock, toujours emmenée par Dave Brock, 75 ans, fidèle au poste, vient distiller un son terriblement planant, qui transporte un auditoire ravi dans les cosmos S-F, soutenus par une panoplie de projections psychés stroboscopiques qui en envoient plein les mirettes. Une bien belle façon de finir ce festival, éreinté mais heureux.
Et voilà, l’heure des au-revoir est arrivée, on quitte le site dans la nuit, la tête basse et le dos courbé (un peu accablés par la tristesse c’est vrai… mais aussi par le poids de la fatigue sur nos vieux corps, avouons-le !), en repensant à ces trois journées splendides de ciel bleu et de riffs lourds, de surprises, de révélations, de confirmations… On a adoré cette édition, et on réfléchit déjà à la suivante. En espérant vous y voir !
Une courte nuit de sommeil a permis de recharger nos batteries internes ainsi que celles de nos nombreux appareils électroniques. C’est la gueule bien enfarinée que nous nous dirigeons à nouveau vers Clisson en consultant les infos météos qui nous prédisent une journée encore plus chaude et ensoleillée que la veille. Ça tombe bien, vue la poussière ambiante le premier jour déjà, on va déguster pour ce deuxième jour du festival dans une Valley dont l’affiche est sacrément bandante !
LOS DISIDENTES DEL SUCIO MOTEL
La place est déjà honnêtement remplie lorsque la formation française attaque sa demi-heure de show à 10:30 du mat ! Nous tenons à préciser que les festivaliers ayant privilégié leur hygiène de petits bourgeois ou le petit-déj gargantuesque ainsi que les porteurs de pass VIP qui se rafraichissaient les panards ou le gosier dans leur zone privilégiée peuvent se bouffer une couille – voire un nibard ne soyons pas misogyne – d’avoir manqué LDDSM au Hellfest : car ce fût diablement bon ! Des choix contraignaient les Alsaciens quant à l’orientation de leur setlist et certains sacrifices au malin ont été consentis pour rentre dans le format contraignant de ce type de performance. Au final, les gars ont misé sur une combinaison gagnante qui ravit les bourrins : trois extraits de leur énorme album concept « Human Collapse », un titre d’« Arcane » et une reprise de « Welcome To The Machine » relevée à la sauce de leur dernière production. Investissant toute leur énergie dans la bataille, les cinq types de Strasbourg ont annoncé la couleur d’entrée de jeu avec le pugnace « Trip » et n’ont pas relâché la pression d’un iota durant trente minutes d’un show dont « Determination » demeurera un énorme moment. Alignés sur un rang devant leur batteur, Los Disidentes Del Sucio Motel étaient en totale harmonie en se trémoussant rageusement en parfaite synchronisation rapidement imités par les premiers rangs : preuve irréfutable d’une formule qui a fonctionné comme sur des roulettes, servie par des artistes bien de chez nous qui commencent à avoir sacrément de la bouteille.
PRIMITIVE MAN
Pour ce deuxième jour, le public s’est déplacé en masse pour accueillir les doomeux du Colorado. Eux ne semblent pas particulièrement heureux d’être là, mais il s’agit aussi peut-être d’une pose liée à leur ambiance musicale. Difficile de faire bouger la foule sur des tempos aussi lents, mais la lourdeur du son montre que l’on a pas affaire à des baltringues ! Les gars déchaînent les enfers dans des turpitudes de guitare plombantes, et l’on en ressort tout chamboulé. Disons que l’ambiance du groupe n’est pas spécialement estivale !
MONKEY3
On enchaîne ensuite avec les helvètes de Monkey3 qui viennent délivrer leur stoner psychédélique à une foule compacte (la Valley ne se sera pas vidée du weekend). Un peu court, hélas, mais on sent monter l’intensité au fur et à mesure de la setlist devant un public qui semble apprécier la prestation du légendaire combo suisse.
BONGRIPPER
On attendait beaucoup de ce set, les américains se faisant (euphémisme) rares sur les scènes européennes. Vaguement cultes, le quatuor se retrouve à jouer un peu tôt à notre goût (faut dire qu’on a des critères d’esthètes) ; mais point d’amertume, on espère juste les voir convaincre (et accessoirement écrabouiller) un public de curieux venu très bien remplir cette chère Valley. Ces imbéciles de musiciens, plutôt que de dégainer un assez traditionnel (et efficace) “Hail” en intro s’engagent direct sur le rêche et sablonneux “Worship”, une belle pièce sanguinolente d’un bon quart d’heure ! Sur un set de 40 minutes la démarche frise l’indécence… Surtout que, bêtes à bouffer du foin, les gaziers complètent leur set avec uniquement un second titre étiré sur presque 20 minutes, le très gras “Endless”. Heureusement, malgré ces choix anti-commerciaux au possible, les gars convainquent le public par un jeu de scène dynamique et exubérant… Errr, non, même pas – pendant tout le set, les zicos sont dans leur trip quasi-nombriliste, il n’y a même pas un pied de micro pour dire “bonjour les copains” entre deux titres (5 grosses minutes de feedback bien gras font les meilleures transitions, c’est bien connu), rien que la lourdeur du riff. Et bon sang, ça écrase. La puissance du quatuor anéantit une Valley qui headbangue la bave aux lèvres… Exsangue, on ressort de ce set lessivé, un vague sourire en travers de la bouche en essayant déjà de se remémorer ce qui vient de se passer… Un TRÈS gros moment de cette édition.
BLOOD CEREMONY
Vient le tour de Blood Ceremony et son mélange étonnant de folk rock, d’acid rock version occulte et de hard rock. Fagotés comme des musiciens progressifs des années 1970 (flûte traversière comprise), leur son étrange perd un peu l’auditeur, mais la prestation était tout de même intéressante, ne serait-ce que pour la différence qu’elle offrait par rapport aux autres groupes…
MARS RED SKY
Cocorico ! Les frenchies de Mars Red Sky investissent la scène pour délivrer un set stoner psychédélique typiquement 70’s ! Le trio bordelais est là pour en découdre, et le public venu les applaudir se laisse happer par le déluge sonore qui les emmène planer dans les sphères aériennes. On sent qu’ils sont contents d’être là, et ils gratifient même le public clissonnais d’un nouveau titre.
CHELSEA WOLFE
Assurément le concert de Chelsea Wolfe est très très très attendu par le public de la Valley, fidèle au poste. La Californienne vient défendre son nouvel album, inclassable, mélange de doom, de folk et d’electro ambient. Une prestation pleine de tristesse, un peu poisseuse, qui aura ravi les dépressifs. « Pain Is Beauty », tiré de son dernier album, suffit à donner l’idée.
PRIMUS
Encore une fois, la Valley se trouve l’hôte d’un “ovni” musical qui ne trouve sa place que sur cette scène propice aux sonorités les plus expérimentales et barrées. Alors évidemment, le stonerhead de base aura passé son chemin et profité de la large pause à rallonge (l’enchaînement avec la brune éthérée qui a précédé le trio californien aura permis aux moins éclectiques de se faire une bonne pause repas tranquille pour commencer la soirée). Cela n’empêchera pas un public de curieux, de musiciens (ça “tricote”, sur scène…) ou de nostalgiques de venir assister à la quasi-résurrection du trio déjanté de Les Claypool (même si Primus ne s’est jamais vraiment arrêté de jouer, 90% de leurs prestations se font dans le confort de leur mère patrie). Malheureusement, le concert déroule très vite une arrogance qui nous refroidira un peu (reconnaissons que ça fait une vingtaine d’années qu’on n’a pas vu la formation de San Francisco, et le choc est brutal entre le groupe accessible de joyeux rigolards de l’époque et le trio pompeux et hautain qui se présente devant nous dans la pénombre de lights sur-travaillés). On n’assistera pas à la fin du set, persuadés toutefois que le groupe a délivré une performance à la hauteur de leur talent. Mais ça nous aura laissé froid.
SLO BURN
Après une journée bien remplie de formations représentant toutes les tendances de la scène, et même plus avec Les Claypool et sa bande de joyeux lurons, John Garcia est de nouveau au Hellfest avec l’une de ses multiples formations. Nous n’allons pas bouder le plaisir qui a été le nôtre, que de se taper Slo Burn live, même si la discographie homéopathique du groupe ne justifie en rien le placement des Californiens en tête d’affiche de la deuxième journée dans la Valley. D’ailleurs on s’en branle un peu de ce que peuvent penser certains vu que Garcia incarne quand-même une bonne proportion du mythe fondateur du mouvement et que Slo Burn c’était clairement le truc que nous ne pensions jamais voir sur scène. Le frontman avait pourtant déjà occasionnellement interprété des titres de ce projet éphémère (comme ils disent sur Wikipédia) lors des prestations live qu’il multiplie depuis son retour aux affaires sous de multiples appellations. Excités comme de jeunes pucelles le soir du bal de promo, nous trépignions d’impatience aux douze coups de minuit pour voir la légende. Nous étions nombreux dans ce cas, mais la Valley n’était pas pleine, autant se l’avouer même si c’est douloureux au niveau du postérieur. Le quatuor emmené par sa star a balancé le film d’intro (à l’iconographie pachydermique) avec une grosse poignée de minutes de retard puis il a envoyé son répertoire officiel et officieux dans la foulée. Nous avons humidifié nos petites culottes sur certaines masterpieces (« July » ou l’incroyable « The Prizefighter » par exemple), mais avons aussi été ramenés à la réalité en constatant que le leader vêtu de sa chemise noire était un chouia à la peine sur certains titres. Le groupe a certes rempli son contrat, mais il aurait pu se montrer plus aventureux en insérant autre chose que de l’instrumental comme nouveauté (ils répètent ensemble depuis un moment selon leurs dires) voire en proposant une vraie heure de concert puisque c’est cinq minutes avant la fin officielle que les lumières se sont éteintes sur la scène de la Valley. Malgré le ressenti un poil mitigé de types qui deviennent exigeant avec les années, les spectateurs présents dans la place pourront se targuer d’avoir vu Slo Burn lorsqu’ils raconteront leur jeunesse à leur descendance.
« July » résonne toujours dans nos crânes quand nous rejoignons notre véhicule dans la nuit moite pour aller décharger la multitude de cartes-mémoire qui nous permettra de prolonger, avec vous, cette journée de festivités à la gloire du riff démoniaque.
Cette année encore la programmation du Hellfest dédie une scène entière (et la presque exhaustivité de sa programmation sur 3 jours) à des genres musicaux qui trouvent généreusement écho dans les pages de Desert-Rock toute l’année. Et c’est donc tout aussi naturellement que nous avons à nouveau pris nos cliques, nos claques, nos bloc notes et nos appareils photos pour vous faire partager à nouveau cette expérience pour un gros week-end encore une fois marqué par le lourd soleil, et l’ombre bienveillante de notre scène fétiche, la Valley…
VERDUN
C’est aux français de Verdun que revient l’illustre mais lourde tâche de lancer les hostilités sous cette tente qui va accueillir la plupart de nos pérégrinations ce week-end. Sacrée pression, d’autant plus que la tente est très correctement remplie pour un début de festival (l’occasion de rappeler les progrès énormes accomplis par l’organisation dans l’accueil du public, qui a pu pénétrer sur le site bien plus rapidement que l’an dernier). Avec sérieux et concentration, les montpelliérains entrent dans la bataille avec la rage que leur confère intuitivement leur patronyme. Lourdeur des riffs et torpeur naissante d’une atmosphère de canicule se marient à merveille pour faire headbanguer un public attentif mais encore un peu apathique (il s’économise peut-être ?). Sur scène c’est carré, bien fait et ça sonne – mention particulière pour cette frappe de mule, qui martèle même des passages limite tribaux pour appuyer des rythmiques bulldozer, voire martiales. Cette lenteur patibulaire déchirée de toutes parts par ces hurlements terrifiants finissent de convaincre une assistance qui repart avec le sentiment que décidément, ce week-end, ça ne sera pas que de la déconne.
OKKULTOKRATI
Cherchez l’intrus… Aujourd’hui, c’est un peu Okkultokrati qui joue un peu l’anomalie sur cette affiche. Les talentueux hybrideurs musicaux norvégiens, signés chez Southern Lord, proposent un metal lugubre percé de saillies doom, punk, post metal ou même black metal, qui aurait peut-être plus trouvé sa place dans une scène voisine (Altar ou Temple) mais il y serait quand même apparu décalé… Reconnaissons à la Valley cette vocation d’ouverture musicale ! Une ouverture pas complètement valorisée pour ce set qui se joue devant une tente moins remplie que pour Verdun. Pour autant les scandinaves ne déméritent pas : la formation est bien en place mais ça ne suffit pas et le public ne fait pas montre d’un enthousiasme débordant. Prévisible.
NOOTHGRUSH
Tandis que les gradients de température augmentent inéluctablement sur Clisson, l’atmosphère sous la Valley prend un tour franchement glauque avec l’arrivée des californiens de Noothgrush. Enfin, “californiens” peut prêter à confusion ici : n’imaginez pas une poignée de bellâtres aux longs cheveux blonds, shorts et chemises hawaïennes ; Noothgrush vient d’Oakland, banlieue pauvre de San Francisco, port marchand et friche industrielle occasionnellement lugubre, dont la crasse vient couler sur chaque mesure de ce graisseux quatuor. C’est sale, c’est lourd, les riffs s’enchaînent lents ou tortueux, et le chant du longiligne Dino Sommese vient lacérer chaque chanson, jouant du guttural comme du hurlement perçant. La batterie de l’étonnante Chiyo Nukaga enfonce chaque titre avec l’effet d’un marteau piqueur martelant nos innocentes cages à miel… Les glaireux “Useless”, “Hatred for the species” ou le lourdingue “Oil Removed” font leur petit effet sur les cervicales des premiers rangs. Il faut dire que la tente est correctement remplie, et le public encaisse chaque titre comme une nouvelle mornifle, sans vraiment comprendre complètement ce qu’il se passe. Très bon, mais quelque peu déstabilisant. Sortir de la tente après un set aussi gras et lourd pour regagner ce soleil incandescent et ce ciel bleu insolent s’avèrera perturbant. La redescente est rude.
SUBROSA
Originaire de l’Etat mormon de l’Utah, SubRosa n’en est pas à son coup d’essai au Hellfest : en effet, le groupe emmené par Rebecca Vernon s’était déjà produit à Clisson en 2014. Pour sa deuxième prestation en terres nantaises, le public s’est déplacé. Peut-être pas en masse, mais la foule amassée sous la Valley est tout à fait honorable pour cette heure de la journée, où beaucoup préfèrent cuver leur gnôle de la veille au camping. Premier bon point et qui montre que l’on a affaire à un groupe sérieux : ici, pas de connards déguisés. Le public se partage entre ceux qui préfèrent s’allonger et vibrer au rythme de la musique et les aficionados, debout, qui ne perdent pas une miette du show. Musicalement, le combo est irréprochable : venu défendre son album “For This We Fought The Battle Of Ages”, SubRosa, sur ses 45 minutes de set, ne jouera d’ailleurs que trois chansons, toutes extraites de leur dernière livraison. Des mélodies entêtantes qui ne sont pas sans rappeler une version heavy de Bjork sur lesquelles viennent danser les violons font que l’on se sent transporté, l’espace d’un concert, hors de Terre. Éloignée des canon sludge et y mêlant de éléments folk et expérimentaux, SubRosa est réellement un groupe à part, dont la musique ne peut définitivement pas laisser indifférent. Le public ne s’y trompe d’ailleurs pas et réserve un accueil plus que chaleureux aux Américains.
HELMET
Après la performance alambiquée entre doom et plans planants de la formation mixte, un petit tour dans l’enceinte du fest nous a permis de constater que le soleil continuait à taper fort sur les nombreux quidams agglutinés devant les échoppes vendant le merch du Hellfest. Les coutumiers de la fête s’y sont pris à l’avance, mais comme il y a toujours plus de coutumiers : le flot de d’acheteurs semble ne pas pouvoir se tarir alors que certains articles sont déjà sold out. Vu le monde qui flâne dans les allées, le public nombreux devant les Mainstage tout comme d’hab’ et la zone VIP hyper confortable qui ne désemplit pas, nous sommes carrément sur le cul de devoir batailler pour nous frayer un passage sous la tente de la Valley. Ça coince de partout et la fosse à photographes affiche complet alors qu’il est l’heure du goûter : difficile dans ces conditions de se la ramener pour contester la présence des Etasuniens, pourtant assez éloignés du registre musical déployé durant ces trois journées. Les vétérans US bourrins déferlent tels des bulldozers écrasant tout sur le passage. Un carton plein avec des extraits datés de leur répertoire et quelques passages intéressants piochés dans leur toute récente discographie (comprendre « Dead To The World »). L’énorme final sur « In The Meantime » (What else ?) a foutu tout le monde d’accord.
RED FANG
Habitué du Hellfest auquel elle est quasi abonnée, la formation américaine Red Fang est de passage sous la Valley pour défendre son dernier opus en date, “Only Ghosts”, sorti en 2016. La tente est surpeuplée et il est difficile d’y rentrer. Beaucoup se contenteront donc de regarder le set via l’écran géant habilement placé à l’entrée. Le combo livre une prestation exemplaire, époustouflante de puissance et d’efficacité. Privilégiant les morceaux concis et efficaces, Red Fang emporte l’adhésion d’un public venu en masse l’applaudir. Les slams sont légions tandis que le quatuor mené par Bryan Giles enchaîne frénétiquement les tubes stoner sans laisser au public le temps de se reposer ne serait-ce qu’un instant. La lessiveuse tourne à plein régime et laisse un public exsangue, épuisé, mais ravi.
BARONESS
Une drôle de succession de groupes proches de la scène stoner aura marqué cette première journée qui faisait la part belle aux formations populaires chez les hipsters et autres bobos récemment convertis au stoner ou à ses proches satellites. Au passage, on notera qu’une inversion de Red Fang et de Baroness aurait été plus logique selon notre lecture ; toujours est-il que c’est les seconds qui occupent une place de choix dans le running order du jour. Forcément rehaussée des illustrations fantastiques de John Dyer Baizley, la prestation du quatuor US en jette visuellement et les Lourds Of The Valley fantasment en matant la nouvelle guitariste Gina Gleason qui touche plutôt bien sa bille à la guitare en plus d’être un joli brin de jeune fille au crâne à moitié rasé. Côté setlist on a droit à une partie de l’arc-en-ciel discographique de Baroness plutôt du côté mou de la force avec une surpondération de « Purple ». Les deux hits groovy de la mort qui tue que sont « Take My Bones Away » et « March to the Sea » ayant constitué le point d’orgue d’un show qui ne fera, hélas, pas partie de nos meilleurs moments du week-end.
ELECTRIC WIZARD
Plat de résistance de la Valley le vendredi soir, le légendaire combo doom metal Electric Wizard arrive en terrain conquis. Plus que bourrée ras la gueule, il règne une chaleur infernale sous la tente. Lumières rouges et vertes, ambiance lugubre et lourdeur sont au rendez-vous pour un set placé sous le signe de Satan. Cependant, si le public semble ravi, l’on a du mal à accrocher à un concert qui enfile les poncifs du genre comme des perles. Il en va de même côté set list, où le groupe nous propose peu ou prou le même concert depuis des années (aucune surprise, leur top 10 tourne en mode automatique : “Satanic Rites of Drugula”, “Witchcult today”, “Return trip”, “Funeralopolis”, …). Zéro prise de risque. Peut-être que si tous les riffs du groupe n’étaient pas des riffs de Black Sabbath injectés de Tranxène, ce serait artistiquement plus intéressant. Cependant, l’audience ne boude pas son plaisir et fait savoir son approbation au combo britannique.
MONSTER MAGNET
L’air de rien, ça faisait assez longtemps qu’on n’avait pas vu la bande de l’aimant monstrueux sur nos terres, et les voir se rappeler à notre souvenir en headliner de cette première (superbe) journée sous la Valley nous ravit. Côté ambiance, leur dernier passage au Hellfest nous revient très vite en mémoire, le groupe ayant cette fois encore eu la main plutôt lourde sur la machine à fumée. Perdus au milieu de ce dense nuage, le quintette (au line up inchangé ces dernières années) prend la scène derrière un Dave Wyndorf qui marque très vite les esprits : très aminci, le fringuant frontman nous rappelle avec émotion sa fougue du début des années 2000 ! Souriant, plein d’énergie, entraînant, interagissant constamment avec son public, incarnant chaque titre avec passion, il s’affirme à nouveau comme le frontman que l’on a connu par le passé. Et les autres ne sont pas en reste : loin d’un vulgaire backing band, chacun fait le taf et assure une présence scénique plus ou moins outrecuidante (entre les poses guitar hero et le travail rythmique de besogneux, on trouve de tout). En tout cas on ne s’ennuie pas et le groupe est généreux.
Côté set list, pas de grosse prise de risque – il faut dire qu’avec un tel répertoire, difficile de se planter avec des perles comme “Dopes to Infinity”, “Tractor”, “Negasonic Teenage Warhead”, “Look to your Orb for the Warning” ou même un plus rare “I Want more” très efficace en live. Pas franchement de surprise, le groupe se la joue un peu facile… mais quelle efficacité ! Ils terminent néanmoins un peu en eau de boudin, plus de 5 minutes avant la fin, en laissant leurs instruments ronronner dans le noir, laissant le public penser qu’ils reviendront… ce qu’ils ne feront pas, provoquant quelques sifflets plus frustrés qu’énervés. Un très grand Magnet ce soir, et plus globalement la promesse de nouvelles années fastes dans la carrière du groupe.
Crevés mais le sourire aux lèvres, on quitte le site clissonais sous un ciel clément et étoilé avec la perspective de deux autres journées que l’on n’ose espérer de la même qualité. En attendant, on va essayer de grapiller quelques heures de sommeil…
Bien aidés par un tour support probablement bien appréciable de leur écurie Relapse, les américains d’Ecstatic Vision reviennent nous rendre visite, avec notamment une grosse demi-douzaine de dates en francophonie.
C’est aux français de Yeti Lane de lancer les hostilités au Void ce soir, devant un parterre assez… discret. Le dimanche soir, quand il fait beau, le bordelais préfère manifestement rester le cul dans son fauteuil élimé pour comater devant l’inspecteur Barnaby plutôt que de lâcher une poignée d’euros et prendre un pied dont il se souviendra souvent…
Mais bref, Yeti Lane donc, duo parigot qui, s’il ne brille pas par le dynamisme débridé de son jeu scénique, force à l’admiration par sa musicalité : les plans instrumentaux spacy s’enchaînent sur une grosse demi-heure de set, faisant penser à un Mars Red Sky un peu plus planant, baigné de nappes et claviers tendance électro. Sympa et efficace.
Enfin, on est quand même venu pour Ecstatic Vision, et grand bien nous en a pris, on en est vite persuadé. Les quatre ricains rentrent dans leur set avec un professionnalisme admirable. Devant une salle n’accueillant que quelques dizaines de spectateurs, ça force le respect ! Surtout que l’énergie du groupe ne faillira pas une seule minute sur la grosse heure de leur set.
Sur scène, le groupe envoie toujours son gros heavy rock psyché lancinant, mélangeant avec un talent qu’on lui connaît groove suintant et psychédélisme, à travers un mix faisant la part belle à l’efficacité. Chaque riff bien catchy est balancé en pâture, puis rejoué, puis rejoué encore et encore, amenant une progression et une répétition qui développent une ambiance de jam psyché punchy et groovy – une machine redoutable d’efficacité.
Tandis que Doug reste l’inébranlable frontman, lâchant souvent sa guitare pour mieux aller haranguer les premiers rangs, on apprécie aussi l’apport de Kevin Nickles, multi-instrumentisme souriant et efficace, qui ajoute une dimension fun à l’ancien trio devenu quatuor.
On retiendra un set mastoc, avec des morceaux de bravoure comme un “Astral Plane” toujours aussi épique ou encore un “Electric Step” impeccable, issu de leur nouvel album.
Bref, un set dantesque, comme souvent, qui ne fut partagé qu’avec trop peu de monde. La fête aurait été encore plus folle.
C’est devenu maintenant un rendez-vous bien établi : le dernier week-end d’avril consacre le stoner en Europe à l’occasion du Desertfest (en mode combo avec Berlin et Londres). Malgré le Brexit, nous voilà donc en ce vendredi 28 avril dans la capitale anglaise pour 3 jours de son.
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Jour 1
GRAVE LINES
Le temps de récupérer le bracelet sésame qu’il est déjà 14 heures, l’heure pour GRAVE LINES d’éclabousser les murs de l’Underworld avec leur sludge bien gras. Aucun autre groupe ne jouant au même instant, la foule est dense et compacte dans la cave anglaise. Le combo en profite pour dérouler un set d’une excellente qualité, mené par un frontman dépenaillé et en parfaite osmose avec le message misanthrope porté par la musique de son groupe. Ça commence fort.
BLOWN OUT
Le retardataires n’ayant pu se frayer un chemin jusqu’à la scène de l’Underworld se sont logiquement rabattus vers le Black Heart pour le set de BLOWN OUT qui débute à 14H45. Difficile donc en venant de l’Underworld de pénétrer dans cette minuscule salle pour le set des Anglais. Nous y arrivons pourtant et profitons pleinement de l’ambiance « planante » dégagée par la musique du groupe. Le public ne s’y trompe pas et restera dense jusqu’à la fin. Une bonne bouffée d’oxygène.
THE WELL
C’est ensuite l’heure des premiers « choix » qui arrive et nous retraversons la rue qui sépare les deux salles pour choper THE WELL à l’Underworld. Le groupe y déroule ses sonorités Sabbathiennes et le public se dénuque gentiment. Malheureusement pour les texans, le parterre est plus clairsemé qu’en tout début d’après-midi. Un set propre et bien en place, mené par une bassiste plutôt sympathique ce qui ne gâche rien au plaisir.
PONTIAK
Nous partons un peu avant la fin du set pour traverser une autre rue en direction de l’Electric Ballroom et voir Pontiak démarrer cette journée sur la scène principale. Les trois barbus n’attirent pas les foules et balanceront leur stoner « folk » devant un parterre assez clairsemé. Camden veut du gras qui tâche.
BLIND RIVER
Retour à l’Underworld pour une première claque surprise. DEATH ALLEY ayant annulé, ce sont les britanniques de BLIND RIVER qui ont hérité du créneau. Le quintette anglais n’ayant rien à perdre et tout à gagner, il met le feu à la salle dans une ambiance redneck bon enfant. Le bassiste, pieds nus, se secoue dans tous les sens cachant ainsi son visage derrière sa longue crinière pendant que ses deux compères guitaristes la jouent façon duel, se positionnant régulièrement face à face. Quant au chanteur, dans le plus pur style british, il harangue l’auditoire entre les morceaux. Le set est solide, les musiciens sont juste heureux d’être là et le public est à genoux.
1000 Mods
C’est l’heure ensuite de 1000 MODS, la sensation grecque du moment de prendre d’assaut la scène d’un Electric Ballroom bien rempli et complètement acquis à la cause du groupe. Aidés par cette interaction avec un public qui réagit à l’entame des premiers accords de chaque morceau, le groupe place la barre haut en crachant une dose élevée de fuzz à travers les amplis, prélude à une soirée du même acabit. Les cacti poussent également dans la patrie d’Ulysse.
VODUN
Le jeu de ping-pong avec l’Underworld continue et nous partons voir VODUN. Ambiance tribale sur scène avec du tissu bariolé sur les amplis, un guitariste en costume moulant et maquillé pour le carnaval, une amazone peinturlurée et peu vêtue derrière les fûts, et une imposante prêtresse black, toute poitrine et voix fluette en avant. Tandis que le guitariste parsème la musique du groupe d’interludes de « douceur », il est rappelé à l’ordre par la rugosité des frappes de la batteuse qui canalise à elle seule toute la fureur de VODUN. Le contraste visuel/musical est détonnant et ne peut laisser indifférent. Une chose est sûre, VODUN est un OVNI dans la scène stoner actuelle.
GLOWSUN
Au tour maintenant de GLOWSUN, nos amis frenchies, de monter sur la scène de l’EB pour remplacer au pied levé STONED JESUS. Le groupe à pris du l’ampleur et va mettre tout le monde d’accord. Devant une salle quasi pleine, les lillois vont axer leur set sur le dernier opus, faisant bouger les têtes et créant une mini fosse devant la scène. « The Last Watchmaker’s Grave », entre autres, aura permis ce soir au trio de se faire de nouveaux adeptes à Camden.
STEAK
De nouveaux adeptes à Camden, STEAK n’en a nul besoin. Les anglais jouent à domicile dans un Underworld plein à craquer et vont rôder leur nouvel opus, No God To Save, devant un public tout acquis à sa cause. Un set propre et solide, une grosse ration de fuzz servie par un son remarquable. Du STEAK en résumé.
LOWRIDER
C’est maintenant au tour des légendes suédoises de LOWRIDER de faire leur apparition sur la scène de l’EB, comme 5 ans auparavant lorsqu’ils nous avaient promis un nouvel album. Histoire de nous faire avaler la pilule, les TOOL du stoner jouent la carte de l’humour en parlant des 17 années d’écriture bientôt terminées pour le successeur du culte Ode To Io. Et nous balancent quelques nouveaux morceaux qui laissent présager le meilleur, comme si le seul album du groupe n’était sorti il n’y a qu’un an à peine. Bref, le public headbangue, slamme, et reprend en chœur les missiles envoyés par les 4 suédois. Emportés par cet élan, les LOWRIDER ne voient pas le temps passer et se feront couper la chique juste avant leur dernier titre : faudrait pas non plus déborder sur l’horaire, d’autant que les nordiques sont connus pour leur amour du retard !
SLO BURN
Après le set des suédois, et au vu du nombre de personnes présentes à l’EB, nous préférons la jouer prudent et faire l’impasse sur THE PICTUREBOOKS afin d’avoir une place de premier choix pour les légendaires SLO BURN. Cela fait maintenant 20 ans que le groupe s’est fendu de son unique EP quatre titres, et voilà enfin une chance de les voir live. Le SLO BURN original et originel fait donc son apparition et va dérouler son répertoire 1H15 durant. Damon Garrison déchire à la basse tandis que Garcia, manifestement en forme au niveau vocal, va hypnotiser l’auditoire. Seul bémol à l’affaire, une gente demoiselle est obligée de venir sur scène entre chaque titre pour scotcher les paroles du titre suivant devant le chanteur (ce dernier aura beau nous dire que le groupe est là spécifiquement pour nous, on ne peut s’empêcher de penser qu’il se fout de notre gueule et qu’il aurait pu réviser un peu, d’autant que le date est annoncée depuis plus de 2 mois). Cela n’enlève rien à la qualité du set et à la réaction monstrueuse du public sur « Cactus Jumper », « July » ou « Pilot The Dune », morceau qui vient clôturer cette première journée 2017 de la plus magistrale des façons.
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Jour 2
SONIC GYPSY
Beaucoup de monde afflue à l’Underworld pour les vétérans de SONIC GYPSY, bande de copains qui profite pleinement d’être le seul groupe jouant à cette heure indue. Au programme, une grosse demi-heure de rock’n’roll, blues, bottleneck et harmonica, avec une touche de ROLLING STONES. Juste ce qu’il faut pour un réveil en douceur après la journée précédente.
MONOLITHIAN
Malheureusement, entre temps, le Black Heart s’est rempli et il est quasi impossible de pénétrer dans la minuscule grotte pour le set de SAMAVAYO. Nous ne profiterons que de deux morceaux, coincés dans l’escalier avant de repartir pour nous planter devant MONOLITHIAN, duo basse/basse batterie pour lequel la parité homme/femme ne sert pas à apporter douceur et finesse à la musique. C’est lourd, gras et… monolithique. Et ça tranche furieusement avec l’ambiance gypsy d’il y a à peine une heure.
BRULE
Passage rapide à l’EB pour checker des GROUNDHOGS qui ne vont pas nous convaincre et retour rapide au Black Heart pour BRULE qui démarre son set devant une salle à moitié remplie. Le son est gros, et le chanteur en forme. Les londoniens balancent leur heavy doom avant-gardiste devant un public visiblement ravi d’être là. Une prestation solide.
BRUME
A une rue de là, et à une lettre de différence, BRUME prend possession d’un Underworld rempli à ras bord. L’ambiance scénique dégagée par le groupe conquit l’auditoire et fonctionne à merveille avec leur musique lourde et lente qui prend un volume particulier avec ce chant féminin façon prêtresse. Mais pas le temps d’apprécier plus longtemps car la légende du jour arrive bientôt.
AVON
Direction l’EB où AVON, le nouveau combo d’Alfredo Hernandez démarre son set. Légende oblige, Alfredo a le droit de jouer avec sa propre batterie, frappée du logo Duvel, casque vissé sur les oreilles (sur une casquette Duvel… merci Fabrice). Pro jusqu’au bout des doigts, le groupe va enquiller les titres catchy, allant même jusqu’à reprendre « Nova », le titre des Desert Sessions qui leur a valu leur patronyme, devant un EB qui n’en demandait pas temps et réagit au quart de tour. Un set jouissif et toujours un régal pour les yeux de voir l’ex-KYUSS malmener ses fûts.
CELESTE
L’Underworld accueille ensuite CELESTE. Grâce à son gimmick scénique, le groupe va plonger l’Underworld dans une atmosphère incroyablement apocalyptique. Toutes lumières éteintes, hormis les stroboscopes et les frontales rouges qui parent chacun d’eux, les quatre lyonnais vont dérouler leur sludge/post-hardcore et créer la sensation devant un parterre totalement hypnotisé par la furie sonore du combo. Une grosse claque.
BLACK SPIDERS
Hypnotisé, le public de l’EB le sera aussi par le rock’n’roll bon enfant et sans prise de tête des BLACK SPIDERS qui vont électriser une salle bien remplie. Ça plaisante sur scène, et ça enquille les riffs sans sourciller devant une fosse en feu. Difficile pour ceux qui ne connaissaient pas les BLACK SPIDERS de ne pas rester pris au piège dans la toile tissée par leur rock sans concession. Une deuxième grosse claque.
MAMMOTH WEED WIZARD BASTARDS
Fort de l’expérience de début d’après-midi, choix est fait de faire l’impasse sur INTER ARMA pour tracer directement au Black Heart. Profitant de l’entre deux sets, nous nous positionnons devant la scène et profiterons du set de MAMMOTH WEED WIZARD BASTARDS. Forts du constat qu’un groupe possédant un de ces 4 mots dans son nom ne pouvait être foncièrement mauvais, les anglais ont claqué les 4 histoire que l’on comprenne le sérieux de la chose. Le Cœur Noir de Londres entre en transe dès les premiers accords et la température n’aura de cesse de monter dans la salle. Après deux grosses claques, voilà une bonne grosse bûche.
SCISSORFIGHT
Direction ensuite l’Underworld pour un SCISSORFIGHT qui va impressionner, aidé en cela par une fosse exclusivement composée de fans. Nos revenants américains enflamment la foule, portés par un Doug Aubin qui sait tenir une scène et profiter de l’ambiance pour asseoir la suprématie de son groupe. Le bonhomme est juste brutal, parfaitement en phase avec la férocité de la musique de ses comparses. Et le public de reprendre en chœur, dans le micro qui leur est tendu par Doug, les hymnes que sont « Tits Up » ou encore « Blizzards, Buzzards, Bastards ». Grandiose.
BONGZILLA
Vous l’aurez sans doute compris, point de JOHN GARCIA BAND pour nous aujourd’hui. Et point de TURBONEGRO également. Direction au bar de l’Underworld pour commander une Trooper (bien dégueulasse au passage) et revenir pile devant la scène avant l’arrivée de BONGZILLA. Quand les chantres du chanvre arrivent enfin, la salle est pleine à craquer (on doit certainement refuser du monde à l’entrée) et malheureusement privée du droit de… fumer des cigarettes qui font rire. Muleboy, particulièrement défoncé, promet donc au public de faire une pause clope pendant le set, histoire de se détendre un peu, avant de revenir dans l’Underworld. Il n’en sera rien. Makela et Cooter, vraisemblablement bien défoncés (surtout Makela) se rabattront sur la bière (surtout Cooter) pour assurer un set qui s’apparente plus à une répétition en public qu’à un véritable concert. Ambiance bizarre donc entre des moments où rien ne semble se passer et de furieuses transes soniques et sonores. C’est Magma derrière les fûts qui tient la baraque et évite le désastre de fort belle manière, impulsant le rythme en plantant ses yeux dans ceux de ses deux acolytes. Makela branle du manche et frise même la chute lorsqu’il tente d’escalader la rambarde pour aller larsener l’ampli qui se trouve derrière. N’empêche que même complètement stoned, le gus est transcendé dès qu’il se met en mode « bûche ». Quand ça joue, BONGZILLA est juste incroyable, et s’apparente à une dangereuse machine de guerre.
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Jour 3
WIZARD FIGHT
Point de BONGZILLA pour nous aujourd’hui, l’éloignement de la Roundhouse avec les autres spots nous aurait fait sacrifier plus d’un set. Nous restons donc autour de la station de métro Camden Town pour un démarrage de journée brutal. C’est en effet WIZARD FIGHT qui débute, et débite, au Black Heart envoyant son doom/sludge en pleine tronche de tous les lève-tôt présents en ce dimanche.
HARK
A peine le temps de respirer que HARK va écrabouiller l’Underworld avec son rock teinté de sludge. Le trio gallois, devenu il y a peu quatuor, est plutôt mal placé dans le running order mais profite de la renommée qu’il a déjà pu acquérir pour détourner des festivaliers du deuxième set de BONGZILLA. Puissant à souhait et unique en son genre, HARK s’insinue inexorablement dans les têtes, dévissant une tapée de nuques au passage.
ELEPHANT TREE
Beaucoup de festivaliers ayant fait l’impasse comme nous sur la Roundhouse, nous préférons zapper BOSS KELOID et rester à l’Underworld afin de nous assurer une place de choix pour ELEPHANT TREE. Bonne pioche puisque nous serons devant la scène pour le set des londoniens tandis que l’Underworld déborde sur les trottoirs. Quand le trio attaque, le public (ainsi que des mecs de STEAK présents en bordure de scène) est prêt à recevoir sa première gifle de la journée. Ponctuée par une version ralentie et alourdie de « Paranoid » (tout un symbole), la prestation s’apparente plutôt à un Uppercut avec un « U » majuscule, comme celui que s’est mangée Vladimir Klitschko la veille dans cette même ville. ELEPHANT TREE : les Anthony Joshua du Desertfest.
MAMMOTH STORM
Après tant de classe, et un déphasage après 3 jours de festival, une pause déjeuner s’impose. Nous revoilà fin prêt pour MAMMOTH STORM. Les vikings font honneur à leur patronyme et assomment le public du Black Heart avec un déluge de décibels et un doom sans concession. Les murs du Cœur Noir vont encore trembler et suinter le sludge pendant plusieurs semaines.
PIGS PIGS PIGS PIGS PIGS PIGS PIGS
Direction l’Underworld, attisés par la curiosité PIGS PIGS PIGS PIGS PIGS PIGS PIGS. Avec un set à la fois sonore et visuel, les anglais ne laissent pas indifférents. Portée par des riffs lourdement accrocheurs, la musique du groupe fleure bon BLACK SABBATH, à tel point qu’on s’attend presque à voir le père Ozzy débouler sur scène. Il n’en est rien : le chanteur, vêtu d’un simple short de boxe, beugle, hurle, rampe, et vit son concert. Il martyrise également son pauvre clavier qui n’en demandait pas tant. Tandis que ses acolytes tiennent la baraque à coup de riffs incisifs et de rythmiques de plomb, Matt focalise donc toute l’attention pour une prestation visuelle proche de l’orgie cradingue et répugnante. Nos sept cochons portent ainsi plutôt bien leur nom.
CANDLEMASS
Fin de journée approchant oblige, nous prenons enfin la direction de la Roundhouse et arrivons juste à temps pour le début du set de CANDLEMASS. Premier constat : l’acoustique de l’endroit est impressionnante. Deuxième constat : les vétérans doomsters scandinaves sont en forme. Le show est bien rôdé et fait la part belle aux brûlots des eighties que sont “Nightfall” et “Ancient Dreams”. Quand résonne « A Cry From The Crypt », le mot épique prend tout son sens. La Roundhouse a déjà un genou à terre.
SLEEP
Déboule enfin SLEEP. La scène est on ne peut plus minimaliste, la batterie étant littéralement coincée entre deux murs d’enceintes devant lesquels Cisneros et Pike viennent se planter. Beer belly en avant, dieu Pike décoche son premier riff. Et la terre s’arrête de tourner, le temps de s’écouler, et la Roundhouse se transforme en un volcan sur le point de se réveiller. Le trio groove comme jamais et fait trembler une capitale anglaise qui sent poindre l’apocalypse. Et lorsque retentit l’intro de « Dragonaut », l’éruption tant attendue se produit. Les riffs de Pike se répandent comme de la lave en fusion et détruisent toute trace d’humanité sur leur passage. Un SLEEP prophétique donc qui viendra ponctuer son set par l’outro de “Dopesmoker”. Ne reste plus au trio qu’à contempler la fumée qui s’élève des cendres de la Roundhouse, et planter guitare et basse devant les amplis pour un dernier larsen salvateur.
Le concept du Glad Stone Fest est une chouette initiative : c’est la fête de la musique de Glad qui, en septembre 2010, organise une sorte de mini festival avec les groupes qu’elle aime histoire de dépenser vite fait bien fait ses indemnités licenciement. Un concert unique qui en a, sans autre raison particulière que la passion, amené huit autres. Se sont alors succédés des noms aussi prestigieux ou prometteurs que Conan, Mos Generator, Midnight Ghost Train, Greenleaf, Glowsun, Abrahma, Samothrace, Stoned Jesus, Valley Of The Sun, Blaak Heat (Shujaa), Sunnata, Wheelfall, Enos ou Domadora sur à peu près toutes les scènes que compte l’underground parisien. La liste d’amis répondant présents s’est élargie et c’est désormais à Glazart qu’a lieu la 9ème édition qui a cette particularité d’être, comme les 8 précédentes, la dernière que Glad organise.
Glazart, 18h30, le temps de savourer du houblon sur la plagette et déjà les premières notes de Deliverance nous happent devant la scène. Ici pas de banjo ni de rednecks consanguins mais deux membres d’Aqme (et ex-Lazy) aux guitares, un ex-Abrahma (et actuel Junior Rodriguez) à la batterie et le chanteur de Memories of a Dead Man. Un line-up affriolant pour 45 minutes de blackened sludge bien branlé, noir comme le charbon et crasseux comme des oreilles de doomsters en fin de festival. Leur premier album vient de sortir chez Deadlight Entertainement et nous ne saurions que trop vous conseiller d’y jeter une oreille.
Eux aussi signés sur le petit mais courageux label ariègeois, Cowards, combo naviguant à vue entre sludge, musiques « post » et black metal, investit la scène ensuite. Affichant alors une agressivité saisissante, le quintet déverse rage et riffs durant son temps imparti devant un public grandissant et quelques nuques déjà se balancent avec frénésie.
Leur premier album était d’ailleurs sorti chez Throatruiner, label du chanteur de Fange qui, hasard du calendrier, prend la suite sur la scène de Glazart. Leur apocalypse sonore étreint l’assistance pour ne les recracher qu’à la fin du dernier larsen. Épique.
Seul groupe étranger de l’affiche, Wolvennest verse dans un doom planant et ésotérique. La scène emplie de bougies et de décorations occultes, le collectif (dans lequel on retrouve un membre de Mongolito et un de La Muerte) articule des riffs oscillant entre heavy lent et early black metal, dans une veine rappelant un peu Blood Ceremony. Au chant et programmations, Shazzula incante, psalmodie et embarque Glazart dans une dérive douce amère vers les abysses. Un grand, un très grand moment.
Pour clôturer, Hangman’s Chair, que l’on ne présente plus, investit la scène après un introduction sur « Ecoutez moi les Gavroches » de Renaud. Le quartet déroule alors une petite heure de son heavy rock dépressif. Piochant principalement dans This Is Not Supposed To Be Positive publié en 2016 et jouant évidemment les titres du split avec Greenmachine sorti il y a quelques semaines, dont la somptueuse « Can’t Talk », probablement le meilleur titre du groupe. Si l’on peut regretter qu’aucune chanson de Leaving Paris ne soit jouée et que juste « No Rest I’ve Found » n’ait été extrait de (A Lament For…) The Addicts, le moins que l’on puisse dire c’est que le show de ce soir était indiscutablement génial.
Vivement le Glad Stone Fest X au Zénith avec Gojira tiens.