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Dans la lignée de cette Amérique déclamée, raconté par ses poètes, à l’instar de All Them Witches, se présente à nous ce trio issu de Rochester dans l’état de New-York, officiant sous le patronyme de King Buffalo depuis 3 ans déjà. Véritable premier long effort autoproduit puis soutenu par Stickman Records en Europe, « Orion » est une véritable petite merveille, une histoire lumineuse qui, de sa première majuscule à son point final, nous emmène loin, liant notre imagination à la route sans fin de sa narration.
Première majuscule référente et floydienne de par le titre éponyme « Orion », sept notes arpégées portées par un groove maître, blues en diable, qui le long de la galette portera de sa langueur les envies du trio. La force du combo réside dans sa simplicité. Il étire de manière limpide de petites idées mais qui, par un équilibre juste, prennent une ampleur savoureuse. On se laisse aisément bercé par les grands espaces déployés au travers de compo telle que « Sleeps on a vine », chauffé par la chaleur de la voix, élevé par la guitare étoilée, rassuré par le touché permanent de cette basse subtilement mise en avant. Un guide à la force tranquille.
Il y a chez King Buffalo ce petit sens du détail qui lui permet de toujours rendre une évidence moins accessible, moins directe qu’elle n’y paraît. Le traitement d’un son, l’ajout d’une mesure, une inflexion vocale, tout un ensemble de micro-points qui font de chaque écoute une redécouverte.
Arrivé, comme ça, quasiment de nulle part, King Buffalo livre un premier long effort bluffant. Un voyage simple, attachant, d’une qualité rare à ce niveau. Un voyage de trois quart d’heure aux creux d’éléments blues, psychédéliques et de stoner aérien. On est tout émoustillé à l’idée de les suivre, de pouvoir les voir un jour sur scène et on ne saurait que trop vous conseiller d’en faire une de vos écoutes de chevet en cette année. Ne nous privons pas de regarder le ciel quand l’occasion se présente, « Orion » nous y invite en tout cas.

Poissard parmi les poissards, Ruben Romano traîne avec lui cette réputation de talentueux et gentil loser, depuis qu’il a contribué à enfanter Fu Manchu, qu’il a quitté dix ans après, avant le succès qu’on leur a connu depuis. Il lança alors avec son compère d’infortune Eddie Glass les géniaux Nebula, qu’il quitta là aussi après dix ans, dans des conditions pour le moins opaques. Marre probablement de se sentir impuissant derrière ses futs, le gaillard – manquant moins de ressources ou de talent que de chance et de bonne fortune dans ses décisions de carrière – décida donc il y a une petite dizaine d’années maintenant de se doter d’une six-cordes, de se caler derrière un micro, et d’initier son propre projet : The Freeks. Plutôt conceptuel au départ, l’objet se transforme progressivement en véritable groupe (à temps partiel, quand même, même s’il s’agit du projet principal de Romano), qui accoucha il y a trois ans de leur second LP « Full On », un LP qui a séduit pas mal de monde (à une échelle relativement confidentielle, la sortie du disque bénéficiant d’une distribution mondiale… à la hauteur des moyens financiers du groupe à l’époque !). A part quelques concerts sporadiquement organisés dans divers clubs sud-californiens principalement, l’activité du groupe était difficile à tracer ces dernières années… jusqu’à l’annonce de la sortie de leur troisième LP, « Shattered » ici présent, sous la bannière décidément volontariste du label italien aux dents longues de Heavy Psych Sounds.
Musicalement, deux points de vue sont possibles selon votre background : si vous connaissiez « Full On » (voire son prédécesseur, musicalement plus diffus), ce « Shattered » ne vous déstabilisera pas. Pour les autres, le CV de Romano détaillé plus haut risque de vous donner une fausse idée du groupe. Car le désormais guitariste (qui a quand même pris à ses côtés Tom Davies, bassiste renégat de Nebula et autres formations stoner occasionnellement à la recherche de mercenaires de la 4-cordes) s’est associé à des partenaires pas forcément issus des même mouvances musicales directes, notamment d’anciens (ou ponctuels) membres d’autres formations chaotiques comme Backbiter ou Roadsaw. Le mélange de cette bande de joyeux drilles en provenance d’horizons musicaux disparates (le nom du groupe – les monstres de foire, en gros – n’est pas dénué de sens…) donne donc un ensemble un peu chaotique, un patchwork de tendances et de sons. Et les bonhommes ne font même pas semblant de créer une cohérence factice à l’ensemble. Donc oui, il y a des choses qui raviront les fans meurtris et frustrés de Nebula là-dedans, directement sur certains titres (« Sylvia », ou « La tumba », qui comme « Strange Mind » et ses plans space rappelent aussi Monster Magnet) ou de manière plus éloignée sur d’autres titres qui puisent dans les mêmes sources d’inspiration, entre des bases très blues et des plans instrus très jam. Mais il faudra qu’ils acceptent de « cotoyer » sur la même galette des titres plus directs, plus rêches et pêchus : les plans quasi-punk, au son vintage bien garage, représentent une autre composante importante de la musique du groupe (« Tiny Pieces » ou « Uncle Jack’s Truck » en droite provenance de la mouvance Hellacopters, avec notamment de discrets mais jouissifs passages de piano, « I’m a mess » qu’on croirait sorti d’un album de Mondo Generator, vocaux compris…) . Le reste est constitué de titres efficaces, mélodiques, voguant dans des eaux plus hétéroclites encore (« Where did you go », le presque 50’s « The Space Bar »…).
Passée l’éventuelle surprise de se voir baladés musicalement dans tous les sens, force est de reconnaître que nos Freeks ont bien soigné leur production, et que leurs compos, même si parfois un peu décousues, s’y entendent dès lors qu’il faut sortir le riff qui va bien ou le solo qui déchire. Tout ceci est parfaitement outillé, et interprété avec talent.
Il ne reste donc qu’à espérer que ce nouveau label et sa distribution/promotion plus performante (l’impact très modeste de « Full On » avait sans doute pâti du manque de moyens d’un Romano seul derrière les manettes de son propre label, créé un peu à l’arrache…) donne un nouvel essor à The Freeks, un groupe au statut underground qui mérite clairement mieux. Et avec un peu de chance, ça permettra même peut-être de les voir venir souiller les scènes live européennes ? On n’espère rien de moins.

Howling Giant présente donc son « Black Hole Space Wizard part.I » et on est plutôt content qu’il le fasse. Le trio américain tease velu son savoir-faire au travers de 4 titres assez disparates mais tous parfaitement composés et exécutés.
Au fil du EP on va penser Elder, The Sword, Kvelertak. De par sa durée, la mini-galette évite l’écueil du « fourre-tout » mais les américains seraient bien inspirés de trouver une ligne esthétique qui leur soit propre. Pas sûr en effet que les multi-références tiennent la route sur un effort plus long.
Reste que cette première partie nous met en haleine. Mélodiquement le trio est un expert en la matière, il blaste comme il faut quand il faut et sait faire monter la sauce quand la salade en a besoin. Aucune raison de mettre en exergue un des quatre titres puisqu’ils sont tous excellents. Fracassez donc vos tympans experts sur la galette de Howling Giant, vous ne le regretterez pas.
« This is not the end » comme ils le disent si bien.

Soufflé je fus lors de la publication, l’année passée, du premier opus d’Holy Serpent, quatuor de skateurs Australiens à peine pubères et sortis de nulle part. Leur musique, mêlant fascination pour Sleep, intérêt pour les mondes alternatifs et riff de pachyderme, avait fait tilter les amateurs les plus éclairés de sons plombés. Ma chronique enthousiaste se finissait d’ailleurs sur cette question : « Avons-nous affaire à un one shot ou à un groupe amené à compter dans un futur proche ? ». Temples, second volume d’une belle discographie en construction, apporte à mes interrogations une éclatante réponse. Car Holy Serpent a fait encore mieux. Affranchi de ses plus évidentes influences, servi par un son de mammouth (quelle prod’), ce disque pousse plus loin encore la mixture du groupe, entre ciel et terre, vocaux planants et rythmique implacable, moment fuzzés et lourdeur doom impitoyable.
Cinq nouveaux titres donc et rien à jeter, de l’impitoyable « Purification By Fire » à « The Black Stone » et son parfait dosage entre son clair et saturation totale. On retrouve, de ça de là, un grain de folie non sans rappeler Cathedral, et toujours ce travail vocal que l’on croit bien emprunté à Uncle Acid. Le résultat, relevé par une prod bien plus massive que sur le premier album, est saisissant, faisant des miracles sur « Sativan Harvest », titres aux accents de blues post apocalyptique (jusqu’à un final aux violons, improbable mais bienvenu). Tout ici suinte le doom surfuzzé aux relents de rock acide, équilibre parfait, le yin et le yang, caresses et mandales.
Par bien des aspects la trajectoire d’Holy Serpent me rappelle Elder, jeunesse insolente et musique incroyablement mature, garçons dans le vent à qui tout réussit. Mais ces derniers ont su très vite s’exporter et envahir clubs et festivals, espérons qu’Holy Serpent eux, auront la possibilité de bientôt sortir de leur île.
Point Vinyle :
En sus de 30 test press (évidemment) déjà introuvables, Riding Easy a fait presser Temples en quatre éditions : Une clear (100 ex), une Opaque Majijuana Green (300ex), une gold (500ex) et une noir, classique.

Sobrement nommé II, voici le second album des polonais de Weedpecker.
Varsovie n’est pas spécialement réputée pour ses groupes de stoner rock mais voici bien l’exception qui pourrait tout changer. Après un premier album de qualité les quatre compères confirment et de fort belle manière les espoirs qu’ils avaient fait naitre.
D’un premier abord cela sonne un peu psyché et bluesy par moment sauf que le tout est relevé d’une pointe bien heavy et de riffs que ne renieraient pas des groupes réputés plus lourds. Bref un joli mélange parfaitement dosé et maitrisé qui donne un résultat très convaincant. Wyro et Bartek aux guitares, l’un jouant sur un mode bien gras et l’autre plus psyché, s’accordent à la perfection et nous livrent une prestation réellement prenante et intéressante. Les solos de l’un répondent à la rythmique de l’autre, la combinaison des deux étant la colonne vertébrale des compos du groupe. La basse et la batterie accompagnent le duo sans pour autant s’effacer et l’ensemble est d’une cohésion bluffante. 7 titres pour 42 minutes qui passent en un instant et qui une fois terminés, vous donne juste enfin de repartir du début.
Leur premier album m’avait fait attendre le second avec impatience, autant dire que l’attente est encore montée d’un cran pour le troisième qui je l’espère, ne tardera pas trop.
Un album qui s’écoute sans modération et sans lassitude, un vrai petit bijou.
A découvrir sur Bandcamp
Le point vinyle :
Comme toujours chez Pink Tank Records les albums ont le droit à un pressage sur galettes à l’ancienne.
Vinyle blanc mate (180g – 100 copies)
Vinyle noir (180g – 300 copies)

Après un album et quelques EP pas mauvais mais néanmoins discrets (labels approximatifs, tournées essentiellement en anglophonie, avec quelques timides embardées européennes en premières parties de groupes dans d’autres veines musicales…), avec un succès plutôt barycentré du côté de l’Oncle Sam, on n’entendait pas vraiment beaucoup parler de Crobot depuis la naissance du groupe. La double conjonction de deux phénomènes a vu leur notoriété prendre un essor certain sur nos terres : leur prestation remarquée (et remarquable) au dernier Hellfest, ainsi qu’une signature chez Nuclear Blast pour leur dernier album. Welcome to Fat City, donc, disque à l’artwork pour le moins dispensable, déboule sur nos platines et dans nos oreilles dans un contexte plutôt favorable… même si l’on est toujours circonspects à l’approche d’un « nouveau groupe » dans l’écurie Nuclear Blast, en tout cas dans son registre « vintage hard rock » qui voit dans ses rangs évoluer les groupes les plus déplorables comme les plus intéressants, et toute une palanquée entre ces deux extrêmes (petit jeu, à vous de classifier à votre convenance les groupes Nuclear Blast suivants dans chacune de ces catégories : Kadavar, Blues Pills, Orchid. Vous avez 10 secondes).
Bref, on s’attèle à la tâche sans trop de difficulté, et rapidement, la première évidence se dessine très vite : le côté accrocheur des compos est indéniable, une bonne moitié des chansons étant déjà bien ancrées en mémoire après quelques écoutes seulement ; la seconde moitié ne mettra pas longtemps derrière à atteindre le même objectif. Un vrai talent d’écriture, donc, que l’on voulait mettre en avant, point fort absolu de ce combo. Au-delà, le genre musical déployé se détache aussi un peu de l’armada de groupes typés hard rock 70’s (dont les sus-mentionnés) : Crobot apporte non seulement au genre une prod toute « americana » qui pète bien, mais surtout une approche hard rock qui pioche fort dans les 80’s, je m’en-foutisme désinvolte en bonus. Leur approche outrancière complètement décomplexée contribue franchement à l’adhésion de l’auditeur : on se prend vraiment à sourire au fil des titres, toujours fun, se frottant dangereusement à la limite du « too much » sans jamais la franchir. Musicalement, aucune barrière donc, on baigne en plein revival hard rock 70s (vieux Whitesnake ou Aerosmith) mais aussi 80s (Twisted Sister, Skid Row – on croirait d’ailleurs souvent entendre Sebastian Bach au chant), un mix très cohérent à l’écoute, lié par une grosse dose de groove (à l’image de quelques plans de gratte presque « funky »). De cet ensemble plutôt plaisant à l’oreille, se détachent quelques titres (« Play it cool », le single « Not for Sale » au refrain imparable, ou encore le refrain « à étages » de « Blood on the snow ») sans pour autant compter de véritables maillons faibles sur les onze titres proposés. Sous un format resserré de quatuor (comprendre : une seule guitare pour abattre tout le taf), la prod (avec Machine aux manettes, le producteur de Clutch entre autres) se focalise sur l’essentiel, et, légitimement, Brandon Yaegley, vocaliste / performer en chef, surnage dans un mix impeccable par ailleurs.
En conclusion, difficile de faire la fine bouche à l’écoute de ce disque qui – ce n’est pas si courant – tient toutes ses promesses. Écriture efficace, exécution solide, prestance remarquable… Welcome to Fat City est l’album parfait pour alimenter les futures set lists live du quatuor, et à ce titre l’attente de les revoir live devient pressante. Un album très agréable, pas prise de tête, pas prétentieux… mais certainement pas révolutionnaire ; ce n’était de toute façon pas son ambition.

Six ans que l’Asteroid n’avait pas traversé franchement le ciel de la galaxie stoner. Rien depuis six ans donc, mis à part une rapide apparition au détour d’un split 7″ en 2012.
La présence du groupe à l’affiche du Desertfest en début d’année laissait cependant bien présager un retour du trio suédois. Il n’aura pas fallu attendre très longtemps pour voir débarquer ce III, digne successeur du II qui a tourné (et qui tourne encore) longuement sur nos platines.
Le groupe démarre en douceur, dans l’obscurité lyrique de « Pale Moon » et de ses guitares plaintives. Vient ensuite le classique et doux « Last Days » qui nous rappelle le bon vieux temps et nous rassure un brin sur la forme du trio suédois : Asteroid a toujours le sens du riff, du groove, et sa musique est toujours marquée du sceau de la bivalence vocale Johannes Nilson/Robin Hirse.
Vintage visuellement, le groupe l’est également musicalement. L’ intro de « Til’ Dawn » fait monter la pression d’un cran supplémentaire : porté par un riff à la fois tranchant et rond puis par une voix rocailleuse, le morceau nous emmène allègrement vers « Wolf & Snake », véritable pivot de l’album (au sens propre comme au figuré). Construit autour d’un riff simplissime, le morceau profite de vocaux éraillés et d’une fu(zz)rieuse ligne de basse pour créer un mélange détonnant, véritable quintessence du savoir-faire suédois.
III bascule alors vers un final beaucoup plus aventureux. Hormis l’interlude aérien et mélodique « Silver & Gold », ce sont en effet deux brûlots stoner qui viennent clore ce nouvel opus. « Them Calling » tout d’abord, invitation-incantation à rejoindre le groupe aux portes de l’enfer témoigne d’un Asteroid au sommet de son art. Une intro simple et efficace qui ouvre naturellement sur un étalage de fuzz, et un refrain chanté de façon binomiale donnent au morceau une profondeur abyssale pour l’ériger en véritable hymne de ralliement.
C’est alors « Mr. Strange », septième et dernier titre de cet album, qui se charge de faire redescendre légèrement le rythme des palpitants et de disperser les troupes. Très axé seventies au départ, le titre profite d’un riff plus “moderne” et ciselé à la perfection pour basculer vers un stoner “contemporain” sur son final.
Le groupe suédois n’a donc absolument rien perdu de sa fougue, et possède toujours autant de classe. Seul (léger) bémol, ce nouveau passage de l’Asteroid dans la galaxie stoner ne dure que 36 petites minutes. Raison de plus donc pour ne pas rater ce III qui devrait figurer en bonne place dans de nombreux tops de fin d’année.

Depuis qu’il s’est libéré de Down, Kirk Windstein consacre toute son énergie à ce qui a toujours été le projet de sa vie. Crowbar, son esprit sludgy, ses vocaux hardcore, ses mélodies catchy et sa fleur de lys, celle de la Louisiane évidemment. Crowbar c’est un style, incarné et souvent imité (et parfois égalé, soyons honnête), c’est une recette, formule magique resservie jusqu’au fond du chaudron tout du long de 10 albums certes inégaux mais très rarement décevant. Et qu’on se le dise, en 27 ans de carrière c’est un fait suffisamment rare pour être signalé. Faisant suite au solide Symmetry In Black, publié il y a deux ans, The Serpent Only Lies n’apporte donc rien de nouveau à l’édifice Crowbar si ce n’est, et ce n’est pas rien, 10 nouvelles raisons de reprendre de la soupe, et la chaudron dans les dents, par la même occasion.
Windstein lui même l’a confessé, pour cet album il a essayé de retrouver les ambiances de la fin des années 90, de faire revenir la patte hardcore, citant Carnivore ou Type O Negative dans ses influences retrouvées, voulant se rapprocher de la sainte trilogie Broken Glass / Odd Fellows Rest / Equilibrium. Évidemment, personne ici ne se plaindra de telles décisions ! Le résultat est par ailleurs plutôt probant, The Serpent Only Lies faisant la part belle au riffing, délaissant quelque peu les harmonies heavy des derniers albums pour se concentrer sur quelques mid-tempos qui sauront parler aux plus nostalgiques. Derrière les rouleaux compresseurs que sont « Falling While Rising » ou « I Am The Storm », un morceau lourd et poisseux, tel que « Surviving The Abyss » rappelle en effet passionnément les ambiances toxiques de « Planets Collide ». Très bonne pioche.
Il en va finalement de Crowbar comme de Motörhead : accroché à une recette aux effets assurés, ces groupes publient avec régularité des albums qui se ressemblent sans pour autant jamais lasser. J’ai de mon côté fini par lâcher le groupe de Lemmy, convaincu qu’il avait tout dit sur ses 7-8 premiers albums. Depuis sa disparition, je comble mon retard en pleurant d’avoir, tant d’années, manqué de confiance en l’un des (le ?) Dieux du rock’n’roll. Je ne ferai pas cette erreur avec Kirk Windstein et Crowbar. Alors vous non plus de déconnez pas !
Info live, Crowbar enregistre dans ses rangs le retour de Todd Strange, bassiste historique du quatuor (et du premier album de Down) qui avait complètement lâché la musique au début des années 2000. Vivement leur prochain passage européen !
Point vinyle :
The Serpent Only Lies est sorti chez E-one au states et SPV partout ailleurs. ll n’y a pas d’infos officielles qui aient filtré sur les différents styles de vinyles pour le moment mais pour l’Europe, en sus des traditionnels vinyles noir, des LPs couleur gold et limités à 200 exemplaires sont déjà disponibles sur certaines plateformes de pré-commande (Nuclear Blast, Napalm, Season of Mist).

Formé en 2015 à Budapest, Hongrie, des cendres de Devla Mufflon, Lemurian Folk Song se place dans la droite lignée du stoner instrumental et psychédélique tel que pratiqué par de nombreuses formations, Colour Haze en tête. Bence Ambrus, leader du groupe aura beaucoup voyagé (jusqu’à faire des concerts dans des caves Islandaises ou en Andalousie) et rapporté, en plus de points miles, de nombreuses expériences, à même de nourrir sa musique. Nommo, premier Ep du groupe, fait en quatres promesses que l’on espère se concrétiser. Il faudra tout de même bosser un peu la communication et s’affranchir des évidentes influences. A suivre !
Lemurian Folk Song – Nommo, disponible sur le bandcamp du groupe : https://lemurianfolksongs.bandcamp.com/releases

Je ne vous apprends rien si je vous dis que depuis quelques années maintenant déferle sur le paysage musical une vague revival 60’s/70’s. Bon nombre de groupes sont repartis aussi vite qu’ils sont venus et d’autres durent et s’accrochent. Dans une démarche plus ou moins authentique et/ou opportuniste, on a vu les catalogues des labels s’enrichir de références estampillées revival, collant cette étiquette un peu à tort et à travers, espérant surfer sur la mode et obtenir sa part du gâteau.
Où situer Slow Season dans cette pléthore de candidats à l’élection du groupe le plus authentiquement authentique et « vintagement » vintage de ce mouvement ?
Tout comme les groupes des 60’s/70’s, Slow Season c’est un album par an. Tout comme eux c’est un enregistrement sur une durée très restreinte (une bonne quinzaine) et sur du matos on ne peut plus dans l’esprit. Donc du côté de la démarche rien à redire, les quatre loustics de Slow Season ne font pas semblant et appliquent à la lettre les bonnes vieilles recettes qui ont fait leurs preuves pour tant de groupes encore adulés aujourd’hui.
Mais là où le groupe tire son épingle du jeu et peut sans aucun doute être placer en haut du panier, c’est qu’en plus les bougres ne se privent pas pour nous sortir des compos qui n’ont absolument pas à rougir face à leurs illustres ainés. Moi ça me rappelle du Four Sticks de Led Zeppelin, du Pound of Flesh de Buffalo tout en allant pourquoi pas chercher du côté de Creedence pour quelques sonorités. Certains y retrouveront une influence Sabbathienne évidente et d’autres y trouveront même une certaine originalité preuve d’une parfaite maitrise du style.
Alors bien sur je ne suis pas non plus en train de crier au miracle mais force est de constater que ce troisième opus de Slow Season s’écoute avec grand plaisir et que les 37 minutes de Westing vous feront passer un agréable moment, voir plus.
Surement une excellent porte d’entrée pour les sceptiques de ce retour un demi-siècle en arrière et une très bonne galette à se procurer pour les adeptes déjà convaincus.
Le point vinyle :
Des versions sur galettes noires, transparentes et bleues ont été pressées ainsi qu’un combo vinyle noir/CD.

Gary Arce est décidément très présent cette année dans nos oreilles. Entre ZUN et Yawning Man, le voilà qui ravive un autre de ses projets, Ten East. Vu le carnet d’adresse de ce pionnier, il est toujours intéressant d’observer de près la composition du groupe qui l’accompagne pour cette nouvelle session créative, la troisième sous le nom Ten East. On retrouve l’habitué Bill Stinson, déjà derrière les fûts chez Yawning Man. Mais voilà de nouvelles têtes, avec Erik Harbers à la basse et Pieter Holkenborg à la guitare, tous les deux en provenance du groupe Hollandais Automatic Sam. Ces joyeux drilles se sont rencontrés au Mañana Mañana Fest en 2014 où ils se sont directement mis à improviser sur scène. Visiblement, le feeling est passé tant et si bien qu’arrive ce Skyline Pressure.
Dès les premières secondes, on comprend que Arce est bien le maître à bord, aidé en cela par Harper Hug, qui était récemment derrière l’enregistrement du ZUN, et qui emmène la production clairement dans la même très bonne direction. Pour avoir jeté une oreille sur Automatic Sam, groupe plus direct que la recherche sonore intéresse visiblement, le lien est ici malgré tout peu évident. Si la basse et la seconde guitare ne sont pas en retrait, bien au contraire même dans ce mix impeccable, l’impression qu’ils se soient faits phagocytés par Arce est très forte.
On connaît la propension de Arce à rester dans sa propriété musicale bien délimitée par une haie de cactus. Les collaborations amenant pour l’auditeur un petit vent de fraicheur pour le moins, un nouveau prisme d’analyse pour le mieux. Sans parler de métamorphose, le chant en retenu de John Garcia par exemple, avait beaucoup apporté au projet ZUN, pourtant relativement classique instrumentalement.
Alors que dire de la légitimité de cette nouvelle collaboration ? Et bien d’abord que la jeunesse de l’amitié musicale qui unit le Ten East nouveau ne transparait jamais dans les soixante minutes de l’album. Il serait facile de croire que Arce est entouré d’amis de longue date, que les années à jouer ensemble transpirent continuellement. Ensuite, que le canevas proposé par les nouveaux venus est rudement bien fait. La basse sait se mettre doucement en avant avec une certaine créativité. La seconde guitare n’est elle aussi pas totalement en reste, même si elle aurait gagnée à avoir un son faisant un peu moins écho à Arce. Mais dans ce projet purement instrumental, difficile toutefois d’entendre dans les détails une réelle collaboration.
Pourtant, le morceau « Sonars And Myths » fait relativiser une partie de ce constat. Si attendus étaient les morceaux atmosphériques, celui-ci semble passer un cap en étant carrément dans le registre du contemplatif. Une vraie B.O de film possédant moins d’éléments typiques en provenance de Arce. A vos imaginaires pour combler le vide visuel. Faut-il y voir une résurgence de la matrice collaborative ? Parlons enfin du guitariste Nico Morcillo du groupe français expérimental Hifiklub, qui a participé aux trois morceaux que sont « Planet Blues », « Tangled Forest » et « Stalactite Dip ». Pour le coup, des effets de la collaboration sont là, par touches, en proposant parfois de véritables arrangements qui ressortent de façon tranchés. Clairement ce qu’il était possible d’attendre sur chaque morceau.
Le constat ne doit pourtant pas être amer. Arce reste Arce et il y a toujours quelque chose à aller chercher dans ses productions. S’il est dommage que la collaboration ne soit pas plus marquée tout au long de l’album, les quelques morceaux qui en sont imprégnés méritent en particulier une écoute attentive.

Cette rentrée automnale 2016 démarre sur les chapeaux de roues puisque 1000 Mods est enfin de retour avec Repeated Explosure To… Et, on peut dire que le titre résume très bien ce que ce troisième opus a dans le ventre.
Et oui, souvenez-vous, le quatuor grec nous avait laissé une très bonne impression avec le mémorable Vultures sorti en 2014. Pour cette troisième expérience studio, le groupe ne s’est pas reposé sur ses lauriers puisqu’il nous a concocté un véritable bijou sonore : une perle grecque qui sort vraiment du lot. Pourquoi ? Tout simplement parce que le quatuor frappe fort en réussissant à nous surprendre à la fois avec des chansons respirant la fraicheur et aussi en nous offrant un son presque unique. Oui un son unique dans la mesure où le groupe n’a pas voulu rebondir sur la vague du « Big » son Stoner que tout le monde semble savoir maîtriser de nos jours. Il a su créer un son propre à lui-même. On peut ainsi imaginer un métissage temporel entre le « british sound » style années 1970 et l’ambiance Rock des années 2010. Mais regardons de plus près ce petit monstre sonore.
Nous découvrons huit titres qui ont leur propre personnalité, que ce soit à la fois dans la prestance rythmique, sonore ou bien l’ambiance. Mais globalement, on y retrouve une énergie stimulante avec des riffs tantôt lourds, tantôt planants, un couple rythmique qui contrôle la situation avec brio et une prestance vocale sous le signe de la puissance et de la volonté hurlante. Prenons notamment le titre introductif « Above 1979 » qui incarne la mise en bouche parfaite. On comprend tout de suite où le groupe veut nous amener puisqu’on décèle ce paradoxe ambiant qui vacille entre bonnes grosses lenteurs planantes et rapidités délirantes. Puis c’est l’enchainement des titres comme « The Son », seul morceau qui se rapproche bien des précédents albums, « On a Stone » qui est le grand récital Stoner de l’opus, ou encore « Loose » : gros coup de cœur pour un morceau vivant et qui a une histoire à raconter.
Puis on découvre que 1000 Mods a gagné en maturité avec notamment « Electric Carve ». Le titre est bien rentre-dedans au départ puis d’un coup net, on se retrouve plongé dans la veille Irlande avec une rythmique excellente et changeante à souhait. « A.W » confirme bien cette énergie débordante où l’on croirait entendre un bon vieux Noir Désir, mais l’inspiration du groupe est à chercher du côté de groupes comme Sonic Youth, The Clash ou bien encore Fugazi. De manière plus large, cette déchéance de lourdeur et de lenteur toujours omniprésente sur les ponts ou même quand on s’y attend le moins ne peut que nous combler. Il suffit de tendre l’oreille sur « Groundhog day », où ce titre nous fait découvrir une facette plus acid-jazz avec toujours plus de Doom et de grosses Fuzz. Sans oublier le final explosif « Into the Spell » qui fait monter le groupe d’un étage. Car ici, on ressent véritablement l’approfondissement artistique. Cette chanson respire la maturité et nous promet un avenir prometteur pour le groupe.
C’est donc un très beau et grand retour pour 1000 Mods qui nous offre un vrai petit chef d’œuvre. Repeated Explosure To… est sans aucun doute l’album de la maturité. On ne peut que féliciter ce groupe qui mérite amplement sa place parmi les grands de la scène Stoner.

Red Spektor aime les symboles. Un simple regard sur la pochette de cet album éponyme saura vous en convaincre. Et de la même manière qu’ils franc-maçonnisent leur visuel, les anglais bâtissent leur stoner avec des techniques éprouvées, illuminatis d’un style efficace, direct mais par trop conventionnel.
Tel un serpent navigant entre compas, œil tout puissant et triangle, Red Spektor glisse ses écailles de cuir craquelé entre blues-rock, gouttes de psychédélisme et riffs poussiéreux. On pourrait ranger le trio entre Brutus et Kadavar pour peu que l’on cherche une comparaison. Efficace.
Le groupe ne cherche pas à ré-inventer le style et s’il s’approprie les codes et conventions du genre assez facilement, les compos défilent sans que l’une ou l’autre sortent du lot. Le disque s’essouffle et perd en intensité. Il faut attendre un titre comme « Black Moon Rising » pour retrouver à nouveau un intérêt certain pour le combo. Ce mid-tempo permet au groupe de se recentrer sur son propos et les intentions font à nouveau mouche. L’histoire de la voix, la justesse des solos, la réverb équilibrée, le riff rythmique martelé, c’est un grand oui qui nous pousse à garder une oreille sur ce groupe. D’autant que celui-ci termine sa galette par « Lost Soul », un titre acoustique tout aussi juste et emprunt d’un véritable respect pour ces Led-Zaînés, une fin tout en espoir.
Red Spektor est un groupe assez jeune finalement (2013, pour leur début). Ce premier long effort est au final, une promesse. Idéal pour boire des bières ou craquer des blondes en discutaillant, il contient tout de même assez de bonnes idées pour entrevoir un futur moins balisé et scolaire. Encourageant mais peut mieux faire.

Trio originaire de Montpellier, Black Witches fait dans le stoner façon cactus. Les g(riff)es acérées de ce Crows In The Skies raviront ainsi nombre de stoners.
Dès l’entame de « Buffalo », premier des 5 titres de cet EP, les contrées désertiques et poussiéreuses envahissent l’espace sonore. Oscillant entre la rugosité d’un Unida et le côté plus mélodieux d’un QOTSA, les montpelliérains débitent des bûches vitesse grand V.
Qu’ils soit instrumental (« All Robots Want To Make Love ») ou non (« Crows In The Skies »), chaque titre de Crows In The Skies fait mouche dès la première écoute. Mention spéciale à « Death By Love » qui, servi par un riff monstrueux de simplicité et d’efficacité, véritable incitation au headbanging, possède les atouts pour devenir un classique du genre.
Black Witches est définitivement un groupe à suivre avec attention.

Cagliari est connue comme une ville chaude et lumineuse du sud de la Sardaigne. Elle est également le terreau fertile qui a nourri la noirceur de la musique de The Blacktones, quatuor sludge/stoner qui sort son premier album autoproduit.
Dès le troisième titre, l’abrasif « Thousand Friends », le gang italien lâche magistralement riffs et décibels pour une furie sonore maîtrisée de bout en bout. Pourtant, réduire le groupe à un combo 100% pur-sludge s’avère être une grave erreur. Certes, la lourdeur d’un Crowbar est là, mais The Blacktones incorpore ci et là des passages mélodiques et des influences grunge (qui lorgnent vers Alice in Chains) pour créer un mix loin d’être complètement déroutant (« I’m Not Here… »).
Au final, les dix titres de cet éponyme The Blacktones passent haut la main l’épreuve d’acceptation auditive et feront, à coup sûr, connaître la Sardaigne autrement qu’au travers de la Duna Jam.
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