Karma To Burn – Live 2009 – Reunion tour (DVD)

Karma To Burn - Live 2009 - Reunion tour (DVD)

Ce DVD est sorti dans le plus remarquable anonymat ces dernières semaines, et il se fait même bien discret dans le fond des bacs de nos disquaires. Et pourtant, un DVD de Karma To Burn, voilà qui en aurait fait fantasmer bon nombre d’entre nous pendant des semaines ! Un rapide coup d’oeil au contenu du disque et déjà, la bave nous vient aux lèvres : pas moins de 3h30 de vidéos live, excusez du peu !

Comme son nom l’indique, l’essentiel de la galette propose un captage vidéo lors de la dernière tournée de reformation du trio, tournée qui a laissé des marques chez ceux d’entre nous qui ont pu les voir sur scène à cette occasion. Le concert est essentiellement filmé près de leurs terres de prédilection, en West Virginia, et est complété de onze titres glanés ici ou là sur d’autres dates ricaines. Pour remplir le DVD, le groupe a fouillé dans ses archives personnelles, pour en ressortir des perles filmées entre 1997 et 1999 : pas moins de 17 titres en rab !

Niveau qualité vidéo, rêvez pas quand même : sur votre nouveau téléviseur de 2 mètres de large full HD de la mort machin truc, ça va être limite baveux ! Franchement, le filmage est de qualité sommaire : les concerts 2009 sont filmés à plusieurs caméras, mais dans un petit club, avec peu de place pour évoluer. Il y a donc pas mal de caméras sur pied (dont une rigolote du fond de la salle, sans doute posée sur un haut parleur car elle tremble à chaque coup de grosse caisse !), quelques caméras mobiles, et le montage est assez discret. Pas une très grosse prod, c’est sûr, mais pas pourri non plus ! On peste surtout sur les éclairages minables de la salle, tout en nuances magenta bien pourraves, dommage. La prise de son est très correcte.
Concernant les vieux concerts, là en revanche, la qualitré est plus modeste : généralement une seule caméra, parfois le son est repris depuis la table de mixage, mais globalement, les vidéos ont plus valeur de témoignage que de démonstration technique ! Du travail de fan probablement. Tout à leur honneur, notons l’honnèteté du groupe, qui mentionne sur le track listing au dos du DVD que ces vidéos sont filmées avec une seule caméra ; pas leur genre d’arnaquer les fans. Ces derniers extraits filmés sont quand même bien sympas, et notamment une reprise du “La Grange” de ZZ Top avec Neil Fallon de Clutch au chant ! Autant vous dire que ça déboîte…

Au final, pour une modeste poignée de brouzoufs, ce DVD saura en donner aux fans pour leur argent, et permet à tout amateur de stoner de s’offrir un DVD live (ce qui déjà est bien rare) permettant de passer d’excellents moments à headbanger au coin du feu pendant les soirées d’hiver.

Golden Pig Electric Blues Band – s/t

Golden Pig Electric Blues Band - s/t

J’avais évoqué ce fameux ( quasiment mystérieux pour ma part jusqu’à ce début d’année 2007 ) groupe dans ma chronique de ‘Hex’ de Bigelf. Je n’étais malheureusement pas encore en possession de leurs albums ( car oui, le second vient déjà de sortir, j’adore découvrir des groupes déjà établis, ça fait toujours plus de merveilles à se procurer d’un coup ) mais la donne a changé ! Qui plus est, les températures estivales trop largement en avance cette année en font un parfait compagnon d’écoute.

Quid donc de ce fameux trio se cachant sous le nom à rallonge ‘Golden Pig Electric Blues Band’ ? Je pourrai me la couler douce et dire qu’il résume parfaitement leur musique. Mais bon, d’un, c’est faux et de deux, il faut bien que je me décarcasse pour vous donner envie d’écouter ce groupe de stoner plus qu’un autre.

Imaginez donc un trio de chevelus, un brin écolo, qui comme Bigelf, aurait comme idoles Black Sabbath et les Beatles. Comme Bigelf, la fusion des styles est plaisante, mais bien plus primitive et sauvage, les musiciens n’ayant pu museler leur coté redneck surgissant de la forêt profonde qui transparaît à la fois dans un son metal stoner/doom tétraplégique, des refrains endiablés alcoolisés et des solos sudistes pas piqués des hannetons.
Avec un tel son, on pourrait classer cet album sous la rubrique heavy rock parmi un nombre incalculable de disques, mais la particularité du GPEBB tient dans son chant. Des vocalises en chant clair, complètement bancales, qui donnent une touche attachante à leurs compositions et qui, je dois dire, a beaucoup joué dans mon appréciation.
Chaque morceau, composé de riffs hargneux et rocheux, devient une sympathique comptine décalée aux mélodies persistances dès que les voix entrent. Leur formule est tellement bien rodée que même leur reprise des tontons Lennon et Cartney s’en retrouve transfigurée, arabisée, pour un résultat des plus délectables, me faisant penser, à moi le non-fan ( oui, nous avons tous nos tares, moi c’est (entre autres) de ne pas accrocher au quatre de Liverpool ) que plus d’heavyness dans leurs classiques aurait fait de moi un amateur inconditionnel.

En jouant la carte de la simplicité et de la franchise (pas besoin de chercher bien loin leur influences tant elles sautent aux oreilles), le Pig orchestra signe un album original même si peu novateur (paradoxal ? Pas plus que faire côtoyer le Sabb’ et les Beatles à mon avis), mais surtout rafraîchissant et loin de toute ambition autre que le plaisir de faire de la musique.

Brant Bjork And The Bros – Somera Sol

Brant Bjork And The Bros - Somera Sol

Voici que nous arrive la nouvelle livraison de Brant Bjork And The Bros, peu après la sortie du mini album acoustique Tres Dias. Michaël Peffer a quitté le groupe et est remplacé par Alfredo Hernandez (ex-QOTSA, ex-Kyuss) à la batterie. Ami de longue date, il a déjà collaboré plusieurs fois avec Brant Bjork (Ché).

Sans être radicalement différents, chaque album de Brant Bjork est une pièce unique doté de son identité propre. Il est donc assez difficile d’anticiper la première écoute de ce nouvel album sobrement intitulé Somera Sol. Saved By Magic sorti en 2005 était un excellent album, celui-ci sera-t-il confirmer la direction musicale entamée deux ans auparavant ?

Turn Yourself On ouvre le bal de façon parfaite avec son rythme simple et efficace et nous plonge directement dans le bain. Agrémenté d’un solo fort sympathique qui montre à quel point l’ami Brant peut maintenant à juste titre être considéré comme guitariste à part entière, cet excellent titre laisse préfigurer de ce que sera le résultat final. Si je devais résumer en quelques mots je dirai que ce n’est pas révolutionnaire mais que c’est bougrement efficace.
L’ensemble de l’album est très varié. Tantôt calme, tantôt rock, cette variété tourne autour de plusieurs points communs : la qualité d’écriture, d’interprétation et de réalisation.
Cette variété prend tout son sens avec des titres comme Lion Wings et Blood In The Gallery. Le premier avec la présence du saxo pourra surprendre mais assurément pas décevoir. Ce titre laisse entrevoir de nouvelles possibilités. Une sorte de test grandeur nature que tente là Brant Bjork. Et que dire du deuxième, écrit conjointement par Dylan Roche et Mario Lalli, qui titille notre imaginaire en nous laissant penser qu’une implication plus importante des membres du groupe dans l’écriture de nouvelles chansons permettrait au combo de passer un cap supplémentaire.

Bref, difficile de trouver un point faible à ce disque, mais très simple de trouver dix raisons de vous le procurer (les dix titres de cet album bien sûr). Les Bros ont une nouvelle fois été capables de confirmer tous les espoirs et ont, mine de rien, laissé présager d’un avenir musical varié et riche. On attend déjà le prochain album avec impatience.

Reverend Bizarre – III : So Long Suckers

Reverend Bizarre - III : So Long Suckers

Les Transalpins de Reverend Bizarre avaient décidé de mettre un point final à leur tribulations dans le petit monde du doom après leur tournée de l’automne deux-mille-six et un album à enregistrer début deux-mille-sept. Comme mentionné sur leur site internet : ‘Christs may come and Christs may go but Caesar is forever’.
Cette troisième et ultime plaque, balancée par un moribond, était sujette à fortes spéculations auprès de la congrue communauté des amateurs de doom. Alors-là ça me troue le cul parce que non seulement ce skeud sort, mais en plus il s’agit d’un double cd qui totalise cent-trente minutes de rock suffocant et lancinant. Loin d’être en panne de verve, le trio fasciné par ce qui a trait au morbide, sort un objet homogène de bonne qualité.
Les vocalises de Magister Albert sont d’outre-tombe ; elles sont graves et distillées avec parcimonie ; elles résonnent dans la tête de l’auditeur et lui pompent son énergie vitale. C’est à ce même lascar que l’on doit les lignes de cette basse omniprésente sur les huit compositions livrées par le trio. La quatre-corde dicte les tempi lentissimes au reste de la formation et ne passe que rarement aux avants-postes le temps de quelques envolées bien compressées.
Les riffs assénés par Peter Vicar sont accordés bien au-dessous de ce qui se pratique dans le rock plus traditionnel. Ils s’enchaînent avec une extrême lourdeur comme embourbés dans le maelström musical qu’est cette production dont trois titres explosent allègrement la barre des vingt-cinq minutes. Seules quelques incursions dissonantes viennent rompre avec la monotonie orchestrée par ces Italiens.
La batterie d’Earl Of Void suit le reste de ce magma en en martelant les bases. Quelques cymbales viennent ponctuer les parties lyriques çà et là. Pour le reste, le clic est réglé sur lentissimo et le type aux baguettes peut tranquillement exercer son art sans stress…
Cet album posthume ou presque saura trouver son public parmi les adorateurs de ce style presque visqueux tant on a l’impression qu’il peine à s’emballer et les autres peuvent sans autre se faire une idée en se passant ‘Caesar Forever’ qui est certainement le meilleur titre que nous propose la bande sur cette dernière production.

Premonition 13 – 13

Premonition 13 - 13

On se fait avoir comme des bleus à chaque fois : tous les ans ou presque, Wino nous sort un nouveau disque / projet, on s’attend à une resucée, et paf ! On la prend quand même en pleine tronche. Il nous avait fait le même coup successivement avec Spirit Caravan, The Hidden Hand, Place Of Skulls. Le bonhomme s’était néanmoins un peu dispersé ces derniers temps, avec Shrinebuilder (superbe projet qui sentait bon le souffre sur le papier, mais qui s’est avéré sentir un peu le pétard mouillé au final) ou son disque « solo » un peu mou, mais bien foutu. Wino reprend donc les chemins assez balisés du gros stoner dont il a le secret pour sa traditionnelle sortie annuelle. On ne va pas s’en plaindre ! Il s’allie pour l’occasion avec un très bieux pote, Jim Karow, qui partage avec lui les guitares (et quelques lignes vocales). Le groupe s’est fait accompagner par quelques musiciens « prétextes » pour sortir ce disque sous le décidément très inspiré label Volcom Entertainment.

Même si musicalement on ne tombera pas à la renverse, on reste bluffé par le talent du bonhomme : sans jamais se détourner de son genre musical de prédiction, il parvient à nous pondre une galette variée, intéressante, sans temps mort. Une sorte de quintessence du genre, sans trop d’efforts, où les titres déroulent leurs riffs dans un flux ininterrompu, servant des titres efficaces, à la prod balaise et modeste à la fois (du gros son, mais pas de chichi). Les compos, on le répète, vont taper un peu partout dans l’historique plus ou moins récente du père Weinrich. Le riff introductif de « B.E.A.U.T.Y. » est superbe de doomitude subtile, un mélange impeccable de vieux Sabbath noir et de St. Vitus, tout comme « La Hachicera ». «Hard To say » rappelle plutôt The Hidden Hand baigné des licks de guitare infectieux de The Obsessed (et oui, Premonition 13 est l’une des premières expériences de Wino à deux guitares), « Clay pigeons » rappelle un peu de Spirit Caravan. Bref, on va pas vous la faire par le menu, vous avez compris : c’est du Wino dans le texte, et on va pas s’en plaindre. Passés ces premiers titres parfaitement réussis et assez conventionnels, le bonhomme se fait quand même plaisir avec cette paire de guitare pour pondre un gros morceau de rock n roll fuzzé (!!) avec « Deranged Rock’n’roller », ainsi qu’une sorte d’hymne pop-stoner (!!?!) avec le détonnant et naïf « Modern Man ».

Avec un peu de recul, Wino donne (à son habitude) l’impression au premier abord de se reposer un peu sur ses acquis, mais au bout de quelques écoutes, et à travers quelques titres en particulier, on note que le chanteur-guitariste se renouvelle, innove, et renforce ses acquis. Le tout en se faisant plaisir, et sans trahir sa fan base. Belle performance (et accessoirement, bel album).

Alabama Thunderpussy – Open Fire

Alabama Thunderpussy - Open Fire

Fulton Hill m’en avait touché une sans bouger l’autre. De la part d’un si bon groupe, l’album faisait figure de léger dérapage incontrôlé, notamment à cause d’un nouveau chanteur (John Weills) un peu “aléatoire”. Et bien il n’aura pas fait long feu : un album et puis parti ! Il est remplacé par le redoutable Kyle Thomas (Floodgate, Exhorder, pas une tafiole, quoi). Bingo ! Ils l’ont trouvé, le remplaçant de Throckmorton, enfin ! Effectivement, tandis que leur premier vocaliste s’imposait en vomissant ses tripes à chaque concert (et sur chaque album), avec conviction et attitude, Thomas assure, lui, essentiellement grâce à une technique imparable : dans des registres chant clair, ou bien dans des hurlements, jusqu’aux beuglements primitifs et aux râles les plus viscéraux, le bonhomme excelle (écoutez l’étendue de son registre sur “Words of the dying man”).

Les chansons défilent, et l’évolution du groupe se fait remarquable. Fini l’amateurisme, ATP devient un “gros” groupe de metal. Les compos sont brillantes, bluffantes même de qualité : les riffs sont ciselés, aux petits oignons, d’une précision et d’une efficacité que l’on n’est pas habitué à retrouver en telle quantité sur une même galette. Impossible d’ailleurs d’en lister un ou deux qui sortent du lot, ATP est totalement “riff-based”, une folie. Une leçon à chaque nouveau titre.

Finalement, le plus surprenant dans cet album est effectivement le professionnalisme, la qualité intrinsèque du groupe : la qualité de la prod est à tomber, et la technique (instrumentale) du groupe est stupéfiante. Auparavant, ATP passait en force, emportait l’adhésion au forceps, par son attitude et sa vigueur surtout. Désormais, on est obligé de noter la performance de la structure rythmique (Bryan Cox est excellent), et surtout les soli tout simplement hallucinants de Ryan Lake (qui repose sur la machine à riffs Larson, ça aide !).

Ma réserve intervient au bout de 12 écoutes successives (ponctuées de frénétiques headbangs) : le groupe signe avec “Open Fire” son meilleur album, sans hésitation. Le quintette se révèle plus fort que jamais, à un niveau de qualité technique et de composition que l’on ne pouvait soupçonner. En revanche, je regrette “mon” Alabama Thunderpussy, ce groupe poisseux, empreint de l’atmosphère sudiste dans le moindre de ses soli, qui se reposait sur la puissance de ses riffs pour tailler des montagnes instrumentales qui savaient séduire le fan de stoner, partageant le même goût de l’aventure musicale permanente, cette incertitude de tout moment avant de poser ses doigts sur un manche de gratte. On peut craindre d’avoir perdu ce ATP là. Mais j’attendrai de les voir en concert pour en juger. Dans l’attente, j’appuie à nouveau sur “play”.

Demon Cleaner – Demon Cleaner

Demon Cleaner - Demon Cleaner

J’avais adoré le précédent méfait de Demon Cleaner, ‘The Freeflight’. En jouant le jeu à fond, tels Fu Manchu, Dozer ou autres groupes de stoner ‘pur jus’, Demon Cleaner prenait le parti ‘d’assurer le coup’, sans grande prise de risque, mais en faisant très bien ce qu’ils savaient faire ; musicalement, c’était une réussite. Les voilà aujourd’hui qui franchissent un vrai grand pas, en ajoutant à ce genre qu’ils maîtrisent désormais à la perfection cette prise de risque, justement, qui leur faisait sans doute défaut. Et c’est réussi ! Alors évidemment, du coup leur album est moins immédiat, et j’ai moi-même mis du temps à l’apprécier à sa juste valeur. Mais après quelques écoutes à peine, les compositions, plus subtiles, moins linéaires, font tout autant mouche que les précédentes, mais sont amenées à durer, à s’apprécier tout autant, sinon plus, sur la continuité, ce qui apporte un réel changement. On se laisse donc prendre à fond par la ‘frénésie stoner’ habituelle du groupe, avec des morceaux comme ‘Freedom’s prize’, ‘The seven’ ou ‘Ruby’, ou encore la beauté du planant instrumental ‘Black river’. Le seul point faible du groupe est sans doute encore ce chant, un peu trop ‘conventionnel’ et étouffé par un mix qui fait la part belle au son de guitare (fuzzzzz !). Un bien sympathique CD, vraiment, très recommandable en tout cas.

Year Long Disaster – Black Magic ; All Mysteries Revealed

Year Long Disaster - Black Magic ; All Mysteries Revealed

Surfant sur une vague de buzz essentiellement ricain (notez que la quasi intégralité des médias français sont passés complètement à côté jusqu’ici de ce groupe somptueux…), Year Long Disaster n’a pas traîné à se reposer sur ses lauriers critiques : au milieu de plusieurs tournées internationales, le groupe a trouvé quelques jours pour enregistrer un nouveau bijou en rondelle, sous la houlette de Nick Raskulinecz (Foo Fighters, Alice In Chains, Velvet Revolver, Rush, …), ni plus ni moins.

Les premières écoutes peuvent paraître déstabilisantes pour quiconque avait aimé le côté rock rocailleux du trio, presque crasseux par moments, sur leur première galette. Le son sur ce nouvel album est gros, majestueux, ronflant, impeccable, avec très peu de place laissée aux imperfections. Les compos, ensuite, sonnent au début plus “légères” que celles que l’on connaissait. Mais au bout de quelques écoutes, la vraie teneur de l’album prend le dessus, et le coup de bluff est découvert. Là où le son pouvait paraître “trop propre pour être honnête”, on note en réalité sa pureté, et surtout sa profondeur qui permet de laisser une place inouie à une somme incroyable de détails sonores : couches d’instruments inombrables, choeurs, percus, effets, arrangements divers, etc… chaque écoute révèle son lot de surprises, et l’écoute de l’album au casque ou dans une configuration acoustique performante est à vous filer la chair de poules.

Au niveau compos, le ressenti initial révèle en réalité une variété de chansons impressionnante, relevant toutes du même gros hard rock auquel le trio nous avait rendu accro. Ouf, on retrouve nos repères ! Sauf que le cadre musical du groupe s’en trouve élargi, étiré, et presque explosé. Au premier abord, rien de particulièrement surprenant dans les premiers titres, les redoutables “Show me your teeth” et “Love like blood” : ces titres, les premiers composés pour l’album, sont aussi ceux qui font le mieux le lien avec l’album précédent (ce qui n’enlève rien à leur efficacité). Avec “Seven of swords”, un pas audacieux est franchi : dans une veine franchement intimiste, le chant fragile à fleur de peau de Daniel Davies, accompagné de sa guitare sèche et d’un minimum d’arrangements apportent une émotion remarquable. “She told us all”, apporte un enchaînement couillu, avec un autre morceau mid tempo d’affilée : sur cette “presque-balade” insidieuse, les vocaux hantés de Davies portés par un riff apocalyptique emmènent ce refrain dans des sentiers inédits pour le groupe. Imprévisible… Pour mieux appuyer cette instabilité de tous les instants, l’un des meilleurs titres de l’album, “Cyclone”, cloture l’album en trombe en déchaînant son torrent de guitares dans les haut parleurs. Cette chanson d’une efficacité remarquable, est portée par une rythmique hallucinante de maîtrise et de sobriété : une basse ronflante qui porte le titre au galop comme un éclaireur de cavalerie, et une batterie qui, sous des airs de simplicité, impose en réalité un rythme “asynchrone”, faussement binaire, dont le décalage génère le sentiment d’un morceau perpétuellement “sur la brèche”. Un arrangement bluffant. Le groupe nous balade perpétuellement avec d’autres titres, tous bien heavy et accrocheurs (“Venus at the crossroads”, le super heavy “Major Arcana”…), pour porter globalement très haut le niveau de composition de cette galette. Le fait que Will Mecum (Karma To Burn, encore…) ait co-composé 3 titres n’est probablement pas étranger à la teneur riff-esque de l’ensemble des titres.

Au final, Year Long Disaster, malgré sa filiation avec Karma To Burn et le hard rock 70’s, ne fait pas vraiment du stoner. Pour autant, leur musique a un potentiel de séduction immense auprès des fans de stoner, et pas uniquement de par ses racines : un sens vicéral du riff, un son de guitare énorme, une rythmique ronflante… Sur ce dernier album, le groupe, confiant et à l’attitude intègre, balance ses titres sans plus de blabla, et laisse parler la poudre. Le résultat est à la fois intelligent et franc du collier, d’une efficacité dévastatrice. “Black Magic” est de ces albums trans-générationnels et trans-genres, de ceux qui ont le potentiel de faire chavirer tout fan de rock vers le côté obscur.

Minsk – The Ritual Fires of Abandonment

Minsk - The Ritual Fires of Abandonment

Même si la première trace du mot slave Minsk remonte à 1067 (désignant évidemment la capitale de la Biélorussie), le groupe s’inscrit cependant dans une tendance résolument contemporaine. Bien des écoutes sont nécessaires pour percevoir toutes les couches superposées de cette musique atmosphérique que l’on peut ranger, certes sans catégorisation aveugle et absolue, dans les étagères du post-rock et du néo-psychédélisme.

Les grattes se superposent en strates bruitistes lorsque elles ne font pas la part belle dans les moments calmes aux sons clairs teintés d’effets de delay et de reverb, ainsi que de tremolo à l’occasion. Elles jouent superbement sur les nuances tout au long des envolées lyriques des vocalistes. Soulignons-le, les 6 morceaux sont longs de 5 à 15 minutes et peuvent relever du répertoire de Pelican, Neurosis, Godmachine et Mogwai. Néanmoins, on y distingue des voix d’outre-tombe noyées dans un festival d’effets qui accentuent les atmosphères funèbres de cette plaque.

Les guitares peuvent aussi se lancer dans des riffs post-hardcore joués ad libidem dans lesquels on ressent un côté groove sans pour autant ponctuer le mouvement d’une suite d’accords relevant du prévisible et du suranné. La batterie s’entoure de percussions à caractère tribal et accentue cet effet par un jeu harmonieux de caisse claire sans timbre dans les moments calmes. Le batteur est également un régal de précision rythmique dans son jeu de cymbales. Avec cela, on y distingue une basse fluide intégrant parfaitement le côté mélodique d’un break tempéré tandis qu’elle assurera son travail de soutien inconditionnel dans les moments forts.

Revenons au chant: les vocalises peuvent parfois relever du chant quasi-grégorien ou de la mélopée gutturale bouddhiste, elles donnent toute l’ampleur de leur tessiture dans les passages enlevés avec des cordes vocales à l’unisson dans un chant tribal versant dans le rituel orchestré. Outre leur déferlante de sombre perception, on ne peut s’empêcher d’y voir une mise en scène macabre et sanguinolente.

Enfin, on remarquera, à côté des percussions additionnelles, l’usage d’un piano et d’un cuivre mais dans une expression très sobre en fin de morceau. Minsk, d’apparence froide de prime abord, révèle une facette de séducteur lorsqu’on se plonge dans l’écoute de ces chansons hypnotiques. Un très beau mix, une splendide pochette et des compos de qualité. Tout simplement.

Sixty Watt Shaman – Reason to Live

Sixty Watt Shaman - Reason to Live

Après la claque mémorable Seed of Decades, on attendait beaucoup de Sixty Watt Shaman, le combo du Maryland emmené par le charismatique chanteur Dan Kerzwick. Et le groupe est au rendez-vous avec ce nouvel épisode discographique produit par sieur Scott Reeder, ex-bassiste de Kyuss et de Unida.De ces 70 minutes de pur bonheur, on retiendra les furieux ‘Our Name is War’ et ‘One good Leg and a Bottle of Booze’, ou encore le très sabbathien ‘When i’m Alone’ et ses passages aussi lourds qu’un troupeau de mammouths. Le tout est savamment entrecoupé de passages calmes plutôt bienvenus (‘The Mill Wheel’, ‘When the Morning comes’, ‘Breathe Again’).
A noter également l’instrumental ‘All my Love’ sur lequel plane l’ombre du grand Cliff Burton.
Bref, Reason to Live est un très bon disque de stoner, n’en déplaise à certaines mauvaises langues qui reprocheront à nos Shaman de se répéter.

Brant Bjork – Keep Your Cool

Brant Bjork - Keep Your Cool

Ayant adoré le précédent album de Brant Bjork, « Brant Bjork and The Operators », dire que j’attendais avec impatience celui-ci est un euphémisme. Me voici donc avec la galette dans les mains et on peut dire que pour le coup, l’album porte un titre parfaitement choisi pour quelqu’un que l’on surnomme « Mr cool ». Par contre, une fois le cd dans la platine, on s’aperçoit rapidement d’un petit souci, c’est la durée, puisque avec simplement 8 titres pour un total de 33 minutes on est plutôt à mi chemin entre le maxi et l’album. Enfin bon, mieux vaut 8 titres excellents qu’une vingtaine pas très bons, c’est sur.Et c’est là que ça coince, sans être mauvais, Keep Your Cool est ce que j’appellerai un coup dans l’eau. Même si chaque titre pris indépendamment les uns des autres s’avère être assez bon, je ne retrouve pas l’homogénéité attendue et je suis quelque peu déçu par l’ensemble.Pourtant, je pourrai vous dire du bien de chacun des titres mais pas vraiment de l’ensemble, un comble.Bref, si vous considérez cet album comme un petit 8 titres sorti comme cela, pour le fun, alors on peut qualifier ce disque de parfait. A contrario, si vous pensez avoir là un véritable album bourré d’originalité et bien c’est loupé.Par contre, et comme je n’ai jamais cessé de le dire, il est quasi certain que certains de ces morceaux prendront une nouvelle dimension lors des concerts de l’artiste et seront surprendre pas mal de déçus de « Keep Your Cool », moi le premier, car c’est bien sur scène qu’il faut écouter Brant Bjork.

Pelican – The Fire In Our Throats Will Beckon The Thaw

Pelican - The Fire In Our Throats Will Beckon The Thaw

Avec 3 E.P. et un album grandeur nature déjà à son actif, Pelican nous gratifie ici d’une 2e plaque complète, haute en couleurs et en paysages éthérés. On s’écarte des quelques plans doom ad libidem que ces oiseaux pouvaient nous envoyer pour atteindre la majestuosité d’un haut vol néo-psychédélique. Ici, le décorum est amplement plus travaillé et toute l’ampleur de ce groupe à l’allure simple mais à l’alchimie impressionnante apparaît enfin à la lumière du jour.

C’est toujours dans son trip full instrumental que le groupe s’exprime dans une version post-rock oublieuse du semi-séculaire schéma rock’n roll dans ses structures. Longues de 5 à 10 minutes, les plages nous emmènent au travers de séquences riches en émotions et montées d’adrénaline. Il en résulte une sorte de mélancolie ambiante sans pour autant verser dans les mélopées désespérées que l’on peut retrouver chez les paires de Neurosis and co. Ou est-ce du triomphalisme comme l’annonce la déclaration sur leur site: “We are a fucking triumphant band!”? L’auditeur se forgera son opinion lui-même.

Ce que l’on retient de cette musique, c’est surtout son caractère empathique de l’individu et les différentes émotions qui peuvent le submerger. J’ai écouté cette plaque dans différents états d’esprit, je les ai vus en concert tard dans la soirée dans un état de fatigue encore plus avancé, et je peux dire que leur musique a le don de se mêler à vos émotions présentes, à vos souvenirs passés. A l’instar d’une drogue, elle exacerbe vos sentiments et en accentue la portée. On peut rester de marbre devant le Pelican. Mais si on décolle avec lui, le trip 100% naturel est au rendez-vous.

La section rythmique est parfaitement minutée et se fait l’audacieuse complice des 2 gratteux dans les nuances les plus subtiles, dans les recoins les plus fins des 7 plages (tiens, tiens, le chiffre parfait). Le secret de ce groupe est de faire monter la sauce tout en douceur pour finalement vous laisser dans un état d’adoration devant le vide, une fois toutes considérations matérialistes oubliées.

Toujours pas l’ombre d’une voix à l’écoute de cette plaque au titre ésotérique mais pas le temps de s’ennuyer non plus. Rejoignez les nuages à l’image de leur pochette et percez-en le secret.

Grand Magus – Grand Magus

Grand Magus - Grand Magus

Depuis l’annonce du départ du charismatique Spice des Spiritual Beggars, on pouvait craindre le pire, tant sa voix rocailleuse et chaleureuse participait à l’identité du combo suédois. Puis les Beggars ont annoncé que Janne, le chanteur de Grand Magus, prendrait sa place, et on restait dans l’expectative. Enfin, on peut désormais découvrir sur pièce ce que vaut ce nouveau vocaliste et on est rassurés ! Et pas qu’un peu : le chanteur du Grand Mage a une voix puissante et assurée, aux relents bluesy parfois, au moins aussi chaleureuse que celle de Spice, et elle représente sans nul doute l’un des principaux attraits de la musique de cet autre groupe scandinave. Mais ce n’est pas le seul intérêt de cet album, probablement l’une des galettes les plus heavy qui nous ait été proposée depuis longtemps : un stoner rock ‘à l’européenne’, plutôt axé sur un héritage heavy presque doomesque, faisant la part belle aux rythmiques charpentées et à la basse ronflante sur lesquelles viennent couler des soli limpides et inspirés (ce bougre de Janne assure aussi toutes les grattes de l’album, et il est loin d’être manchot). Ce power trio stonerien de barbus crée donc une agréable surprise, se positionnant en mélange parfait de Gov’t Mule (trio aux influences bluesy), Black Sab’ (ce son de basse et ces leads ne trompent pas !) et même des Spiritual Beggars, vu qu’ils évoluent dans des genres assez proches. Du très bon, donc.

7 Weeks – B(l)ack Days

7 Weeks – B(l)ack Days

Après une première autoproduction sortie l’an passé, chroniquée sur ces pages dans la section idoine, le quatuor de Limoges revient à la charge avec ce premier ep – composé de huit titres – qui étale le talent de cette jeune formation, puisque née en avril deux-mille-six, sur un peu plus d’une demi-heure. On retrouve au menu de cette production une poignée de compositions déjà présente sur la première trace du groupe et la filiation avec les Foo Fighters est toujours aussi présente sur certains ‘vieux’ morceaux dont les imparables ‘The Score’, ‘Shadows’ ou ‘Hooked’ (ces deux derniers n’étant disponibles que sur la deuxième mouture de la-dite démo). Les nouvelles plages, quant à elles, sont actives dans un registre nettement plus inspiré par la scène stoner.
Cette nouvelle trace dans le sillon débute avec un l’inédit ‘B(l)ack Days’. Le morceau éponyme, bien ficelé, navigue dans les eaux habituelles des Limougeos soit un rock’n’roll énergique qui puise son inspiration quelque part entre le fuzz et le bon vieux grunge psychédélique. Assez percutante, cette entrée en matière Fu Manchienne augure le meilleur pour la suite de leurs tribulations musicales. La seconde nouvelle compo c’est ‘The Pretenders’ ; sur un rythme assez lent, mais sévèrement burné, le groupe plaque de gros accords un peu à la manière de Solarized, quoiqu’avec un peu plus de retenue.
L’ultime titre inédit c’est ‘Waiting For Resurrection’, un bon tubard fuzzy avec un refrain d’une redoutable efficacité et quelques accélérations furieuses qui donnent du relief à son obsédant riff de base. Ce titre se détache assurément des influences grunge pour plonger dans un univers musical très très proche de Dozer. J’attendais la suite de l’autoprod et désormais j’attends impatiemment le premier long format !

Acid King – Busse Woods

Acid King - Busse Woods

Ca commence fort. « Electric machine » se compose d’un méga riff sabbathien décliné à l’infini. Pas de doute, nous sommes en territoire connu. Ça ronfle, ça masse, ça martèle. Six morceaux seulement mais qui durent longtemps. On retrouve aussi un peu l’ambiance des Melvins de l’époque « Bullhead » où ils étaient le groupe le plus heavy de la terre. Jolie digression pour introduire que justement, c’est Lori, l’ex-bassiste des Melvins qui tient ici la guitare et chante, accompagnée d’un certain Joey Osbourne à la batterie. Sachant que Dale Crover est également présent sur ce disque pour manipuler certains petits instruments d’arrangements, il n’est certainement pas interdit de penser que nous sommes là en présence d’une reformation des Melvins presque originelle (presque car c’est Matt Lukin, aujourd’hui Mudhoney, qui était leur premier bassiste, Lori n’est arrivée après). Les indications sur le disque étant minimales, les photos des musiciens ne présentant pas leurs visages, je n’ai pas davantage d’éléments d’appréciation. Je ne peux que déduire. Connaissant les Melvins, cela n’aurait absolument rien d’incongru. Quoiqu’il en soit, on ne peut que se réjouir de la réapparition de Lori qui avait subitement abandonné les Melvins car elle était tombée non moins subitement, gravement malade. La revoilà donc quasiment au même point qu’elle nous avait laissé. Apparemment, elle a toujours ce goût pour l’artillerie lourde qu’on un peu délaissé ses anciens compagnons. Je regretterai simplement sa voix qu’elle a beaucoup trop monocorde à mon goût. Sa linéarité plaintive, passé le premier morceau devient un peu agaçante à la longue. La voix de Buzz m’aurait davantage convenu, mais bon. La zique est vraiment terrible. Fuckin’ heavy !

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