Kalas – Kalas

Kalas - Kalas

Sorte de dreamteam de la fameuse Bay Area de San Francisco, celle-là même qui explosa à la face du monde il y a vingt-cinq ans avec un quatuor chevelu qui reste l’un des meilleurs groupes (si ce n’est le meilleur) en activité à l’heure actuelle (houlà je m’égare et vais me faire taper sur les doigts par les puristes du site alors je cesse tout de suite vilain que je suis), alors bon ben, on est là pour causer de Kalas qui se décrit comme un groupe à part entière et non pas comme un side-project de luxe. N’empêche qu’au sein de ce quintette on retrouve Matt Pike (le type chevelu qui hurle et joue de la guitare dans High On Fire et qui naguère officiait dans Sleep), Andy Branton (dont le cv contient Econochrist, Grimple et Samiam), Paul Kott (Cruevo et High Tone Son Of A Bitch), Scott Plumb (Cruevo) ainsi que Brad Reynolds qui fait un peu pâle figure en n’ayant pas participé à autant de projets prestigieux que ses petits camarades de jeu.
Tout ce beau monde a commencé à jouer ensemble en deux-mille-trois et a sorti une première demo un an plus tard après s’être distingué sur scène en Californie. A l’automne passé, ils ont signé avec le label qui leur permet de sortir aujourd’hui leur première véritable production qui fût mise en boîte au Nu Tone Studios en janvier dernier.Au menu de cette sortie, neuf titres bien heavy qui lorgnent plus du côté de ce que pratique High On Fire que des productions emo Samiam et c’est pour ça qu’on s’intéresse à cette chose. Le côté dévastateur de la bande à Matt est là et ça blaste dans les règles de l’art dans un registre plus crust que doom. Les parties vocales sont balancées avec fureur avec un timbre de voix buriné par les excès de toutes sortes quand elles ne sont pas carrément chantées comme sur ‘Things Done And Undone’ qui permettent de découvrir tout le talent du bonhomme. Les guitares sont dans la ligne des grandes formations britishs des années quatre-vingt (merci Iron Maiden) à l’image de ‘Due Time’ un morceau epic et heavy qui est plus proche du metal que du sludge et qui ne m’a pas franchement botté. Les rythmiques sont quant à elles bien balancées et elles font mouche sur des titres comme ‘Media Screws’, morceau flirtant avec le doom, ou ‘Voyager’ qui est certainement le morceau le plus stoner des neuf.
Le point d’orgue de cet album est sans aucun doute ‘Godpills’ qui démarre de manière lancinante tout en douceur avant de groover à fond sur un tempo plutôt lent mais terriblement efficace. Un album tout en lourdeur qui séduira les adeptes du genre.

Sourvein – Will To Mangle

Sourvein - Will To Mangle

Ouch ! Voilà quatre ricains manifestement très remontés qui semblent extérioriser la somme de leur désespoir sur un disque à la tonalité réellement tragique. Mise en scène particulièrement efficace de la rage qui les ronge, la musique de Sourvein est une célébration de la colère. Scrutateurs d’un monde qui s’obstine à ne bâtir qu’un champ de ruines, ces trois mecs et cette nana (à la guitare) ont élaboré une esthétique de la lacération et de la mutilation (comme l’indique le nom de l’album). Ce disque est un hallucinant rappel à l’ordre pré-apocalyptique à l’adresse d’un monde à la dérive. Alors qu’il devrait instiller la terreur et donc l’évitement, sa force réside cependant dans son pouvoir d’attraction qui conduit à en multiplier les écoutes. Car comment résister au déversement de ces montagnes de riffs monolithiques et tranchants ? Comment ne pas plier de bonheur sous les martèlements pachydermiques de la batterie ? Comment ne pas se soumettre avec extase à ce déluge de hurlements saturés frôlant la démence ? Comment ne pas se laisser enivrer par ces rythmes lents et indolents agrémentés de ci de là de quelques hammer iommiesques et gimmicks winoesques ? Et pour couronner le tout, comment ne pas succomber à la production toute en épaisseur noire de l’incommensurable Billy Anderson (je ne sais plus quel qualificatif utiliser à son propos : sorcier, magicien, pape, dieu, extra-terrestre ?). Sourvein c’est un peu Sleep en plus dur, High On Fire en plus groovy, Electric Wizard en plus sauvage. Tout simplement inouï. Si Sourvein opère dans un périmètre réduit, il n’en est pas moins parvenu à se forger une identité très forte. Le titre « Carveblind » en est probablement la plus belle illustration. Après nous avoir maintenu, pour notre plus grande joie, le nez dans la réalité la plus sombre pendant sept morceaux, « Dirgewine » qui clôt le disque, nous offre la plus belle des conclusions : synthèse des titres précédents (immanence), suivi d’un solo lumineux (transcendance) avant de basculer à nouveau dans la barbarie du monde physique. Un disque dur certes, mais surtout somptueux. Aussi divin que l’enfer.

Set The Tone – Es La Guerilla

Set The Tone - Es La Guerilla

Set The Tone est un groupe liégeois (Belgique) composé de jeunes gens assoiffés de bière et de gros son. Il faut donc enfoncer le clou en insistant sur le fait que, outre leur affection pour les grains d’orge, le son des grattes est énorme et graisseux. Bref, pour vous planter le décor à la manière de ces musiciens, allons droit au but: on est en plein dans la lignée de Crowbar.

C’est carré et puissant, sans ambages et sans concessions. Inutile de vous dire que la voix n’est pas celle d’un alto mais bien celle d’un hurleux/dégorgeur à sec. Certains peuvent y voir une musique de bourrin, d’autres – et j’en fais partie – ressentent dans cet envoi de bois une pulsion animale, comme une envie d’en découdre au grand dam de toute forme de diplomatie et de courtoisie. On n’est pas là pour faire dans la soie ou boire une tasse de thé dans un salon chicos: seule la force de frappe compte. Le politiquement correct n’a certainement pas sa place au sein de ce groupe.

Une fois les 3 premiers pains encaissés, les plages 4 et 5 nous révèlent que ce groupe peut être moins “direct-dans-ta-gueule” au plan musical avec des attaques plus nuancées et des variations de tempos sans pour autant abandonner son statut de bulldozer. Le public résolument stoner n’y verra pas un produit pur malte mais peut néanmoins en apprécier les effluves.

Après avoir sorti un E.P. en 2006, le quintet travaille actuellement sur un album à sortir sur Ruined Live Records.

Contact:

www.setthetone.be

www.myspace.com/setthetone

La machine à couper non pas le semaine mais le CD en deux est passée. Les lascars ci-dessus ont partagé la galette à parts égales avec les Français de Es La Guerilla (5 titres chacun).

La 2e plage et son riff hypnotique surprend l’auditeur avec une voix à la Jaz Coleman de Killing Joke. Tout simplement plaisant.Les tempos évoluent entre le mid et le down et les accordages des instruments sont résolument tournés vers le bas, vraisemblablement en do. Es La Guerilla maîtrise parfaitement son interprétation des morceaux et l’on sent que les musicos ne sont pas des débutants, surtout à l’écoute des soli envoyés.

Petit contraste avec le groupe précédent, Es La Guerilla a des structures plus léchées que Set The Tone mais sa voix est plus monocorde.

Cette 2e partie du split CD me révèle que l’on sort sérieusement des lignes éditoriales de ce site mais le groupe révèle des qualités musicales. Enfin, je me dis que me déplacer pour les voir en concert serait une expérience tentante. Pour sûr, ça doit déménager.

Contact:

www.myspace.com/eslaguerilla

Masters Of Reality – Give Us Barabbas

Masters Of Reality - Give Us Barabbas

Chef d’oeuvre, voilà le qualificatif qui vient à l’esprit dès que l’on parle de ce nouvel opus de Masters of Reality, ou plutôt de Chris Goss tant ce nouvel album semble très personnel.Tout a déjà été dit sur la musique de Masters of Reality tant et si bien qu’il est difficile de faire une chronique qui ne ressemble pas à celle des précédents albums du groupe (il faudrait presque inventer de nouveaux superlatifs pour décrire la musique composée par Goss). Une chose est sûre cependant : MOR ne sonne comme aucun autre combo et surprend toujours autant pas son audace et ses mélodies imparables. Give Us Barabbas ne déroge pas à la règle. Qui peut ne pas tomber en admiration devant autant de pures merveilles (‘The Ballad of Jody Frosty’, ‘I Walk beside your Love’, ‘Bela Alaf Rose’, ‘Jindalee, Jindalie’, …) ? Même le très folklorique ‘Don’t Get caught by the Huntsman’s Bow’ réussit la prouesse de s’insinuer sournoisement dans nos têtes. Ajoutez à cela un packaging sobrement divin qui contient une dizaine de reproductions de toiles paintes par Goss et vous obtenez un pur chef d’œuvre, qui fera plaisir aux fans de rock en général (et pas seulement de stoner).Avec ce Give Us Barabbas, Chris Goss démontre une fois de plus qu’il est un grand monsieur de la musique rock. Ceux qui pensent le contraire peuvent passer leur chemin.

Kube – Stockholm Syndrome

Kube - Stockholm Syndrome

On ne peut pas dire que la Belgique ait enfanté un grand nombre de groupes mémorables dans notre genre musical de prédilection. Il semblerait que les derniers mois aient tendance à me faire mentir toutefois, et la sortie de cette onctueuse galette en provenance directe du plat pays en est la plus belle des confirmations.

Kube, donc, un trio que je découvre avec cet album, balance ni plus ni moins qu’un album imparable, totalement décomplexé, dans le sens où le groupe revendique totalement ses influences, et s’éclate dans le cadre pourtant un peu “balisé” du stoner pur jus.

Certes, on trouve un peu de gros heavy-stoner à la scandinave (la rythmique de “In bed”, “Running Free”), mais le son de gratte, la basse ultra saturée (un peu comme Lemmy croisant Nick Oliveri), et ce jeu de cymbales aérien ne trompent personne : ça sent le sable chaud et l’urgence d’un album qui se veut clairement un prétexte à sortir vite fait du studio pour aller jouer ces titres dans la moiteur de clubs aussi sordides que possible.

Pour autant, jamais le groupe ne bâcle ses compos, proposant en 10 chansons (plus une outro un peu lugubre) pas moins de 10 titres bien différents et originaux. Jamais pour autant Kube ne réinvente la poudre, toutefois les influences du groupe sont vastes tout en restant homogènes, si bien que l’on balaye allègrement des instrus typiques des groupes “pré-stoner” des années 80, des couplets très 70’s, le tout savamment mélangé sur des compos aux structures et au son très moderne (pas sans rappeler la démarche de QOTSA par moments, avec cette attitude frondeuse qui refuse de se scléroser dans un style trop “bridé”).

On passera donc d’instrus enlevés, tendance Monkey 3 (“Shadows & stars”) à des titres beaucoup plus 80’s (“Orgy”) ou 70’s (“Someone to blame”), mais encore des compos totalement intemporelles imparables (le groove de “Dreamin’ of you”), le tout servi par un duo gratte-basse bulldozer (tendance Operator:Generator).

Bref, un album bluffant, que vous ne trouverez vraisemblablement pas à Auchan ou Carrefour, mais qui mérite largement une visite au petit disquaire du coin ou une rapide recherche sur internet pour le dégotter.

Blood Of The Black Owl – S/T

Blood Of The Black Owl – S/T

Sauve-qui-peut ! Cette nouvelle pièce de la collection de Bindrune Recordings s’inscrit dans un registre assez difficile d’accès. Autrefois connu sous le nom de Svart Ugle, ce one-man-band a germé dans le cerveau tourmenté de Chet W. Scott dans le nord des Etats-Unis. Exécutant lui-même les vocaux, les grattes, les batteries, les percussions ainsi que tous les artifices sonores, ce washingtonien à qui je ne confierai pas mes filles, nous gratifie de septante minutes de voyage dans son univers froid, glauque et sombre.
Dire que ces sept morceaux sont difficilement abordables par le commun des mortels n’est pas un vain mot et il faut s’accrocher pour affronter ce cd qui est annoncé comme étant du metal extrême. De fait, si son écrin l’envoie directement, sans passer par le start, dans le registre du black metal, une écoute de cet ovni ravira les amateurs de doom, funèbre selon la bio, très très lent.
Autrefois membre du projet drone The Elemental Chrysalis, son concepteur se complaît dans un registre aux tempi tellement ralenti que j’ai cru que le moteur de ma platine avait cessé de tourner normalement. Les ambiances sonores ici travaillées respirent tout sauf la joie de vivre et tous ceux qui sont frustrés par le côté fun ou guilleret de Sunn0))) ou d’Earth se réjouiront de la touche lugubre que Scott ajoute à son mix de doom, de drone et de metal burné façon High On Fire sans la vélocité.
Déconseillé aux dépressifs.

Bukowski – Amazing Grace

Bukowski - Amazing Grace

Le buzz autour de Bukowski commence à être assourdissant, limite louche pour un groupe de rock français. L’air de rien, Bukowski est un peu plus qu’un groupe de rock, ou tout du moins un cas atypique : né sur les cendres de deux groupes de ce que l’on appelait alors “neo metal”, le trio bénéficie depuis sa création il y a moins de deux ans d’un soutien de toute part (plein de groupes et musiciens leur apportent un coup de pouce). Mais le plus étonnant chez Bukowski tient dans leur musique…

L’orientation musicale prise par le groupe étonne par sa maturité et son naturel : évoluant sous la forme quintessentielle du power trio (pas de gras : une basse, une gratte, une batterie), Bukowski délivre sur ses 11 titres un gros rock racé, gras et pesant parfois, mais surtout rageur et acéré. Le groupe évolue titre après titre sur ce fil étroit entre metal un peu trop grassouillet (un genre qu’ils évitent très habilement) et rock trop traditionnel et trop lisse, le tout avec une maturité musicale qui ne peut qu’étonner, pour un premier album. Mais là où ça peut vous intéresser, c’est que Bukowski n’hésite pas à se vautrer dans un stoner “moderne” (plutôt à la sauce “Small Stone” qu’en tant que plagiaire de Kyuss, si vous voyez ce que je veux dire) pour mieux servir ses compos, et leur apporter la texture fiévreuse qui leur sied si bien.

L’album commence comme une baffe en pleine gueule par le remarquable “Bro, you save me…” au refrain stonerien délicieusement heavy, et une prod impeccable, le tout accompagné d’un torrent de grattes. Le refrain “hymne” hurlé de “Shaggy Dog Story” prend la suite, et rebondit sur un riff impeccable. Quelques mid-tempo prennent le relais, tous de fort bonne tenue, occasionnellement remués par un brulôt un peu plus bruyant (“Mysanthropia”, “Pillbox” et son refrain énorme que n’auraient pas renié les énormes Awesome Machine).Ainsi, le trio enchaîne les morceaux sans se répéter, le tout dans une bluffante cohérence musicale : la prod percutante ne pervertit jamais le son du groupe, bien bâti sur un solide groove basse-batterie (power trio !!!) et des rythmiques de gratte cinglantes (et occasionnellement un petit solo bienvenu), le tout emporté par le chant puissant et erraillé de Mat (qui devient après la première écoute une marque de fabrique du combo).

Bukowski se révèle être une vraie révélation, et déboule avec un premier album massif, percutant et sacrément mûr pour son âge ! Un excellent disque, à voir comme la première brique d’une carrière que l’on espère longue et faste.

Euroboys – Long days flight til tomorrow

Euroboys - Long days flight til tomorrow

L’Amérique aime l’Europe. Et l’Europe le lui rend bien. Quelle rigolade. Ce disque est la paix, la détente et la cordialité. Une bande son pour l’ONU. Plutôt que de larguer des bombes sur cette raclure de Milosevic, il eut fallu larguer des CD d’Euroboys au Kosovo. Relax man ! semble être le leitmotiv de ce disque. Et ça fonctionne. Ce disque contient un effet relaxant du tonnerre. Stressés ? Constipés ? Hop ! un coup d’Euroboys. Du Prozac sans les inconvénients de la chimie. De la marijuana sans les inconvénients de la maréchaussée. Du soleil en disque. Une musique qui s’écoute facilement à tout âge, dans toutes les positions et quelle que soit votre confession. Cocottes de guitare Shadows qui font tchac-tchac et wah wah, trompettes Otis-esques qui font pouet pouet et musica mexicana quelquefois, orgue Farfisa qui fait Huggy les bons tuyaux, basse Bootsy-funk qui rou-coucoule, batterie qui fait ratata sur la caisse claire et tchic-it-tchic sur le charley, congas latinos qui font bim-bi-li-bim-bim-bili-bili et flûte qui fait fuuuuuuuuuuuuh. Bref c’est comme si les films policiers italiens avec Maurizio Merli rencontraient les films blaxploitation de Melvin Van Peeble pendant une croisière où ils s’amuseraient vraiment beaucoup. Oui on se fend la gueule avec cette galette. Enfin un disque écoutable à table avec ses parents. Un disque qui donne envie de s’acheter un yorkshire et une Alfa Roméo décapotable. Qui donne envie de se parfumer au patchouli et de s’habiller en fuschia. Ce disque est de nature à vous faire commettre l’irréparable. Et c’est magnifique. Donc obligatoire. Que le Pape le reconnaisse comme une nouvelle religion me semble être un minimum. Quand on sait que ce sont d’ex-Turbonegro qui ont échafaudé cet objet on comprend mieux pourquoi on se retrouve dans un tel état à son écoute. Comme le disait sobrement Vuillemin, : « Sueurs d’hommes-Frissons de bonheur ».

Puny Human – It’s not the heat, it’s the humanity

Puny Human - Its not the heat, its the humanity

Encore sous le choc de leur déflagration précédente (“Revenge is easy” en 2000), c’est avec une forte anticipation que j’attendais le nouveau Puny Human. Il arrive enfin et il dépote ! Rarement groupe n’a mélangé autant de styles pour finalement, sans réinventer, rendre jouissif le moindre riff, ou entraînant le moindre refrain. Puny Human est lourd, tendance rock 70’s blindé aux barres à mines, rempli de groove jusqu’à la gueule, le boogie à fleur de gratte, endiablé de bout en bout. Les compos en attestent, comment ne pas taper frénétiquement du pied à “The Toos”, à “Witches chasing cabs” ou encore “Greasin’ the wheel” ?! Les guitares sont pachydermiques et ont le riff velu, et la rythmique est imparable (excellent batteur, anecdotiquement VJ à MTV). Le son (Jay Yuenger, l’ex-White Zombie produit la galette) n’est pas en reste, et apporte la discrète cerise stoner sur le gâteau de notre bonheur béat. Encore !!

Astrosoniq – Son of A.P. Lady

Astrosoniq - Son of A.P. Lady

Présenté comme un croisement du groove des 70’s, du hard rock des 80’s et du versant industriel des 90’s, Astrosoniq apparaît comme assez unique en son genre. Sur le papier. Très en deçà des prétentions affichées, ce groupe hollandais évolue dans un registre somme toute assez conventionnel. Balancer trois ou quatre bidouillages électroniques ne présente franchement de caractère innovant, même dans le stoner rock. Saturer la voix pas davantage. Il est vrai, les titres sont tous assez différents les uns des autres. Présentent quelquefois de bonnes idées comme le pont d’« Ego Booster » par exemple. Mais manquent cruellement d’unité. Si la reprise « Earthquake » de Sly and the family stone constitue probablement le meilleur morceau de l’album, « Pegasus » est probablement ce que j’ai entendu de pire ces derniers temps. Slow infâme et synthétique à la croisée d’un ersatz d’Indochine et d’un sous-Depeche Mode. Vous imaginez le tableau ? On est soulagé lorsque les guitares refont leur apparition. Un album bien laborieux.

Spice and The RJ Band – The Will

Spice and The RJ Band - The Will

Si on devait résumer la carrière de Spiritual Beggars, on pourrait discerner 3 périodes : la première très space-rock / quintessence stonerienne, qui a culminé avec “Another Way To Shine” et “Mantra III”. La seconde, qui tirait un peu vers un heavy-rock stonerien, a accouché du superbe “Ad AStra”. Et la période actuelle, penchant copieusement dans un gros hard rock metal qui tâche, qui a vu le bassiste/chanteur Spice remplacé par Janne de Grand Magus au chant.

Notre Spice bien aimé, une fois lourdé en beauté, aura trouvé un foyer temporaire dans son projet “Mushroom River Band”, et depuis, plus de nouvelles… Jusqu’à ce mystérieux groupe (au patronyme original “Spice and the RJ Band”), qu’il monte avec un ancien pote bassiste et le batteur de “Mushroom”, et qui déboule sur nos platines un peu par hasard, pour notre ravissement auditif. On va pas vous la faire : on est ici en pleine période “Spiritual Beggars période Ad Astra”. Certes, le génie riff-esque de Mike Amott manque un peu ici ou là, mais au final, on aurait bien tort de bouder notre plaisir : la voix de Spice est d’une profondeur, d’une puissance, mais aussi d’une chaleur remarquables. Reconnaissable entre mille, le chanteur déploie toutes les facettes de son organe sur chaque plage de ce CD. Un bonheur en soit.

Pour le reste, les compos défilent, ça taille bien, c’est bien produit et arrangé (vraiment, une belle palette de sonorités qui font super bien sonner ces morceaux), on ne se lasse pas : passant du pur heavy 70’s aux power ballads teintées de gratte acoustique, on écoute ce skeud en boucle avec un vrai plaisir. Si vous aimez Spiritual Beggars (ou si vous aimiez jusqu’à il y a 5 ans environ !), vous devriez adorer ce disque. Pour les autres, ces compos ne devraient pas vous laisser de marbre, et ce disque figurer dans vos play lists pendant quelques semaines (ce qui rentabilise déja l’achat).

Golden Pig Electric Blues Band – Hitchhiking To Oblivion

Golden Pig Electric Blues Band - Hitchhiking To Oblivion

A l’écoute de ce disque me vient une question que j’aurais du me poser depuis longtemps, le fait d’habiter la campagne depuis ma naissance (rural kid power) n’a-t-elle pas influencé ma façon d’aborder le stoner ? Serais-je sinon, comme la plupart des citadins aficionados de musiques lourdes que j’ai pu côtoyer, plus enclin à apprécier les doom et sludge revêtant un aspect plus sale et urbain ? Pourquoi cette introspection à deux balles dont vous n’avez que faire ?
Tout simplement parce que la simple vision de la pochette de ce nouveau méfait de l’orchestre du porc doré, de ces bois verdoyant, me rappelle ceux derrière mon habitation, qu’il n’y a qu’un pas à faire pour retrouver ces trois chevelus sur la route en train de faire de l’auto-stop pour l’oubli et me joindre à eux. Donc apprécierais-je autant ce groupe si j’avais grandi dans un appart dans la capitale avec comme seul horizon les HLM et les nuages de pollution au lieu de ces champs labourés, ces bosquets et ces restes de forêt éparpillés sur ces semblants de collines (pas très nombreuses en Lorraine malheureusement, mais que voulez-vous, l’herbe est toujours plus verte chez son voisin) ?

Sans avoir la moindre certitude concernant la réponse, je peux néanmoins vous assurer que mon parcours ‘rural’ à jouer dans l’attirance que j’ai éprouvée pour ce disque tout vert. Vert dans son image, mais aussi dans son son. ‘Hitchiking’ a beau être le second album du trio, il en a gardé la fraîcheur et la spontanéité, tout en parvenant paradoxalement à un degré de sophistication plus important. On sent les 3 gaillards désormais rodés au genre qu’ils ont créé. Toujours riffeur avec cette chape de plomb particulière, les mélodies se font plus affinées, certains refrains, toujours chantés par cette voix juvénile complètement décalée (encore plus quand on se demande duquel de ces 3 bûcherons colossaux elle jaillit), deviennent même des hymnes à l’effet persistant (‘Born to lose / Nothing to prove’). Pas un morceau n’est à déprécier, de l’intro ringarde mais pourtant voyageuse à l’enchaînement de gros riffs qui s’ensuit aux différentes compositions, hargneuses mais entraînantes, aux accélérations pataudes mais jubilatoires et surtout sans la moindre prétention.
Sans doute le point le plus important à retenir de ce disque, ces 3 gars jouent pour se faire plaisir, nous invitant par la même occasion à faire de même, à noter une reprise de Crosby Still & Nash illustrant parfaitement cet état d’esprit.
Respirez un bon coup, appuyez sur play et sentez les effluves de verdure montez jusqu’à vous. Je vous laisse, je vais faire du stop avec eux.

Bigelf – Hex

Bigelf - Hex

Bigelf (à écrire attaché), c’est un groupe de la même veine que The Golden Pig Electric Blues Band (dont j’espère vous parler prochainement (comprenez : quand j’aurai réussi à me procurer les albums)) ou plutôt leurs prédécesseurs, mais en version raffinée. Si vous ne connaissez ni l’un ni l’autre, laissez moi vous résumer la chose :

Des musiciens qui brassent des influences diverses : Pink Floyd, Beatles & Black Sabbath en particulier, réussissant à faire cohabiter les styles propres à chacun dans un même morceau tout en nous évitant à parvenir à différencier les divers gimmicks. Un peu comme si Waters, Lennon, Mc Cartney, Iommi et Geezer avaient décidé de jammer ensemble. Le rêve non ? Eh bien, si sur leurs deux précédents albums, l’idée était déjà là sans parvenir à l’homogénéité parfaite, sur ‘Hex’, le rêve est devenu réalité.

Imaginez un jam entre les musiciens précités, enregistré sur des bandes en provenance directe des 70’s, mais avec une production énorme actuelle (celle que j’adore, massive mais pas tape à l’œil). Sauf qu’en règle générale, me ferez-vous remarquer, qui dit jam dit improvisation et donc, en toute logique, déchets. C’est là que je vous ris au nez (ne le prenez pas mal, c’est pour la chro). Puisqu’il ne s’agit pas d’un vrai jam, juste des musiciens qui ont fait comme si, rien n’est à jeter ! C’est assez incroyable pour être souligné, mais aucun morceau n’est plus faible qu’un autre, un tel niveau d’excellence, c’est rare.
On passe de gros riffs sabbathiens assénés sans modération à ceux plus planants dignes du flamand rose, soutenus lors des refrains par des chœurs beatlesiaques mirifiques et un orgue Hammond omniprésent aux chaleureuses sonorités. Certains thèmes reviennent au long de l’album, mais aucun ennui ne guette, uniquement une vague et sympathique impression de déjà-entendu qui permet de rentrer immédiatement dans ces morceaux pourtant déjà fort accrocheurs.

Je ne saurai que conseiller à tout amateur de ces chères décennies disparues de jeter une oreille à cette production, prouvant qu’à l’heure actuelle, certains sont parvenus à retrouver cette passion, le cachet qui fait tant le charme des disques d’antan. Reste à espérer que les problèmes d’ordre contractuels entre Bigelf et leur maison de disque pourront un jour se régler et les sortir de leur mutisme musical qui entame déjà sa quatrième année.

Mos Generator – The Late Great Planet Earth

Mos Generator - The Late Great Planet Earth

De ces trois américains on ne sait pas grand chose excepté qu’ils jouent dans d’obscurs combos depuis dix ans, que Mos Generator fut formé en 2000 et que ce « Late Great Planet Earth » semblerait être leur deuxième album, ce dont on n’est pas vraiment sûr. Par contre, niveau certitude, un fait s’impose à l’auditeur dès la première écoute : définir le style pratiqué tout au long de ces douze morceaux nécessiterait la création d’une nouvelle étiquette à rallonges et tenter de dégager des influences reviendrait à citer une liste de noms trop longue pour qu’on s’y attarde. Et en fait, le style et les influences, on s’en tape. On se contentera donc de dire que Mos Generator joue du Mos Generator et que ces trois-là sont des petits futés passés maître dans l’art de brouiller les pistes. Les trois premiers morceaux désorientent par leur diversité et alors que l’on s’interroge sur la beauté sombre de « Six Million People Dead » en se demandant à quelle sauce on va être mangé, « Opium Skies » déboule en puissance, le phrasé de Tony Reed évoquant le Ozzy de la grande époque avant que le morceau ne mue vers une sorte de Southern Rock burné. Les bons plans se succèdent avec fluidité, servi par un son magistral fait maison et que ce soit la basse énorme qui explose sur l’intro de « The Myopic » ou le final tendu de « Closed Casket » et sa rythmique binaire mais imparable, cet album réserve son lot de surprises. Le coup de génie réside dans les enchaînements, chaque fin de morceau introduisant le suivant sans discontinuer, créant un flux oscillant entre passages bluesy ou psychés apaisés et lourdeurs toute sabbathienne, alternance que l’on retrouve parfois au sein du même morceau. Si vraiment il fallait décrire cette musique, on pourrait parler de doom aérien, pratiqué les fenêtres grandes ouvertes pour laisser entrer la lumière, mais ce serait presque faire injure à la palette d’émotions proposées. « The last Great Planet Earth », c’est une succession de petits moments de bonheur intenses, de ceux qui rendent la vie un peu plus belle chaque jour. Et on aurait vraiment tort de s’en priver.

Church Of Misery – Master Of Brutality

Church Of Misery - Master Of Brutality

Revoilà les japonais de Church of Misery. Toujours aussi fascinés par les serial-killer. Quatre titres sur six leurs sont consacrés. Passons. Hormis cette fascination morbide, la musique de ces maniaques est d’une efficacité redoutable. Toujours plus heavy, toujours plus doom. Ça dégage grave. Certains passages se rapprochent des ambiances à la Sleep. J’adore. La voix de Yoshiaki Negishi, le nouveau chanteur, est incroyablement éraillée. J’ai écrit éraillée, pas déchirée. Ce qui la rapproche de celle de notre père à tous Lemmy, mais également de celle de Neil Fallon. Fiers de leurs perturbations psychologiques, ces enfants du soleil devant les yeux, nous livrent là, ni plus ni moins, le plus bel ouvrage doom de l’année 2001. Quelle puissance ! Phénoménal. Les titres sont longs, mais Diable, qu’ils sont bons. Qu’on se rassure, cet album ne conduit pas à la dépression sous l’effet de l’oppression monolithique des murs de guitare. Au contraire, les titres sont relativement enjoués. Les changements de rythmes sont assez fréquents. Les solos de guitare aèrent subtilement l’ensemble. Il se dégage de cet album une réelle énergie. Un appel à la vie qui repose à mon sens sur les aspects hard rock, donc de certaines influences blues dont sont empreints ces morceaux. J’en veux pour preuve leur reprise de « Cities on flame » du Blue Oyster Cult. Du hard doom. Voilà de quoi il s’agit.

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