Wrench – Oscillator Blues

Wrench - Oscillator Blues

On est d’abord frappé par la beauté des photos figurant sur la pochette de cet album. L’entrée en matière musicale avec « Gravitron » frappe moins. On est en territoire connu. Desert rock à la Kyuss. Jusqu’à la voix qui ressemble à celle de Mr Garcia. Après tout, rien d’anormal à ce que ces australiens soient inspirés par le désert étant donné qu’ils en disposent d’un sacré paquet de kilomètres carrés. En fait, j’ai l’impression que l’originalité de ce disque s’affirme seulement après le passage électro de « Free ride » (cinquième morceau sur douze). Wrench franchissent là une sorte de Rubicon après lequel ils acquièrent une identité plus personnelle, nettement plus agréable. Les morceaux sont moins formellement heavy. Respirent davantage. En fait, une fois les quatre premiers morceaux évacués, on se trouve carrément en présence d’un sacré bon disque de bidouilleurs psychédéliques comme a pu l’être le premier album d’Earthlings ? Hautement recommandable pour les amateurs du genre. Espérons simplement que c’est dans cette voie qu’ils persévéreront. Quitte à revendiquer une filiation particulière, autant se déterminer pour la moins fréquentée. Les routes restent à tracer dans le désert. Eventuellement plus dangereuses, mais tellement plus excitantes.

Honcho – Burning in water, Drowning in fire

Honcho - Burning in water, Drowning in fire

L’album précédent de Honcho, “Corporate Rock”, m’avait vraiment scié, par sa maturité, sa qualité… Difficile à croire qu’un groupe aussi peu connu, bénéficiant d’aussi peu de moyens, puisse produire une galette aussi jouissive.

Ben croyez-le ou non, je me suis fait la même remarque avec ce nouvel album, mais je suis encore plus impressionné. Ce disque est du bonheur en rondelles. Inéluctablement stoner dans l’esprit (plus que le précédent sans doute), car ancré dans des mélodies planantes (“Seeing Red”) bercées par des riffs évidents (“Messenger Messiah”), ce disque se révèle dès les premières écoutes comme l’accouplement réussi entre hard rock, blues, stoner, metal, etc… Ces vapeurs bluesesques sont d’ailleurs bien présentes tout au long des 9 bijoux qui composent ce disque.

Les chansons sont accrocheuses, bien foutues, touchant à l’épique pour certaines (4 morceaux de plus de 6 minutes, sans la moindre note ennuyeuse !), et originales avec tout ça (voir le refrain “à contretemps” de “Silly”). Difficiles d’ailleurs d’avoir un morceau préféré sur l’album… Mon coeur balance entre les envolées de “Holy” et la charge rock de “Falling behind”, hymne immédiat s’il en est. On notera aussi la prise de risque d’un combo résolument “hard rock” dans l’esprit qui se frotte à des compos limite “balladesques” (la superbe “Through”), ou largement bluesy (“Hangover blues”), avec une réussite bluffante.

Même si les zicos ne déméritent pas une seconde (voir les atmosphères envoûtantes de “Hangover blues” et “Silly” ou autres assauts groovystiques parfaitement maîtrisés), le MVP de l’album est sans nul doute Lars Si, le nouveau chanteur du groupe. La bio de Honcho précise qu’il est issu d’un groupe de “grunge” (voir les relents très proches d’un Chris Cornell ou d’un Layne Staley, effectivement…), mais la puissance de son chant, son assurance, son feeling (voir le troublant “Through”, encore) sont vraiment remarquables.

“Burning…” est une réussite incontestable, sans doute LA sortie qui manquait à ce début d’année morose pour nous redonner goût à la musique ! L’album le plus excitant depuis un bon moment !

Om – Variations on a Theme

Om - Variations on a Theme

Cà fait sept ans qu’on les attendait ces deux-là !! Sept ans depuis qu’ils avaient repoussé les limites du raisonnable en sortant « Jerusalem », morceau-fleuve de 52 minutes devenu culte par tous les amateurs de Doom qui se respectent. A l’époque, ils s’appelaient Sleep et Matt Pike n’avait pas encore décidé de faire saigner les oreilles de tout auditeur potentiel, ce qu’il réussit fort bien à présent avec High on Fire. Remarquez que six ans séparaient déjà ce fameux « Jerusalem » de « Sleep’s Holy Mountain », leur autre album-culte. Mais voilà, ces garçons sont très lents, il faut les laisser évoluer à leur propre rythme. Et qu’ils ne viennent pas nous dire qu’ils ont passé tout ce temps à composer les morceaux de ce « Variations on a Theme » ou qu’ils ont eu du retard en raison du layout de la pochette ! En effet, comme le titre l’indique, il y a une seule idée sur ce disque (reconnaissons au moins leur honnêteté). Pour éviter de nous faire deux fois le même coup, ils ont décidé de l’étaler sur trois morceaux distincts mais çà ne fait pas beaucoup de différence. Vous pouvez sans soucis aller prendre une douche en cours d’écoute, vous ne raterez pas grand chose. A la limite, çà s’emballe un peu à 5’30” sur le troisième morceau, « Annapurna », mais çà ne dure pas longtemps.

Et pourtant…

Pourtant Al Cisneros et Chris Hakius réussissent une fois de plus à nous hypnotiser durant 45 minutes qui en paraissent 3 et on émerge désorienté avec une seule envie, réappuyez sur « play » et replonger. Avec seulement une basse au son hyper-travaillé et une batterie épileptique (l’absence de guitare passe carrément inaperçue), OM nous fait vivre ce qui s’apparente plus à une expérience mystique qu’à l’écoute d’un album. Cisneros récite plus qu’il ne chante des paroles au sens obscur. C’est répétitif, lent et lourd sans jamais être indigeste et même très abordable pour ceux que le mot « doom » effraye. Le tout est produit de façon magistrale par l’inévitable Billy Anderson, déjà présent sur les albums de Sleep (s’il compte sur eux pour gagner de quoi payer son loyer, il est mal barré).
On se demande néanmoins ce que nos deux lascars nous réservent la prochaine fois. Rendez-vous en 2012 pour de nouvelles aventures.

Clutch – Pure Rock Fury

Clutch - Pure Rock Fury

Clutch est l’exemple ultime d’un groupe brillant, original et génial autant sur album qu’en live, dont la carrière est (jusqu’ici) gâchée par des maisons de disques qui font mal leur boulot. Comment comprendre en effet qu’ils font une tournée européenne sans même effleurer la France, la Suisse ou autres, que cet album magique ne soit quasiment pas distribué sous nos contrées (il est sorti il y a plusieurs mois), et encore moins chroniqué dans la presse metal (si ce n’est pour des chroniques débiles faites après une demi-écoute de l’album). Au premier abord, on a du mal à saisir l’originalité de Clutch, ce n’est qu’au bout de deux ou trois écoutes que l’on est frappé de plein fouet par la musicalité de l’ensemble. D’abord il y a la voix de Neil (et ses paroles, passionnantes), gueularde ou mélodique, débordant de nuances. Ensuite, c’est la guitare qui ressort, pachydermique dans les rythmiques et aérienne dans les soli. Mais le plus incroyable c’est cette section rythmique, un batteur et un bassiste qui alignent les grooves comme d’autres préfèrent enchaîner les notes sur un manche de guitare, et quels grooves ! Ils sont innombrables et tous aussi efficaces, véritables ‘nappes’ de musique sur lesquelles se reposent les autres : comment résister aux rythmiques de ‘Careful with that mic’, ‘Red horse rainbow’ ou l’hallucinant ‘Frankenstein’ dont l’intro frise l’indécence, voire l’insolence avec son groove entêtant. L’album regorge ainsi de véritables perles, toutes aussi différentes que géniales. Pour couronner le tout, Clutch nous gratifie de pas moins de trois titres live (dont le brillant ‘Brazenhead’), rien que pour ‘remplir’ le CD (j’en connais qui feraient bien d’en prendre de la graine). Et comme si c’était pas suffisant, ils rajoutent une super plage multimédia (accessible via internet) avec vidéos exclusives entre autres. Jamais un album n’a mieux porté son nom. Allez commander ce CD chez votre disquaire, c’est un ordre. Tout de suite !

Sheavy – Synchronized

Sheavy - Synchronized

Faisant suite à ‘Blue Sky Mind’, ‘Electric Sleep’ et ‘Celestial Hi-Fi’ cette production, qui évolue dans un style très proche de Black Sabbath, fera le bonheur des toujours plus nombreux amateurs de musique dite stoner. Car, autant l’annoncer tout de suite, ce disque est une véritable bombe. Les ambiances varient du rock’n’roll bien rythmé de ‘Next Exit To Vertigo’ au délire aérien de ‘Synchronized’ en passant par des riffs très proche d’AC/DC sur ‘AFX… Thrown For A Loop’. La sublime balade ‘Ultraglide’ qui s’étale sur sept minutes (vu que n’importe comment ce titre ne passera jamais sur la bande FM, il n’y a pas besoin de se gêner) nous démontre que l’élève dépasse le maître Ozzy (parti faire le pantin sur MTV) et son titre ‘Dreamer’ en rotation sur les chaînes commerciales. En résumé ce titre est une acquisition presque indispensable pour les amateurs de rock au sens large ayant d’autres sources d’inspiration que les produits aseptisés que nous balancent les majors à longueur d’année.

Atolah – Relics

Atolah – Relics

Basé dans l’hémisphère sud, à Perth pour être précis, Atolah nous propose une première plaque de gros doom instrumental au tempo ralenti et tout en lourdeur qui se teinte parfois de sludge. Distribué par un label autrichien, le trio composé de Pierre à la basse, Zaheer à la guitare et J-B à la batterie est allé s’enfermer au Bergerk Studio – en Australie Occidentale – en août dernier pour graver dans le sillon une demi-heure de gros son qui dépote redoutablement. L’hiver devait être rude.
Ce premier effort propose cinq compositions originales qui groovent diablement dans la ligne de Goatsnake ou Electric Wizard les parties vocales en moins. Des énormes murs de grattes lancinantes sont érigés en couche de fonds. Sur cette première strate oppressante vient se poser une batterie qui semble s’être calquée sur l’électrocardiogramme d’un comateux et, qui par conséquent, apporte encore une dose de profondeur glauque à l’ensemble. Pour parfaire cet ensemble, un vernis de basse vrombissante est apposé. Bénéficiant d’un mix abouti pour ce style, la basse prend le lead sur les autres instruments pour apporter du relief à ce sombre tableau dont la couleur est annoncée d’entrée de jeu par l’artwork d’obédience doom pur jus.
On nage en pleine folie dévastatrice durant l’écoute de cette plaque qui n’est rage contenue jusqu’à l’oppression. A l’image de ‘Down It Or Leave It’ qui est le morceau le plus long, et celui vers lequel va ma préférence, les Australiens s’acharnent à nous remuer les viscères titre après titres. Le tout n’est pas novateur à proprement parler, mais il faut bien avouer que ce groupe à un sacré potentiel dans ce registre et sort admirablement son épingle du jeu en proposant une production compacte qui envoie du gros bois du début à la fin et provoque donc chez l’auditeur de gros headbanging !

Eon Megahertz – M.E.T.E.O.R.

Eon Megahertz - M.E.T.E.O.R.

Ca fait un bon moment maintenant qu’on entend parler d’Eon Megahertz, jeune groupe français aux influences plutôt enthousiasmantes, qui fait son petit bonhomme de chemin dans la “scène” française, humblement, sans faire de vagues. Personnellement, j’entendais parler de sorties “obscures” (je suis un indécrottable feignant : si ça sort pas chez mon disquaire, je tombe rarement dessus !) ici ou là, sans vraiment savoir de quoi il s’agissait. Tout juste entendu un mp3 ou deux.

Bref, voilà que débarque leur première “vraie” galette, qui plus est chez un label fort sympathique sous la bannière Sriracha / At(h)ome. Ben là, surprise. Du peu que j’en avais entendu, Eon Megahertz a changé. En bien ? Sans doute, mais pas pour tomber du côté “stoner” de la force non plus. Parce que oui, ce groupe que l’on pensait tout acquis à la cause stonerienne française, que l’on se voyait volontiers en fer de lance d’une scène qui commence à se faire bouillonnante (l’air de rien), on a presque l’impression qu’il nous abandonne un peu.

C’est donc la chronique de quelqu’un de satisfait MAIS déçu que vous êtes en train de lire. Satisfait parce que je suis un rocker, j’aime tous les genres de rock, et à ce titre je suis servi, parce que ça balance bien. On passe de chansons que n’auraient pas renié les Backyard Babies (“The speaker machine”), Monster Magnet (“METEOR”), Rocket From The Crypt (“The Atom Age”), les Hives, à d’autres que l’on croirait presque pompées sur les Ramones (“Operation gold in Oran”) ou le AC/DC période Bon Scott (l’intro de “Miss Wong” très proche de “Squealer”), et c’est plutôt flatteur, dans ma bouche ! Bref, ça envoie du bois, mais ça tend pas mal vers le punk-hard-rockabilly, en gros.

Et du coup, ben, le fan de stoner a du mal à retrouver ses petits ! Ca manque cruellement d’une seconde guitare pour renforcer tout ça (le son de gratte est franchement maigrelet, ça manque un peu de saturation et de “gras”).Le puriste pourra donc passer carrément son chemin, tandis que l’amateur ouvert d’esprit y trouvera quelques riffs bien charpentés à se mettre sous la dent (“Corporation fix”, “Under my middle finger”).

Maintenant, tous les ingrédients sont réunis pour obtenir un franc succès dans un secteur largement déserté en France, et on leur souhaite.

Mr. Plow – Head On

Mr. Plow - Head On

Première surprise. Aucune mention de label sur ce disque. Il s’agit donc, semble-t-il, d’une autoproduction. Emballage impeccable avec des trucks à gogo. Ça commence avec un riff stoner sous mixé. Et vlan, voici que le même riff s’épaissit d’un coup avec le chant qui l’accompagne. J’adore déjà. Ce qui frappe tout de suite est la ressemblance de la voix avec celle de Scott Hill. Le reste en est également un peu influencé, c’est clair. Sauf que l’ensemble sonne nettement plus nonchalant. Les morceaux sont plus longs aussi. L’ensemble est très, très rock’n’roll. C’est la deuxième surprise. Mr Plow nous propose un stoner rock détendu. Oui, c’est ça, les gaillards ne semblent pas être particulièrement énervés. Pas trop pressés non plus. Non, tout baigne. Style : il fait chaud, pourquoi ne pas aller tranquillement à la plage ? Attention, comprenez-moi bien, je n’ai surtout pas dis que ce disque était mou. Non, il s’en dégage simplement plus de flegme que dans ce que j’ai l’habitude d’entendre. Bien sûr que ça déboîte à certains moments. Bien sûr que c’est gras à d’autres. Bien sûr qu’il y a de la fuzz. Mais l’atmosphère générale est à l’indolence, au groove paresseux et chaleureux qui s’immisce progressivement dans la caboche pour s’y installer sereinement pendant quelques jours. C’est toute la puissance de ce disque. La faculté de pouvoir vous accompagner dans le quotidien et d’irradier vos neurones de soleil. C’est les vacances, il fait moche, Mr Plow est là. La vie est quelque fois plus simple qu’on ne le croit. Merci Mr Plow.

Monster Magnet – Mastermind

Monster Magnet - Mastermind

Le groupe a connu des hauts et des bas (surtout des bas : overdose de Dave Wyndorf, départ puis retour de Phil Caivano) ces dernières années, et chacune de ses apparitions depuis suscite inquiétude et questionnements pour les fans du groupe. Après une poignée de prestations live d’excellente tenue et un dernier album impeccable, on avait repris confiance. C’est le moment qu’a choisi le quintette pour sortir son dernier disque.

Dès les premiers accords, Mastermind calme les ardeurs et rassure : le riff lent et lugubre du très doom « Hallucination bomb » est probablement l’introduction rêvée pour les fans de Monster Magnet, en ce sens qu’elle rappelle que le « retour aux sources » partiellement entamé sur les dernières galettes du combo est toujours à l’ordre du jour. « Bored with sorcery » déboule ensuite et nous rassure cette fois sur la vigueur et la santé du groupe : une rythmique sautillante, des passage space rock planants, des soli Mundell-iens. Ils n’ont pas perdu la recette ! Ou : comment, en deux titres, remettre tout le monde d’accord.

La suite est à l’avenant, avec notamment l’entêtant « Dig that hole », porté par un lick de basse imparable. Même verdict pour le presque enivrant « Mastermind », qui suit le même schéma. On est vraiment en terrain connu, et c’est bien le Monster Magnet que l’on aime qui se répand sur cette galette ! Un Monster Magnet avec ses légers travers aussi, ne nous le cachons pas, sous la forme de ces titres « d’ambiance » auxquels il nous a habitués (ici « The titan who cried like a baby » ou « Time machine », titres reposant quasi exclusivement sur le chant de Wyndorf sur des nappes de synthés et quelques cordes). Mais les bons titres pleuvent dans tous les sens, avec les très rock « Perish in fire » et « All outta nothin » (ce dernier avec passages en son clair typiques du groupe), ou encore les hymnes immédiats que sont « Gods and puks » et « 100 Millions miles », taillés pour tout démonter en live.

Musicalement (et, on a envie de le dire, « collectivement ») le groupe est au top. Le chant de Wyndorf est toujours aussi puissant et chaleureux, les soli de Ed Mundell sont impeccables, et la section rythmique se révèle clairement mise en avant sur ce disque (des lignes de basse remarquables de Baglino et une frappe de mulet typique de Pantella rythment ce disque sans débander du début à la fin). Après une vingtaine d’écoutes (si si !) ce disque se place clairement dans les meilleures productions du groupe. Toutefois, le groupe évolue tant en terrain connu que le manque de prise de risque peut décevoir un peu : la recette, excellente, est bien maîtrisée, et les cuistots sont au top. Bref, un vrai délice de gourmet, mais sans « l’urgence » que l’on sentait aux débuts du groupe. Ce disque sent moins le soufre, mais il fleure bon le gros space rock bien gras et bien burné ; rien que pour ça, cette production s’impose clairement au top des disques sortis ces derniers mois.

Sixty Watt Shaman – Ultra Electric

Sixty Watt Shaman - Ultra Electric

C’est avec cet Ultra Electric que le monde découvre Sixty Watt Shaman et son chanteur Dan Kerzwick à la voix si particulière. Car, en effet, ce qui frappe le plus sur ce disque, c’est bien se timbre absolument hallucinant qui arrive à compenser le manque de punch de certains titres. Attention, ne me faîtes pas dire ce que je n’ai pas dit : Ultra Electric est un bon album. Son défaut est d’être le premier des Shaman, qui n’ont donc pas encore trouvé parfaitement leurs marques. Du coup, à part le très groovy ‘Rumor Den’ et le très inspiré ‘New Trip’, on ne retient pas grand-chose de ce disque, ce qui est plutôt frustrant car on sent que le groupe peut faire beaucoup mieux. Il faudra donc encore patienter un peu avant que Sixty Watt Shaman ne se positionne vraiment en digne héritier de Kyuss.

Colt 38 – Colt 38

Colt 38 - Colt 38

Mettons immédiatement les choses au point. Il ne s’agit pas pour moi de faire l’apologie de VE. Si l’on accepte l’idée qu’un fanzine est avant tout un lieu d’expression de la subjectivité, je voudrais vous faire partager la mienne, dénuée de quelque considération économique ou stratégique que ce soit. Mes motivations sont entièrement dictées par le feu conjoint et irrépressible de l’enthousiasme et de la passion. C’est pourquoi je me permets d’écrire quelques lignes sur la première production de VE duquel je ne possède aucune action. Ces précautions prises, j’espère éviter les éventuelles accusations de partialité, voire de concussion. En tant que ressortissant français, je voudrais dire une fois encore l’amour que je porte à la scène italienne. Ce disque ne me fera pas changer d’avis. Au contraire, il le renforce. Colt 38 est un projet initié par Claudio de That’s All Folks ! Ce dernier s’est entouré de talents issus de groupes tels que Hogwash, Acajou, Vortice Cremisi et Verdena pour un projet de très haute tenue. A l’image des Desert Sessions aux USA ou de Greenleaf en Suède, les pratiques de ce type réunissent grosso modo les acteurs d’une même scène musicale dans leurs pays d’appartenance respectifs. Si on peut dire que ces réunions sont plus ou moins abouties, il est manifeste que dans ce cas précis, elle est une réussite totale. Huit morceaux absolument lumineux à la fois par leur diversité et par le haut degré d’inspiration dont ils sont porteurs. Rythmes d’une souplesse féline (Snakes, snails & puppy dog tails), mélopées envoûtantes (« Midnight siren blues »), richesse de l’instrumentation (Hammond, Rhodes, mellotron, djembé, flûte, mandoline, effets divers, etc.) et des arrangements. On nage en plein bonheur. Le disque ouvre sur « The gambling » s’appuyant ouvertement sur des guitares stoogiennes. Puis, embraye sur un hommage appuyé à leur compatriote Ennio Morricone. Opération extrêmement subtile et chargée d’humour. Ensuite, on approche des sphères quasiment vierges à peine empruntées par des groupes comme Earthlings ?, Wellwater Conspiracy ou encore Spor. Là, on saisi le temps d’un morceau, une proximité avec le fabuleux « Jalamanta ». Si des images affleurent, si des associations se dessinent ponctuellement, les morceaux de ce disque conservent toujours suffisamment de distance par rapport à ce qui a déjà été fait par ailleurs Ce qui leur confère sa force et ce caractère rétro-novateur si réjouissant. Italian rock : ti amo !

Repomen – Roadkill

Repomen - Roadkill

Un gros direct en pleine face! Ca ne vient pas de moi mais des Repomen. Ces musicos ne font pas dans la dentelle et vous envoie une volée de gros son sans échappée possible. Né sur les cendres encore chaudes des défunts Borehole, ce groupe opère toujours sous la forme d’un quartet mais maintenant avec 2 grattes et un bassiste – ayant repris le micro – qui n’est autre que le dynamique Peter van Elderen de Peter Pan Speedrock. Point de speed rock ici mais bien du gros stoner rock où le mid-tempo règne en maître et où les grooves altérés de patate bien musclée ont la part belle.

La première plage vous plante un décor façon viking où le refrain n’est autre qu’une martèlement du nom du groupe appuyant la rythmique assénée à grands coups de burin. Ca bastonne de tous les côtés et seul le riff plus léché du 2e morceau vous donne un instant de répit dans cet univers de béton et d’acier.

L’auditeur se trouve pris dans le tourbillon sonore et il n’a pas question de toucher à la sono sauf si c’est pour monter le son. Les plages suivantes révèlent de très belles alternances de riffs aussi meurtriers que maîtrisés. Pas le temps de s’ennuyer une seule seconde ou de voir dans la suite un bis repetita des autres morceaux, Repomen cultive un sens personnalisé des suite d’accords et de notes qui les démarque aisément du reste.

Que dire du son outre qu’il est énorme? Il fait surtout l’objet d’un mix de toute grande classe de la main du grand sorcier de la table, à savoir Mo le guitariste et soundman. Ce qui est remarquable, c’est l’épaisseur de chaque instrument pour un final tout en rondeur et en dynamique. Chacun y a sa place et l’oreille peut facilement en discerner les subtilités. Et quelle batterie! Une frappe de bûcheron scandinave du 19e siècle, du temps où l’on se servait d’une hache et non d’une tronçonneuse. A préciser que le cogneur est en fait une cogneuse de premier ordre en la personne de Miriam.

Si Repomen peut choquer au départ par son tranchant et sa lourdeur, une écoute attentive en fait un groupe super intéressant tant le son est riche et tant leur musique est travaillée.

Eindhoven, de par son passé rock, a déjà bien tremblé ces dernières années. Outre la crise financière et économique actuelle, la ville peut maintenant trembler au son des Repomen. A voir absolument! C’est une grosse tuerie! C’est d’ailleurs dans le titre de l’album. On vous aura prévenu…

Phazm – Antebellum Death ‘n’ Roll

Phazm - Antebellum Death n Roll

Phazm, des frenchies. Sortis de nulle part, comme ça. Louche. Qui plus est, le quatuor se positionne clairement dans la trace glaireuse d’un Down ou autres gros zicos du bayou. Le musicien de Phazm est barbu et crasseux ou n’est pas, point. Dubitatif, je jette la galette dans la platine et me mange le premier riff en pleine poire.

Phazm ça dépote. A déconseiller à ceux qui trouvent Nebula trop heavy. Très vite, on sait où on met les pieds, car “How to become a God” commence par un riff que ne renierait pas Pantera, lancé par un harmonica lancinant qui fend l’intro pour mieux dégager le chemin à Pierrick (de Scarve) et ses vocaux gutturaux. Le bonhomme éructe sur tout l’album, ce qui pourra en énerver plus d’un : s’il ne tombe pas dans les travers du Death pur et dur, il évolue quand même dans des sonorités bien thrash. Néanmoins, son chant glaireux, gentiment éraillé au Jack D et à la binouze, marque cet album de son empreinte.

Dans un deuxième temps, c’est la lourdeur du riff qui marque : même si le tempo est souvent un peu trop rapide à mon goût (suivi par une double grosse caisse un peu trop “metal”), la qualité du riff est bien là, et les breaks, nombreux et originaux, sont bien amenés.

Pas mal de chansons sortent du lot, mais l’ensemble montre quand même une belle homogénéité. Sans paradoxe, Phazm gagne aussi ses lettres de noblesse dans les morceaux les plus “décalés”. Ironiquement, par exemple, le titre “Sabbath” ressemble à tout sauf à Sabbath, sorte d’instru à l’harmonica parfumé à la gaudriole. Idem pour “Lorelindorenan”, un très joli instrumental qui pue la bayou asséché, avec ses harmonies de gratte acoustique et son harmonica larmoyant. Sans parler du bluffant (car poisseux, glauque, torride parfois) “Damballah”, lardé de grattes acoustiques, aux limites du primitif ethnique.

Bref, je conseille vivement cet album aux amateurs de Down, pas effrayés par le metal bien frappé, tendance thrashisant, aux influences sudistes bien cintrées. Pour les autres, je peux rien faire pour vous, circulez !

Neurosis – A Sun That Never Sets

Neurosis - A Sun That Never Sets

On s’écarte des sentiers bien battus du stoner mais cette digression en vaut vraiment la peine. Pas évident d’aborder l’écoute de cette plaque mais la persévérance paie et on ne tarde pas à découvrir les qualités intrinsèques et les émotions subtiles de Neurosis.

La voix, dérangeante et personnelle, révèle des trésors de sensibilité même si on n’a pas affaire à un vocaliste à la Maynard James Keenan ou encore à la John Garcia. La tessiture et le timbre se baladent plutôt dans le spectre sonore d’un certain Tom Waits mais avec plus de rage et de désespoir que de folie et de dérision.

Encore une fois, on ne nous livre pas ici un produit stoner 100% pur malt mais plutôt un approche musicale rock très mature et dans un mix tantôt noisy tantôt intimiste. Ce qui frappe surtout, c’est la dose intense de tristesse voire de mélancolie qui se dégage de leurs chansons, même quand le bois est envoyé sans retenue. Et la beauté de ce désespoir surtout! Les mecs, sans être des virtuoses mais exécutant parfaitement leur set, s’évertuent avant tout à créer des ambiances et faire jaillir des émotions personnelles dans des structures évitant soigneusement l’éternel “couplet/refrain/couplet/refrain/bridge”.

Neurosis n’hésite pas à inclure des instruments comme les cordes et autre piano. Comme quoi on n’a pas a s’enferrer dans des schémas musicaux dogmatiques pour attirer l’attention et en découdre avec ce monde.

Il est peu probable (mais tout arrive) que l’on tombe à genoux lors de la 1ère écoute de cet album. C’est plutôt un trip long et planant qui doit se distiller dans le temps avec patience et sagesse. Mais là, je deviens trop sérieux. Enfin, c’est ce que cet opus m’a inspiré. Prenez votre temps, respirez un bon coup, en bon bouilleur de crû, le résultat n’en sera que meilleur.

Glasspack (The) – American Exhaust

Glasspack (The) - American Exhaust

Comme le disent si bien nos agitateurs culturels faisandés : « Attention Talent ». Et oui. S’il y a un seul disque de la cuvée 2001 à acheter, c’est incontestablement celui-là. Une bouffée d’air vicié aux effets immédiatement bénéfiques sur le teint, les rides et la cellulite. Et pourtant. On pourrait s’y méprendre car Exhaust signifie « gaz d’échappement » mais également « éreinter » ou « épuiser ». C’est vrai que les ricains polluent et personnellement, me fatiguent souvent. Et pourtant. Que leur rock’n’roll est bon. Que Glasspack est génial. Du punk rock avec un son stoner. Du stoner rock joué dans un esprit punk. Tout y est surdimensionné. Américain quoi. La basse est énorme. Les guitares sont épaisses. Le chant est déchiré juste ce qu’il faut. Le tout est terriblement gras. Et le gras, c’est bon. Quelle mixture cholestérolémique ! Les morceaux s’enchaînent sans le moindre temps mort. Les huit morceaux sont tous assez différents les uns des autres et pourtant cet album est d’une cohérence, d’une limpidité exemplaire. Il est des endroits où les punks ne se cachent pas pour extérioriser leurs penchants pour le psychédélisme. Le Kentucky, d’où nous provient cet opus exaltant serait-il l’équivalent de notre Gers ? Un endroit où l’on peut manger gras sans risquer l’infarctus ? Où manger gras vous préserve des maladies cardio-vasculaires ? Il faut croire que oui. Ces américains sont vraiment trop fort. Me faire admettre que respirer des gaz d’échappement peut renforcer le système immunitaire. Du coup, à l’instar de W., je m’oppose fermement à faire appliquer les accords de Kyoto. Rien ne doit jamais venir entraver la production discographique de The Glasspack.

Se connecter