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Après de longues hésitations quant à la panoplie à emporter au vu des possibles plans humides concoctés par la météo, nous reprenons la direction du lieu emblématique du pont aérien de la guerre froide pour un – déjà – dernier jour à l’affiche fort alléchante ! Pour info il n’a pas plu ce jour là.
NIGHT BEATS
Les célébrations débutent avec le trio vintage, ses vocaux éthérés et sa batterie minimaliste. C’est suranné et hyper groovy ! Le public tape du pied dans la petite salle aux sons de plans du rock’n’roll de l’âge de gloire. Les lights rouges soutiennent un côté old-school très soigné qui s’est baladé dans les eaux soul avec des passages durant lesquels le fantôme de Charles Bradley volait dans l’air du Columbia Theater. Une savoureuse mise en bouche pour cette journée tournant autour de la trilogie du désert et d’un dessert annoncé comme légendaire.
MONDO GENERATOR
Lié à la légende Kyuss, Mondo Generator et sa figure de proue, sont omniprésents sur nos scènes et sur nos platines avec la ribambelle incessante de sorties allant de l’indispensable [ndlr : ah ?] au tout à fait dispensable. Nick est conscient de la chose, en joue et se fait plaisir ; désolé pour les monomaniaques de Kyuss, ce trio fait du punk voire du métal empreint de stoner et ne se contente pas d’égrainer les compos anciennes des groupes ayant contribué a la constitution du mythe Oliveri. Les compositions maison prendront nettement moins que « Supa Scoopa And Mighty Scoop » du mythique Welcome To Sky Valley (un comble pour un titre sur lequel il n’a jamais joué, d’un album où il ne figure pas !) ou que « Green Machine » du légendaire Blues For The Red Sun préférée par le public à « You Ain’t Worth A Dollar, But I Feel Like A Millionaire » de l’apogée de QOTSA lors d’un vote remporté par ceux qui gueulaient le plus fort. Débutée à l’heure de la collation de l’après-midi, la performance des Étasuniens a explosé le temps de jeu à disposition sur la scène intérieure. Le public semblait satisfait surtout après le dernier titre joué, mais c’est l’intégralité du programme de la journée dans la Columbia Halle qui a ramassé, et jamais le retard ne sera comblé malgré le professionnalisme des dynamiques techniciens de scène.
BOTTENHAVET
Forcément débarqués à la ramasse, parce qu’il n’est pas concevable de louper « Green Machine », et partis avant le final en raison du chevauchement avec le set du désert, nous passons du bon temps avec la formation au style ancré dans les années 70. Menée par son chanteur aux faux airs de fils illégitime du Big Lebowski et de l’héroïne de Stieg Larrson, le groupe suédois a envoyé un rock énergique, parfois lancinant et délicieusement daté. Promis : on se rattrapera la prochaine fois !
TAMIKREST
Ambiance découverte pour vos serviteurs au premier rang pour le set de Tamikrest. Emmenés par Ousmane Ag Mossa au chant et guitare, le combo de “psych-touareg” comme on peut l’entendre décrit de manière fort simpliste dans différents organes médiatiques, engage un set chargé d’un groove généreux. On est bien dans une tendance psyche avec cette lancinance rythmique qui structure chaque titre. Même si la structure du groupe repose sur un socle “électrique” assez standard (guitare-basse-batterie) les emprunts la musique centre-africaine et nord-africaine sont significatifs, a fortiori quand il est fait usage d’instruments traditionnels, en sus des guitares électriques et instruments plus habituels sur cette scène. Les degrés montent petit à petit et une gentille fièvre dansante s’empare des premiers rangs qui ondulent béatement au son de ce set feel-good fort bienvenu.
RUFF MAJIK
Difficile de capter les sud-africains de Ruff Majik sur scène : lorsque leurs rares opportunités de partir en tournée ne sont pas annulées, la sélection de pays est restreinte et passe rarement par chez nous. S’il faut aller à Berlin pour les voir, nous irons à Berlin ! D’autant plus que les dernières productions du groupe nous ont enthousiasmé et nous voulions voir ces titres en live. Apparemment nous ne sommes pas les seuls dans ce cas, la salle du Theatre étant fort bien remplie tandis que le quatuor prend la scène dans une halo bleu-violacé. Le premier titre “Wax Wizard” est ravageur et pose en quelques minutes les bases d’un set prometteur – même s’il n’atteindra plus néanmoins ce niveau de tension. Protéiforme, rebondissant de break en break, assénant son riff principal dévastateur à tout bout de champs, ce morceau aura fait des dégâts et montré tout le potentiel du groupe. C’est en revanche une bonne illustration d’une set list que l’on aurait préférée différente, aujourd’hui un peu en mode montagnes russes : à l’image de ce premier titre issu d’un vieil EP du groupe, une large part des morceaux de ce soir sont anciens ou rares, ce qui rend l’appropriation par le public plus difficile. Une moitié de la set list provient néanmoins de leurs deux derniers LP, mais pas forcément toujours leurs titres les plus efficaces – hormis “Rave to the Grave”, certes emballant mais pâtissant un peu de son passage en mode “guitares live” (sans le gimmick de clavier). Heureusement, qualitativement la sélection reste bonne et ratisse large, ce qui permet de maintenir la tension dans le pit où le headbang est largement pratiqué. La bande à Johni Holiday ne s’économise pas et déroule son set constamment sur la brèche, entre pure débauche d’énergie brute et totale maîtrise. Le dernier titre, “Delirium Tremors”, met finalement tout le monde à nouveau à genoux, interprété depuis le pit par le bassiste Jimmy Glass qui regarde ses copains sur scène en contre plongée. Un set de haute volée, qui aurait pu être dantesque avec une set list un peu retravaillée.
BRANT BJORK TRIO
Deuxième légende du désert à se produire sur la grande scène lors de cette ultime journée, le trio de Mr Cool attaque son set – en retard – sur un étonnant mais très sympathique “Buddha Time” devant une salle comble et conquise d’avance. Notre scepticisme habituel a rapidement cédé sa place à un plaisir de circonstance, le trio agissant en antiseptique qualitatif. La configuration avec Super Mario (Lalli) à la basse est foutrement efficace ! On tape du pied du premier au dernier rang, les projections du desert californien soutiennent le propos et le set est impeccable de bout en bout (on se croirait transposés dans la B.O. de « Paris, Texas »). Coutumier de nos scènes depuis des lustres désormais, Brant a livré le meilleur de ses concerts auquel nous avons eu le plaisir d’assister ces dernières années (et ça fait des brouettes pleines). Un set couvrant plusieurs époques de la discographie solo (ou presque) du frontman (dont de larges pans issus de Saved by Magic ou Jalamanta, ce qui n’était pas pour nous déplaire)avec des vétérans rompus à l’exercice scénique du jam cadré (l’esprit de Fatso Jetson était présent). On notera en particulier l’immensément groovy “Stackt”, le classique “Too Many Chiefs…” un peu remanié mais toujours efficace, et surtout un final classique mais un superbement cool sur “Lazy Bones / Automatic Fantastic”. Un show qui a délivré toutes ses promesses et satisfait toutes les attentes. Nous avons quitté la Colombia Halle avec du sable plein les godasses et des étoiles dans les yeux.
SUNNATA
La perspective du set de Sunnata nous a mis en joie, la troupe polonaise foulant rarement nos contrées en termes d’activité scénique. Auteurs d’une poignée de disques très qualitatifs, les voir enfin sur scène relève de l’aboutissement naturel des choses. Avantage ou inconvénient des festivals, la programmation et ses enchaînements parfois complexes ou audacieux rendent les choses compliquées pour nos cerveaux faibles. Il en est ainsi quand on quitte le set groovy en diable de Brant Bjork avant la fin (le retard généré par le dérapage du 1er concert de Mondo generator aura des répercussions toute la journée… merci les gars !) pour se plonger dans le Theatre et son ambiance sombre et prenante où Sunnata a déjà commencé à faire parler les premiers décibels. Il faut donc un petit moment pour “rentrer” dans ce set, qui alterne les plans de pure puissance frontale (quelques beaux assauts de riffs bien doomy) et les plans plus atmosphériques. A peu près ce à quoi on s’attendait en réalité, stylistiquement on n’est pas surpris. L’ensemble est joué avec sérieux et autorité par le quatuor, sûr d’eux et de leur musique – à raison. La salle est généreusement remplie mais on ne se sent pas tassé, signe que le groupe était attendu, mais que les “produits d’appel” sur la main stage lui font un peu concurrence, dans des genres radicalement différents toutefois. Nous trouverons en revanche que les séquences plus “atmosphériques” développées à l’envie par le groupe, si elles sont parfaitement exécutées, dissolvent un peu l’efficacité globale du set, qui aurait peut-être gagné – en contexte festival – à se concentrer sur des compos un peu plus “directes”. Un bon set toutefois, qui nous aura surtout donné envie de revoir le groupe, en club par exemple.
MASTERS OF REALITY
C’est avec un petit pincement au cœur et la gorge serrée que l’on voit le légendaire Chris Goss monter sur scène le pas hésitant, s’installant avec difficulté sur le tabouret en milieu de scène qu’il ne quittera pas de tout le concert. Habillé avec grande classe, il ne lui faudra pas longtemps pour montrer qu’il est musicalement bien loin d’être diminué le moins du monde, loin s’en faut. En réalité, il lui suffit de quelques secondes et d’entonner les premières lignes de chant du classique et classieux “The Blue Garden” pour que la profondeur et la chaleur de sa voix incomparable ne viennent conforter toute l’immense salle. Nous voilà quand même revenus plus de 35 ans en arrière, aux débuts de la carrière d’auteur-interprète de Goss (rappelons que le grand gaillard est surtout connu en tant que producteur légendaire), comme si cette parenthèse n’avait jamais existé. Goss s’est entouré pour cette tournée de sa fidèle section rythmique (en particulier John Leamy, son vieil et fidèle ami batteur mais aussi Paul Powell, bassiste extraordinaire ayant entre autres officié auprès de Jamiroquai) et il a spécifiquement invité en complément son copain Alain Johannes, un autre ami qui a gravité dans les mêmes sphères de musiciens, et partage avec Goss la caractéristique d’être à la fois un producteur reconnu et un musicien-chanteur remarquable (ce qu’il confirmera derrière le micro entre autres sur “Hangin’ Tree”, titre qu’il a co-écrit pour les Desert Sessions). Se reposant largement sur ses premiers disques (dont beaucoup de Sunrise on the Sufferbus / 1992), Goss oublie un peu quelques pépites issues de ses disques des années 2000, c’est dommage. Mais d’un autre côté, qu’aurait-il dû sacrifier parmi les perles interprétées ce soir ? Le sabbathien et bluesy “Alder Smoke Blues” ? Le solide “Third Man on the Moon” ? Le presque punk “Time to Burn” (où Oliveri s’empare du micro) pour un final (d)étonnant ? On pourrait quand même discuter un peu de la teneur du set, quand on met par exemple en perspective ce quasi-onaniste break bluesy en mode impro, pas flamboyant et un peu longuet, avec le fait qu’ils n’ont pas eu le temps d’interpréter les démoniaques “She Got Me” et “Domino” pourtant prévus en clôture du set.
Le retard de la main stage (merci encore Nick) et nos pauvres corps meurtris criant famine, il s’avère impossible techniquement d’assister au set de Full Earth, qui nous faisait pourtant de l’œil, avec ses membres de Kanaan… Tant pis !
PENTAGRAM
Le dernier concert d’un festival est à plus d’un titre aussi son apothéose, avec tout le public de la journée qui se présente devant la main stage avec l’envie de profiter à plein de ces dernières chansons du fest pour cette année. Quand, en plus, le headliner de la journée est Pentagram, et que ce dernier a annoncé la fin de sa carrière scénique dans les prochains mois (ce concert étant affiché comme son dernier à Berlin), autant dire que l’excitation est forte. Greg Turley, fidèle bassiste et co-pilote discret et solide du bateau Pentagram depuis longtemps, a en outre annoncé l’arrêt des concerts pour lui, faisant de cette soirée le dernier concert de sa carrière au sein du groupe ! L’émotion est donc largement au rendez-vous quand, clopin-clopant, l’inusable Bobby Liebling monte sur scène, portant l’un de ses sempiternels hauts bouffants à paillette, son pantalon moule burnes favori et ses bottes aux talons de 15 cm… What else, pour un musicien de 71 ans ?
Dès les premiers coups de médiators du brillant guitariste Matt Goldsborough sur “Run My Course”, on est embarqué dans un périple qui mettra plus d’une fois en danger notre santé mentale. Est-ce la meilleure prestation du groupe à laquelle on a assisté ? Difficile à dire avec assurance, mais pour chaque musicien, le contrat est plus que rempli, en particulier pour ce cher Bobby, pas avare en mimiques saugrenues et pas de danse décalés. Sans contrainte (pas de limite sur l’horaire de fin) le groupe déroule une set list de référence où figurent à peu près tous leurs classiques (on pourra regretter à la limite l’absence de “All your Sins”) : les doomy “When the Screams Come” ou “The Ghoul”, le lugubre “Be Forewarned”, “Sign of the Wolf”, “Petrified” (initialement pas prévu), le nerveux “Relentless” avec une pause sur son break final, ou le tortueux et gracieux “Last Daze Here”… N’en jetez plus ! Enfin on reprendra bien une rasade de ce pseudo medley “Forever my Queen / 20 Buck Spin” pour la soif, et c’est fini ! Embrassades, salutations au public, hugs entre musiciens, sourires, applaudissements, oreilles qui résonnent… Tout se mélange pour une fin de concert et de journée dans les étoiles…
C’est le cœur un peu lourd que l’on quitte ce Desertfest Berlinois si particulier. Ils sont rares ces festivals où l’ambiance est si agréable et où l’on sent vraiment cet esprit de communauté musicale (où l’on peut taper la discute peinard dans la cour avec des musiciens de Elder, Kadavar, Greenleaf, Plainride… qui viennent par plaisir, ou commander sa pizza au food truck avec Nick Oliveri qui fait la queue derrière). Quand en outre la programmation musicale était du niveau auquel on vient d’assister pendant trois jours, et que les conditions d’accueil étaient impeccables, il est difficile de se dire que c’est fini pour cette année. Mais il n’est de si bonne compagnie qui ne se quitte, dit-on, et il est temps de saluer les amis et collègues répartis un peu partout dans le complexe Columbia en cette agréable nuit berlinoise, en nous disant sur le chemin du retour qu’il va être difficile d’attendre encore une an…
Vos serviteurs, accueillis par un soleil radieux, arrivent dans l’enceinte du festival avec le sourire (quelle journée de la veille !) et l’esprit grand ouvert : cette journée s’annonce atypique, avec plusieurs groupes inconnus au bataMaryse Miegeillon ou tout simplement étonnants. On se prépare donc à un lot de surprises et de découvertes.
Petite déconvenue toutefois, nous raterons le premier groupe de la journée, les locaux de Go Mahhh, qui aura remplacé Cava au pied levé, suite à l’annulation de ces derniers.
EINSEINSEINS
La journée commence donc pour nous dans le Theatre, avec les bien nommés germaniques “UnUnUn” (!). Le trio ne se cache pas derrière son petit doigt au moment de sortir les étiquettes musicales, et révèlent assez vite leur passion du kraut rock de la grande époque. Même si les plans répétitifs aux atours électro et sonorités de synthé bien old school (Vangelis, sort de ce clavier !) se succèdent en nombre, les deux claviéristes s’emparent assez souvent de leurs instruments à corde (guitare et basse) pour s’engager dans des plans évidemment plus rock. La variété ainsi apportée à un style qui serait sinon un peu trop ennuyeux est plutôt bienvenue, et le public y répond lui aussi favorablement, qui dodeline gentiment pendant tout le set. Très agréable entrée en matière !
DIRTY SOUND MAGNET
Nous avons rarement l’occasion de voir le trio suisse sur les planches, et il nous fait bien plaisir de le retrouver pour ouvrir la très grande Halle en ce début d’après-midi. La tonalité musicale convient parfaitement à la journée, qui finalement se dessine largement (mais pas totalement) autour de diverses variantes de musique psyche. Dirty Sound Magnet excelle dans ce style et il ne faut pas plus de quelques minutes pour en faire la confirmation. Le set décolle très fort et assez vite, avec certes une rythmique basse-batterie redoutable, mais aussi un Stavros Dzodzos au chant/guitare littéralement possédé. Un “ventre mou” se dessine toutefois en milieu de set, avec peut-être un peu trop de titres plus calmes ; si ces morceaux font la démonstration de l’excellent feeling développé par nos musiciens, ils freinent un peu les ardeurs psych rock du public. Mais il faudrait faire les difficiles pour ne pas reconnaître que ce concert était de très bonne facture, et qu’on aimerait voir ce groupe plus souvent sur scène.
ZAHN
Le trio germain prend place de manière particulière sur la plus petite des scènes (exceptée celle sise au beau milieu du foodcourt/beergarten). Il faut relever ici qu’en plus des deux scènes où se succéderaient les formations, le spectacle était aussi assuré à l’air libre sur une petite scène qui a vu se succéder DJs, kakaokés, groupes et performances durant les trois jours. C’est dans un registre mixant globalement le garage punk, le kraut rock et le grunge que les spécialistes en dentition (ndlr : blague pour germanophones) ont envoyé un set avec la batterie en avant de scène et les deux autres protagonistes flanqués sur les côtés avec leurs instruments à cordes ainsi que leurs synthés délicieusement vintage. Le public était un peu clairsemé durant cette prestation instrumentale qui est passée de parties très space à des plans foutrement bourrins sans pour autant nous casser les dents.
SIENA ROOT
Toujours très discret, le quatuor suédois se présente sur la main stage avec un paquet d’arguments à faire valoir. Musicalement, on connaît la qualité du groupe, qui déploie très vite les bases de son heavy rock psyche très vintage. Les rythmiques et sonorités sont variées, et l’on ne s’ennuie pas une seconde. Durant la moitié des titres à peu près, Zubaida Solid, par ailleurs frontwoman efficace et chanteuse remarquable, se met aux claviers pour ajouter cette patte psych old school que rien d’autre qu’un vieil orgue Roland ne peut proposer. Les années d’expérience scénique sont tangibles, et la maîtrise démontrée par les musiciens est tout simplement impeccable. Siena Root, trop rare sur scène (prestations ciblées ou tournées lointaines) et sur disque, confirme son importance incontestable sur la scène psych rock européenne. La grande classe.
DAEVAR
Avec Amber Eyes tout récemment sorti, le trio allemand était fort attendu par la moitié de notre binôme de reporters. Un chevauchement de 5 minutes avec la grande scène empêchera une partie du public d’assister au tout début de ce premier set militant du jour. Le trio emmené par un guitariste affûté et une bassiste pailletée, toujours souriante, a envoyé son doom lourdement et très lentement devant les rangs serrés d’un public conquis d’avance. Les voix sont aériennes et le propos engagé : le batteur frappe comme une mule avec son t-shirt antifa et la l’arrière de la basse de Pardis est marquée d’un « Woman Life Freedom » vindicatif. Le propos féministe sera souligné lors de l’envoi de « Leila », tirée du premier effort Delirious Rites, pour lequel l’invitation est faite au micro de laisser la place devant le pit aux femmes – qui doivent se battre pour leur place dans la société actuelle, pour résumer le discours tenu sur scène. Malgré quelques problèmes de son ressentis en fin de set, la performance a été impeccable avec un public réceptif qui a chanté, une salle pleine et une maîtrise parfaite du style. Une des grosses baffes de ce deuxième jour où l’éclectisme était de rigueur.
DŸSE
Comme Monkey3 la veille, le duo allemand fait partie des routards de ce festival. Ceci explique certainement aussi leur placement avantageux dans le running order de cette deuxième journée de festivités – en plus de l’engouement du public allemand pour ses groupes nationaux. Le duo batterie-gratte conscient fout le boulet d’entrée de jeu en attaquant de manière trépidante son concert. Les slogans sont scandés sur fond de rouleau-compresseur rythmique. On en prend plein la tronche avec un adroit jeu de lights qui souligne efficacement le style musical pratiqué soit un bon gros rock alternatif super bruyant ! Nous restons néanmoins un peu dubitatifs sur la place de ce groupe aussi haut sur l’affiche.
ZERRE
Depuis quelques heures – et a priori jusqu’à la fin de journée – on rentre dans la zone de turbulences WTF de la programmation musicale : chaque groupe est soit une étrangeté, soit une sorte d’anomalie spatio-temporelle. Zerre est en plein dedans. En effet, le groupe propose une sorte de thrash metal crossover bien old school – période années 80, début 90, en gros – complètement assumée. Ça sent le “quitte ou double” par l’équipe de programmation… et c’est un carton ! Ayant probablement accumulé un bon stock d’énergie non diffusée sur le début de la journée, une large frange du public se lâche complètement devant le set intègre et fou furieux des allemands. La fosse, d’abord expectative, se transforme vers le milieu du set en pur bouillon metal incandescent, pour finir sur les trois derniers titres en furieux mosh pit des familles. Le final sur “Whiplash” de Metallica aura laissé des traces et des bleus… Salvatrice parenthèse !
The CRAZY WORLD OF ARTHUR BROWN
Quel étrange choix de programmation de sortir Monsieur Arthur Brown de sa confortable naphtaline pour nous gratifier de son auguste présence… Fi de médisance gratuite, c’est la surprise qui nous prend en premier lieu, d’autant plus que vos serviteurs, encore dans leur prime jeunesse, n’ont pas forcément baigné dans les années de gloire du sénior-grooveur anglais. C’est donc l’esprit grand ouvert et les oreilles bien décrassées par un set précédent assez furieux que nous abordons ce concert – à l’image d’un large public souriant qui s’est déjà massé dans la grande salle. La bonne humeur est le premier sentiment qui émerge dès les premières mesures du spectacle du monsieur. Précédé de ses musiciens (pas des bras cassés : ça tricote), Brown monte sur scène avec une théâtralité outrancière et surjouée, complètement décalée avec nos standards. Il prend la scène maquillé, chapeauté, déguisé, casqué… procédant aux changements entre les morceaux lorsque nécessaire. Paillettes et couleurs pétard, et même le feu, lorsqu’il déboule avec un casque littéralement enflammé pour interpréter son classique “Fire” – qu’il dégaine en troisième chanson du set (là où tout musicien un peu calculateur aurait évidemment attendu la toute fin du concert pour sortir sa chanson la plus attendue). Notre sympathique chanteur n’a pas besoin de ce type de calcul ni d’artifice pour s’imposer : il peut se reposer sur une voix toujours impressionnante de chaleur et de puissance à 82 ans, et sur des compos certes inégales mais qui ont pour point commun de faire inéluctablement dodeliner un public en joie. Le pari du décalage fut – cette fois encore – payant, et nous avons passé un bon moment à honorer cet artiste oublié et pourtant à l’influence évidente sur de larges pans de la musique contemporaine.
APTERA
Overlap de 10 minutes entre les deux salles et les deux ambiances marquées du jour. On délaisse les plans babas pour un comeback en territoire metal nettement plus rugueux. Les briquets allumés au vent sur fond de chants d’oiseaux sont délaissés pour du dur qui n’attendra pas les retardataires. L’aile bourrine du genre se décline au féminin et à l’international : le quatuor qui a élu la capitale du monde libre comme port d’attache est actif dans un sludge doomisant tirant parfois sur les plans stoner ou black. Ça cogne et ça vocifère en duo (basse et guitare). Parfois quelques mélopées ou passages crossover viennent vivifier le set qui ne dérapa jamais dans la monotonie. Le headbanging accompagne « Selkies » ou les accélérations de tempo de « Nepenthees » issus du dernier long format « You Can’t Bury What Still Burns ». On retrouve des accents militants sur « When The Police Murder » introduite en rappelant Georges Floyd et les excès de la maréchaussée berlinoise (omniprésente partout en ce jour de finale de la Coupe d’Allemagne). « Black Rose » tiré de la plaque éponyme (tout comme « The Knight Twist ») qui a déjà 5 ans fait le carton plein avec une basse rebondissant dans un paysage black. Carton plein de l’orga avec le pari métal du jour qui a permis de constater que ce style fait encore mouche auprès du public stoner. Ça permet aussi d’éviter l’ennui qui guette lorsque les shows convergent trop.
OSEES
Avouons-le : votre serviteur partait avec un a priori négatif à la perspective de ce concert, dont l’ostentatoire double kit de batterie venait occuper tout le front de scène. il faut dire que j’attends encore d’être convaincu par la supposée “puissance” supplémentaire apportée par cet artifice de pure coquetterie esthétique qu’est le jeu à deux batteurs qui jouent la même chose. Le professionnalisme et l’objectivité chevillés au corps, c’est sans préjugé que nous assistons aux premières minutes un peu bordéliques de ce concert, qui voit les musiciens finir leur soundcheck un peu tardivement, et engager leur set d’affilée sans vraiment plus de formalisme. Et très vite c’est l’évidente énergie de son frontman John Dwyer qui vient emporter la timbale. La guitare chevillée à la poitrine, le bonhomme sautille comme un chevreau épeuré, arpente son bout de scène (petit bout de scène, du fait de la place inutile occupée par cette seconde batterie…) en tous sens, s’emparant évidemment du micro pour colorer chaque chanson. A ses côtés ça joue sévère, et les occasions de le démontrer ne manquent pas, les compos du groupe permettant de mettre en avant l’ensemble des musiciens (dont un claviériste / guitariste qui malheureusement ne prend jamais la lumière, caché qu’il est par cet inutile second kit de batterie… qui a dit “il rabâche” au fond de la salle ??). De là à justifier un statut de “headliner” de la journée, avouons qu’on reste un peu circonspect. Mais le set était très bon, efficace et plein d’énergie, et il a clôturé très proprement cette journée.
C’est donc plein de satisfactions que nous quittons le complexe Columbia : même si nous n’étions pas vraiment inquiets en arrivant en début de journée, nous étions en partie dubitatifs, et pleins de questions sur la programmation du jour. Cette dernière se sera avérée riche à la fois en découvertes, bonnes surprises et agréables confirmations. Une sorte de journée de festival parfaite finalement… En attendant demain, qui, sur le papier, s’annonce énorme.
Le temps semble facétieux en ce premier jour de fest, il le sera durant 2 jours, et c’est à la ramasse que nous nous radinons du côté de Tempelhof. Les festivités berlinoises prennent à nouveau leurs quartiers de printemps dans le complexe “Columbia”, entre la halle et le théâtre, sis à une extrémité du quartier de Kreuzberg, épicentre de la culture de la capitale allemande.
PRAISE THE PLAGUE
Sans gloire, nous loupons un bon bout du groupe pas actif dans notre style de prédilection. Les transports auront eu raison de notre soif – toute relative – de métal extrême. Le choc entre le soleil ainsi que la chaleur de cet après-midi radieux et le black metal déployé dans la fureur sur la petite scène est prenant. Nous tapons du pied et hochons du chef alors que les tempi assassins donnent leurs derniers coups de boutoir dans la pénombre.
NEANDER
Les Hambourgeois de neànder passent ensuite dans le Columbia Theater le temps d’un rapide changement de setup. Qualifiés de collectif lourd instrumental, les Allemands ne sont pas venus les mains vides à la capitale puisqu’ils ont profité d’annoncer la suite de leurs tribulations discographiques avec III qui pointera le bout de son nez cet automne. En attendant, le présent c’était du post-tout délicieux qui a été envoyé avec notamment « Khàpra » et « Aäs » issus du petit dernier qui a déjà 5 ans (oh mon Dieu). Bonnes sensations pour les amateurs de Cult Of Luna et autres friandises du genre.
MONKEY3
C’est scandalisés que nous rejoignons la grande salle pour le premier concert du festival à s’y dérouler. Les Suisses jouent avant même l’heure de l’apéro ; ce placement nous laisse dubitatifs vu l’engouement général pour le quatuor de Lausanne actuellement en tournée. La masterpiece récemment livrée et la fréquentation des shows en cours, auxquels on ajoute l’affect du public de ce fest, auraient pu justifier de voir le groupe se produire plus haut sur l’affiche. Nous boudons un poil, mais constatons que le public est au rencard pour ce groupe à l’affiche de ce festival depuis ses débuts ! Les vétérans proposeront un set de malade avec la virtuosité qu’on leur connaît. Deux extraits remarquables de Welcome To The Machine sont envoyés, « Collapse » ainsi que « Kali Yuga », que nous n’avions jamais savourés live. La dégustation est probante, les nouvelles ogives bottent le cul et le public a la banane sur son visage suant. Pour compléter le setlist, les mecs ajoutent leurs hits intersidéraux : « Birth Of Venus » et « Through The Desert » qui font un carton plein auprès du public harangué par les musiciens. Final en apothéose dans la fumée, tout le monde réclame une fessée instrumentale supplémentaire, hélas l’horaire sera tenu en ce premier jour. Monkey3 a placé la barre très haut en début d’évènement en délivrant un set impeccable durant lequel la communion entre les artistes et leur public a relevé de la magie. Merci les gars vous avez fait très fort à nouveau et balancé un des meilleurs sets de l’événement.
THRONEHAMMER
De retour dans le Theatre, les avis diffèrent sur le set de Thronehammer : le gros metal aux reflets death / doom / thrash s’inscrit dans une sorte de logique de la programmation de la petite salle dans la journée (on est sur un début d’après-midi plutôt costaud), mais le passage entre Monkey3 et ses hautes sphères, vers les tréfonds lugubres et l’agression du combo anglo-germanique nous semble un peu trop difficile… Pourtant l’exécution du set est impeccable, et le public répond présent, bon gage de qualité. Mais nous ne sommes qu’humains et nos cerveaux fragiles et nos corps déshydratés nous éloignent de la salle avant la fin du set, pourtant exempt de reproches.
En revanche, nous serons littérallement happés en sortant de la salle par les volutes psyche-kraut rock frénétiques et hypnotiques de Kombynat Robotron, qui évolue en plein air, sur la petite scène sise sur la cour centrale du complexe Columbia, entre food trucks, barbecue et tablées de spectateurs en phase de houblonnisation. Super set surprise !
ACID KING
L’ambiance sombre et chaleureuse de la Columbia Halle participe à l’immersion rapide, et de fait c’est exactement ce qu’il nous faut pour tomber sous l’enchantement du doom hanté de Acid King. Le chant de Lori, toujours aussi particulier, envoûte le public, qui ondule en symbiose durant tout le set. Le nouveau line up du groupe confirme son talent, qu’il s’agisse du jeu de basse efficace et assez technique de Bryce Shelton, ou de Jason Willer à la batterie, dont l’énergie apporte un vrai plus au groupe (Lori nous avait habitué à des batteurs plus “minimalistes”, or Willer, même si le style musical ne s’y prête pas forcément, déborde d’énergie, se dresse derrière son tabouret, fait des mimiques…). Le groupe s’appuie sur une set list intelligente, qui repose beaucoup sur son excellent dernier opus (Beyond Vision), avec notamment un très efficace enchaînement “Mind’s Eye” / “90 Seconds”, mais n’oublie pas le reste de sa discographie, avec quelques extraits de plus vieux albums (dont le toujours aussi goutu “Electric Machine”). Au milieu du set, Lori accueille Gussie Larkin, la frontwoman de Earth Tongue (qui ouvre pour Acid King sur leur tournée européenne en cours) en tant que discrète choriste en fond de scène pour l’épauler sur 2 ou 3 discrets passages… Dispositif inédit pour le groupe, mais qui montre comment, à l’instar de son dernier album, le groupe s’ouvre à la nouveauté. Un très bon concert d’Acid King.
BLACK PYRAMID
Après avoir bien poncé leur nouvel album, The Paths of Time are Vast, fraîchement sorti, on attendait impatiemment de voir le groupe sur les planches – c’est même un euphémisme. On avait pu croiser leur route dans une configuration proche il y a quelques années (à Munich notamment), pour une jolie claque, mais nous étions un peu déstabilisé par cette nouvelle instance du combo, pourtant habitués que nous étions à la carrière (et au line up) quelque peu instable de la formation étasunienne. Niveau stabilité pourtant, il ne faut pas longtemps pour constater que ce que proposent les trois gaillards sur la petite scène, c’est du très solide. Beau signe de confiance en soi, le combo est si fier de sa dernière galette qu’il nous la sert en quasi-intégralité, du 1er titre (le complexe et audacieux “Bile, Blame and Blasphemy”) au 6ème (le solide “The Paths of Time are Vast – part II”)… dans l’ordre de l’album ! Couillu… Evidemment, ils font l’impasse sur les deux très gros titres de fin de l’album (il aurait fallu 25 minutes de set supplémentaires !) pour délivrer leur classique “Visions of Gehenna” (et son intro) en final, à un public de connaisseurs (la salle est pleine) qui n’attendait que ça pour exploser. Et pourtant, on n’est pas complètement dans le metal “bourrin”, mais la richesse musicale des américains emporte tous les suffrages ce soir. Le chant d’Andy Beresky, avec des placements complexes et audacieux sur disque, est parfaitement maîtrisé en live, et le résultat est plus que convaincant. Gros set, lourd ET subtil. Superbe.
PIGS PIGS PIGS PIGS PIGS PIGS PIGS
L’anomalie et la mauvaise blague de la programmation du jour, c’est de retrouver PIGS (x7) aussi haut placé sur la main stage (au vu de ceux qui les y ont précédés, on peut aisément crier au crime de lèse majesté). Les anglais bénéficient d’un orage déclenché à l’extérieur pour profiter d’un flux supplémentaires de spectateurs cherchant abri temporairement. Zéro surprise sur scène, le groupe entame sur son classique “GNT” et déroule en roue libre, avec conviction et énergie. Son frontman Matt Baty fait toujours le mariole en courant dans tous les sens pieds nus en short et marcel ridicules, haranguant la foule, gesticulant et grimaçant sans véritable lien avec la musique. On applaudirait des deux mains si le groupe avait un peu plus de fond de jeu à proposer musicalement, mais on manque cruellement de riff marquant et d’originalité. La dichotomie entre l’offre musicale et le spectacle proposé nous laisse un peu froid et nous quittons les lieux avant la fin (nous ne serons pas les seuls dans ce cas).
EARTH TONGUE
Sur la petite scène, un jeune duo suscite bruissements et excitation discrète depuis le début de la journée : Earth Tongue assure la première partie d’Acid King sur leur tournée européenne, et se prévaut parmi d’autres faits d’armes d’une première partie sur la dernière tournée de QOTSA en Nouvelle Zélande (certes, uniquement une poignée de concerts, mais quand même…). De quoi susciter notre curiosité, d’autant que nous sommes passés à côté de leur album. C’est donc aux premiers rangs, aux côtés de Lori d’Acid King (qui, malgré le fait qu’elle a dû les voir un paquet de fois, est venue assister au set complet du groupe, c’est dire…) que nous nous laissons embarquer dans ce qui ressemble à une véritable aventure musicale. Protéiforme à plus d’un titre, le duo repose pour beaucoup sur Gussie Larkin, frontwoman impressionnante, qui sort de sa guitare des sons de toutes sortes pour servir des compos très variées. On passe allègrement de riffs dooms bien fat à des plans plus aériens voire des structures prog bien décalées. Derrière, Ezra Simons suit parfaitement, proposant lui aussi un jeu de batterie riche et efficace, tout en contribuant aux lignes de chant. Le public est conquis, et nous aussi : l’énergie déployée, l’originalité et la densité musicale sont là, mais on doit avouer qu’on ne sait pas trop ce qu’il s’est vraiment passé… A surveiller de près, très clairement.
AMENRA
L’affiliation des Belges avec la scène stoner n’apparaît pas comme une évidence, pourtant les chantres de la Church Of Ra n’en sont pas à leur coup d’essai en affichant leur patronyme tout en haut de l’affiche d’un festival d’obédience désertique. On connaît la chanson : mécanique savamment huilée avec une esthétique soignée, une maîtrise instrumentale parfaite et une mise en scène en totale adéquation avec le propos. Même si la set list ce soir ne propose guère de surprise, ça fonctionne savamment bien et les amateurs s’en tapent une bonne tranche durant un déluge sonore hypnotique qui a débuté de manière intimiste avec des percussions métalliques délivrées par le maître de cérémonie dos à son assemblée (une mise en scène d’intro elle aussi déjà vue de nombreuses fois sur le lancement de “Boden”). Les amateurs de sensations moins brutales et froides ont profité des toitures disponibles pour boire une binouze au sec après que la capitale allemande eut été bien rincée par un orage.
La météo farceuse du weekend dictera certains courts déplacements aux abris durant les premiers jours de ces Berlinades stoner. C’est la fin de la journée et tout le monde converge vers la sortie afin de soigner les organismes qui seront encore bien mis à contribution deux jours durant. Tips de la rédaction : les contrôles dans les transports publics sont monnaie courante désormais à Berlin (certains festivaliers en ont fait la cruelle expérience). Les temps ,changent comme dirait l’autre.
Une belle soirée soutenue par Garmonbozia nous attendait ce jeudi avec pour sa tournée européenne, un Acid King qui avait emmené dans ses bagages le quartette Brume, également originaire de San Francisco et dont la discographie étoffée leur fait largement mériter la place occupée.
Les artistes de Brume montent sur scène tout heureux d’enfin visiter un pays où l’on est à même de prononcer correctement leur nom et vont avoir la tâche de convaincre le public que leur doom, goth Indie a toute sa place ici. Leur doom en effet parfois un rien indie donne le ton de la soirée. Au programme, lourdeur et voix féminine enlevée. Ajoutez à cela une originalité, un violoncelle d’une blancheur immaculée qui fait vibrer le côté gauche de la scène même si ce dernier peine à exister au milieu des blasts de batterie et de basse dans le premier tiers du set. Malgré cela, le groupe est communicatif avec son public et l’effort est apprécié, à en juger par la rumeur de la foule à chaque invective ou blagues de bon aloi entre Susie, la chanteuse bassiste et le Jamie guitariste au sujet de son accent anglais (Le gars est de Bristol)
Les Intro mélancoliques donnent vie aux cordes frottées et Jackie et son Violoncelle finissent parc conquérir leur place toute légitime. Cependant la face la plus goth du groupe n’émerge durant tout le set, une chance selon moi. D’ailleurs ces passages les plus mélancoliques et les plus post-rock n’ empêchent pas une joie visible de jouer de s’installer et le public qui jouit de la musique les yeux fermés ne dédaigne pas l’ offrande. Lorsque ce dernier revient à lui le set se termine déjà et si ce n’était pour accueillir Acid King je suis persuadé qu’on en aurait bien repris encore un peu.
Allez, il est l’heure d’aller se faire masser les tympans par Acid King et je m’aperçois qu’être sorti pour me rafraichir d’une limonade n’était sans doute pas la meilleure idée de la soirée. Il faut jouer des coudes dans le Ferrailleur pour atteindre la scène bien cinq minutes avant le début du set et finir coincer sur le côté gauche de la scène. Là où ira se positionner la guitariste Lori, au final le hasard n’est pas si méchant.
A peine monté sur scène et c’est la débauche de violence contenue. Le trio comme à l’accoutumée joue lourd et gras. Parfois le rythme devient plus smooth et c’est toujours étonnant alors qu’on est venu pour du lent, du lent et du lent. Pour autant la magie d’Acid King c’est ça aussi, transformer certains riffs à la limite du jouasse dans le creuset de leurs composition pour les transformer en doom pur.
La puissance du set est perceptible dans chaque note,l’onde de choc de la batterie viennent percuter le haut du crâne que l’on tend vers la scène, bien trop occupé à regarder ses pompes en marquant le rythme. Et quel rythme, Jason fracasse tout sur son passage sortant du tempo, déstructurant les morceaux et revenant par on ne sait quel miracle dans le cadre. Incroyable que Mark n’en perde pas la rigueur de sa basse et que Lori continue de suivre. Mais attention, il n’est pas question que de technique ici, on vit du beau et c’est particulièrement palpable lorsque Lori délaisse entre deux morceaux sa gratte pour dire combien ils sont heureux de revenir jouer à Nantes ce soir, se remémorant leur premier Hellfest à quelques poignées de kilomètres du Ferrailleur.
Évidemment côté set list on en prend plein les esgourdes, le groupe faisant le choix de caler quelques désormais classiques comme “Coming Down From Outer Space” entre les titres les plus récents comme “Beyond Vision” et un final magistral sur “Colors Trails” où Acid King pose lui-même sa couronne sur le haut de son crâne alors que le public, un genoux à terre pourra commencer à conter dès les lumières rallumées un chapitre de plus la geste du roi Doom.
La salle est fort bien remplie et l’ambiance générale est joviale ce soir au Krakatoa ! Il faut dire que “l’enfant du pays”, Dätcha Mandala, a fort logiquement choisi sa seconde maison, le Kraka, pour organiser la “release party” de son nouvel album. Amis et familles se mèlent donc aux fans du groupe, qui aura eu le bon goût d’inviter Patròn et Alain Johannes pour chauffer ce public bigarré (et multi-générationnel !) mais enjoué.
Patròn
Honneur à Patròn de lancer les hostilités. Le quatuor mené par Lo (de Loading Data) vient à Bordeaux pour la seconde fois en moins de deux mois – en termes d’activité scénique, Patròn c’est un peu “l’effet bouteille de ketchup” : rien, rien, rien, rien, puis plein d’un seul coup ! Pas de quoi bouder notre plaisir, bien au contraire : on avait beaucoup aimé son premier effort (il y a presque 4 ans) et il nous manquait la confirmation scénique. Le line up voit Lo épaulé de trois musiciens aguerris, et il saute très vite aux yeux et aux oreilles que le set va tenir la route ! Les compos groovy du disque passent comme une lettre à la poste, et le public, s’il ne connaît pas forcément le combo, tombe vite sous le charme. Pour un set de première partie, le groupe bénéficie d’une cinquantaine de minutes qu’il met judicieusement à profit pour lâcher quelques unes de ses compos les plus catchy (“Very Bad Boy”, “Who Do You Dance For”, “Room with a View”… manquait plus que “How to Land” !), pour finir par deux inédits : l’un plutôt énervé, et l’autre plus “classique” au regard des standards du groupe, une sorte de brûlot dansant absolument infectieux, qui semble répondre au sobriquet de “Vegas”, sur lequel Lo se départit même de sa guitare. Le son est impeccable, le groupe est solide, les compos fonctionnent parfaitement en live, et le public est content. Un très bon set.
Il ne faut que quelques minutes à Alain Johannes pour enchaîner : le temps de poser un petit tabouret et trois guitares acoustiques. Pour autant, la transition est brutale, Johannes entamant son set dans une approche ultra-minimaliste : le légendaire compositeur-producteur s’empare d’une petite “cigar-box guitar” pour interpréter en électro acoustique, seul, une poignée de chansons. La majorité du set se déroulera ainsi, l’interprète enchaînant les chansons en bord de scène, souriant et communiquant avec le public, dans la pénombre, avec la plupart du temps juste une poursuite sur lui. Mais la magie opère complètement. Il faut dire que le gaillard a pour lui une discographie massive et solide, et le luxe de piocher à loisir dans l’ensemble de sa carrière, solo, en groupe ou pour d’autres artistes, et ça défile : sa propre discographie solo, son premier groupe culte Eleven, l’album solo de Chris Cornell (un très touchant “Disappearing One”), etc… L’interprétation est évidemment parfaite, à l’image du chant de Johannes, puissant et juste, aussi subtil et cristallin que son corps est massif. Une véritable leçon de présence scénique, mêlée à une qualité de compos bluffante. Un peu plus tard, le “backing band” de Patròn vient ajouter profondeur et électricité à une poignée de compos supplémentaires (dont des titres de Eleven datant de plus de trente ans, qui n’ont pas pris une ride), invitant même Lo à revenir sur scène pour une interprétation de “Hangin’ Tree” (titre écrit par Johannes et Lanegan pour une Desert Sessions, mais popularisé via la sortie par QOTSA) – une chanson dont vous n’aurez pas de mal à trouver des extraits sur les réseaux sociaux, si l’on en juge par le nombre de téléphones qui en quelques secondes ont jailli du public pour filmer tout ou partie de cet extrait (smiley dépité). Une leçon de talent, de simplicité, de charisme et d’efficacité.
Alain Johannes
Avec encore une fois un changement et une préparation express de la scène, Dätcha Mandala, les héros de la soirée, crachent leurs premiers décibels un peu avant l’horaire prévu. Déjà vus ici ou là (et notamment sous la Valley au Hellfest pour un set haute énergie qui a largement convaincu) on savait que le côté dynamique du trio girondin était une sorte d’assurance tous-risques. Et sur scène, c’est exactement ce qu’il se passe : au taquet du début à la fin du set, Nicolas (basse / chant) arpente la scène de long en large, harangue le public, chante, saute… et ne rate pas une note de basse ! Jérémy n’est pas en reste, et abat un gros boulot à la gratte, devant un Jean-Baptiste souriant qui assure velu derrière les futs. L’alchimie est évidente, et le rock du groupe trouve un écho enthousiaste côté public – rappelons que le trio évolue en terrain conquis, et le public leur mange dans la main. La set list est largement basée sur le nouvel album, à juste titre au vu de la vocation de la soirée.
Habitués que nous sommes dans ces pages aux lourds décibels, on trouvera quand même parfois le classic rock du trio un peu léger en saturation… Mais reconnaissons qu’on est dans un environnement musical dont on est moins coutumier, pas du tout déplaisant. L’ambiance générale est au sourire bienveillant, tendance feel good absolue (c’est pas à un concert de Weedeater ou d’Eyehategod que le chanteur dédicace une chanson, je cite, “à toutes nos mamans”… ou alors pas pour de bonnes raisons…), signe si besoin d’un concert enthousiasmant et réussi.
La soirée aura été plaisante de bout en bout, l’ambiance excellente, le public présent en nombre… Sur scène se sont enchaînés des concerts variés, dans des styles musicaux différents, avec à chaque fois des émotions bien particulières. Une excellente soirée.
Et si le temps d’un week-end la capitale française de la scène Sludge et stoner se trouvait au milieu de la Seine-et-Marne à Savigny le Temple ? Question pas évidente, car il est déjà difficile de faire bouger les masses dans Paris, alors en dehors… et pourtant ce fut un pari gagné par Garmonbozia l’an dernier avec le festival du Grand Paris Sludge. Avec la même volonté d’allier la crasse et la fuzz, le festival était de retour ce week-end avec la même formule deux jours axés sur Eyehategod et Monkey3.
Le festival se tient de nouveau dans la salle de l’Empreinte, à Savigny le Temple donc, et malgré la faible distance relativement compliquée à réaliser en transport (merci le RER D et ses travaux aussi long qu’un morceau de Bell Witch), impossible de faire le même constat que Iro22 qui avait chroniqué la précédente édition… L’endroit est parfait pour accueillir ce type d’événement ! La scène principale est une très belle enceinte avec un son impeccable. La seconde scène, au premier abord remisée derrière le bar dans un genre d’espace club, est en fait tout aussi qualitative niveau son et suffisamment grande pour accueillir le public prévu. A cela s’ajoute un espace extérieur très agréable, divers écrans pour suivre les concerts depuis l’extérieur des salles et un cadre naturel vraiment chouette. Bref le site est idéal, la programmation alléchante et l’organisation/sécurité au top malgré un décor marécageux involontaire dans la fosse de la grande scène !
Vendredi 26 Avril
Il fallait presque poser un cierge auprès de St Christophe pour espérer arriver sans encombre à la gare de Savigny le Temple avant le début des hostilités à 19h20. Succès déverrouillé puisque j’arrive pile à temps pour voir Apostle of Solitude démarrer son set sur la scène principale. Ne connaissant pas cette bande de lents américains, leur doom traditionnel me parait assez conventionnel aux premiers abords, mais est suffisamment bien ficelé et mis en valeur par la qualité de son de la salle pour rapidement m’envoûter. Les morceaux sont pesants, on commence à prendre racine, mais quelques riffs viennent pimenter le doom des américains et nous échauffer la nuque.
Apostle of Solitude
On file sur la scène du Club pour les français Clegane et autant vous dire que l’échauffement de la nuque a été salvateur vu l’avalanche de bûche que l’on a mangé. Le trio est déchaîné et aplatit la foule avec son doom massif et lugubre. Les premiers rangs bénéficient en bonus d’une session massage à la vibration de basse, que demander de plus ! Le guitariste aura beau essayer de nous amadouer avec une chanson d’amour, c’est bien un portail vers l’enfer qui a été ouvert dans le Club.
Parenthèse de douceur, ou presque, dans une journée de brute, c’est ensuite The Machine qui investit la grande scène. Pour les avoir enfin vu l’an dernier au Glazart en ouverture de King Buffalo, le trio néerlandais est dans la même forme olympique et nous envoie dans l’espace pendant une heure. Leur mélange de stoner, de grunge et de shoegaze est toujours aussi efficace et maîtrisé. Par moments à la limite du jam, le groupe nous emmène loin et nous fait perdre la notion du temps. Le plaisir est complet !
The Machine
La brèche infernale ouverte par Clegane plus tôt semble avoir fait entrer un démon visqueux, c’est l’heure de Witchthroat Serpent ! Fan de leur dernier album Trove of oddities at the devil’s driveway, la tornade stoner hollandaise précédente m’aura un peu désorientée et c’est malheureusement de dehors que je vois les toulousains. Mais même à l’air frais, impossible de passer à côté de cette ambiance malfaisante qui remplit la salle de ces riffs étouffants. Rien à redire, la roue n’est pas réinventée mais c’est tellement bien fait que le public à bien raison d’en redemander.
La soirée s’achève avec les patrons de Eyehategod mais comment vous dire… j’ai toujours eu du mal à apprécier ce groupe. Pas de chance pour se rabibocher, les derniers bus de nuit partent et il me faut plier bagage pour pouvoir rentrer tranquillement dans ma caverne. Vraiment désolé pour ce climax raté, cependant les échos du lendemain étaient très élogieux donc que voulez-vous que je vous dise, fallait venir au Grand Paris Sludge !
Samedi 27 Avril
De nouveau frais et parés pour l’aventure, c’est avec le cœur rempli par la joie de voir (enfin !) Monkey3 que je m’aventure de nouveau à l’Empreinte pour ce second jour ! Patience cependant car, pour ma part, il y a beaucoup de découvertes à faire sur cette seconde journée
Ce sont les français de One Shot qui ouvrent cette seconde journée sur la grande scène. Enfanté par des musiciens de Magma, le groupe plonge profondément dans des jams jazzrock à faire perdre de nouveau la notion du temps. Surprise cependant, pour les initiés en tout cas, le groupe doit faire face à l’absence de son guitariste et joue pour la première fois en trio. Mais même à trois, One Shot nous emmène en exploration dans leur univers musical et m’embarque complètement, notamment avec quelques ambiances et notes de synthé me faisant penser à de vieux jeux vidéos 8 bit.
One Shot
Parfait démarrage pour cette journée à la programmation plus éthérée. Cependant, qu’il est dur d’enchainer avec le doom sabbathien, mais pas que, de Witchorious. Il me faut quelques morceaux pour pleinement apprécier le doom des parisiens et un supplémentaire pour constater que les malins ont caché pas mal de références sous ce vernis couleur Black Sabbath / Electric Wizard. Le chant plus hurlé du guitariste et quelques riffs bien sombres amènent une atmosphère plus désespérée et violente tandis que les parties chantées par la bassiste nous ramènent plutôt dans un trip bluesy morose. Le mélange des deux donnant au final une palette très agréable et bien plus nuancée que l’impression de départ.
La soirée se poursuit avec les américains de Cloakroom. Difficile de situer ce groupe musicalement jusqu’à voir une description sur internet qualifiant leur musique de “stoner emo”. La formule a de quoi faire hurler mais est au final assez proche des émotions transmises par Cloakroom. On oscille ici entre un stoner doom épais mais flâneur et un rock influencé 90’s à tendance mélancolique. A cela s’ajoute une légère ambiance désertique plutôt moelleuse qui fait que l’on se sent très bien dans la grande salle.
Cloakroom
Les français de Maudits viennent clore les concerts du Club et malgré l’envie de découverte, il faut aussi penser à se nourrir et c’est donc depuis le Food Truck que je suis cet avant dernier concert. Le peu que j’ai pu entendre de près était toutefois intéressant, et la foule ne s’est pas trompé en se massant devant eux. Très bonne découverte en rentrant avec leur dernier album, le rendez-vous est pris pour leur prochaine date parisienne !
Il était important de se nourrir car la soirée, et ce Grand Paris Sludge deuxième du nom, se termine par un grand voyage dans l’espace, un vrai de vrai ! Difficile de ne pas attendre de pied ferme les suisses Monkey3 après la sortie fin février de leur dernier album Welcome to The Machine. Et dès le départ, le groupe nous offre le titre floydien “Ignition” ! Le trip instrumental cosmique de Monkey3 est tout bonnement éblouissant en concert. Encore une fois, 1 heure, 2 heures… difficile de dire combien de temps a duré cet excellent moment. Que ce fut compliqué de devoir partir un morceau avant la fin pour aller attraper le dernier RER, qui en plus va moins vite et moins loin que la fusée suisse…
Difficile de résumer autrement cette seconde édition du Grand Paris Sludge qu’avec le mot Plaisir ! L’ambiance générale me rappelle les Stoned Gatherings au Glazart, ce qui en soit est un gros compliment tant ces évènements ont pu marquer. Autre satisfaction plus chauvine, la présence massive (comme sur la première édition) de groupes français à l’affiche. Preuve à nouveau que la scène française est d’une diversité passionnante ! Si par hasard vous n’avez pu ou hésitez à venir, déjà n’ayez crainte la Seine-et-Marne c’est cool, et le Doom Dad a suivi et commenté l’intégralité du festival. Allez donc sur ses lives youtube ci-dessous, et on se donne rendez-vous l’année prochaine, en croisant fort les doigts pour que ce festival puisse nous proposer une troisième édition !
Avec sa mention COMPLET plus d’un mois avant l’événement, il gravitait autour de cette soirée une aura de convoitise intrigante. Une affiche 100% cocorico avec au programme le trio rouennais Servo, suivi de l’équipe des frères Fossat, j’ai nommé Slift. Armés de leur très réussi dernier album, Ilion, le trio Toulousain s’est embarqué sur une tournée qui semble fédérer les foules. C’est donc avec un mélange d’impatience et de curiosité que l’on s’est dirigé ce vendredi soir au Stéréolux de Nantes pour assister à la date tant attendue.
Servo
Ouverture des hostilités à 20h30 avec Servo, trio ayant aussi fait ses débuts en 2016 et pourvu d’un dernier opus tout frais sorti de décembre dernier. Devant un parterre de spectateurs s’amassant déjà de manière admirable, l’équipe rouennaise déploie progressivement sa musicalité noise-rock sombre mêlée d’éléments post-punk. Cette musique nous est présentée comme « avant tout au service du live », et il est vrai que l’on ne peut nier cette assertion. Sur la basse ronronnante de Louis, le groove immersif d’Hugo et les nappes envoutantes promulguées par la guitare, ce sont les voix des trois lurons qui nous emportent. Les têtes commencent à doucement s’agiter, les regards semblent captivés et très vite nous sommes tous happés dans l’univers onirique et étrange du groupe, hypnotisé par la voix planante et aux accents New Wave d’Arthur. Les morceaux s’enchaînent si bien que l’on en perd le fil, livrés que nous sommes aux caprices de ce doux trio. Un spectacle magnifié par le rendu du Stéréolux, qui même avec sa salle « micro » nous offre une qualité d’écoute incroyable.
Slift
S’en suis un interlude éclair où l’armée de techos du lieu s’affairèrent à préparer le plateau suivant. Le temps pour nous d’une pause aux tireuses avant de vite se replacer devant, histoire d’éviter la masse toujours plus grandissante de convives ralliant l’événement. Puis Slift entre en scène. Le light show bleu rêve de Servo se soustrait ici à un jeu de clair obscure, entre lumière directe et vidéoprojecteur, effaçant par intermittence les musiciens derrière des effets cisaillés. Un contraste renforcé par leurs tenus noirs en opposition au clair criard de leurs instruments.
Très vite les perceptions se confondent et les murs de son commencent à nous balayer comme des bateaux de noix dans la tempête. L’énergie du groupe est stupéfiante, à l’image de son guitariste Jean Fossat effectuant de frénétiques aller-retour entre micro et ampli, ne lâchant sa Gibson SG que pour poser les doigts sur son clavier. La basse de son frangin Rémi ne s’arrête pas non plus, en atteste les frasés exaltés d’« Ilion ». Et que dire du batteur, capable d’enchaîner de longs staccatos entraînants avec de puissantes séquences à déchausser les dents. Côté foule, la réponse est au rendez-vous : dès l’arrivée d’« Ummon », joué pour l’occasion plus rapide que sur l’album, les passions se déchainent et explosent aussitôt en pogo. Plus tard, des slams se succèdent même sur ce monument à briser des nuques « Weavers’ Weft » et sur « Altitude Lake ». Bien évidemment, ces déchainements perdraient de leur superbe sans les découpages planants qui les séparent, permettant ainsi à l’auditoire de reprendre son souffle, et dans le même temps de reculer pour mieux sauter.
Déterminé à nous partager leur dernière création, les titres du dernier album sont à l’honneur et le moins que l’on puisse dire c’est que cela fonctionne en live. La montée se fait progressivement jusqu’aux trois derniers titres qui se présenteront comme le bouquet final, une ultime gifle, un panache coloré et explosif qui viendra nous lessiver, inscrivant dans nos mémoires de pauvre mortel le souvenir de Slift comme un groupe maître de la scène, et qui justifie sans peine l’engouement que lui porte son public.
Agréable retour dans cette jolie salle de Pessac (qui jouxte Bordeaux) qui, tandis que la Belle Endormie n’a plus d’asso pour organiser des concerts aux doux sons de fuzz et de sable chaud, prend occasionnellement le relais (Mudweiser, The Atomic Bitchwax…). Merci à eux !
La soirée commence avec le concert des Dark Dogs, un groupe de hard rock local (qui avait déjà ouvert pour Djiin dans une autre salle girondine il y a quelques mois !). Assez éloigné de l’esthétique sonore de Djiin, le quatuor a le mérite d’apporter quelques bonnes vibes à l’occasion d’un gros paquet de compos qui ratissent large dans plusieurs nuances de hard rock. Avec le recul, le groupe aurait peut-être gagné à un set plus resserré et efficace, la grosse heure de riffs étant peut-être un peu trop roborative pour une première découverte…
Le changement complet du set up est bien rapide, et l’on revient bien vite dans la petite salle pour le début du cérémonial/concert de Djiin. Il ne faut pas très longtemps pour prendre la mesure de la maîtrise scénique du quatuor rennais : sur la fin d’un périple de plus d’un mois sur les routes, le groupe est vraiment bien en place. Côté énergie, la fatigue de la tournée ne se fait pas non plus sentir, les musiciens se défonçant littéralement derrière leurs instruments (Tom à la guitare est peut-être un peu plus réservé, mais il abat un sacré boulot avec sa six-cordes). Ça saute, ça bouge, ça tournoie et… ça se déplace ! On ne compte plus les descentes dans la fosse de Chloé pour chanter et danser dans le public, et même Charlélie et Tom y font quelques incursions fort sympathiques.
Musicalement, on a beau connaître la musique (jeu de mots), la musicalité du groupe est parfaitement adaptée au live, mêlant séquences groovy psyché menant aux bords de la transe, perforées souvent par des saillies de pure énergie rock. Toujours aux limites de l’impro, les séquences instrumentales sont bien en place, efficaces et maîtrisées. Pour celles et ceux qui ne connaissent pas Djiin, le groupe a comme particularité de disposer d’une harpe électrique, opérée par Chloé occasionnellement, qui a le profond mérite de ne pas faire “gimmick”, avec un réel apport mélodique. Dans la même veine, notons que même si Chloé assure en front-woman, captant l’attention quasiment en continu (son timbre de voix rauque et sa puissance vocale restent impressionnants), chaque musicien assure à l’identique et apporte une réelle contribution musicale au groupe – mention spéciale à cette section rythmique infaillible sur l’heure de concert. Les titres s’enchaînent sans que jamais l’ennui ne s’installe, avec quelques extraits de leur prochain album qui trouvent bien leur place dans le set.
Cette fort belle soirée se termine donc de la meilleure manière, avec quelques échanges sympathiques avec les musiciens autour du stand de merch. On regrettera bien sûr la modeste affluence ce soir, les girondins ayant préféré rester dans leur canapé plutôt que payer moins de 10 euros pour une super soirée.
On ne va pas vous la faire à l’envers, on n’a pas beaucoup bossé pour cette chronique, mais en même temps, quoi ? On va être honnête la majeure partie des groupes qu’on a eu la chance de voir sur scène ce weekend de Westill, on vous en a déjà parlé à de multiples reprises. Alors on s’est dit, essayons de vous faire vivre ça un peu au travers du festival plutôt qu’en égrenant les noms de formations qui nous auront fait rêver deux jours durant.
Donc nous étions présents pour cette édition 2023 du Westill, la troisième pour votre serviteur, la septième pour l’organisation et un certain nombre de fidèles. On attendait vraiment peu de choses de cet événement. Pas qu’on soit blasé et qu’on n’ait pas envie, bien au contraire. C’est plutôt que l’orga faisant plutôt bien les choses il était difficile d’arriver avec quelque défiance. Jusqu’à présent peu de couacs, une salle confortable, un accueil au top et cette année une affiche à faire pâlir d’envie un paquet d’organisateurs (si, si, on en a vu tout rouges d’envie, la bave aux lèvres et le front soucieux de savoir comment un si parfait plateau avait pu être monté par une équipe ne produisant qu’un événement par an). Nous voilà donc partis bras dessus, bras dessous avec une bande d’irréductibles camarades pour ce qui s’annonce le plus parfait des weekends.
Le premier jour avait eu la courtoisie de ne démarrer qu’aux alentours de 18h30, laissant aux travailleurs que nous sommes le temps d’enfiler nos vestes à patchs au sortir du boulot et de nous présenter au pied de la scène pour l’ouverture des hostilités, et ce malgré une queue infernale pour charger l’innovation de l’année, un bracelet cashless. Décidément ce Westill veut faire comme chez les plus grands. A quoi ressemble ce festival ? Pour ceux qui n’auraient pas eu la courtoisie de nous lire l’an passé, il s’agit d’une organisation annuelle par une bande de bénévoles focalisés sur ce seul événement. On déboule sur un parking de belle taille à quelques dizaines de kilomètres du site du Hellfest, à Vallet, un patelin disposant de toutes les commodités nécessaires à un jeune couple pour s’installer. Le tout, en plein milieu du vignoble Nantais, pas de quoi finir déshydraté. On remonte ensuite se faire caresser les poches par de virils bikers des Kannibals connus pour leur poigne de fer et leur sourire angélique nous évitant par là même une improbable érection lors de la fouille. C’est néanmoins avec une fluidité parfaite que l’entrée se fait dans le Champilambart, une sorte de méga salle polyvalente avec une cour intérieure et une cuisine côté jardin. De quoi coincer le festival entre la cantine du festoche et deux Food Truck. On ne va pas mourir de faim.
Pour accéder à la scène, il faut passer par une allée pleine de merch. ‘Pas à dire, impossible pour le festivalier de repartir aussi riche qu’il est arrivé. Ajouté à cela le point essentiel de tout festival qui se respecte, le bar. Westill c’est un choix de bières à en faire pâlir plus d’un. Surfant sur la mode des bière kraft, le bar propose un choix de bière “standards” déjà dans le haut du panier mais également une série de bière “éphémères” faisant valser d’un instant à l’autre fûts d’IPA et de stout de belle qualité. En conséquence, un bar presque toujours plein et un débit de plus de 120 fûts sur le week-end.
Voilà enfin venu l’enchaînement des groupes de ces deux journées. Chaque jour débute sous de bons hospices avec vendredi le trio français Witchorious et samedi avec les très dynamiques Volcanova, d’un côté un stoner sans fioritures et de l’autre une énergie toute hard rock.
Witchorious
Volcanova
Il faut dire que des groupes dynamiques l’affiche, n’en était pas exemptée avec un set de Deadly Vipers qui aura pris tout l’espace de la scène avec un très présent Fred au chant et des comparses qu’une tournée avec Truckfighters aura sans doute récemment aidés à prendre en ampleur.
En parlant de Truckfigters, ils étaient d’ailleurs présents en clôture de cette première journée et mon dieu quelle déception! Le groupe fait les frais d’un problème récurrent du festival cette année, la qualité à géométrie variable du son, à tel point que le chant n’est pas là et quand il perce malgré tout il faut admettre que Ozo n’est pas au sommet de sa forme. Les habituel sauts de cabris de Dango ne suffisent pas à combler le fossé entre ce set et ce que l’on sait de leur capacité à allumer une scène.
Truckfighters
Parmi les groupes qui auront fait les frais des variations de son, on compte les français de Red Sun Atacama qui malgré sa bonne volonté et son savoir-faire indéniable, n’ayant pas eu le temps de bien gérer ses balances, se retrouve à court de retours et cela ce ressent. Les gars jouant à vue dans un brouillard sonore peinent à embarquer leurs admirateurs aux premiers rangs mais marquent cependant des points en enjaillant ceux qui les découvrent et qui pourront lors d’un autre concert pleinement apprécier l’énergie dévastatrice que ce combo peut diffuser dans une salle.
Red Sun Atacama
Red Sun Atacama
Au rayon de la haute qualité du premier jour on retiendra particulièrement le set de Mars Red Sky dont le grand professionnalisme permet au public de se laisser tantôt écraser tantôt soulever par les riffs toujours beaux du trio bordelais.
Mars Red Sky
Mars Red Sky
Ces derniers auront ouvert la voie et celle-ci sera élargie par Colour Haze qui réalise pour nous un concert de cathédrale. La beauté absolue du set n’aura eu d’égal que la virtuosité du batteur placé au centre de la scène et du cercle que forment les musiciens. Un set incroyable de fraternité qui saisit l’âme et le cœur des auditeurs qui en parleront encore le lendemain comme de l’un des sets les plus réussis du festival.
Colour Haze
Il y avait fort à faire pour dépasser le plaisir pris lors de la première journée et même si votre serviteur passe plus de temps à papillonner entre l’espace bouffe et les allées du merch lors des concerts classiquement stoner des chypriotes de Stonus ou du post rock masqué des espagnols de El Altar Del Holocausto, il aura tout de même pu en saisir tout l’impact sur les visages réjouis de ses camarades de concert.
Stonus
Portons une attention particulière à El Altar Del Holocausto dont le merch ne désemplit pas ni avant ni après les concert. Il faut dire que la prestation du groupe est attendue, tant pour leur musique que pour leur accoutrement hors norme et ils ne déméritent pas ce samedi soir en laissant descendre un des musiciens dans la fosse qui lui offre un boulevard, rendant ce set instrumental bien palpable.
El Altar Del Holocausto
Pour ce qui est des limites de notre ligne éditoriale ce samedi, elle est approchée une seconde fois avec My Diligence groupe que nous avions pu chroniquer cette année au Hellfest, et dont nous confirmons tout le bien que nous avions pu en penser. Leur stoner qui se dirige allègrement vers des sonorités plus indéfinissables aura fait mouche auprès du public qui aura délaissé la gamelle des Food Truck le temps d’ovationner la lourdeur de la musique des Belges.
My Dilligence
Organiser un festival c’est aussi savoir organiser les sets et le Westill a eu le chic pour proposer un trio gagnant en fin de dimanche. Black Rainbows d’abord. Un son très correct, une section rythmique lourde à souhait et un Gabriele Fiori très en voix ont permis aux transalpins de dominer le set d’une main de maître. Leur énergie communicative, les riffs psychés entraînants venus de leur dernier album comme des précédents, les maintiennent sur le podium bien chargé des meilleurs groupes de la scène Heavy Psychédélique.
Black Rainbows
Sur le podium on retrouve également Kadavar qui vient en Headliner de ce festival délivrer ses meilleures compositions, jusqu’à ce qu’à la seconde chanson, Christoph aka “Lupus” perde sa voix. Le groupe s’arrête, Christoph s’excusant, hésitant entre clore le set et continuer en version instrumentale. Et là… la magie opère, le désormais quartette (en effet, le groupe s’est doté récemment d’un clavier/guitariste) est porté par les encouragements de la foule pour que continue la fête. C’est sur une vague d’amour absolue que se déroule donc la suite du set où Christoph reprend le micro au mieux de ses possibilité pour quelques titres et clôturer sur un énorme et habituel “Helter Skelter” sous les applaudissement et les mains formant des cœurs au dessus des têtes du public.
Kadavar
La fatigue se fait sentir, les jambes sont lourdes la tête pleine de riffs mais il faut se battre, rester jusqu’au bout. Un certain nombre de festivaliers n’a pas eu le courage de rester, quitte à s’affaler dans un coin de la salle pour gouter aux envolées de The vintage Caravan. Malgré un début de set moins convaincant et issu du dernier album, le groupe finit sur ses classiques devant une salle diminuée de moitié mais reconnaissante.
The Vintage Caravan
The Vintage Caravan
Il est l’heure de dire au revoir aux amis, aux connaissances et à toutes ces personnes nouvellement rencontrées. Une dernière bière, on s’attarde sur le parvis de la salle dans l’humidité de la soirée. On retiendra de cette édition une affiche composée d’une main de maître, deux jours avec un son parfois chaotique et des lumières parasites qui n’ont pas toujours mis en valeur les sets. Cependant il est clair que le Westill est devenu cette année un événement incontournable de la scène stoner en France. L’organisation d’année en année s’est remise en question, a corrigé les dysfonctionnements ici et là, mis un point d’honneur à accueillir à merveille son public comme les artistes. Nous lui souhaitons longue vie et lui disons à l’année prochaine!
Ce soir nous retournons dans ce lieu emblématique Nantais qu’est le ferrailleur pour une bamboche de tous les diables organisée par les très efficaces Garmonbozia. Au programme du local avec Birdstone, le (trop?) rare duo, Powder For Pigeons et les très attendus Monkey3. Je dis très attendu car bien avant le jour J la soirée affichait Sold Out dans un monde où l’auditeur moyen ne se presse plus guère pour empocher son billet de concert.
Birdstone
C’est un bordel certain sur scène qui nous accueille. Deux batteries sont entreposées là, celle de Monkey3 dans le fond et sur le devant de la scène celle frappée du logo de Birdstone. Les trois comparses se faufilent donc sur cet espace rendu plus exigu qu’à l’ordinaire et sans sommation entament leur set. La salle est déjà bien remplie, preuve s’il en était que Bridstone représente pour beaucoup une valeur sûre de la scène stoner. Pour les autres, ils découvrent que deux tiers de la formation consiste dans un réemploi des zikos de The Necromancers, soit la batterie et la guitare. On ne parlera néanmoins pas de sous formation de The Necromancers, l’atmosphère est bien différente et ce projet à une identité à part entière, celle d’un blues rock qui semble dire “pose ta gitane et ton whisky Johnny. On va écouter le blues”. Il en résulte un monde très visuel, convoquant certaines formations du genre des années 80/90. On ajoute à cela une ambiance sur scène toute particulière avec un Benjamin derrière ses fûts jamais avare de grimaces qu’un maquillage approprié renforce un peu plus, une Edwige qui incarne totalement ses lignes de basse et ne se laisse pas décontenancer lorsqu’elle glisse un pain bien involontaire dans le set qui ne fait que renforcer le sourire complice de Basile au chant et à la guitare. Le public valide généreusement le set qui se termine par un rituel quasi mystique des trois comparses frappant en chœur la batterie autour de laquelle il se sont réunis.
Powder For Pigeons
Après quelques rafraichissement de mise, il est temps d’aller voir ce que donne Powder For Pigeons, cela fait longtemps que je n’ai pas eu l’occasion de les voir sur scène et ma mémoire souvent défaillante me dit cette fois qu’il s’agit d’un groupe hautement appréciable. C’est à nouveau un encombrement de batterie sur scène, en effet, le Duo mi australien mi allemand joue sur ses propres fûts et Meike a fait migrer son instrument sur le côté droit de la scène d’où l’on pourra apprécier la férocité de sa frappe et l’étonnante décontraction de ses scandales, c’est dire si la dame maitrise les pédales. Ajoutons à cela une belle grosse amplification et c’est un mur rythmique qui se construit tout au long du set. De son côté Rhys sous ses de minet chanteur guitariste assène des riffs sans demi-mesure au frontières du rock indé et du grunge. Ce dernier ne se prive jamais de haranguer la foule présente avec un succès mitigé toutefois et ce à cause tant de son accent australien que du légendaire niveau d’anglais du public français. Ceci va d’ailleurs de pair avec l’adhésion du public à ce set peu formel. Le duo gagnant quelques deux tiers de la salle à sa cause et interpellant un dernier tiers qui ne sait pas trop quoi penser des enchaînements stylistiques peu orthodoxe de Powder for Pigeons. Néanmoins la foule reste assez compacte pour que ce set puisse être qualifié de réussite et finir de chauffer la salle pour Monkey3
Monkey3
Je l’ai dit, les helvètes étaient attendus, on ne les avait pas vu dans l’ouest depuis leur set mémorable du Hellfest en 2022. C’est dans une habituelle nappe de fumée qu’apparaissent les quatre musiciens font leur apparition. Sans ambages, le groupe déroule son set toujours aussi millimétré lors duquel il délivre ses meilleures et désormais classiques compositions: “Jack”, “Icarus” ou “Birth of Venus”. Le set light met en valeur les mélodies vaporeuses du groupe et les projections psychédéliques qui remplacent le back drop permettent à tous d’atteindre rapidement une mise sur orbite. Sur scène Boris en front man du groupe donne la réplique à un bassiste hautement vitaminé qui ne se prive pas d’appuyer ses rythmiques de gestes transcendés, allant jusqu’à jouer à genoux face à son camarade guitariste. Dans le public souvent on ferme les yeux, on tend le cou , le visage aux nues et il n’est pas rare de voir l’émotion affleurer au coin de l’œil de certains, rien que de très normal désormais pour se groupe qui communie avec son public tant sur scène qu’en dehors. A l’heure du rappel les gars se font désirer, jouant le suspens, Boris pointant du doigt d’un air désolé sa montre. ( Il faut toujours que les suisses nous rappellent leur supériorité en termes d’horlogerie, c’est dramatique…) Se décidant enfin à reprendre leurs instruments c’est sur les notes de Ennio Morricone que le groupe tire sa révérence avec un titre issu de “Il était une fois dans l’ouest”, choix judicieux pour conclure le set le plus au Ponant de cette tournée.
Un tour par le merch’ et l’occasion d’échanger une blague avec les divers artistes de la soirée ou pour les remercier pour le bonheur apporté lors de ces instants qui resteront longtemps dans les mémoires des participants à n’en pas douter.
Revenons sur une belle soirée signée Ben Crumble. L’habile programmateur Nantais se bat au quotidien pour faire vivre sa passion doomesque et psyché et ne rechigne pas à aller glaner ici et là quelques belles pépites bourrines, comme le démontre le plateau de ce soir, qui démarre avec les post métalleux de Sick Sad World pour transiter tout sludge dehors vers Old Iron avant de porter au pinacle les inclassables Verdun. La belle soirée que voilà, allons donc nous refaire le film de cette dernière.
Venus en voisins, les Nantais faiseurs de post metal de Sick Sad World n’ont pas encombré leurs valises de bons sentiments. La musique sombre et invasive du quintette ne délaisse pas la finesse pour autant. Cette entrée en matière se compose d’un set maîtrisé et d’un mix du son qui ne démérite pas. La prestation scénique de Sick Sad World est sans excès, la décontraction du batteur surprend même alors que sous ses pied martèlent les doubles pédales qui servent de tremplin aux effets saturés des gratteux et du chanteur hurleur qui, tantôt derrière sa console tantôt micro tête de mort à la main, capte l’attention de son public par de nombreuses gesticulations visant à faire sortir la puissance de ses tripes. L’habile insertion d’effets électro acoustiques puis la clôture écrasante finissent de combler le public et votre serviteur, ravis d’avoir découvert cet assemblage particulièrement réussi.
Déjà bien plus dans notre ligne éditoriale que le précédent groupe, le trio de Seattle, Old Iron revendique une étiquette sludge que l’on pourrait vite qualifier d’un rien foutraque. En effet la tendance du batteur à sortir régulièrement du temps pour quelques éphémères démonstrations stylistiques séduira une part des auditeurs mais me laissera sur le côté de la route. Malgré cet enthousiasme mitigé, la salle se remplit doucement et c’est tant mieux, nous n’allions pas nous fâcher pour si peu, après tout le groupe est d’une légitimité absolue, lui qui avait réalisé en 2022 un split sombre et violent avec Verdun, à qui ils servent la soupe ce soir. Néanmoins, c’est lorsque le rythme se ralentit et que le groupe rentre dans les standards du genre qu’il donne le meilleur de lui-même. Quelques riffs d’exception émaillent le set offrant au public ce qu’ il attend d’un bon moment. Old Iron nuance son propos ici et là de bandes sonores qui allègent la série de poutres qu’il balance à la tronche d’un public qui en redemande de plus en plus. Au final le pari est réussi pour les américains avec un set qui va en se bonifiant et conquiert indéniablement le public.
Parfum d’apocalypse lorsque les headliners de Montpellier foulent les planches au son de “Dark Matter Crisis”. Avec ses tatouages hardcore plein le visage du chanteur, Verdun renverse le cold crash. Alliant la lancinance des riffs aux blasts les plus agressifs, c’est le fer et le feu que le groupe fait pleuvoir sur la fosse . On devient peu de choses face à un tel groupe. Hurlements après hurlements le chanteur violente les tympans de l’assistance pendant que ses trois collègues instrumentistes transpercent les corps de leurs riffs. Et quand entre deux tours de chant le frontman prend la parole, on peine à croire qu’ une voix normale ait pu dormir en une pareille créature. Le morceau le plus hardcore me fait me demander si le groupe a bien sa place dans ces pages. Mais rien que pour le plaisir de valoriser la puissance d’un tel set je répondrais : oui ! Les rythmiques doom s’effacent systématiquement devant les blasts et de part et d’autre de la scène c’est la totale, un fourre-tout dont on peine à s’ extraire indemne en particulier avec les titres issus de leur split avec Old Iron, “Narconaut” et “Down Of The Angry “qui sera suivi en conclusion de “Last Man Standing”, issu lui de leur premier album. En conclusion nous laissons derrière nous toute analyse avec un seul mot d’ordre, Verdun, ça se vit, allez les découvrir en live!
Voilà passée une seconde soirée pour ma part au Cold Crash, toujours sous la bienveillante et professionnelle égide de Crumble Fight et c’est encore une réussite pleine et entière. La salle a un parfum de Michelet bis et il n’en faudra pas plus, on l’espère, pour que vive pleinement ce lieu qui semble-t-il attire déjà tout ce que la région Nantaise compte de fans de la scène stoner, doom et affiliés.
Après une première journée de festival qui nous a mis en joie, vos serviteurs ont profité des agréables températures automnales norvégiennes (zéro degrés matin et soir) pour arpenter la ville, son agréable zone littorale, ses manifs sur le conflit Israélo-Palestinien, ses disquaires… C’est tout requinqués que nous regagnons en début d’après-midi la zone du festival et l’église Jakob, où, sur le papier, une nouvelle série de super concerts nous attend aujourd’hui encore…
LEONOV
Histoire de se chauffer un peu les tympans et le corps, nous entamons l’après-midi dans la grande salle du Dome (pour rappel : une nouveauté du festival pour cette année) pour découvrir Leonov. Le quintette (complété aujourd’hui d’une 6ème musicienne, à la sitare, clavier, chœurs…) n’est pas venu de loin pour nous faire goûter son post metal : basé à Oslo, les musiciens ne profitent pourtant pas de cette proximité pour développer la communication avec le public, quasi-inexistante. Le groupe, au comportement scénique pour le moins austère, se concentre surtout sur ses instruments et ses innombrables pédales d’effets, pour développer un post metal (très) atmosphérique, où les ambiances prennent bien plus de place que les riffs. Les éclairages et projections sur les immenses murs en fond de scène finissent d’habiller un paysage musical froid et sombre, qui s’inscrit bien dans son environnement géographique et remplit parfaitement son office de mise en bouche pour le reste de la journée.
ALASTOR
Les esthètes ont bien anticipé que ce concert d’Alastor pourrait bien constituer l’une des pépites cachées de ce festival. Le quatuor suédois a sorti deux superbes et classieux albums, et leurs prestations live sont pour le moins rares (2 ou 3 concerts par an, les bonnes années) ; les conditions de quelque chose relevant de l’événement sont donc réunies. Pour confirmer ce point, le groupe a mis les petits plats dans les grands, en décorant sa scène de chandeliers gracieux, donnant une toute autre dimension à l’atmosphère cosy de l’autel de l’église, qui bénéficie sur ce concert de l’un des plus beaux éclairages du week-end. La faible activité scénique du groupe nous laissait craindre un manque de maîtrise et d’aisance scénique, or c’est tout le contraire que nous constatons : le groupe est confortable et en plein contrôle de sa prestation, et le son est grandiose dans ce contexte (même si perfectible sur le mix des voix, pourtant l’un des atouts les plus intéressants de la musique du groupe). Même s’il fait généreusement honneur à son dernier disque, le splendide Onwards and Downwards (superbe intro sur “The Killer in my Skull” et parfaite pointe de vitesse sur l’entêtant “Death Cult”), il n’oublie pas pour autant son disque précédent (avec son morceau titre le très doomy “Slave to the Grave”) et autres sorties plus rares. On imaginait un possible grand concert, et c’est exactement ce que l’on a eu : une prestation efficace et solide, une interprétation impeccable de ces superbes compos, par des musiciens sérieux et heureux d’être là. Un superbe set, en forme de découverte pour beaucoup, et de confirmation pour les autres.
1234!
Tels des adeptes de la franchise Splinter Cell de Tom Clancy, c’est devant la scène épurée du Verkstedet (le petit bar/club de l’autre côté de la rue) que Desert-Rock s’est faufilé à nouveau pour être dans les starting blocks quand le duo entamerait son set décoiffant. Les Norvégiens font dans le super efficace et dans l’intense en se concentrant sur l’essentiel : la rythmique. Une basse, une batterie et des chants par les deux lascars suffisent pour animer l’assistance qui danse de la nuque en rythme en rangs très serrés. Si techniquement l’exercice peut s’avérer compliqué lorsque la totalité du groupe chante à l’unisson, l’énergie est présente et communicative : ça plait et ça nous plait ! Les nostalgiques de « Cocaine Rodeo » ou d’autres gâteries vociférées jadis par Nick avec les reines de l’âge de la pierre en ont eu pour leur pognon (en monnaie locale vu que ces Européens-là ne sont pas eurocompatibles). On applaudit de toutes nos mains le bon goût des programmateurs qui ont convoqué ces deux types pour nous rappeler que les basiques font du sens scéniquement parlant.
TUSKAR
Sur le papier, ce duo anglais méconnu de vos serviteurs a pas mal d’arguments pour nous séduire. Malheureusement, en rejoignant la crypte en sous-sol au début du concert, il est déjà trop tard pour se trouver dans les premiers rangs, seule condition pour bénéficier d’un visuel autre que le haut du crâne des deux musiciens. N’ayant pas forcément d’intention de jouer des coudes au milieu de ce public norvégien généralement poli et bienveillant (on est loin des flamands…), on assiste au set depuis différents emplacements (permettant par ailleurs de confirmer que la qualité du son dans ce lieu finalement assez saugrenu est très correct et homogène un peu partout). Malgré ces conditions, la musique du furieux combo nous capte sur toute la durée du set et on goûte chaque morceau avec gourmandise : développant une sorte de sludge doom puissant, Tuskar peut même parfois se targuer d’un certain groove, à l’instar d’un Mantar par exemple (qui partage la même configuration instrumentale, même si ici le batteur se charge des rares parties de chant). Tout en maintenant cette constante metal extreme bien lourd, le groupe ne se fixe pas beaucoup de barrière, à l’image de ce passage presque… “dub” sur sa rythmique sur un titre pris au hasard. Une excellente découverte.
MANDALAI LAMAS
Changement d’ambiance un peu brutal : après le concis dans le bar et le bourrin dans la crypte, voici la débauche de zicos aux allures de hippie sur l’espace imposant de The Dome qui jouent à domicile. Si le public compact allait comme un gant à leurs compatriotes 1234! en binôme, c’est une foule clairsemée qui a pris place pour ce set très seventies. Les jacks en cordon de téléphone, l’harmonica, les lunettes de soleil, les maracas, les vestes à franges et les plans slide ont défilé sur scène le temps d’un set maitrisé, mais peu enthousiasmant à notre goût. On apprécie néanmoins le professionnalisme du sextuor qui ne se laisse pas démonter par les problèmes de sangle de guitare qui lâchent en pleine augmentation de l’intensité rythmique.
LOWRIDER
C’est avec joie, bonheur et twerk dans le living room que nous avions appris la venue des légendes suédoises qui, à l’instar de Witchcraft la veille, est venu garnir l’affiche au dernier moment du fait de l’annulation de deux groupes ! Les croiser sur scène étant une source de bonheur garantie, nous étions au taquet devant la scène The Chapel pour être certain de ne pas perdre une miette de la prestation de cette formation que nous adorions déjà alors que nous montions ce site jadis. Les suédois nous ont manqué durant une absence trop longue et heureusement s’est rappelé à notre bon souvenir par la suite, d’abord avec quelques shows dispensés de manière homéopathique, puis en signant un comeback total (sur disque et sur scène) il y a quelques années. C’était la première fois que nous assistions à un concert de ce groupe durant lequel les échanges avec le public se faisaient dans une langue scandinave que nous ne maitrisons pas du tout – donc pour ce qui a été déclaré il faudra vous reporter aux écrits en dialecte viking. N’empêche que nous avons capté qu’un nouveau morceau était au sommaire (et comme on est des types en or, on vous en a collé un extrait sur les réseaux sociaux alors que nous en profitions le sourire beat aux lèvres). Ce titre figure sur le setlist comme étant « And The Horse » si le déchiffrage s’avère correct. Hormis cette petite folie bien affriolante, le quintette Lowrider (avec un joueur de clavier sur le flanc droit) a fait la part belle au petit dernier, Refractions, ce qui est cohérent en terme de démarche artistique, mais assez frustrant pour les adorateurs de Ode To Io. La bande de Peder a néanmoins fait péter deux pépites du début du siècle : « Dust Settlin’ » ainsi que l’incroyable « Lameneshma » histoire de bien faire vrombir la basse pour souligner que ces vétérans sont encore bel et bien vivants ! Nos nuques ont bougé de la première à la dernière note d’un set mené avec maestria par une formation qui a semblé prendre une énorme pied à se produire ; nous en tous cas on a pris le nôtre et ce n’était pas la dernière fois de la journée !
Histoire de pousser le déphasage temporel dans ses retranchements, on fait un passage poli dans le Dome pour picorer un échantillon de la prestation de The Chronicles of Father Robin : le groupe norvégien justifie sa place assez haut sur l’affiche du fait d’une carrière de plus de trente ans, et une vraie rareté scénique (et discographique). Les nombreux musiciens présents proposent un folk rock progressif à forte tendance médiévale, illustrée aussi par des oripeaux typiques et des pas de danse supposément d’époque. Un peu hermétiques, nous passons respectueusement notre chemin pour nous sustenter.
GREEN LUNG
On n’est pas insensible au talent du groupe anglais, et le voir aussi haut sur l’affiche de ce festival fut l’un des facteurs nous confirmant le bon goût de l’équipe en charge de la programmation. En revanche, on ne s’attendait pas à constater un tel succès : dès que le quintette est monté sur les planches, le public est au taquet ! Excellente surprise que de les voir reprendre les tubes du dernier album à gorges déployées, headbanguer, jeter les poings en l’air à la moindre occasion et crier leur approbation à chaque fois que Tom Templar annonce le prochain titre. Ce soir, Green Lung est en démonstration : leur maîtrise scénique est impeccable, les musiciens assurent, non seulement dans l’exécution des chansons, mais aussi en terme de prestation. Mention spéciale à John Wright derrière son clavier, qui se contorsionne et grimace malgré son instrument plutôt statique, mais aussi à Templar, qui, sans en faire trop, assume bien son rôle de frontman, dans un groupe où beaucoup repose sur la guitare – une guitare assurée de main de maître par l’impressionnant Scott Black, qui sans extravagance abat un boulot phénoménal. Le doom metal épique old school du groupe prend toute son ampleur dans le format de l’église, propice à donner une autre dimension aux riffs surannés mais jouissifs du combo. Si les plus gros succès viennent des titres de leur dernier album Black Harvest (notons en particulier le grandiloquent “Graveyard Sun” chanté en chœur par tout le public), les titres issus du prochain album (sortie prévue une semaine après le concert) fonctionnent tout aussi bien (à l’image de l’épique mid-tempo “One for Sorrow”). Bref, un concert impressionnant de la part d’un groupe que – soyons honnêtes – nous n’imaginions pas à ce niveau. Un futur grand, probablement.
SPURV
Changement de décor sur The Dome qui pourra se targuer d’avoir fait dans l’éclectisme total durant ce dernier jour de festival. Le combo post-rock instrumental d’Oslo a capté son auditoire en débutant son show par un attroupement de 3 de ses membres autour de la batterie armés de 6 baguettes. La suite, interpellante aux premiers abords en raison de la présence de cuivres sur scène, a été phénoménale. Les mecs en ont sous la pédale question talent puisque le passage du vent à la corde se fait impeccablement lorsqu’il faut lâcher la gratte pour s’emparer de la trompette par exemple ou se munir de la guitare en délaissant le trombone à coulisse pour placer des trames de fond sous leur sludge abouti. L’ajout du trombone sous effets synthétisants apporte un rendu unique à l’exercice scénique ainsi que discographique de ces Norvégiens, ce qui les distingue de la foule de formations marchant dans les traces de Cult Of Luna sans parvenir à les dépasser.
CULT MEMBER
La bagarre enfin ! On vous avait prévenu lors du résumé de ces deux jours que sauvagerie il y eût, et celle-ci était à foutre sur le dos des allumés de Cult Member. La formation de Tromsø en Orvège, active dans le registre hardcoreux-crossovero-thrash, a provoqué une baston d’anthologie dans l’underground de l’église ! Mosh, pogo et crowd surfing sous le plafond bas ont ravi les bas de plafond qui s’étaient retenus durant presque deux jours ! Difficile de résister à ce set fougueux au setlist qui prévoyait 24 titres balancés les uns derrières les autres, dans la plus pure tradition hardcore au relents de vieux thrash des années quatre-vingt.
BONGRIPPER
Le plat de résistance arrive pour ce dernier soir, avec la tête d’affiche du festival : les doomsters de Chicago de Bongripper. Tête d’affiche déjà de l’édition de 2020 qui dut être annulée du fait de la déferlante COVID, l’organisation a vu les planètes s’aligner à nouveau pour ce dixième anniversaire du festival, pour finir d’exorciser ces mauvais souvenirs. Le quatuor américain y joue seulement son troisième concert de 2023, après le Hellfest et un concert en Islande la veille de cette venue à Oslo. Pour lancer les festivités, le groupe lance un gros morceau, “Worship” et son doom protéiforme, mi-éléphantesque mi-mélodique. Les musiciens sont parfaitement rodés, ne s’adressent presque jamais la parole, et déclenchent chaque break, chaque section d’un simple regard. C’est une machine musicale redoutable, parfaitement huilée, et efficace, qui produit un effet direct sur le public : headbang forcené, masses de corps qui se meuvent et se bousculent en rythme, yeux fermés au ciel comme pour mieux recevoir les pluies de décibels… On trouve de tout dans l’enceinte de l’église. Petite surprise ensuite, c’est le rageur “Satan” qui est choisi pour mieux labourer les cerveaux avec notamment sa terrible intro (l’occasion pour Dan O’Connor de montrer qu’il est aussi performant dans le blast furieux que dans le doom lent et pachydermique). Sa dernière section plus mélodique vient appeler le désormais habituel “Slow” pour finir le set, l’un des titres les plus étourdissants du quatuor, mêlant passages doom lourds et lents et percées presque aériennes en de multiples séquences parfaitement maîtrisées par le groupe. Scéniquement, on ne fait pas dans la gaudriole, mais la musique ne s’y prête pas. Tandis que Dennis à gauche est toujours le plus flegmatique, Ron toujours au centre avec sa basse et Nick à l’autre guitare à droite vivent la musique dans toute son amplitude. Le set se termine donc sur le “premier final” de “Slow”, de manière un peu abrupte (fini les bidouilles de pédales d’effets pour conclure leur set), et le groupe se retire en saluant, sous les applaudissements nourris du public, exsangue. Nous nous retirons nous aussi sur ce final à la hauteur de nos attentes, satisfaits encore une fois d’avoir assisté à une excellente prestation d’un groupe qui, décidément, déçoit rarement.
Quelle excellente paire de jours nous avons passé au Høstsabbat ! Le facteur principal tient à sa programmation : tandis que 80% des mêmes groupes se retrouvent à tourner en Europe et participer à la poignée de même festivals durant le mois d’octobre, ils font venir des groupes rares, qualitatifs, et les font jouer dans des conditions excellentes. On ne reviendra pas encore sur la majesté de cette église et les concerts qui s’y déroulent, mais rappelons l’ajout très significatif que constitue l’adjonction de ce complexe “The Dome” au dispositif du festival, qui dispose désormais de deux grandes salles pour ses concerts les plus ambitieux, un véritable atout en plus de ses deux sympathiques mais trop petites salles déjà utilisées jusqu’ici. Alors certes, tout n’est pas rose non plus : la vie est chère à Oslo (notons pour information que le festival ne prend aucune marge sur le merch groupes) et il y fait froid (et faire un festival avec un blouson sur toute la durée est… “étrange”). Mais au global, ce festival à taille humaine, plein d’atouts, son public plaisant et respectueux, sa programmation de qualité et ses salles impeccables nous ont positivement marqué. Il est bien probable que l’on y retourne un jour…
Cela fait plusieurs années que le festival Hostsabbat nous fait de l’œil, avec sa programmation alléchante, et son dispositif autour d’une salle mythique, “l’église de la culture” Jakob, une église réformée du XIXème siècle, en plein centre d’Oslo. Suite à une rénovation menée à la fin du siècle dernier, le lieu est désormais consacré à l’hébergement de spectacles culturels, dont le festival fait désormais partie, tous les ans. L’église de belle taille est sobrement décorée, mais ses attributs architecturaux en font un lieu remarquable… sans parler du son, qui tournoie et englobe tous les volumes !
La programmation de cette année nous a décidé à déclencher ce périple, et nous voilà donc arpenter les abords du festival par 0°C, une ambiance pour le moins atypique !
VILLAGERS OF IOANNINA CITY
Le festival commence fort avec une valeur sûre de notre scène musicale depuis plusieurs années : Villagers of Ioannina City (VIC) qui inaugure la nouvelle scène. Nouveauté cette année : le festival a mis en place un partenariat avec un centre culturel immédiatement adjacent à l’église, qui propose une salle de spectacle (et donc concerts) de très belle taille, avec une hauteur de plafond époustouflante. Pouvant accueillir plusieurs centaines de spectateurs, le « Dome » (bien mal surnommé, étant données les dimensions toute parallélépipédiques du lieu) nous impressionne rapidement par la qualité du son proposé, qui sert particulièrement bien la formation grecque présente sur les planches. Le concert de VIC a beau être sans surprise pour les habitués, il constitue encore une fois un excellent moment : toujours clairement emmené par le charismatique Alex Karametis (chant impeccable, jeu de guitare sans fioriture mais efficace), le groupe est visiblement rodé et le set solide. La musique rock à tendance folklorique et aux atours psyche indéniables fait mouche, à force de mid tempi efficaces, propices aux envolées instrumentales toujours transcendantes. Une entrée en matière parfaite !
WITCH CLUB SATAN
Le phénomène black metal norvégien était fort attendu en ce premier jour de festivités, et il était le premier à se produire sur la scène The Chapel, c’est à dire dans l’église abritant le festival, devant le chœur à la croisée du transept. A des années lumières de nos préoccupations musicales, le tantôt trio tantôt quatuor féminin a livré le show – fort – attendu même s’il n’a pas fait honneur aux traditions norvégiennes en ne boutant pas le feu à l’église dans laquelle se déroulait ces deux jours de festivités pour public averti (c’est excusable vu qu’il s’agissait d’un édifice protestant à la base). Ce happening macabre empreint de satanisme a fait carton plein avec des costumes moyenâgeux puis juste des strings, du faux sang, de la basse à l’archet, des incantations blasphématoires et du black metal basique vociféré dans les aigus : tout le monde en a pris plein la gueule, ce qui était un peu le but du truc.
BONG VOYAGE
Première visite dans le Verkstedet : cette salle est en réalité le bar juste en face de l’église, de l’autre côté de la rue ! Consacré aux formations norvégiennes tout le week-end, le lieu est exigu au possible, avec une petite scène mise en place tout au bout du bar. C’est à 2 mètres de la scène que nous parvenons à nous faufiler au peu près, n’entrapercevant que les scalps des musiciens de Bong Voyage ! Les conditions spartiates ne nous empêchent pas de goûter avec plaisir aux riffs du quintette (pas facile de caler tout ce beau monde sur une si petite scène) scandinave, qui déroule un set de gros stoner avec une fougue communicative. Tant qu’à être « aveugles », on se pose dans un petit recoin calme du bar, pinte, bancs et tables en bois, où un haut parleur a été judicieusement placé pour goûter dans des conditions parfaites aux riffs efficaces et groovy de ce groupe sans prétention mais enthousiasmant.
AIMING FOR ENRIKE
Aiming For Enrike est le deuxième formation de la journée à se produire sous terre (premier pour nous), dans les fondations, sur la scène The Crypt (pas de Prix Nobel de l’originalité pour ce sobriquet sur ce coup pour l’orga – même s’ils pourraient aller le chercher à pieds). Littéralement sous-sol de l’église, la crypte est acessible via un petit escalier en colimaçon, et propose certes une belle surface d’accueil, mais malheureusement une visibilité très réduite sur les groupes (la scène est placée entre deux énormes poteaux de 2m de côté, si bien que seules quelques dizaines de personnes peuvent se targuer de voir un peu les musiciens évoluer – pour les autres, c’est en aveugle, voire sur les nombreux fauteuils disposés un peu partout). Le tandem d’Oslo, articulé autour d’une batterie et d’une guitare déployée à grands renforts d’effets, a fait le taf dans le style instrumental et aérien. Ce programme ambiant, planant et psychédélique déployé par un duo de mecs au look de profs de musique a enchanté ceux qui s’étaient entassés dans cet espace à la capacité très limitée. Tirant sur les plans aériens à la Pink Floyd avec rien moins que 23 pédales au sol, les Norvégiens ont ravi une certaine tranche du public branchée par les plans atmosphériques, ainsi que les curieux débarqués au sous-sol le temps d’attendre une prochaine sensation plus rock sur une autre scène.
SPACESLUG
Retour sous le « Dome » pour un concert très attendu par vos serviteurs, celui de Spaceslug, un groupe trop rare sur scène, auteur d’albums pourtant fort qualitatifs. Pour autant, le trio est à l’aise sur les planches, à la fois investi dans la prestation et l’interprétation scénique de ses chansons, en particulier Bartosz Janik, le guitariste faisant preuve d’une belle énergie. Le chant est porté alternativement par les trois musiciens, qui parviennent bien à retranscrire la richesse de leur spectre musical. Une large part du public semble découvrir leur musique, aux atours doom, sludge ou encore prog, et très vite tout le monde est conquis par les percées mélodiques du set, qui ne sacrifie jamais à la puissance des riffs. Baigné d’un light show impeccable qui tire bien profit de l’architecture du lieu, le set du trio polonais se termine trop tôt au goût du public, qui en aurait bien repris un peu plus…
BLACK RAINBOWS
Pour probablement la seule fois durant tout le festival, un chevauchement entre deux concerts nous force à un sacrifice (notre duo de zélés reporters de l’extrême devant donc se scinder en deux pour l’occasion) pour ne pas rater le début du set de Black Rainbows. Il faut dire que les prestations récentes du trio italien nous laissent espérer un gros set de heavy psych. Peut-être un peu écrasés par la grandeur (littérale) des lieux, les musiciens mettent un peu de temps à rentrer dans leur set. Le light show n’aide pas : basique en début de concert, il peine à stimuler l’auditoire. Mais au bout de quelques chansons, on y est, pas de doute, on les a retrouvés, en forme. Les nombreux soli de Gabriele tournoient dans les volumes impressionnants de l’église et envoûtent presque plus qu’à l’accoutumée, rendant particulièrement honneur aux titres les plus mid-tempo de leur répertoire. Côté rythmique, les gaillards sont bien au rendez-vous, Edoardo en particulier abattant des lignes de basse bien massives, headbanguant en continu derrière son voile de cheveux. Le light show aussi, plus dynamique, vient mieux servir le rageur “Grindstone”, le classique « The Hunter » ou encore leur habituelle reprise de « Black to Comm” du MC5. On a eu un peu peur au début, mais au final on a eu droit à encore un excellent set des italiens, décidément dans un bel état de forme ces derniers temps.
IRON BRA
N’ayant froid ni aux yeux ni ailleurs – car rappelons-le : Oslo fin octobre c’est autour de O°C en extérieur et vos envoyés spéciaux ne l’avaient pas en tête quand bêtement ils se sont fait un high five pour aller a la découverte de ce festival – la rue a été traversée pour se rendre sur la scène Verkstedet. Le jeune trio féminin d’Oslo a entamé son set dans un espace carrément blindé et pas uniquement par ses proches ! Tel une anguille, Desert-Rock s’est faufilé parmi les vikings pour atteindre le premier rang afin de savourer ce doom lent et foutrement efficace. Alica assurant une rythmique métronomique et martiale sur laquelle Kamilla, à la basse, et Niahm, à la guitare, déploient un mur de son phénoménal, ont conquis de nouveaux adeptes ; vous seriez bien inspiré aussi d’aller consulter les maigres titres déjà livrés par cette formation. Malgré un plantage à mi-concert, le groupe a réalisé une performance lourde et foutrement efficace en envoyant ses titres déjà dispos et quelques pépites qu’il nous tarde de nous taper sur disque. Le point d’orgue de ce show hargneux : « Matt Pike », l’ode dédiée au plus grand sex symbol de la galaxie stoner !
SIGH
Retour dans les parages de The Dome pour le trio du soleil-levant. Les vétérans du metal extrême arpentaient la place depuis la fin de l’après-midi et le guitariste grimé vêtu en civil détonnait dans le paysage glacial de la capitale scandinave. Sur scène ça envoyait sévèrement côté visuel avec des idéogrammes flanqués des deux côtés du trio – car oui, le groupe évolue aujourd’hui sans sa chanteuse habituelle, Dr. Mikannibal… nouvelle configuration ou formation temporaire ? Toujours est-il que le trio en habits d’apparat ça claque question image ! Un batteur surplombant la scène avec un masque et un samurai avec son katana à la guitare épaulant le leader du groupe Mirai Kawashima, bassiste-hurleur en kimono, le tout devant une projection nippone traditionnelle appliquée à l’arrière sur les murs nus, ont servi d’écrin pour un show visuellement impeccable et musicalement en adéquation avec l’œuvre du groupe. Peu sensibles à l’art pratiqué par le combo de Tokyo, nous étions quelque peu esseulés parmi des amateurs scandant les refrains des titres de Sigh. Comme Witch Club Satan quelques heures plus tôt, le trio a fait carton plein en prodiguant un black / doom metal aux accents parfois death à grands renforts d’effets scéniques dont une partie inspirée du patrimoine culturel de sa lointaine contrée.
YAWNING MAN
On commence à prendre goût à ces retours réguliers dans l’église pour chaque concert. Relégués à des scènes miniatures dans des festivals peu (re)connaissants, le légendaire trio californien prend la scène avec son assurance et son bagout habituels… Non, on déconne, ils sont juste montés sur scène presque sans un regard vers le public, entamant leur set par une jam qui se structure au bout de quelques minutes, sans jamais pourtant ne retranscrire la sensation d’écouter une « vraie » chanson, mais plutôt une séquence d’impro entre amis – ce qui finalement est exactement le cas ici. Cette section rythmique formidable, probablement la meilleure qu’ait connue le groupe, est pour vos serviteurs l’élément le plus intéressant du concert (bien plus que les jérémiades guitaristiques space-surf rock de Gary Arce, quasi immobile, concentré sur son interprétation. Le light show déplorable (spots rouges fixes, puis spots bleus fixes, puis spots violets…. Bref, vous voyez le genre) n’aide pas la partie « spectacle » du set, qui se retrouve cantonné à sa production instrumentale, toujours plaisante, mais qui manque de tenir le public attentif pendant la durée du set, la salle se vidant un peu au fil du concert.
LLNN
Déjà vu cet été au Hellfest, LLNN (et les garçons ; il était impératif de la placer, celle-ci), clôturait les festivités sur The Dome pour le premier jour de sabbat avec son post-tout sludge et sombre. Furie furieuse il y eut avec les Danois bourrins dont le grand bassiste a démontré à ses homologues dans la place que la basse ça se joue à la force de la nuque. Larguant sa guitare le temps d’un morceau – comme à Clisson – le frontman, guitariste et chanteur de la formation, a harangué la foule vigoureusement. Ça a blasté sa maman avec LLNN qui a mobilisé toute sa hargne pour envoyer dans les cordes le public du fest avec comme point d’orgue les incroyables coups de boutoir de « Parallels » tiré de l’album Deads. Au passage, on notera que c’était pas trop la fête du pogo, du slam, des murs de la mort et autres pitreries durant ces deux journées à l’exception d’un set brutal le samedi sur lequel on reviendra dans le report idoine. N’empêche que même avec un public plutôt statique, le quatuor synthé-guitare-chant-basse-batterie a constitué une des grosses sensations de ce premier jour.
THE ADMIRAL SIR CLOUDESLEY SHOVELL
En descendant un peu avant l’heure du début du set de The Admiral Sir Cloudesley Shovell (on reprend sa respiration) on parvient à se faufiler au premier rang, parmi les rares donc qui pourront avoir un « contact visuel » avec le groupe. Le trio à la carrière chaotique et aux tournées sporadiques déçoit rarement sur scène, et le constat se vérifie ce soir. Les plus-très-jeunes anglais (une bonne quinzaine d’années de “carrière”) ont usé un bon nombre de clubs et scènes en tous genres, et c’est sans prise de tête qu’ils déboulent ce soir, sans fioritures – à l’image de Johnny Gorilla qui branche direct sa Gibson SG dans sa tête d’ampli Marshall, comme à la maison, sans pédales d’effets ou autres artifices… Côté attitude on est bien, et côté interprétation on est pas mal non plus : les titres déboulent les uns entre les autres, entrecoupés de vannes entre musiciens ou avec le public, l’auto-dérision chevillée au corps, avec cet humour so-british. Musicalement imaginez une sorte de Black Sabbath meets MC5, avec ce goût du riff épais, de la mélodie, mêlè à une attitude presque punk, le tout baigné par un son garage juste poussiéreux comme il faut. Le trio est généreux et donne la banane à tout le monde, headbanging et poings levés au ciel se disputant dans les premiers rangs. Un des cartons surprise de la journée. Rock N’Roll !
WITCHCRAFT
Invité en dernière minute suite au désistement de Elephant Tree et Shaman Elephant, c’est pourtant avec circonspection que l’on attend la montée sur scène de Witchcraft. Magnus Pelander ayant fait le vide depuis plusieurs années dans son line up, et ayant proposé un disque quasiment solo assez insensé récemment sous l’étiquette du groupe, chaque nouvelle prestation suscite autant la curiosité que la défiance. Une chose est sûre : en montant sur la petite scène de l’autel de l’église, Pelander a le sourire. Toujours en format trio désormais Witchcraft entame son set sous les meilleurs auspices, à l’image de ce light show intéressant, mettant autant en valeur l’architecture de l’église que le groupe. Alors forcément, l’ancienne version de Witchcraft nous manque toujours un peu, avec son artillerie à 3 guitares et une basse (!!) pour des joutes épiques et puissantes… mais il semble qu’il faille se faire une raison désormais, cette période est terminée, et c’est sous sa forme simplifiée et plus « dépouillée » que nous devons apprendre à apprécier les compos du groupe. C’est ce que nous faisons sans nous faire prier, du coup, et de ce côté il y a quand même matière à se faire plaisir, avec une sélection en mode best of de ses concerts habituels : tous les “hits” habituels sont là, “No Angel or Demon”, “Witchcraft”, “Wooden Cross”, “Queen of Bees”… Pas de surprise, si ce n’est une sorte e désaveu du dernier album, dont aucun titre n’est joué ? Quoi qu’il en soit, Pelander garde la banane pendant tout le set, et son interprétation est sans faille : avec un jeu de guitare gracieux et efficace (d’aucuns capteront quelques réminiscences Iommi-ennes ici ou là dans son doigté… la cause n’est pas perdue !) il tient l’essentiel de la baraque, bien aidé par un binôme rythmique qui compense son absence d’allant scénique par un jeu de qualité. Au final, on aura pris un vrai plaisir à assister à ce set, satisfaisant en tous points, qui entérine si besoin était le nouveau “format” de Witchcraft…
Il est temps de regagner nos pénates, des étoiles plein les yeux et des acouphènes plein les oreilles… Jusqu’ici ce festival tient toutes ses promesses. La 2ème journée s’annonce bien charnue, et quelques heures de sommeil ne seront pas superflues !
Le temps a filé et nous voici déjà au troisième et dernier jour. Le corps commence à vous faire sentir qu’il fatigue mais ce n’est clairement pas le moment, la journée est dantesque. Les tournées des uns et des autres font que pas mal de groupes n’avaient certainement la possibilité de venir que le dimanche. On a donc un déséquilibre par rapport aux deux premiers jours mais on ne va pas s’en plaindre, on termine en beauté.
MONKEY3
Et quand je vous dis ça, comprenez qu’on débute par exemple avec Monkey3 sur la mainstage. Du lourd dès le début.
Si vous n’avez jamais vu les Suisses en concert, de une c’est étonnant vu leur longévité, de deux c’est une grosse erreur. Chaque concert que j’ai vu d’eux a toujours été de haute qualité et celui-ci ne fait pas exception. Le son est magnifique et le trio? visiblement content d’être là ne tarde pas à conquérir la salle dans sa totalité. Les plus anciens sont de plus ravis d’entendre par exemple les première notes de Jack extrait de leur deuxième album. Une fois de plus le quatuor a fait honneur à sa réputation de groupe live imparable avec un concert de très haut niveau qui pose les bases de cette ultime journée. Excellent.
THE OBSESSED
Petit tour à droite à gauche pour faire le plein de discussions et rencontres et on enchaine, toujours sur la Desert Stage avec The Obsessed. Bim ! Grosse journée je vous ai dit ! Ce n’est pas à Wino et sa bande qu’on va apprendre comment chauffer à blanc une salle déjà acquise qui plus est. Donc, pas de préliminaire, le groupe enchaine les titres piochés dans toute leur discographie et expose tout son savoir-faire. De la belle œuvre à l’ancienne, rondement menée avec un groupe visiblement ravi de son effet.
DUEL
Direction la Canyon stage pour l’un des mes principaux objectifs du festival, Duel. Public et groupe, tout le monde a donné ce qu’il avait dans les tripes. J’avais une attente énorme pour ce groupe et ils ont tout explosé. Difficile de trouver les mots pour retranscrire le ressenti tellement le groupe a fait preuve d’une maitrise totale de bout en bout. Les texans ont tout retourné et ont offert un show hyper dense et énergique. Ne cherchez pas les pauses et temps morts, ne cherchez pas les moments de relâche. Un sprint de début à la fin. Tom Frank à la guitare et au chant assure méchamment. Ce mec et le reste du groupe sont possédés par leur musique et interprètent leurs titres avec cet énorme supplément d’âme qu’empêche le studio. A titre perso, le meilleur concert des trois jours, rien que çà.
EYEHATEGOD
Je suis tellement sous le choc de Duel que je reste jusqu’au bout et joue même ma groupie pour récupérer une setlist oh ! Du coup, à la bourre pour Eyehategod sur la scène principale et impossible d’accéder au devant de la scène pour des photos avant la fin du délai (3 premiers titres) le temps de se frayer un chemin pour arriver près de la scène. Bref, le groupe joue devant une salle comble et a l’air en bonne forme. Mais pas plus. Les quatre musiciens délivrent un show solide mais un peu routinier. Ça monte doucement en puissance et la seconde moitié est plus convaincante. Attention, Eyehategod qui en garde sous le coude ça reste quand même quelque chose à voir. Le groupe assène ses riffs mortels, interagit un peu avec le public et apporte la dose de rage que les fans étaient venus cherchée. Eyehategod, ça ne chante pas l’amour et la joie de vivre, ça crache sa haine du système et la nécessité d’abuser de substances pour traverser cette chienne de vie. Bref, le public ressort heureux de ce concert qui a fait le job.
YAWNING MAN
Je poursuis ma soirée en picorant plus qu’autres choses sur Howling Giants, Black Mirrors et vais jeter un regard curieux sur le début de Enslaved. Direction la Vulture Stage car je suis intéressé de voir l’accueil réservé à Yawning Man. Clairement la bizarrerie de programmation que de placer ce groupe sur la toute petite scène (et pour avoir eu l’avis de Gary Arce, ce n’était pas le choix du groupe). Bref, si vous arriviez 15 minutes avant le début du show, il y avait encore moyen d’être bien placé. Une fois le show commencé, trop tard. C’est blindé de chez blindé. Le groupe égal à lui-même délivre un concert tout en ambiance, en mode cool de chez cool. Pour vous dire comme les gars étaient tranquilles, à 21h40 heure présumée du début du concert, Matthias Vandeven (My Sleeping Karma) doit partir à la recherche du batteur et bassiste alors que Gary Arce les attend sur scène. Bref, le coin scène et bar est plein à craquer et du début que j’ai vu et les échos entendus ensuite, c’était très bien.
THE ATOMIC BITCHWAX
Alors oui, j’ai quitté assez vite Yawning Man mais je les ai déjà vus un paquet de fois ce qui n’est pas le cas de The Atomic Bitchwax. Et à priori, ça promet du grandiose car un groupe comme celui-ci sur la Canyon Stage, c’est la promesse d’une belle bagarre. Et c’est exactement ce qu’on a. Un groupe ravi d’être là, devant un public ravi d’être là, sur une scène qui est parfaite pour un concert de ce type. Tout y est et l’alchimie est parfaite. Plus le groupe se donne plus le public leur répond. On a donc un concert de grande qualité, très énergique où le groupe balaye une bonne partie de sa discographie au grand plaisir des fans. Une fois le show terminé, je croise des gens dégoulinant de sueur (le bassiste de Duel entre autres!) qui ont un sourire aux lèvres qui en dit long. Magnifique prestation.
DOPELORD
Et dire qu’il nous reste Dopelord pour clôturer cette édition 2023 du festival. Les Polonais ne sont pas venus faire de la figuration et clôturer un festival où la moitié du public serait déjà parti, oh que non. Les quatre musiciens sont là pour vous faire sortir la moindre goutte d’énergie restante à grands coups de riffs maléfiques. Et ça marche. Là encore le public est hyper réceptif et se donne sans compter. Ça headbangue de partout et applaudit généreusement. Il faut dire que la prestation de Dopelord est excellente. Impossible de rester de marbre. Le groupe pioche principalement dans ses trois derniers albums pour une setlist solide et puissante. Ça ne laisse pas de place au doute, Dopelord est là pour montrer ce qu’ils savent faire et la démonstration est magistrale. Pour moi un choix parfait pour faire la clôture du festival, une réussite total.
Voilà, l’édition 2023 se termine. On repart la tête pleine de merveilleux souvenirs, de bons sons et de superbes images. Le sac est rempli de disques et autres goodies achetés à prix raisonnables directement auprès des groupes.
Et comme je le disais en intro du premier jour, si vous regardez le ratio entre l’investissement (place, hébergement, route) et le plaisir (concerts, rencontres, discussions), vous êtes carrément bénéficiaires. Le DesertFest d’Anvers est un festival a taille humaine qui permet de pleinement apprécier son week-end. Les quelques défauts (prix de la bouffe, un peu trop de basse sur la mainstage, petite scène parfois inaccessible sans arriver à l’avance) sont totalement éclipsés par le millier de qualités de ce festival. Rendez-vous donc dans un an pour reprendre sa dose automnale de riffs.
De retour au Trix pour la deuxième journée du festival. Le public a repris des forces, la liste des groupes du jour est intéressante. Bref, on ne se fait pas prier pour y retourner et reprendre une bonne rasade de riffs!
ASTODAN
On commence doucement en allant jeter une oreille sur Astodan (Belgique). Après avoir sorti deux LP instrumentaux, le groupe a intégré le chant sur son dernier album. Comme la veille, la Canyon est déjà bien remplie et le public très attentif est captivé par la performance du groupe. Ça sonne très bien et celles et ceux qui sont arrivés plus tôt que moi ont eu raison.
YEAR OF NO LIGHT
Chose rare, enchainement de deux groupes français pour ce milieu d’après-midi. Direction la Desert Stage pour les Bordelais de Year of No Light. Jamais évident de construire sa setlist lorsqu’on dispose de 40 minutes et qu’on est plus adepte des morceaux de 10 minutes que de 3. Ce sera donc 2 morceaux de Consolamentum, une pépite de Ausserwelt et une autre de Tocsin. Le public est très attentif et réceptif devant la performance impeccable de précision du groupe. Hypnotique à souhait, le groupe mélange le gros son et le planant. Normal de les voir sur la grande scène.
RED SUN ATACAMA
Malheureusement les deux groupes français se chevauchent, argh !!! Direction la Vulture Stage pour Red Sun Atacama. La veille c’est Carlton Melton qui avait tout retourné, aujourd’hui c’est clairement Red Sun Atacama. C’était furieusement bon. En y repensant la tête froide, c’est peut-être bien dans mon top 5 du week-end et n’y voyez pas de la solidarité frenchie, ce n’est pas mon style. Non, objectivement, le trio a clairement gagné des fans et comblé ceux qui les connaissaient déjà. Excellente performance du groupe avec un son énorme et un public aux anges.
THE VINTAGE CARAVAN
Du coup, le retour sur la Desert Stage pour le trio islandais de The Vintage Caravan fait presque office de repos. Un concert sérieux et agréable mais qui ne m’emballera pas plus que ça. Mais si j’en juge par la réaction du public qui les connait bien mieux que moi, c’est solide. Le groupe est encore en pleine promo de Monuments, leur dernier effort studio, et même d’un album live, The Monuments Tour, sorti quelques jours avant. Le groupe est donc là pour se faire plaisir et ça se sent. Pour le chroniqueur que je suis, le problème c’est que leur passage est entre Red Sun Atacama et La Muerte.
LA MUERTE
En quelques mots, La Muerte est un groupe belge qui s’était séparé en 1994 pour se reformer en 2015. Des vieux de la vieille comme qui dit. Je vous dis ça mais c’est ce que j’ai lu car le groupe, je ne le connaissais pas du tout avant. Et c’est là l’une des grandes forces d’un festival, vous faire découvrir des groupes dont vous n’auriez jamais écouté une note sans ça. Bref, La Muerte, c’est musicalement un truc qui ne m’intéresse pas forcément mais dont le show m’a captivé, complétement hypnotisé. Une quasi-expérience mystique à base de Doom, Metal, d’indus et de tout un tas de trucs agrégés. C’est irracontable, c’est à vivre. Au point que je reste jusqu’à la dernière note, hypothéquant mes chances de pouvoir prendre des photos correctes du groupe suivant, pourtant sur ma liste des priorités. C’est dire!
KING BUFFALO
Il va falloir que King Buffalo assure sur la grande scène pour capter mon attention après ça mais c’est exactement ce qu’ils font. Je les avais cochés dans ma liste des « groupes jamais vus et on ne sait pas pourquoi ». Performance solide avec une setlist très équilibrée piochant dans une bonne partie de leur discographie déjà bien garnie. La salle est comble et comblée. Le groupe a exactement donné ce que l’on attendait d’eux et de leur réputation live. Pas étonnant si certains placent ce concert dans leur top du festival. Si vous les aimez sur disque, King Buffalo en live c’est un plaisir car ça joue très bien et leur réputation est amplement méritée. De la première à la dernière note y’a rien à redire, c’est de la belle œuvre.
BLACK MOON CIRCLE
Petit crochet sur la Vulture pour prendre quelques décibels des Norvégiens de Black Moon Circle. Encore une fois la Vulture tient ses promesses et le trio assure. Ce groupe fondé il y a quelques années par les frères Engan s’est attaché une fanbase et tourne régulièrement en Europe. Leur psychedelic space rock (si on devait mettre une étiquette) est très agréable à écouter. Et clairement, si vous ne connaissez pas, c’est le genre de groupe à découvrir et à ne surtout pas laisser de côté en festival ou en première partie.
MANTAR
Grosse année pour Mantar qui donnait ici son avant dernier show de 2023 avant une pause bien méritée (et une tournée avec Meshuggah déjà annoncée pour mars 2024 !). Là encore, première pour moi et grosse claque. Parfois il ne faut pas être plus de deux pour occuper tout l’espace visuel et sonore d’une grande scène. Mantar le prouve avec une performance monstrueuse de puissance. Alors qu’ Erinç Sakarya maltraite copieusement sa batterie avec une force absolue, Hanno Klärhardt occupe tout l’espace disponible et nous assène des riffs dantesques dans la face. Mantar place la barre très haute pour qui voudra faire show plus puisant après eux. Des patrons.
Pour redescendre, il me faut bien une bonne frite à 12 € et quelques achats au merch. L’occasion de discuter avec Shiran Kaïdine de Year of No Light, musicien vraiment très sympathique. Et un festival c’est aussi ça et surtout le Desert Fest, louper des concerts car on est en train de discuter entre potes, avec des personnes qu’on rencontre pour la première fois et même avec des musiciens. L’ambiance du festival s’y prête. Tout est à taille humaine, rien de démesurément grand.
ATOMIC VULTURE
Atomic Vulture qui joue sur la Vulture Stage, c’est presque une évidence. En même temps ce n’était pas gagné puisque le groupe a été ajouté à la liste en remplacement de Ruff Majik quelques jours avant. Le trio belge balance ses instrumentaux à base de riffs vintage à souhait et enflamme pour la dernière fois aujourd’hui la petite scène qui a encore vu passer un paquet de bons concerts. Vu la réputation, je me demande si les groupes n’ont pas autant de pression à jouer dans ce petit coin plutôt que sur la grande scène. Il faut assurer et c’est ce que fait le groupe en développant son ambiance propre avec un son puissant.
GNOME
The Great Machine (trio israélien) ayant dû annuler leur venue, les Belges de Gnome assurent la pige. Gnome c’est le meilleur coup marketing du fest. Des mecs avec des bonnets rouges, programmés au dernier moment et qui te vendent 5 € des bonnets rouges. Du coup, des dizaines de bonnets partout, autant des fans que des curieux. La Canyon Stage déborde de Gnomes, sur scène et dans le public. C’est bon enfant et ça fait une chouette fin pour ce samedi de grande qualité.
Très bonne deuxième journée donc et une courte nuit durant laquelle il faudra absolument faire le plein d’énergie car la journée de dimanche est plus que copieuse avec un enchainement de groupes cultes assez fou.