Ufomammut – Idolum

Ufomammut - Idolum

Ils sont de retours, prêts à nous en remettre une bonne dans le visage. Après un EP franchement décevant me concernant, qui misait plus sur sa (jolie) forme que son fond et une collaboration le trio revient avec un disque qui fait honneur à son nom toujours aussi ridicule que pourtant tout à fait approprié. C’est bien un véritable mastodonte au son en directe provenance des ères stellaires qui vient nous percuter.

A croire donc que l’épisode ‘Lucifer songs’ et ses formats courts ont été balayés, on récupère la suite directe du monstrueux Snailking, l’un des plus fabuleux disques de ‘stoner/doom’ de cette décennie, avec un son encore plus massif et lourd, mes meubles en tremblent encore. La finesse ne semble plus être de mise, autrement que dans les subtils arrangements, les Italiens en truffant leurs longs morceaux (on tape dans la demi-heure sur la fin, ils ont enfin osé le faire), notamment de longues mélopées de clavier synthétique grâce à ce fameux Korg qu’Urlo caresse de ses doigts tandis qu’il martyrise de sa voix maintenant bien reconnaissable le micro à coups de hurlements noyés dans la masse de saturation noire et vicieuse.
Le reste ne change pas, on reste en terrain connu, voire ‘balisé’ en ce qui concerne le style ‘Ufomammut’ mais gare aux mines et autres surprises, on n’est jamais vraiment à l’abri derrière le mur que forment ces coups de butoirs soniques répétés inlassablement, comme le démontre sans doute la plus belle pièce d”Idolum’, ‘Ammonia’. A la manière d’Asva ou de la collaboration Altar entre qui vous savez, pour citer des exemples faciles, Ufomammut a invité une chanteuse folk, Rose Kemp, a glisser ses chuchotements lyriques sur cette chape de plomb et le résultat est simplement envoûtant. Le ‘drone’ est décidément une musique rituelle qui ne peut se passer de l’élément féminin.

Monstrueux et monstrueusement long, ‘Idolum’ marque le retour aux affaires du groupe italien et confirme qu’il est l’un des fers de lance européens du style. Tout aussi dur à appréhender et savourer que son prédécesseur, il va falloir de l’obstination pour s’en délecter mais je vous fais confiance, ce n’est pas le premier monolithe que l’on nous glisse entre les oreilles. A noter une édition deluxe vraiment splendide (et chère), cette fois, le fond et la forme sont en osmose.

Sir Hedgehog – Sir Hedgehog

Sir Hedgehog - Sir Hedgehog

Depuis des années, l’underground bruisse autour de Sir Hedgehog, le groupe se voyant bardé d’une petite réputation culte à la seule force d’une série de démos et de mini-albums confidentiels. Voilà donc enfin leur premier véritable effort vinylique, et effectivement, la rumeur ne mentait pas : Sir Hedgehog est vraiment un excellent groupe. Evoluant franchement dans la mouvance ‘stoner’ au sens très large (et donc très bon) du terme, le quatuor canadien propose une musique largement empreinte de tonalités 70’s/80’s, mais aucunement datée, et ce notamment grâce à des arrangements audacieux et percutants (énorme son de guitare, riffs tranchants, basse ‘groovante’, backing vocals, percussions, instruments acoustiques, etc…). Tantôt planant (‘Magic Garden’), tantôt heavy (‘Freedom Guild United’), tantôt rapide (‘Gimme the bone’), tantôt lent (‘Olympus Mons’), le groupe excelle dans tout ce qu’il touche, mais ne se disperse jamais, ne se perd pas en impros mal maîtrisées. Sir Hedgehog ne révolutionne pas le genre, mais le maîtrise totalement, se permettant des libertés et des audaces qui se révèlent à chaque fois réussies. Cerise sur le gâteau, le groupe nous gratifie en ‘ghost track’ d’une hallucinante reprise du ‘Call me’ de… Kim Wilde (!!). Excellent !

Clutch – Live at the 9:30

Clutch - Live at the 9:30

Les fans de baseball connaissent feu le vieux Yankee Stadium sous le sobriquet « The house that Ruth built ». Ainsi, par analogie, le 9:30 club de Washington DC est souvent désigné par « The house that Clutch built ». L’endroit, où le combo du Mryland a joué une tripotée de fois au cours de sa carrière, était donc le lieu tout indiqué pour cette soirée spéciale du 28 décembre 2009 durant laquelle Fallon, Gaster, Maines et Sult vont jouer l’intégralité de l’album éponyme de Clutch.Mais attention, même si l’objet se présente sous la forme d’un digipak CD, c’est bien sous le format DVD que nous est donnée la possibilité de (re)vivre ce fameux gig. Installez-vous confortablement dans votre canapé avec quelques bières fraîches à portée de main, débranchez les téléphones et tout autres appareils susceptibles de vous déranger, et vous voilà parti pour plus d’une heure et demie de rock et de groove dont seul Clutch a le secret. Le groupe entame le set par 4 titres de Strange cousins from the west, histoire de rappeler quand même à la foule qu’ils ont un nouvel album à promouvoir. Et, dès la fin du magistral « Let a poor man be », Maines balance la ligne de basse de « Big news I ». Nous voilà donc embarqués, grâce à plusieurs caméras, dans la moiteur de 9:30 club pour un moment de bravoure mémorable. Les « Tight like that », « Droid » ou « Spacegrass » n’ont pas pris une ride. Bien au contraire, le combo réussit le tour de force de les rendre encore plus groovy tout en conservant la hargne des versions originales. Du grand art. On ne s’ennuie pas un seul instant à tel point que quand vient la fin de « Tim Sult vs. The Greys », nous sommes surpris de voir que tous les titres du Clutch y sont déjà passés. Et pour enfoncer le clou, Fallon et ses comprases reviennent pour une version absolument dantesque de « The Regulator » avant de terminer sur l’entraînant et l’entêtant « Gravel Road ». Après ces instants de pur bonheur, il est l’heure de passer au deuxième DVD de ce Live at the 9:30. Intitulé « Fortune tellers make a killing nowadays », ce documentaire de près de 2H00 se présente sous la forme d’un road-movie rythmé par la musique de Clutch. Vegas, LA, Frisco, mais aussi Montreal……on y trouve pêle-mêle des interviews de fans, de roadies, de musiciens fans de Clutch. Ce documentaire est aussi l’occasion, au travers des diverses interventions des uns et des autres, d’en connaître un peu plus sur l’origine de Clutch. Mais ce qui transpire surtout de ce « Fortune tellers », c’est le caractère humble de ces 4 amis d’enfance. Simples, ultra-réservés pour certains, bosseurs…..ces mecs là sont à l’opposé de la rock n’roll attitude affichée de certains de leur congénères. Ce double DVD est donc un must-see pour tout fan du groupe du Maryland.

Place Of Skulls – With Vision

Place Of Skulls - With Vision

Ça y est, Victor Griffin confirme définitivement son retour. Pour ce second album, il s’est acoquiné avec rien moins que Wino, monstre sacré du stoner doom (qui est hélas déjà reparti). Donc pas un, mais deux guitar heroes, par ailleurs également vocalistes hors pair. Excusez du peu comme on dit. Et quand ça vous pète à la gueule ça fait mal ! Héritage sabbathien incontestable. Mais c’est tellement bien fait que c’en est un régal. Une splendeur. Ce disque est d’une fluidité absolue. De vieux routiers qui font leur miel du meilleur de la tradition heavy qu’ils ont eux-mêmes contribué à édifier. Les solos que les deux gaillards nous décochent à tour de rôle sont simplement prodigieux. Eblouissants lorsqu’ils les croisent. De la plus parfaite impureté. Totalement assumée. Car Wino et Griffin ont l’honnêteté de ne pas se raconter d’histoires. Ils savent mieux que quiconque qu’ils sont des héritiers. Qu’ils ont une dette envers Iommi et Ozzy. Ils ne la nient pas. Ils leur rendent hommage et s’imposent à leur tour comme des modèles d’excellence. En toute humilité. Tels d’infatigables artisans. Sans cesse ils polissent leurs riffs, les raffinent, pour les rendre plus puissants et plus efficaces. Ce disque est une leçon magistrale administrée par des maîtres du genre. On s’incline et on dit merci.

Monster Magnet – Superjudge

Monster Magnet - Superjudge

On continue notre voyage au pays des dinosaures avec un album qui est un prélude à la popularité internationale que Monster Magnet connaîtra à partir de 1997. Petit flashback, nous sommes en 1993 et le Magnet n’a pas encore aimanté les foules et mis le souk dans le milieu rock. Dave Wyndorf n’a pas encore atteint le statut d’icône et c’est sereinement que les lascars attaquent le 3e opus du nom de Superjudge (4e si on tient compte de l’E.P. Tab).

On sent qu’ils ont travaillé la formule et que la sauce commence à prendre à l’écoute de ce travail de composition empreint d’une forte personnalité. Maître Wyndorf enchaîne ses suites d’accords maintenant reconnaissables et caractéristiques de son groupe. La fuzz coule à flots dans un déluge de guitare solos pyrotechniques sous le doigté talentueux d’Ed Mundell. Le son a maintenant pris une assurance remarquable et a bénéficié d’une attention particulière, certes à grands coups de dollars mais bon on n’a rien sans rien. Loin de moi l’idée de dénigrer les précédents travaux mais force est de constater que la dynamique du son manquant aux précédents albums est bien présente et prouve que le groupe gagne en maturité en plus de s’allier un public toujours plus nombreux au fur et à mesure des tournées marathoniennes.

Si la 1ère chanson nous invite à un décollage majestueusement dirigé par la voix aux mille effets mais au timbre ô combien reconnaissable, la 2e plage nous montre que le quatuor (si, si, ils étaient 4 à l’époque) a bien intégré des éléments plus groovy accompagnés de saveurs psychédéliques dans de superbes lignes de solo. La section rythmique est également mise à contribution pour marquer les contre-temps avec précision avant de relancer de plus belle la machine aux riffs cinglants.

Plage 3: Le côté space rock du riff hypnotique joué tout en finesse nous montre que de nouvelles voies s’ouvrent aux musiciens qui n’ont d’ailleurs pas fini d’en marteler les notes pendant près de 5 minutes jusqu’à ce que, grande surprise, le batteur attaque un riff punk en mode binaire pour ensuite se voir rejoindre par les autres instrus dans une déferlante enflammée qui ne trouvera sa fin que dans une cacophonie savamment orchestrée en guise de final. Puis c’est l’intro acoustique de Cage Around The Sun qui nous ramène sur terre non sans un paradoxe marquant à l’écoute des paroles surréalistes de Wyndorf. Je vous laisse le soin de découvrir.

Bref, les morceaux s’enchaînent selon un ordre bien pensé et c’est un plaisir pour les oreilles entre les envolées des guitares tantôt planantes tantôt incandescentes soutenues par une section rythmique efficace et surtout un blizzard de cymbales quand il s’agit de mettre la zone.

Monster Magnet conserve quand même son côté rock en première ligne: les riffs demeurent “in-your-face” (traduisez par “dans ta gueule”). Même gonflé à la fuzz, le son des grattes reste fort aigu alors qu’un certain Josh de Kyuss n’éprouve plus la moindre gêne à brancher sa gratte directement dans un ampli de basse.

Cependant, les membres du groupe nous apprennent qu’ils peuvent intégrer de manière homogène des éléments de space rock, de fuzz rock et de psychédélisme en alternant des plages aux structures évidentes avec d’autres incluant de longs breaks d’une intensité remarquable. Le trippant Brainstorm, 10e morceau de cet album, nous donne un goût de reviens-y et est annonciateur du skud qui sera lâché 2 ans plus tard. Monster Magnet n’est pas encore à son zénith mais est, à ce moment très précis de la sortie de l’album, dans une phase ascendante.

Sunride – Through The Red

Sunride - Through The Red

Il y a de ces albums dont on attend peu, de ces groupes qu’on ne connaît pas, qui font une première impression moyenne, et qui se révèlent très vite de petits joyaux ! Sunride est de ceux-là. Je ne connais pas leur premier album (ni rien de ce qu’ils ont sorti), mais celui-ci, même s’il ne paye pas de mine, se révèle être excellent, et ce, ça mérite d’être mentionné, après seulement deux ou trois écoutes : les chansons sont accrocheuses à souhait ! Décrire leur genre est plus difficile : résolument metal (le riff est acéré et la guitare tranchante), les finlandais sont imprégnés de profondes influences plus rock, voire stoner (du groove comme s’il en pleuvait), leur donnant un intérêt tout particulier. De l’obsédant “False independence” au heavy/tendance Paradise Lost “Speeding Nowhere”, en passant par le stoner-doom “Days inside the capsule” ou le boogiesque “Under control”, il y en a pour tous les goûts, sans jamais perdre en homogénéité. Bel effort.

Rite – Shoot Skull For Jackpot

Rite - Shoot Skull For Jackpot

Nouvelle prod pour le label qui fait la fierté de notre pays bien davantage que ne saurait le faire n’importe quel parti politique ou équipe de football. Fidèle à son attirance pour les belles scandinaves, Water Dragon à remis le cap sur la Finlande. Après leur avoir produit un joli premier 45 tours en guise de préliminaires, l’hydre française est parvenue à faire godiller Rite sur la longueur d’un album. La qualité du son frappe immédiatement. Y a pas de doutes, on est bien dans le Grand Nord. Sec et brûlant comme du Entombed. Du coup, les gimmicks stoner, ronds et amples, que l’on discerne en creux ici où là, sont-ils à peine dissimulés sous une matière anguleuse et agressive du meilleur effet renvoyant à ces nouvelles formes de rock’n’roll contemporaines situées entre hard et punk rock métallisé. Bref, ça sent la cartouchière plutôt que les bretelles, la Gibson plutôt que le Colgate, les rangers plutôt que les sandalettes. Qui s’en plaindra ?

Brant Bjork – Punk Rock Guilt

Brant Bjork - Punk Rock Guilt

Mais qu’est ce qui va différencier ce nouvel opus des autres, voilà bien la première question qui me vient à l’esprit au moment de mettre Punk Rock Guilt dans la platine. Il faut dire que Brant n’est pas réputé pour révolutionner son style d’un album à l’autre et certains y voient même des répétitions, non sans avoir forcément tort. J’étais de plus un peu dubitatif lorsque j’ai appris que Brant nous sortait en 2008 un album enregistré en 2005. J’ai même un moment eu l’idée que le gars nous refilait ses fonds de tiroirs comme on dit.
Finalement, après quelques écoutes, le constat est sans surprise. Sans bouleverser ses habitudes, l’ami Brant nous livre un disque agréable à l’écoute, bien réalisé et renfermant quelques chansons sympathiques. Peut être moins réussi que le savoureux Saved By Magic, Punk Rock Guilt n’en reste pas moins un achat indispensable pour tout fan et pourquoi pas votre premier album de Brant Bjork si vous devez le découvrir après avoir lu ces lignes.
Une mention spéciale pour la production de l’album que je trouve vraiment excellente. Le son, la balance entre les instruments, les arrangements, tout ici est efficace et sans fioritures excessives.
Tout comme Local Angel fut un tournant dans la carrière de Brant, Punk Rock Guilt le sera aussi. Album entièrement enregistré par lui, nouveau label (Duna Records a cessé d’exister), et même nouveaux guitariste et batteur pour l’accompagner, voilà bien des changements qui débouchent sur une nouvelle phase dans sa carrière.
Mais à l’instar de Local Angel qui fut un succès mitigé, punk Rock Guilt bénéficie d’atouts plus solides pour s’assurer l’adhésion des fans et donner à une poignée de nouveaux venus l’envie de se plonger dans la discographie complète de Mr Cool.

Sons Of Alpha Centauri – Sons Of Alpha Centauri

Sons Of Alpha Centauri -– Sons Of Alpha Centauri

Oyé les amis du stoner instrumental ! Le quatuor londonien nous livre son premier long format qui fait suite à une démo sortie en deux-mille-quatre ceci juste avant de commettre ces prochains temps une œuvre ‘néoclassique’ (dixit le dossier de presse) à paraître sous le nom de ‘Thread EP’ avec cinq titres au sommaire.
Au menu de cet album : douze plages de stoner entièrement instrumental pour plus d’une heure de musique très homogène. Auteur de déjà trente-quatre compositions, le groupe les numérotants à la matière de Karma To Burn, mais la comparaison avec le trio étasunien s’arrête là, nous avons droit cette fois-ci à 2, 14, 15, 26, 23, 25, 28, 21, 9, 31, 8 et 34. Ces plages ont toutes un sous-titre et là je me bidonne un peu en lisant dans la bio que le groupe les numérote pour, je cite, ne pas compromettre l’intégrité artistique au profit du gain commercial et patati et patata… enfin bref on passe là-dessus et on s’intéresse justement à l’aspect artistique de cette plaque.
Tout d’abords, au niveau de son emballage, ce skeud est une réussite de packaging pas vraiment épuré, mais très élaboré et je ne vais pas bouder mon plaisir en voyant le chemin parcouru depuis l’apparition du cd argenté bien encastré dans son boîtier au fond noir et son livret nous expliquant la codification AAD, DDD, ADD etc… Ce bijou trône dans son écrin de toute grande classe avec impression sur papier gaufré et insert opaque dans un style qui me rappelle un peu ce que nous livrent parfois les résidents d’Hydrahead.
Pour le côté musical, qui est quand-même un peu l’essentiel, je dirai que les amateurs de Monkey 3 ou de 35007 devraient largement s’y retrouver avec cette production bien aérienne comme il faut, mais qui ne verse pas trop dans les plans babas en conservant juste ce qu’il faut de brutalité. L’ombre de Pink Floyd de la grande époque plane aussi sur cet opus de plus d’une heure au cours duquel ces Britanniques déploient toute leur énergie et leur savoir-faire musical pour faire hocher notre nuque avec des joyaux tels que ‘23’ qui est une magistrale démonstration de montée en puissance d’un riff qui tourne à l’instar de sa petite sœur ‘9’.
Le groupe s’égare parfois sur les rivages de fleuves un peu moins séduisant comme sur ‘8’ qui a un rendu très rock progressif ou ‘25’ dont le riff de base féroce s’égare un peu au milieu d’une joyeuse pagaille qui est accentuée par l’ajout de breaks et de plans pompiers qui me rappellent les guitar heroes de naguère et leurs fameuses permanentes. Quand elle se laisse aller dans son créneau un peu plus rigide, avec des rythmiques métronomiques, une basse vrombissante bien mise en valeur par le mix final et des guitares distordues bien acérées, la formation explose avec ‘2’, ‘26’ ou ‘21’ qui frappent juste et pile poil où il faut !

Porn (Men of) – Wine, women and song…

Porn (Men of) - Wine, women and song...

Avis de Brotherfab

Récapitulons. Porn est le groupe de Billy Anderson (producteur de tout premier plan ayant travaillé avec Cathedral, Eyehategod, High On Fire, Los Natas, Melvins, Neurosis, Sourvein, Sleep, Unsane, etc.). Ce qui donne une idée du personnage et de la qualité de son travail. Et le gaillard sait s’entourer. Encore une fois, il recourt aux services du talentueux Dale Crover, batteur des Melvins. Mais également à ceux de Tim Moss, chanteur et guitariste, timbré notoire, ayant officié au sein de Ritual Device dont la voix évoque quelquefois celle de Judah des Thrown Ups, autre groupe de barges magnifiques.

Donc, nous voici en présence du tout meilleur album de Porn. Ou chaque musicien apparaît profondément inspiré. Tirant le meilleur parti de son instrument. Pour en extraire des sonorités d’une étrangeté peu commune. Le tout magnifié par un son d’une densité phénoménale. Un peu comme si Killdozer s’était mis à pratiquer un doom énigmatique en son temps.

Bref, pas la peine d’en rajouter, ce disque est un must. Il ouvre sur de mystérieux horizons dont les contours sont encore difficiles à cerner. Ce qui le rend aussi jubilatoire. Un avis que partage probablement le grand Frank Kozik qui, une fois encore, a fort joliment habillé ce disque.

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Avis de Thomas :

Les (Men of) Porn (qu’on pourrait appeler (Man of), finalement) ont plus d’un point avec les Melvins, quand on y regarde bien :

– Porn, c’est le projet d’un seul homme, le géant Tim Moss (aux troublantes ressemblances physiques avec un autre monument de la nature, Scott Reeder) comme on peut considérer les Melvins comme le groupe de Buzzo sans trop frustrer les fans (non? pas taper! pas taper!), faisant appel à des musiciens interchangeables de sessions ou pour le live.
– Porn est également un laboratoire d’expérimentations sonores. Moss se permet tout. Mais au lieu de faire dans le délire sauvage et incompréhensible comme la bande à Tahiti Bob, il recherche l’abrutissement auditif via des fréquences et une saturation abusive.
– Porn possède un son aussi salement plombé que le duo de Seattle à l’époque (bénie) de Ozma/Bullhead/Lysol.
– Enfin, Porn et les Melvins, tout du moins sur ce disque, se partagent le même batteur, l’infatigable Dale Crover.

Sur ce disque, troisième du nom, on retrouve Moss, Crover derrière les fûts et Billy Anderson à la fois à la basse, aux beuglements occasionnels (souvent donc) et à la production. Et ça s’entend ! Quel son, quelle densité palpable ! Etouffant, suffoquant, redéfinissant le qualificatif « lourd ». Je crois qu’à ce stade, seul un disque de Warhorse peut rivaliser. Chaque coup de boutoir de Crover malmène votre rythme cardiaque ; mais quelle frappe de mule ! A la fois puissante et véloce, je n’en revient toujours pas.

En bref, cette espèce de dream team burnée démontre qu’il faut parfois être des mecs salement expérimentés pour donner naissance à un vrai disque aussi vicieux. Le tempo est lent, les riffs stoner à la limite de la tétraplégie et pourtant, qu’est ce que ça groove. Vous vous imaginez sûrement un disque dissonant, quasi sludge. Que nenni, pas la moindre trace d’un larsen ou d’un grésillement impromptu, ces mecs maîtrisent leurs instruments et frappent là où ça fait mal. Les voix sont éraillées mais pas gueulardes, les mélodies bien là mais nous sommes bien trop occupées à survivre à la première écoute pour y faire attention.

Ce disque est une épreuve mais aussi une magnifique démonstration de rock poisseux et maladif. Une ode à lourdeur et à son ambassadrice, la saturation.

Grand Magus – Wolf’s Return

Grand Magus - Wolfs Return

Combien de fois n’a t’on pas été séduit par un premier album spontané et original, convaincu qu’on tient là un futur grand groupe ? Lorsqu’un deuxième album vient confirmer toutes les promesses, renforçant les bases et affinant le style, il reste à passer le cap du troisième album. Le fameux cap du troisième album. Le quitte ou double qui permet à certains de décrocher le jack-pot et à d’autres de se perdre dans la multitude de groupes qui avaient tout pour réussir.

Grand Magus fait partie de la première catégorie.

Avec leur premier album éponyme, les Suédois de Grand Magus redéfinissait la notion de puissance au sein d’un power trio. Influencés par le Blues et les groupes de Hard-Rock du début des 70’s, Black Sabbath en tête, ils délivraient un Doom au feeling positif qu’ils désignaient comme étant du Black Magic Rock. La voix puissante mais toujours mélodique de JB en séduisit plus d’un, notamment les membres de Spiritual Beggars à la recherche d’un remplaçant pour Spice.
« Monument » continuait dans cette veine 70’s en durcissant le ton et en lorgnant de temps à autre vers les groupes heavy du début de 80’s.« Wolf’s Return » s’ouvre sur « Kingslayer » et l’on est d’emblée surpris par la rythmique, beaucoup plus rapide que tout ce que Grand Magus a proposé jusqu’à présent. Bien que certains morceaux nous rappellent aux bons souvenirs des albums précédents (« Wolf’s Return », « Ashes »), il semble que cette fois-ci, nos vikings se soient attachés à revisiter les groupes de métal des 80’s. C’est tantôt une ligne de basse à la Steve Harris, tantôt un chorus digne de la paire Downing/Tipton, autant de références discrètes qui au final donnent un ton beaucoup plus heavy à l’ensemble. Cela est très marquant sur des morceaux comme « Blood Oath » ou « Repay in Kind » et leur rythmique estampillée NWOBHM. Le recours aux bons vieux solos de guitares (outre ses qualités vocales, JB est aussi un foutu bon guitariste) renforce cette impression. Les quatre petits instrumentaux plus doom offrent autant de pauses qui permettent au groupe de ralentir le tempo et même d’introduire une guitare acoustique sur « Jarnbord ». Cet album ratisse très large au niveau des influences tout en restant homogène et original. Ancré dans le passé sans jamais être passéiste, il devrait plaire à tous les fans de doom et heavy traditionnel, ce qui, on l’espère, élargira considérablement leur auditoire.

Ufomammut – Snailking

Ufomammut - Snailking

Dire que j’attendais ce disque est un euphémisme. Je l’ai espéré chaque jour depuis avril 2000, période à laquelle ces italiens nous ont livré leur premier monument « Godlike snake ». Ce disque m’a sévèrement ravagé le bulbe rachidien pendant quelques semaines avant que ma moelle épinière ne consente à redonner l’accès à de nouvelles vibrations. Le temps aidant, je m’étais donc progressivement éloigné de ce maléfice. Et voilà qu’il resurgit. Et il sait s’y prendre. Son emprise s’effectue doucement. Cosmiquement pourrait-on dire. L’hypnose vous a définitivement gagné lorsque se produit la première détonation. Nous y sommes à nouveau. Le son est caractéristique. Gras à souhait. Ecrasant. Les sonorités du Korg MS 20 confèrent toujours à l’ensemble ce relief si particulier. Si étrangement captivantes. Replonger dans l’univers ufomammutesque est tout bonnement jubilatoire. Mais n’allez pas croire que ce disque ressemble au précédent. Oh que non ! En posant ces ambiances, le groupe affiche son retour flamboyant. Manœuvre pour que l’auditeur gagne les plages suivantes en confiance. Les synapses réconfortées. Dès le second titre, Hopscotch, le grésillement de l’énorme son de basse annonce une nouvelle malédiction. La voix d’Urlo, subtilement distordue est hurlée à pleins poumons. Ses imprécations ont une tonalité quasi sludge, avant de devenir mélodiques à d’autres endroits. Voilà la première Vérité. Et que l’on nous en assène une autre encore. Le jeu de batterie de Vita s’est nettement étoffé. Exit la mécanique minimaliste. Voilà la seconde Vérité. Ce disque est bien plus crépusculaire que le précédent. Plus tourmenté. Plus noir. S’il est également moins avant-gardiste, il n’en est pas moins aventureux. Façonnant avec une belle constance un groove reptilien massif mais toujours aéré, Ufomammut affirme une fois encore son statut de Commandeur d’un genre musical flirtant dans certaines proportions avec Electric Wizard, Los Natas et Paul Chain, mais sans jamais renoncer à construire sa propre perspective. Ufomammut est grand. Voilà la troisième Vérité.

Brought Low (The) – The Brought Low

Brought Low (The) - The Brought Low

Dommage qu’il n’y ait pas un créneau ‘clair’ pour ce type de groupe, un marché bien ciblé pour les combos qui, comme The Brought Low, recyclent les genres, s’inspirent ouvertement du passé pour proposer en retour un rock jouissif, libéré de toute contrainte commerciale. Trop souvent on considère que ces groupes n’ont pas su évoluer, mais quelle erreur ! The Brought Low propose un condensé du meilleur de Lynyrd Skynyrd, de ZZ Top, du MC5, des Stones et de Who même parfois, de Led Zep, de Deep Purple. Mais pas séparément : tout à la fois ! La synthèse érigée en art. On retrouve ainsi un son de guitare chaleureux (que dis-je : ‘bouillant’ !), des arrangements succulents (harmonica, chœurs), un chant impeccable, le tout servant des compos légères mais en aucun cas surannées. Une seule volonté pour ce trio new yorkais : se faire plaisir et contenter des milliers de fans de la musique des 70’s en leur montrant qu’il est tout à fait possible de proposer un disque qui ne sonne pas forcément ‘vieux’, mais qui peut plaire à tout type de public, et ce sans compromission. Une vraie gageure. Ce disque est donc, par définition, intemporel. Et jouissif. Encouragez-les, ils le méritent ; et si en plus vous pouvez vous faire plaisir.

Black Pyramid – 7 "

BLACK_PYRAMID

Un jeune label belge avec un belle paire de burnes et seulement 2 groupes produits nous balance ce skeud 7′ de 2 plages ô combien impressionnantes par Black Pyramid. Le groupe ne vous dit peut-être rien mais on y retrouve un gaillard du band récemment splitté, Artimus Pyledriver.

Je ne vais pas y aller par 4 chemins puisqu’on est ici dans un stoner pur jus sans chemins de travers et sans écarts (ou plutôt fautes) de goût. 2 mid-tempos ravageurs s’enchaînent sans lassitude tout au long des ces 2 bombes venues du Massuchetts (USA).

Alors je vous citerai bien volontiers Black Sab (période Master of Reality et Volume 4), Sleep et Earthride, sans oublier la touche rageuse de High On Fire. C’est précis, carré germanique, puissant et enivrant. Impossible de ne pas foutre le volume à stock dans cet envoi de bois de toute grande classe!

Un goût de reviens-y assurément et l’on ne peut que saliver à l’idée de la l’album full length que ces mecs doivent encore nous sortir.

Sparzanza – Angels Of Vengeance

Sparzanza - Angels Of Vengeance

Yeah ! Après avoir fait leur connaissance grâce au split MCD qu’ils partageaient avec Superdice (Water Dragon), dans lequel ils s’étaient très brillamment illustrés avec le titre « Angel of vengeance » qui a donné le titre pluralisé de cet album, Sparzanza nous revient pour un nouveau festival de riffs longue distance. Si l’on admet qu’il existe de la muzak pour les ascenseurs et de la musique lounge pour les bars branchés, il va falloir se rendre à l’idée que la musique de Sparzanza est calibrée pour les cabines de camions. Les routiers deviennent subitement à nouveau sympathiques. D’une certaine manière et bien qu’il soit plus varié dans sa démarche (orgue, tambourin, percussions), il émane de Sparzanza un esprit assez proche de celui d’Alabama Thunder Pussy. Tout en puissance. Ce qui ne les empêche pas de balancer deux balades dont « Logan’s run » très proche de Monster Magnet, et la très radio friendly « Coming home in a body bag » qui s’apparente à certains titres de Metallica dont l’usage est exclusivement réservé à emballer les filles. Et des filles à emballer, il y en a un paquet sur le clip qui accompagne ce CD. Je confirme que la suédoise n’a rien perdu de son attractivité. En définitive, ce skeud est un putain de disque de hard rock. Qui donne envie de s’acheter un camion dédié au ramassage d’auto-stoppeuses avenantes et moites.

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