Thulsa Doom – A Keen Eye For The Obvious

Quel plaisir de retrouver le combo norvégien revenir avec un nouvel album, même si c’est par la petite porte (promo inexistante, communication du groupe à 80% en norvégien, résonance pathétique…). Les premières galettes de Thulsa Doom ont soigneusement labouré nos orifices auriculaires au début des années 2000 avec leur EP (très subtilement intitulé She fucks me, doté d’un artwork rutilant) et surtout le terrible et fondateur The Seats are Soft But the Helmet Is Way Too Tight. Le groupe au patronyme le plus troisième degré de l’humanité surfait alors sur une vague de gros stoner fuzzé et apportait un regard frais et décomplexé sur ses compos. Ils étaient bien aidé en cela par un vocaliste remarquable, Papa Doom [on vous détaille pas le line-up complet, mais oui, c’est des pseudos…], qui permettait à Thulsa Doom de se distinguer d’une masse de groupes pour lesquels un chanteur était plus un mal nécessaire qu’une caractéristique clé (c’est toujours le cas, hein). A noter d’ailleurs que dès lors que Papa Doom a quitté le groupe en 2003, confiant amicalement le micro à son guitariste Doom Perignon [No comment…], la carrière du gang, qui n’avait pourtant jamais dépassé le seuil d’un groupe d’initiés mélomanes avertis, a largement décliné – à tel point que votre serviteur pensait le groupe mort et enterré depuis belle lurette…

Et bien non, ils reviennent ! L’excitation le dispute à la crainte d’être déçu, mais on ne tarde quand même pas à se plonger dans cette galette. Il ne faut pas plus des quelques premiers morceaux pour déjà faire le constat que les dernières inclinaisons du combo sont confirmées : le Thulsa Doom que l’on a connu et adoré n’est plus vraiment le même : il a grandi, sa rage d’adolescent boutonneux s’est transformée en posture de jeune adulte mûr et sûr de lui, produisant quelque chose de plus carré, soigné et même fignolé. Les potards ont été baissés un peu partout, on a relégué la pédale de fuzz à un rôle de figurant… On l’avait senti venir avec Keyboard, Oh Lord! Why Don’t We?, alors soyons honnête : on ne peut pas vraiment dire qu’on est surpris, mais un peu déçu quand même. Nos scandinaves évoluent désormais dans un hard rock bariolé, multi-facettes, qui peut piocher dans toutes les variantes (du rock plutôt pop au hard le plus extrême) mais aussi, quand même, dans du bon vieux stoner ici ou là (« Baby, Hate It », « Wrap the Bad Up »). On peut passer d’une minute à l’autre d’un passage complètement plagié sur du Thin Lizzy (« Lady Nina », franchement, pourrait être un bonus track sur Jailbreak), vers des plans hard 80’s, voire metal (« Shadows on the X-Rays »), puis punk rock garage (tendance « scandinavian » comme sur « Eloquent Profanity ») ou encore pop rock groovy limite soul (« Quest for Fire » et un peu « Magazine »), et même des inspirations quasi-post rock (la montée sur la fin de « Wrap the Bad Up »)… et j’en passe ! Ça part littéralement dans tous les sens, mais avec toujours une complète maîtrise de la situation, et sans jamais dénaturer leur identité propre (bien aidés en cela par la prestation fil rouge de Papa Doom).

Là où l’on est content de retrouver nos lascars en revanche, c’est dans le travail de composition, où leur inspiration WTF se mêle à une intelligence d’écriture remarquable : les titres s’avèrent au final des petits bijoux d’inventivité et d’efficacité. Et puis y’a Papa Doom… Revenu au bercail, il surnage et définit une large part de l’identité sonore du groupe, avec son chant mi-gueulard mi-crooner tellement emblématique (quelle présence sur « In Italics and Bold » ou « Baby, Hate It »…). Mais sa voix écrasante n’affadit pas le groupe pour autant : derrière, la famille Doom n’est pas un vulgaire backing band. Le jeu est solide carré, et effectivement produit à la perfection, pour le genre visé. Mais on revient à la finalité, et on reste coi devant une telle démonstration d’écriture.

Au final c’est donc cela qu’on retiendra : A Keen Eye for the Obvious est un disque remarquable, qu’on peut écouter des heures durant sans jamais se lasser, un travail de composition de haut vol, porté par une interprétation survitaminée. Un vrai bon disque, comme on en fait peu. En revanche, il semble marquer une bonne fois pour toutes la sortie du groupe de nos sphères musicales de prédilection. Les plus nostalgiques le déploreront. Les plus ouverts en termes d’horizons musicaux sauront sans nul doute les apprécier à leur juste valeur.

Sabel – Re-Generation

 

Re-Generation est le troisième album de Sabel, groupe nous venant de Suède et qui officie dans un style entre le retro-hard 70’s et le stoner metal. Et là, vous me direz, qu’est ce qui peut les différencier de la ribambelle de groupes ayant choisi ce style ? Ma foi pas grand-chose mais à l’image de bon nombre de ces groupes, Sabel fait son petit bonhomme de chemin et commence à trouver sa propre identité musicale. En effet, ce troisième opus convient déjà plus à l’étiquette stoner metal tendance doom qu’à celle tant à la mode du revival 70’s. Et même si cet album n’est pas sans défaut, il se peut que quelques-uns d’entre vous lui trouvent pas mal de qualités comme c’est mon cas.
Au fil des albums et EP, le groupe a allongé ces morceaux, alourdi son son et si une comparaison un peu osée devait être faite je dirais que l’on y entend parfois un petit arrière-gout d’orange… d’Orange Goblin.
Alors il manque encore peut être quelques solos bien sentis par-ci par-là et l’album souffre de quelques longueurs (riff répété à l’excès en fin de titre) mais Re-Generation est un album très agréable à écouter et qui devrait certainement attirer l’attention de certains.
Choix délibéré ou manque de moyen pour faire mieux, le son est brut, très oldschool. Et même si de nos jours on trouve globalement des productions de très bonnes factures y compris pour des autoprods, je dois dire que je classe ce son un peu crade dans la colonne des qualités. J’y reviens mais ça me rappelle un peu le son de The Big Black (lecteur, si tu ne connais pas The Big Black d’Orange Goblin, va de suite découvrir ça !).
Bref, si je résume, Sabel passe indéniablement avec ce troisième album un cap qualitatif et les quelques défauts ne sont absolument pas rédhibitoires, au contraire.
Si le groupe poursuit sa progression d’album en album comme c’est le cas, il se pourrait que le prochain soit un excellent cru. En attendant, nous voilà avec du bon tirant sur le très bon par moment. Un album solide, à découvrir.

Wedge – Killing Tongue

Quand certains prétendent que le rock ’n’ roll est mort, pleurant leurs idoles perdues en saignant toujours plus leurs vinyles poussiéreux, d’autres s’efforcent de prolonger cette glorieuse époque. Le trio berlinois de Wedge, nommé d’après le premier outil de pierre de l’histoire, appartient à cette famille de groupes. Ceux qui refusent l’extinction d’un genre, qui lui témoignent toute leur affection et s’investissent à 2000 % afin d’en ressusciter les sensations.

Quatre ans après son premier album éponyme, Wedge formé en 2014 revient le 9 février 2018 avec une nouvelle production signée chez Heavy Psych Sounds. Un concentré chaleureux de rock classique, de garage des années 60 et de tout ce que les 70’ ont offert de mieux ; e que s’apelorio Killing Tongue.

Dès les premières secondes de « Nuthin » » on entend la cassette se rembobiner vers la génération sacro-sainte. Puis les cordes de guitare de sieur Kiryk Drewinski commencent à s’agiter et nous entraînent dans une rythmique pleine d’énergie. En moins de trente secondes on sait à quoi on a affaire. Une furieuse ligne de basse se cale sur une batterie au galop, et ensemble invoquent un solo d’orgue puis de guitare. Impossible ici d’ignorer la ressemblance à Deep Purple. Même dans la structure on est à la maison : intro-couplet-refrain-couplet-refrain-pont-solo-refrain. Une pièce usinée de 2 min 30 s qui vous met direct dans le bain.

Les membres se présentent au nombre de trois, mais pourraient tout aussi bien être six. Si Kiryk se partage la gratte et le chant, il touche aussi un peu aux percussions et à l’harmonica, comme il le montre dans « Push Air ». On l’entend même agiter de vraies chaines durant l’intro psyché de « Tired Eyes ». Le batteur Holger Grosser dit « The Holg » se balade à loisir sur des congas ou des cloches, jouant avec cabasa et autres tambourins avec une aisance déconcertante. Quant à David Götz, lorsqu’il n’envoie pas ses lignes de basse entêtantes en plein visage il vient sublimer la musique à l’aide de son orgue ou de ses autres claviers.

Sans surprise, les influences se révèlent nombreuses chez Wedge. On songe bien sûr à Led Zep et aux Who, mais on pensera aussi Santana à l’écoute de « Quarter to Dawn ». Par ailleurs et avec plus de subtilité, certains refrains ne seront pas sans rappeler les mélodies de Jack White.

Il s’agit ici d’un album aux origines incontestables, joyeux et dynamique, qui ne cesse de stimuler les sens sans rien apporter de nouveau au genre. Wedge ne s’efforce guère de sortir des sentiers battus, mais propose au contraire un superbe hommage à une époque qui se veut immortelle. Des constructions éternellement efficaces magnifiant cette simplicité adulée et qui sauront assurément faire transpirer les foules en live.

Walnut Grove DC – Roskov

Dès les premières notes de Roskov, nouvel album du quatuor rochelais, une idée nous vient en tête : prendre la bagnole et avaler les bornes à fond la caisse. Le son est puissant, entraînant et la voix ne laisse place à aucune hésitation avec un quelque chose de feu Lemmy Kilmister, loin d’être désagréable. Les frenchies dépotent avec un stoner rock qui envoie du lourd, dans tous les sens du terme.

Les premières secondes de « Take it back », titre introductif, laissent présager un gros metal alternatif jusqu’à ce que la guitare envoie ce petit riff entêtant et très stonérien qui perdure au gré des 9 titres de Roskov.

Walnut Groove DC ne laisse que peu de répit à son auditeur, enchainant 9 chansons comme on distille les droites lors d’un combat de freefight : court mais intense. Les Français privilégient l’efficacité avec des chansons plutôt courtes pour le genre mais qu’à cela ne tienne, on préfère toujours prendre son pied pendant 3 minutes plutôt que s’emmerder pendant 8.  On regrette juste une certaine redondance sur quelques morceaux avec des riffs parfois trop similaires.

Niveau instrumental, chacun envoie le pâté à sa manière, toujours efficace. La batterie reste à fond de balle tout au long de l’album pour tenir la rythmique soutenue et apporter cette lourdeur indomptable, accompagnée par une basse omniprésente qui apporte un vrai plus à cet album (c’est un bassiste sûrement trop subjectif qui vous parle de ça mais quand même…). Les guitares s’entrelacent à merveille pour faire ressortir les solos tantôt envoutants, voire psyché, tantôt purement mélodiques comme sur « Roskov », où le groupe s’aventure dans les sulfureuses contrées du stoner doom.

On calme un peu le jeu avec « Walk Alone » qui baisse en intensité, ce qui nous permet de pouvoir aller pisser sur une aire de repos. On ne tarde pas à remettre les gaz avec  « Bullet Time », la dernière de la galette, qui porte bien son nom. On file vers l’horizon toutes fenêtres ouvertes avant de se prendre un barrage de flics qui arrose le convoi Walnut Groove DC, histoire de terminer en beauté. Mais dans ces conditions, ça vaut le coup d’y laisser sa peau, une fois la chanson arrivée à terme évidemment.

Les Rochelais sont actuellement en tournée dans toute la France et s’ils passent dans votre bled, n’hésitez pas une seconde.

 

Fistula Split-EP : Come To Grief / Fistula + -16- / Fistula

Après deux disques de Fistula en 2016, Patac est toujours d’attaque lorsqu’il s’agit de mettre la main à la crasse, et presse pour 2017 deux splits albums entre Fistula et un autre poids lourd du sludge insalubre : -16- et Come To Grief.

Les premiers (dont le nom est, pour rappel, une référence à leurs « Under aged girlfriends ») sortant d’un excellent Lifepan of a Moth chez Relapse Records tandis que les seconds, émanation de Grief reformée par le guitariste Terry Savastano, viennent de publier le recommandable The Worst Of Times.

Est-il besoin ici de rappeler le principe du split ? Tradition punk, comme le DIY, une influence majeure pour le sludge dans sa construction, il s’agit de partager un support avec un autre groupe, afin d’étendre sa fan base. De nombreuses petites traditions émanent de cet exercice de style : le support déjà. Imaginé sur tape, il s’est beaucoup démocratisé avec le 7’, d’autant plus aujourd’hui, faisant du 45 tour à pressage limité l’outil idéal pour ce petit plaisir de musicien. Il est aussi de coutume d’en profiter pour enregistrer une reprise d’une des influence de votre groupe (il y a même une tradition consistant à enregistrer une reprise de la formation avec laquelle on partage ledit split). Le passage par la reprise, c’est le choix sur lequel se sont porté Fistula et -16- rendant hommage à deux de leurs influences, pas des plus évidentes, -16- tronçonnant le « Complication » de Killing Joke tandis que Fistula engraisse le « Mongoloid » de Devo à grands coups de stéroïdes frelatés (ce titre avait déjà été repris par Dozer sur une compilation « Suckin’ The 70’s » de Small Stones, tandis que Mos Generator eux s’étaient concentrés sur « The Girl You Want » des même Devo, une reprise indispensable, montrant toute l’influence de cet ovni venu d’Akron).

Pour ce qui est du split avec Come To Grief, Fistula livre là un titre original, doom à souhait : « Contusion », idéal pour se marier au riffing lent du front de (Come to) Grief qui avec « Take Me In My Sleep » d’ailleurs ne déroge pas à la tradition et emporte l’auditoire dans les tourments d’un vilain cauchemar éveillé.

Réservés la plupart du temps aux plus acharnés, les splits sont aussi (et surtout) d’idéales façons de pénétrer l’univers des groupes et lorsque l’on parle de Fistula, Come To Grief et -16-, il serait idiot de ne pas au plus vite vous y pencher.

 

Point vinyle :

Le split avec Come To Grief est disponible en K7 et en 3 versions 7’ (250 black / 150 red / 100 clear) tandis que celui avec -16- n’est dispo qu’en 7’ (250 black / 150 aqua color / 100 clear).

 

 

Loviatar – Loviatar

L’année dernière sortait discrètement un disque qui méritait pourtant toute notre attention. Actifs depuis 2010, les 4 canadiens de Loviatar sortaient leur premier album éponyme après 4 EPs.
Très orienté mythologie et légendes anciennes depuis leurs débuts, leur premier album ne déroge pas à la règle et s’inspire entièrement de la mythologie égyptienne, un domaine finalement peu exploité, surtout face à ses concurrents scandinaves ou celtes.

Divisé en seulement 4 morceaux et ne dépassant les 40 minutes d’écoute, Loviatar pourrait être considéré comme un long EP, ou un court album, c’est selon. Quoiqu’il en soit, il est à envisager d’un seul bloc : les trois premiers morceaux, respectivement “Nascent”, “Discordant” et “Ascendant”, tout les trois sous titrés “Stygian Wyrm”, et le dernier morceau, le plus long, Blind Goddess of The Nine Plagues constituent un ensemble parfaitement homogène et fluide. Les transitions entre les morceaux sont quasi-inaudibles, si bien que l’album n’aurait pu être constitué que d’une seule chanson. Dès le départ, Loviatar nous invite à une épopée au temps des Pyramides qui ne se termine qu’à la dernière note de l’album.

Loviatar est un melting-pot d’influences et nous rappelle à cet égard Mastodon, pour sa capacité à mélanger tout et n’importe quoi et à aboutir miraculeusement à quelque chose de très cohérent et immersif. “Nascent” nous ouvre sur la voix lyrique et puissante du guitariste chanteur JD, très heavy, posé sur un entremêlement mélodique de guitares et de percussions, qui laissera place sur le morceau suivant à un déferlement de doubles croches que n’aurait pas renié High On Fire. Sur la suite, Loviatar continue de synthétiser le doom avec des riffs d’une lourdeur imparable, le post-metal avec des passages plus ambiants et occasionnant toute sorte d’expérimentation sonore, et termine comme il se doit son album avec un morceau de 19 minutes, afin de, quand même, respecter un minimum les traditions du doom, ce qu’il s’est bien gardé de faire jusqu’ici.

Sorti à la même période, Loviatar me rappelle le Asheran de DVNE dans son assemblage un peu foutraque et coloré et dans sa volonté de lever le majeur aux codes du genre. Sur le papyrus, un groupe de Stoner/Doom/post metal puisant son inspiration dans l’Egypte Antique peut s’avérer fantasque, mais l’écoute vous dissuadera définitivement de cette idée et vous verrez qu’il n’y a rien de risible dans ce voyage au bord du Nil.

Insect Ark – Marrow Hymns

 

Nous entrerons dans une ère bien sombre ce 23 Février car Insect Ark sortira sa sixième création, Marrow Hymns chez Profound Lore Records. Atmosphère de fin du monde garantie et tout ceci sous la férule de deux multi-instrumentistes, Dana Schechter (basse, lap steel, Synthétiseurs) et Ashley Spungin (batterie, percussions, Synthétiseurs)

Marrow Hymns est un album froid et vertigineux, les deux interprètes nous emmènent dans un univers lunaire ou l’esprit s’égare au son du Lap Steel. En effet, ici pas de guitare, mais son substitut Hawaïen, il a la particularité de nous faire perdre nos repères et de conférer aux titres une atmosphère proche de la folie. À vrai dire il est difficile de dire s’il est vraiment question de folie, mais l’album a été écrit en pleine crise existentielle des deux interprètes. Elles nous livrent une musique à fleur de peau et qui ne tombe jamais dans l’atermoiement tant elle est emplie de force. L’artwork de la pochette laisserait supposer dès lors un phénix se consumant pour mieux renaitre de ses cendres.

Le Noise/Doom psychédélique d’Insect Ark pourrait faire office de bande son pour quelque film d’horreur ou comme support d’une œuvre visuelle projetée live. L’état d’esprit est assez proche d’un NNRA pour l’atmosphère et du coté des claviers on se perd aussi facilement que dans un « Live at Pompéi » des Pink Floyd.  Écouter cet album aura été véritablement comme se trouver confronté au monolithe de « 2001 l’odyssée de l’espace » tout en se repliant sur soi. Marrow Hymns est une pièce qui s’écoute seul avec soi et sur laquelle on reviendra régulièrement comme une thérapie.

Mudweiser – So Said The Snake

Les Sudistes sont de retour et quel retour ! Cinq années après Angel Lust, le quatuor de Montpellier nous envoie un album carrément énorme qui souffre toutefois d’un défaut conséquent : il ne comporte « que » 8 titres (et quels titres mes cadets !) et j’aurais bien aimé m’en taper quelques-uns de plus tirés de la même vieille barrique de whisky clandestin.

Pour ce troisième album – toujours sur la structure Head Records – le groupe a carrément pris son temps afin de peaufiner la chose dans le moindre détail et je les remercie des efforts déployés pour me faire remuer les cervicales et/ou battre le sol du pied à chaque mesure. Transpirant le bayou des environs de Nola, So Said The Snake, se consomme d’une seule rasade sans appuyer sur skip, sans enclencher le mode aléatoire et sans y insérer des plages issues d’autres productions aussi bonnes fussent-elles ! C’est un LP élaboré dans les règles de l’art avec la patine des temps jadis ; le temps où l’œuvre des artistes était abordée dans l’ordre comme un tout et pas réduite à un étal à dispo pour y piocher quelques éléments !

Avec ses riffs appuyés, sa rythmique plombée et ses vocaux burinés à l’alcool de contrebande, cette plaque capte l’auditeur de bout en bout en maintenant parfaitement la tension entre le sludge dégueulasse et le heavy blues distordu.

« Useless Prick » et surtout « The Story Of Joe Buck » incarnent merveilleusement le côté plus apaisé de cette costaude pièce en laissant la part belle à des parties chantées, à la limite des plans de crooner déglingué, appuyées par des plans de guitares se déployant dans la retenue avant d’aller dégouliner par tous les pores des enceintes pour envahir le premier plan. Il est tout aussi appréciable de se cogner ces plages à un volume malsain, que compliqué de s’extraire ensuite de la tête les riffs qui tournent tout au long de celles-ci !

Côté plus bourrin, les Lourds vont foncer sur « Fairy Tales », « 777 » ou l’imparable « 7am Zombie » qui est une réussite du genre avec son intro parlée de Charles le gourou sanguinaire californien. Empreinte d’urgence, cette composition blaste sa maman avec un tempo véloce, des refrains collés et un énorme solo de gratte comme on les mitonnait dans les eighties.

Ce disque ne serait toutefois pas ce qu’il est sans son titre le plus long et franchement le plus bandant : « The Snake ». Illustration parfaite de la tension de cet album, cette plage de clôture rivalise avec ce qui se fait de plus mieux à l’international : tournoiement d’accords plaqués hargneusement contre le manche, rythmique grasse voire collante et chants éraillés semblant inviter l’auditeur à s’auto-distribuer des baffes sans s’arrêter pendant des heures ; une réussite comme on dit au pays des charbons ardents !

Ces quatre garçons dans les brumes du bayou des rives de la Méditerranée déploient avec talent l’héritage d’une certaine Amérique glauque et trash en s’inspirant des films de série B, voire Z, ainsi qu’en prenant pour référence un sud des États-Unis aussi rude que rêche. Mudweiser confirme tout le bien que je pense d’eux avec So Said The Snake et ne peut que me faire nourrir des regrets quant à leur absence remarquée en dehors de l’Hexagone.

Naxatras – III

Il est de ces groupes qui n’attirent pas sur eux les feux de la rampe immédiatement et c’est semble-t-il le cas du trio grec Naxatras qui en est déjà à sa troisième galette avec une promo minimum, auto-prod oblige. Leur parcours est pourtant d’une constance magnifique et ils livrent depuis leurs débuts un rock psychédélique cousu main avec un son qui mérite qu’on s’y arrête, c’est d’ailleurs ce que j’ai fait avec cet album “III” à sortir le 16 février.

“III” se différencie de ses prédécesseurs, bien que majoritairement instrumental il laisse plus de place au chant et délivre une atmosphère planante en couleur, sans avoir recours aux paradis artificiels. Ce que Naxatras a perdu en énergie brute il le gagne en éther.  On ne s’ennuie pas au fil des pistes qui s’enchainent avec beaucoup de cohésion et des passages plus rugueux pour bien nous tenir en haleine comme c’est le cas sur « On The Silver Line ».

Une fois de plus la qualité d’enregistrement entièrement analogique est une des clés de leur réussite, le rendu est superbe avec une batterie juste effleurée mais percutante, une basse qui roule comme une perle, le tout saupoudré de guitare. Du point de vue stylistique on rencontre des influences jazz autant que des boucles à la limite du funky et cela reste un pur voyage psychédélique.

Le trio nous emporte dans un univers organique baigné par la lumière d’un astre solaire réconfortant ou leur musique est là pour nous faire du bien. On remarquera inévitablement un clin d’œil très appuyé à Black Sabbath sur la dernière piste « Prophet » qui détonne avec le reste de l’album.

III est l’album qui me semble le plus personnel de Naxatras, une galette à posséder pour les amateurs de Color Haze, Samsara Blues Experiment ou encore Mother Engine.

 

En attendant la sortie de III  vous pouvez toujours vous faire un avis sur la question en allant jeter une oreille de ce côté : https://www.youtube.com/watch?v=Fx2I_FLH_kk

Sinistro – Sangue Cassia

En 2017, Moonspell a fait couler de l’encre (noire) en sortant 1755, son premier album entièrement chanté en portugais. De nombreux journalistes ont alors vanté la prise de risque et la fraicheur de la démarche, tout en louant les accointances sonores du portugais avec la musique dépressive et métalique. Sinistro pourtant le fait avec talent depuis 2012 et a, en publiant Semante en 2016 chez Season Of Mist, pu diffuser son propos à grande échelle, au Roadburn principalement, puis lors d’une tournée en ouverture de Paradise Lost (dont ils reprennent par ailleurs « Nothing Sacred » en bonus sur ce disque). Débuté en tant que groupe de doom bruyant et instrumental, Sinistro a trouvé son rythme en s’adjoignant les services de Patricia Andrade lors d’une collaboration commune. Cette dernière apporte alors murmures et enchantements à un groupe qui s’adapte et mélodise son propos. La musique de Sinistro s’enrichit alors de samples et autres nappes de claviers discrets, se fait atmosphérique, entre accalmies sensuelles et explosions de distorsions maitrisées.

Sur Sangue Cassia, les lusitaniens reprennent la formule de leur album précédent, oscillant entre un rock atmosphérique à la durée radiophonique et aux refrains susurrés (« Petalas ») et un doom éthéré, symbolisé par la jolie réussite que représente « Lotus ». Le reste de l’album est de cette veine, convoque quelques astuces de production rendant le propos moderne, maîtrisé. « Lotus » donc, ainsi que son morceau d’ouverture « Cosmos Controle » et de clôture « Cravo Carne » sont trois délicieuses raisons de se pencher sur ce disque. Mais hélas, trois fois hélas, Sinistro cède facilement aux sirènes de la mélodie molle et calibrée, rendant son écoute d’une traite assez ennuyeuse lorsque l’on est un tant soit peu habitué à prendre plaisir dans le bruit et la fureur des guitares qui s’entrechoquent. « Vento Sul », « Gardiena » ou « Nuvem » sont de parfaits exemples de ce que « Petalas » promeut et qui ne m’intéresse pas. Pour le reste (on est pas loin de parler d’une petite moitié de disque intéressante au final), l’équilibre fragile entre sensibilité et puissance mérite l’oreille, malheureusement distraite par les complaintes habilement épurées de violence qui permettront sans nul doute au groupe de fédérer de nombreux auditeurs, mais qui me donnent à moi envie de passer au plus vite à autre chose. A vous de voir alors si vous voyez le verre à moitié vide ou à moitié plein.

 

Point Vinyle :

Classique Season Of Mist, quelques éditions couleurs (100 clear, 100 green dark opaque et 250 en Red Transparent) pour les plus forcenés et une version black facilement disponible. La meilleure configuration possible ? Probable.

Somali Yacht Club – The Sea

Après le fameux The Sun sorti en 2014, le trio Ukrainien est revenu fin janvier avec le très attendu The Sea. Soit presque quatre ans depuis le précédent opus, les mecs de Lviv nous emportent à nouveau dans leur univers stoner psyché aux accents post-métal et shoegazing.

Ici la chaleur du soleil se substitue à la pesanteur de l’océan. The Sea se révèle plus mélancolique, plus coulant, avec des titres comme « Vero » ou « religion of Man » s’étirant parfois sur douze minutes. On y retrouve cette douceur apaisante apportée par des phrasés de guitare tous plus mélodiques les uns que les autres, mais aussi par les lignes flottantes d’Artur et par la rythmique hypnotique de Lezyk. Des séquences souvent balayées par une vague de lourds riffs musclés et d’un chant inaccessible, avant de finalement retomber. Lentement.

Les morceaux s’enchaînent si bien que même après une dizaine d’écoutes on peine encore à les différencier. Ils se complètent, se mêlent comme les courants d’une mer tantôt agitée tantôt somnolente, mais toujours en mouvement. « Hydrophobia » en atteste parfaitement ; une composition tout en échos et effets sonores qui inspire une navigation en eaux troubles. Puis la lumière du soleil finit par percer les abysses et la musique explose, littéralement. Même la rythmique binaire se mue en ternaire à l’occasion d’un pont final venant bousculer toute cette harmonie. La voix de Mez nous arrache alors à notre confort, nous projette dans un tourbillon de notes avant que toute la pression de l’océan nous accable de nouveau.

L’album s’achève sur « Crows », un titre qui aurait aisément pu se passer de chant tant l’immersion instrumentale est réussie. À l’image du reste de l’album, il s’agit d’un contenu introspectif à souhait dont les composantes expérimentales paraissent mieux maîtrisées, peut-être plus assumées que dans le précédent album. On y retrouve moins d’influences, moins de tentatives, pour investir d’autant mieux ce psyché si savoureux.

Un album de la maturité donc pour Somali Yacht Club qui saura, espérons-le, exalter les scènes européennes cette année. À voir ce que nos amis ukrainiens nous réservent pour la suite. Un The Earth aux influences tribales pour achever la trinité naturelle ? Ou bien un The Sex animal pour compléter celle de Gainsbourg ?

Weedpecker – III

Pas étonnant que les oreilles bienveillantes de Nicholas Di Salvo, leader de Elder, se soient penchées sur le quatuor polonais tant certaines ambiances et volontés du dernier album embrassent furieusement le chemin artistique creusé par le combo de Boston. Weedpecker fait partie de cette génération ne souhaitant pas s’enfermer dans un style en particulier, ce qui les pousse aux confins du psychédélisme, à la frontière du heavy, à mi-chemin entre prog et lancinance doom. Mix improbable me direz-vous ? Pas tant que ça, lorgnez donc du côté de King Buffalo ou d’ Elephant Tree pour comprendre le cheminement de la réflexion.

On n’est donc pas surpris de l’écrin, cuve de brassage total où se télescopent les envies sans qu’elles ne se phagocytent. Weedpecker est un enfant de ce siècle numérique où l’accès à LA musique se fait en 2 coups de clics. Le patrimoine qui sous-tend les compositions du combo est donc impressionnant, foisonnant et pourtant logique. Ils pourraient être signés chez El Paraiso Records, tourner avec Elder donc, partager un moment acoustique avec Sun River ou tricoter un ab lib furieusement bluesy avec All Them Witches que les gonzes ne dépareilleraient pas. Le tout évidemment sous le saint patronage des Floyd et du Grateful Dead, histoire d’asseoir l’incroyable maturité des structures et progressions, référez-vous à « Embrace » deuxième titre de l’album pour vous en convaincre.

Et si ce savant mélange est intelligible c’est bien sûr par le savoir faire des musiciens mais aussi et beaucoup sur cet album par la grâce d’un mixage intelligemment équilibré. La spatialisation des effets est une vraie réussite et ce n’était pas une mince affaire tant les titres de Weedpecker en regorgent. Le disque ne souffre que peu d’erreurs et on le traverse avec gourmandise et délectation.

2018 s’annonce comme étant une année exceptionnelle par les qualité des sorties, preuve supplémentaire avec ce « III » signé Weedpecker et véritable objet de qualité. Un écrin merveilleux où rock, prog et psychédélisme se mélangent en une orgie merveilleuse, un bel univers où le groupe transgresse juste comme il se doit les préceptes de ces aînés afin de se muer en véritable objet désirable. Une franche réussite.

Frank Sabbath – Are You Waiting ?

 

Les sudistes de Frank Sabbath tracent leur route musicale depuis plus de quatre ans sur un chemin caillouteux et… un peu chaotique reconnaissons-le. Enfanté à Paris, le trio murit sa conception bien spécifique de la musique, avant de se retrouver quelque peu atomisé géographiquement dans l’hexagone. Mu à la fois par une démarche musicale commune et par des contraintes techniques et logistiques, leur production musicale se matérialise naturellement par l’expression de longues séquences jam et autres improvisations, généralement enregistrées d’une traite. Parfois gravées sur vinyl (leur premier album, composé de 2 sets distincts), parfois plus « informellement » (voir leur bandcamp, qui collecte plusieurs de leurs enregistrements), ces bandes ont comme point commun une liberté musicale et instrumentale que l’on sent inspirée du free jazz, déclinée au fuzz rock heavy tendance psyche. Frank Sabbath, sobriquet parfait, donc (Black Zappa sonnait moins bien, reconnaissons-le). Cette nouvelle production s’inscrit complètement dans cette veine.

Le premier contact déstabilise un peu, en tous les cas, et il faut un peu s’accrocher pour rentrer dans l’univers bien barré de nos gugusses. Les écoutes défilent sans déplaisir, et on pense ici ou là à Frank Zappa (c’est inévitable), mais aussi parfois à Mister Bungle, à Domadora pour les passages les plus incisifs, et plus largement à Tia Carrera. On y est : on l’a notre power trio de jam music français, notre Tia Carrera à nous ! Un groupe pour lequel l’exécution d’un morceau à l’identique d’une fois à l’autre est une sorte de non-sens, un groupe qui privilégie l’osmose instrumentale et le dialogue sonore entre musiciens. Domadora tenait bien la barre, un peu seul, avec une approche musicale et instrumentale proche. Sans l’ombre d’une posture concurrentielle, les deux approches, proches mais non identiques, satisferont chacune les aficionados et esthètes du bon son.

EP ? LP ? Autre ? L’objet du jour se retranscrit en quatre séquences plus ou moins carrées dans leur structure, quatre morceaux de 6 à 11 min en gros. Chacun a son identité, ses multiples reflets et rebondissements. « Goat » est bondissant et vif et amène son riff fondateur dans des chemins de traverse passionnants, dont un final de pure jouissance. « Lazarus » est plus lent, plus accrocheur aussi, glissant ses mélodies lancinantes et ses lignes de chant incantatoires dans nos cervelles enfumées. « Take the Lead », plus atypique encore, propose une intro d’ambiance s’étirant et se construisant sur plus de cinq minutes ( !) qui déroule ensuite gentiment sur la seconde moitié. Pas le morceau le plus intéressant, mais déstabilisant, pour sûr. Le comble du barré clôture la galette : « Sasume », avec son riffing sur-fuzzé sur fond de dialogues de films nippons old school, déroule sa rythmique galopante, sans jamais oublier de laisser une bonne place aux soli. Le titre offre une conclusion complètement WTF à un album qui en avait pourtant déjà une bonne dose.

Frank Sabbath est un groupe à découvrir si ce n’est pas déjà fait, et ce disque est un excellent point d’entrée pour pénétrer leur univers. Maintenant, il leur reste à surmonter les difficultés qui les empêchent de déverser plus largement leur savoir-faire sur nos scènes hexagonales (et européennes) car clairement, c’est là qu’on veut les voir.

Against The Grain – Cheated Death

Against the Grain, c’est quatre mecs de Detroit qui ne manquent pas de qualificatifs pour définir leur musique : « balls-to-the-wall rock, incorporating all things heavy they practically defy categorization, seamlessly blurring the lines of punk, rock, doom and thrash » . Ça semble un peu prétentieux mais presque tout y est. On oubliera juste le terme « Doom » qui semble plus être un argument commercial qu’autre chose. Toujours est-il que je me suis retrouvé attaché à un rail durant une quarantaine de minutes le temps pour le train de l’artwork de l’album « Cheated Death » de me passer dessus en attendant sa sortie le 09 février.

L’ouverture de l’album, sonne comme un Mothoread, rapide et percutant. Une rage mi-thrash, mi-punk anime cette joyeuse bande de fanas de mécanique, en particulier sur « Smoke ». Même si la loco se déglingue un peu sur la balade « Devil & Angel » , on notera quelques savoureuses boucles mélodiques. Un coup de gnôle dans le réservoir et les morceaux repartent. « Rolling Stone » balance un rock’n’roll à la nitroglycérine qui ne fait que s’amplifier sur « Enough Not Enough » et « Jaded And Faded » . Bien que cet album ait un air de déjà entendu, j’ai pris pas mal de plaisir à l’écoute de la seconde partie de l’album avec en particulier ses lignes de basse proprettes bien rondes. Dommage que les gars plient les gaules sans prévenir après « Into the Light », j’en aurais bien repris un peu.

Au final, ce «Cheated Death » n’est pas un mauvais album qui trouvera certainement toute sa place sur scène avec un peu plus de puissance sonore.

Hooded Menace – Ossuarium Silhouettes Unhallowed

 

Vous êtes vous déjà demandé ce qui a fait le succès des balades écrites par des groupes de métal les décennies précédentes ? C’est avant toute chose cet équilibre parfait entre fureur et douceur, entre rage et mélancolie. Prenez par exemple « Nothing Else Matters » : c’est bien son sens ultime de la mélodie, aération intercalée dans un déchaînement de distorsion, qui en fait un moment musical important. Et plus le metal est lourd, plus l’aération est précieuse. Et dans le cas d’Hooded Menace, formation finlandaise s’évertuant à souiller nos plus fébriles espoirs depuis désormais 10 ans, la moindre interstice de lumière a alors des allures d’ultime échappatoire. Leur discographie, fortement recommandable dans son entièreté, a toujours offert une place de choix à la mélodie, par le truchement de riffs inspirés, maidenesques, quoique noyés sous 100 000 tonnes de lugubres désespoirs. Leur dernier album en date, Darkness Drips Forth, jouait tout de même la carte du monolithe, 4 titres pour 40 minutes de lente agonie et au final ne s’imposait pas, sur la durée, autant que Never Cross The Dead et Effigies of Evil, ses deux glorieux prédécesseurs. Mais Ossuarium Silhouettes Unhallowed vient rebattre les cartes, proposant peut être, ce que la formation de Joensuu, relocalisée à Helsinki a fait de meilleur à ce jour.

Enfin devenu groupe, plus que projet du seul Lasse Pyykkö, Hooded Menace enregistre même l’arrivée d’un chanteur, Harri Kuokkanen (d’Horse Lattitudes, qui avait dès 2011 croisé la route d’Hooded Menace), qui avait déjà enregistré le split avec AlgomA, paru l’année précédente. Et dans un certain sens, ce nouvel apport éclaircit le propos de la menace encapuchonnée. En effet son chant death, plus académique et moins caverneux que celui de Pyykkö, Kuokkanen amène Hooded Menace sur les versants du doom/death originel, celui de la trinité de Peaceville, et de Paradise Lost en particulier. Une touche anglaise que le mastering aux studios Orgone finira d’ailleurs d’apporter. Résultat : l’album est en tout point mieux construit, plus riche et varié que les précédents. Ecrit à deux plumes (Kuokkanen en est le cosignataire avec Pyykkö et signe également seul « Cascade of Ashes »), « In Eerie Deliverance » est l’incarnation parfaite de cette orientation nouvelle avec son pont épique et sa légère touche de voix féminines. La mélancolie qui se dégage de « Cascade of Ashes » ou les réminiscences doom traditionnel de « Charnel Reflections », rappelant l’obsession de Pyykkö pour le premier album de Cathedral, sont autant de paramètres qui font de ce cinquième album la synthèse parfaite de ce qu’est Hooded Menace et de ce qu’il semble vouloir devenir. Comme un point d’équilibre absolu. Sans pour autant renier la noirceur qui fait le sel (à vif, sur plaies béantes) du groupe, les multiples idées qui parsèment le disque révèlent une réelle envie de musique, extrême certes mais portée par la lumière qu’ont ces albums qui marquent un tournant dans la carrière d’un groupe. Ossuarium Silhouettes Unhallowed est il, à sa façon, le Black Album d’Hooded Menace ? Seul l’avenir apportera une réponse à cette question. Reste que l’on tient là un monolithe qui fera date.

 

Point Vinyle :

Achat du vinyle indispensable pour voir en grand la pochette d’Adam Burke, l’artiste qui monte dans les scènes death (Vektor, Tchornobog, Acephalix, Spellcaster, Tempest) et doom (Uncle Acid, RIP, Ruby The Hatchet, Ancient Warlock, Pagan Altar, Mos Generator) ici utilisé à la parfaite jonction des deux. L’album est un joli gatefold, plein de détails, existant, pour le premier pressage, en 3 versions :

  • Blue transparent : 100 exemplaires, sold out.
  • Yellow transparent : 200 exemplaires, sold out
  • Black, sold out sur le site du label et du groupe mais trouvable un peu partout.

Ne trainez pas où ce sera 50 balles sur Discogs.

Se connecter