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Comme les vendangeurs dans les vignes réputées des bords du Rhin, le Up In Smoke – dans sa version sédentaire – reprenait ses quartiers au Z7 de Pratteln pour une nouvelle édition dédiée au heavy rock, au doom et au rock psychédélique ainsi qu’à tout ce qui constitue ce qu’on appelle vulgairement (ça on sait l’être) le stoner. Il y avait donc du poil, de la meuf et même des – désormais – incontournables hipsters, pieds nus dans les baskets, dans la salle menacée de disparition et ça avait même des airs de Tour de Babel quand on se baladait parmi les quidams parlant français (youpi ça a l’air de marcher le stoner dans ces contrées), l’italien, la langue visigoth du coin ainsi que d’autres dialectes européens que, malgré notre quasi omniscience, nous n’avons pas reconnu (décidément nous sommes des reporters en carton pâte).
ILJA
Les hostilités commençaient, comme c’est désormais la tradition, avec une formation des environs : Ilja (originaire de Thurgovie pour les petits curieux que vous êtes certainement) qui effectuait ses balances alors que les premiers festivaliers pénétraient – le sourire aux lèvres – dans l’enceinte de la manifestation. Ce trio masculin portant la chemise (à carreaux ou unie) avec élégance avait la lourde tâche de lancer ce festival qui allait voir quelques grosses pointures se succéder sur scène. C’est donc devant un public assez clairsemé (et pas franchement coincé contre la petite scène) qu’ils ont balancé, durant les trente minutes qui leur étaient allouées, un fuzz bien speedé aux relents parfois de grunge simpliste à la Nirvana. Au rayon son, on regrettera la batterie un poil trop en avant dans la sono, mais force est de saluer cette prestation qui s’avéra des plus agréables au final ; plaisir partagé par un public qui resta dans les alentours de la Side Stage pour profiter du bon son.
CARSON
Place à nouveau à un helvétique trio sur la petite scène, histoire de continuer à taper dans les amuse-gueule de qualité. Carson, lui, déploie un power-stoner efficace aux gimmicks entêtant et enlevés. La section rythmique assure une bonne mise en place quand le guitariste, aux faux air de Josh Homme, se lance dans du “han” solo. L’ombre des sorcières de l’âge de pierre plane assez souvent au dessus des compositions du trio. Ca joue propre et juste. Une découverte rafraîchissante qu’on vous conseille. Leur dernier EP date de 2012, à suivre donc.
BLACK BONE
Après deux prestations suisses, la petite scène, était à disposition de Back Bone. Le trio néerlandais a carrément foutu le boulet sous la tente qui couvrait la petite scène où s’étaient déroulées la totalité des performances du jour jusqu’ici. Alors que la nuit tombait, le public s’est mis en mouvement de manière frénétique sous la déferlante de riffs délivrée par ce power trio qui a fait parler la poudre. Quoiqu’assez proches d’Airbourne par moments dans l’exécution de leurs compositions (un rock furieux sans fioriture savamment mis en scène à grands coups de gimmicks hard rock), les Hollandais ont su séduire en envoyant quelques nouvelles compos issues de leur dernière plaque « Blessing In Disguise » encore disponible au rayon frais.
JEX THOTH
Les américains ont la charge d’ouvrir les hostilités sur la scène principale de la Z7 Konzerfabrik. Profitant de la pénombre offerte par la salle, Jex Thoth (la chanteuse) déploie une armée de bougies et autres artifices sacrificiels afin de nous aider à entrer dans l’univers du combo. Un doom psychédélique planant et majestueux. Musicalement la formation est au-dessus du lot, développant son univers avec une aisance technique indéniable. La performance est habitée, peut-être un peu trop. A vrai dire, les concerts de Jex Thoth sont à double tranchant. Soit vous adhérez à la performance chamanique et incantatoire de la chanteuse, profitant de ses moindres mains crispées levées au ciel comme d’un bienfait druidique, soit vous fermez les yeux pour apprécier pleinement la musicalité du groupe. Car elle chante d’une voix puissante et habitée mais visuellement le résultat semble surjoué, les incantations pataudes, le jeu ne vaut pas la chandelle qu’elle tient dans la pogne (ah-ah, pardon). Reste qu’une fois les yeux fermés, on se retrouve bercé et enveloppé par l’aura musicale que dégage le groupe. Un voyage qui prend aux tripes et aux synapses, baignant la grande scène d’un psychédélisme noir et lascif. C’est donc sur cette impression mitigée que nous nous dirigeons vers la petite scène afin de profiter du blues rocaille de…
CHILD
Et la transition se passe, ma foi, à merveille. La langueur de Jex Thoth trouve écho dans le rythme très posé dépeint par le trio australien. Un blues rocailleux donc, inspiré, rappelant un Radio Moscow moins démonstratif et plus collectif. Les trois zicos se complètent de fort belle manière, offrant une leçon d’écoute sur chaque petit libre passage. On n’est pas non plus là à un écouter un blues de papy mou d’la fuzz, nan nan. Quand les deux cordistes se décident à écraser les pompes sur leur pédales d’effets, c’est du gain crincrin et volumineux qui dégueule des enceintes de face. Pour le plus grand plaisir des esgourdes. A noter que la petite scène dans sa nouvelle configuration offre un écrin très “club” à ce genre de performance et permet d’oublier qu’on est dehors. L’immersion est totale. On est bien. Proche des artistes, des performances et du public, toujours très cool sur ce festival. Mais l’envie de bouger un peu se fait ressentir, l’envie pressante de rock à burne se fait ressentir, et l’on ne boudera pas notre plaisir de transhumer vers la grande scène pour assister à la performance pleine de poils en sueur de Valient Thorr.
VALIENT THORR
Le quintet américain va asséner une leçon de rock. Directe, burnée, tranchante et dégueulasse, la musique de ces clones de Dieux nordiques dépravés emporte le public dans un tourbillon de salacerie et de handbanging jubilatoire. Valient Himself se pose en frontman charismatique, tenant la salle avec ses speechs décousus, son “dad-bod” conquérant et ses ptits muscles tout plein de hargne. Les deux guitaristes n’hésitent pas à parcourir pleinement les manches de leurs instruments, croquant à pelletées de doigts riffs et plaquages rythmiques. L’exécution est dégueulasse, pleine de fougue. “Double Crossed” en sera le parfait exemple. La Thorr family entame ce soir une tournée d’une vingtaine de dates et entend bien prouver qu’elle va taper gras fort le vieux continent. La Z7 suinte. C’est beau à voir et un peu poisseux. Le final est un joyeux bordel, salto de guitare, bassiste claudiquant. Une bien belle prestation ma foi (à lire à voix haute avec un accent de présentateur sportif) qui a le don de nous coller un large sourire. Allez, té c’est l’heure de manger une de ces FAMEUSES saucisses du Up in Smoke. Légèreté jusque dans l’assiette. La cohérence est totale.
STONED JESUS
Le groupe au nom le plus cool de la galaxie (et de ses environs proches) voyait converger à l’extérieur la quasi-totalité du public. Les Ukrainiens ont clairement le vent en poupe ces jours et dire qu’ils étaient attendus n’est que rendre justice : c’était clairement du délire sous la tente extérieure lorsqu’Igor et sa bande ont débarqué sur scène. En fait de bande, Igor était épaulé par un autre membre de la formation de l’est : son bassiste. Le reste de la formation – le batteur donc – étant resté coincé à Budapest après avoir dignement fêté la fin de la tournée précédente avec le vocaliste velu de Greenleaf. Son passeport égaré ne lui a pas permis de se joindre à cette tournée débutant le jour même – la troisième leg du « Harvest » tour comme on dit dans les milieux branchouilles que nous fréquentons beaucoup dans l’équipe de desert-rock.com – pour convertir l’Europe Centrale.
Pas plus démontés que ça, les garçons nous ont présenté un show en deux temps et sous deux formes différentes. Un premier volet consacré à une interprétation de grande classe du premier album amputé de quelques plans, à laquelle était convié Florian de No Mute (une formation helvétique à suivre qui s’était déjà faite remarquée par le passé au Up In Smoke). Un second acte composé de titres du fameux « The Harvest » avec Léo des Space Fisters (autre formation à suivre qui se produira le lendemain) aux baguettes, introduit après quelques explications du frontman sur l’incident de Budapest (qui a bien fait marrer la foule en liesse). Certes anecdotique de par sa conception, cette performance de haut vol a fait mouche auprès du public « bâlois». Une mention très spéciale aux deux batteurs embauchés dans l’urgence qui ont assuré sur scène avec des sourires communicatifs qui en disaient long sur le plaisir qu’ils ont eu à contribuer à cet événement : chapeau les gars !
KARMA TO BURN
La voilà la tête d’affiche de la première journée. On avance en devant de scène avec appréhension. Bien sûr le trio est une référence, ses albums pleins de couilles, son obsession pour les chiffres, mais on a déjà assisté à des performances en demi-teinte, pour ne pas dire fatigantes des gonzes. Alors qu’en est-il ce soir ? Primo, boom, le son, dans ta gueule. Un énorme mix nous envahit l’oreille interne, équilibré et massif. Chaque fréquence va trouver sa petite place dans le spectre qui nous assaille. Et le trio est en forme. William Mecum, d’habitude avare en parole, n’hésite pas à partager ce soir et on le sent concerné par chaque attaque de cordes. La main droite, médiator serré, illustre chaque silence, s’abattant ensuite irrémédiablement sur la six cordes. La section rythmique est un rouleau compresseur. On pourra toujours regretter le bassiste de The Exploited mais force est de reconnaître que le msieur devant nous fait le taf. Le batteur est un monstre de précision. Sa frappe est puissante et chirurgicale.
Il faut admettre que Karma to Burn sait gérer les vides et les pleins comme personne. Son stoner intrumental fait de cassures, de breaks nécessite une mise en place précise ne souffrant d’aucune approximation. Autant vous dire qu’en cette fin de premier jour, le couperet K2B vient de tomber. C’est un grand soir et une grosse performance.
Après cet énième trio, les jambes se font lourdes et c’est avec des étoiles plein les yeux que tout le petit monde constituant cet événement rejoint ses pénates constituées pour certains par le sleeping/camping organisé dans la salle ou l’hôtel pour les plus bourgeois (dont nous faisions partie pour des raisons techniques et pas parce qu’on est devenu des vieux cons non mais oh !).
Flaux & Chris
Retrouvez le résumé vidéo de cette journée par ici :
Ce dimanche 27 septembre, il valait mieux avoir posé son lundi au boulot si l’on souhaitait assister à cette 8ième édition du Glad Stone Fest en association avec les Stoned Gatherings. Il était en effet compliqué de sortir indemne de ce déferlement sonore organisé pour les 5 ans d’existence du fest. Avec 6 groupes à l’affiche dont aucun n’a le tricot de dentelle pour passion, le déluge de saindoux était à prévoir. C’est donc avec un grand plaisir que l’on s’est rendu à ce séduisant rendez vous, sans parapluie ni K-Way, afin de profiter pleinement de toutes ces grasses effluves.
C’est Decasia qui a l’honneur d’ouvrir à 18h. Ce trio nantais installé à Paris depuis peu entame son set et l’on comprend rapidement que cette soirée va faire vibrer nos organes et la surface de notre bière tiède. Le son est en effet gigantesque, avec une basse très prédominante pour le plus grand bonheur de nos cœurs de doomsters, pour reprendre l’expression de Julien Clerc. Pourtant, la musique du groupe n’est pas brutale. Les passages de riffs heavy sont souvent atténués par d’autres chantés sur une guitare claire et dénuée de tout effet superflu, se rapprochant d’un rock plus traditionnel. Ajoutez à tout cela une teinte de psychédélisme et une bonne dose d’énergie, coupable d’une corde de guitare cassée en fin de concert, et vous aurez une petite idée de la chapelle dans laquelle officie Decasia. Bonne entrée en matière pour le reste des événements.
Le trio parisien Red Sun Atacama prend le relais et débute sur un morceau élevé en bpm rappelant un “Green Machine”. La basse est encore une fois mise à l’honneur et on se délecte du jeu très groovy du bassiste chanteur, dont on peine malheureusement à entendre la voix. La guitare vient quant à elle poser de nombreuses envolées réverbérées, manquant parfois un peu d’altitude et d’inspiration. Un mélange assez efficace pour voir naître les premières agitations au sein du public.
Il est 19h30 et c’est au tour de Miava de continuer le viril concours de celui qui aura la plus grosse fuzz. Les quatre belges nous livrent des compos post metal et purement instrumental avec une certaine maîtrise. Malgré quelques fulgurances reluquant vers Tool, la musique du groupe souffre tout de même d’une certaine linéarité et demeure assez prévisible. Heureusement, le son toujours aussi lourd que l’enclume du forgeron d’Excalibur nous permet de digérer ces quelques points faibles et de passer un bon moment.
C’est les oreilles déjà bien rassasiées qu’on entame cette deuxième partie de soirée et qu’arrive Enos. Face à un bassiste encapuchonné et aux premières notes plus basses que terre qui résonnent lentement dans la salle, on jurerait être devant un groupe de doom. Que nenni. Nos anglais évoluent dans un registre space rock/stoner psychédélique, un croisement entre Hawkwind pour le trip spatial et Orange Goblin pour la science stonerienne du riff. Le guitariste – un poil trop bas – nous balance des riffs bluesy pour les envoyer rendre visite aux étoiles, dans un espace à l’écho hypnotique. Une belle leçon de musique.
Si jusqu’ici le son était assez lourd pour faire trembler les murs, Sunnata vient placer la barre encore au dessus et menace le Glazart de s’effondrer. Entraperçu aux derniers Doomed Gatherings, les polonais avaient fait assez sensation pour être de nouveau invités ce soir. Pour situer la noirceur de la musique du groupe, pensez à une nuit d’hiver au nord de la Finlande. En sous-sol. Dans une cave. Au milieu de cris et de larsens, la puissance phénoménale du doom/sludge de Sunnata ravage tout sur son passage, avec toujours un sens de la mélodie indiscutable.
La gueule bien amochée par tant de violence sonore, on s’apprête à recevoir le coup final de la main de Glowsun. Le Glad Stone Fest qui se charge habituellement de réunir des groupes peu connus du grand public a enfreint la règle pour ses 5 ans : le groupe français de stoner/psychédélique fait clairement figure de tête d’affiche ce soir. Après un album fraîchement sorti et très bien accueilli et un passage par le Hellfest, Glowsun a pris du galon et ça se voit. Le groupe entame son hypnotique « Death’s Face » autour de volutes d’encens tout juste allumé et posé au devant de la scène. Il faut voir Glowsun en live pour se rendre compte à quel point leur son est massif. Il y a une réelle puissance, difficile à cerner au travers d’une simple écoute de leurs albums, et qui devient pourtant évidente en live. La subtilité des compositions laisse la place à une force brute et primitive, dont votre nuque se souviendra dans les jours à venir. Parce que Glowsun fait preuve d’un groove incroyable. Le groupe contraste aussi avec les précédents par un professionnalisme et une aisance incomparables. Les morceaux s’enchaînent impeccablement et tout est très carré. Le guitariste jongle avec une facilité déconcertante entre ses différentes pédales d’effet, toutes très présentes dans la musique du groupe. Après un rappel unanime, le groupe s’apprête à entamer une nouvelle chanson alors qu’il se fait interrompre discrètement sur le côté de la scène : il est déjà 23h30, le temps qui leur était imparti est écoulé. Dommage, on serait tous bien restés plus longtemps.
De manière encore plus poussée que les Stoned Gatherings, qui associent des groupes moins connus à d’autres à la notoriété déjà bien installée, le Glad Stone Fest a toujours essentiellement eu à cœur de dénicher des formations intéressantes, moins exposées médiatiquement. Si la démarche est légèrement différente, le Glad Stone Fest n’en est pas moins un rendez vous incontournable pour tout fan du genre. Avec une programmation d’un très bon niveau général et un tarif plus que dérisoire, même Lidl en période de solde aurait du mal à concurrencer un tel rapport qualité/prix. Bref, on s’étonne que l’événement ne joue pas à guichet fermé à chaque fois. Allez, pour la prochaine édition, plus d’excuse.
Ca y est, après une petite accalmie estivale, les Stoned Gatherings ont entamé leur rentrée. C’est sous un ciel noir et peu accueillant que l’on arrive au Glazart pour assister à cette soirée déjà surnommée « la bûche ». L’affiche est à deux tiers française ce soir : les bretons de Stonebirds et les montpelliérois de ÖfÖ Am se chargent d’ouvrir les hostilités juste avant les américains de Jex Thoth, la tête d’affiche de la soirée. On peut donc parler de bûche tricolore, car après tout, le drapeau des Etats Unis est lui aussi bleu, blanc et rouge.
C’est à Stonebirds que revient la tâche ingrate de commencer les réjouissances sonores face à un public encore assez maigre. Depuis sa création en 2010, le line up du groupe n’est pas la seule chose à avoir changé. Passé de cinq membres à trois, Stonebirds a aussi troqué un stoner classique pour un style plus personnel, complexe et torturé. Le groupe a cessé de lorgner les déserts outre Atlantique pour trouver l’inspiration dans un paysage qui lui était bien plus connu, celui du Centre Bretagne (Kreiz Breizh pour les intimes), et ainsi se forger une identité propre et singulière. L’alchimie opère et le résultat est captivant. Même si l’influence de Kyuss reste manifeste, le groupe évolue dans un univers beaucoup plus sludge, poisseux et marécageux, porté par la voix tantôt criarde tantôt assagie du guitariste Fanch et par les back vocals du bassiste Sylvain. On pense à Kylesa, à un My Sleeping Karma plus anxiogène, parfois à Mastodon… Pour notre plus grand plaisir, la palette sonore du groupe ratisse large, et les paysages de tourbières défilent sans rien avoir à envier aux cactus californiens. Malgré cela, le public ne semble pas franchement réceptif et reste très silencieux et calme. Peut être qu’un peu plus d’énergie de la part du groupe aurait été bienvenue pour secouer l’audience et la sortir de sa légère léthargie. Quoiqu’il en soit, on est musicalement conquis. Dehors il s’est mis à pleuvoir, la musique de Stonebirds a porté ses fruits.
Après s’être rapidement lesté l’estomac d’un excellent sandwich vietnamien du food truck Banh Mi Road, on rejoint une salle un peu plus remplie pour ÖfÖ Am. Les trois gars de Montpellier pratiquent un stoner instrumental avec un bon penchant hard rock. On ne sera pas surpris d’apprendre que le groupe a sorti un split album avec Karma To Burn en 2010, tant leur musique fait penser à celle des américains. Les morceaux sont courts et vont droit au but, les riffs sont bien construits et entrainants, la basse est ronde et heavy, le batteur est énervé, bref, la formule est classique mais efficace. Pour preuve, l’énergie envoyée par le groupe commence à gagner doucement le public qui se réveille petit à petit. Entre deux morceaux, le bassiste déclare sa flamme à la chanteuse de Jex Thoth : « Elle chante bien, OK, mais putain ce qu’elle est belle ! ». Nous voilà rassurés, nous ne sommes donc pas les seuls à être sous son charme. C’est d’ailleurs à elle d’entrer en scène.
Une odeur d’encens a envahi le Glazart, et la scène est plongée dans une pénombre où seules des bougies boursouflées par la cire dégoulinante apportent un peu de lumière. On aperçoit aussi quelques bois de cerf. Pas de doute, c’est maintenant au tour de Jex Thoth. La chanteuse habillée d’une courte cape noire et de bottines fait son entrée et entame « To Bury », titre introductif de leur dernier album en date. Si le groupe a pour nom celui de sa chanteuse, ce n’est pas sans raison. La star du groupe, c’est indéniablement elle. Sa présence scénique est incroyable, au point qu’elle arrive à éclipser complètement les autres musiciens. Entre transes orgasmiques, interactions avec le public et mouvements suggérant une possession démoniaque, elle capte toute l’attention. Dans cette ambiance propice à une séance de ouija entre amis, Jex Thoth allie les bases du doom à la légèreté de la voix douce et suave de notre blondinette, pour un résultat sonore semblant venu d’une autre époque. Et Jex Thoth c’est précisément ça, une sorte de Grace Slick pratiquant la magie noire en tenue hippie. Le concert est envoutant, servi par un son d’une qualité impeccable, et c’est la bave aux lèvres et les yeux écarquillés que l’on fixe béatement la chanteuse dans tous ses déplacements, grande prêtresse prêchant la diabolique parole du doom face à un parterre de fanatiques. On regrettera juste une sortie de scène un peu brutale, sans un mot ni geste pour le public. À trop vouloir jouer la comédie, on en oublie les règles de bienséances.
En définitive, une belle soirée assez éclectique grâce aux Stoned Gatherings, qui fêtent leur 5 ans cet automne. Joyeux anniversaire et merci à eux !
C’est sous un infâme cagnard qui m’aura suivit sur deux heures de trajet dans une voiture non climatisée que j’accoste la maroquinerie. Première chose à faire dès lors, prendre une pinte à vider d’un trait pour essayer de se souvenir de la signification du mot « fraîcheur », le tout sur la très sympathique terrassedu lieu. Mais déjà, il est temps de s’engouffrer dans la moiteur et les vapeurs de machine à fumée pour atteindre la scène.
Ainsi, l’espace semble avoir déjà raisonné. Au vu du niveau de transpiration des individus présent ce soir, il est clair que je viens de louper la première partie… Psychotic Monks. Je ne parlerais donc pas de leur musique. Par contre, j’entends parler de leur prestation avec entrain. A charge de revanche donc.
Ce soir ce sera donc Black Mountain seulement. Petite parenthèse, ce groupe canadien de heavy-hard-rock-psyché-stoner-prog 70’s formé en 2004 me semble absolument mésestimé au vu de la qualité de leurs compositions et du soin apporté à la production d’un album comme « In The Future », qui est pour moi, l’une des meilleures références du genre (plutôt large le genre donc). Le groupe est en tournée pour les 10 ans de la sortie de leur premier album, ce qui va me permettre de les voir pour la première fois vu que lors de leur dernier passage, en 2011(!), la salle affichait complet.
Les voilà donc qui arrive sans chichi. L’une des particularités du groupe est le double chant masculin/féminin avec le leader chanteur/guitariste Stephen McBean d’un côté et la chanteuse Amber Webber de l’autre. Si cette dernière est plus ou moins en retrait sur certains morceaux, car tantôt lead ou backing vocals, la symbiose des deux est là. Avec un claviériste et un bassiste sur la gauche, c’est assez naturellement qu’Amber trouve sa place au centre avec le batteur tandis que Stephen s’excentre plus loin sur la droite. Ce doit être le moyen pour lui de se dégager suffisamment d’espace pour laisser place à la fougue de son jeu de scène. A la fois intériorisé car souvent tête baissée ou regardant ses amplis mais aussi démonstratif avec ce qu’il faut en sauts et hochements de tête. Cette position centrale d’Amber se montrera parfois en décalage, surtout lorsqu’elle se retrouve passive alors que l’ensemble du groupe se donne au maximum, mais après tout qu’importe, puisqu’on décolle.
Ils font honneur à l’anniversaire qui les amène avec « Modern Music », pas mal en ouverture mais l’atmosphère enjouée qui s’en dégage est bien différente de leurs habitudes. On se rattrape avec un « Stormy High » du tonnerre, tube de leur second effort avec ce chant féminin lointain tout à fait entêtant. C’est alors que je m’aperçois de la qualité du son de ce soir. Les balances sont à l’orée du parfait et laissent entendre l’ensemble des nuances presque comme sur enregistrement. A peine s’aperçoit-on ici ou là que le clavier est un peu bas en volume. Pour en finir avec la technique, les lights soulignent tranquillement et de manière assez psyché ce qui se passe sur scène.
Globalement la set-list enchaînera les ¾ des morceaux du premier album en alternance avec ceux du second. Quelques morceaux ressortiront tout particulièrement pendant cette soirée comme « Don’t Run Our Hearts Around » qui se finira en un orgasme extrême non feint pour l’ensemble de l’audience ou bien « No Hits » et ses passages complètement schizophrénique. On aura aussi le droit à un « Queens Will Play » décevant dans sa première partie, la faute à un synthé complètement aphone pour le coup mais suivit par un morceau inconnu (« Defector » ?) qui ne demande qu’à être analysé rapidement sur un futur enregistrement !
Une petite pause histoire de s’éponger comme on peut, puis un retour sur un second morceau inconnu (« Mothers » ?). Si nous n’avons pas eu le droit ce soir au troisième album et à un titre comme « Rollercoaster » nous avons par contre le droit à ce qui semble être deux nouveaux morceaux que le groupe traîne sur cette tournée. Ce dernier s’étire en longueur à la manière d’un « Bright Lights » en plus pêchu et réussi directement, comme ça, à la première écoute live, à être l’un des meilleurs moments de la soirée. Encore une fois, j’espère vite pouvoir y jeter une oreille attentive sur enregistrement. « No Satisfaction » vient pour boucler la boucle en résonnant avec « Modern Music » et c’est alors que les portes s’ouvrent et que l’air frais s’engouffre.
Voilà donc un groupe qui ne déçoit pas en live, bien au contraire. Tous les éléments étaient présents pour passer un très bon moment et jusqu’à la découverte de ces deux nouveautés qui annoncent peut-être un nouvel album d’ici peu. En croisant les doigts, je pars me repasser les galettes précédentes et divaguer aussi sur l’ensemble des projets musicaux gravitant autour du groupe.
Pour qui suit de près la scène stoner psychédélique française, il devient difficile de ne pas avoir entendu ce nom prononcé : Domadora. Le trio français est devenu au fil des derniers mois LA valeur sûre de la scène : ses différentes prestations à Paris, dont un hommage à Earthless le 5 décembre 2013, ainsi qu’une tournée avec Steak et Crystal Head, font du combo un nom qui compte. Reste que Domadora s’est vite aperçu qu’il est en réalité plus un jam band qu’un combo traditionnel. Ce n’est pas là le genre de musique que l’on peut apprécier en une demi-heure de set coincé entre d’autres groupes mais bien une musique faite pour transporter les âmes par delà les codes traditionnels du concert. Fort de cette identité nouvelle, le groupe se met alors à la recherche d’espaces plus propices à leurs aspirations psychédéliques.
La première étape de ce revirement de carrière se fait le 31 juillet dans un lieu tenu secret au sud de Paris. Organisé par les Stoned Gatherings en 5 jours, l’événement se monte comme un happening ultra privé, pour des raisons évidentes de sécurité. Un petite vingtaine d’invités, contactés via les réseaux sociaux se retrouvent alors devant une gare RER et attendent l’arrivée de l’orga, qui acheminera le joyeux convoi jusqu’à la clairière où les attendent un générateur et les trois musiciens de Domadora. Pendant près de deux heures, sur une presqu’île, avec lac et foret comme décors naturel, le trio envoute l’assistance en tissant une toile opaque de riffs et de breaks irrésistibles. Quelque part entre Hendrix et Earthless, avec le ciel comme seul toit, Domadora invite au voyage. Une fois tout le monde revenu sur terre, puis raccompagné au RER, le groupe acte sa transformation en Jam band et cherche à tout prix de nouveaux terrains naturel et inspirants pour leurs prestations.
Et cela tombe bien : l’association Black Owl, située à Clermont Ferrand, avait au même moment des aspirations de « Generator Party », le plus vieux fantasme stoner qui soit. Tout naturellement, ils pensent à Domadora pour clôturer une soirée placée sous le signe du psychédélisme, avec She Hunts Koala, Decasia et The Blondi’s Salvation. Pour le décor, cette fois-ci, une vieille grange, perchée sur une colline au milieu des Volcans d’Auvergne. La scène est un amas de tapis, au milieu de l’herbe. Autour, une piscine, quelques tentes et une soixantaine d’amateurs de musiques qui font voyager les sens. Les quatre heures qui séparent Paris de la destination, encore une fois tenue secrète, passent finalement plutôt vite. A l’arrivée certains piquent une tête dans la piscine, les autres trouvent place dans un hamac. Les trois musiciens de Domadora, eux, font leur balance. Il est 15 heures et la journée, fort ensoleillée, sera des plus relaxantes. C’est à la nuit tombée que les concerts s’enchainent, avec She Hunts Koala en premier lieu. Le combo Toulousain, visiblement influencé par Sleep, déroule un set chamanique et lourd tandis qu’une lune ronde et pleine apparaît en contre-bas. Cette dernière illuminera le set de Decasia, dont le style est plus (trop ?) proche de Colour Haze. Devant la scène, la poignée de privilégiés s’assoit et se nourrit des vibrations procurées par la musique des Nantais. Pour ceux qui ne se nourrissent pas que de son, des sandwichs au St Nectaire (de la ferme, à tomber) ou au saucisson (tout pareil) sont prévus, ainsi que d’incroyables pâtés aux pommes de terre. Question bières, les fûts s’enchainent sous la tireuse, étanchant les soifs grâce à une formule aussi simple que magique : bière de caractère à prix plus que raisonnable. Puisque de fûts il est question, c’est une jeune (et jolie) demoiselle qui vient s’asseoir derrière ceux de Blondi’s Salvation. Le combo nantais est fait de très jeunes amateurs de psychédélisme, vivant jusqu’au bout leurs rêves hippie. Les 5 membres vivent en communauté, ont construit leur propre studio et multiplient sur scène les instruments. Il y a quelque chose qui rappelle les Doors (mais pas que) dans cette aventure sonore aussi naïve que délicieuse. L’assemblée voyage sur des terres d’orient et la fumée des altérations psychotropes montent jusqu’à la lune sans la faire tousser. Il est presque minuit lorsque Domadora s’installe sur les tapis, devant la vieille grange. Le public s’est maintenant rapproché. Il est devant, sur le coté, et même derrière la scène. Seul la lune surplombe la colline désormais. Le trio transporte alors l’audience dans les limbes du stoner, là où seule la rythmique a encore un sens. Par dessus, Belwil et sa vielle Gibson dessinent à grand renfort de notes les contours d’une nuit éternelle. Jam For The Full Moon. Le public désormais debout exulte et rend au groupe l’énergie que le trio déploie. Lorsque les dernières notes tombent dans la nuit, la lune brille toujours au dessus de la grange. C’est dans cette dernière que la soirée se poursuit, puisqu’une « Jam Room » y a été installée. La musique peut ainsi continuer jusqu’au petit matin.
Desert-Rock tenait à parler de ces deux initiatives, par le biais d’un report croisé. Merci aux Stoned Gatherings et à Black Owl d’avoir rendu cela possible. Merci également à Domadora pour leur musique et leur gentillesse. Espérons que ce genre d’initiatives, visant à briser les codes traditionnels du concert seront nombreuses à l’avenir.
En général, au restaurant, le déroulé classique des opérations consiste en une entrée, un plat, un dessert. Un démarrage tranquille pour une exponentielle des sens. Les caresses, l’amour, le câlin. Mais ce soir, les mecs des Stoned Gatherings ne se sont clairement pas inspiré de Joël Robuchon pour leur affiche. Ils viennent en effet nous proposer trois plats, dont aucun ne pourrait trouver sa place dans une réunion consommateurs Weight Watchers. Oui, c’est indéniable, ils dépassent tous l’apport calorique d’un repas de sumo en période de prise de masse. Mention spéciale pour Crowbar, à pousser un diététicien à la reconversion professionnelle. Ce soir le Glazart joue donc sa première étoile au guide Michelin, et c’est les oreilles affamées que l’on arrive pour goûter à ce menu qui nous titille les papilles depuis un moment déjà.
À l’heure où les rues de Paris ont battu le record de fréquentation du désert de Namibie, le Glazart ne semble pas souffrir de la diaspora parisienne qui a lieu chaque été puisqu’avant même le début des hostilités le lieu est déjà bien rempli. La date du 9 août pour une telle affiche pouvait paraître risquée mais le pari est finalement réussi.
Black Tusk ouvre le bal dans une salle presque comble dont la température et l’humidité permettrait la floraison immédiate d’une quelconque plante exotique. Dès les premières secondes, on comprend rapidement que Black Tusk n’est pas là pour nous ménager. Le son de la basse est énorme, le guitariste chanteur hurle et le batteur martèle son kit de batterie, qui se demande surement ce qu’il a fait pour mériter une telle violence, lui qui n’a rien demandé à personne, le pauvre. Même si le public n’a pas encore atteint l’excitation dont il va faire preuve sur les deux groupes suivants (peut être s’acclimate-t-il à son nouvel environnement tropical), impossible de ne pas remuer la tête sur des titres comme « Embrace the Madness » ou « Red Eyes, Black Skies ». Entre quelques gorgées de Jim Beam, le groupe de « swamp metal » comme les membres aiment à se définir, nous livre un set mélange de stoner et de hardcore, bourré d’énergie et ponctué de grands sourires d’un guitariste tout guilleret. Ça fait plaisir à voir et à entendre.
Après 5 minutes de balance (suite à un problème technique ?), place maintenant au grand Wo Fat, le magicien des jams psychés, ayant établi pour temple vaudou la salle du Glazart. Wo Fat, c’est ce trio de Texans qui depuis presque dix ans nous balance un southern stoner déjanté et possédé par les démons du blues et de l’électricité, avec son lot d’albums cultes et de hits en puissance. Ce soir, le groupe a puisé dans sa discographie les morceaux les plus ravageurs, du moins en live. « The Black Code » , « The Conjuring » ou encore « Read The Omens », autant de bombes bourrées de riffs délectables et de succulents solos. La voix de Kent Stump est difficilement audible mais étrangement, tout le monde s’en fout. Et de fait, ça n’affecte en rien la puissance musicale du groupe. Parce que Wo Fat c’est avant tout du riff. La foule dégénère sérieusement sur les délires fuzzés des trois sorciers qui se sont visiblement emparés de l’esprit des malheureux du premier rang. On oublie vite la chaleur de moins en moins supportable pour se laisser porter avec grâce par ces malades du groove.
On comble rapidement notre anormale sudation par un apport rapide et efficace en houblon, et on attend avec impatience les légendaires Crowbar. On doit l’avouer, les vrais stars de la soirée, ce sont eux, ce mythique groupe qui règne en maître dans la chapelle du sludge, porté par le saint Père Kirk Windstein, le Riff Lord, qui n’a pour autant rien d’un enfant de chœur. La salle est remontée à bloc après ces deux superbes mises en bouches et ce final qui s’annonce majestueux. De nouveau des balances (décidément…), un petit pipi de Monsieur Windstein, et le groupe peut commencer. La boucherie démarre sur le résolument hardcore « Sever The Wicked Hand ». 25 ans d’office et 10 albums derrière eux, Crowbar a de quoi rassasier ses fans avec une belle discographie pleines de tubes construits de riffs doomy aux tonalités plus basses que les fonds marins. C’est donc un peu sans surprise que le groupe va nous dérouler les titres qui ont fait son succès, « Planets Collide », « High Rate Extinction », « To Build A Mountain », ou le plus récent « Walk With Knowledge Wisely »… C’est prévisible, oui, mais ça reste très jubilatoire. La fosse qui a pris des allures de cage aux lions pourra en témoigner, avec un slam par minute et même un mini wall of death improvisé.
Un petit rappel plus tard, Crowbar clôt cette belle soirée. C’est les oreilles bien remplies que l’on quitte les lieux, avec un petit sourire plein de compassion en pensant aux copains sous le soleil qui ont raté cette soirée. Merci les Stoned Gatherings de m’avoir vengé des vacanciers.
Il existe encoredes personnalités atypiques, inclassables voire imprévisibles dans le milieu , et c’est tant mieux. Certainement pas pour rien que Nick Oliveri a intitulé son dernier album “Uncontrollable”. La quarantaine ça aide à se connaître. Pas non plus tous les jours qu’une icône de Palm Desert au CV impressionnant nous rend visite, et l’annonce d’un set acoustique en solo suscite curiosité et interrogations parmi la centaine de personnes venue garnir le Warmaudio pour ce deuxième plateau proposé par L’Oeil de Néron.
C’est aux locaux, comme le veut la coutume, d’Out of Space, que revient l’insigne honneur d’ouvrir pour l’un des pionniers du stoner californien. Au cours d’une discussion pré-show passionnée, le trio officiant depuis 2012 me confiera d’ailleurs vivre une sorte de rêve éveillé en partageant l’affiche avec l’une de leurs influences majeures, petits veinards qu’ils sont.
Et effectivement une fois que les planches se mettent à vibrer, un fort arrière goût QOTSA-ien émane des compos des lyonnais, mais celui, plus désertique, des débuts, mélangé toutefois à des ambiances plus sombres, des touches plus grunge. Une fois, découverte oblige, les sempiternelles étiquettes accolées, on apprécie le déploiement sonore du combo : la basse punchie de Guillaume ronfle et groove comme il se doit, Nicolas et sa gratte prennent un malin plaisir à varier les sonorités, appuyés par la panoplie d’effets inhérente au genre. Son chant vient des tripes, renforçant ainsi la véhémence des morceaux. Tout juste notera-t-on un léger manque de justesse sur les parties aigües les plus exigeantes. Derrière les fûts Kevin est loin d’être avare en dépense énergétique et en mimiques dont seuls les batteurs ont le secret, et le fait d’avoir un bassiste gaucher jouxtant un guitariste droitier apporte une symétrie scénique plutôt sympathique visuellement.
Mention spéciale au dernier morceau sur lequel on est invités à fermer les yeux et voyager, un petit quart d’heure plus aérien et bien senti qui s’achèvera en larsens, mariés aux applaudissements d’une audience qui ne s’y est pas trompée.
Une bonne découverte, assurément un groupe à suivre dont on aura l’occasion de vous reparler.
“Jamais vu autant de tracteurs de ma vie, quel merdier !” C’est un Nick fatigué et limite bougon qui arrive enfin à Décines, depuis Nantes, avec quelques bonnes heures de retard, bloqué par les agriculteurs mécontents. Tout s’est décidément réuni ce soir pour qu’on se demande à quelle sauce on va bien pouvoir être mangés ce soir…
Après évacuation du superflu sur la scène, c’est à dire tout sauf un ampli et une table nappée, ornée de breuvages d’origine belge ou mexicaine, l’homme qui autrefois s’amusait à jouer à poil va se mettre à nu devant nous. Dès son entrée, tout sourire (ouf !), il instaure une proximité avec son public à coups de vannes et de bonne humeur communicative, déclenchant instantanément l’hilarité des (plutôt nombreux) anglophones présents et détendant l’atmosphère en deux coups de médiator.
Place à la musique, et le bonhomme va passer, à la moulinette acoustique donc, une partie forcément non exhaustive de sa riche discographie. Il ne faut que très peu de temps pour qu’enfin la double centaine d’oreilles présente mette le doigt sur tout l’intérêt de cette tournée solo: se faire plaisir et nous faire plaisir. Se faire plaisir en déterrant avec brio des morceaux loin d’être connus de tous, surfant sur les vagues punk, rock ou blues chères à son cœur, et nous faire plaisir avec des relectures personnelles et appréciées de quelques morceaux de qui-vous-savez.
A peine planqué derrière sa guitare, Oliveri se fait tantôt furieux, tantôt d’une douceur presque insoupçonnée, six-cordes maîtrisée qui semble en fait servir d’appui pour permettre à sa voix si particulière, stridente, possédée mais chaleureuse et envoutante, de s’exprimer au maximum de ses capacités, nous laissant littéralement en admiration devant tant de sincérité et de passion.
Chaque entre-morceaux est prétexte à se réhydrater, s’auto-chambrer sur son passé, offrir une bière au public, ou encore carrément nous inviter à faire la fête avec lui sur scène pendant “Feel Good Hit of The Summer”, laissant même le micro à qui veut, simplicité, intégrité, classe.
Si j’avoue bien volontiers ne pas être un aficionado des tous ses projets, les conditions de ce soir proches d’un showcase ou d’un concert privé, promiscuité et convivialité, nous auront permis de découvrir l’Artiste sous un autre angle, le plus spontané et honnête qui soit.
En témoigne, si besoin était encore, cet after collectif émaillé d’anecdotes de route toutes plus croustillantes les unes que les autres. Notre quadragénaire insatiable finira même chez Fraise, tatoueuse du coin, histoire d’immortaliser sur sa peau ce moment de partage musical et humain.
Double, voire triple pouce en l’air, pour Néron qui a eu l’œil, pour les gens qui l’ont aidé, ainsi que pour Jo Riou, illustrateur pour de plus en plus de groupes dans la nébuleuse, descendu spécialement de Paris avec tout plein de chouettes affiches, notamment celle de ce soir, et félicité pour son travail par Nick himself qui repartira avec quelques posters à afficher dans sa chambre d’éternel ado.
Et bien sûr bravo aux quatre musiciens du jour, messieurs vous avez assuré et messieurs-dames, ce fût une soirée fort agréable !
(Crédits : poster par Jo Riou, photos par Noodle Photography)
Grasse semaine. Après Red Fang et Eyehategod, troisième concert d’affilée, cette fois au Blogg et gratuit. Il me tardait de découvrir l’endroit et voir les parisiens Dot Legacy confirmer la qualité de leur premier album en live, saupoudrés de deux groupes locaux.
Alors ? Y’avait-il de la bière ? Réponse sans images :
SORENSEN :
C’est 20h30, deux p’tits jeunes qui doivent pas trop être habitués aux mauvaises notes, amis de longue date et heureux profiteurs d’un double désistement prennent place pour ouvrir la soirée et c’est parti pour un duo guitare/batterie des familles !
Direct ça sonne, ça joue bien, les morceaux sont plutôt bien construits, alambiqués mais pas trop pour rentrer dedans. Selon les plans distillés on navigue entre riffs couillus, mélodies chiadées mais pas à chier et arrangements travaillés bien sentis.
Mon collègue (bassiste) me glisse, ou plutôt me braille dans l’oreillette qu’il manque quelque chose et ira leur proposer ses services après leur set, apprenant que le line-up n’est pas fixé et qu’il y a des (grosses) cordes en plus sur l’enregistrement. Effectivement le spectre sonore mériterait d’être un brin plus rempli mais avec un son de gratte gonflé et retravaillé on sent que la formule pourrait fonctionner à merveille tant ces deux-là semblent se connaître par cœur.
Sacrément prometteurs donc, malgré quelques rares imprécisions et un manque de conviction (dixit Arthur le batteur) sur les interventions de Martin entre les morceaux. On leur pardonnera volontiers ces petits détails, les potes et les autres applaudiront de plus en plus chaleureusement leur prestation, ponctuée par un forcément efficace Twenty de “Si-tu-sais-pas-qui-tu-t’es-planté-de-site”. Bière.
GOATFATHER :
Changement de cours de récré avec Papa Chèvre, second groupe local d’une soirée assez pauvre en son clair. On passe de deux à cinq sur la sympathique scène du Blogg, du coup devenue plutôt exigüe, en particulier pour l’immense et jovial chanteur, ainsi que pour le pauvre bassiste qui se retrouvera planqué derrière un des deux gratteux tout le long du concert.
Le set démarre à sec, les nuques se meuvent machinalement et les pieds tapinent tous seuls. Ouep, Goatfather c’est du stoner burné et rock ‘n’ roll à souhait, pas franchement original mais franchement efficace. Chaque compo est une “vraie” chanson avec son lot de riffs difficilement résistibles, ses paroles parlant des trucs qu’on aime bien ou qu’on aime pas, ses breaks parfois convenus et ses solos
qui mériteraient d’apporter un peu plus aux morceaux à mon goût, ça viendra j’en doute pas !
Le tryptique grattes-basse forme un ensemble compact, les trois compères-chèvre jouant assez souvent la même chose, le cogneur quant à lui donne pas mal le ton, avec des coups de cowbell par ci par là. Bière, flasques de whiskey pour les zikos.
Une reprise de Viking Skull annonce bientôt la fin, on sent les zikos concentrés et pas encore complètement à l’aise sur scène, alors le frontman, terme trop rarement utilisable, fait le show. Présence, voix frelatée, humour et Goat-Pro, un crâne de bouc affublé d’une caméra dont Olaf le bien-nommé se servira pour arpenter le public qui finira avec un grand sourire aux lèvres. Bière.
DOT LEGACY :
Le sourire aux lèvres, les quatre capitaleux de Dot Legacy l’auront tout au long de leur set mais au vu du matériel qu’ils utilisent, sont clairement pas venu enfiler des perles… Ah ben si en fait, mais des perles de leur premier et très bon album mélangeant avec brio musique du désert à des passages planants, hip-hop ou encore surf (!!), le tout enrobé d’un travail de voix (auquel tout le monde participe, parfois à capella, en espagnol et/ou en canon) à couper le souffle et une mise en son quasi parfaite ; attends, ça s’appelle pas la claque ça ?
Les mecs ont de la bouteille, sont clairement là pour en découdre et ça se confirme dès les premiers accords, chacun est à fond et maîtrise pour le moins son sujet, ça bouge de partout même le batteur ne tient pas en place et se lève à la moindre occasion, bref ça envoie. Un peu trop d’ailleurs, le sonomètre est dans le rouge et le groupe devra se baisser, mais juste un poil, faut pas déconner.
Damien, bassiste/chanteur, utilise un deuxième micro pour moduler son chant juste et inspiré, le saturant ainsi sur certains passages, nous délectant dans le même temps d’un jeu de basse fourni, varié et parfaitement audible, Arnaud le gratteux bondissant ne prend même pas le temps de poser sa six cordes pour balancer un peu de clavier de temps à autres et John de l’autre côté termine de remplir l’espace, complet, à l’aide de gros riffs ou d’effets du plus bel… effet.
Tiens, c’est presque la fin et je remarque seulement que la salle s’est honteusement vidée, comme partout apparemment une fois que les potes ont joué on se casse…
Tant pis pour eux Félix, chef d’orchestre, qui visiblement n’aime vraiment pas trop être caché derrière sa batterie, est loin d’être en reste avec son jeu tantôt subtil tantôt bourrin, ses grimaces et son corps d’éphèbe qui suscite une certaine jalousie de ses camarades, vu qu’il sera sujet à quolibets en fin de show (c’est le mot), entrecoupés d’un gros riff en guise de censure. Devant moi deux mecs (de l’équipe desert-rock) prennent leurs pieds comme des adolescentes, mais barbues, bière(s).
Ce premier concert au Blogg aura été une première claque et de premières bonnes découvertes locales, espérons-en d’autres bientôt !
Après deux jours de festival, nous ne sommes plus aussi vigoureux qu’au premier jour. Le lever suivi du petit-déjeuner en mode quick and dirty a un peu plus d’inertie, mais c’est pas à des vieux babouins comme nous qu’on va la raconter…
On reprend la même équipe, la même soucoupe spatiale et la même soif de décibels pour rejoindre le même open air. Tout comme la veille et l’avant-veille : il fait beau, sec et chaud (tout comme d’hab’ dans cette région nous murmure-ton dans les oreillettes) et c’est sans surprise que la Valley sert à nouveau de refuge aux ennemis du soleil en plus d’être la seconde maison des aficionados de notre style de prédilection. On échange quelques impressions au sujet des shows de la veille, on se réjouit de voir la Nouvelle-Orléans bien représentée sur scène en ce dernier jour et on débat aussi des heures de départ, des itinéraires, du job qui repointe sa fraise (et ça c’est pas glamour du tout) etc… Enfin bref alors que certaines pouliches sentent l’écurie, que certains canassons accusent la fatigue (voire paient cher leur habitude nouvelle de se taper une carafe de pisse plutôt qu’un verre de taille usuelle) et que les yearlings s’émerveillent d’un rien, les pur-sang que nous sommes sont dans les starting-blocks pour une nouvelle journée dédiée au Dieu Stoner.
WITCHTHROAT SERPENT
Comment se faire Electric Wizarder de bon matin ? T’as passé un bon samedi soir et tu veux retrouver les tréfonds et les tourments de l’âme, la poisse bien noire qui colle à la joie ? Les toulousains sont les anti-Zebda et vont le prouver en ce début de dernière (sniff) journée de festival. Riffs lourds et lancinants, les cordes graissées à la suie et les fûts remplis de pétrole, le trio déroule un set gluant porté par l’armée de subs au garde à boue en devant de scène. Du gros doom dégueu qui, par moments, perdra de sa force quand les zicos perdront la cohérence et l’unité nécessaire. Un mal vite récupéré et une belle ouverture de troisième jour devant un parterre attentif et heureux devant tant de souffrance. Les groupes français n’auront pas démérité, loin de là, au cours du festival, et on aimerait les voir un peu plus haut placés dans le running order pour la prochaine édition.
DEATH ENGINE
Groupe du cru, remplaçant du groupe qui remplaçait le groupe qui n’a pas pu, Death Engine ne rentre pas dans la ligne éditoriale de votre webzine préféré mais ils nous a quand même sacrément retourné avec leur noise obscur teinté de hardcore servi dans un écrin violent de prestation. 11h40, la mandale est violente et la découverte belle. Merci messieurs.
SOFY MAJOR
On ne va pas vous mentir, c’est un peu le chaos dans le running order de la Valley ce matin : après l’incorporation de Death Engine, c’est maintenant aux auvergnats de Sofy Major de se retrouver bombardés invités de cette prestigieuse scène. Un peu inhibés par cette opportunité, le trio n’est pas franchement débridé sur scène, même s’ils font le job, à savoir se faire connaître. Sur le papier, on pouvait craindre un délire bruitiste prétentieux, mais il n’en est rien sous nos yeux : sur une base effectivement bien noise, les clermontois alignent les riffs et les rythmiques massues susceptibles de satisfaire bon nombre d’amateurs de stoner, et peut même se targuer, c’est rare dans cette veine musicale, d’avoir des passages au groove naissant… La démonstration sur le moyen terme s’avère convaincante : loin d’être pompeux et ennuyeux, le groupe aligne les compos énergiques et plombées, et convainc un public un peu disséminé, mais réactif et apparemment appréciatif. Bonne performance, un peu hors sujet peut-être, mais pas si éloigné de nos affinités premières.
RED FANG
Nous avions été positivement impressionnés lors de l’annonce des groupes du Hellfest par la présence de Mastodon sous la Valley, un groupe habitué aux Main Stages. A l’inverse, voir les “habitués” Red Fang (deux Hellfest déjà dans la besace) émigrer vers la Main Stage ne nous a pas forcément rassuré. Souvenirs mitigés des groupes que nous affectionnons (Crowbar par exemple ?) jouer sur ces scènes impersonnelles, au son approximatif, sous un soleil de plomb… Bingo, on prend les mêmes et on recommence ! C’est donc sous un soleil de plomb que l’on gagne la scène principale pour aller retrouver les quatre musiciens un peu perdus sur cette scène bien trop grande pour eux. Ils se sont d’ailleurs positionnés au milieu (derrière un grand backdrop qui apparaît minuscule au fond de ce gigantesque volume), bien près les uns des autres, seul Bryan Giles se mouvant un peu hors de son emplacement, parfois. On est un peu alertés par la qualité du son au début, mais très vite, il devient juste impeccable, et ce à différents endroits dans la fosse. Une fosse étonnamment assez animée, d’ailleurs : même si le public est au mieux attentif passé le milieu de la fosse, il reste impliqué, souriant, ondule en rythme et gueule pour célébrer chaque fin de morceau. Le quatuor a quarante petites minutes pour convaincre, pas le temps de papoter (les échanges avec le public sont brefs), ils déploient l’artillerie lourde direct, pas de quartier. Il faut dire que le combo s’y connaît en compos efficaces : le duo “Hank is Dead” / “DOEN”, “Wires”, “Blood Like Cream”, une version légèrement accélérée de “Wires”, “Malverde”,… En gros, on va pas se plaindre, c’est vraiment le point fort de Red Fang. En terminant, on en a pris l’habitude, sur le classique “Prehistoric Dog”, ils sortent de scène sous les applaudissements nourris (et mérités) d’un public qui est prêt à leur manger dans la main. On s’attendait au pire, on a eu du très bon. Comme quoi…
RUSSIAN CIRCLES
Quand vous les voyez arriver, vous ne pouvez pas dire qu’un élan de charisme vous domine… Et puis, les instruments branchés, la vague déferle. Puissante, immense. Là ou Godspeed You ! Black Emperor emploie entre sept ou huit musiciens pour emplir le spectre sonore, Russian Circles le fait à trois. Et le fait bien. Le voyage est aérien, psychédélique, post-truc, stoned bourrin, il leur est propre, ça c’est certain. Les nappes superposées par les cordistes puisent leurs forces dans l’entrelacs rythmique que créé le batteur. Ce dernier caresse son charley autant qu’il martyrise ses toms, défriche les terrains pour faire place et honneur en grande partie à « Memorial ». Ça écarquille grand les mirettes dans le public à l’écoute du live et de son interprétation. La communication, minimale, permet de rester dans chaque seconde de silence entre les morceaux. On ne décroche pas un seul instant, bercé par de nouvelles nappes aériennes avant d’être frappé à nouveaux par la puissance des compos. Un vrai bon concert du Hellfest, qui aura grandement participé à la haute teneur qualitative proposée en ce dimanche de fête de la musique.
WEEDEATER
Quand le régisseur vient chercher Dixie Collins à l’heure de commencer le set, tandis qu’il sirote tranquilou une bouteille de Jack Daniel’s avec Jimmy Bower, on se dit que niveau professionnalisme, engagement et investissement émotionnel dans le set, on est pas au top du côté de ces branleurs de Weedeater. Pour parfaire le tableau, le bassiste se comporte comme le dernier des clodos durant le set, tétant sa bouteille carrée à chaque occasion, projetant un filet de morve qui reste accroché à sa barbe une bonne part du concert, arborant un tee-shirt suintant de sueur, déchiré sur 50 cm sous le bras… La grande classe. Mais au final, ça passe. Faut dire que niveau gras, on a notre dose pendant quarante minutes. Le frontman déjanté au regard de maniaque n’est pas qu’un rigolo – il caresse sa basse comme si c’était une femme de mauvaise vie sur les trottoirs glauques de leur patelin de Caroline du Nord, faisant cracher par la même occasion des torrents d’huile de vidange des amplis (notons que ça manque un peu de pêche en façade sur la basse, mais encore une fois… l’essentiel est bien là !). Côté vocaux, le beuglard met à profit son stock de glaire quand il daigne aller lécher le micro, finissant l’enrobage de chaque titre. Le surcouche de goudron frais est apportée par le son de gratte de Dave Sheperd : le six-cordiste a beau avoir la présence scénique d’un plat de nouilles froides, il assure. Et que dire du jeu de batterie déjanté de Travis Owen ? Chargé de groove, la prestation du frappeur est inattaquable, et l’on pourrait passer le set entier à le regarder jongler, faire tourner et lancer ses baguettes, frapper sa cymbale avec le pied, grimacer… Et la set list dans tout ça ? Pfff, on s’en fiche un peu non ? Le groupe jouerait la même chanson pendant quarante minutes qu’on prendrait quand même notre pied à avaler des bidons d’huile de vidange en headbanguant. Il n’empêche, on ne boude pas notre plaisir de discerner des petites perles comme les duo “Turkey Warlock” / “Jason… The Dragon” ou encore les nouveaux et efficaces “Goliathan” / “Cain Enabler”. Mais l’essentiel n’est pas là. On ne sait pas vraiment où il est, d’ailleurs, l’essentiel… En tout cas on a pris notre dose de graisse et on a adoré.
EYEHATEGOD
On reste dans une galaxie plutôt bourrin avec une autre formation originaire des USA. Décidément, l’ultime jour est très axé grosses bûches made in America et de ça, nous n’allons pas nous plaindre (surtout qu’il y a un putain de niveau sur scène). Nous demeurons donc en compagnie de personnages rompus à l’exercice scénique pour une cinquantaine de minutes consacrées à la débauche musicale dans toute sa splendeur. A leur entrée dans l’arène, les vétérans de la scène de Louisiane ont une mine un peu moins joviale qu’au Freak Valley où ils débutaient cette nouvelle tournée. Mais comme ces garnements sont plein de ressources, c’est confiants que nous nous plaçons pour déguster les spécialités des bûcherons en chef. Du renfort de sécurité débarquera par ailleurs de la Warzone pour assurer la réception des crowd surfeurs qui vont s’en donner à cœur joie durant le set d’EHG. Le concert débute sur un titre récent : “Agitation ! Propaganda !” puis on exhume “Lack Of Almost Everything” avant de frapper très fort avec l’incroyable “New Orleans Is The New Vietnam” qui constitue toujours un temps fort des prestations de cette – pas si – fine équipe. La suite du show sera du même baril avec des titres anciens et d’autres extraits de la plaque éponyme sortie il y a peu (“Worthless Rescue” ou “Parish Motel Sickness”). Du Grand Art comme on l’aime. La prestation aura poutré jusqu’au final débridé habituel et le peuple de La Vallée signifie sa satisfaction au groupe qui quitte la scène. Après deux formations actives du côté obscur de la force, il va falloir patienter un moment pour se faire à nouveau botter le popotin (ou se reposer, ou se désaltérer, ou se bourrer la gueule sans avoir nécessairement soif) ; c’est quartier libre pour les moins de trente-huit ans pour presque trois heures.
LIFE OF AGONY
Difficile d’expliquer ce que vient faire Life Of Agony sous la Valley, alors que la Warzone, à moitié dédiée aux groupes d’émanation hardcore, semblait toute désignée pour héberger la prestation du groupe… LOA est une directe engeance de la vague new-yorkaise du genre, et même s’il a su injecter au fil des albums des aspects sombres et metal à sa musique (s’éloignant de fait de ses origines NYHC), le groupe reste stylistiquement plus proche d’un Sick Of It All que d’un Brant Bjork, par exemple ! Toujours est-il que l’excitation est palpable lorsque commence ce set improbable sous une Valley chargée d’affect : il faut dire que le quatuor, dont la vocaliste Mina Caputo était précédemment connue en tant que Keith Caputo (faut vous faire un dessin ?) drive la performance énergique du combo perpétuellement sur la brèche entre émotion pure (c’est un cliché que de faire allusion à un comportement très féminin ?) et puissance vocale inaltérée. La voir chanter presque trois morceaux complets dans le pit photo, à enlacer ses fans, leur parler, les faire chanter, enlacer les spectateurs handicapés, etc… est juste hallucinant. Mais bon, on est musicalement hors sujet dans ces pages… Disons néanmoins que c’était probablement l’un des meilleurs sets du week end.
SAINT VITUS
Retour en terres plus connues avec d’authentiques survivants des seventies. Plus tout à fait jeune, mais gardant une attitude terriblement infantile dans sa manière d’aborder ce set, Saint Vitus va botter des culs durant soixante minutes. Nous n’allons pas faire durer le suspens bien longtemps : Wino n’est pas de la partie et c’est l’autre bon vieux Scott (Reagers pour ceux qui sont dissipés) qui assure le chant pour un show d’excellent doom psychédélique vintage. Ce set très traditionnel verra se succéder des soli orgasmiques, des interventions tombant à plat de Dave Chandler (à la ramasse totale) et des titres d’anthologie. Nous assisterons aussi à un lâché de baudruches (vos limiers ont cherché en vain de trouver l’heureuse personne qui avait organisé ce dîner d’anniversaire…vous dire si nous ne sommes pas pro).
Question titres, après une attaque prometteuse sur “Dark World”, les Californiens demeureront sur Die Healing le temps d’un deuxième titre. Ce choix est cohérent compte tenu du fait qu’ils se produisent ce soir avec le vocaliste occupant cette place sur cet enregistrement. Dans le même esprit, ils ont aussi gratifié le public du Hellfest de titres issus de la première plaque légendaire de 86. Le setlist sur mesure a contribué à l’humeur joviale de leur chanteur qui sera très contagieuse puisque tout le monde a passé un sacré bon moment durant ce concert majeur. Il demeurera assurément un très grand moment de cette édition tout comme ceux délivrés le même jour par Weedeater, Eyehategod ou Red Fang. Il est à mentionner que le public n’a pas été le seul à communier avec ce groupe faîtier de ce genre puisqu’une grosse représentation des formations citées deux lignes plus haut, ainsi que de Superjoint Ritual qui se produira plus tard, était présente sur scène pour profiter de ce spectacle (et se désaltérer en communiquant avec le groupe qui joue ; normal). Malheur aux absents, ces gens sont vraiment passés à côté de quelque chose. Forcément le show se termine en apothéose alors que commencent à débarquer dans la Valley quelques têtes croisées ces derniers jours en d’autres lieux. Étrange…
SUPERJOINT
… ou pas en fait. Superjoint Ritual – dont une partie de l’équipe de Desert-Rock boudera la performance qualifiée de pas stoner – va se produire pour mettre un point final à ces trois jours de furie et d’amour dans la Valley. Un indice ne flouera personne à l’approche du début du concert : il y a une putain de queue du côté des photographes qui veulent immortaliser ce concert historique. Il y a aussi, parmi la foule, des nostalgiques des nombreuses formations emblématiques auxquelles leur leader Phil a participé. Il est à mentionner que Monsieur Bower effectuera son deuxième concert de la journée en ces lieux après celui d’EHG.
Le concert a démarré avec un peu de retard, mais les fans – appelons les choses comme il se doit – ont frisé l’orgasme durant un set qui a été constitué principalement de titres issus du splendide “Use Once And Destroy”. Anselmo a tenu le crachoir comme d’habitude et quelques extraits de “A Lethal Dose Of American Hatred” sont venus pimenter un peu ce set très pro qui a fait des heureux parmi de nombreuses tribus de la grande nation metal.
Une journée de grande classe (dont un résumé visuel traduit un peu l’ambiance au pied de cette page) qui fait suite à deux autres du même tonneau. Des groupes généreux pour la plupart, un temps radieux, un public fantastique et une organisation au top ont constitué une cuvée anniversaire du Hellfest d’excellente facture. A l’heure de rendre sa quiétude au bled agricole, nous nous jurons de revenir nous faire bourriner la gueule sur la route qui mène de Nantes à Montaigu (la digue, la digue…) l’an prochain pour une nouvelle édition de folie ; what else ?
Deuxième jour d’envoi de steak dans la Valley des bûcherons et le ciel est un peu voilé en arrivant ce matin : la journée s’annonce bien pour ceux qui boudent la crème solaire. Les furieux ont l’air un tantinet plus glauques quand nous débarquons dans la place. Il y a du lourd aujourd’hui sur scène et quasiment que des formations qui n’ont pas une actu folle au moment de se produire ; les dernières galettes étant sorties depuis quelques mois au mieux.
Les programmateurs de cette scène, que nous chérissons trois jours durant, ont organisé cette journée comme la veille : du bourrin et du planant du milieu de la matinée aux petites heures du lendemain. Des vétérans ayant traversé les frontières du petit monde du stoner et des groupes à l’audience plus confidentielle se succéderont pour le plus grand bonheur de la joyeuse troupe qui passe son week-end de trois jours à l’ombre de cette structure. Nous croiserons dans la soirée un type qui nous demandera si on vient d’arriver, vu nos bronzages pas au top : non Monsieur, nous vivons cachés dans l’underground !
MACHETE
Difficile d’ouvrir une scène lors du deuxième jour de festival. L’effet sensation passé, l’effet cuite encore présent, les groupes de 10h30 doivent se donner plus que de raison pour espérer capter l’attention du festivalier matinal (sic) et embrumé. Machete y parviendra aisément par la grâce graisseuse d’un hardcore brutal et beuglard. Efficace. De quoi ouvrir esgourdes, intestin et gosier.
ELDER
La seule frustration du concert de Elder viendra de leur place dans la programmation de la journée. Second du running-order pour trente minutes de set – trop tôt, trop peu pour le formidable trio américain. Voir les nombreuses personnes se rameuter sous la Valley alors qu’il ne s’agit que des balances vous donne un indice sur la valeur du son proposé. Coupable d’un des meilleurs albums de 2015 avec Lore, Elder va littéralement donner une leçon de savoir-jouer, étalant ses maître-compositions sous une Valley remplie comme jamais pour une matinée. Le groupe jouera la carte de l’assurance en commençant par « Gemini » tiré de Dead Roots Stirring, glissera une nouvelle compo entre « Spirit at Aphelion » et « Compendium » Quatre titres au total pour un show maîtrisé de bout en bout. La section rythmique souriante et cohérente créera l’assise parfaite pour les solos et riffs de Nick di Salvo. Ce dernier n’hésitant pas à rajouter de la dynamique dans le chant, celle-ci faisant un peu défaut sur album. Une démonstration. De technique, de cohérence, d’écriture, la musique d’Elder est un hommage appuyé à ses 70’s références et le public ne s’y trompe pas. Les regards sont impressionnés, les avis positifs et enthousiastes et on n’est pas loin de penser que d’ici deux ans le groupe sera tête d’affiche de cette Valley, disposant du Hellfest, le soumettant par sa technique et sa fraîcheur.
MONARCH!
Après ce set bien gras et dégoulinant à l’américaine, il est l’heure de passer au prochain entremet alors qu’il n’est pas encore treize heure et que nombreux sont ceux qui vont se réfugier à l’ombre. Le public de festival c’est plus ce que c’était… Alors donc, ce nouveau plat du menu du jour de la gargote Valley nous provient en direct du Sud-Ouest. Quiconque suit un peu l’actualité des grandes émissions culinaires qui trustent le prime time de la petite lucarne (quoi ? La télé existe encore…), saura que ce terroir fait dans le costaud et le consistant : ça tombe bien on adôôôre ça ! La présentation est des plus soignée : bougies disposées sur le clavier qui est posté à l’avant de la scène et lights lugubres : ça va donner d’entrée de set. La tête de la basse est frappée contre le sol (pourquoi tant de haine ?) tandis que la vocaliste en cheffe – sapée comme une première communiante – se désaltère sous son clavier-autel avant de vociférer telle une folle et de capter instantanément toute l’attention du public alerte. Pour ce qui est du public moins alerte, celui-ci est carrément K.O. dans les cordes, assis assommé par la chaleur et les coups de boutoirs assénés par cette horde de fous. Quarante minutes de déluge sonore au rythme ralenti s’abattent dans la Valley ; les titres à rallonge sont aussi gras que l’humour des festivaliers et certains mâles poilus se produisant dans les tentes dites extrêmes feraient bien de s’inspirer un peu de la petite française à la blonde chevelure. Des titres comme « Blood Seeress » atteignent un niveau de puissance absolument phénoménale sur scène et les gastronomes – ceux qui ne se réfugient pas dans la valley uniquement pour éviter l’astre solaire – s’en paient une sacrée tranche. Au terme d’une déferlante d’une rare violence, Madame Shrek redevient Princesse Fiona pour remercier le public avec une sincérité touchante. On profite de la pause pour vaquer à d’autres occupations parce qu’il y a d’autres groupes qui jouent en d’autres lieux et que les prochains à égayer ze Valley se produiront une heure plus tard.
THE WOUNDED KINGS
Dire qu’on attend la prestation live des doomeux brittons de The Wounded Kings avec une pointe d’excitation est un lourd euphémisme. D’autant plus qu’on ne sait jamais vraiment qui seront les partenaires du guitariste Steve Mills sur les planches. On savait que la charmante Sharie Neyland avait quitté le groupe l’an dernier (snif) et que George Birch, le chanteur originel, avait dépanné le groupe suite à son départ soudain. On constate que le frontman au cheveu ras est toujours de la partie, officiant désormais aussi en second guitariste (ça fait des économies de personnel !). Un semblant de “vrai” groupe, enfin ? Quoi qu’il en soit, le groupe entame son set dans une Valley remplie (mais pas trop dense) d’un public curieux, mais qui peine un peu à rentrer dans le concert. Il faut dire que le groupe met une bonne dizaine de minutes à se roder, peu expressif, un peu crispé… A moins que nous en attendions trop ? Mais en se rapprochant du milieu de set, la sauce prend enfin, et l’alchimie commence à opérer. Les tempo lents à mourir associés à la torpeur ambiante (le climat de début d’après-midi est déjà lourd) appesantissent l’ambiance, et bien accompagnés d’un light show encore une fois excellent, ils finissent d’embarquer un public petit à petit conquis. La voix atypique (pour ce genre musical) de Birch joue à plein la carte du chant hanté, jouant de son tremolo pour mieux encore appuyer ses effets. Non dénué de charisme, il tient bien la baraque, même si ses collègues instrumentistes sont loin de démériter, qu’il s’agisse d’Alex Kearney, souriant et vif à la basse, ou encore l’impérial Mills, bien sûr, impeccable autant dans sa production de riffs que dans ses soli, avec de redoutables séquences en harmonie avec Birch. Au final, les rois blessés nous auront proposé un excellent set, d’un doom traditionnel baigné de fulgurances instru psyche du meilleur tonneau.
ASG
Bing ! Après les rois, place au quatuor de Caroline du Nord qui n’a pas son pareil pour foutre un beau bordel. Il faut dire que le sympathique groupe a acquis, au fil des années, une solide troupe de suiveurs bien au-delà de la scène purement stoner un peu comme d’autres formations dont Red Fang, qui se produiront le lendemain sur l’une des deux grosses structures du festival. Casquette de trucker vissée sur la tête, Jason Shi donne le coup d’envoi du show sur « Mourning On The Earth » balancée avec brio. Brio sera d’ailleurs le maître mot d’une prestation rondement menée par des musiciens (et poètes) aguerris. Le temps accordé à ASG pour s’exprimer est concis, le groupe envoie donc une anthologie de sa discographie en extrayant de son– trop – modeste répertoire les perles que sont « Right Death Before », « Blood Drive » ou « Low End Insight ». Aussi à l’aise dans les plans rapides que dans les ambiances plus ralenties, les Etasuniens foutent la patate aux nombreux spectateurs entassés sous la tente (et pas que pour y trouver de l’ombre) alors que la concurrence est rude question rock’n’roll à l’heure du goûter. « Day’s Work » restera un énorme moment de ce show, d’une rare intensité. A l’heure à laquelle les amplis se sont tus, la communauté de la Valley sourit béatement enchantée qu’elle est de ce concert d’excellente facture.
AHAB
Par l’on-ne-sait quel phénomène (tout à fait louable) on note avec surprise la présence assez haut sur l’affiche du quatuor doomeux teuton Ahab. Le combo de Daniel Droste et Christian Hector compte bien en profiter pour marquer les esprits. Sauf que…oui mais. On attendait beaucoup de ce set, n’ayant jamais eu l’occasion de voir les allemands jouer live. Mais cette rasade de doom léthargique calée entre l’énergie U.S. de ASG et le stoner groovy de Brant Bjork est dure à machouiller. Il faut dire aussi que scéniquement, les gars aiment se regarder jouer et faire la gueule (des allemands, quoi…), et ce n’est pas le charisme de prof d’histoire-géo de Droste qui va changer la donne (désolés, amis enseignants !). Musicalement, le trip Moby Dick n’est pas trop invasif (si ce n’est les bruits de vagues et les cris de mouettes un peu abscons entre les morceaux), et heureusement, les gars jouent impeccablement. Et c’est là que ces petits malins emportent finalement le pompon : derrière une scénographie à l’austérité toute Est-allemande dans son enthousiasme débridé, ils bénéficient d’un son brutal, et les séquences de pure agression doom qui alternent avec les plages plus planantes sont bien percutantes. Le chant subtilement guttural de Droste, en directe provenance d’outre tombe, vient compléter des passages où la dualité des guitares apporte des nuances intéressantes. On attendait de ce set une énorme claque ; musicalement, on n’a pas été très loin, mais on aurait sans doute aimé voir le combo allemand plus enthousiaste, mettre plus de cœur à l’ouvrage, même si l’exécution fut parfaite. Efficace toutefois… oui mais.
BRANT BJORK
Sans dec’. Y a t’il quelqu’un de plus cool que Mr Cool lui-même ? Autant le sieur nous avait bien scotché moins d’un an auparavant au Up in Smoke, au cours d’un show enlevé et frontal, autant aujourd’hui le Brant va se la jouer posay et chamanique. Mr a mis sa gratte sur « Smooth », catégorie grain tranquilou et va dérouler un set tout en vibes « Jalamantanesques ». Le groupe ouvre d’ailleurs le concert par la doublette « Lazy Bones / Automatic Fantastic », histoire d’annoncer la couleur. Le Low desert punk band envoie un groove chaleureux et limpide qui sent la cohésion et le bonheur de jouer ensemble. Le virus est contagieux. Il suffit d’une petite rotation est/ouest de la tête pour constater un immense sourire collectif. Les titres s’enchaînent de « Buddha Time » à « Boogie Woogie on your Brain » sans qu’une vague de saturation emporte la Valley. Non. Tranquilou on vous dit. L’ancien batteur de Kyuss maîtrise son sujet et dirige le concert comme un chamane guiderait une séance de prise d’Ayahusca. Bienveillant, toujours quelques petits mots bien placés et surtout, le dude croit en sa musique. Voyez ce final sur « Freaks of Nature » faire chavirer le public en une masse de groove poilu et d’amour. Putain de hippies ! Le concert du Bjork Brant ajoutera un peu plus de chaleur à cette journée déjà bien chargée, nous laissant plus serein et apaisé que jamais prêt à en découdre avec le reste du festival.
ORANGE GOBLIN
Après plusieurs passages sous la Valley ces dernières années, il apparaissait plus que légitime de voir le quatuor anglais parvenir à la tête d’affiche. Un honneur mérité pour un groupe qui ces dernières années n’a pas ménagé ses efforts. Grisé par cette perspective, on imaginait bien le groupe tendu, crispé par la pression. Ce fut tout le contraire ! Et il n’a pas fallu longtemps pour le constater. Voir le père Ben Ward et ses collègues débouler sur scène (après avoir passé la journée à regarder les autres groupes depuis le bord de la scène) avec le sourire jusqu’aux oreilles aurait dû nous mettre la puce à l’oreille… Ils rentrent dans le lard direct avec un “Scorpionica” toujours efficace, qui prend très vite une tournure électrique. Mais dès le pourtant moyen (sur album) “Devil’s Whip”, c’est le public qui devient électrique. Et à partir de là, c’est l’escalade : le groupe s’éclate de plus en plus, gagnant en confiance et en puissance, et le public prend son pied. Deux mondes qui communiquent : sur scène, papa Ward arpente la scène dans tous les sens, s’adresse au public en beuglant, Joe Hoare n’a jamais été aussi souriant et frondeur, Millard est toujours noyé sous cette masse de cheveux blonds, tournoyants non stop, et Chris Turner, dont le set de batterie pas trop loin de la scène le rend enfin visible, participe au show sans réserve. De l’autre côté des barrières, le public, sans trop que l’on comprenne exactement quelle en est la cause (mais on s’en fout), est incandescent, déchaîné : ça slamme, ça gueule, ça chante le poing levé… et le premier rang a la banane, lui aussi. Niveau set list, les gaillards se font plaisir, avec notamment une version de “Saruman’s Wish” qui ne fait même pas redescendre l’ambiance, et quelques petites friandises tel le punkisant “Your World Will Hate This” (issu du sous-estimé Coup de Grâce) ou le vieux “Blue Snow” (Time Traveling Blues). La fin, bien que très traditionnelle (“Quincy The Pigboy” et “Red Tide Rising”… surprise !) ne fait que sonner le glas fatidique d’un set qui aura laissé des traces, sur les corps et dans les têtes. Avouons-le, on a beau adorer Orange Goblin, on ne les pensait pas capables de décrocher ainsi la timbale. Grand.
TRIGGERFINGER
Le trio de dandys belges aura été selon certains l’une des sensations de cette édition du Hellfest. Il est, à notre sens, assez éloigné du style auquel nous consacrons ses pages. Leur rock’n’roll est certes efficace, mais pas franchement stoner avec ses plans popisants. Nous levons donc le camp afin d’aller poursuivre nos pérégrinations amorcées dans d’autres lieux après y avoir pris goût lors du bain de jouvence offert par Faith No More. Ah ouais, après la bande de Mike Patton, nous étions idéalement placés pour admirer le feu d’artifice concocté pour ce dixième anniversaire. La bande originale a d’ailleurs fortement contribué à notre régression. Il se murmure que Desert-Rock était ensuite présent lors des performances d’Obituary et de Venom (c’est bon là ? vous nous croyez quand on vous explique qu’on est retombé en enfance ?).
Nous allons ensuite glander ou nous trémousser (c’est selon) en attendant que tout le monde s’en soit pris suffisamment plein la gueule (et il y avait matière) pour lever le camp. Le temps de monter les désormais traditionnels aperçus visuels de nos tribulations (que vous trouverez en bas de page), de faire chauffer les accus, d’échanger un peu à propos de nos impressions sur des sujets forts vitaux et d’étancher notre soif, nous nous écroulons afin de profiter de quelques heures de sommeil vu la journée de bourrins qui se profile quelques heures plus tard…
C’est carrément au nombre de trois que nous nous sommes pointés à Clisson pour le grand raout de l’enfer qui trouble chaque année la paisible existence des culs-bénits de Loire-Atlantique et des environs. Pour son dixième anniversaire, le festival avait fait très fort question logistique et aménagements afin de proposer à ses festivaliers hauts en couleur une expérience encore plus intense (le festoche serait-il en passe de réaliser le doublé des awards européens ?).
En ce qui concerne la fameuse tente The Valley où la majorité des actes stoner se déroulent, point de grande évolution lorsque nous la comparons aux scènes voisines The Altar et The Temple qui ont gagné en volume (mais putain ces scènes super larges ça fait vraiment bizarre). Par contre, The Valley a régulièrement flirté avec sa capacité maximale durant ces trois jours idylliques que vous découvrirez, si vous n’y étiez pas (et ça c’est pas drôle), dans les lignes ci-dessous :
GLOWSUN
Le premier concert des trois jours du Hellfest est toujours l’objet d’une foule d’incertitudes : va-t-on pouvoir accéder au site et passer la sécurité assez tôt pour les voir ? Le groupe porte la responsabilité de donner le ton du week-end : sera-t-il à la hauteur ? Le son et la technique seront-ils au rendez-vous dès le premier groupe ? Pour la première fois depuis plusieurs années, on peut répondre positivement à toutes ces questions. En effet, le public massé sous la Valley avant même les premières notes du trio nordiste, et les échos captés ici ou là après le concert, nous laissent penser que pour une fois l’accès au site du Hellfest permettait à tout un chacun (qui s’y prenait raisonnablement tôt) d’assister aux premiers concerts. L’opportunité pour Glowsun de disposer d’une tente presque pleine, d’un public intéressé. La bande son du classique “Death’s Face” retentit pile à l’heure pour donner le départ d’une (trop) petite demi-heure de set, et d’un week-end exaltant sous la Valley ! Grosse pression donc, mais gérée de main de maître par les robustes lillois, désormais musiciens aguerris, qui maîtrisent leur prestation : aucun faux-pas instrumental, on sent Johan et ses collègues se donner sans réserve. Trente minutes, c’est peu pour découvrir l’univers musical complexe du groupe, et le choix d’une set list efficace n’est pas évident : quatre titres seulement seront donc proposés, deux anciens (des classiques, issus de Eternal Season) et deux nouveaux, “Behind The Moon” le premier “single” extrait de l’album, et le véloce “Arrow Of Time” pour conclure de fort belle manière un set sans temps mort. Le public ondule sur les séquences les plus atmosphériques et headbangue sur les passages les plus féroces, même s’il n’est pas aussi déjanté qu’on aurait pu l’imaginer (premier concert de trente minutes à 10h du mat, il ne faut pas rêver non plus !). Impeccable de bout en bout, le challenge est relevé.
THE MIDNIGHT GHOST TRAIN
L’effet buzz tourne à plein régime apparemment : voir The Midnight Ghost Train, tornade dévastatrice bien (re)connue de centaines de concerts en club, accéder à un public de plusieurs milliers de personnes, qui ont pour la plupart uniquement entendu parler de ses prestations hautes en couleur, ça fait chaud au cœur. Trente minutes pour conquérir ce public de curieux représente un challenge que nos trois furieux rednecks se sentent prêts à affronter – et il ne leur faut pas plus de trente secondes pour nous en convaincre, dès l’intro “Along The Chasm” où le furieux binôme de cordistes se déchaîne et propose déjà la première d’une longue série de leur traditionnelle routine de cette sorte de headbanging en quinconce face à face qui leur est bien propre. Les gouttes de sueur commencent à perler en masse tandis qu’ils enchaînent le dévastateur trio qui introduit aussi leur dernier album. Associé à “No. 227”, cette séquence vise à casser les tibias d’un public qui n’en demandait pas tant, et y parvient pour l’essentiel. Démonstration étant faite, “Straight To The North” permet de montrer la face plus groovy du trio. Au final le groupe n’aura joué que des titres de son dernier album, un choix fort judicieux finalement, avec le pied sur l’accélérateur (chaque titre paraît joué avec plus de pêche encore que sur l’album !). Sur scène, le groupe donne ses tripes exactement comme on l’attendait. Dans le public, ça fonctionne aussi, mais encore une fois, l’inertie des grosses foules, le phénomène “matinée”, et un son de gratte en façade franchement famélique (donnez-moi plus de gras, diantre !) ne permettent pas de déguster le set comme on aurait pu l’espérer. Il n’empêche que le groupe a ravi plusieurs milliers de personnes, comme le mentionne Steve Moss sur la fin du set : “If you’ve never seen us before, now you know what the fuckin’ deal is”. L’essentiel est fait.
SAMSARA BLUES EXPERIMENT
Après le rock barbecue des ricains, le running order nous conviait à un plat plus digeste et aéré en provenance d’Allemagne. Samsara Blues Experiment investissait la scène, cheveux soyeux et moustache fluette, à grande dose de delay et de longues plages psychédéliques. Il nous tardait de tester la formule trio dispensée depuis 1 ou 2 ans tout de même afin d’en goûter la force ou d’en déceler les faiblesses. Pas de surprise, la recette est depuis longtemps éprouvée et efficace. De Causa Sui à Colour Haze en passant par certaines galettes de Acid Mother Temple, les passages saturés puisant leur force dans les longues expérimentations claires et groovisantes restent le fruit de Samsara. Le set tournera un peu en rond cependant sur ces plages d’impro, la voix aurait mérité un peu plus de puissance aux entournures et l’on n’aurait pas craché sur un peu plus de communication entre le groupe et l’auditoire acquis à sa cause. Reste un set frais et cohérent qui aura eu le mérite de rafraîchir les esprits et les corps en cette journée grasse de programmation. Une pointe d’amertume cependant tant ce Blues Experiment pourrait aller plus loin mais en quarante minutes on ne va pas leur demander l’absolu.
TRUCKFIGHTERS
Les trois suédois connaissent déjà la Valley pour y avoir joué il y a deux ans, en ouverture de journée. Logiquement, ils gagnent trois petites places dans l’ordre d’apparition du jour et viennent donc dans l’objectif de fuzzer quelques culs à l’heure de la digestion. Bon présage, “Desert Cruiser” est à nouveau utilisé en intro, avec son riff qui fait mouche à chaque fois. Dotés d’une grosse paire de cojones, ils enquillent directement vers le roboratif “Mastodont”, dont la bonne douzaine de minutes propose quelques moments de grâce, mais aussi des plages plus atmosphériques qui coupent un peu la dynamique du set. Il en va de même sur “The Chairman” (même cause). Heureusement la sauce reprend lorsque le groupe choisit “Mind Control” pour la suite, un des titres les plus directs du dernier album (notons que deux tiers de la set list est composée de titres issus de leur dernière galette, Universe). Côté public, comme dans la vraie vie, il y a deux profils : ceux qui s’éclatent, dégustent le fuzz jusqu’à la dernière goutte, slamment et headbanguent sans réserve. Et les plus dubitatifs, qui ont beau reconnaître la qualité d’une bonne part du catalogue du combo, se lasse de voir son pois sauteur mexicain (A.K.A. Dango, le guitariste) faire des sauts de cabri à la moindre occasion, de manière irrationnelle, et ce quelle que soit la dynamique ou le rythme de la chanson jouée. Ce comportement scénique “extrême” étonne et détonnera toujours un peu, il est vrai. Il n’empêche que l’on ne pourra jamais reprocher au groupe de se la jouer facile et de se regarder le bout des chaussures pendant trois quart d’heures (suivez mon regard un cran plus haut sur l’affiche). Et puis en terminant par le vieux méconnu “Gweedo-Weedo”, le combo scandinave est assez courageux pour ajouter une surprise et une vraie prise de risque dans une set list de quarante minutes comprenant seulement cinq chansons. Cojones, on vous dit !
ORCHID
Après le groupe dans le trend du moment, nous retrouvons une valeur sûre de la scène hard rock seventies dans le sillage du Black Sabbath originel. Nous les avions déjà admiré au Freak Valley et nous attendons donc à un set de qualité équivalente, même si les Californiens ne headlinent pas sur ce coup là. Pensez donc, il est à peine l’heure officielle du thé lorsque le quatuor envoie son premier titre à nouveau issu du EP Sign Of The Witch, qui commence sérieusement à se faire attendre. Tout comme deux semaines auparavant, Orchid aligne plusieurs titres de cette pièce à venir (et tout pareillement qu’à cette occasion, le chanteur potasse son énorme recueil de paroles entre les titres afin de ne pas se gourer). Le concert est court : moins de trois quart d’heure et il n’est pas question ici de badiner. La formation enchaîne donc les morceaux sans interagir plus que nécessaire avec le public ; ça tombe bien, ce n’est pas vraiment leur point fort. La Valley remue timidement sa nuque alors que quelques pièces notoires du répertoire des Ricains sont alignées en cette fin d’après-midi. Naturellement, les nostalgiques des années septante sont aux anges lorsque « The Mouths Of Madness » ou « Eyes Behind The Wall » sont jouées. Le t-shirt Nazareth (il faut oser nous vous l’accordons), le gilet à franges (il faut là aussi être carrément cascadeur) ainsi que le tambourin (nous notons encore l’audace de certains) agité durant certains soli apportent un rendu vintage à ce show bref et très efficace balancé devant un backdrop sobre frappé des armoiries de ces gars. Une nouvelle réussite à mettre à l’actif d’une formation inspirée par un style d’un autre temps qui poursuit efficacement son malhomme de chemin sans coller aux tendances de la mode, mais en devenant – au fil du temps – une référence d’un genre déserté par ses vieilles gloires. Vivement la prochaine occasion qui nous sera donnée de voir Orchid si possible en salle ou alors plus haut sur l’affiche afin de se taper un peu plus de leurs fabuleux titres. On remballe fissa sur la scène afin de se préparer à un ouragan de riffs.
HIGH ON FIRE
Avec un temps de jeu raisonnable (presque une heure) et un créneau horaire sympa (fin d’aprem, avant l’apéro, en gros !), le trio de bourrins U.S. High On Fire a toutes les cartouches en poche pour bien démonter une Valley qui n’attend que ça, le sourire aux lèvres. La démonstration tourne vite au carnage d’ailleurs, tandis que le set commence par le gros “The Black Plot”, qui introduit le nouvel album du groupe, le tout chaud Luminiferous (à sortir quelques jours après cette prestation, mais qu’une part du public connaît apparemment déjà). Double crosse-caisse, grosse basse nerveuse, riffs de guitare bien gras occasionnellement remplacés par une poignée de soli impeccables, le tout enjolivé (!!) de la plus belle voix goudronneuse de monsieur Piquet : l’équation est pourtant simple (et HOF n’a jamais prétendu à une originalité débordante) mais l’efficacité de la machine qui laboure les boîtes crâniennes de la Valley sous nos yeux est redoutable. Le public ne s’y trompe pas, jamais aujourd’hui le pit n’a été aussi chaud et les slammeurs aussi nombreux. La programmation sur ce créneau précis aura quand même un peu desservi le trio nord-californien, en faisant jouer en même temps d’autres gros bourrins (Sodom et Dying Fetus), mais la Valley est plutôt bien remplie, et les présents se satisfont d’une set-list se rapprochant assez d’un best-of. On y retrouvera des titres de toute la discographie du groupe (allez, pour les puristes, on précisera que “Surrounded By Thieves a été mis de côté), que du bon : “Cometh Down Hessian”, “Rumors of War”, “Fertile Green”, ou encore le terrible “Slave The Hive” que l’on connaît depuis quelques mois en exclu issu du premier album. Bon, après la première demi-douzaine de barres à mines dans la nuque, on aimerait quand même entendre un peu de variété (le lourdinque “10,000 years” apparaît presque délicat dans ce contexte…). Mais on n’a finalement pas le temps de se lasser et on prend notre claque comme tout le monde. Papa Pike a la pêche, même si le gars est bouffi de partout (on ne parle pas que de son spectaculaire beer belly…) : ça n’a jamais été une bête de scène, mais le bonhomme n’est pas non plus apathique, et délivre ses offrandes sans déplaisir, apparemment. Avec une mise en son d’excellente facture, il aurait été difficile de faire plus dévastateur. Contrat rempli.
ENVY
Alors, certes, nous sommes chez desert-rock, mais on va quand même écrire quelques phrases sur Envy. Parce que les japonais étaient déjà venus pour le Furyfest et qu’ils ont, une fois de plus, envoyé leur gros post-rock/screamo nippon dans les esgourdes du public. Et même si la formation dépareillait dans la prog, force est de constater qu’ils ont fait le taf et de fort belle manière.
MASTODON
Après avoir foulé les grosses structures du Hellfest, Mastodon revient dans un cadre nettement plus adapté à son art (et c’est tant mieux pour nos gueules), en tant que headliner de la Valley. Ceci à l’occasion d’une tournée européenne très axée gros festivals, mais qui les vit aussi s’agiter sur des scènes à taille nettement plus humaines. Un de nos rédacteurs aura eu la chance de les voir à deux reprises durant cette semaine puisque la tournée s’est arrêtée un soir à l’Usine de Genève pour un concert au setlist très proche dans une salle ayant une capacité inférieure à mille spectateurs. Bref, l’orga propose une grosse pointure rompue à toutes les configurations scéniques envisageables qui va nous gaver de son style véloce et hyper technique. Bien qu’assez éloigné du stoner pur beurre, Mastodon a commis jadis quelques pièces fort prisées par la communauté. Nous nous permettons donc de nous arrêter quelques instants sur ce show qui débuta de manière pas étonnante sur « Tread Lightly» qui fait office d’ouverture sur ce tour. Comme quelques jours auparavant, on est frappé par la clarté du mix ; ces types-là ont de la bouteille et ça s’entend. On remarque aussi qu’un membre du crew passe le concert à réaccorder les instruments sans interruption puisque les grattes changent à chaque morceau côté jardin (et moins fréquemment côté cour). Proposant un énorme bordel (très) organisé qui voit les protagonistes s’échanger régulièrement le lead et déverser chacun un nombre de notes à la minute impressionnant, ce n’était pas gagné d’avance d’avoir un rendu permettant de discerner les différentes interventions sous une tente à l’occasion d’un festoche dont ils ne squattaient pas l’une des principales scènes. Toujours aussi classe en ce qui concerne l’entretien capillaire et le style vestimentaire, le quatuor a envoyé la sauce de manière fort qualitative durant l’heure qui leur était allouée ; c’est peu ! Ca a permis de se cogner une grosse part de Once More ’Round the Sun, agrémenté d’un soupçon de titres plus anciens, mais malheureusement – et c’est ainsi depuis quelques années déjà – beaucoup trop peu d’extraits tirés des trois premiers chefs-d’œuvre qu’ils ont sortis en début de carrière. Nous n’allons pas bouder notre plaisir : « The Motherload » avec ses différents vocalistes a été un très bon moment quand-même. « Black Tongue» de The Hunter a poutré en diable et on s’est un peu rabiboché avec le groupe en entendant « Megalodon » survivant d’une autre époque. C’était très bien, mais beaucoup trop court à notre sens. La structure se vide sitôt la fin du set afin que les quidams rejoignent d’autres scènes à la programmation alléchante (et peu stoner), le dernier acte de la journée (peu stoner) se déroulant plus d’une heure après.
WOVENHEAD
Retour dans la Valley (lalilala…) pour la formation étasunienne qui était la dernière à s’y produire en cette première journée. Actifs dans un registre très éloigné de celui que nous chérissons dans ces pages, nous n’allons point nous étaler sur la performance suivant la grosse baffe envoyée par leurs compatriotes précédents. C’est dans une Valley (de la mort) que quelques bipèdes ont tangué une heure durant au son (clair) de leur rock underground apaisé empreint de sonorités country (tout un programme que nous laissons à d’autres).
Le temps d’aller considérer aussi la programmation proposée en d’autres lieux (le temps n’est pas resté sans effet sur Judas Priest…), de se retrouver au milieu de la foule (qui nous emporte) et de taper la causette avec deux/trois quidams connus de nos services, le temps est venu de reprendre la route afin d’aller monter le résumé visuel du premier jour (cf. ci-dessous), de faire charger les batteries des appareils et des types qui se sont levés à l’aube (aussi un peu car nous ne sommes plus tout jeunes et qu’il nous faudra des forces pour affronter la suite de cette aventure pleine de promesses ).
Après une courte nuit de sommeil (ben quoi, vous croyez que ça se monte en un claquement de doigt les petits résumés visuels amateurs que nous vous livrons en plein festoche comme celui de cette troisième journée que vous pourrez revoir en bas de cette chronique ?) de laquelle nous avons eu de la peine à émerger, nous reprenons les mêmes types et les mêmes accessoires pour rallier le même lieu où tout se passe. Nous arrivons à l’heure convenue au Freak Valley après avoir discuté avec un sympathique trio grec qui matait la vidéo que nous avions réalisée le premier jour.
TOMBSTONES
Nous traversons à nouveau le périmètre du festival (ce qui équivaut à se rendre d’une Main Stage à l’autre au Hellfest) pour aller nous foutre au soleil devant la petite scène vu que toutes les places à l’ombre sont déjà squattées (on en connaît certaines qui auraient mieux fait de s’y rendre depuis le premier jour, mais nous disons ça, nous ne disons rien…). En guise de petit-déj’ (et oui l’horloge du clocher de l’église n’a pas encore sonné les douze coups de midi), c’est les vikings de Tombstones qui balancent du bourrin de grande classe tandis que parmi le public ça déjeune sportivement à la cervoise et que les plus babas désertent rapidement l’endroit pour aller chiller sur les nombreux sièges à dispo encore humides du déluge de la nuit précédente (la pluie a eu le bon goût de n’apparaître que pendant la nuit).
Le trio dispense son doom tendance sludge lent et très lourd avec une certaine pugnacité sur une scène au décorum personnalisé (mais pas franchement mis en avant) : drapeaux frappés du sigle de la bande et mannequins de pestiférés sur les bords. La Ricken vrombit et l’assistance est très réceptive au style qui incite à pratiquer des vas et viens ralentis de la nuque. En prenant un peu de distance, cette petite foule ressemble à une communion d’adeptes des free party au petit matin (mais ce n’est pas désagréable). Tombstones termine son set avec deux nouveaux titres à paraître sur la plaque à venir dont nous nous réjouissons et nous filons direct au merch procéder à l’acquisition de leurs œuvres (en gros nous avons beaucoup aimé si vous n’aviez pas suivi).
VALLEY OF THE SUN
Le trio U.S. récemment signé sur le label de Truckfighters a pas mal sillonné l’Europe suite à ce coup de boost à leur carrière, et pourtant vos serviteurs n’avaient pas encore eu l’occasion de les voir sur scène. C’est avec une certaine excitation que nous nous apprêtons à voir corrigé ce constat, tandis que les deux américains et le français (c’est Arnaud de Dot Legacy, grand activiste du stoner, qui tient la basse !) montent sur la petite scène au fond du site. Très vite – c’est-à-dire en gros dès le déluge de bûches délivrées par le duo “Hearts Aflame” / “Deep Light Burns” en intro – cette petite structure parallélépipédique noire posée dans l’herbe donne l’impression d’être un peu sous-dimensionnée pour accueillir l’énergie déployée ! Tandis que Ryan à la gratte est tout en puissance contenue, Aaron derrière son kit de batterie est complètement habité, jouant debout, grimaçant et frappant ses fûts comme un goret. Et que dire d’Arnaud, déchaîné, qui court et bondit dans tous les sens… L’école Truckfighters ? A noter que le groupe jouait en République Tchèque la veille et a passé la nuit sur la route : une heure et demi de sommeil en moyenne pour tous les membres du groupe au moment où ils foulent les planches sous nos yeux… le moins que l’on puisse dire c’est que ça ne se voit pas ! Le groupe est là pour défendre son dernier bébé, “Electric Talons of the Thunderhawk”, dans lequel il piochera une bonne moitié de sa set list, dont le nerveux “Gunslinger” ou encore un “Sleeping Sand” quelque peu frustrant… puisque le courant alimentant l’ampli de Ryan se coupe brutalement… Surchauffe ? Après quelques minutes de manip un peu frustrantes, le groupe enchaîne directement sur le titre suivant (que votre serviteur n’a pas reconnu – un inédit ?). Sur la fin, Arnaud, intenable, tente d’escalader une colonne d’ampli qui manque de lui tomber sur le râble ! Ayant joué son set le pied sur le champignon, le groupe se retrouve avec un peu de temps, mais alors qu’ils lancent un dernier titre, l’ampli saute à nouveau, signe qu’il est temps d’aller boire une bière pour Ryan, qui est à bout de fatigue et de patience. Bière méritée !
DEAD MAN
Le rock psychédélique des Suédois sera le premier à être déversé ce jour-là sur la grande structure. Nous nous cassons un peu les bonbons (nous écrivons ça parce que nous sommes des types plutôt bien éduqués) très rapidement durant la prestation du trio qui nous rappelle un peu ce que donnerait une prestation de fin d’année dispensée par des profs de musique. Techniquement c’est très bien interprété, mais ça manque cruellement de couilles ! Une partie de la populace adhère. Il faut bien avouer que c’est un peu dans le trip de l’événement même si ce n’est pas le style qui nous séduit le plus. Ca tombe bien c’est l’heure d’aller bouffer et de dépenser quelques jetons en plastique servant de monnaie locale au Freak Valley (et déformant les larfeuilles).
EGYPT
A l’image de Valley Of The Sun, nous n’avions pas encore eu l’occasion de voir opérer les rednecks du gras de Egypt sur scène, un terrain de jeu qu’ils affectionnent, si l’on en croît leur réputation. On est un peu inquiet quand même en voyant arriver Robert le camionneur (OK, Aaron, en fait) à la basse et derrière le micro… Le replet quatre-cordiste s’avère finalement être un véritable expert en boucherie (des lignes de basse maousses et gracieuses à la fois, un chant chaud et gras à souhait) et en charcuterie fine (le bassiste se révèle un habile musicien, doublé d’une belle mécanique à groove). Talent musical qu’il partage avec ses collègues (faut voir ces passages guitare / basse en harmonie, du plus bel effet ma belle dame !). Ce qui fait la force de ce combo sur disque nous saute au visage durant ce set excellent de bout en bout : Egypt propose une sorte de gentil sludge typiquement américain, teinté de passages doom de très bon ton, mais chargeant le tout d’une dose de groove qui fait toute la différence. Forcément, le power trio met en avant son unique album dans la set list, même s’il nous semble capter un ou deux inédits dans un set qui ne manque pas de relief (et ce malgré un soleil éreintant). La bière coule à flot pour s’hydrater (question de survie en cas de canicule !) et les cous ondulent lourdement pendant trois quarts d’heure qui passent trop vite.
TUBER
Après cette incursion au pays des pharaons, le moment est venu de faire plus amples connaissances avec les Hellènes de Tuber qui nous ont été chaudement recommandés par leurs compatriotes croisés plus tôt (se référer à l’anecdote plus haut pour ceux qui lisent en travers et vont se faire tirer les oreilles) ainsi que par les sympathiques membres de Monkey 3. Il faut dire que le style déployé par le quatuor grec n’est pas sans rappeler celui des (pas si) p’tits (que ça) Suisses. Il ne s’agit pas non plus d’une copie conforme et, en live, la puissance est plus retenue ; au final nous sommes dans l’instrumental quelque part entre les singes suisses et Glowsun (les chants en moins).
Plusieurs titres de leur dernière production « Desert Overcrowded » ont été interprétés durant le set du quatuor dont « Firebird », le morceau éponyme ainsi que « The South Will Prevail » nettement plus apaisé par moment que le reste du set. Plutôt visuels, ces Européens du sud ont bien assuré en cette fin d’après-midi à l’heure du ouzo. Véritables stars du genre dans leur pays, Tuber touche plutôt bien leur bille sur scène et contribuent au renouveau de leur scène nationale des plus actives de nos jours. Ce concert a par ailleurs été une excellente liaison dans le running order du jour.
KAMCHATKA
On avait pris une jolie claque au Desertfest Berlin devant ce trio atypique, dont le talent nous semblait mériter une bien plus grande exposition que la notoriété actuelle du combo. Pas de suspense inutile : le constat reste le même ! Les suédois enjoués proposent toujours un mix original et réussi de rock / hard rock, stoner, blues, avec même quelques plans limite prog, et ce faisant se positionnent dans une “niche” musicale inédite, sans compétiteur. La journée nous aura fait apprécier plusieurs trios de grande qualité, et Kamchatka n’y fait pas exception. Les musiciens, comme souvent dans ce type de formations, sont irréprochables, voire plus ici encore, où le talent de Per Wiberg (Opeth) à la basse, bien aidé par un son rond et chaud remarquable, fait écho à la quasi virtuosité de Thomas Andersson et sa gratte : les soli et jams pleuvent par dizaines, toujours du grand art, surfant toujours sur une base rythmique rutilante. Jamais démonstratif, toujours efficace. Même si le dernier album (sold out dans leur merch, un irritant récurrent durant ces trois jours !) est mis en valeur, à travers notammment le super catchy et toujours efficace “Get Your Game On”, la très riche production du groupe est mise à l’honneur via des extraits de quasiment toutes leurs productions. La bonne humeur des musiciens, leur capacité à occuper une scène et à maintenir l’intérêt du public, font de ce set l’un des meilleurs de la journée (comme beaucoup d’autres, c’est vrai).
BUSHFIRE
La formation teutonne leadée par son chanteur géant et charismatique était dans la place depuis le début des festivités (difficile de les rater). Bien que pas annoncés sur l’affiche du festival, nous avons eu la surprise d’apprendre, lors d’une énième annonce de notre Monsieur Loyal préféré, qu’ils se produiraient en acoustique sur la petite scène avant et après The Vintage Caravan. Le frontman ayant monté la garde sur place durant tout l’après-midi afin que les festivaliers ne profitent pas de cet endroit pour s’affaler comme ce fut le cas les jours précédents, le groupe était prêt à attaquer sitôt les derniers accords de Kamchatka balancés sur la grande scène (et respectivement ceux de The Vintage Caravan pour la seconde partie de leur set).
Cette initiative nous a fait vachement plaisir car le sous-emploi de cette petite scène nous avait laissé pas mal dubitatifs. Pour le second show de leur batteur actuel (le premier étant celui de Berlin chroniqué sur ces pages), le groupe lui a filé une caisse pour battre le rythme, ironise le vocaliste fort à l’aise dans cet exercice de style ; faut dire que le garçon a du coffre. Bushfire a totalement réussi cet exercice de style – notamment en raison du registre étendu de son vocaliste – qui nous fit découvrir unplugged six titres très bien envoyés.
THE VINTAGE CARAVAN
Le Freak Valley est clairement un festival cosmopolite, et l’on croise dans le public plein de français, des grecs, des italiens, des américains, etc… (et même des allemands !) Ce constat est aussi applicable sur scène, avec des groupes de nationalités aussi diverses qu’australiens, suisses, américains, gallois, suédois, italiens, etc… (et même des allemands…) On peut rajouter l’Islande à la liste, avec les trois jeunes loups de The Vintage Caravan. Fidèles à leur réputation, les jouvenceaux d’apparence fraîchement pubères montent sur scène la bave aux lèvres et le sourire jusqu’aux oreilles ! Leur vision de la scène est fondamentalement FUN ! Et finalement, ça nous convient bien, en cette fin d’après-midi fort agréable. Nouveaux représentants de la vague vintage dans cette édition du Freak Valley, les trois Reykvíkinga se sont fixés pour mission de faire bouger le public du festival aux sons en directe provenance d’une génération qu’ils n’ont clairement jamais connue (leurs parents, à la rigueur ?). Et… ça fonctionne ! Il faut dire que l’on ne peut pas rester complètement insensible à l’énergie foncièrement sincère dépensée sur scène, qu’il s’agisse d’Alexander à la basse (qui court dans tous les sens, saute partout et passe la moitié du set à haranguer le public un pied sur les retours) ou d’Oskar (qui aligne les soli, les poses clichesques de guitar hero… et les grimaces). On a donc le sourire et le concert se laisse regarder sans déplaisir. Musicalement, ça tient la route, même si tout ceci manque un peu d’originalité, forcément. Il n’empêche, des titres comme le très catchy “Expand Your Mind” ou “Midnight Meditation” et son riff très hendrixien, fonctionnent très bien en live. Un bon moment, et un groupe à surveiller dans les prochaines années, alors qu’ils gagneront forcément en densité et en maturité.
CRIPPLED BLACK PHOENIX
Comme nous sommes loin d’être omniscients, nous ne connaissions point cette formation et comme nous sommes différents (et parfois complémentaires), notre ressenti à l’égard de certains aspects de la prestation a varié. Ces Anglais se pointent en nombre sur scène : une claviériste (et parfois chanteuse aussi), un clavier, un batteur, un bassiste, un guitariste et chanteur ainsi que deux autres guitaristes. Ca en fait du bordel sur scène pour le style musical déployé par ces individus aux parcours musicaux aussi variés qu’intéressants (ça va en gros de Mogwai à Electric Wizard). En tous cas ça a de la gueule avec les drapeaux en arrière-scène et ça commence de très belle manière ; ça débute dans un style à des années lumières de ce que nous avons vu sur scène jusqu’alors durant ces trois jours. Les Rosbifs balancent d’entrée de jeu des joyaux du genre hard pop alternatif : « Rise Up And Fight » qui a quelques années ainsi que « Black Light Generator » tiré de « White Light Generator » sorti l’an passé. La moitié du team Desert-Rock.com est toute excitée alors que l’autre soupire profondément.
Après ce début de concert furieux, le groupe s’enlise dans une pop nettement moins fougueuse ; la superstructure prend l’eau alors que nous évitons définitivement la pluie puisque les nuages menaçants nos frêles constitutions décident d’aller déverser leur flotte un peu plus loin. Mais, revenons à nos moutons : à part avec la construction palindromique « 444 » balancée en fin de set, Crippled Black Phoenix n’atteindra plus l’intensité du début de son concert et finira par lasser le grand nombre en interprétant ses compositions pas inintéressantes, mais clairement pas adaptées à l’assistance.
EYEHATEGOD
Coincé entre les expérimentations de Crippled Black Phoenix et avant une suite du programme très orientée plans babas psychédéliques, la formation légendaire de NOLA est très injustement programmée en tout début de soirée alors qu’elle a clairement le potentiel artistique – et commercial – de se retrouver plus haut sur l’affiche. Tant pis pour nous ; nous ne sommes pas à une fête consacrée au sludge. Nous ferons donc avec, ainsi que la frange la plus lourde du public qui piaffe d’impatience – et s’imbibe – depuis quelques heures. A peine rentrés aux USA pour quelques dates (entre autres), EHG revient sur le Vieux Continent pour sa deuxième tournée de l’année ainsi que du trimestre.
Avant que les hostilités commencent, notre animateur de festival à lunettes rondes s’en revient – avec une charmante main innocente – pour le tirage au sort qu’attendent les plus joueurs des participants à ce festoche. Les cinq lots – dont la superbe veste pimpée Freak Valley – sont rapidement tirés et il ne reste plus qu’à la mariée aux cheveux rouges (ah oui, nous ne vous avions pas encore tenu au jus : un couple très rock’n’roll a profité de l’occaz pour convoler en juste noce dans ce cadre) procède au traditionnel lancer de bouquet. Nous ignorons si c’était la meilleure idée du monde que de céder à ce rituel en ouverture de cette bande de générés (sur et devant la scène) car au final c’est un bouquet en charpie qui a effectué plusieurs allers-retours entre la scène et la fosse.
Lorsque les vétérans débarquent sur scène, nous sommes interpellés par l’air à la fois clean – il boit de la flotte, un mythe s’effondre – et terriblement vieilli de Mike Williams ainsi que par les sandalettes de son acolyte Jimmy Bower qui finira d’ailleurs le concert pieds nus. Le reste de la cavalerie sudiste a l’air bien en forme et Gary Mader a l’air nettement moins allumé qu’à l’accoutumé (pas de bouteille de rouge à portée de mains durant les set). Le ton est rapidement donné : ces furieux balancent « Agitation ! Propaganda ! » du dernier opus puis « Lack Of Almost Everything » tirée de « Dopesick ». Le tiercé de tête est complété par le sublime « New Orleans Is The New Vietnam » à propos de leur ville, qui est tiré du single qu’il est lui-même tout seul ; ce titre incroyable ayant rythmé notre fin de semaine nous sommes rapidement à fond alors que nous prenons encore une dernière volée de clichés (disons 250 durant le titre au bas mot). L’heure de jeu est menée tambour battant – une partie de vos serviteurs allant même se défouler un moment dans le pit – jusqu’au final. Ce set connaîtra aussi le premier moshpit avec pogos, circle et autres crowd surfing peu en adéquation avec le style seventies du festival. En guise de bouquet final c’est « Metamphetamine » du légendaire « Dopesick » (encore !) qui est propulsée avec une fin (sans fin) du plus bel effet. Cette première date de la tournée annonce le meilleur pour la suite de celle-ci et nos envies de lourdeur se trouvent comblées (remarquez il y avait intérêt parce que la suite du programme n’allait pas être du même tonneau).
ELECTRIC MOON
Après avoir pris un panard géant avec les déglingués de NOLA, le décors change radicalement et nous nous demandons pourquoi ce n’est pas Eyehategod qui joue sur les coups de vingt-deux heures en lieu et place du trio instrumental… Electric Moon monte sur scène pour jouer en triangle. La bassiste ainsi que le guitariste se font face de part et d’autre de la batterie ; ces gars jouent donc en grande partie dos à leur public (encore des disciples de Miles Davies). Etonnamment, ledit public se satisfera de cette situation et ondulera tout du long du set de rock psychédélique orienté acide que les Germains dispenseront dans la pénombre.
Un tour au merch (ah ouais, nous n’avons pas carrément goûté au style) nous permettra de constater que les échoppes de bouffe et de productions musicales sont désertes durant ce show ce qui en dit long sur l’affection que porte le public du festival à ce style. L’éclairage très très très minimaliste (à côté Monkey 3 jouaient en plein jour), le manque d’interaction avec le public, le fait que nous n’ayons pas pris des pilules et la fatigue peut-être (mais pas sûr), nous laissent totalement indifférents aux prouesses techniques déployées par la section rythmique incroyable de cette formation des plus populaires dans ces contrées. Il faut dire qu’après les bûcherons admirés plus tôt dans la journée, ces virtuoses interprétant des compos alambiquées et techniquement irréprochables ne parviennent pas à nous toucher.
EARTHLESS
Difficile de faire plus trippant que leurs prédécesseurs, qui ont apparemment érigé cette compétence en expertise. Sans viser cette extrémité, Earthless apparaît avec le recul comme le groupe idéal pour clôturer un festival à vocation psychédélique comme se veut l’être le Freak Valley. Le groupe a arpenté pas mal de scènes européennes ces dernières semaines pour conclure sa tournée par le headlining du festival, et d’après les rumeurs qui sont parvenues à nos oreilles, il a fait des dégâts sur son chemin. Il ne nous faut pas longtemps pour faire un constat similaire. Bénéficiant d’une mise en lumière encore une fois sur ce festival de grande qualité, le trio sud-californien ne met pas franchement en avant son jeu scénique : Mike Eginton reste debout posté contre le kit de batterie de Ruby Mars, n’adressant que de rares regards ou sourires au public. La robustesse de cette section rythmique repose-t-elle sur cette posture ? Si c’est là le prix à payer, on s’en acquitte volontiers, au vu de la lourdeur de ces nappes de basse et de cette batterie qui oscille entre saccades métronomiques et plans impro limite jazzy. Mais même si cette paire rythmique est essentielle, c’est le “soloing” continu d’Isaiah Mitchell qui suscite le plus d’émotion : les doigts du bonhomme courent sur ce manche non stop jusqu’au bout de la nuit, sous le regard admiratif des musiciens, et hypnotisant les autres dans des grappes de notes aux frontières de l’hallucinatoire. A tel point que les morceaux s’enchaînent dans une fluidité qui nous fait perdre la moindre notion du temps : on entend passer un bout de “Uluru Rock”, puis tout se fond et on se laisse emporter… L’alchimie musicale et instrumentale entre ces mecs est hallucinante : ce qui apparaît comme une grosse jam de plus d’une heure est, c’est une évidence, le fruit d’un travail énorme. On termine donc le festival complètement embarqués par ce set impeccable du trio, qui devient de fait petit à petit le groupe référentiel de ce courant musical.
Ainsi s’achève l’édition 2015 du fameux festival allemand à taille humaine. Nous remercions les activistes en charge de cette manifestation à l’identité forte qui a su rester amateur et très familiale. L’expérience vaut vraiment la peine d’être vécue si vous hésitez (même si nous avons assisté à une édition exceptionnelle au niveau météorologique). Nous remercions aussi les formations ainsi que tout ceux qui se bougent les fesses pour que ce genre de manifestations éloignées des grands raouts destinés aux masses continuent d’exister. Enfin nous remercions finalement – et nous excusons d’avance pour les oublis – nos potes francophones croisés dans la place : Glad, Jo, Antoine, Lucho, Paolo, Boris, dB, Kevin, Walter et les autres. A l’année prochaine !
L’Oeil de Néron, asso lyonnaise orientée stoner et toute fraîche puisque organisant sa première date, nous convie en ce vendredi 12 juin, malheureusement pluvieux à son dépucelage via cette affiche alléchante.
L’orage qui s’est invité à l’heure de l’apéritif aura eu une incidence certaine sur l’affluence, clairsemée mais attentive et chaleureuse toute la soirée. Dommage car une fois à l’intérieur du Warmaudio on y est bien.
La fin des balances de Montecharge présage du tout bon et une paire d’heures plus tard le combo prend possession de la scène.
Concentrés, les quatre parisiens vont, au cours de leur set, nous égrainer tous les préceptes d’un bon stoner/rock, classique mais efficace et bien ficelé. Le travail du son, les breaks bien sentis, la section rythmique au groove permanent, tout y est, agréablement agrémenté de lignes de chant justes et travaillées. On passe un premier bon moment et, histoire de finir de détendre tout le monde, les parisiens enverront gentiment en fin de set un p’tit Truckfighters appréciable et apprécié.
C’est pour quand l’album les gars ?
Greenleaf vient de Suède, un pays où les forêts sont propices à fabriquer des grosses bûches. Greenleaf, dont le pilier Tommi à la gratte aura joué en 15 années d’existence et 5 albums avec des mecs de Lowrider, Dozer, Demon Cleaner et Oskar, le chanteur/bassiste de Truckfighters, ouais, rien que ça. Greenleaf est là ce soir, avec son frontman très en voix, Arvid, à la pilosité faciale disons, débordante, et un “Trail & Passes” fort goutu sous le bras. Greenleaf est en tournée, est content, ça se voit et ça se sent. Greenleaf dégouline de charisme, d’enthousiasme, d’énergie et c’est dangereusement contagieux alors les têtes se secouent, sourires aux lèvres. Greenleaf sait varier les plaisirs et piocher dans sa riche discographie, avec forcément un léger penchant pour leur dernière galette (notamment l’excellent “With Eyes Wide Open”) et se faire à l’envie plus doux et hypnotique, contre-balançant ainsi la furie rock ‘n roll et permettant à nos nuques des moments de repos plutôt bienvenus. Greenleaf, sur album c’est vachement bien, en concert c’est vachement encore mieux.
Au Warmaudio, en dépit d’un relatif éloignement et d’une légère carence en lights, ce qu’il y a de bien c’est qu’on peut se sustenter à coup(s) de burgers/hot-dogs/frites et de (bonnes) bières à prix raisonnables.
Du coup on peut se permettre le luxe d’être repus pour apprécier pleinement l’excellent set que Glowsun, une bonne décennie d’existence à son actif, va nous offrir. Les nordistes, dont la réputation n’est plus à faire à l’étranger (!!), débarquent avec un troisième album, “Beyond the Wall of Time”, qui va à coup sûr finir d’asseoir le savoir faire du trio dans la nébuleuse stoner, peut être même en France qui sait ?
Forts d’un line-up stable depuis leur premier LP “The Sundering”, les parrains du psyché hexagonal n’ont aucun mal à captiver d’emblée l’assistance, appuyés par une toile en fond de scène projetant des images colorisées et acidulées. Chanceux et privilégiés que nous sommes, nous avons droit à un joli florilège représentatif du petit nouveau qui s’annonce dans la lignée du précédent, “Eternal Season”, avec encore moins de chant et une lourdeur parfois accrue. Car entre les passages envoûtants et chaloupés au cours desquels Johan, complété à merveille par les lignes de basse de Ronan, nous régale de son jeu de guitare fin et de sa gestion des effets bien à lui, les moments plus appuyés se font maintenant presque doom, d’une épaisseur imparable. Le jeu de Fabrice derrière les fûts est impeccable, d’une finesse et d’un touché agréable et personnel.
Servi par un son excellemment propre et rempli, on passe volontiers avec le groupe derrière le mur du temps qu’il nous construit et on savoure une bonne heure d’un set de haute volée, parachevé par un rappel logiquement réclamé par la petite centaine de personnes présente.
Nul doute qu’avec ce genre de concerts et la qualité de leurs albums, Glowsun, qui ouvre enfin la Valley du Hellfest cette année, va continuer de marquer des points dans toute l’Europe et de se faire un grand nom parmis les grands, ce fameux temps le dira…
Un coup de chapeau (de cow-boy) aussi à L’Oeil de Néron, pour une première ça aurait été franchement dur de faire mieux. On ne peut que saluer l’initiative de vouloir nous proposer des plateaux de ce type sur Lyon avec des groupes de cette qualité, espérons que ce soit le début d’une belle aventure !
Merci à Noodle Photography ! Pat Apl
Etrange que cette mini tournée Européenne, pour un groupe aussi légendaire, revenant avec un nouvel album de haute tenue, après 15 ans d’absence. 6 dates seulement sont au programme, dont le Temples et le Freak Valley, calées entre l’agenda de Sunn O))), le Maryland Death Fest et le Crucial Fest. Qu’à cela ne tienne nous sommes de nombreux passionnés français, venus de Bretagne, Paris ou en voisin lillois à venir grossir les rangs belges pour la date de Courtrai. La première partie locale devait être King Hiss, combo à la réputation montante outre Quiévrain dont on m’a vanté la qualité des morceaux, avant que ces derniers soient remplacés aux alentours de midi par Sardonis, duo bruyant bien connu du circuit, qu’il est toujours agréable de retrouver. Nous rentrons d’ailleurs dans la salle au moment même où le guitariste et le batteur entament leur set. Le son est fort et malgré le public parsemé, l’énergie des deux lascars prend la salle et leur grosse demi heure de heavy rock crasseux passe plutôt bien. Ne goutant que très peu à la bagarre Crust Punk proposée par les danois de Halshug, nouvelle signature de Southern Lord, je ne remettrai les baskets au De Kreun qu’au moment où Pete Stahl et les siens fouleront les planches.
L’ambiance est timide, les musiciens aussi, sauf peut être Greg Anderson, dont la guitare, bien trop forte, écrase ses partenaires dans le mix. Difficile alors de retrouver ce soir l’incroyable esprit blues qui avait régné en maître au Roadburn (2010) ou au Hellfest (2011), les deux dernières prestations du combo auxquelles j’avais eu l’honneur d’assister. Il faudra attendre la fin du set, après pas loin de 45 minutes pour que quelque chose se passe enfin. Sur le nouveau (et magistral) morceau « A Killing Blues », l’ambiance enfin s’installe. Stahl transmet son feeling et la salle décolle. Je me suis à ce moment reculé de cinq bons mètres et le son me paraît alors bien mieux équilibré. Il plane sur le De Kreun l’esprit du deep south, la scène est noyée dans une saturation de lumières vives et la magie opère enfin. Les voix s’élèvent pour répondre au facétieux chanteur, et lorsque résonne « Mower » à la suite, la centaine de présents exulte dans un hourra général. Le concert semble lancé mais c’est alors que le quatuor quitte les planches et que les lumières se rallument, nous privant de rappels (et d’« Innocent ») en coupant ce lien enfin créé entre le groupe et son public après à peine une heure de set dont quinze minutes de réelle communion. La définition exacte et douloureuse de la frustration.
En sortant, il est amusant (et logique, vu ses fonctions à Southern Lord Europe) de retrouver Guy Pinhas au stand merchandising, le temps de s’amuser de l’anecdote : peu de groupes peuvent se permettre de se priver d’une reformation de leur line up mythique en gardant tout de même leur bassiste originel et légendaire au stand pour vendre les disques. Reste qu’après 4 ans d’attente et 300 bornes, le concert était insuffisant. Raisons de plus pour revenir, et vite, faire une vraie tournée ? On y compte bien.
Comme la veille, il fait monstre beau et chaud en ses terres agricoles (et certaines auraient mieux fait de chercher un peu d’ombre, mais nous n’allons pas balancer) et le bar à cocktail – situé dans un sauna, normal ! – vend désormais de la crème solaire en plus des breuvages et des clopes. C’est parés de lunettes de soleil, de couvre-chefs ainsi que gluants de crème que le public converge sur les lieux du festival. Les bourgeois que nous sommes (pour rappel nous étions à l’hôtel) croisent donc les campeurs effectuant le cérémonial du matin (qui consiste en gros à se rendre aux lieux d’aisance, aux douches gratuites à dispo, aux caravanes de bouffe et de revenir au camping). Le résumé en images animées est disponible en bas de page. Bref, alors que ça déjeune à la bière – ben quoi nous sommes en Allemagne ! – nous traversons le site du festival afin de rejoindre la petite scène inutilisée la veille.
C + C = MAXIGROSS
C’est sur cette petite scène minuscule dans un recoin du site que les hostilités du jour commencent, aux aurores (avant midi, quoi). On a passé la journée d’hier à se demander à quoi servait cette scène, nous apprenons qu’elle accueillera les deux premiers groupes du jour… Quel intérêt ? Pourquoi ne jouent-ils pas sur la main stage ? Bref, nous voilà donc tout disposés à découvrir le groupe du jour, au patronyme alambiqué peu propice à une mémorisation rapide (gageons que les gars se sont reportés sur ce nom étrange suite au constat que leur choix initial “Total Fucking Destruction” était déjà pris…). Le trio au look mi-plagiste, mi-bobo hippie propose une sorte de pop-rock sans beaucoup de relief, nous servant une bande son mélangeant aléatoirement des relents des Beach-Boys, de Nada Surf, de Terrorvision, etc… Le soleil cognant déjà très fort, nous choisirons d’aller nous poser tranquille sous une tente en entendant de manière assez lointaine les volutes sonores pas désagréables des italiens… Pas d’excès de zèle inconsidéré, un festival, c’est aussi une question d’endurance !
FREEDOM HAWK
Deuxième formation de la journée – et ultime du jour sur la petite scène – , le trio US se met rapidement en place afin de débuter son show à l’heure du déjeuner. Nous remarquons rapidement que nous ne sommes pas les seuls à attendre ce groupe dont la nouvelle pièce « Into Your Mind » a été notre bande-son durant les trajets motorisés de ce long week-end. Cette plaque – disponible au stand du groupe – nous ayant pas mal fait penser à Black Sabbath (période Ozzy, surtout pour la voix), nous avions hâte d’entendre ce que ces arrangements allaient donner en live et nous allions être bien servis. Durant presque une heure, les natifs de Virginie vont nous rassasier d’un heavy-rock bien fuzz et nous faire penser par moment à leurs homologues de la Côte Ouest, Fu Manchu. Le rendu scénique était donc plus rentre-dedans que ce que laissait penser la production léchée de leur nouvelle production.
Les deux types aux Gibson – dont un arborait fièrement un t-shirt de Dozer – se sont tortillés durant la totalité d’un concert mené pied au plancher. En point d’orgue une version hyper rapide de « Journey Home » tirée de leur nouvel opus. Trop rapidement, le groupe rembarque son matériel au terme d’une prestation sans faute dont le seul bémol sera le placement trop tôt sur l’affiche, mais ça ils n’y peuvent rien. Par contre, il a été très apprécié de les découvrir dans une configuration presque club à hauteur de bipèdes.
BRÖSELMASCHINE
Après une telle claque prise sur la mini-scène, on se dit que le groupe suivant, qui bénéficie du “luxe” de la main stage, doit assurer velu, et c’est la bave aux lèvres que l’on se précipite dans la fosse. Faut dire que le vieux kraut rock grossièrement psyche et bluesy du combo teuton n’a jamais fait partie de notre background musical… et avec le recul, ce n’est pas vraiment un regret profond. Le set des ces vieux tromblons (le groupe a commencé en 1969 !) est long (pourquoi 1h05 de jeu tandis que tous les groupes avant et après eux n’ont que 45 min ??) et plutôt décalé. Le batteur a un kit de batterie deux fois plus chargé que celui de Mike Portnoy, la chanteuse-potiche passe 90% du temps à danser nonchalamment, le guitariste court hors de scène dans le public pour voir ses copains dérouler une jam indigeste de plusieurs minutes avant de remonter sur scène, etc… Étonnamment, cette musique de vieux hippies semble rencontrer un certain succès auprès du public… Une question de culture sans doute !
SEEDY JEEZUS
On entendait vaguement parler de Seedy Jeezus depuis une paire d’années comme d’un groupe intéressant en provenance d’océanie. Il ne nous faut pas longtemps pour commencer à apprécier l’énergie et la qualité du trio, manifestement très heureux et reconnaissant d’être là. Les trois musiciens sont à fond, et déclinent de A à Z le mode opératoire du parfait combo de hard rock psyche : très largement instrumentale, chargée de soli remarquables de Lex Waterreus, la musique des trois mal lascars mal dégrossis de Melbourne fait très vite pas mal d’adeptes dans le public, bien fourni. Faut dire que les trois barbus savent tenir une scène : la section rythmique fait plus que le job sans oublier d’interagir avec le public, laissant à Waterreus le soin d’occuper l’espace “lead”, en vocal ou en six-cordes. On n’est pas loin de penser occasionnellement à la grâce d’un Mos Generator en live (il n’y a pas que la pilosité faciale qui nous rappelle le groupe de Tony Reed) tant le groupe semble y évoluer comme si c’était son unique biotope. Porteur d’un unique album et d’une ribambelles de EP et splits divers, le groupe fait la part belle à sa nouvelle production dans une set list qui laissera de très bons souvenirs.
TRAVELIN JACK
Le quatuor berlinois jouait déjà son rôle d’OVNI dans le line-up du Desertfest Berlin, les voilà jouer le même rôle aujourd’hui : que fait un groupe de glitter/glam rock revendiqué au milieu d’une affiche de pur stoner psychédélique ? Bien peu préoccupés par cette question, les quatre maquillés déboulent comme des tornades sur scène bien décidés à botter des culs. Faut dire qu’ils n’ont pas à rougir de leurs hymnes directement issus des tendances hard rock des années 70, qu’ils interprètent avec un talent certain et une énergie bluffante : sans une once de second degré, le groupe réussit l’exploit de ne jamais être ridicule, emportant les potentiels sarcasme via un amour sincère pour le genre musical qu’ils incarnent avec quelques couches de mascara et de fringues flashy. Même si la frontwoman exhubérante Spaceface emmène la formation en parfaite frontwoman, le reste du groupe assume pleinement leur rôle de showmen. Au final, un assez bon moment, même si les puristes que nous sommes aurions apprécié de voir ce créneau horaire attribué à un groupe plus dans notre veine musicale de prédilection.
SIGIRIYA
A chaque festival sa découverte : la nôtre sera incontestablement Sigiriya, le groupe originaire du sud du Pays de Galles dont certains protagonistes présentent un CV plutôt alléchant. Le vocaliste se présente affublé d’un t-shirt d’une marque de sirop pour adultes débutant par Jack qui est fort prisée des rockers et dès les premiers accords, nous pensons à la scène de la Nouvelle-Orléans. Ce sentiment ne nous quittera pas durant le set des Britanniques (et nous ne serons pas les seuls à apprécier ce show) qui contraste fortement avec le groupe les ayant précédé au niveau du look. Le public, en général, ne nous rejoindra pas en masse durant ce set préférant aller se siroter une binouze ou faire la queue au stand de merch de Bröselmaschine qui peine vraiment à désemplir. Les bourrins que nous sommes s’en sont, par contre, payé une bonne tranche durant les quarante-cinq minutes les plus lourdes de la journée (le lendemain nous réservera aussi son lot de lourdeur).
Le concert très carré – et suintant de dessous les aisselles – du quatuor lui permettra de traverser son répertoire concis (deux plaques) de manière fort lourde. Les brûlots que sont « Freedom Engines », « Deathtrip To Eryri » ou « Tribe Of The Old Oak » écrasent leurs chattes sur scène. Le titre nous ayant le plus fait lever la cornette étant clairement « Whiskey Song » issu de leur premier opus « Return To Earth » ; c’est aussi cette plage qui transpire le son du Sud – et rappelle donc agréablement certaines formations de la scène de NOLA particulièrement Down – qui a poussé les derniers timorés à entamer la danse de la nuque jusqu’au terme de cette prestation. Autant vous dire que nous nous réjouissons de la suite des tribulations de ces mecs dont la dernière production – « Darkness Died Today » – sortie l’an passé mérite carrément le détour.
SIENA ROOT
S’il est un groupe qui rentre pile-poil dans la thématique du fest c’est bel et bien Siena Root : les suédois sont connus pour être l’un des jam-bands les plus performants, tout en se faisant rares sur les scènes européennes et mondiales. Sorte de groupe-projet-concept musical tournant autour de quelques musiciens “pivots”, il semble que le quintette ait trouvé une certaine stabilité ces dernières années, notamment suite à l’incorporation de Jonas Åhlen au micro : il faut dire que le grand échalas joue son rôle de frontman avec une énergie qui booste le reste de l’équipe, que l’on avait rarement vue aussi dynamique et enjouée ! Véritable machine à vibes positives tournant à plein régime, le premiers tiers du set est énergique et envoie du groove par caisses entières à un public souriant, lui aussi. Une entame irréprochable, qui verra quelques mid tempo varier un peu les ambiances sur la suite du set, qui voit l’enthousiasme se résorber un peu sur la longueur. Mais globalement, on en a bien pour son argent avec les titres proposés : compos impeccables, soli délectables, leads de claviers vintage grande classe… A l’image de ce “Between The Lines” issu du dernier album en date, Pioneers, qui offre une plateforme d’expression impeccable aux zicos, ou encore “Conveniently Blind” où même Åhlen se lâche complètement derrière son micro. Leur set se terminant cinq minutes avant l’heure limite, les scandinaves reviennent vite sur scène pour nous balancer le groovy “Dreams Of Tomorrow”, qui finit de faire bien danser un public à fond dans le trip. Une excellente prestation qui nous laissera un bon souvenir d’un groupe en grande forme.
DANAVA
La bande de Portland s’installe plutôt tranquillement sur scène et se paie un long soundcheck peu en phase avec le style pratiqué par ce quatuor. Leur hard rock teinté d’influences bien garage nous rappelant plus une certaine spontanéité qu’un déploiement de sophistications techniques. Qu’importe, il fait encore monstre chaud dans l’enceinte du festoche et nous nous mêlons à la foule défilant sous les jets d’eau judicieusement installés par les organisateurs pour rafraîchir un peu tout ce beau monde, en attendant le son urgent des Ricains. Il ne tardera pas à jaillir de la sono une fois les mecs – finalement – en place. Ca débute tout comme d’hab avec eux (à fond donc) et le look de leur chanteur Gregory Meleney ayant chaussé ses lunettes miroir donnent un air de RAMONES à ce début de show. Rapidement ça s’agite sur scène pour réclamer du son dans les enceintes et le set s’interrompt quelques instants suite à des problèmes techniques à la fin du premier titre. Loin les lunettes et redémarrage en fanfare pour le très groovy « Hemisphere Of Shadows » qui entame le déroulé d’un set sans encombre déployé pieds au plancher. Ca groove un max tandis qu’une partie de l’assistance se restaure (ou s’abreuve c’est selon). Le frontman, plutôt loquace, échange à plusieurs reprises avec l’auditoire sur divers sujets dont les salutations adressées aux formations amies qui se produiront le lendemain : Eyehategod et surtout Earthless (avec qui split fut partagé naguère) dont l’un des membres se produira avec un t-shirt de Danava environ vingt-quatre heures plus tard. Le groupe s’éclipsera après un dernier titre dédicacé par Gregory aux bikers comme le furent jadis son père ainsi que son grand-père. Encore une prestation de bonne facture qui augure bien pour la suite de la journée.
HORISONT
Autre représentant de la vague “vintage rock” présent ce week end, Horisont est loin d’être le moins intéressant (suivez mon regard vers l’affiche d’hier pour les trouver…). Les suédois, fidèles à l’écurie Rise Above, viennent apporter une grosse rasade de vieux heavy rock en droite provenance des années 70, inspirés par les meilleurs groupes de hard rock de l’époque. L’on a vraiment l’impression d’être devant une superbe machine live, un groupe qui a arpenté les scènes européennes en long et en large, pour un resultat de pure efficacité. L’interprétation ne souffre d’aucune approximation et la fougue de nos jeunes scandinaves fait plaisir à voir, et emporte un public enthousiaste, qui profite du soleil qui commence à se coucher pour se masser devant la scène sous une température bien plus accueillante. Même s’il fait la part belle à son dernier véritable effort (dont le catchy “Writing on the Wall” et le terrible “Eyes of the Father” en clôture, propice à quelques joutes guitaristiques bien rock’n’roll) ainsi qu’au 7″ sorti récemment, le groupe va quand même piocher généreusement dans toute sa discographie pour le plus grand plaisir des afficionados – qui sont bien présents, à en juger par le nombre de personnes qui accompagnent Axel à voix haute sur les refrains. Petit cadeau bonus, on aura droit à deux inédits apparemment prêts pour le prochain album (scoop : ne vous attendez à rien de révolutionnaire si le prochain effort des suédois est dans la veine de ces deux titres). Une prestation de pur rock’n’roll, généreuse et franche du collier, qui nous aura mis en joie.
MONKEY3
Après ce tour d’horizon, place aux sympathiques Helvètes avec qui nous avions déjà échangé la veille, tandis qu’ils assistaient au festival en spectateurs. Comme aucune tournée n’est prévue pour le moment, nos amis des bords du Lac de Genève en profitent pour se produire à quelques occasions lors d’événements particuliers. Loin d’être oisifs, ces garçons dans le brouillard ont ouvert pour My Sleeping Karma lors du vernissage de « Moksha », ils se sont produits à Genève avec les metalleux de Samaël qui fêtaient l’anniversaire d’une de leur pièce de choix et se produisent en sous-headliner lors de ce Freak Valley ; tout ça en ce début d’été. Ayant visiblement du temps à consacrer à la préparation de ce concert, ils ont mitonné dans leurs marmites magiques un set sur mesure pour l’occasion en raison du format imposé. C’est donc une heure pleine qui sera consacrée aux titres les plus rentre-dedans de leur répertoire. Ce qui ne change pas, par contre, c’est la mise en lumière des prestations de Monkey 3 : les photographes se sont arrachés les cheveux par grosses touffes alors qu’un show des plus puissants prenait son envol dans le crépuscule champêtre teuton.
Quand bien même leur ingé son maison est absent sur les dates actuelles (pour cause de transhumance sur les autres rives de l’Atlantique), le son des Vaudois – assuré par un vétéran de cette science – est au poil, ce qui compte énormément pour les formations instrumentales techniques dont le quatuor fait partie. Nous précisons ici à toutes fins utiles, que c’est eux-mêmes qui se sont chargés du soundcheck… Question setlist, le groupe a pioché un peu tous azimuts dans sa disco et nous attribuons une mention spéciale à « Pintao » et « Birth Of Venus » qui nous ont presque autant mis la gaule que l’incroyable « Jack » issu de la masterpiece « 39 Laps ».
Mission réussie au final puisque c’est soixante minutes à fond de rock psychédélique fort puissant qui ont été délivrées par les Suisses pour le plus grand bonheur des fans et aussi des vétérans hippies en transe sur les bords des premiers rangs. Nous pouvons déclarer que nous ne sommes pas les seuls à avoir apprécié ce concert merveilleux car un indice qui ne trompe pas nous confirmera rapidement que le premier groupe dont les posters étaient sold out au stand merchandisaing de nos amis graphistes français était justement Monkey 3. Longue vie à eux et vivement la suite de leurs aventures discographiques dont la prochaine étape est déjà en gestation (pourvu que le son plutôt que la gestation elle-même soit pachydermique).
ORCHID
La bande de San Francisco – dont la nouvelle pièce repoussée plusieurs fois se fait attendre – officiait en tant que tête d’affiche de cette deuxième journée de festival. Ils bénéficiaient donc d’un temps de jeu plus long que les formations précédentes. Nous n’allons pas nous plaindre de cet état de fait, inconditionnels que nous sommes de cet ersatz des Black Sabbath des temps jadis. Comme la veille, le headliner a droit à des incréments supplémentaires au niveau lumières (ce seront les premiers à bénéficier des blinders surpuissant installés sur le haut de la structure vantant une manifestation réunissant « No Fillers – Just Killers ! ») et aussi à une mobilisation générale du public même si certains signes de fatigue (seulement ?) commencent à se faire ressentir. Les amplis Orange sont alignés à côté du backdrop et sitôt l’intro musicale (qui fait naturellement suite à l’annonce du groupe par le Guy Lux velu local) achevée, les Etasuniens attaquent avec « Helicopters » de leur court format à sortir « Sign Of The Witch ». Le titre n’a rien de révolutionnaire tout comme le morceau éponyme qui sera balancé plus tard dans le set. Les nouvelles plages alignées dans le setlist (trois sur les quatre) nous incitent à nous montrer plus compréhensifs envers l’épais bouquin recensant les textes qui a pris place sous le micro du chanteur.
Nous notons que les nouveaux titres imaginés par Orchid s’insèrent parfaitement dans la ligne du groupe et que nous pouvons donc nous réjouir de la suite de leurs productions musicales. Suite à la première mise en bouche, les Ricains vont taper dans un de leur standard imparable en live : « Mouths Of Madness » (tiré du même album). Le concert se déroule agréablement sans le moindre accro avec des moments plus intenses que d’autres : « Black Funeral » et « Capricorn » en faisant partie jusqu’à sa fin… ou presque. Alors que tout le sable à dispo dans le sablier s’est écoulé, le quatuor de chevelus se repointe sur scène pour un rappel. Les sourires ornent les visages alors que le dernier titre (« Wizard Of War » selon nos souvenirs) part un peu en sucette. Qu’importe, la prestation tant attendue du meilleur groupe du genre en activité a été d’excellente facture.
Le temps d’échanger nos premières impressions avec nos poteaux dans la place, nous décampons afin de nous consacrer aux impératifs techniques que nous nous sommes imposés et de pioncer aussi un peu pour être vigoureux dès le début des hostilités du lendemain.