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C’est avec une certaine amertume désormais que l’on se dirige vers le Michelet. La célèbre salle nantaise a annoncé sa fermeture définitive le 30 avril prochain, pour des raisons médicales concernant des deux fondateurs. Une tragique décision qui va assurément laisser des dizaines d’amateurs de distorsions orphelins. Toutefois, il n’existe guère de fauve plus féroce que celui qui sent la fin venir. Et forte de son expérience dans le domaine, la scène nantaise nous propose ce jeudi 31 mars une nouvelle occasion de secouer la nuque au milieu des effluves de bière et de sueur électrique.
Baron Crâne
Comme le témoigne ce cliché atroce pris du fond de la salle, le cul collé contre la table de mixage, le premier groupe accueille un public en nombre et motivé. Les Nantais sont venus profiter de l’énergie dispensée par un trio d’énergumènes, nommés Léo, Léo (!) et Olivier, originaire de Paris et officiant sous une bannière intitulée Baron Crâne. Ensemble, ils proposent un stoner instrumental aux origines diverses, mais au groove certain. Phrasés de guitare progressifs, ligne de basse jazzy, et rythmique entêtante, ils naviguent entre un rock psychédélique maîtrisé et animé de cette frénésie organique propre à la sacrosainte composition guitare-basse-batterie. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que la mixture prend. Les têtes s’agitent, les sourires s’échangent, et devant ce groupe affichant un plaisir si évident, on ne peut que communier ensemble. Pour le final, Léo nous invite à nous rapprocher encore plus les uns des autres, d’oublier les insécurités et angoisses du monde extérieur, pour simplement profiter encore un peu de ces instants suspendus. Et d’un riff planant, il clôture la messe.
Weedpecker
Le temps d’attraper une pinte au comptoir, on se retrouve déjà à remonter les marches pour l’arrivée du second groupe. A peine les Polonais de Weedpecker s’installent que déjà une vingtaine d’affamés du riff s’amassent devant les retours pour recevoir leur dose de saturation. Et sans autre forme de procès, l’équipe de Varsovie ouvre le bal avec « Molecule » ; valeur sûre extraite de sa pièce maitresse sortie en janvier 2018 : III. Piste qui s’enchaîne à merveille avec « Liquid Fire » et qui laisse pleinement apprécier le stoner psychédélique du quintet. La séduction s’opère de suite, le groove charme, les guitares envoutent de leurs mélopées oniriques, ponctuées par un discret clavier qui teinte l’atmosphère en arrière-plan. Instrument qui n’a d’ailleurs pas l’air de suffire à son musicien tant celui-ci se perd en air-guitare et en agitation de tous les membres de son corps. En comparaison de ce satyre déchaîné, les quatre autres gaillards paraissent presque calmes. Et pourtant l’énergie est là. Après deux morceaux issus de leur dernier album, on repart sur III avec « Embrace » qui reçoit un formidable accueil. Pas de là à provoquer des pogos, mais on sent tout de même graduellement monter la température. La scène parait à peine assez grande pour les cinq bonshommes qui commencent à gagner en frénésie. La section rythmique est d’une solidité minérale, avec un batteur au charbon et un bassiste, la barbe taillée d’un guidon magnifique, qui tricote copieusement sur sa quatre-cordes. Entre ces deux-là, les deux gratteux glissent leurs phrasés tantôt empruntés à la lourdeur du doom, tantôt aussi fragiles que le tissu d’un rêve, le tout agrémenté de ce chant éthéré si caractéristique du groupe. On aurait pu le souhaiter plus fort. Mais le son, et à fortiori le mixage, étant ce qu’ils sont dans ce type de salle, on aurait tort de se plaindre du rendu final, qui se révèle plus que satisfaisant.
Weedpecker
Après un rappel qui aurait tout aussi bien pu durer vingt minutes tant les premiers rangs en redemandent, Weedpecker achève son set avec le sourire, dégoulinant de sueur sous les projecteurs rouges. Une nuit de semaine printanière certes frappée par une vague de froid, mais qui nous apparaît bien douce, grâce à une programmation de l’équipe du Michelet qui aura une fois encore su nous réchauffer le cœur ; et nous plongera doucement dans la mélancolie de tous ces moments passés à sauter ensemble. Merci.
Vallet est une commune située à moins de 10 bornes de Clisson, ville emblématique du Hellfest (donc de le la Valley, scène stoner du festival) et à moins de 25 de Nantes (qui est en passe de revendiquer le titre de ville stoner psychédélique la plus active de France) Pour la cinquième année se tient ici un festival connu des initiés de la scène, le Westill, qui comme beaucoup aura reporté son organisation de 2020 sur cette année.. Ce rassemblement a le chic pour mettre les petits plats dans les grands; outre une salle d’une taille impressionnante et une orga d’une vingtaine de personnes, le Westill propose un plateau ambitieux avec une affiche qui invite Supertzar, Wallack, Veuve, Goatfather, Monkey3 et 1000Mods, excusez-nous du peu et on oubliera vite que Duskwood et Samavayo ont dû annuler leur venue. Dès lors entrons vite dans la salle Le Champilambart pour découvrir un accueil autour du merch des groupes, et divers artistes graphistes ou disquaires. Une fois passé ce centre névralgique, on entre dans une salle d’une belle taille et on se retrouve face à une scène pouvant accueillir les moins ridicules des groupes du circuit. Il est 16h30, c’est l’heure d’attaquer les hostilités.
Supertzar
La salle est encore vide quand Supertzar attaque son set, lla file d’attente à l’entrée est encore encombrée, sans doute à cause d’une succession de contrôles COVID, sécurité et billets qui débouche sur l’achat des jetons de consommation. Tant pis, l’heure c’est l’heure et Supertzar ne va pas se laisser démonter. Le trio envoie de la buche ou résonne les classiques du genre, leur stoner doom se teinte de heavy et fait la part belle aux soli aussi agressifs que démonstratifs. Cette touche d’originalité est mise en valeur par une scénographie au poil. Il faut dire qu’une belle console tout juste dépoussière trône au fond de la salle et que les spots au-dessus de la scène sont légion. Quel régal de pouvoir assister à un set de découverte du groupe dans de telles conditions d’autant que le son sonne net et en place malgré un an d’arrêt de l’ingé son. Autant vous dire que le set passe à une allure folle.
Wallack
A peine le temps de retrouver les camarades de concerts qui étaient coincés dans la file, que déboule Wallack. Ce Quintette à clavier vient de Poitier et la richesse de leur musique offre une expérience originale. Si le son mérite une correction en début de set à cause d’une basse qui écrase tout, c’est très vite le retour à la normale. Le public peut alors profiter pleinement des nappes brumeuses d’un synthé couplé à une basse linéaire et enveloppante. Le titre “Anxiety” lorsqu’il est annoncé fait bruisser la satisfaction, il semblerait que le groupe soit déjà attendu malgré un parcours nanti de seulement deux albums. Le mélange des genres proposé par Wallack se veut immersif et complexe quitte à parfois dérouter l’auditeur. Mais c’est bien cette originalité qui leur vaudra ce soir un juste succès.
Veuve
Pour prendre la suite, c’est un groupe Italien avec un nom bien français qui entre en scène, Veuve. Le trio sonne immédiatement bien installé dans le genre stoner. Alors attention, pas le stoner qui tache, on joue là tout en subtilité et en riffs enjôleurs. L’approche fait penser parfois à celle de Valley of The Sun et si l’accueil n’est pas fou de prime abord on sent tout de même dans la fosse la présence d’une certaine fan base. Les riffs déboulent, s’enchainent et tournent sous un show light de qualité. C’est alors que se produit un de ces instants propres aux lives de qualité, la foule adoube le groupe en resserrant les rangs et se massant au devant de la scène. Veuve a pris ses vitamines et secoue la fosse. Le concert joue la progression tout du long et personne ne sortira de ce set en ayant quelque chose à redire sur réussite de la prestation.
Monkey3
A présent il est temps de quitter toute objectivité et tout esprit critique en vous racontant le set de Monkey3 . Les grappes de fans s’accrochent à la scène, quitte à prendre en pleine gueule les fumigènes (le bruit court que ce seraient même eux qui auraient inventé la e-cigarette et le brouillard), le temps est venu d’honorer les transcendants Vaudois. D’ailleurs que dire de leur prestation ? Elle étreint l’assemblée, il ne faut pas long à la majorité des auditeurs ici présents pour entrer dans le set. Et à écouter les murmures qui se faufilent dans la salle on comprend facilement qu’ils ont été un élément décisif pour prendre son billet pour le festival. Le quartet déroule sa set list avec talent, il est impressionnant de voir des musiciens jouer autant de notes aussi lentement, c’est un paradoxe, ils submergent massivement l’assistance avec une placidité incroyable qui n’exclut pas les blasts soniques pour autant. L’émotion dans la fosse est bien réelle, des larmes d’émotion coulent. Monkey3 nous aura offert un moment de grâce et de communion que l’on aurait accepté de voir s’étendre sur des heures. Revenez vite nous bénir s’il vous plait.
1000Mods
Malgré tout il faut passer à la suite et ce sont les non moins attendus 1000Mods qui après des balances qui semblent interminables prennent le relais. Et quel relais ! Une profonde déception envahit la fosse. Le son est puissant, la batterie assène ses coups avec une généreuse violence, mais pas un brin de voix ne filtre, ou presque malgré le titre magistral qu’est “Above179” et qui ouvre ce set. Très vite l’envie de bouger dans la salle devient une nécessité et si en navigant vers la console on retrouve une agréable qualité de son, on sent bien qu’une gratte va chercher trop de décibel et que la batterie écrase tout sur son passage. Il ressort de tout cela que certains dont je fais partie se sentent exclus du show et en viennent vite à le considérer comme poussif, sans supplément d’âme. Quel dommage car 1000Mods sait être une belle claque live et ils auront d’ailleurs l’occasion de le prouver sur le dernier tiers du set. La foule se sépare en deux, la batterie et la gratte font monter la pression. Les combattants se font face et enfin c’est le pogo et les auditeurs s’agitent dans la fosse. C’est à la force du poignet que 1000Mods clôture sur “Vidage” et réconcilie ainsi tous ceux présents devant la scène.
Goatfather
Les Lyonnais de Goatfather vont se charger de boucler la soirée. Le choix parait incongru, en effet, après les deux mastodontes qui se sont succédé il paraît étonnant de voir débouler ces quatre stonerheads au parcours plus confidentiel, pourtant ils vont prouver qu’ils sont à leur place sur ce créneau. La salle a beau être fortement clairsemée à cette heure tardive (il est minuit) cela n’empêche pas Goatfather de délivrer une prestation qualitative et granuleuse. Leur musique s’accorde d’ailleurs parfaitement avec l’heure de passage et l’alcoolémie qui en résulte. On est face à un groupe festif et qui met le pied au plancher sans s’encombrer de délicatesse, fini la dégustation de rigolos muscadets, on attaque le pot de cote qui pique et on s’empiffre d’une musique légère comme un tablier de sapeur. Le titre “Hipster Fister” pose là l’état d’esprit. Les riffs et les hurlements prennent la salle par les parties et du fond de la salle on voit émerger quelques zombies assoiffés de bagarre. Il ne faut plus longtemps pour que les pogos s’enchaînent et que les stagedivers apparaissent. Voilà un groupe qui finalement aura trouvé sa place dans une brèche inattendue où le besoin de se défouler était encore bien présent au final.
Le Westill se termine donc dans la sueur et les acouphènes et les lumières trop vite rallumées n’auront pas laissé le temps d’un rappel au dernier groupe. Espérant sans doute chasser rapidement l’assemblée, l’organisation fait le choix d’une bande son hip hop foutraque… fatale erreur, les quelques vaillants spectateurs toujours présents s’empressent de sauter partout et de danser pour marquer le terrain. La soirée finit de s’éterniser autour de quelques verres et les derniers présents se promettent déjà d’être là l’an prochain et nous comptons bien en être!!
Cela fait un an que Red Sun Atacama est passé par là. Nous assistions alors à leur set en sachant qu’il n’y en aurait sans doute pas d’autre avant longtemps. Au final les revoilà, prêts à défendre leur futur album dans une double release party où Stone From The Sky vient également défendre un album prêt à sortir le jour suivant, Songs From The Deepwater. Ça sent la fête et la bonne humeur d’autant que les deux “jeunes” formations sont de connivence.
Red Sun Atacama
Red Sun Atacama à la joie d’ouvrir (Une fois de plus) pour une salle déjà pleine, ce soir le Michelet aura attiré la fine fleur des stonerheads avides de sonorités bûcheronnes. Ils vont être servis. Les parisiens sont excités au possible, Vincent va d’ailleurs venir prendre la pause sur les caissons posés devant la scène et exhiber son jeu de gratte au public. Il domine l’assemblée de sa taille et de son promontoire offre son énergie à l’assemblée. La fête est complète et ce malgré quelques soucis du côté du Micro de Clèm qui a du mal à se faire entendre avant de se faire totalement couper la chique. Heureusement pour lui, le ronflement de sa basse électrise l’auditeur et personne ne tiendra rigueur à la console ou au micro d’avoir par instant masqué sa voix, d’autant que les deux tiers du set finissent par lui rendre sa voix qui délivre enfin le chant du nouvel album. Il passe le banc d’essai avec brio d’ailleurs cet album. Les compositions semblent valoir leur pesant d’or et risquent fort de se placer encore au-dessus de l’excellent Licancabur sorti en 2018. Là où l’on pouvait noter que la basse était parfois trop avant, il y a des chances pour que le trio se soit rééquilibré autour d’une batterie qui joue le rock, celui qui plonge ses racines profondes dans le blues et mais déchaîne aussi une fureur abrasive comme le sable d’une tempête du désert. Vivement que l’opus nous tombe entre les esgourdes, tel est l’avis unanime de la fosse qui ne se dissout après un rappel sur “Red Queen”, seul morceau issu du premier album.
Stone From The Sky
Stone From The Sky vient peu après une fois de plus offrir ses sonorités au Michelet . Le choix de Crumble Fight de les avoir programmé en tête d’affiche est déconcertant de prime abord, leur musique à une tendance affirmée à virer vers le post rock et on frémit à l’idée que leur set puisse être moins énergique que celui de leurs camarades parisiens. Fort heureusement il n’en est rien! SFTS est une mécanique savante capable de sortir les mélodies les plus sensibles et d’en faire un rouleau compresseur sur scène, c’est d’ailleurs exactement ce qui se passe ce soir. Il suffit de voir Dimitri sauter partout avec sa basse ou Florent s’agiter méthodiquement derrière sa gratte. Les amateurs du trio constatent au centre que ce n’est plus Dylan qui écrase les fûts mais Simon, nouveau batteur du groupe qui n’a rien à envier à son prédécesseur. Une frappe brutale et maîtrisée qui sèche les peaux à chaque coup et blast la fosse sans peine. Les compos jouées par le groupe sont un mélange des anciennes et des nouvelles et en ce qui concerne ces dernières il est clair que le virage dans lequel se trouvait le groupe lors de ces précédents albums est fini, la route est taillée vers des horizons plus post hardcore. Stone From The Sky sera pour nos pages désormais un de ces groupes border line stylistiquement mais qui méritent qu’on s’y arrête. L’écriture est toujours aussi fine et les atmosphères toujours aussi prenantes. Leur musique est violente comme une mécanique monstrueuse et pourtant organique et minérale à la fois. L’ensemble est lumineux et emporte une fois le de plus le public très loin, preuve en est que deux (vrais) rappels suffisent à calmer la soif de l’auditoire qui n’aura plus d’autre choix que d’envahir le merch pour rapporter à la maison un bout de cette soirée qui restera longtemps dans les mémoires.
Il fallait arriver tôt ce soir au Michelet pour profiter des copains, de la bière et des burgers amoureusement préparés par l’asso West Stoner Sessions. Ces organisateurs de concerts ne courent pas après les affiches, en effet il se limitent à 2-3 concerts l’an et un festival sur deux-trois jours l’été venu. Cette année, consécutivement à la période de doutes dont nous sortons suite au confinement, c’est une reprise en douceur décalée à l’automne et renommée West October Sessions qui nous attends. Pour autant le plateau n’est pas ridicule, Dirt Circle, Birds of Nazca, Walnut Grove DC et Deadly Vipers. Les néerlandais de Komatsu auraient dû jouer la tête d’affiche mais suite à une annulation de dernière minute celle-ci est décalée d’un rang, ce qui n’a rien de dramatique, nous le verrons.
Dirt Circle
Dirt Circle pourrait paraître un choix léger pour cette soirée aux revendications stoner affirmées. En effet, le set du quintette nantais respire le grunge et suinte le punk à papa, pour témoins d’ailleurs une reprise de “I Wanna Be Your Dog” des Stooges en plein milieu du set qui consciencieusement met l’assemblée en bouche. Il faut dire que les gars chauffent la salle comme il faut et leur prestation énergique et maîtrisé va venir combler les oreilles avides de stoner et mettre en jambe l’assemblée avec un titre particulièrement vif, “Enemies”, où le chanteur pose sa gratte pour prendre d’assaut l’espace de la scène et marteler physiquement la musique pour clôturer le set sur un efficace “The Sky”.
Birds of Nazca
Birds of nazca est aussi un groupe des bords de Loire qui n’a pas eu beaucoup de route à faire pour venir remplacer au pied levé le groupe qui a fait faux bond au West Stoner Sessions. Le duo peut s’enorgueillir de s’être fait remarquer dans l’efficace concept des Smoky Van Sessions. Leur Stoner posé sans surplus technique est d’une efficacité redoutable. Le duo guitare batterie ne tarde pas à emporter l’auditoire malgré quelques problèmes de sangle défectueuse côté guitare. Passé ce cours de bricolage et avec l’aide d’une console son aux petits soins, Guillaume et Romuald transforment le set en façonnage de poutres et soulèvent les planches du devant de la fosse avec des basses dantesques pour un groupe qui n’a qu’un guitariste pour servir les cordes. Côté batterie, sous des dehors paisibles les enchaînements de cavalcades se multiplient et l’ensemble finit par glisser vers un flirt post métal après l’invocation shamanique du titre “Symposium”. Le tour de force du duo est bel et bien de servir du riff puissant et fédérateur, tenu en une poignée de notes sur une frappe parfois quasi binaire. Un groupe, indéniablement à suivre.
Walnut Grove DC
La soirée ayant définitivement pris le tournant de la puissance assumée et du déchaînement d’amplis, c’est au tour de Walnut Grove DC d’enchainer les brûlots joués vite et fort. Balls to the wall comme on dit dans l’aéronautique anglo-saxonne. Bigrement poseurs les trois rochelais sentent le jack, le pneu brûlé et la poubelle, c’est un peu le son qui sort de la caravane au fond du bayou. Le groupe s’appuie sur la voix du chanteur, elle décape l’assemblée et les instrumentistes viennent passer le gras par-dessus les rayures. L’ensemble tient beaucoup grâce au duo basse batterie et à un travail côté console qui ajuste les instruments du côté gras de la force. Le public quant à lui sent la connivence, la salle s’est densément peuplée et pour se frayer un chemin jusqu’au pied de la scène il faut affronter quelques tenaces fans qui défendent chèrement leurs positions. Ça commence à sentir la sueur et même si on est loin du déchaînement frénétique il faut bien avouer que Walnut Grove DC donne satisfaction à son auditoire.
Deadly Vipers
Ça sent encore la gomme brûlée lorsque Deadly Vipers monte sur scène. Il leur aura fallu faire quelques bornes depuis Perpignan pour venir s’offrir au public du Michelet ce soir. De bornes faites pour s’offrir mais aussi pour parler réchauffement climatique car une fois de plus le quartette démontre que le sud de la France doit être un véritable désert, source d’inspiration d’un son comme on les aime. Malgré une voix un tout petit peu en retrait au niveau de la console, force est de constater qu’il n’y a pas devant nous un artiste en dessous de l’autre. Leur maîtrise du son et de la technique emporte progressivement une salle trop vide pour un tel niveau de qualité. Rudy, le batteur, carré et puissant égraine les chapelets d’astuces pendant que le son de basse de Thomas se fait hors norme et redonne la guitare de David quand ce n’est pas l’inverse. Si à force de saillies vocales Fred commence à transpirer sévère sur scène, le public n’est pas en reste, ça commence à sentir dans la fosse, les corps bougent et révèlent la condition animale à laquelle nous appartenons entièrement à présent. La soirée se termine en apothéose au son des anciennes et nouvelles compositions d’un Deadly Vipers qui redoutable d’efficacité provoque un pogo défouloir qui viendra clôturer le set.
Une fois redescendus au rez-de-chaussée et sur terre il est l’heure de prendre encore quelques verres entre amis, de contempler sur les visages fatigués mais heureux du travail accompli par les West Stoner Sessions et quatre groupes de qualité. On aurait aimé que la soirée fut un weekend entier, on aurait aimé en recevoir encore et que cela ne s’arrête jamais mais il faut une fin à tout et apprendre à se satisfaire de la saine fatigue dispensée par une orga aux petits oignons dans le parfait écrin du Michelet.
Tout bon fan de stoner de France a déjà entendu parler des Volcano Sessions. Pour notre part nous vous en avons déjà vanté les mérites dans le passé. L’événement est un festival à jauge réduite qui se tient dans le Puy de Dôme sous l’égide de l’association Black Owl depuis 2015. Si à l’origine le festival se tenait en divers lieux, il a la chance d’avoir pu se maintenir ces dernières années dans l’écrin du cratère du volcan de Montpeloux. Le site est à lui seul la promesse de nuits chaudes et vaporeuses pour lesquelles nous avons pris la route avec au ventre la joie due à la perspective de revenir à la vie dans un festival attendu, tant pour des questions sanitaires que pour le privilège de faire partie du peu d’élus accédant au sésame.
JOUR 1
RED CLOUD
Au programme de cette session est sorti du cratère Red Cloud qui, après de très longues balances, va mettre en valeur la perfection du son qui remplira nos esgourdes durant tout le week-end. Le Groove enjôleur du tout jeune groupe parisien porte à merveille la voix puissante et sensuelle de la chanteuse qui se fera un plaisir de blaster l’auditoire entre deux riffs joyeusement pêchus.
LITTLE JIMI
A demi rempli de breuvage magique et houblonné pour quelques dérisoires écus, nous venons admirer Little Jimi qui se charge de venir faire bouillir l’eau de cratère avec son album planant sorti le jour même et chroniqué ici même. Ils passent le test du live avec talent, investissant l’espace de leurs mélodies mi psyché mi épiques qui n’oublieront jamais de faire valoir la puissance de leur son. Bien souvent au cours du weekend leur nom reviendra sur les lèvres tant ils ont séduit et surpris par la finesse de leur dernière production qui se détache habilement du travail de leur premier EP.
Les volcans d’Auvergne recèlent bien des secrets et parmi ceux-ci le saint Nectaire et le Pâté aux patates ne sont pas des moindres. Vous l’aurez compris, les Volcano c’est aussi du terroir qui te graisse les entrailles et te fait éructer de plaisir à chaque instant, mais c’est encore Flaux qui en parlait le mieux dans sa chronique de la quatrième édition. Après un arrêt roboratif il est donc temps de redescendre dans le cratère d’où émanent déjà de biens beaux accords.
MARS RED SKY
C’est avec professionnalisme et humour que les Mars Red Sky prennent leur tour sur les planches surplombant le lac. A l’aise, ils posent ici leurs compositions en habitués du lieu. Autant vous dire que les blasts doomesques des Bordelais ont encore fait mouche. L’alchimie d’un chant accouché dans la douleur puis le transport provoqué par celui-ci lorsqu’il est repris en duo, la puissance de la section rythmique associée aux riffs les plus psych font exploser les couleurs d’une éruption visuelle et sonore. Une musique qui à la lourdeur du basalte volant sous la pression des gaz libérés.
ASHINOA
Pour clôturer ce premier jour, c’est Ashinoa qui vient finir d’abreuver de son jam de l’espace la petite troupe présente. Claviers à fond, ils provoquent un glissement de terrain et les corps sont emportés au pied de la scène. L’intense bordel, le magma foisonnant de leur musique happent les âmes embrumées par les fumerolles et l’alcool. Les corps quant à eux répondent volontiers aux notes rebondissantes et presque électroniques de ces lyonnais. Une parfaite fin de journée pleine de joie et de danses.
JOUR 2
Le rythme des Volcano fait aussi son charme. Après une nuit presque sans agitation, il est temps de reprendre des forces avec du carburant pour se mettre en condition et de se taper quelques activités ludiques (un vrai camping estival, frisbee et pétanque sont de mise). Il n’est pas encore 13 heures lorsque le son monte du milieu du campement où s’est mise en place une jam session. Les artistes programmés comme ceux venus en festivaliers se passent les instruments et le micro. Le soleil tape fort et beaucoup préfèrent jouir des morceaux improvisés à l’ombre d’une tonnelle ou d’un bosquet ; un moment parfait de mollesse et de détente.
SUPER CANDY
Il est presque 17 heures lorsque Super Candy ouvre la journée. Le groupe porte bien son nom et tient sa place. Le bonbon un peu musclé dévoile son esprit au travers d’un power trio jam. Le chant est principalement tenu par le batteur et ses cris allument la mèche de cette journée qui sent le soufre à plein nez. Un groupe qui a été parfaitement programmé pour introduire avec son stoner amical ce second jour de fête et baliser le terrain pour ce qui va suivre.
WORMSAND
Le sol tremble, les balances sont en cours ou le volcan se réveille, on ne sait pas trop. Sous un soleil bien lourd Wormsand va venir mettre fin à 18 millions d’années de sommeil et réveiller le volcan. Le visage plein de rage, les membres crispés, chaque musicien du groupe envoie voler à destination du public un bout de doom surpuissant. Un set d’une violence défouloir où le trio occupe l’espace en crachant sa gestuelle outrancière, libérant sa rage à tout va. Un set qui passe comme une nuée ardente et laisse les spectateurs séchés sur place.
MAD FOXES
Les Nantais de Mad Foxes saisissent le relais sur les cendres encore fumantes du précédent set. Leur prestation fait la part belle au grunge et Post-Punk. Leurs sonorités tranchent un peu avec les groupes précédents, ni tout à fait psych ni doom, même pas complétement stoner, le trio va devoir se donner à fond. Sans aller immédiatement vers une musique survitaminée. Les morceaux sont à peine contenus et accumulent pourtant leur énergie tout au long du set. La tension gronde sous la roche lorsque le trio arrive à la fin de son concert et finit par la cracher de leurs entrailles devant un public ravi bien que clairsemé.
DJIIN
La nuit tombe sur Djiin et rend son set encore plus hypnotique et éthéré. La druidique chanteuse et harpiste du groupe contribue pour beaucoup à cet esprit, c’est d’un cri du fond des âges qu’elle libère la puissance tellurique de ses camarades instrumentistes. Le quartet joue à fond la carte des 70’s et gagne à sa cause en un rien de temps un public dont bon nombre de pupilles se sont grand ouvertes pour savourer cette nuit à hiboux. Sous une quasi pleine lune Djiin nous a offert une partie de son nouvel album pas encore sorti et annonce un patchwork musical de qualité à paraître dans les mois à venir.
MOONDRAG
Le temps d’éponger les premières agapes de la journée avec force charcuterie et autres délices à croûte fleurie et c’est Moundrag qui servira de plat de résistance. Ce duo mi décalé mi sérieux a le sens de la mise en scène. Avec seulement un clavier et une batterie, il fait rugir les notes comme un ensemble bien plus complet. Authentiques et investis les deux compères vont cependant recevoir l’aide du guitariste de Djiin et de la bassiste de Cachemira pour former pour quelques temps un groupe d’opportunité qui ira encore plus haut dans les tours et agglomérer au pied de la scène les oiseaux de nuit en quête d’émanations psychédéliques.
CACHEMIRA
Alors que les derniers verres de vin chaud s’épuisent et que la fumée se fait dense au sein du cratère, c’est Cachemira qui va avoir la responsabilité de clôturer ces deux incroyables jours de fête. Les Espagnols jouent une musique qui n’est pas sans rappeler Radio Moscow. C’est une fois de plus un véritable voyage au travers du temps qui s’opère. On se laisse porter sur les eaux du volcan, bouillantes de tant de bonnes ondes. L’assistance encourage, crie et réclame ne s’y trompant pas. L’échange avec le groupe est entier, ce dernier allant jusqu’à réclamer au public son assistance pour s’enjailler comme il se doit. La proximité qui fait la spécificité de ce festival apparaît bien plus clairement alors que la journée se termine.
Comme pour tout festival réussi c’est le cœur gros qu’il faut quitter les amis et la grâce de l’instant. Cette année encore les volcans d’Auvergne auront inscrit en leur sein une légende de plus avec cette sixième édition des Volcano Sessions.
Merci à Alexandre pour son coup de main photographique.
Le regard d’un photographe sur la captation
Bourg-en-Bresse (dit Bourk-en-Bresse), préfecture de l’Ain et capitale de la Bresse, réputé pour ses fameux poulets et son monastère royal sacré par Stéphane Bern fut le théâtre d’un évènement unique en ce mois de février, une captation des Mars Red Sky en vue d’une diffusion ce 19 Mars.
La Tannerie, la scène des musiques actuelles de la ville, dirigée par Gilles Garrigos qui avait initialement programmé nos amis Bordelais sur leur grande scène en Mars, leur ont offert cette opportunité. Étant proche de la Bresse et aimant cette belle salle qui fit vibrer la musique dans mon cœur dès l’adolescence dans le premier département français (01), je n’ai pu résister à demander une accréditation (comme dans des temps anciens) pour immortaliser cette événement Fuzzien dès l’annonce de la date.
C’est donc fébrile que ce samedi 27 février, je me rends dans l’un des cinémas de la ville et l’une de ses salles de 150 places après un lavage des mains au gel hydroalcoolique et arborant mon masque de circonstance. A 18h15, les Mars Red Sky rentrent en scène, les équipes techniques de la Tannerie et de David Barrault de l’Imaginerie pour la captation donnent le clap de départ du concert. En professionnel, je me plonge dans la musique et le spectacle. Je recherche activement les meilleurs angles sans déranger les équipes de la captation tout en esquissant quelques Head bangs plus ou moins discrets. Et autant vous dire que l’exercice dans une salle de cinéma est étonnamment moins évident que dans une fosse…
Ce fut compliqué de saisir toute la subtilité de l’œuvre du groupe. Non pas que je n’ai pas apprécié, mais la particularité de ce contexte fut que nous n’avions que le son des amplis, de la batterie et la voix uniquement dans les retours, pour des raisons techniques propres à la captation et au lieu. Le groupe a joué le jeu et comme à leur habitude, pour mon troisième concert d’eux en tant que photographe, l’énergie et la communication scénique furent bien présentes et me transportèrent jusqu’au fond de mon objectif. Ils ravirent nos oreilles avec des morceaux de leur dernier opus The Task Eternal, comme le marquant “Recast”, tout en y ajoutant des morceaux de leurs précédents albums.
Après 55 min, il est temps d’applaudir pour la dizaine de personnes présentes dans la salle (techniciens compris) et un vieux réflexe pavlovien ne peut m’empêcher de lever mon plus beau Horn Sign.
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L’heure de la diffusion a sonné ce vendredi 19 Mars 2021. Depuis la captation, les acteurs de la culture se mobilisent partout en France et la Tannerie est occupée depuis une semaine. Il me parut évident de me joindre à eux pour assister à la diffusion sur écran géant avec un très bon son. Nous étions quelques personnes à tenir le lieu pour la nuit et à profiter de cette diffusion dans le bar de la salle, lieu de rendez-vous de la mobilisation. Un grand plaisir de voir la grande qualité de la captation et de la performance des Mars Red Sky, entouré de personnes découvrant pour certains le stoner rock par la même occasion. La sensation, lors de la captation, que le groupe avait, comme à son habitude, livré un set irréprochable fut confirmée. Ce moment fut un des moments forts de la soirée nous rappelant pourquoi nous étions réunis ce soir-là : pour que la culture continue à nous faire vibrer dans des conditions normales !
Finissons par saluer les nombreuses initiatives des acteurs culturels de l’Ain qui depuis le printemps 2020 travaillent à se réinventer avec les captations nombreuses de la Tannerie mais aussi des concerts dans les jardins du département durant l’été, à jauge très limitée avec la scène locale…. Chapeau aux amis Aindinois de la Tannerie, 98 Décibels et les K-potes entre autres d’être toujours là en ces temps obscures et de nous rappeler que la culture est plus qu’essentielle.
Nicolas Bevernage aka Oofzos
Même si c’est ici la troisième chronique, petit rappel du concept qui se cache derrière cette prestation de Stöner.
COVID oblige (punaise, deuxième phrase et déjà ce truc qui apparait !), Ryan Jones, faute d’avoir sa rasade annuelle avec le festival Stoned & Dusted, décide d’organiser une série de cinq concerts avec une thématique commune, le désert et pas de spectateur. Le concept ne s’arrête pas là puisque le bougre va nous sortir tout cela sous forme de galettes aux gouts CDs, vinyles (plusieurs parfums prévus) et DVD.
On remue les contacts, on cherche des bons groupes têtes de gondole (Earthless & Nebula), on invite aussi des groupes moins mainstream (Spirit Mother & Mountain Tamer) et on se réserve une belle petite exclue pour le final avec Stöner.
Oui car la série de cinq concerts se termine en beauté avec ce groupe dont le nom est quand même sacrément culotté, et qui n’est autre que le nouveau projet de Brant Bjork, Nick Oliveri et Ryan Güt.
Joli coup donc pour Ryan Jones puisque le groupe qui nous tease depuis des mois n’a encore rien sorti ni fait de tournée (forcément avec le CO…. ta gueule !!).
Contrairement aux précédents concerts diffusés, la première partie est un peu décevante. Tranquillement installé en mode VIP devant son écran, les 30 premières minutes nous montrent des extraits des 4 précédents streaming. C’est certes sympa pour attendre mais ça reste de l’autopromo.
Les 40 minutes suivantes nous offrent des extraits de deux concerts, l’un de Brant (2004) et l’autre de Mondo Generator (2005). Là encore c’est un peu chiche comme contenu car il s’agit de vidéo amateurs (qu’au passage tous les traders de bootlegs doivent posséder et qui sont disponibles sur youtube).
Pas d’interview. C’est bien dommage car il y avait matière à poser un max de questions sur ce projet et c’est très certainement une belle occasion loupée.
Bref, de toutes façons, on n’est pas là pour ça, ce qu’on veut c’est du live !
Ici, le chroniqueur que je suis sait que le job ne va pas être facile. Chroniquer un concert qui n’en est pas vraiment un, assis devant l’écran d’ordi pour le « direct » et devant la télé pour une rediff, avec un groupe dont je ne connais pas le moindre titre ! Impossible donc de savoir si les titres ont été correctement exécutés (si ça se trouve c’est bourré de fausses notes !) et ce sont surtout mes impressions que je vais donner.
Et honnêtement, mettant de côté toute l’affection que je peux avoir pour Brant et Nick pour essayer d’être le plus objectif possible, les impressions sont très bonnes, excellentes même.
Musicalement, on penche plus du côté de Brant que de Mondo Generator mais le second influençant inévitablement le premier, on est sur du haut niveau. On retrouve tout un tas de plans faciles à la gratte mais ça marche. Les riffs comme Brant peut en écrire des dizaines fonctionnent encore et toujours. C’est plus fort que moi, j’headbangue en mode automatique incontrôlable. Parfois la balance penche plus fortement côté Nick (l’excellent “Evil Never Dies” qu’il chante d’ailleurs) et parfois on se retrouve à mi-chemin entre les deux références inévitables.
On attendra la sortie de l’album pour se pencher plus en détails sur tout cela mais c’est clair, l’album est entré sur ma wishlist directement.
Si en plus l’album à venir nous sort un son comme celui de cette captation, on sera sur une belle pépite. Déjà constaté sur les précédents streaming, le travail technique est admirable. Le son est parfaitement équilibré, ce qui permet d’apprécier chaque instrument. L’image est sublime. Couleurs chaudes qui transcendent le lieu. Car oui, pour reprendre ce qui a été dit dans les précédentes chroniques, l’endroit est le quatrième membre du groupe. Membre qu’on espère tous temporaire car on aimerait bien retourner dans une bonne salle de concert mais on se prend tous à rêver d’y être.
Caméraman au sol et drones dans les airs, énormément de plans vous feront rêver. C’est tout simplement beau. Le montage est à la cool et on a pleinement le temps d’apprécier ce qu’on voit.
Le drone en particulier est très bien utilisé. Les visuels des paysages bien sur mais aussi des plans par-dessus (notamment la batterie) sont parfaitement placés. Des plans fixes ou en mouvement, la réalisation est splendide.
Bref, la musique est très bonne, le son est parfait et visuellement c’est hyper beau.
La série de Live in the Mojave Desert se termine en apothéose et restera comme un des projets les plus aboutis qui ont été initiés depuis que la nature a décidé qu’on devait rester chez nous !
Deux semaines après la petite claque (oui oui, on ne s’y attendait pas) du live stream de Earthless, c’est au tour de Nebula, autre gloire de la sphère stoner, de nous proposer son set dans le désert de Mojave.
L’effet de surprise en moins, donc, on se cale quand même devant notre écran dans notre confortable fauteuil (oui, ça fait toujours le même pincement au cœur de se dire que c’est désormais comme ça qu’on regarde les concerts) à l’heure dite du concert. Comme pour Earthless, on est gentiment pris en charge par une sorte de DJ set virtuel où s’enchaînent des morceaux de stoner, doom, psych rock, space rock… le tout sur des visuels animés psychédéliques du meilleur ton.
Juste après, c’est Ryan Jones, initiateur du projet, qui nous accueille pour une interview très sympa avec le groupe. Les gars sont détendus, l’interview se tient plusieurs mois après l’enregistrement du concert (d’où l’anecdote toute mimi : Eddie a un petit bébé de 2 mois sur les genoux, qui est en fait son fils, né juste après le concert…). Après l’interview, la prod nous propose quelques vidéos live de bon aloi, dont deux vieilles vidéos de Nebula de 2004 et 2006, mais aussi Lo-Pan, etc… Cool pour un bonus !
Le concert commence donc réellement au bout d’1h après la “prise d’antenne” (avec un petit générique et quelques plans aériens de la prod : tous ces éléments désynchronisés nous rappellent donc que ce n’est pas une captation en direct, mais un enregistrement effectué il y a plusieurs mois, en octobre 2020, ayant bénéficié d’un montage vidéo significatif depuis). Le premier titre joue la sécurité : le classique “To the Center”, étiré dans tous les sens et chargés de jams et soli un peu partout, nous rappelle de quoi est fait Nebula en live – de l’imprévisible… la vie quoi ! Le titre est capté dans une ambiance un peu irréelle, entre chien et loup, sous un soleil crépusculaire aux couleurs un peu fantasmatiques.
Le récent “Man’s Best Friend” (un des nombreux extraits de leur dernier album Holy Shit ! joués sur ce concert) vient enchaîner, le groupe rentrant progressivement dans la torpeur d’une nuit naissante. Nuit qui s’assombrit encore lorsque le trio dégaine une autre pépite, “Giant”, son riff classieux étant servi par une énorme rythmique de basse. Encore une fois, les interprétations ne sont jamais très orthodoxes, le groupe injectant un segment de “Clearlight” à la fin du morceau.
La suite du set se déroule de nuit, avec un light show assez simple, constitué de spots fixes sur le groupe. L’occasion de se concentrer réellement sur les trois musiciens – et de penser que l’on a probablement sous les yeux le meilleur line-up du groupe : Eddie Glass et son jeu de guitare aussi organique que lunaire, Tom Davies et ses lignes de basse infaillibles (proposant rythmiques robustes et mélodies cruciales dans l’équilibre du groupe, permettant à Glass de se perdre dans des leads débridées en retombant toujours sur ses pattes) et Mike Amster, batteur depuis la reformation du groupe, infaillible frappeur, alliant puissance et feeling.
Nebula enchaîne encore quelques titres dans cette atmosphère, dont un inédit a priori appelé “Highwire” (un nouvel album est en cours d’écriture, apprendra-t-on lors d’une des interviews du groupe proposées autour du concert), un titre qui trouvera sa place dans la frange la plus heavy des compos du groupe. L’occasion aussi (tandis que l’on essaye de déguster chaque note de ce nouveau morceau) de louer encore une fois la qualité de cette prise de son : la captation est irréprochable, claire et puissante à la fois, proposant à chaque instrument une place de premier plan.
Après encore quelques morceaux (toujours bien choisis, reconnaissons la qualité de la set list) et une autre interview un peu WTF (Eddie porte un masque de singe…), on retrouve nos gaillards cette fois dans une configuration assez similaire à celle de Earthless, à savoir toujours une captation de nuit mais avec un light show psyche somptueux sur les massifs rocheux avoisinants. L’occasion de déguster l’hypnotique et lancinant “Let’s Get Lost” enchaîné à “Messiah”.
La fin du set voit encore largement le très bon Holy Shit ! mis à l’honneur (“It’s all Over”, “Witching Hour”…) avec néanmoins une petite gourmandise : “Perfect Rapture”, publié il y a un moment sur un split obscur distribué au lance-pierre à l’époque.
Le concert se clôture après une bonne heure et dix minutes de set, avec en bonus, en guise d’au revoir, un petit instrumental d’Eddie à la guitare acoustique capté sous le soleil… ambiance…
On ressort donc de cette seconde expérience “Live in the Mojave Desert” aussi satisfait qu’après le set de Earthless, mais l’effet de surprise en moins. Reste alors ce constat du travail bien fait, d’une captation qui fait honneur à la fois au groupe et à la musique que l’on aime.
Le voilà enfin, le premier acte de cette série “Live at the Mojave Desert”, abondamment teasé depuis plusieurs semaines. Pour rappel, dégouté d’avoir annulé son festoche Stoned & Dusted, Ryan Jones a décidé de se lancer dans un “projet COVID” un peu spécial, en proposant à cinq groupes de faire chacun un concert dans un coin reculé du désert (il s’est pour celà appuyé sur son expérience récente avec Yawning Man), lançant pour l’occasion son label afin de sortir ensuite chaque concert en disque. Et le projet commence donc ce samedi soir, avec la diffusion du set de Earthless.
Contexte COVID oblige, la diffusion de ce premier concert suit un petit protocole auquel on est désormais habitué : rendez-vous à une heure fixe devant son écran pour le début des hostilités, on est priés de préparer sa bière avant (ou le pop corn ?). A l’heure dite, on est accueilli par une longue séquence “d’ambiance”, avec une playlist de titres sympas sur fond de visuels psyché animés, de quoi descendre gentiment le premier verre sans trop d’action…
Un peu plus loin, le trio de production se livre à une petite “auto-interview” pour contextualiser un peu le projet, très cool, ça sent la passion et ça fait plaisir. C’est enfin Isaiah Mitchell qui se retrouve interviewé ensuite, encore un moment sympa. Tout ceci est bien évidemment enregistré de même que, on vous le rappelle, le concert : posé sur bandes il y a quelques semaines, cette approche de concerts “live” avec horaire de RDV fixe notamment paraît un peu étrange dans ce contexte, mais pas gênant : pour tout dire, on se raccroche volontiers à tout ce qui nous fait nous rappeler des “vrais” concerts, ces derniers temps !
Au bout d’une heure finalement, le concert commence, et on est chaud ! Ça tombe bien, car l’ambiance est bien celle du sable chaud : l’après-midi dans le désert de Mojave, les plans sont impressionnants et délectables. On y voit en particulier plusieurs plans montrant la production nécessaire à cet événement (camions, une vingtaine de techniciens, drones, caméras partout…). Musicalement, le groupe se lance dans un “Violence at the Red Sea” plutôt classique (comprendre : 20 min tranquille), qui fait parfaitement le job de nous rappeler les composantes clés de Earthless en live : Rubalcaba et Eginton tiennent la baraque avec une rythmique et une base mélodique virtuose, tandis que Mitchell, fusionnant avec sa Wah-wah, essaime ses leads et éructe des soli space rock d’une fluidité confondante.
Après une petite séquence / intermède avec une interview un peu informelle des musiciens, on retourne dans le désert… mais en pleine nuit cette fois ! L’ambiance est toute autre, et visuellement aussi, avec notamment des plans un peu plus resserrés. Le trio entame un autre de ses classiques, “Sonic Prayer”, s’appuyant sur une intro à rallonge toute en montée en puissance (permet de bien apprécier le talent de Mario Rubalcaba et son approche parfois “tribale” de la batterie), pour aboutir à ce riff qu’on connaît bien. Cette ambiance nocturne permet aussi de voir apparaître le quatrième homme du concert : un light show remarquable, qui finit d’occuper l’espace (et il y en a, de l’espace !) autour du groupe : spots puissants aux tonalités évolutives, et surtout projections psyche sur l’énorme bloc rocheux voisin, l’effet est saisissant.
On est bien chaud quand, après déjà 45 min de set, le groupe nous sort une petite pépite, dégottant de son sac à raretés le vieux “Lost in the Cold Sun” ! Et il ne le fait pas en mode glandeur, puis qu’il en propose une version de rien moins que quarante bonnes minutes ! Quintessence du jam rock, le titre déroule sans provoquer l’ennui, toujours bien accompagné par les effets visuels toujours aussi pertinents. On notera aussi l’usage ponctuel d’effets vidéos divers (superpositions, ralentis, effets “miroir”, etc…) qui apportent encore un peu de valeur ajoutée à cette production (qui n’en manquait pas, déjà servie par une très grande variété de plans et cadrages divers, fixes ou mobiles). Le titre, plutôt lent, nous emmène gentiment dans la nuit naissante (chez nous), avant que l’on ne se fasse cueillir par un gros coup d’accélérateur surprise, pour nous replonger sur sa longue conclusion dans une douce langueur space rock…
Et puis tout s’arrête, de manière un peu abrupte finalement, après une heure et demie d’un live de grande qualité. Pour “redescendre” un peu (même si on peut présumer que vous êtes restés à la bière tout du long…), la suite de l’interview des trois producteurs nous apporte quelques infos complémentaires sur le projet et les prochains événements de la série…
A chaud après le concert, difficile de dire qu’on n’a pas kiffé : admettons-le, c’est probablement le meilleur concert de Earthless que vous verrez en vidéo, que ce soit pour le lieu du concert ou sa production visuelle. Quant au son, on n’en a pas parlé, il a été de bout en bout absolument remarquable, puissant et clair, sans faille (sauf pour les interviews, où il était trop faible – ce qui n’a pas posé grand problème, on n’était pas là pour ça…). Reste la réflexion, posée à tors et à travers ces derniers mois du “concert sur internet” : est-ce que l’on peut substituer de vrais concerts avec des live streams ? Bien sûr que non, et c’est bien là que les responsables du projet ont bien vu : en proposant un concept bien spécifique, sorte d’hybride entre le bon vieux DVD live et le concert en direct, le tout s’appuyant sur les principes du stream “en différé”, avec une production de grande qualité, ils amènent sur un plateau d’argent de quoi faire patienter le fan de stoner échaudé par la situation sanitaire du moment. Une belle réussite.
En ces temps faméliques pour tous gourmands de la chose live, la résistance s’organise sur le net, les groupes proposant de plus en plus de concerts en live via des plateformes de streaming. Le procédé fait débat et divise les fans. « Pourquoi payer pour une vidéo » se disent ceux qui ont le Youtube facile, « rien ne vaut l’incomparable sensation d’un vrai concert » argue le sensé. Oui. Oui mais cela fait désormais 8 mois que les salles se sont tues, et le spectacle vivant avec elles. Foutu virus. Alors lorsque Paradise Lost a annoncé proposer un Stream exclusif « At The Mill », un night club de Bradford, via la plateforme digitale Stageit, il nous a semblé important d’en être, pour voir un peu quelles sensations cela procure, de faire un concert sur son canapé.
21h, le casque sur les oreilles, le jogging Black Sabbath sous le plaid, une bière à la main et les copains sur Messenger, le concert peut démarrer.
Tout de noir vêtu, le visage fermé (les membres de Paradise Lost ne sont pas sur scène les plus joviaux mais pour le coup le stress est palpable), Nick Holmes et ses comparses ouvrent avec « Widow », premier extrait d’Icon. Le son est excellent, la résolution vidéo aussi (il est possible de la baisser pour s’adapter à votre débit). Le chat de la plateforme déborde de messages, l’opération semble être un succès. Seul Waltteri Väyrynen (ci désigné « le batteur », hors de question de réécrire une seconde fois son nom) voit son poste de travail adapté, puisqu’il joue derrière un plexiglass. Le son énorme, ample du groupe fait la part belle à la basse de Steve Edmondson, qui emplit l’espace sonore d’un son rond, un poil fuzzé. Le groupe propose ce soir 3 extraits d’Obsidian, joués lives pour la première fois (« Fall From Grace », « Ghosts » et « Darker Thoughs », les trois pépites de l’album) au milieu de titres plus attendus. C’est d’ailleurs là un peu le reproche à faire à ce concert : la set list est très classique, et courte, 50 minutes pour un ticket classique (10 dollars) et 1h20 pour le ticket VIP (15 dollars, suivi d’une session interview certes intéressante mais que l’on aurait aisément remplacée par « Hallowed Land » et « The Longest Winter »). L’absence de communication entre les morceaux aussi est dommageable (“mais pour parler à qui ?” me diriez vous, lorsque l’on ne peut avoir aucun retours du public ?), rendant ce concert certes excellent dans sa réalisation mais un peu sans âme, l’ajout de bandes enregistrées allant aussi un peu dans ce sens. Mais quels morceaux cependant ! « Faith Divides Us », « As I Die » et même le très dansant « So Much is Lost » issu de Host font à coup sûr chanter dans de nombreux salons d’à travers le monde.
Au final un excellent moment, sensation amplifié par l’effet de manque, malgré une ambiance un peu étrange et une set list convenue. De quoi se laisser tenter pour un autre Stream, en attendant que la vie, la vraie puisse un jour reprendre.
SET LIST
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- Widow
- Fall From Grace
- Blood And Chaos
- Faith Divides Us
- Gothic
- Shadowkings
- One Second
- Ghost
- The Enemy
- As I Die
- Requiem
- No Hope In Sight
- Embers Fire
- Beneath Broken Earth
- So Much is Lost
- Darker Throughts
Ce soir la France a peur! Alors que le président de la république doit annoncer la fin du monde de la culture, une petite ville résiste encore et toujours à l’envahisseur. Une fois de plus l’association Erato est en lutte pour proposer dans l’écrin de La scène Michelet une soirée pleine de gras acoustique et de subtilités ensablées. C’est Grandma’s Ashes qui ouvrira la soirée comme à l’accoutumée désormais, en deux sets successifs devant 45 personnes assises chacun. Puis ce sera au tour de Red Sun Atacama de se prêter à l’exercice.
Grandma’s Ashes
Il est 20h10 et Chloé chanteuse de Djiin et organisatrice vient gueuler en terrasse l’ouverture de la salle. Chacun monte alors prendre place sur chaise et c’est un acte toujours déstabilisant de se dire que l’on va assister à un concert pimenté le cul posé. Les trois musiciennes de Grandma’s Ashes montent sur scène, prennent leurs marques et rapidement enchaînent les riffs de leur musique qu’elles définissent comme un mélange de punk et Stoner notamment.
Il faut rapidement retirer les bouchons d’oreille car aux premiers rangs la saturation est intenable. Une fois le conduit auditif libéré on peut se rassurer, la balance est tout à fait correcte. Le trio de Parisiennes délivre une musique où sonnent quelques accents grunges. Il y a du Muse là-dedans aussi et si le groupe ne joue pas les copy cat c’est un constat au travers duquel on ne saurait passer. La musique de Grandma’s Ashes transpire et goute l’acidité, en cela on ressent une volonté punk d’en découdre et le jeu sait se faire violent à bon escient. Dans leur phrasé néanmoins on a parfois du mal à suivre la logique qui les anime, l’asymétrie des morceaux étant souvent perturbante. Lorsque le chant trouve les rails et que le chœur entamé tend à un moment de plaisir intense, souvent la gratte cherche à s’exprimer plus avant et prends des risques puis la rythmique prend un virage à 180° et la batterie rattrapée par la basse fait voler en éclat les morceaux.
Grandma’s Ashes se complait dans une sorte d’expérimentation sonore qui désarçonne l’auditeur. Autant dire qu’il n’y a pas chez elles de consensus et la volonté des gonzesses n’est pas de sombrer dans le conformisme. Quitte à livrer un patchwork musical où le public aurait été moins désarçonné grâce à quelques transitions. Qu’importe le plaisir est intact lorsque l’on garde à l’esprit les accès de rage et les quelques tours de passepasse du côté des cordes qui n’étaient pas piqués des vers.
Le temps d’une causerie autour d’une bière bien méritée et d’une perception assez partagée du set que l’on vient de vivre et c’est à nouveau l’heure de venir se caler devant la scène. Red Sun Atacama a déjà investi les planches et les brûlent de leur impatience de se lancer dans le set. Voilà plus d’un an que le groupe n’a pas jeté sa hargne à la face du public.
Red Sun Atacama
A peine la salle remplie, déjà Clém le bassiste demande si le temps imparti permet de se lancer dans une jam session. On sent bien que les gars ont besoin de se défouler avant d’attaquer les choses sérieuses. Le trio n’attend pas, il démonte la salle à coup de riffs et on se demande comment le public accepte la frustration de rester assis. On se demande aussi comment le premier rang évite la baguette qui glisse de la main du batteur à la fin du premier échange. Le plaisir est communicatif et le titre “Gold” ajoute de la pression sous le couvercle de la salle. Red Sun Atacama offre un investissement total dans le show. Jamais poseurs les gratteux se mettent en avant juste ce qu’il faut pour enivrer le public et valoriser leur musique.
Ce soir le trio vient proposer ses nouveaux titres, on ne s’arrête pas de vivre parce qu’on a pas repris la scène depuis longtemps et c’est après une intro à l’orientation très blues que les gonzes font voler en éclat ce qui aurait pu rester de calme dans chaque auditeur présent et faisant ainsi naître des sourires que l’on imagine plein de dents derrière les masques.
Red Sun Atacama a pleinement profité de l’acoustique de la salle et fini de me convaincre, si c’était encore nécessaire, qu’il s’agit d’un groupe de scène, un groupe vivant à la musique lumineuse. Plus au point que la dernière fois où j’avais pu profiter de leur set en première partie de Black Rainbows, à présent ils jouent l’absolu collectif dans une sorte de triptyque où le plat passe de la batterie à la basse puis à la guitare. Cette fois-ci Red Sun Atacama profite jusqu’à la dernière seconde, les parisiens se ravissent de leurs dernières 7 minutes quitte à accélérer le tempo. Plus d’un ce soir sortira de la salle avec une seule hâte, celle d’être au prochain album l’an prochain, rendez-vous est pris.
On descend les oreille bourdonnantes, ravis d’avoir encore pu participer à une soirée vivante et musicale grâce à deux groupes de qualité et l’opiniâtreté de lieux et d’orgas qui luttent dans une période critique. Au moment de se dire au revoir on apprend les annonces de la soirée. Une chape de plomb est tombée sur une bonne parties grands villes de France et le couvre-feu décrété annonce des jours encore bien sombres pour pas mal d’acteurs de la culture. Comme à Nantes quelques-uns passent pour cette fois au travers des gouttes, espérons que cela durera, en attendant ce n’est pas ça qui viendra gâcher le plaisir pris ce soir ni l’envie de remettre ça le plus tôt possible.
Ce vendredi soir je fête deux anniversaires en un. La première date n’est pas des moindres puisqu’il s’agit du 13e anniversaire de la scène Michelet, bastion metal et grand pourfendeur de la cause du rock sablonneux. Le lieu a organisé pour l’occasion un cycle des plus sérieux avec une série de dates aux styles variés. La deuxième date est plus anodine, il s’agit de mon sixième mois sans concert et autant vous dire que ça n’a pas été simple et de fait je traine mes guêtres ce soir d’une façon un peu particulière pour retrouver le lieu du crime. Car oui, en effet, mon dernier concert avait été notamment celui de Wormsand, groupe qui ouvre de nouveau ce soir ! Je clos donc la faille spatiotemporelle et me lance dans cette soirée à l’organisation toute Covidienne où les groupes auront le devoir de satisfaire deux salves d’auditeurs. Deux sets d’affilé pour chacun afin de permettre d’organiser des concerts à jauge réduite,le public en roulement, masqué et assis au sol dans le respect le plus strict des normes sanitaires.
D’office Wormsand balance des riffs d’une lourdeur saisissante, le power trio est à l’évidence plus au point que lors de son dernier passage. Le groupe de Menton distille de la première a la dernière composition une atmosphère à la fois lourde et éthérée. Assénant les parpaings les gars jouent sans retenue séduisant les têtes qui dodelines ou donnent de la nuque pour suivre la variété de rythmes. Au chant on assiste à une alternance entre le cri déchiré de Julien le guitariste et la clarté de celui de Clément à la basse. Un grand écart qui semble-t-il donne plus de gage du côté du bassiste. Pourtant il faut admettre que le tout accompagné d’accords et arpèges dérangeants laisse souvent un arrière-goût de malsain, de poisseux qui produit un effet de fascination dans la fosse. Il s’agit d’un fragile déséquilibre où la batterie joue sur le contretemps et quand elle assène les bûches est accompagnée de violentes gesticulations scéniques de part et d’autres. La démonstration de puissance de Wormsand aura étiré les meilleures phrases de leurs compositions connues et permis la présentation de petites dernières. Le public sort convaincu et les tapis chauffés pour accueillir la première vague d’auditeurs pour le groupe suivant.
L’entrée en matière de The Necromancers est laborieuse, il faut que l’ingé son s’y reprenne à trois fois pour lancer la musique du thème d’introduction. Finalement c’est parti, juste à temps car les vannes commencent à fuser dans la salle.
Dès les premières notes de “Secular Lord” c’est une putain de vague démoniaque qui emporte les spéctateurs., la puissance des phrases est sans appel alors que déboulent les titres les plus ravageurs du groupe, monte l’envie d’aller au contact. Oui c’est bel et bien frustrant que de devoir suivre un tel set assis sans pouvoir profiter de l’énergie collective qui se dégage d’une fosse qui chahute. Espérons qu’ils reviennent ces concerts moites de corps en transe, un morceau comme “Lucifer’s Kin” n’aurait mérité que cela pour accompagner son introduction nantie d’une basse pachydermique et les lames de fond des grattes où l’on se fait gifler en prime par la grande maîtrise vocale de Tom qui passe avec aisance de la rocaille au plus suave des chant.
Comme pour tous les sets des Pictaviens il est impossible de ne pas fixer le visage possédé de Benjamin derrière ses fûts. En particulier lorsqu’il attaque “Black Marble House” en roulant des yeux déments. Le quartet entonne ses thèmes et lorsque ces derniers sont répétés à en être usés jusqu’à la corde comme présentement, le public en redemande encore, prêt à tout sacrifice sur l’autel de la grosse caisse et du riff poutracier
Relisant son album Servants ofThe Salem Girl , The Necromancers invoque les pouvoir ancestraux de la sorcière et offre au sabbat convoqué ce soir “Salem Girls Part II” puis “Part I”. Finissant par envouter la totalité de l’auditoire et démontrant qu’ils ont signé un pacte avec Lucifer au nom de la qualité.
Au moment de sortir, le corps transporté par la joie d’être revenu dans l’arène, au détour d’une conversation on découvre les set lists et s’aperçoit que les deux sets de The Necromancers n’étaient pas les mêmes…quel dommage de n’avoir pas pu en profiter, certes, mais quel bonheur que d’avoir pu remettre les pieds devant une scène grâce à l’association résidente de la salle, Erato qui aura eu le courage de passer la tempête sanitaire et la force de nous rassasier les esgourdes, longue vie à elle et ses congénères.
Il y a 25 ans, Down débarquait sur la scène musicale et sortait son premier album, toujours référentiel aujourd’hui, NOLA. Un super-groupe complètement initié par Phil Anselmo, première illustration significative de la gloutonnerie musicale du frontman de Pantera (pour rappel, Pantera à l’époque était au sommet de sa carrière). Anselmo y rassemble quelques potes dont il présume que leur amour partagé pour Trouble et Saint Vitus, mêlé à leur background musical et un fort enracinement louisianais, rendront ce projet spécial. Et il le fut, amenant le sludge à un niveau de reconnaissance que l’on connaît aujourd’hui, et tirant dans son aspiration bon nombre de formations louisianaises qui n’auraient sans ça probablement jamais rencontré le succès.
Il apparaissait donc logique, en 2020, de fêter comme il se doit les 25 ans de ce premier disque. Down avait donc prévu d’arpenter le vieux continent (et d’autres), pour célébrer cet anniversaire en interprétant l’intégralité de l’album sur diverses scènes et festival (rappelez-vous, on devait les retrouver à l’affiche du Hellfest en juin). Et pour l’occasion, c’est le line-up originel qui a été mobilisé, alors que ces dernières années ont vu la formation live du groupe fluctuer, du fait notamment des engagements respectifs des musiciens avec leurs autres groupes. Petit écart de principe, c’est le bassiste actuel du groupe, le nonchalant mais solide Pat Bruders, qui tient l’instrument à la place du pourtant espéré Todd Strange.
La démarche était séduisante et on s’en pourléchait les babines à l’avance… mais le COVID-19 est passé par là, tuant cette initiative dans l’œuf. Symboliquement, ne rien faire en 2020 semblait inenvisageable, et c’est en version “dématérialisée” que la solution sera trouvée. Le groupe reprend donc son cycle de répétitions, met en place les conditions de “streaming” optimales, et donne rendez-vous aux fans le 29 août, à minuit pour les français, en échange d’une petite contribution de moins de 8 eur (dont 10% sont reversés à un fond de soutien à la nation unie Houna, une tribu indienne ancestrale implantée dans près de la Nouvelle Orléans).
Il est aussi stérile que vain de parlementer sur l’intérêt d’un concert derrière un écran plutôt que devant une scène. Le fait est que le second choix est impossible, et qu’on oublie un peu vite qu’on a tous passé des heures carrées derrières nos écrans de PC, DVD ou même cassettes VHS pour les plus anciens, à regarder des concerts ! C’est donc une forme un peu hybride qui nous est proposée ici, et au diable les plus bégueules et autres pisse-froid – on ne crachera pas dans la soupe.
A l’heure dite, c’est finalement une succession de reportages courts, interviews et petits sketches qui nous accueille et non pas le concert, qui commencera trois quarts d’heure plus tard. Enfin, donc la scène apparaît sur l’écran, sombre mais vaste, avec deux grands écrans latéraux (largement sous-exploités durant le set), baignée par un light show pro (aux tons très jaunes / rouge). Les musiciens sont tous là, menés par un Phil Anselmo bien crampé en front de scène, bien au milieu, sur son pied de micro.
Ça démarre de manière assez décousue sur la montée en régime de “Eyes of the South”, autour de quelques impros de Keenan, et très vite les planètes s’alignent pour une intro massue et rassurante. Assez rapidement, la mise en son efficace nous rassure, on va pouvoir monter le volume des haut parleurs… Les speechs d’Anselmo entre les morceaux sont trop bas, mais on n’est pas là pour ça, donc pas très grave. Les musiciens sont en forme et efficaces, ça joue bien et fort. Les gars sont aussi concentrés sur leur prestation que contents d’être ensemble, c’est évident.
Et l’interprétation en bénéficie largement, avec des titres qui, même s’ils gardent leur forme initiale, font l’objet de quelques adaptations maîtrisées. On lèvera les sourcils d’étonnement à l’écoute de quelques harmonies guitare un peu dissonantes entre Keenan et Windstein, mais au final, l’ensemble est très solide et tient furieusement la route. Même Anselmo, dont le niveau de forme ces dernières années n’a pas toujours été un long fleuve tranquille, s’avère appliqué et plutôt en voix – en tout cas rarement pris en défaut.
Les morceaux de l’album sont interprétés dans le désordre, et le groupe inclut même trois titres du second album, pour enrichir un peu le set (dont “Lysergik Funeral Procession”, interrompu sur son intro, mais relancé par Anselmo comme si de rien n’était). A noter que le groupe jouera aussi le très planant “Jail”, en mode assis au calme… Un morceau enregistré séparément, avant le concert, dont la transition fut un peu dégradée par un problème technique. Cette parenthèse leur permettra de se ragaillardir et de revenir pour un final au taquet. A son habitude, Down termine sur “Bury Me in Smoke”, où à la fin les guitares sont passées à quelques potes (dont Katie la femme d’Anselmo) pour finir de labourer le dernier riff ad lib dans le bordel le plus absolu.
Bref, on aura passé un très bon moment devant ce set, qui nous aura proposé une petite bouffée d’air frais dans un milieu musical pour le moins sclérosé. Il y avait des pains, des clins d’œil, des private jokes entre musiciens… Comme sur scène ! Exactement ce dont on avait besoin.
EyeHateGod, dernier concert avant la fin du monde, uchroni-que de concert.
Mercredi 03 mars 2021. 353 jours de confinements. Bientôt une année cloitré à la maison. Dehors le ciel est gris et les rues désertes. La végétation a, par de nombreux endroits, repris ses droits sur le béton. Je suis sorti ce matin troquer mes deux derniers vinyles de Motörhead contre un rouleau de PQ. Sur le gros millier de disques de ma collection, il ne m’en reste qu’une petite dizaine. Les 6 premiers de Black Sabbath, avec lesquels je souhaite être enterré, un Sleep, un Kyuss, un Blues Pills que personne n’a voulu reprendre. Et Take As Needed For Pain d’Eyehategod dont la pochette, dérangeante au possible, semble aujourd’hui me dévisager.
Cela fait un an jour pour jour que j’ai assisté à mon dernier concert, dix jours à peine avant que le président de la république annonce les premières mesures de confinement. Lorsque je ferme les yeux je repense au show clinique de Misery Index, à la rage de quinquas de Napalm Death. Qu’est ce qu’on avait guinché avec les copains à la Machine du Moulin Rouge ce soir là. Mais mon grand souvenir de cette dernière nuit d’insouciance reste le show d’EyeHateGod. C’est que les quatre New Orléanais avaient cassé la baraque.
Dès l’entrée de Jimmy Bower, en Crocs et jogging informe, avec ses yeux dans le vague et ses tics de drogués, on a compris que l’on allait vivre un moment unique. Le genre de concerts où personne ne dictera le tempo. Mike Williams lui, tee-shirt Motörhead sous veste kaki, se présente au public en se mouchant sur les premiers rangs. Une salve de doigts d’honneur plus tard, le concert peut commencer. Et quel concert. Tout est sur le fil, agressif, sans compromission. Une déclaration de guerre à ceux qui ne sont pas là pour les écouter. « Lack Of Almost Everything », le premier titre joué prend un sens spécial dans ce contexte. On voit bien le téléphone dans la poche informe de Bower, on voit l’écran s’allumer à travers le tissu lorsqu’il reçoit une notification. Et le moins que l’on puisse dire c’est qu’il s’en fout. Il balance riff sur riff, semble parfois être sur une autre planète que ses collègues. Son accordage est co(s)mique. « Parish Motel Sickness » : la fosse fond un boulon. Il pleut des coudes, même les plus braves mordent le plancher. Certains s’envolent et ne retombent jamais. « Sisterfucker », les deux parties. Les doigts se lèvent, encore. On s’invective, on célèbre le sale. Riffs, riffs, riffs, riffs. On voit bien qu’une partie du public, reculé, inquiet, ne comprend rien à notre catharsis. Certains rient dans le coin. Lorsque finissent les dernières notes de « New Orleans Is The New Vietnam » ils n’ont plus de dents et leurs sourires ont fait place à des trous béants déformés par la douleur. Nous sommes exsangues mais pétris de bonheur. Les gorges hurlent, les poings acclament, donnent du respect.
Le concert s’est ouvert sur un long larsen et s’est refermé de la même façon. Nous étanchons notre sueur et notre plaisir d’une pinte sans goût. Au merch une femme, qui a longtemps été un homme, nous énonce, hilare, toutes les insanités qu’elle connaît dans toutes les langues des pays qu’elle a traversés. « Runka Min Kuk ! » ah oui je la connais aussi celle là.
Un tee shirt sous le bras je rejoins le métro. Les gens sont pâles, mon voisin de siège tousse. Il semble fiévreux. Je quitte la rame station Porte de Versailles pour récupérer ma voiture, sans remarquer que le fiévreux tombe de son siège. Quel concert, quel chaos, quel bonheur.
Une pensée bien sûr pour les organisateurs de concerts, les techniciens du spectacle, les groupes et tous ceux impactés de près ou de loin par cette situation. Espérons tous en rire dans quelques semaines, une bière à la main tandis qu’un groupe s’échinera à nous luxer la nuque sur une quelconque scène à Paris ou ailleurs.
Voilà quelques temps que je m’étais promis de profiter du prochain passage à Nantes des Manceaux de Stone From The Sky pour aller découvrir ce que donne leur prestation live. Donc, voyant se dérouler l’affiche de leur mini tournée de ce début d’année et leur passage à Nantes, j’en ai profité pour aller jeter une oreille sur ces gaillards ainsi que sur Wormsand dont on m’avait dit le plus grand bien. Pourquoi se priver d’une soirée sous les auspices de l’association Erato qui se décarcasse si bien pour faire émerger les talents parfois confidentiels de notre scène ou trop souvent les mastodontes règnent sans partage?
Black Horns
Nous voici donc encore une fois à la scène Michelet et ce soir c’est Black Horns qui a pour tâche d’ouvrir le bal. Cet étonnant duo Rennais a déjà à son actif un EP et un LP et les deux bonshommes ne sont pas venus faire autre chose que jouer. Ils associent l’art minimaliste du duo à un je-m’en-foutisme salutaire. Les gars produisent un son qui appartient à beaucoup d’autres groupes sans pour autant en être la copie conforme.
Black Horns tire une originalité délicieuse de la base du genre. La gratte exhale une haleine pas nette où suinte un fond d’ordure. Mais derrière la crasse faussement étalée il y a une réelle maîtrise. Le public ne s’y trompe pas et tends la joue pour se faire tarter comme dans un concours de baffe du fin fond de la Sibérie. C’est sludgy, muddy et alcoolisé comme il faut. La nonchalance d’Adri à la gratte est porteuse. Sa voix du fond du bayou ajoutée au swing de Tom derrière ses fûts offrent une palette de jeu virant du blues au doom en passant par le sludge. Carton plein pour Black Horn qui conquiert la salle et fini le préchauffage de la machine avec une efficacité remarquable.
Wormsand étant de Menton, ville à la réputation gériatrique, on aurait pu croire que le temps ne nous était pas compté et pourtant, à peine le temps de s’offrir quelques mondanités houblonnées et le trio vient se cramer la plante des pieds sur les planches encore chaudes du précédent set.
Wormsand
Une énergie juvénile déborde de ces gars un brin poseurs mais séduisants de fougue. Wormsand met quelques minutes à convaincre son auditoire mais pour des raisons techniques où le guitariste frôle la colère. Heureusement le public est bienveillant et les gesticulations énergiques ainsi que les idées prometteuses de la musique ont tôt fait d’enthousiasmer la salle. Les efforts musicaux naviguent dans une nappe continue d’un même gruau quasi doom l’ensemble est pesant à souhait. Emerge de la masse le chant qui touche plus au cri rauque qu’à l’angélus. Ce doom sombre ou pointe (poutre?) parfois la lumière fait bien son office ce soir même si une respiration de temps en temps n’aurait pas nuit il est indéniable que les accords qui séduisent l’oreille feront de Wormsand un groupe à suivre toujours plus attentivement et à revoir sur les planches avec (encore) quelques bornes de plus au compteur pour savourer pleinement leur musique et y trouver les tanins propres aux vieux routards sludge qu’ils promettent de devenir.
Voici venu enfin la prestation qui m’a décidé à venir ce soir. Stone From The Sky avait récolté quelques lauriers l’an passé au sein de notre rédaction et sur ce sujet mon insistance sur la qualité du groupe a dû déplacer hors du cadre le concept d’objectivité. Pour autant le trio va immédiatement démontrer la qualité de ses compositions en ouvrant avec “Inside the Dalek” et poursuivant avec “Vena Cava”.
Stone From The Sky
Du côté de de la basse et de la guitare les mecs assurent le show, rien de trop excessif, juste la démonstration de la volonté d’exister sur scène. Le public entre dans la transe et le set défile à une vitesse folle. L’atmosphère dégagée par le trio vaut bien celle de ces albums et on sent que le set s’est bien rodé au cours de ces derniers mois. Impeccable SFTS assomme toute la salle avec sont titre “Animal” flirtant entre post et psych. Les montées pleines de puissance et de beauté du morceau sont une preuve de plus du talent d’écriture de ce groupe.
“Welcome To Trentor” et sa mise en scène musicale parfaite va clôturer la soirée, les accents orientalisants balayent ce qui aurait pu rester d’objection. La batterie va crescendo et l’envie de plus monte à chaque instant. Les cordes se déchainent et font souffler la tempête dans la petite salle où le plancher toujours prompt à vibrer semble se soulever en vagues. Stone From The Sky joue le passage de balle d’un instrumentiste à l’autre et finit le set dans la frustration la plus totale car le temps manque pour un rappel.
C’est un peu déçu de n’avoir pas pu en prendre plus plein les oreilles que le public quitte la salle. Frustration sans trop de gravité pourtant, le sentiment d’avoir passé un excellent moment domine. Chacun trace donc sa route pour se rendre soit au bar, soit sauter sur l’occasion pour acquérir la réédition par More Fuzz Records de Fuck The Sun de Stone From The Sky et compenser le rappel manquant.
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