Pour tout vous dire, cette interview date d’octobre 2015 et plus précisément du 2ème jour du Up in Smoke version sédentaire. Le choix de mettre la lumière sur Space Fisters nous semblait évident tant le trio a surpris son monde avec sa zic sortie de nulle part, pleine de qualité et étonnamment mature. Pourquoi tant de temps à la publier alors ? La faute à la paresse, à une prise de note désastreuse… Quoi qu’il en soit, Mesdames et Messieurs, laissez-nous vous présenter Space Fisters, un trio de mecs cool, de la grosse zic puissante et intelligente. Encore une bonne raison d’être fier de cette scène. Merci les gonzes de la montagne !
Comment vous êtes vous retrouvés sur cette affiche du Up in Smoke 2015 ?
On a suivi Stoned Jesus pour leur tournée en France en avril dernier et David, leur merch guy, bosse chez Sound Of Liberation, et il nous a proposé de faire le Up In Smoke 2015 et voilà comment ça s’est fait. Un très grand merci à lui d’ailleurs.
Et ce petit joint offert par un spectateur pendant le set, il est bien passé ?
Plutôt ouais, le gars nous a en aussi payé un pendant les balances, bien familial de sa part !
Léo, remplacer le batteur de Stoned Jesus au quasi-pied levé, raconte-nous un peu et comment s’est passée l’expérience ?
Igor m’a envoyé un message pour savoir si j’étais chaud pour remplacer Viktor puis j’ai dis oui ! Du coup, j’ai appris le morceau « I’m the Mountain » dans les grandes lignes, on est parti très tôt le matin du vendredi pour les retrouver dans un bled paumé de la Suisse allemande pour qu’on répète une fois avant le concert. Je crois qu’on a fait 3 fois le morceau puis c’était bon. Le soir du gig, ça s’est bien passé ! En grands princes, ils m’ont offert un t-shirt et ils nous ont filé leur chambres d’hôtel car ils n’en avaient pas besoin. Ca, c’était cool !
Vous avez ce côté « déconstruction » et cassure rythmique dans votre musique, d’où vient cette envie ? La peur de s’ennuyer ? Le challenge des structures complexes ?
Il y a un peu de tout ça. Le truc le plus important c’est le fun que ça représente à bosser et à placer en live, je ne pense pas qu’il faille y voir un challenge ou un concours de bites, on aime juste le côté surprenant du truc.
De fait, vous me disiez écouter aussi des groupes issus de la scène prog et math-rock, à l’instar de Ni, vous tendez plus vers ce format ou pas du tout ?
C’est une influence comme une autre même si ce qu’ils font, c’est scéniquement et musicalement monstrueux. Quand on les a vu on était dingue, on s’est demandé comment c’était possible de faire un truc aussi piné qui envoie autant, c’était la guerre, les gens étaient tarés. Du coup on s’est dit un que ce serait énorme de transmettre un truc aussi violent à nos concerts. Mais c’est le cas pour 40 autres groupes, on bouffe à tous les râteliers, un peu comme Johnny.
Vous me parliez aussi de groupes et de musiques qui déroulent comme «Fuzz ». Vous voulez concilier linéarité et complexité dans le futur ou pas du tout ?
Peut-être. Pas à leur manière en tout cas, même si on adore et qu’on aussi prit une belle branlée en live, on ne va pas faire du “Fuzz”, parce que d’autres le feraient bien mieux que nous. Par contre on tend vers un format plus court, un truc plus direct.
Vous brassez large vos influences du coup. Ça vous semble expliquer la maturité musicale de votre dernier opus (ndlr : le Vol.1 qu’on vous recommande chaudement) ?
Quand on s’est mis à jouer ensemble, on partait dans l’idée de faire de la musique genre Eagles Of Death Metal et on a sorti notre premier EP dans cet esprit là. La grande différence avec notre premier album, c’est qu’on ne s’est pas dit : « Tiens, il faudrait qu’on sorte un morceau comme ci ou comme ça » et on s’est également mis à écouter pleins de choses et ouvert nos influences à d’autres styles. C’est en tout cas une bonne chose pour nous.
Du coup quels sont les projets pour 2016 ?
On sera en tournée fin Mai en France et on sortira quelque chose dans le courant de l’année, rien n’est encore défini à ce niveau là.
Vous cherchez un label ? La prochaine étape c’est quoi ? Un gros album dans une grosse structure ou vous prenez les choses telles qu’elles viennent ?
Le prochain album sera la prochaine étape à proprement parler car on a super envie de composer d’autres choses et de faire évoluer ce projet. On souhaite avant tout rendre le projet sérieux et pas être un « groupe du coin ». Un label, oui, très certainement, après… Qui ? Quoi ? Comment ? On verra bien.
Robin, tu me disais faire le travail de booking tout seul. C’est facile de booker un groupe comme Space Fisters ? Comment vous vous présentez ?
Non, ce n’est pas simple et c’est même un sacré boulot. J’ai passé beaucoup plus de temps à essayer de comprendre comment cela fonctionnait pour faire un truc qui ait vraiment de la gueule, qu’à vraiment booker. Après, le réseau commence à se faire petit a petit et ça deviendra de plus en plus simple au fil du temps, du moins je l’espère. Merci déjà à tous ceux qui me filent un précieux coup de main. Je présente le groupe comme un groupe de Heavy Psych avec les différents liens (Vidéo et sons) et des extraits de chroniques, c’est plus parlant à mon sens.
Le partenariat avec Purple Sage pour la communication a commencé l’année dernière, vous sentez la différence sur les retours et la couverture de Space Fisters ?
Oui, très clairement. On a sorti l’album en autoprod avec pas beaucoup de notions de ce qu’il fallait faire pour qu’on en entende parler. On a eu des chroniques avant mais il y a eu un vrai déluge quand on s’est mis à bosser avec Purple Sage. On a vraiment hâte de pouvoir sortir quelque chose de nouveau pour retravailler ensemble.
Petit point : « Nerd ou bat les couilles ». Vous êtes des férus de technique, à bidouiller chaque potard d’ampli, à rechercher LA pédale de fuzz, ou bien vous branchez les instrus et vas-y gros ?
On est plus « bat les couilles » parce qu’on n’a pas une tune en fait ! On a eu de la chance de croiser le chemin de Ben de Sentenza Handmade Pedals qui fait des pédales de Fuzz assez dingues. Ça nous a permis d’avoir un son différent et sans trop se faire chier à aller chercher tel ou tel son. Benrey Road Cab aussi nous a permis d’avoir un baffle pour la guitare qui sonne terriblement bien. On recherche toujours à faire évoluer notre son aussi mais bon, si on peut manger et boire avant c’est cool aussi.
La dernière question n’en est pas une mais plutôt un espace de liberté d’expression, z’avez quelque chose à rajouter pour conclure ? Quelque chose à vendre peut-être…
On vend une chaine Hifi, 2X15 watts cause déménagement et sinon merci, c’était cool
De passage à Paris à l’Archipel pendant sa première tournée acoustique européenne, John Garcia nous a offert un très sympathique tête à tête où il s’est largement confié sur son tout nouveau concept « Unplugged Tour ». C’est d’ailleurs dans un contexte très particulier que ce grand monsieur du Stoner, personnellement très touché par les événements de Paris de ce triste 13 novembre 2015, nous revient avec beaucoup d’humanité, d’amour, et heureux dans ce qu’il fait. Bien plus encore, Mister Garcia nous livre quelques détails pour la suite.
Un an après la sortie de ton premier album, tu repars sur les routes pour nous proposer un tout nouveau concept avec une tournée de concerts acoustiques, et, bien évidemment, on pense tout de suite à ton morceau “Her Bullets Energy” qui clôt l’album sur cette touche acoustique. C’était une façon d’annoncer la couleur pour la suite ?
C’est une idée qui était déjà présente pendant l’enregistrement de mon premier album. Avant même de rentrer en studio, nous avions pu faire quelques dates acoustiques. J’ai tout de suite apprécié cette ambiance plus “intime”. C’est une nouvelle expérience pour moi. Tout le monde connaît très bien ma carrière et c’était juste une étape logique. Juste l’envie de me faire plaisir et faire plaisir aux autres.
J’ai surtout envie d’être heureux et c’est à travers la musique, notamment avec ce nouveau concept acoustique que je le suis vraiment. Et j’apprécie vraiment d’être là ce soir, comme j’ai pu l’être à Berlin ou encore à Londres. Cette opportunité de jouer ne serait-ce que devant 5, 25 ou 75 personnes, bref, je donnerais toujours la même énergie. Car j’aime tellement jouer, performer et rencontrer.
Pour résumer, je me suis concentré sur mon projet solo avec mon nouvel album, en tournant puis en faisant une bonne pause cet été afin d’être avec ma famille. Enfin est arrivée cette tournée acoustique qui se résume ainsi : “Profitez de la vie !”.
Peux-tu nous raconter comment as-tu eu cette opportunité de monter cette tournée acoustique européenne et qu’en est-il de son concept ?
Nous voulons donner cette impression de jouer comme si on était dans un salon, avec cette ambiance intime que l’on ressent notamment à travers les lumières et le lieu. Surtout pas besoin de batterie, de basse ou de guitares qui font beaucoup de bruit. C’est comme si tu étais nu ; juste une guitare, une voix et rien d’autre. En gros, on veut donner cette impression d’inviter les gens chez nous, dans notre salon.
On ressent bien que progresser sur ce type de set te permet aussi d’exploiter ta voix d’une autre manière avec une teinte plus mélodique, plus spirituelle… ?!
En effet, je n’ai pas besoin de pousser ma voix comme sur un concert électrique, je peux l’exploiter différemment et beaucoup plus que d’habitude. Tu sais, chanter n’est pas toujours facile, en tout cas pour moi. Mais je suis toujours enthousiaste d’exploiter ma voix au maximum. Avec ce projet acoustique, ça me permet justement d’aller encore plus loin.
Ça me permet surtout d’apprendre à me connaître mieux, et chaque événement est différent, surtout, l’ambiance est différente, elle change énormément selon l’endroit. L’ambiance n’est pas forcément la même selon les morceaux que je vais jouer, des titres comme « Space Cadet »,« Kentucky » ou mes autres nouvelles chansons. Enfin bref, j’essaie de savoir où se trouve ma voix. C’est d’une certaine façon un challenge perpétuel.
Ehren Groban t’accompagne de nouveau sur cette tournée et j’ai comme l’impression qu’il est devenu un compagnon de route important pour toi…
Ehren et moi entretenons une relation importante car tout d’abord, c’est quelqu’un d’honnête. Ce n’est pas seulement un simple chanteur et guitariste, Ehren a pris une place différente par rapport à d’autres musiciens dans ma vie car c’est un super auteur-compositeur. Il a toujours de très bonnes idées, et, tu sais, tout le monde ne peut pas assurer comme Ehren Groban. Il gère à mort en concert car c’est un super guitariste. En plus de ça, on est très proches en dehors de la musique. D’après mon expérience personnelle, trouver cette cohésion entre un chanteur et un guitariste, c’est la chose la plus importante dans un groupe. C’est en tout cas mon point de vue.
J’avais vraiment besoin de quelqu’un de sérieux pour entreprendre cette aventure avec moi, et Ehren est juste l’homme parfait ; un super musicien, un mec bien, un très bon ami et c’est tout ce dont j’ai besoin. Contrairement à d’autres avec qui j’ai pu travailler, nous sommes rarement en désaccord et nous avançons toujours dans les meilleures conditions possibles. J’en suis vraiment heureux.
Et toi en tant que musicien instrumentiste ?
Je fais de la percussion (tambourin, shaker) sur cette tournée acoustique, j’aimerais bien jouer de la guitare, mais je ne suis pas très bon [ndlr : il nous fait une belle imitation de air-guitar].
A propos des différents morceaux que tu interprètes, on y retrouve tout un panel de différents projets que tu as portés, de Kyuss, jusqu’à ton album solo. En tant que personnage qui aura su inspirer de nombreux groupes, est-ce l’occasion de faire le point sur toi-même, de ces (presque) 30 ans d’activités musicale ? Et peut-être une façon de rendre hommage à ta carrière ?
Est-ce que c’est une façon de résumer ma carrière allant de Kyuss jusqu’à maintenant ?! Je ne me prends pas assez au sérieux pour tout ça. Je suis avant tout un père de famille, un mari aimant. Dès que je peux, je viens aider ma femme qui travaille à hôpital, et, je consacre le reste de mon temps à la musique.
Difficile de résumer ma carrière, il y a Kyuss, Slo Burn, Hermano ou Vista Chino… [petit souffle] mes différentes collaborations comme Danko Jones ou bien d’autres encore. Et je te le répète, je ne me prends pas assez au sérieux pour tout ça. Tu sais, je n’ai d’ailleurs jamais aimé le rapport à l’argent et la musique, je veux juste rester simple. Après c’est une bonne question car on me reproche souvent tout cela, je n’en ai rien à faire de ce que les gens pensent. Dans ce business, tu dois te détacher de toutes ces critiques. Oui on dit souvent : « oh il a encore un nouveau projet, oh il ne sait pas au final ce qu’il veut faire,… ». Et alors, c’est quoi le problème ? C’est ma vie ! Pas leur vie ! Tu sais, j’aime explorer. Si je reste trop longtemps dans le même délire, je m’ennuie, et tous les gens proches autour de moi le savent. Je désire juste faire les choses quand je veux et comme je l’entends. Et personne ne peut m’interdire ça… J’espère que je ne me suis pas trop éloigné de ta question ?
Non pas du tout, au contraire, on ressent bien que ton inspiration, c’est avant tout “la famille” ?
C’est clair, je vis pour donner du bonheur. Si ma famille est heureuse, je suis heureux. Genre on me demande ce que je veux pour Noël, je ne veux rien car mon cadeau c’est de te voir heureux, c’est ça que je veux pour Noël.
Pour revenir un peu sur cette tournée acoustique, peux-tu nous faire un petit topo des différents morceaux que tu vas jouer ce soir et pourquoi adapter ces derniers plutôt que d’autres?
Bonne question. On essaie avant tout d’isoler un morceau, on se dit : « Tiens, ce morceau par exemple, ça pourrait grave le faire en acoustique ! Pourquoi ne pourrions nous pas la transformer en un délire acoustique ?! » Donc on essaie d’adapter le morceau, on travaille dessus. Ensuite, tu vas avoir des grands classiques style « Space Cadet ». Après on s’est beaucoup concentré sur les nouveaux morceaux que nous avons composés avec Ehren. Globalement on joue onze morceaux comme « Kentucky », « Don’t Even Think About It », … [ndlr : en fait, nous avons eu le droit à 14 morceaux sur la date de Paris, voir la rubrique “Chroniques Live”].
Pour résumer, on essaie des morceaux, si par exemple on prend des chansons de Kyuss, on essaie, si on sent que ça marche, que ça nous parle, on le fait ! Si ça ne le fait pas, on passe à autre chose.
Nous voulions monter un super spectacle, construire ces morceaux différemment. « Space Cadet », voilà un morceau vraiment cool qui m’a toujours donné envie de faire de l’acoustique !
Après l’Europe, peut-on espérer d’autres tournées acoustiques ailleurs dans le Monde ?
En Mai 2016, on revient encore une fois en Europe pour terminer la tournée, ainsi qu’en Irlande, en Écosse, en Espagne, …
Cette tournée ne te donne pas l’envie d’en faire un album acoustique ?
Oui, il n’y a aucune raison pour qu’on ne le fasse pas. C’est quelque chose d’inattendu, je sais, mais ça faisait longtemps que je voulais enregistrer un album acoustique en une sorte de “roadbook”. On va encore me dire que ce n’est pas ce que je devrais faire, bien, je m’en balance. C’est quelque chose qui me semble naturel pour se sentir bien et peu importe les conséquences. J’ai envie de le faire et c’est le plus important. Qui s’en soucie ?!
J’aimerais bien qu’on parle d’un de tes projets, celui de Hermano, où il est question d’une prochaine sortie en 2016. Tu nous avait dit l’année dernière que tu mettais un peu au “garage” tes différents projets. Du coup, on s’interroge énormément sur ta participation au successeur de … Into the exam room.
Ce n’était pas ce que je voulais faire immédiatement, mais les gars voulaient vraiment le faire. Je suis vraiment heureux maintenant avec mon projet et c’est difficile de me détacher pour me replonger dans autre chose que ma carrière solo. Ils veulent faire un nouvel album, OK, mais ce ne sera pas ma priorité. Je ferai peut-être quelques concerts. Mais je suis vraiment concentré à fond sur mon projet. Je veux enfin être libre. Je suis vraiment heureux de ma carrière mais ça n’a pas toujours été évident de faire les choses, et tu sais, je vais avoir 45 ans, ce n’est plus aussi facile qu’avant…
Tu veux garder toute ton énergie pour ton projet solo ?
Oui, tout à fait.
Te connaissant tout de même hyperactif dans la musique, as-tu d’autres projets qui ont le potentiel de ressurgir, ou peut-être même des nouveaux ? Voire de nouveaux featurings avec d’autres artistes ?
Encore une fois, je veux penser à moi, enregistrer un nouvel album solo. Oui, ça je vais le faire, ça me suffit maintenant pour être heureux.
D’ailleurs à ce propos, nous avons pu découvrir récemment tes jeunes poulains de Black Mastiff et leur très bon album Music Machine, et donc ton rôle en tant que producteur. Peut-on espérer te voir travailler sur de nouvelles productions ?
Je ne pense pas et je trouve que ce mot “producteur” est inapproprié. On compare tout de suite cela à des gens comme Rick Rubin, Mutt Lang,… Ce sont des vrais producteurs ! Pour moi, produire quelque chose comme les Black Mastiff, c’est beaucoup plus que ça. Je me soucie seulement de leur musique. Mais là, je suis tellement pris par mon projet solo et projet acoustique qu’en ce moment, c’est la seule chose qui m’occupe l’esprit.
Mais qu’est ce que ça signifie ce mot “produire” ? A quoi ça rime ? Et quelle est sa définition ? Tu as des idées, de l’espoir et une vision pour un groupe ! OK, ma définition de la production c’est que quelqu’un se soucie et s’implique dans un projet, et pas pour l’argent, juste pour le projet. J’aime vraiment beaucoup Black Mastiff, tout comme j’ai aimé enregistrer mon album solo, avec Vista Chino, avec Danko,… Et si je ne le sens pas, je ne le fais pas.
Souhaiterais-tu quand même “aider” [pour remplacer le terme “produire” que John n’aime pas trop] des groupes venant d’autres régions du Monde comme l’Europe par exemple ?
J’aimerais en avoir le temps mais si je commence à dire oui, ça va me donner encore plus de travail, puis enchainer et au final, ne plus avoir de temps pour moi.
Ça fait aujourd’hui presque un an, pile-poil, après ta venue à Paris [ndlr : le 2 décembre 2014] afin de défendre ton projet solo, qu’est-ce que ça te fait d’être là ce soir, dans un contexte un peu particulier ?
Bon, je ne vais pas te le cacher, nous avons été très touchés par ce qu’il s’est passé il y a trois semaines à Paris [13 novembre 2015]. Cet horrible acte a résonné jusqu’en Californie. Je ne vais pas te mentir, ma famille m’a demandé pourquoi je partais jouer quand même en Europe. Je n’ai pas hésité un instant et je suis parti. Après, oui, ça m’a traversé l’esprit qu’il pouvait se passer encore quelque chose de grave, mais tu ne peux pas t’arrêter de vivre. Et je trouve ça formidable de pouvoir savourer une bière, discuter avec quelqu’un comme toi et rencontrer de nouvelles personnes. Continuer à mener ma tournée acoustique et apprécier d’être là ce soir. Allons jouer à Paris, partons à Londres ! Car nous ne pouvons pas nous arrêter de vivre ! Nous devons continuer. Tu sais, ce soir plus de 200 personnes seront là, j’apprécie cela, et, je suis venu pour eux. Regarde, Bono de U2 a écrit une chanson qui résume clairement la situation : “La musique est le son de la liberté”, la musique c’est l’évasion. Tu t’évades, ne serait-ce que pour un moment et ça suffit pour te rendre heureux, vivre ; apprécier la vie. Tu sais j’aime vraiment ce que Jesse Hugues et son groupe EODM ont dit à propos de leur désir de revenir au plus vite ici pour être le premier groupe à rejouer au Bataclan… Je l’ai eu au téléphone l’autre jour, et ça compte vraiment pour eux de dépasser tout ça. Tout comme Jesse et Josh le pensent, et je pense que tout musicien l’a en lui : il faut vivre la vie à 100%, et profiter de tous les instants de la vie.
C’est à l’occasion de la version statique du Up In Smoke Festival à Bâle que nous avons échangé avec le très sympathique leader de la formation Ukrainienne qui monte. Le volubile Igor revient sur leur début de tournée épique qui les voit se produire sans leur batteur attitré demeuré à l’écart pour des raisons très rock’n’roll. L’homme à l’enthousiasme contagieux nous en dit aussi un peu plus sur cette formation originaire d’une contrée pas très stoner et sur la success story du groupe au nom le plus cool du globe terrestre et de ses environs proches.
Salut Igor, as-tu besoin que je te présente Desert-Rock.com le webzine francophone ?
Non, je me souviens de votre review qui était très cool.
Vous débutez une nouvelle tournée aujourd’hui…
…oui c’est la troisième partie de la tournée pour « The Harvest ». Nous sommes en tournée depuis mars, date à laquelle cette production est sortie, nous allons faire trois festivals sur cette partie : le Up In Smoke aujourd’hui, le Stoned From The Underground et le Desertfest Belgium vendredi prochain à Anvers.
Cette phase de la tournée se déroule dans la partie centrale de l’Europe ; qu’attendez-vous de celle-ci ?
Nous connaissons ces pays, le public et aussi quelques promoteurs. Nous allons retrouver quelques salles déjà connues comme à Amsterdam et Stuttgart par exemple. C’est vraiment sympa de retourner dans des endroits où nous avons déjà joué ; cela nous permet aussi d’avoir des cachets plus importants, d’avoir un public qui sait à quoi s’attendre et des promoteurs aussi. Nous sommes donc toujours bien accueillis. Nous avons juste un petit problème sur cette tournée : notre batteur s’est fait voler son passeport à Budapest. Les autorités ne nous ont pas beaucoup aidé et nous avons cherché, en Ukraine, un nouveau batteur. Malheureusement un type n’avait pas de visa, le second était trop occupé et le troisième a demandé combien il allait être payé, mais ce n’est pas ainsi que les choses se passent ; nous ne sommes pas là pour ça ! Nous avons finalement trouvé un batteur de session qui ne nous rejoindra que demain car il avait déjà des engagements. En ayant déjà un bon contact avec les salles, il est plus facile d’effectuer ce tour un peu spécial.
Comment allez-vous procéder aujourd’hui vu l’absence de batteur ?
Aujourd’hui, pour le Up In Smoke, nous allons faire un show de quarante-cinq minutes très spécial. La première partie sera consacrée à un medley de « First Communion » que nous ferons avec un batteur : Flo du groupe No Mute, un groupe de la région (vu l’an passé au même festival). Le dernier titre : « I’m The Mountain » sera joué avec le batteur des Français de Space Fisters, Léo, dont le groupe jouera demain ici. C’était fou car nous avons répété avec un type la nuit dernière et avec l’autre ce matin. C’est vraiment fou et tout ce qui nous arrive sur cette tournée l’est aussi. Nous avons été pénalisés à l’aéroport car nous avions oublié certains documents relatifs au merchandising et nous avons dû payer une amende de six-cent euros. C’est clairement le début de tournée le plus fou que nous ayons eu jusqu’ici.
Votre dernière tournée s’est terminée il y a à peine quinze jours. Comment était-ce de tourner avec Greenleaf ?
Ce sont des types vraiment sympathiques et simples. Ils sont très ouverts et Arvid m’a carrément tiré sur scène pour que nous chantions une partie en duo lors du premier show. Nous avons fait ceci sur toutes les dates ce qui était super sympathique. Ce n’était au final pas une tournée où deux groupes tournaient ensemble en étant chacun confiné dans sa loge. Nous avons plaisanté et chacun des groupes à assisté à la prestation de l’autre. Ils ont fait de nouveaux titres car ils sortent bientôt leur prochain album. Je fais de la promotion pour eux : il sortira en février prochain sur Napalm Records et ils ont réalisé la vidéo du premier single « A Million Fireflies » qu’ils ont joué sur cette tournée. Je vous préviens : c’est leur meilleur titre, catchy, bien foutu avec une ligne vocale que l’on retient d’entrée, du genre tu l’entends la première fois et la deuxième fois tu la chantes avec le chanteur. La dernière soirée de la tournée a été très agitée pour notre batteur et leur chanteur qui ont fait la fête ensemble et le lendemain il y a eu cette histoire de rechercher le sac disparu qui contenait le passeport. Ce sont des Scandinaves et nous des Ukrainiens : nous avons une relation spéciale avec l’alcool. Je ne suis perso pas trop dans ce trip.
Comme tu le disais, vous avez trois festivals sur cette tournée : le Up In Smoke aujourd’hui, le Stoned From The Underground et le Desertfest Belgium avec des sets limités au niveau du temps. Comment avez-vous sélectionné les titres que vous y interpréterez ?
Nous venons de terminer une tournée sur laquelle nous avons mis à l’honneur notre album « First Communion » sorti il y a cinq ans. Nous l’avons fait en entier ou presque. Nous continuons avec quelques coupures opérées dedans et en y ajoutant des titres qui plaisent à notre public comme « I’m The Mountain » ou d’autres. Certains se plaignent de l’absence de certains titres, mais nous ne sommes pas un groupe de karaoké ; ce n’est pas ainsi que nous considérons les choses. Nous ne faisons pas non plus nos plans les plus doom et nous n’allons certainement pas refaire le répertoire de « First Communion » durant les cinq ans à venir quand il aura dix ans nous nous y remettrons. Je demande aux fans d’apprécier cette approche.
Et toi, en tant que fan, quels sont les groupes que tu veux voir ici ?
J’adorerai voir les Melvins que j’ai vus au Hellfest, mais ils jouent demain. Aujourd’hui le line up est très robuste et il y a beaucoup de groupes que je n’ai jamais vu sur scène. J’aimerais découvrir des groupes, même si je connais les Australiens de Child, par exemple, dont j’ai écouté les productions.
Vous êtes originaires d’Ukraine, comment est la scène stoner là-bas ?
Il y a de nombreuses initiatives underground actuellement. Tout a commencé il y a environ cinq ans où nous avions notre batteur impliqué dans deux formations qui n’étaient pas toutes dans le style doom. Notre batteur faisait du brutal death metal et c’était très compliqué alors. Actuellement les choses éclosent et il y a des groupes que j’aime beaucoup comme 5R6 qui pratiquent un style entre Alice In Chains et Tool ; ce sont des types très cools et de très bons musiciens. Il y a aussi Somali Yacht Club qui sera au Desertfest Berlin de l’année prochaine. Nous sommes très fiers d’eux et les considérons comme nos petits frères ; nous les aimons beaucoup et j’espère que nous allons collaborer à l’avenir. Il y a une foule d’autres groupes comme dans beaucoup de pays avec quatre-vingt pourcent d’entre eux qui ne sont pas si bons que ça et se contentent d’être des repompeurs, mais vingt pourcent méritent le détour. Nous avons l’équipe du label Robustfellow qui sont responsables de tout ce style. Ils proposent la compilation « Electric Funeral Cafe » en téléchargement gratuit qui permet de se faire une idée de notre scène. Nous sommes sur Moon Records qui sont un peu une major en Ukraine et où nous sommes parmi une multitude d’autres formations d’horizons multiples ; c’est un peu une consécration pour l’underground stoner.
Comment expliques-tu le succès de « The Harvest » ?
Je suis certain que le succès de cet album est la conséquence du succès de nos albums précédents. Nous jouons des titres plus récents sur scène, mais les gens sont restés sur nos albums précédents ; celui-ci ne parle pas vraiment à tous nos fans. En tous cas pas autant que ceux d’avant car nous avons opéré des changement en ce qui concerne le son et notre manière de jouer, d’écrire et de tout. Les gens n’étaient pas prêts à ceci je crois. Je pense que le travail a été bien fait et suis content des collaborations avec notre manager et les gens en charge du son. Nous pouvons désormais nous produire dans des festivals de grande envergure en Ukraine. Nous sommes à la télé, nous avons des vidéos qui passent à la télé et participons à des talkshows. C’est marrant ce côté “ce sont des stars, ils jouent en Europe”. Nous sommes maintenant coincés sur certains festivals entre des groupes que nous écoutions gamins. Ils sont désormais vieux et écoutent ce que nous faisons ; c’est amusant quand un type que tu voyais à la télévision il y a une quinzaine d’années vient te dire qu’il aime ce que tu fais.
Tu parles de collaborations, comment s’est passée celle qui vous voit travailler avec la structure française Purple Sage pour votre promotion ?
Ça se passe monstre bien avec elle. Elle connaît très bien son boulot, sait ce qu’il faut faire ou ne pas faire. J’ai eu un peu d’intérêt pour le marketing et Claire fait un très bon boulot. Elle propose des choses et nous en discutons pour faire au mieux pour propager notre musique. J’aime travailler avec elle et espère pouvoir continuer à le faire.
Une question stupide à propos du nom de ton groupe : vous avez le nom le plus cool de la planète. Comment l’avez-vous trouvé ?
C’est la question à laquelle j’aime répondre de manière amusante car je suis vraiment fatigué d’y répondre. Mais ce n’est pas un problème, je vais te dire quand-même comment les choses se sont passées. Cela a commencé en 2008 ou 2009, j’avais des morceaux et n’avais pas vraiment réfléchi au nom du groupe. Je les ai fait écouter à des types autour de moi qui les ont trouvés vraiment cools et ils m’ont demandé comment j’avais appelé le groupe, ce à quoi j’ai répondu que jamais je n’y avais pensé. Alors, comme je voulais uploader les démos, j’étais devant mon ordinateur et me suis dit : « Stoned Jesus From Out Of Space ». Le premier nom était Stoned Jesus From Out Of Space. Des copains m’ont dit que si je voulais être pris au sérieux, je devais virer « From Out Of Space » parce que c’était trop du genre « Stoner Kebab » [remarque de moi-même : un groupe italien intéressant porte réellement ce nom !]. J’aime bien les commentaires sur Youtube qui disent : « Je suis venu pour le nom et resté pour la musique ». Les gens pensent que nous sommes peut-être des gens stupides avec un nom comme ça puis viennent vers notre son qui n’est pas à l’image de ce nom.
Aucune relation avec la religion ? Même avec des titres comme « Black Church » sur votre dernier opus ?
Non, rien du tout à voir avec la religion et les titres de nos morceaux citant des liens religieux sont des métaphores. Celui que tu as cité est une métaphore pour la sortie de quelque chose qui peut être la drogue, la vie de couple voire même la musique ou la religion ; c’est un abri que tu dois quitter comme les réfugiés le font. Je n’ai jamais approché la religion comme des groupes du genre Ghost qui la ressassent en continu. Je leur laisse faire ceci et me concentre sur autre chose.
Une dernière question : la dernière partie de la tournée sera terminée à la fin du mois d’octobre…
Nous terminons au Desertfest Belgium et avec notre batteur qui ne peut pas quitter l’Ukraine, nous allons faire des shows chez nous principalement dès novembre. La chose la plus excitante c’est qu’en novembre et décembre nous allons bosser sur du nouveau matériel et, pour être honnête, la plupart des titres de « The Harvest » ont été écrits il y a quatre ans voire trois pour les plus récents. Bien sûr que nous avons bossé dessus, mais ce n’était pas du nouveau matériel. Nous avons un nouveau batteur et désirons expérimenter des choses nouvelles. Je suis le principal contributeur à l’écriture et j’ai déjà plein d’idées et de choses prêtes pour aller de l’avant avec les autres sans qui je ne peux pas avancer. Nous écrirons, répéterons et probablement que l’an prochain nous enregistrons un EP. J’espère qu’en 2017 nous sortirons notre prochain album.
Petit évènement (de plus) cette année dans la nébuleuse, la sortie attendue du nouveau Uncle Acid suivant le déjà classique Mind Control nous permet de suivre avec attention l’évolution d’un groupe important de cette décennie passée et à coup sûr de celle à venir. Intéressons-nous plus particulièrement même à son mentor Kevin Starrs, un homme simple, calme et très courtois. Une entrevue au fort accent british.
The Night Creeper est plutôt bien reçu par le public et la presse, t’arrive t’il de lire les chroniques vous concernant ?
Oui des fois, mais ça n’a pas vraiment d’impact sur ma façon de faire car je ne fais pas de la musique pour eux, je le fais pour moi-même…
Comment décrirais-tu le processus de composition par rapport à Mind Control, as-tu ressenti une pression particulière ou changé tes habitudes de travail ?
Ce coup-ci ça été assez simple et naturel car je n’étais pas distrait par quoi que ce soit, pas de tournée ou de concerts à s’occuper, juste à se focaliser sur l’écriture et l’enregistrement, qui s’est fait bien plus simplement et rapidement que pour Mind Control. C’est probablement d’ailleurs la meilleure façon de faire de la bonne musique : se faire plaisir sans aucune pression.
On sait que tu composes quasiment tout tout seul, mais pourquoi tous ces changements de line-up ?
Pas par choix, à chaque fois ça a été parce qu’untel a voulu partir, faire autre chose ou ne pas continuer… Le dernier changement est le bassiste qui est reparti en Nouvelle-Zélande en début d’année.
Le nouvel album est naturellement déjà omniprésent dans les set-lists de la tournée qui commence. Comment choisissez-vous les morceaux que vous allez jouer ?
Disons que notre but est d’essayer de faire en sorte que tout le monde puisse ressortir content de l’expérience donc on met un peu de tous nos albums dans nos sets. Évidemment on ne peut pas se passer de morceaux de Blood Lust et Mind Control mais c’est intéressant aussi de voir la réaction des gens sur des titres qu’ils ne connaissent pas ou peu, spécialement s’ils n’ont pas encore écouté le nouvel album.
Vous commencez à avoir une flopée de (bonnes) chansons à jouer, ça doit commencer à être compliqué de choisir lesquelles jouer ou ne pas jouer non ?
Ouais c’est vrai que c’est un peu une sorte de problème, on en parlait justement encore juste avant : quelles chansons retirer et lesquelles mettre à la place, dans quel ordre etc, ça devient effectivement de plus en plus compliqué avec le temps…
Vous changez donc régulièrement la setlist ?
Pas tous les soirs mais régulièrement oui, ça peut même parfois dépendre de comment le public réagit. Par exemple on aurait aimé commencer par plusieurs nouveaux morceaux mais on s’est rendu compte que ça rendait plus difficile pour les gens de se mettre dedans vu qu’ils ne les connaissaient pas encore bien, du coup on a dû changer ça un peu.
Etes-vous toujours satisfaits du boulot que Rise Above fait pour vous ?
Oui complètement, ils nous laissent faire ce qu’on veut et font ce qu’ils ont à faire, les pressages d’albums et toute la partie business.
Comment expliques-tu que vous n’étiez pas à l’affiche des festivals genre Desertfest ou Up in Smoke ?
On aimerait beaucoup et on a été contactés pour y jouer mais à chaque fois soit on est déjà bookés en tournée comme à Londres où on jouait le même soir, soit tout simplement pas disponibles. Pareil pour Anvers, pour l’instant ça n’a jamais pu le faire mais bon… On a joué au Roadburn déjà, j’espère que ça se fera un jour ! [ndlr : s’en suit une petite discussion sur leur passage au Hellfest en 2013, bien apprécié apparemment, ainsi que sur le vieux matos qu’ils utilisent…]
On assiste depuis quelques années au retour en force du vinyle, es-tu toi-même collectionneur ?
Pas vraiment en fait, j’achète des disques mais je m’en fous un peu d’avoir la version limitée avec une couleur spéciale, ce genre de trucs. Pour moi ce qui compte c’est la musique…
Quels sont tes derniers achats alors ?
Le nouvel album de WASP, que je trouve putain de bien.
Ca ne m’étonne pas vu ton t-shirt (Van Halen)
Ah ah, ouais, d’ailleurs je les ai vus à Hollywood il y a quelques semaines, c’était la première fois que je les voyais et j’étais comme un gosse, Eddie est toujours le meilleur !
Tu en as profité pour faire quelques trouvailles là-bas ?
Oui je suis tombé sur Mirror Ball de Neil Young qui est difficile à trouver en vinyle, à San Francisco il me semble, donc il fallait que je l’achète…
Tu es plutôt branché vieux groupes alors ?
Hmm oui plutôt en fait. Bon il y a quand même pas mal de bons groupes récents : Blood Ceremony, Danava, Spiders [ndlr : leur première partie sur la tournée] sont très bons aussi. Il y a vraiment beaucoup de bonne nouvelle musique aussi.
Quel est ton ressenti par rapport à la France ?
On a toujours eu un bon soutien en France même si ce n’est que notre première fois à Lyon. En plus la salle est vraiment super, le son sur scène est excellent alors on a bien hâte. Espérons que des gens viennent et apprécient !
Quel est votre emploi du temps à venir ?
Une longue tournée en Europe jusqu’au 26 novembre à Londres, après ça une petite pause et on file vers l’Australie !
En tant que cinéphile as-tu déjà pensé composer une BO ?
C’est vrai que c’est quelque chose qui me plairait beaucoup mais je n’en ai pas encore eu l’occasion pour le moment, personne ne m’a encore contacté à ce sujet…
C’est au cœur de la campagne teutonne que nous avons croisé la route du trio de Virginie lors de l’édition deux-mille-quinze du Freak Valley Festival. Le soleil cognait dur sur nos crânes et c’est quelques heures après leur prestation de la mi-journée que nous avons eu le plaisir d’échanger avec T.R. Morton, Mark Cave et Lenny Hines au sujet du petit dernier et de l’actu de cette formation qui se fait – trop – rare sur nos scènes régionales.
Salut Freedom Hawk, vous êtes en tournée en Europe pour la promotion de « Into Your Mind », votre nouvel album. Comment ça se passe jusqu’ici ?
Bien ; il s’agit du second show aujourd’hui au Freak Valley. Jusqu’ici nous passons du bon temps et tout va bien. La prestation du jour était bonne, nous y avons pris du plaisir et en plus c’est une belle journée.
Et comment est-ce que ça se passe avec Seedy Jeezus vos camarades de tournée ?
Ca se passe à merveille ; c’est des types super un peu comme nous (rires).
Le concert de ce jour était la date la plus prestigieuse de cette tournée. Comment était-ce de devoir jouer à l’heure du repas de midi ?
Étonnamment bien, les attentes étaient faibles et le résultat très élevé.
Quelles attentes, les vôtres ?
Ouais les nôtres ; nous étions sur la petite scène et il y avait peu de monde (les gens se reposaient à l’ombre) avant le début du show. Les gens ont débarqué quand nous avons débuté le show. Cela nous a rappelé une aventure similaire à Austin quand nous jouions avec Clutch et une tapée de groupes. Nous jouions les premiers et là aussi nos attentes n’étaient vraiment pas très élevées. Nous avions fait un soundcheck devant personne et, comme aujourd’hui, ça a fini de belle manière.
Un peu comme dans les clubs ?
Non c’est nettement mieux ; dans les clubs tout ce que l’on fait c’est arriver, brancher les instruments et prier pour que le son donne quelque chose ; plug and play (rires). Ça nous convient assez, nous sommes des punk stoner rock.
Vous avez donné quelques concerts aux Etats-Unis au début de l’année et la plupart des shows auront lieu en Allemagne et aux Pays-Bas. Quels sont les projets dans les tuyaux pour venir à la rencontre de vos fans en Suisse ou en France ?
Nous étions en France l’an passé. Nous allons tenter de revenir rapidement. Nous y retournerons dès que possible, mais il n’y a plus d’argent dans la musique. En fait, non ce n’est pas qu’une histoire d’argent ; la nourriture était fantastique en France et le vin aussi. Paris a certainement été le meilleur endroit au niveau de la nourriture sur notre dernière tournée même si c’était bon partout. C’était un lundi soir et il y avait beaucoup de fans. Nous avons vraiment passé un bon moment pour une soirée qui avait lieu un lundi. Les gens étaient vraiment très enthousiastes. Nous adorerions faire le Hellfest dont tous les groupes nous parlent, mais à part sur Paris, il est difficile de jouer en France.
Pouvez-vous m’indiquer comment vous vous être retrouvé à collaborer avec autant de Français ?
Claire est en charge de nos relations presses et se charge de notre promotion ; Antoine [ndlr : de Headbang Design] s’est chargé de l’illustration de notre nouvel album. Nous avons échangé avec ce dernier par e-mail suite au poster qu’il a réalisé pour le Freak Valley Festival en lui indiquant qu’un album allait arriver ; il a dit OK. C’est un type vraiment talentueux et il est très collaboratif dans sa manière de travailler. Il s’est chargé du design total et pas uniquement de la couverture.
« Into Your Mind », ce fameux nouvel album sera bientôt dehors. Quels sont les premiers avis que vous avez reçus ?
Jusqu’ici c’est très positif.
Cet album est à nouveau sorti sur Small Stone Records, comment est-ce que les choses se sont déroulées cette fois-ci ?
Les choses se sont très bien passées. En Allemagne c’est Cargo Records qui s’en occupe pour la distribution et pour le reste c’est Small Stone.
Leurs problèmes d’eau [ndlr : les bureaux de Small Stone ont subi une inondation il y a quelques mois] leur ont quand même permis de mener à bien ce projet ?
Il se reconstruit très bien. Quand tu descends aussi bas qu’il est allé avec les inondations qui l’ont touché, tu dois avoir de l’énergie pour faire ton retour et il l’a !
En ce qui concerne l’enregistrement, quelle était votre idée au niveau du son quand vous êtes arrivés en studio ?
L’idée était clairement d’enregistrer les parties rythmiques live. Les albums précédents ayant été enregistrés de manière plus standard avec le processus habituel des prises de sons successives, nous nous sommes rendus compte que nous avions perdu le feeling que nous avons live. Nous avons donc enregistré celui-ci pour avoir le rendu du trio que nous sommes en sentant le rythme pendant les prises. Nous n’avions pas à revenir avec des overdubs ou des insertions de soli.
Le son est résolument différent au final.
Nous l’avons réalisé avec un autre type ; les deux autres avaient été réalisé avec le même producteur Vince Burke qui a travaillé avec pas mal de groupes de notre genre présents sur Relapse Records. Nous avions envie de faire quelque chose d’un peu différent avec un autre ingénieur dans un autre studio pour explorer d’autres sons ainsi que d’autres manières de bosser. Jim Woodling avait ce que nous cherchions dans son studio. Il est d’abord venu nous voir répéter pour s’imprégner de notre son. Nous n’avons pas utilisé de click pour ce travail ; tout était live. Ce qui est spécial, c’est que quand nous réalisions l’enregistrement, nous étions plus dans un registre du début des années 70 avec l’esprit de se rendre en studio et d’y enregistrer les choses telles qu’elles venaient. Nous avons tous les trois apprécié cette manière de travailler. Nos sets sur scène fonctionnent bien et nous voulions capturer ceci.
Certains titres sont très spéciaux comme « Into Your Mind » ou « Lost Space » qui tape dans le psychédélique ; comment s’est déroulé le processus de composition ?
Le processus d’écriture s’est déroulé de manière assez standard ; nous avons joué ensemble pour commencer à trouver des idées. Le processus lui-même est toujours le même : T.R. propose des riffs et Mark ainsi que Lenny arrivent ensuite et nous collaborons, nous donnons du feedback et avançons ainsi. Nous travaillons tout ensemble : les lignes de basse, les riffs et la batterie en indiquant ce qui pourrait être fait. Nous nous asseyons et cherchons des idées pour les transitions entre les riffs. C’est assez live en fait, nous ne nous asseyons pas et élaborons les titres de manière scolaire. Notre groupe est assez particulier car nous jammons des heures durant et enregistrons ces jams sinon nous ne nous souvenons pas de ce que nous avions fait. Nous trouvons les transitions et les bridges juste en jammant c’est comme ça que ça marche le mieux pour nous : de manière organique en pratiquant à partir d’une idée générale.
Un titre semble être un hommage aux grands-pères du stoner : « The Line »…
… Ah « The Line » ; le titre original était « Buck Rogers Go Surfing » (rires). T.R. l’avait abordé avec une batterie électronique. Nous en avons fait un titre pour finir. Il fait désormais un peu plus de six minutes alors qu’il était d’une longueur de neuf minutes à l’origine. Il était beaucoup trop long par rapport à nos titres habituels qui ne dépassent pas les cinq minutes. Une chose qui est très importante c’est que nous venons de la culture surf des plages de Virginie et nos fans locaux sont issus du monde du surf ou de celui du skate. C’est pour cette raison que nous avons ce genre de titres provisoires pour nos chansons qui sont à la base des jokes. Nous venons de la Côte Est et il y a pas mal de similarités avec la Côte Ouest plus spécialement avec la Californie. C’est la culture des USA plus spécifiquement pour ses côtes… Nous avons failli garder ce titre et avons tout de même fini par le changer alors que nous l’avions toujours joué en répétition en l’appelant ainsi. Nous avions même pensé en faire uniquement un acronyme : « B.R.G.S. » comme ça personne, à part nous, n’aurait su de quoi il s’agissait.
Plus généralement, quels sont les groupes qui vous ont influencé ?
Nous avons tous des influences provenant de styles différents. T.R. aime le style des années quatre-vingt style college rock. Lenny est plus porté sur les seventies en tant que batteur et Mark aussi, mais en étant plus axé sur le heavy rock [ndlr : il portait un t-shirt de Dozer durant le set qui avait eu lieu plus tôt dans la journée]. Nous essayons d’être assez heavy au final.
Et quels sont les groupes que vous désirez voir aujourd’hui sur scène ?
Orchid !
Et avez-vous vu le drumkit impressionnant de Bröselmaschine [ndlr : il faut préciser ici que ce qu’Abaddon de Venom utilisait naguère était du pipi de minet par rapport à l’engin des teutons] ?
Nous étions certain qu’il s’agissait de celui de Orchid car ils ont mis des heures à le préparer et à effectuer un soundcheck. Il y avait absolument tout ce que tu peux chercher dessus. Pour en revenir aux groupes à l’affiche, malheureusement nous ne verrons pas Earthless qui jouent demain et que nous n’avons jamais vu sur scène. Nous avons envie d’être surpris par certains groupes comme Danava par exemple. Nous voulons découvrir un groupe qui nous emballe.
Et finalement, quels sont vos plans quand vous serez de retour en Virginie ?
Nous allons faire quelques shows aux USA, mais la tournée actuelle est la plus grande que nous avons faite. Nous devons nous retrouver et voir nos familles qui se sont agrandies récemment.
Nous avons profité de la venue de nos potes du Kansas au Hellfest 2015 pour blablater un peu avec leur charismatique frontman. C’est avec un Steve Moss bien disposé – comme à son habitude – et incroyablement heureux de sa prestation devant une Valley pleine avant même l’heure du repas, que Desert-Rock a pris la température du trio US alors que ses complices Brandon et Mike récupéraient après leur incroyable show. Nous avons rapidement fait le point sur l’actu de la formation et la santé du barbu à peine sorti d’une intervention chirurgicale, dans un box de la zone presse tandis qu’un Idol sur le retour mobilisait toute la puissance de la sono pour sa conférence de presse.
Salut Steve…
Salut ! Quand j’ai vu que Desert-Rock était sur la liste des interviews de la journée j’ai crié : « Yeah ! ».
… Merci, comment vas-tu ?
Je viens d’effectuer un show incroyable au Hellfest : je vais bien !
Et en ce qui concerne ton opération ?
J’ai eu une opération il y a quelques semaines ; j’avais deux hernies. C’était rude ; il y a deux semaines je ne pouvais même plus marcher. J’étais couché dans un lit et maintenant je suis sur scène.
Et comment ça se passe sur scène ?
Juste aussi bien que d’habitude. C’est douloureux, mais je dois le faire. Le docteur m’a donné son feu vert ; il m’a dit que je pouvais tourner et me produire sur scène alors c’est OK. C’est censé aller de mieux en mieux.
Tu dis que tu dois le faire ; estimes-tu qu’il s’agisse d’un devoir ?
Je dois le faire pour gagner de l’argent.
Tu gagnes donc de l’argent en pratiquant ta musique…
Ouais, enfin j’essaye.
Vous tournez une fois de plus en Europe peu de temps après votre précédente tournée, quels sont les changements par rapport à celle-ci ?
Le Hellfest : il s’agit en fait de la partie principale de cette tournée qui a été organisée autour de cette date. Il y a aussi d’autres festivals comme le Stoned From The Underground et Rock In Bourlon, il y a aussi l’Espagne et le Portugal ainsi qu’un tas d’endroist où nous ne sommes pas allé depuis longtemps pour continuer à promouvoir le nouvel album.
Qu’attendez-vous de cette nouvelle tournée ?
Nous sommes prêst à jouer partout, nous sommes ravis de voir des gens sortir pour venir nous voir sur scène faire du rock, que ce soit des milliers de personnes ou une vingtaine/trentaine de personnes c’est la même chose pour nous.
Il me semble que vous tournez neuf mois par année…
Ouais !
Que faites-vous les trois autres mois restants ?
Personnellement, je passe mon temps à aimer ma femme et mes chiens. J’essaye aussi de voir quelques matchs de baseball.
Il n’y a donc pas d’autres activités autour de la musique pour vous ?
Non, nous avons amplement assez à faire avec ce groupe. C’est vraiment beaucoup de boulot et nous n’avons pas l’énergie pour faire autre chose dans ce domaine.
Revenons sur le concert de ce jour. Quel effet ça vous a fait de jouer si tôt ?
La tente était pleine bourrée ; nous étions donc contents !
Comment expliquez-vous le fait que c’était si plein ?
Je ne sais pas. Nous étions très surpris car je crois que le groupe qui nous a précédé a eu moins de monde [ndlr : Glowsun qui jouait à l’heure de l’ouverture] et celui qui nous a suivi [ndlr : Samsara Blues Experiment] en avait aussi moins. Nous étions étonnés et contents car durant notre soundcheck il n’y avait personne sous la tente et quand nous sommes montés sur scène c’était bourré. C’était cool et nous sommes vraiment contents que tant de personnes aient entendu parler de nous. Maintenant ils savent qui nous sommes !
Comment avez-vous sélectionné les titres que vous avez joués ?
Nous avions un temps de jeu très limité donc nous avons choisi les titres les plus lourds et les plus rapides. Nous ne voulions pas d’un show qui prend le temps de démarrer, mais l’attaquer de manière frontale afin d’avoir l’impact maximal.
Donc pas de reprise de Nina Simone…
…Non, mais j’aurais bien aimé la faire.
Comment vous est venue l’idée de la reprendre ?
Je suis un énorme fan. En fait non, nous sommes tous d’énormes fans et nous aimons vraiment jouer ce titre.
Votre dernier album, Cold Was The Ground, était très présent aujourd’hui…
…Ouais ! C’est notre nouvel album, nous devons le pousser.
Quelques mois après sa sortie, avec du recul, comment celui-ci a-t-il été accueilli ?
Très bien ; les retours sont excellents et nous sommes très contents.
Il est sorti sur Napalm Records ; comment est-ce de travailler avec une major européenne ?
C’est très bien ; ils sont présents partout y compris aux USA donc c’est vraiment très bien. Ils s’occupent bien de ce que nous faisons, de ce que nous sommes.
Vous avez commencé à tourner alors que cet album n’était pas encore sorti. Qu’avez-vous prévu pour ces prochains temps ?
Un nouvel album… Nous avons commencé à écrire pour ce nouvel album. Nous allons continuer à bosser sur cet album et tourner.
Et un nouvel album live après celui enregistré au Roadburn ?
Ouais, pourquoi pas ; tourner c’est notre vie donc on va y retourner.
Pas de DVD en vue ?
Nous adorerions faire un DVD ; les gens aiment nos shows sur scène ce serait donc énorme de sortir une chose pareille, mais ça coûte assez cher.
Pour vous donner plus envie encore, nous avons enregistré « B.C. Trucker » aujourd’hui avec plusieurs caméras.
Merci beaucoup !
Vous avez une fanbase importante en Europe qu’est-ce qui pourrait vous aider à être encore plus visible de ce côté-ci de l’Atlantique ?
Nous devons absolument nous arranger pour trouver un groupe de stature importante pour tourner avec. Un truc du genre Clutch, très connu qui nous permettrait de toucher plus de monde.
Et des plans comme aujourd’hui ?
Oui effectivement il s’agit d’une excellente opportunité ; c’est un rêve devenu réalité qui nous a permis de jouer devant vraiment beaucoup de gens.
C’était votre plus grande assistance ?
Oh oui vraiment ! C’est clairement l’endroit où nous avons eu le plus de monde pour assister à un de nos shows. Quelque chose comme huit-mille personnes c’est vraiment quelque chose ! En montant sur scène nous nous sommes dit que nous étions prêt pour le rock ; cette mer de monde nous a tout de suite incité à nous dire que c’était le moment venu pour le rock’n’roll !
Et avec un public aussi éloigné de vous par rapport à d’habitude comment était-ce ?
Même avec les gens loin derrière nous nous sentions bien ; c’était excellent et nous espérons donc que cela incitera plus de monde à venir nous voir dans de plus petites salles. Nous essayons toujours de trouver l’interaction avec la salle et même au fond ça le faisait. Nous avons tenté d’interagir autant que nous le pouvions.
J’ai lu quelque part que vous jouiez du heavy rock à la manière du blues ; comment décririez-vous votre musique ?
Tous nos riffs de guitare viennent du blues avec des éléments de jazz, beaucoup de fun, un peu d’overdrive, de la rapidité et la tête qui tape fort.
Deux dernières questions : la scène est qualifiée de musique stoner. Comment ça te fait d’être une des figures de cette scène alors que tu ne bois pas et ne consommes pas de drogues ?
Je pense que peu importe l’étiquette que tu colles à cette musique, je suis content de la pratiquer, peu importe que ça s’appelle stoner rock ou autrement. D’ailleurs pour faire ce que je fais sur scène, je ne pense pas que j’en serai capable si je buvais ou prenais de la drogue. C’est mon job et je considère que je dois prendre cette chose sérieusement.
La dernière fois que je t’ai croisé tu conduisais aussi le van. Quelles sont vos conditions pour la tournée actuelle ?
Nous sommes comme d’habitude uniquement tous les trois, sans personne pour assurer les tâches comme conduire, faire le roadie ou autre chose…
C’est après leur prestation au Desertfest de Berlin, qui demeurera l’une de nos préférées de l’édition 2015, que nous avons tapé la causette avec le trio nord-américain. Boosté par une imagerie sombre, agressive et tourmentée, ces Canadiens s’avèrent être des garçons aussi sympathiques que talentueux. Ne nous leurrons pas, Dopethrone mieux que personne est une valeur sûre qui incarne le renouveau de la scène stoner internationale et pas uniquement francophone. Nous remercions Vince, Vyk et Carl pour leur génie, leur énergie ainsi que leur amabilité.
Salut Dopethrone, comment se passe cette tournée européenne ?
Nous avons fait Lyon et Strasbourg avec Eyehategod et hier nous étions au Desertfest de Londres. C’est notre quatrième date aujourd’hui en fait. Ici c’est gros, avec une grande scène : c’est étrange au niveau du feeling. Il s’agit de notre plus gros show avec le Roadburn.
Quel effet cela vous a fait de vous retrouver sur une grande scène aujourd’hui ?
Comme une petite érection (rires). Nous préférons les petites scènes un peu plus intimes car nous sommes un peu punk et ces grosses scènes avec une barrière et le drumriser nous font un peu bizarre.
Vous étiez néanmoins bien groupés en avant sur la scène…
…c’est exactement ce que nous désirions. Nous aimons bien l’ambiance petit bar même si nous avons bien aimé ce concert et aussi l’organisation de ce festival.
Vous n’avez, en plus, bientôt plus de t-shirts pour le merch…
…il a fallu repaquer. C’est important pour nous car ,comme nous le disons, et comme nous l’avons tatoué pour certains d’entre nous, D.I.Y. Fais-le toi-même : nous faisons tout nous-même y compris le merch. Si vous désirez nous revoir l’année prochaine il faut acheter du merch car il nous faut de l’argent pour tourner.
Quand vous parlez de tout réaliser, vous faites aussi le design ?
Nous dirigeons à la manière d’un directeur artistique en engageant un gars et en lui indiquant ce que nous voulons à peu près et après il y va. Nous sommes le cœur et l’âme de l’artwork, mais nous utilisons d’autres gens pour transformer notre vision sur papier après.
Musicalement vous avez aussi cette démarche D.I.Y. en enregistrant vous-même ?
Ce sont des amis qui s’en chargent. C’est comme ça que ça a commencé avec le batteur du début et ça a continué ensuite avec Dark Foil et III quand Carl est arrivé . C’est un peu une famille. Nous avons finalement dû changer pour des raisons de fiabilité et travailler avec JB, un Français établi à Montréal, pour Hochelaga qui sonne pour nous extrêmement bien. Nous avons d’ailleurs envie de continuer avec lui pour le prochain album.
Votre nouvel album Hochelaga n’était pas tout à fait sorti au début de la tournée, était-ce handicapant pour vous ?
Nous avions le LP au tout début de la tournée, mais le CD n’était pas sorti à temps et nous avions la version virtuelle disponible : ça vend beaucoup et c’est parfait. Il est à $6.66 sur Bandcamp, nous nous demandons bien pourquoi (rires).
Pour quelqu’un qui ne vous connaitrait pas, comment décrieriez-vous cette nouvelle production ?
Nous sommes des punks qui jouons du blues. Tu mélanges ça avec une voix black metal, de l’occulte et du heavy après ; imagine un mammouth qui se noie dans du goudron mélangé avec du blues…
On vous dit assez proche du sludge, vous sentez-vous proche de cette scène ?
Nous essayons de trouver notre propre son. Comme pour une bonne recette, nous tentons de l’améliorer en ne la changeant pas trop. C’est un peu comme pour les riffs de Muddy Waters : quand tu écoutes un album tu sais que c’est Muddy Waters, mais toute une équipe participe à la construction du son et pas une seule personne. Nous n’essayons pas de réinventer la roue ; nous essayons d’être nous-mêmes et de jouer la musique qui nous plaît ; celle qui nous fait nous sentir bien.
Votre son est assez proche d’un certain son issu de la scène de La Nouvelle-Orléans – vous avez par ailleurs joué avec Eyehategod commevous le disiez – est-ce que vous vous sentez proche de cette scène en raison de la colonisation de cette ville par des Canadiens ?
Cette ville a un petit côté francophone c’est certain. Vince y est resté un bout de temps après Katrina en 2008 quelques années après l’ouragan afin de jouer de la musique ; dans le ghetto là où les armes à feu étaient très présentes. Certaines maisons étaient à moitié démolies et les enfants de quartiers jouaient dedans ce qui était assez dangereux. Il a donc travaillé là-bas avec des prisonniers et des personnes qui acceptaient de très faibles rémunérations.
Quelles sont les évolutions majeures que vous percevez entre Hochelaga et III ?
En nous fiant aux reviews, il semble que III était la continuation de Dark Foil, mais que Hochelaga c’était Dopethrone. Les fans nous ont trouvé : c’est ce que nous sommes. JB nous a aidé à trouver notre son à nous. Nous avons composé en jammant durant des barbecues, nous improvisons et jouons plutôt que nous échanger des riffs à distance. Vyk se chargeait de tout enregistrer avec son téléphone afin que nous n’oubliions pas ensuite ce que nous avions joué la veille. Nous ne sommes pas du tout technologiques et nous pensons avoir perdu de nombreux titres en n’enregistrant pas nos jams vu que nous le faisons surtout en fin de semaine en faisant la fête. Nous sommes très productifs en travaillant ainsi en acoustique. Nous avons un mode d’écriture instinctif ; nous le faisons au feeling uniquement et n’arrivons pas à nous poser dans un local pour nous focaliser sur le processus d’écriture. Ce processus est naturel comme dans le blues : si ça la fait c’est OK et sinon tant pis. Les riffs les plus aboutis sont ceux qui ont été composés quand ça allait mal et quand nous étions déconnectés. Impossible pour nous de composer après une séance de fitness et un petit jogging ; c’est pas la « Balade des gens heureux ».
Vous n’avez pas l’air malheureux pour autant !
Après dix-huit heures de route et quelques bières : ça va bien !
Vous vous déclarez pas technologiques, mais quand on voit le nombreux public qui est venu assister à votre prestation, on pense aussi que votre présence sur les réseaux sociaux n’y est pas étrangère.
Nous sommes arrivés après que Myspace se soit crashé et que Facebook débarque en force avec l’appui de Youtube. Ca nous a permis de toucher du monde et par exemple, ce soir un fan est venu d’Israël pour nous voir. Il nous a d’ailleurs dit qu’une scène stoner y existait. Ce type est venu d’Israël que pour nous et même si cinq-cents personnes ont assisté au concert, juste cette personne-là nous rend heureux. Il y a aussi un de nos fans qui s’est fait tatouer notre logo et qui bouge à chaque fois que nous jouons à trois heures de route de chez lui. Il nous voit cinq ou six fois par tournée et ça nous fait aussi nous rendre heureux.
Vous avez réalisé un visuel très agressif pour cet album et le clip de « Scum Fuck Blues » hyper violent…
C’est des amis à nous qui l’ont réalisé. Ils avaient fait un film en utilisant un de nos titres et on les a contactés pour qu’ils fassent ce clip. Ils travaillent sur VHS avec beaucoup de grain ce qui matche bien avec notre style.
… je pense que ça a contribué au fait que les gens viennent vous voir…
Oui, nous avions donné comme guideline : 1970, 1980, abus de substances, bikers, meurtres et drogues. C’est tout… et ça a marché !
Pourquoi avoir baptisé cette nouvelle production du nom de là où vous vivez ?
« Hochelaga » : c’est parce que c’est là que l’album est né tout simplement. C’est comme une ville dans une autre ville ; dans Montréal. Hochelaga est un quarter très québécois dans Montréal ; il s’est beaucoup appauvri quoique ça s’est amélioré un peu ces dernières années. Au début, il y avait des putes aux coins des rues, des bastons, des meurtres et des feus partout, mais là, ça diminue. Ce qui est positif avec ça c’est que nous ne pouvons pas nous faire arrêter car il y a toujours quelqu’un de pire que nous. Toujours quelqu’un de plus thrash. Nous faisons des feux et nous jammons, mais personne n’appelle la police. Les gens nous reconnaissent et nous respectent parce que nous n’avons rien à voir avec la vente de crack et les bandes de junkies. Nous sommes respectés au niveau communautaire car nous partageons.
Comment expliquez-vous l’omniprésence de la France autour de vous : label et tourneur en premier lieu ?
Parce que les Français sont partout, tabernacle (rires) ! Ca s’est développé naturellement ainsi. Quand nous avons joué au Roadburn, Walter nous avait mis dans la même loge que les groupes français. Nous avons donc rencontré Huata, Nico [de Dead Pig Entertainment], etc. Le plan est parti comme ça. Nous avons plus tard rencontré JB : c’est des coïncidences, mais ce style ne marche pas très bien à part au Sud des USA et un peu sur la Côte-Est, alors qu’en Europe, et en France en particulier, nous avons nettement plus de fans. Pour jouer aux Etats-Unis : c’est très très très compliqué. Nous jouons presque gratuitement en raison des visas et autres formalités ce qui contraint les groupes à jouer soit de manière illégale – sans pouvoir vendre de merch par exemple – soit de ne pas gagner d’argent.
Et qu’en est-il au sujet de Montréal ?
La scène commence à se développer. Il n’y a pas de scène stoner au Canada, même si d’autres que nous sont déjà venus en Europe, comme Show Of Bedlam. Il ne s’agit pas d’une grosse scène ; rien à voir avec l’Europe. Alors que le grind et d’autres styles extrêmes sont bien établis.
Pour finir, comme vous avez sorti quatre albums en sept ans : où en êtes-vous du processus d’écriture du prochain ?
Nous en sommes à zéro ! Nous avons des vies en dehors de Dopethrone car nous ne vivons pas du tout de notre musique donc il faut aussi que la vie continue. Nous nous concentrons pour l’heure sur la sortie de cet album et sur la tournée actuelle. Nous nous concentrerons après sur la suite d’autant plus que Carl, notre batteur, a déménagé et on se retrouve tous à cinq minutes les uns des autres, ce qui nous permettra de composer plus rapidement le cinquième album qui va déchirer des culs !
On avait taillé le bout de gras avec Ben Ward il y a quelques semaines à l’occasion de la sortie de l’excellent Back From The Abyss, mais nos anglais préférés ont trouvé moyen à nouveau de nous surprendre avec une paire de concerts “anniversaire” à l’occasion des deux Desertfest. Forcément, on a voulu leur en parler, cette fois avec Martyn Millard et Chris Turner, qui se sont révélés des interlocuteurs non seulement sympathiques mais affables et drôles ! Du coup, on les a pris à leur propre jeu et on a voulu célébrer leur anniversaire à travers une interview autour de leur discographie… L’occasion de glaner des infos inédites et même souvent surprenantes. Pas de langue de bois, vous verrez !
Vous avez atteint l’âge canonique de vingt ans cette année, joyeux anniversaire ! Vous jouez deux shows très spéciaux à cette occasion, aujourd’hui à Berlin, et demain à Londres. Vous y jouez notamment l’intégrale de votre album The Big Black. D’où vous est venue cette idée ?
Martyn Millard (basse) : Je pense qu’on voulait faire quelque chose de différent. C’était un peu trop évident et facile de proposer de rejouer notre premier album, même si ça aurait été logique étant donné que c’est notre vingtième anniversaire… Mais notre album le plus populaire est The Big Black, c’est celui que nos fans préfèrent, en général.
Chris Turner (batterie) : On nous a proposé plusieurs choses pour célébrer cet anniversaire, et c’est cette idée que nous avons voulu concrétiser. Tu sais il y a certains titres de l’album que nous n’avons jamais joué sur scène jusqu’à aujourd’hui…
Martyn : Une chose est sûre, il y en a au moins un : l’instrumental “You’ll Never Get to the Moon in That”. Après on n’est pas complètement sûr pour certaines autres… “298 Kg”, nous l’avons jouée deux ou trois fois… D’ailleurs à chaque fois on l’a ratée… On risque de la rater ce soir aussi, mais on s’en fout, on s’y est préparés (rires).
Vous ne jouez pas la reprise de Black Sabbath, “Into The Void”, qui figure sur certaines éditions de l’album ?
Martyn : Non, non, on joue l’album, mais pas ses bonus tracks !
Chris : Le truc avec les albums c’est que quand les labels veulent les ressortir pour des éditions spéciales, ils veulent des titres complémentaires. Or on est quand même assez feignants, et quand on enregistre un album on écrit juste assez de titres pour l’album, rien de plus. Tu as certains groupes qui composent une cinquantaine de titres et qui n’en retiennent que dix à la fin…
Martyn : Alors que nous si on arrive à en pondre neuf ou dix pour l’album on s’estime chanceux (rires). Mais concernant la reprise de Sabbath, j’y ai pensé pas plus tard qu’hier figure-toi, mais je suis arrivé au constat qu’il y avait encore des chansons à nous, que nous avons composées nous-mêmes, que nous n’avons pas encore joué live…
Chris : Exactement : c’est une célébration des vingt ans d’Orange Goblin, et nous avons tant de chansons maintenant, ce n’est pas dans une telle occasion que nous allons jouer des chansons d’autres groupes… Même si j’adore cette reprise !
Il paraît que vous allez être sept musiciens sur scène pour ces concerts, dites-nous en plus.
Martyn : Nous serons sept demain à Londres. Ce soir à Berlin nous serons cinq. Il faut se rappeler que nous étions cinq pour enregistrer The Big Black.
Chris : Aussi extraordinaire que soit Joe [Hoare] à la guitare, il ne peut pas retranscrire tout ce qui a été enregistré sur cet album avec une seule guitare.
Martyn : Sur nos derniers albums, tout est composé pour quatre musiciens, c’est impeccable, mais dès lors que nous jouons certains de nos titres issus des albums plus anciens, où nous avions deux guitaristes, on perd forcément un peu de l’impact de ces morceaux. En live on l’entend, on les a ré-arrangés pour la plupart, mais ce n’est pas pareil. Donc pour retranscrire à la perfection The Big Black il nous fallait une cinquième personne, et nous n’avons pas hésité longtemps en demandant à Neil [Kingsbury – ndlr] notre guitar tech, de nous accompagner sur ces concerts, il a déjà joué avec nous plusieurs fois [ndlr : lors d’une blessure de Joe Hoare notamment]. Pour le concert de Londres, nous aurons aussi du lap steel, de l’harmonica, des claviers, des chœurs… Mais ce sont des musiciens qui habitent Londres, qu’il est trop compliqué de faire venir ici juste pour une date.
On va maintenant faire une séance “retour vers le futur”, et on va passer en revue avec vous l’ensemble de votre discographie depuis vingt ans si vous le voulez bien… On va donc commencer par Frequencies From Planet Ten, votre premier album, sorti en 1997. Quelle est votre chanson préférée dans cet album ?
Martyn : Wow, pas évident… Je dirais sans doute “Saruman’s Wish”, que l’on jouera aussi ce soir, mais… C’était il y a si longtemps…
Chris : On pourrait aussi citer “Magic Carpet”.
Martyn : Putain oui, c’est un bon morceau, tellement basique et efficace. Mais je les aime tous vraiment. On peut entendre sur ce disque des morceaux déjà un peu anciens, car la plupart des titres existaient depuis plus d’un an et demi avant la sortie du disque : le disque a été sorti très tard après l’enregistrement, car nous avons dû changer le nom du groupe [ndlr : le groupe s’appelait à ses débuts “Our Haunted Kingdom”], ça a été une chose compliquée avec le label à l’époque, tu imagines… Dans l’intervalle on avait déjà pas mal tourné, on était vraiment en train de façonner notre identité musicale, donc il y avait un décalage. Tu sais, cet album c’est aussi un peu comme nos premières démos : sache qu’il n’y a jamais eu de démo avec Orange Goblin, tout est sur l’album, le reste était sous notre ancien groupe.
Votre premier album s’est retrouvé direct sorti sur le label qui commençait à avoir le vent en poupe, Rise Above, une référence pour l’époque… Coup de chance ?
Martyn : On a été un peu chanceux, c’est vrai, mais il faut aussi se rappeler qu’à l’époque, les seuls groupes dans le genre étaient Cathedral, Electric Wizard, Acrimony… les mecs de Rise Above ont écouté notre musique et ont dit “ouais ouais, ça peut rentrer dans notre catalogue”, on avait en quelque sorte quelques influences Trouble en plus, on était quand même différents… Mais dans les années qui ont suivi, il y a eu des tonnes de groupes dans des genres assez proches. Donc oui, quand on a “émergé”, on a eu du bol, on était là au bon moment.
Comment voyez-vous votre second album, Time Traveling Blues, avec ces années de recul ?
Martyn : Au moment où il est sorti, on avait déjà beaucoup changé dans notre façon de composer.
Chris : J’ai commencé à contribuer activement à l’écriture à ce moment-là.
Martyn : Absolument, et ça nous a apporté pas mal d’influences complémentaires, des choses venant du punk, du hardcore… Ca ne saute pas aux oreilles immédiatement, mais il y a des trucs qu’on n’avait jamais essayés avant, des signatures typiques…
Et on voit aussi disparaître le recours aux claviers sur cet album…
Chris : On a eu quelques claviers sur le premier album, mais le claviériste, Duncan Gibbs, ne faisait quand même pas partie du groupe.
Martyn : Il a joué sur deux ou trois chansons du premier album, et une seule chanson sur Time Traveling Blues, “Shine” bien sûr. Mais par contre on n’a pas recruté un nul, il était excellent : Deep Purple le voulait quand ils ont viré John Lord ! Je te parle du début des années 80…
On en arrive à The Big Black, dont on a déjà un peu parlé. Qu’est-ce qui a contribué selon vous à en faire un album si spécial, quel était votre état d’esprit à l’époque ?
Martyn : On était juste bourrés et défoncés (rires).
Chris : On vivait tous ensemble à l’époque, on se retrouvait ensemble tous les jours. On avait tous des jobs merdiques à ce moment-là…
Martyn : Jobs merdiques, drogues merdiques… (rires)
Chris : On passait tout notre temps libre ensemble, on n’avait pas de fric, il n’y avait que l’alcool et les joints…
Martyn : On a fait venir Billy Anderson pour enregistrer l’album… et putain, il était pire que nous (rires). Il y a beaucoup de tout ça sur cet album.
Chris : Deux semaines avant l’enregistrement, on n’avait aucune musique. On nous a filé une salle derrière un pub pendant une semaine…
Martyn : Ouais, paumée sur la côte Sud de l’Angleterre, on an composé tout l’album là-bas et Billy l’a enregistré. Je peux te dire qu’il y a beaucoup de passages alcoolisés sur cet album, Billy enregistrait tout, 24 heures sur 24, on le ramenait déchiré dans sa piaule avec les enregistrements tous les soirs, on se demandait ce qu’il en sortirait…
Pourquoi l’aviez-vous choisi pour produire ce disque ?
Martyn : Il avait fait Eyehategod et Sleep…
Chris : Voilà, Sleep, putain, Sleep …
Martyn : On avait aussi enregistré trois morceaux avec lui précédemment, et le feeling était excellent. Il avait fait aussi Neurosis, tu vois, inutile d’en dire plus. Au final on a plutôt des souvenirs du temps passé ivres morts dans ce studio à enregistrer tout et n’importe quoi… De bons souvenirs !
L’album suivant a été Coup de Grâce. Sa spécificité est qu’il est produit par Scott Reeder, l’ancien bassiste de Kyuss, et que vous y avez invité John Garcia et Tom Davies [ex Nebula]. Un souhait d’affirmer une soudaine influence sud-californienne ?
Martyn : Non, pas forcément. Une opportunité, plutôt. Avec The Big Black on a fait quelques dates avec Unida en Angleterre, et Scott était bassiste au sein du groupe à l’époque. Il commençait à enregistrer quelques groupes. Et donc on s’est dit pourquoi pas bosser ensemble ? C’était cool, même si je me rappelle qu’il avait eu des problèmes avec la table de mixage… A un moment il a dit “on devrait inviter John Garcia pour jouer sur ce disque”, et il s’est débrouillé et a réservé l’avion pour faire venir John : il a atterri, on a été le chercher à l’aéroport, il a été dormir au studio, s’est levé le lendemain, a enregistré deux chansons et est reparti le lendemain. Putain, avec le recul je me dis “mais où on a pu trouver le fric pour faire ce genre de plans ??” (rires). On se foutait vraiment de ces questions de fric à l’époque.
Comment voyez-vous l’album aujourd’hui ?
Martyn : La presse n’a pas été tendre à sa sortie, ils critiquaient la production, pas mal de choses… Mais c’était notre volonté. On voulait faire quelque chose de différent, et il est différent.
Chris : Tu sais, avec The Big Black, on a eu tellement d’excellentes chroniques, tout se passait super bien… Mais le label, Music For Nations, a fait faillite. Et d’un seul coup on se retrouvait avec rien.
Martyn : Notre état d’esprit avait beaucoup changé, dans cette situation, on était devenu très cynique vis-à-vis du “music business”, on a écrit des chansons plus énervées, et on se moquait complètement de faire partie d’une quelconque “scène”, et donc de faire ce que l’on attendait de nous. Inconsciemment, il est même possible que l’on ait tout fait pour s’en détacher.
Votre album suivant, Thieving From The House of God, a marqué le départ de Pete O’Malley, votre second guitariste, et votre souhait de continuer à quatre désormais.
Martyn : Absolument. Pete est parti après Coup de Grâce : on est parti en tournée en Europe, puis aux USA, et ça l’a achevé. Quand on est rentré, on a fait deux concerts de charité en l’honneur de Johnny Morrow, le chanteur de Iron Monkey qui était décédé peu de temps plus tôt, et il est parti juste après.
Chris : Il nous a dit qu’à ce stade il avait fait tout ce qu’il avait toujours voulu faire dans un groupe : il a fait plein de concerts, sorti plusieurs disques. Il avait fait le tour…
Martyn : Je me rappelle qu’on avait un festival prévu en Angleterre, le Bulldog Bash [ndlr : a priori c’était en 2004], et il nous a dit qu’il s’était cassé l’orteil ou quelque chose comme ça, qu’il ne pouvait pas jouer. Je ne pense pas qu’il mentait, mais le fait est que nous avons dû jouer à quatre ce jour-là, et on a eu de si bons retours de ce concert, un super feeling ! Je pense qu’à partir de là on a été rassurés pour la suite.
L’album a donc été écrit pour une seule guitare ?
Martyn : Oui, absolument, on savait à partir de ce moment-là que ça marcherait comme ça. Et l’air de rien ça nous a bénéficié à nous trois, en tant que musiciens, d’avoir plus de place dans le spectre instrumental en quelque sorte… en particulier moi-même : jusque là mes lignes de basse étaient essentiellement calées sur ce que jouais Pete, et ça m’a libéré musicalement.
Vous avez ensuite enregistré Healing Through Fire pour le label Sanctuary, qui avait le vent en poupe à l’époque…
Chris : Yep !
…Or le label a fait faillite juste après !
Chris : Yep ! C’est toute l’histoire de notre carrière résumée là (rires).
Que s’est-il passé ?
Chris : Tout se passait bien les premiers mois. Et puis Sancturay a été racheté par Universal, et évidemment Universal n’a gardé que les groupes qu’il aimait, on s’est donc retrouvés sur le carreau, comme des centaines d’autres groupes.
Comment l’avez-vous vécu ?
Martyn : Pfff, que veux-tu faire, quand ça t’arrive ?
Chris : On est devenus assez cyniques, tu sais…
Martyn : C’est sûr, après vingt ans de carrière, c’est normal. Sur le moment, ça te fait franchement chier. T’essayes de retrouver ta motivation en jouant un concert après l’autre, mais c’est sûr que ce n’est plus pareil… Ce n’est pas la seule raison, mais ça explique aussi un peu qu’il y ait eu cinq ans entre cet album et le suivant. A ce moment-là on se posait des questions sur notre avenir, on a envisagé de se séparer. On était toujours actifs sur cette période, on jouait un concert par mois minimum, ici ou là en Europe… Juste assez pour nous maintenir à flot et juste assez motivés pour continuer jusqu’au concert suivant. Par contre on n’a rien composé du tout pendant ces années. En plus Chris a déménagé un peu loin de chez nous… Et on ne répétait pas non plus, on n’en avait pas besoin : jouer ces concerts c’était nos répétitions. Cette période a duré quatre ans environ. On a signé avec Candlelight Records à un moment donné durant cette période, mais ça a bien duré deux ans et quelques avant que l’on n’envisage de sortir quoi que ce soit pour eux. On s’y est collé laborieusement ensuite, on s’est isolés, mais ça n’a pas été très efficace : on a fait une chanson seulement, je crois que c’était “Red Tide Rising”…
Chris : On n’avançait pas, on a même repoussé la sortie de l’album.
Où avez-vous trouvé la motivation pour faire Eulogy For The Damned ?
Martyn : On est repartis en tournée aux USA pour deux semaines et demie, et ça s’est super bien passé : une super tournée, des salles remplies, un excellent public. Et ça nous a vraiment boosté ! Après ça on s’est retrouvés de plus en plus souvent pour répéter, une fois par semaine, puis deux fois par semaine, et on a vraiment senti une bonne dynamique propice pour enregistrer l’album.
Chris : Je pense que ce qui rend Eulogy… si spécial est ce contexte, le fait que ça soit venu de nous et que personne n’attendait quoi que ce soit de notre part. Aucune pression. Le processus entier reposait uniquement sur nos épaules, et ça a rendu les choses très faciles, presque confortables. Fondamentalement, c’était l’album que nous ne pensions jamais enregistrer un jour. Dans ce sens, ça nous a surpris nous-mêmes d’aboutir à ce résultat.
Martyn : Ouais, je trouve que ce qui en est sorti est excellent, je pense que c’est mon album préféré…
Tu le préfères même à votre dernier album ?
Martyn : Et bien, c’est dur à dire, il faut attendre l’épreuve des années pour se prononcer vraiment… C’est difficile : si tu m’avais demandé l’an dernier, je t’aurais dit que le nouveau était mon préféré, mais là avec un peu de recul, je me dis que celui-ci est très solide aussi…
Après Eulogy For The Damned, vous avez sorti un album live, Eulogy For The Fans. Pourquoi cette initiative ?
Chris : C’était le festival de Bloodstock c’est ça ? [ndlr – en 2012]
Martyn : Ouais… En fait on ne savait pas vraiment qu’on en ferait quelque chose. Un mec est venu nous voir en nous demandant s’il pouvait enregistrer le concert, on a dit oui, bien sûr. Or le résultat s’est avéré excellent…
Chris : On a eu l’opportunité de partir en tournée aux USA, et on s’est dit que ce serait une bonne idée d’avoir un disque à promouvoir à cette occasion.
Martyn : On ne voulait pas faire de tournée avec rien de neuf sous le bras pour le justifier.
On a déjà parlé il y a quelques semaines en long et en large de Back From The Abyss, on ne va pas en remettre une couche… Par contre, dites-nous quand même à quoi nous attendre de la part d’Orange Goblin dans les prochains mois ?
Martyn : On n’a pas de grosse activité prévue d’ici la fin de l’année, même si on a quelques dates prévues, notamment en festival, assez excitantes. Mais pas d’enregistrement a priori… Enfin, il ne faut jamais dire jamais avec nous ! Je reformule donc : je serais surpris qu’on enregistre quelque chose cette année (rires).
Après la saison des festivals, vous vous mettez au chômage technique côté scène ?
Martyn : Disons juste qu’il y a des discussions… On a des propositions pour aller jouer une semaine par ci, une semaine par là… Je ne peux pas t’en dire plus, mais je peux quand même dire qu’il y aura quelques concerts d’ici la fin de l’année.
Vous allez enregistrer les concerts d’aujourd’hui et de Londres ? Si oui, la perspective d’un nouvel album live, un peu exceptionnel, est-elle envisagée ?
Chris : Les concerts seront enregistrés, mais je ne pense pas que nous les sortirons… Mais en tant que bonus tracks sur une future sortie ou autre, pourquoi pas ? Nous avons plein d’autres bandes live de bonne qualité que nous pouvons aussi utiliser si nous le souhaitons… Donc qui sait ?
Deux apparitions sur Lyon en plus d’une décennie, l’occasion de poser quelques questions aux vétérans du stoner français avant leur excellent concert était immanquable. Entrevue décontractée autour d’une bière avec le trio Ch’ti.
Vous étiez en Grèce il y a deux semaines pour la seconde fois, comment se sont passées ces trois dates ?
Ronan : Très bien et très chaud, le festival Thessaloniki était juste parfait, on a été très bien accueilli, bon accueil et beaucoup de monde.
Johan : C’est qu’on a un vrai public maintenant là-bas, à peine arrivés sur scène ils scandent “Glowsun Glowsun” et chantent les chansons alors que bon, on chante pas vraiment (rires).
Fabrice : Dès que Johan entamait un morceau ils fredonnaient les riffs, tapaient dans les mains, le public grec est vraiment chaud
Votre troisième album “Beyond the Wall of Time” sort fin juin chez Napalm Records, votre deuxième chez eux, ce sont eux qui sont venus vous chercher ?
Fabrice : Oui, comme pour notre 1er album “The Sundering” chez Buzzville on a fait aucune démarche, on a jamais envoyé des démo. Après notre concert au Freak Valley en 2012 un mec de Napalm est venu nous voir disant qu’il avait adoré l’album et avait quelque chose à nous proposer, on a dit “banco” !
Ronan : Je pense que l’exposition qu’on a en Allemagne, en Autriche est due notre booker Sound of Liberation qui nous a trouvé plus de dates à l’étranger, et ce depuis le début, même avant le premier album on jouait plus en Belgique qu’en France…
Vous avez une entière liberté musicale de la part de votre label ?
Fabrice : Oui tout à fait, après j’imagine que si on se mettait à faire du bal-musette ça leur plairait pas…
Johan : Ils nous ont pris pour faire du Glowsun et nous laissent carte blanche
Je trouve que depuis vos début il y a une “patte” Glowsun reconnaissable, est-ce ça vient de vos éducations musicales différentes ?
Johan : On vient de milieux et d’influences assez différentes à la base, moi par exemple je viens du grunge et du punk, mais on s’est réunis autour du stoner en ayant découvert Nebula ou Fu Manchu au début des années 90. Après avec le temps on est aussi influencés par ce qui se passe actuellement, notamment la scène doom et aussi d’autres trucs comme le jazz, etc…
C’est ce qui fait que vos compos sont de plus en plus pêchues mais toujours aussi psychés ? On sent aussi que vous avez bien pris votre temps pour développer vos idées…
Ronan : Ca a toujours été notre méthode de fonctionnement, si on peut appeler ça une “patte” Glowsun c’est qu’on a toujours cherché à construire nos morceaux de la sorte. Après, effectivement, on s’est même parfois posé des questions, une fois qu’on a eu la matière, si on ne s’éloignait pas des fois de certaines ambiances de “Sundering”, de certains morceaux qui ont pu faire qu’il plaisait, mais c’est aussi l’inspiration du moment.
Johan : Après on est aussi influencés par la vie de tous les jours, on voit bien qu’autour de nous c’est un peu agressif d’une certaine manière donc quelque part on interprète ce que la vie nous donne. On a bien vu qu’entre les années 90 et la fin des années 2000 on va dire, vu qu’on est vieux (rires), les mentalités ont changé, les gens sont de plus en plus agressifs, forcément ça se ressent dans notre musique.
Peut-on parler d’un concept autour du temps sur ce nouvel album ?
Johan : De temps et de chaos quelque part. “Derrière le mur du temps”, finalement ça veut dire que si on ne fait rien tous, et bien on sera tous dans la merde. La signification du nom Glowsun, en fait, c’est “La lumière du soleil avant qu’il n’implose”.
Ronan : Si on peut parler de concept de nos albums, il y a eu la fracture pour le premier, “Eternal Season” était plus une approche sur l’environnement et là celui-ci effectivement sur le temps qui passe. Comme disait Johan, le fait que le temps défile et qu’on voit bien qu’il y a beaucoup de choses qui partent en vrille et qu’il y a a agir. On est empreints vraiment de ça dans l’inspiration et c’est ça qui nous fait arriver à ces compostions et leur construction.
Johan : Pour créer une chanson il faut ressortir une émotion je pense, du moins c’est mon approche, dans la vie il y a des hauts et des bas et je pense que la musique doit raconter une histoire, faire voyager les gens.
Un voyage de plus en plus instrumental au fil des albums, avec un seul morceau chanté cette fois-ci. Est-ce une évolution naturelle ?
Johan : Oui à chaque fois quand je mets du chant c’est vraiment parce que je le ressens.
Ronan : Dans la manière dont on construit les morceaux, souvent Johan apporte des idées de riffs qu’on s’approprie à trois, qu’on remet des fois entre guillements un peu au carré, qu’on digère, qu’on travaille…
Certaines idées viennent de Ronan non ? Notamment sur “Last Watchmaker’s Grave” on sent un jam sur ce riff de basse
Fabrice : Ce morceau là en particulier est totalement parti d’une impro, c’est très souvent le cas mais là on a vraiment jammé une demie heure et extrait quelque chose.
Johan : Le pire c’est que sur ce titre là, il n’y a que trois notes (rires).
Vous ouvrez la Valley au Hellfest cette année, vous le voyez plutôt comme une consécration, une étape, une ouverture de portes ?
Johan : On voit ça plutôt comme une étape
Fabrice : La porte ouverte à la fête de l’enfer (rires).
Plutôt logique après avoir joué dans pas mal de festivals et avec un peu la crème du genre ?
Ronan : On a eu effectivement l’occasion de partager des scènes avec beaucoup de groupes et là on souhaite que ce soit une marche dans notre parcours.
Johan : C’est une sorte de continuité en fait.
Vous vous connaissez depuis longtemps, vous avez le même line-up depuis plus de dix ans, comment est l’ambiance en tournée ? Plutôt tartiflette ou jacuzzi ? (rires généraux)
Fabrice : Tartiflette dans le jacuzzi alors, avec l’ami Jack [Daniel’s – ndlr].
Comment expliqueriez-vous qu’on vous ait si peu vus en dessous de Paris ces dix dernières années ?
Johan : Le problème c’est l’argent. On a voulu jouer dans le Sud mais ça aurait été des one-shots, les fameux péages français coûtent extrêmement cher et en général c’est des petites assos qui n’ont pas les moyens.
Ronan : Comme on disait tout à l’heure ça vient aussi de notre situation géographique.
Fabrice : Et surtout qu’en Allemagne et en Belgique ils étaient ouverts à ça. Il y a dix ans en France, en étant un groupe de stoner tu jouais devant trois personnes, c’est seulement maintenant que la scène se développe en France. On a joué il y a quelques années à Lyon (au bar Les Capucins) devant dix personnes…
Ronan : Effectivement aujourd’hui on a quand même plus d’approches, de personnes qui nous contactent pour jouer.
Fabrice : Mais ça fait quoi ? Deux ans… C’est tout récent, les créateurs de Desert-Rock peuvent te le dire, le stoner a mis longtemps à démarrer en France. C’est pour ça qu’à part par chez nous on ne jouait quasiment qu’à Paris, notamment grâce aux Stoned Gatherings.
Et très peu en Angleterre malgré votre proximité ?
Ronan : Non c’est vrai, on a fait le Deserfest à Londres, mais c’est pas un pays facile, les anglais sont un public compliqué…
Vous comptez tourner après cette grosse semaine qui se clôture par la fête de la musique “à la maison” juste après le Hellfest ?
Ronan : Oui en octobre. La fête de la musique c’est un incoutournable, s’il ne pleut pas on ne peut pas ne pas la faire…
Fabrice : D’ailleurs cette année on a même loué un générateur, comme les grands (rires), l’année dernière on nous a coupé le courant à 22h en fin de set alors cette fois-ci on va prendre notre autonomie.
Vous avez fait deux clips pour l’album, une nouveauté, Johan une nouvelle vocation ?
Johan : Alors j’ai écrit le clip de “Behind The Moon”, par contre pour “Against The Clock” c’est Napalm qui s’en est occupé. Mais on a fait ça un peu à l’arrache, ça prend du temps, il faut trouver les personnes, se déplacer, c’est tout un investissement et on reste autodidactes donc c’est compliqué.
Fabrice : “Behind The Moon” on l’a fait chez nous donc on a cherché personne, on s’est pas déplacés (rires).
Johan : C’est fait dans notre local avec un drap blanc et des lampes, très simple, pas besoin d’un gros budget pour faire un clip…
Johan tu fais des pochettes d’albums, des visuels pour des concerts et des festivals, ça semble marcher de mieux en mieux, quel est ton ressenti sur cette évolution plus personnelle ?
Johan : C’est une continuité comme avec Glowsun en fait, ça a monté en même temps et oui ça fait plaisir. Ca fait maintenant une vingtaine d’années que je suis dans le milieu stoner, pour te dire j’ai monté le premier festival stoner en France en 1999 ou 2000 avec quatre groupes dont Hypnos 69 avec qui on avait tourné en Allemagne mais qui n’existent plus. Ouais, on est des vieux de la vieille…
Il n’y a pas de secret : pour produire un album aussi intéressant et abouti que Moksha, il faut forcément une bande de musiciens intègres et passionnés. Cet entretien avec Matte, le bassiste de My Sleeping Karma nous aura conforté dans cet a priori : le musicien est non seulement intéressant, mais il parle de sa musique une passion communicative. Ceux et celles qui auront vu le quatuor allemand sur scène comprendront à quel point cet enthousiasme sincère est même contagieux, et se répand dans le public au bout de quelques minutes… C’est aussi l’effet produit par l’écoute de Moksha pour l’auditeur…
Soma avait été très bien reçu par le public et la critique. Dans quel état d’esprit vous trouviez-vous quand il a été question de commencer à composer pour Moksha ?
Moksha est notre cinquième album. Notre principal objectif était simple : ne pas refaire le même album que Soma, et nous voulions aussi modifier notre processus créatif. Nous voulions tenter de nouvelles choses, prendre plus de risques. L’une des illustrations de ce changement d’approche a été que cette fois-ci Norman, notre joueur de clavier, a participé au travail d’écriture : il nous a proposé plusieurs idées à partir desquelles nous avons travaillé.
Tu veux dire qu’auparavant Norman ne prenait pas part au processus de composition ?
Rarement, en effet. Généralement les chansons étaient écrites avant qu’il n’y appose ses claviers et autres atmosphères sonores. Seppi, Steffen et moi-même habitons à côté les uns des autres, tandis que Norman vit un peu plus loin, ce qui rend les choses moins faciles pour lui, forcément. Tandis que cette fois il était bien plus présent avec nous lors de l’ensemble du processus d’écriture. Je pense que c’est l’une des raisons pour lesquelles le son de cet album est plus profond, plus travaillé aussi.
Dis-nous en plus sur ce process de composition.
Habituellement on jamme donc plutôt en format trio. C’est généralement plutôt Seppi qui écrit des riffs de guitare et nous jammons sur cette base pour composer. On identifie une bonne idée de riff, de mélodie, et on travaille sur cette base, on se laisse porter. Mais vraiment, tout vient de jams. On essaye de se retrouver une ou deux fois par semaine pour jouer, en gros.
Peux-tu nous expliquer pourquoi le process de composition a été aussi long ? En effet, tu nous disais déjà il y a deux ans que vous commenciez à travailler sur l’album, or il ne sort que maintenant…
Soma est sorti en novembre 2012, période où nous nous sommes embarqués sur la tournée avec Monster Magnet. Ensuite nous avons beaucoup joué un peu partout, nous avons enchaîné avec pas mal de dates en festivals d’été… Nous avions prévu de travailler sur le nouvel album ensuite, et c’est bien ce que nous avons commencé à faire. Or à ce moment-là, certains membres du groupe avaient des préoccupations liées à leur vie privée. Notre musique ne peut être écrite que dans un état de bien être, avec l’esprit libre. Ca n’a aucun sens de le faire si l’un de nous ressent le moindre stress, et que l’on commence à se comporter du genre : “vite vite, nous n’avons que peu de temps devant nous, il faut que l’on compose quelque chose aujourd’hui !” … On a dit “non, on s’arrête, on écrira l’album quand le timing sera propice”… On avait donc une partie de l’album réalisée, mais on a continué environ six mois plus tard. Toute chose prend du temps… Evidemment nous aurions aimé l’avoir plus tôt, mais maintenant qu’il est fini et prêt à sortir, on est ravis ! Peut-être que pour une fois nous parviendrons à sortir le prochain album plus rapidement… mais je n’y crois pas trop ! (rires)
Pourquoi avoir choisi ce titre pour l’album, “Moksha” ?
L’album précédent s’appelait “Soma”, c’est un breuvage qui te permet d’accéder à des sphères éloignées, à des dimensions par ailleurs inatteignables. Moksha, c’est la libération, l’illumination finale… Peut-être qu’après avoir bu pas mal de Soma tu atteins l’illumination finale ! (rires) Mais en réalité, le concept de Moksha nous a paru naturellement approprié au contexte de My Sleeping Karma : le groupe existe depuis dix ans, c’est notre cinquième album… Ce sont des nombres ronds, et notre situation en tant que groupe nous convient parfaitement, et donc fondamentalement, ce concept d’une sorte de plénitude nous est apparu parfaitement adapté.
Avez-vous trouvé le nom de l’album avant de commencer à écrire, ou bien après avoir terminé l’album ?
Il est arrivé comme ça, après. Nous écrivons toujours la musique avant, et c’est ensuite que nous identifions le titre le mieux approprié.
C’est le cas pour vos chansons aussi ? Etant donné que vous n’avez pas de paroles, est-ce que sélectionnez le concept et l’esprit du titre avant ou bien après en avoir composé la musique ?
Généralement nous trouvons le titre après avoir écrit la chanson. Pour Moksha on a essayé de lire pas mal avant, ce qui nous a permis de mettre en avant différentes idées et concepts. Quelques unes de ces idées ont été aussi retranscrites sur l’illustration de la pochette, par exemple tu y vois quatre ponts qui mènent à un temple : l’idée vient de livres hindoux qui mentionnent quatre parcours différents qui amènent à l’illumination. On essaye de travailler avec ces symboles issus de concepts de l’hindouisme ou du bouddhisme, et ensuite nous décidons des noms en fonction de ce que le son des chansons nous inspire : parfois il s’agit de rôles divins, d’autres fois de comportements humains positifs… Ce sont des sujets sur lesquels il est très intéressant de travailler.
Tu as fait allusion au superbe artwork qui ornera cet album. L’une de ses spécificités est que, pour la première fois, il est plein de couleurs, alors que vous aviez privilégié le blanc, puis sur Soma le noir…
Déjà, tu as raison, Soma avait amorcé un changement, après trois albums sur fond blanc. Il était pourtant prévu en blanc lui aussi, mais l’artiste nous l’a envoyé en inversant simplement les couleurs pour passer sur une base noire, et il nous a paru évident que l’on devait garder cette version : elle était plus détaillée, plus riche… Il fallait qu’elle soit noire, pas d’hésitation. Alors bien sûr, maintenant les gens se sont imaginé qu’après trois albums blancs puis un noir, le prochain serait noir lui aussi ! D’autres nous ont aussi sorti qu’étant donné que nous étions chez Napalm Records, un label plutôt metal, nous étions obligés de sortir des pochettes noires (rires) ! Mais c’est plus simple et innocent que tout cela : nous avions envie de couleurs cette fois, nous avons donc demandé à l’artiste de nous envoyer quelques essais avec des couleurs, et ça nous a plu, voilà tout.
Cette couverture est une pièce maîtresse de votre album, peux-tu nous en dire plus sur sa conception ? Vous êtes en tous les cas restés fidèles au même artiste. L’a-t-il réalisée sur la base de la musique ?
C’est toujours Sebastian Jerke, effectivement, c’est aussi lui qui avait fait Soma. Non, il n’a pas écouté l’album avant, mais il connaît bien My Sleeping Karma, et comme nous il a beaucoup lu avant et pendant l’élaboration de cette peinture. Nous échangions sur notre vision de Moksha, les différents concepts associés. Il nous soumettait des idées lui aussi en retour, et la pochette s’est construite progressivement de cette manière. Nous avons vraiment voulu travailler à nouveau avec lui car il comprend vraiment ce que nous voulons, ça nous a même parfois presque choqué de constater à quel point nous étions complètement en phase avec sa vision, c’est comme s’il lisait dans nos esprits ! Je suis persuadé que nous le solliciterons à nouveau pour notre prochain album…
L’idée principale de cette illustration tient dans le doute entre ce qui est vrai et ce qui est imaginaire : est-ce que la vie que l’on vit est réelle, ou bien est-ce que c’est cette supposée illumination qui est réelle ? Si l’illumination est réelle, est-ce que notre vie existe quand même ? Etant donné que tout le monde semble chercher l’illumination en vain, on pourrait conclure que la vie est peut-être fausse… C’est largement ce concept qu’il a exploité, avec dans le fond de l’image, en bas, des éléments qui sont très “normaux”, des structures d’apparence très réalistes construites par l’homme. Puis en remontant on arrive aux quatre ponts, qui mènent au temple où est assise Ganesha, et on voit que la transformation commence : ça atteint son paroxysme avec l’arrière du temple, qui est un peu le début du monde des rêves. Une autre interprétation est que Ganesha semble assise sur un trône, en protectrice de la sagesse et des bonnes choses liées au monde de l’illumination, qui sont derrière elles, et qui sont aussi les concepts apparents sur la pochette de Soma. Si tu regardes attentivement, tu observeras que les gens qui doivent traverser les ponts doivent en conséquence traverser les figures de nos quatre albums précédents ! Il y a tant de détails… Du coup, vu le format atypique, les gens vont croire qu’ils se sont trompés quand ils achèteront le disque, car il est imprimé de travers, or c’est le seul moyen pour pouvoir voir l’illustration en entier, une fois dépliée !
Vous avez aussi opté pour un nouveau concept concernant les interludes entre chacune de vos chansons. Peux-tu nous dire ce dont il s’agit ?
Nous aimons relier chacune de nos chansons par de petits extraits avec des identités bien spécifiques. Nous voulons quelque chose entre les chansons qui prenne la main de l’auditeur et l’amène à travers une nouvelle émotion pour la chanson suivante. Des interludes plutôt lents si le titre suivant est plutôt heavy, par exemple. La particularité sur Moksha est que ce n’est pas nous qui avons fait les interludes. On s’est dit “c’est notre cinquième album, faisons quelque chose de cool et différent”, et on a donc demandé à des amis, des musiciens que nous connaissions, de nous faire chacun un interlude : David de The Machine, Stefan de Colour Haze, etc… Ils nous ont demandé ce qu’on voulait exactement, on leur a simplement dit de faire un interlude sur leur façon de voir My Sleeping Karma, c’est tout ! Ils ont tous dit OK et nous ont envoyé leurs morceaux directement. Seul Stefan de Colour Haze voulait vraiment le faire, mais n’a pas eu le temps car il était occupé avec son propre enregistrement. C’est super intéressant d’entendre ce qu’ils ont composé en pensant à My Sleeping Karma ! Ils ne connaissaient pas la nouvelle musique, donc c’est nous qui avons choisi où irait chaque titre, là où ça s’agençait le mieux.
Le premier single issu de Moksha est “Prithvi”, pourquoi avez-vous choisi ce titre en premier ?
On l’a choisi parce que lorsque tu écoutes le dernier titre sur Soma, “Psylocybe”, et lorsque que tu écoutes “Prithvi” ensuite, qui est le premier titre du nouvel album, tu comprends immédiatement que la musique provient de la même “famille”, du même cercle. On a donc choisi “Prithvi” comme premier single parce que l’on voulait faire comprendre que c’était bien le MSK que les gens connaissaient, et en même temps cette chanson termine la connexion avec Soma, la boucle se referme. Après ce premier titre, les chansons suivantes sont plus audacieuses, elles explorent de nouvelles directions, qu’il s’agisse du très long morceau titre, des sections de violoncelles, ce genre de choses…
Ce titre est par ailleurs l’opportunité de votre première vidéo. Peux-tu nous en parler ?
Le postulat de base était que nous ne voulions pas y apparaître en tant que personnes, on ne voulait pas de captation live pour ce clip, du genre avec des plans traditionnels de nous quatre en train de jouer. Ca aurait été d’un ennuyeux… On voulait donc apparaître sous forme d’ombres, en quelque sorte : c’est la musique qui est importante et pas les quatre gars qui jouent ladite musique. On a demandé à notre ami Tim de le faire, il nous a emmené dans une sorte de salle de sport pour filmer ces passages en ombre chinoise, on n’y croyait pas du tout sur le moment, on pensait que ça serait pourri, on aurait dit du bricolage, et finalement ça ressort super bien. C’est vraiment un tout petit budget, mais on en est super contents.
Vous jouez plusieurs petites séries de dates autour de la sortie de “Moksha”, mais on ne voit pas d’annonce pour une vraie, grosse tournée. Est-ce que c’est dans vos projets ?
J’espère que l’on pourra partir en tournée en octobre ou novembre. Mais on n’est pas encore sûr, ça dépendra de la situation familiale de chacun des membres du groupe. Nous voulions en faire une en juin, au moment de la sortie de l’album, mais ce ne fut pas possible pour des problèmes d’organisation de certains membres du groupe vis-à-vis de leur famille. Nous avons donc en projet de le faire à l’automne.
Vous avez néanmoins bon nombre de dates qui devraient mériter le détour : une “release party” aujourd’hui, une autre dans votre ville natale, une date à Genève pour la fête de la musique pour un concert gratuit, des festivals, etc… Quels événements attendez-vous en particulier ?
Tu as raison, il y aura beaucoup de dates spéciales, mais en réalité, on les attend toutes avec le même enthousiasme ! Tu sais, avec My Sleeping Karma on adore tout simplement jouer live. Et chaque situation est différente et nous plaît tout autant. Tu imagines que c’est un peu différent de jouer par exemple dans un gros festival metal, en tant que groupe instrumental psychédélique, ou de jouer avec Monkey 3 dans notre petite ville natale ! Mais on prend tellement de plaisir à être sur scène, que l’on est contents dans toutes les situations : que nous jouions devant une seule ou un millier de personnes, on se donnera de la même manière.
A la veille de leur tournée ricaine et en pleine tournée européenne avec Conan, nous avons profité de leur étape berlinoise – au Desertfest – pour dialoguer un peu avec le collectif transalpin. Auteurs du sublime « Ecate » (chroniqué ici), ces Italiens lettrés s’avèrent être des garçons charmants investis à fond dans leurs projets artistiques à l’écart des modes depuis plus de quinze piges !
Vous êtes actuellement en tournée avec Conan. Comment se déroulent les choses jusqu’ici ?
Pour le moment tout est en ordre ; ce sont des types sympas. Nous avons fait cinq dates jusqu’ici : une en Suisse, Paris et deux en Allemagne dont quatre avec Conan. Nous effectuons notre sixième date ici au Desertfest de Berlin ce soir. Tout va bien !
Est-ce qu’un projet du type split album est prévu avec ce groupe ?
Non, nous ne pensons. Nous avons un nouvel album qui est à peine sorti et c’est une chance de tourner avec ce groupe mais, à l’heure actuelle, nous n’avons absolument rien planifié de ce genre.
Vous allez tourner aux USA pour la première fois en 15 ans de carrière, pourquoi le faire maintenant ?
Pourquoi le faire avant (rires) ? Nous avions déjà tenté par le passé, mais les choses ne se sont pas faites en raison des promoteurs, des problèmes avec les différentes taxes, etc… Les choses ne sont pas concrétisées il y a deux ans alors que nous étions supposés tourner aux Etats-Unis ; elles se sont mieux arrangées sur ce coup-ci et ça devrait mieux se passer. C’est une expérience compliquée car au début nous avions notre propre matériel et de jouer sur son propre équipement posait des soucis logistiques.
Et comment vous sentez-vous à l’approche de cette tournée ? Fiers ?
Non pas réellement fiers, nous sommes surtout excités par cette nouvelle expérience. Il s’agit de quelque chose que nous n’avons jamais expérimenté par le passé. Nous pensons que ça pourra se rapprocher des sensations connues lorsque nous avions fait notre première tournée. Nous ne sommes plus si jeunes, mais terriblement excités. Nous tournerons avec un groupe américain, Usnea, et il sont vraiment sympathiques.
Vous avez sorti « XV », votre box set il y a peu, quelle était votre intention ?
C’est un DVD qui relate les quinze premières années de notre existence ou quelque chose du genre. Nous avions oublié certains événements, certains documents et c’était un bonne occasion de mettre ensemble ces vieux souvenirs de tournée, de sessions enregistrement, etc… C’est un document réellement intéressant et c’est aussi l’occasion de constater à quel point nous avons vieilli (rires).
Votre dernier album « Ecate » vient juste de sortir. Son titre est tiré du nom d’une princesse grecque, pourquoi avoir choisi ce concept ?
Nous avons d’abords pensé à la musique et, une fois qu’elle était là, nous sommes partis du son pour avoir une ligne directrice au niveau des parties vocales. L’atmosphère de cet album est étrange, nous avons utilisé beaucoup de sons du style chœurs assez funèbres, ça tirait vers la mort, mais la mort n’était pas ce que nous cherchions. La mort est quelque chose de négatif et nous désirions quelque chose de positif. Nous avions déjà expérimenté ce thème avec « Eve » qui était composé de deux longs titres. Nous nous sommes tournés vers ce thème de Ecate qui était cette déesse capable de voyager entre les vivants, les morts et les Dieux ainsi que dans le temps ; c’était le concept parfait pour nous, pour représenter notre travail. C’était ce que nous cherchions comme concept.
N’y avait-il pas une déesse équivalente dans la mythologie romaine plus proche de vous ?
Elle apparaît dans presque toutes les religions, dans l’occulte et la sorcellerie. Il s’agit d’une déesse unique qui est encore présente aujourd’hui. Elle a voyagé dans le temps ; il y a toujours des comtes actuels qui parlent d’elle. Nous voulons toujours penser à la réalité quand nous pensons à ces Dieux ou ces figures comme Ecate, Lucifer ou l’antéchrist, mais pas dans un sens religieux. Nous ne sommes pas des fanatiques et nous foutons pas mal de la religion.
Et pourtant vous portez des pentagrammes sur certains de vos vêtements ?
Ce n’est pas de la religion : c’est un gag ! Les gens ont peur des symboles, nous nous en foutons et c’est sympa de jouer avec ça. Nous pouvons arborer un tel signe et aussi des croix chrétiennes. Nous nous en foutons et si Dieu n’existe pas, Satan n’existe pas non plus. C’est juste l’histoire de l’humanité : quand nous ne connaissons pas quelque chose nous cherchons à trouver une raison à cette chose. Nous ne savons pas ce qui se passera après notre mort. Les religieux sont là pour expliquer des choses qui sont difficiles à expliquer. Il y a le pire dans les religions, mais aussi des choses merveilleuses. Dieu vient de nous-mêmes et nous sommes finalement des Dieux car nous sommes aussi originaires de notre intérieur et pas uniquement de choses externes. Après tu peux finir dans la scientologie, c’est juste une question d’interprétation.
« Oro » était un album spécial avec deux titres…
… en fait c’est un seul morceau séparé en deux parties. Comme nous avons toujours déclaré que nous détestions les doubles albums, mais que le morceau commençait à devenir trop long, nous l’avons séparé en deux parties de manière à ce qu’il puisse être écouté d’abord avec la première partie puis dans un second temps la deuxième partie.
Le nouvel album est beaucoup plus classique dans son rendu final…
Oui il y a six titres au final qui sont tous assemblés finalement car nous n’aimons pas faire des pauses dans les albums. Il s’agit de six titres : des titres pop (rires). C’est effectivement notre album le plus classique, mais aussi le plus difficile pour les lignes de batterie ainsi que les vocaux.
Quelle était l’idée derrière ce projet de six titres plus habituel ?
Il n’y avait pas vraiment une idée précise de faire six titres. Nous avons fait ces titres, en fait sept au total et deux morceaux ne figurent pas sur le disque [ndlr : pour les nuls en maths, on vous laisse cinq minutes de plus pour rendre votre copie et nous dire combien il reste d’inédits…]. Nous avons choisi ensuite quels étaient ceux qui étaient ok pour être sur le disque et les avons mis ensembles pour faire l’album.
Le processus d’enregistrement a été pour le moins inhabituel, comment se sont déroulées les choses ?
L’enregistrement a été comme nous l’avons décidé depuis quelques années dans un lieu proche de notre local de répétition. Pour l’enregistrement, nous nous sommes placés à l’intérieur d’un grand hall ; nous avions cet espace à disposition et la batterie sonnait vraiment bien dans cet endroit naturel. Notre ingénieur du son a déplacé les micros à différents endroits pour obtenir ce son et expérimenter plusieurs possibilités sur les balcons c’était sympa, mais c’était aussi difficile. Nous avons réalisé ces prises en quelques jours. Nous pensions que le placement des micros serait rapide, mais il s’est avéré bien plus difficile que prévu.
Étiez-vous éloignés les uns des autres durant les prises ?
Nous étions tous ensemble pour nous entendre et avons passé un super moment. C’était relax et il y a un bar pas loin de cet endroit où nous avons toujours plaisir à aller.
Le nouvel album est de nouveau sur Neurot Recordings, pourquoi avez-vous choisi cette structure ?
Ils nous ont choisi et ça nous allait bien. Depuis le début nous faisons beaucoup par nous-mêmes. Nous étions intéressé de collaborer avec eux et c’était la structure qui nous laisserait toute la liberté que nous désirions. Comme nous réalisions tout par nous-mêmes pendant longtemps nous n’avions pas l’expérience d’avoir un label qui fonctionne autrement que comme une famille. Nous ne sommes pas un groupe passif et nous faisons confiance à un label qui est tenu par des musiciens comme nous, qui fait le focus sur la musique et pas sur l’argent. Nous avons une vision commune des choses.
Je pense pouvoir affirmer que vous êtes le groupe italien le plus connu dans le circuit stoner…
D’abord nous ne comprenons pas ce fait et ensuite nous nous considérons comme faisant partie de la scène metal. Nous ne somme pas vraiment un groupe de stoner, quand nous pensons stoner, nous pensons Kyuss et nous en sommes éloignés. Si nous parlons d’un genre heavy et psychédélique : il y a d’autres formations très valables.
Vous êtes en tous cas ceux qui tournez le plus à l’extérieur de l’Italie quand bien même de nombreuses formations viennent jouer en Italie.
Beaucoup de groupes italiens tournent beaucoup comme Zoo par exemple.
Pour terminer, vous êtes en tournée en Europe actuellement et enchaînez avec les États-Unis, quelle est la priorité de Malleus ?
Toujours faire la même chose : faire des posters, nous sommes vraiment chanceux parce que tout ce que nous faisons est en lien avec la musique. Nous prenons notre travail avec nous. Tourner peut être préjudiciable pour Malleus donc nous devons bien travailler à l’avance pour être en ordre aussi de ce côté là. C’est aussi simple que ça. : il y a du temps pour Malleus et du temps pour le groupe.
C’est lors dela tournée« Legends of the Desert II»de passage aux Stoned Gatherings que Gary Arce,fondateur etguitariste de Yawning Man,a bien voulu répondre à quelques questions sur le passé, le présent et le futur deses projet musicaux ainsi que de sespoteset du désertbien évidemment.Un entretien qui commença par l’ouverture d’une bière commele veut lacoutume…
Tu évolues depuis toujours dans de nombreuses formations (Yawning Man, Fatso Jetson, Yawning Son, The Sort Of Quartet, …). Parmi elles, pourrais-tu nous dire lesquelles sont encore en activité et celles qui sont susceptibles de passer à l’échelle supérieure (comme envisager des tournées, faire des disques, etc.)
Et bien mon principal projet reste Yawning Man avec lequel je suis en train de prévoir un nouvel album. Maintenant mon second projet principal est ZUN. Globalement, c’est moi seul en studio avec une batterie, une guitare et des paquets de boucles. John Garcia chante sur trois morceaux et mon amie Sera Timms [Black Math Horseman] sur trois autres ! Les deux albums devraient sortir dans quelques mois et on parle de tourner en Europe cette année avec ZUN.
A travers ces formations tu es souvent aux cotés de Mario Lalli, quels sont les liens qui vous unissent ?
Oh nous sommes simplement meilleurs amis. On a toujours joué ensemble. Impossible pour nous de ne pas jouer ensemble pendant 6 mois et de ne pas monter sur scène pour 5 heures de Jam. Nous avons une vraie relation musicale. Nous savons tous les deux comment joue l’autre mais tu sais, malgré cela, lors des Jam, on est toujours surpris.
Alfredo Hernandez, avec qui tu as formé le groupe, n’est pas sur la tournée. Est-ce à dire que YM est maintenant votre projet à toi et Mario ?
Burt a remplacé Alfredo mais la musique reste la même. C’est un très bon batteur et c’est juste beaucoup plus facile. C’est malheureux tu sais… J’aime Alfredo comme un frère mais parfois certaines choses arrivent, tu vois…
Depuis 1986, vous avez été plutôt avares en disques avec principalement « Rock formations » en 2005 et « Nomadic Pursuits » en 2009. La dernière sortie est un split avec Fatso Jetson en 2013. Pourquoi nous donner si peu de matière ?
Parce qu’avec YM rien ne presse, ça arrive quand ça arrive, en fait. En plus je vis dans le désert et Mario à Los Angeles. Mais après cette tournée, on va être plus actif car on a de nombreux nouveaux morceaux que l’on va enregistrer quand on sera de retour à la maison. Nous allons sûrement jouer deux nouveaux morceaux ce soir d’ailleurs !
Vous avez eu recours à un procédé de « Crowdfunding» pour enregistrer un album. Qu’avez-vous retiré de cette expérience et pensez-vous de nouveau l’utiliser ?
Yeah on s’est lancés là-dedans pour sortir un nouvel album. L’argent est toujours là mais nous n’avons pas encore eu le temps de le faire. Chacun a sa vie, ses enfants, son boulot… C’est aussi l’intérêt de ces soirées où l’on joue live car au fil des Jam, les morceaux viennent et c’est à partir de ces morceaux que l’album va être fait quand on va rentrer. Mais je ne pense pas que nous réutiliserons ce procédé.
Parlons un peu de « Catamaran » [repris et popularisé par Kyuss, Ndlr]. La seule trace de ce morceau est une vielle demo-tape sortie récemment. Est-il prévu de l’enregistrer pour une future sortie ?
On en a parlé et ça dépend, peut-être sur le nouvel album… Mais en tout cas on la joue en live avec Mario [au chant, Ndlr]. C’est l’un des premiers morceaux que j’ai écrits à la guitare avant de le montrer à Mario.
Je crois que vous n’avez commencé à la jouer que très récemment en live. Au vu de la popularité du morceau, pourquoi un tel traitement ? Surtout quand on sait qu’en live le succès est assuré !
Parce que je ne pensais pas que le public la connaissait. Enfin, peut être que pour certains si, s’ils étaient assez fous. Un jour, une nana est venue nous voir en nous demandant de la jouer pour elle car c’était son morceau préféré donc oui, tu as peut être raison, mais on était surpris. Je n’ai jamais vraiment réalisé que c’était une chanson si populaire !
La tournée de l’été 2014 a été abruptement stoppée sans réelles explications. Que s’est-il passé ?
Oh j’ai eu un problème médical mais on ne peut pas en parler…
Ces dernières années vous tournez bien plus souvent en Europe qu’aux Amériques. Comment expliques-tu cela ?
C’est juste que c’est difficile de tourner aux Etats-Unis. Dans beaucoup de villes, les clubs veulent que tu payes pour jouer, or YM n’est pas un groupe qui joue là-dedans mais plutôt dehors comme dans les « Generators Partys ». Donc pour nous, jouer dans les clubs aux Etats-Unis, c’est un peu aller à l’encontre de ce que l’on est et de notre façon de voir la musique. Et puis le désert, la scène musicale et même les gens ont beaucoup changé là-bas. J’ai l’impression au fond de moi qu’une partie de ces personnes essayent de tirer profit de ce que Across The River, Yawning Man et Kyuss ont été ou sont encore. Tout ça me rend malade. Je ne vais pas voir les groupes de cette nouvelle scène à laquelle je n’adhère pas et avec laquelle je n’ai rien à voir. En fait je ne veux même pas en parler.